Application de l’accord intérimaire du 13 septembre 1995
(ex-République yougoslave de Macédoine c. Grèce)
Réponse de la Grèce à la question posée par M. le juge Bennouna
1. Le 30 mars 2011, le juge Bennouna a posé la question suivante à la Grèce :
«Dans la période qui a précédé le sommetdel’OTAN tenu à Bucarest du2au
4 avril 2008 et au cours de celui-ci, quelle a été la position exprimée par la Grèce lors
de ses contacts avec les autres membres de cette organisation en ce qui concerne
l’admission à celle-ci de l’ex-République yougoslave de Macédoine ?» . 1
2. Les consultations relatives à l’élargissement de l’OTAN lors du sommetdeBucarest ne
concernaient pas uniquement l’ex-République yo ugoslave de Macédoine, mais aussi deux autres
pays candidats à l’adhésion, l’Albanie et la Croatie. Comme tous les autres membres de l’OTAN,
la Grèce a pleinement participé au processus de consultation et de décision collective du
sommet de Bucarest, qui a abouti à un consensus au sujet des trois pays candidats . 2
La position exprimée par la Grèce lors de ses contacts avec les autres membres de l’OTAN
avant et pendant le sommet organisé du 2 au 4 avril 2008 était la suivante : pour pouvoir être invité
à devenir membre de l’Alliance, le demandeur devait satisfaire aux critères et conditions convenus
par l’OTAN et indiqués dans ses communiqués concer nant le processus d’élargissement et autres
communications yafférentes. C’est au regard de ces exigences et de certaines difficultés qui
n’avaient pu être aplanies avec le demandeur , parmi lesquelles l’impo ssibilité de résoudre la
divergence au sujet du nom, que sa candidature n’a pas été retenue.
3. Parmi les éléments versés au dossier de la présente affaire par les Parties figurent des
communiqués et autres communications de l’OTAN concernant son élargissement, ainsi que des
déclarations de la Grèce sur ses contacts avec les autres Etats membres de l’Alliance pendant la
période susmentionnée.
Documents de l’OTAN sur l’élargissement Déclarations de la Grèce
de l’Alliance
Etude sur l’élargissement de l’OTAN adoptée au Aide-mémoire adressé aux Etats membres de
sommet de Bruxelles, le 3 septembre 1995, l’OTAN (mémoire, annexe 129).
Manuel de l’OTAN, Documentation, Bureau de
l’Information et de la Presse de l’OTAN, 1999,
p. 338-374 [VF] (contre-mémoire, annexe 19).
«NATO Beyond Enlargement» [La mission de Lettre datée du 31mars2008 adressée à tous
l’OTAN, au-delà de son élargissement], allocution les Etats membres de l’OTAN par le premier
prononcée le 19novembre1997 par le secrétaire ministre grec, M. Kostas Karamanlis
général de l’OTAN, M.Javier Solana, devant (réplique, annexe 6).
l’Atlantic Council of the UK, (duplique,
annexe 52).
1CR 2011/12, p. 67 (Bennouna).
2«Nos ministres des affaires étrangè res se sont réunis à Bruxellmars, ont passé en revue les progrès
réalisés par les trois pays auxquels s’applique le Mce qui concerne leur souhait d’entrer à l’OTAN et ont, en
conséquence, entrepris un échange de vues ouvert et frasujet du traitement des candidatures respectives. C’est,
naturellement, au sommet que reviendra la prise de la décision finale.» (Lettre datée du 31 mars 2008 adressée à tous les
Etats membres de l’OTAN par le premier ministre de la Grèce, M. Kostas Karamanlis ; réplique, annexe 6, p. 1.) - 2 -
Plan d’action pour l’adhésion, chapitre 1, par. 2 c),
avril9, communiqué de presse
NAC-S(99)66 (contre-mémoire, annexe 21).
Déclaration du sommet de Riga, par 2.8,
29novembre2006, communiqué de presse de
l’OTAN (2006) 150, «Déclaration du sommet de
Riga publiée par les chefs d’Etat et de
gouvernement participant à la réunion du conseil
de l’Atlantique Nord tenue à Riga»
(contre-mémoire, annexe 23).
Communiqué final de Bruxelles, 7 décembre 2007,
par.4, communiqué de presse de l’OTAN
(20017)0, «Communiqué final, réunion
ministérielle du conseil de l’Atlantique Nord»
(contre-mémoire), annexe 25.
Point de presse conjoint du secrétaire général de
l’OTAN, M. Jaap de Hoop Scheffer, et du premier
ministre du demandeur, MN . ikoa ruevski,
23 janvier 2008 (contre-mémoire, annexe 26).
Communiqué final de Bruxelles, 3 décembre 2008,
par.7, communiqué de presse de l’OTAN
(20081)53, «Communiqué final, réunion du
conseil de l’Atlantique Nord au niveau des
ministres des affaires étrangères tenue au siège de
l’OTAN» (contre-mémoire, annexe 32).
Déclaration du somm detasbourg/Kehl,
4 avril 2009, par. 22, communiqué de presse de
l’OTAN (200 09), «Déclaration du
sommetdeStrasbourg/Kehl, publiée par les chefs
d’Etat et de gouvernement participant à la réunion
du conseil de l’Atlantique Nord tenue à
Strasbourg/Kehl le 4 avril 2009» (contre-mémoire,
annexe 35).
4. Les déclarations faites par la Grèce dans le cadre du processus de consultation de l’OTAN
visaient à rappeler les conditions auxquelles étai t spécifiquement soumise la candidature du
demandeur et que l’Alliance avait adoptées par cons ensus. Par exemple, dans son aide-mémoire
aux Etats membres de l’OTAN, la Grèce a déclaré ce qui suit :
«[N]ous souhaitons la normalisation co mplète des relations bilatérales avec
[ldemandeur], le renforcement de la coopération régionale et une voie
euro-atlantique libre de tout obstacle pour y parvenir, comme pour tous les autres pays
des Balkans occidentaux, sous réserve que l es candidats remplissent tous les critères.
[Ledemandeur] doit, en particulier, démontrer avoir adopté et mis en Œuvre une
véritable politique en faveur de relations de bon voisinage, abandonnant et corrigeant
les actions et politiques exprimant des sentiments hostiles et irrédentistes à l’égard de
plusieurs membres de l’OTAN et de l’UE. Plus important encore, [le demandeur] doit
honorer son engagement de participer bona fide à de véritables négociations pour
trouver une solution mu3uellement acceptable sur un nom définitif, international et
reconnu erga omnes.»
3
Aide-mémoire adressé aux Etats membres de l’OTAN (mémoire, annexe 129, p. 2). - 3 -
5. Ainsi, dans le cadre de ses consultations avec les alliés, la Grèce a informé ces derniers de
l’état de ses relations bilatérales avec le demandeur à la lumière des critères d’élargissement de
l’Alliance. Aux yeux de la Grèce, le demandeur n’a pas rempli les conditions liées au principe du
bon voisinage ni répondu à la nécessité de régler par accord mutuel toutes les questions en suspens,
exigences auxquelles est tenu de se plier tout pays souhaitant adhérer à l’OTAN. En outre, la
Grèce a fait observer que l’adhésion du demandeur à l’OTAN avant que ne soit réglée la question
du nom ⎯absence de règlement perçue, selon la résolution817(1993) du Conseil de sécurité,
comme une menace pour la paix et la stabilité de la région ⎯«engendrera[it]4également des
difficultés insurmontables pour le f onctionnement quotidien de l’Alliance» . La Grèce a en
particulier appelé l’attention sur le fait que le demandeur entrav ait toujours les négociations qu’il
s’était engagé à poursuivre et qui devaient constituer le seul et unique mécanisme de règlement de
la divergence relative au nom. Dans une communi cation en date du 31 mars 2008, par exemple, le
premier ministre grec a fait obser ver que «[j]usqu’ici, les efforts entrepris pour parvenir à une
solution mutuellement acceptable au problème du nom, comme l’a prescrit le Conseil de sécurité
de l’ONU, [étaient] restés vains en raison de l’intransigeance de Skopje et de son manque de
volonté politique en vue d’une solution bénéfique pour tous» . 5
6. La Grèce tient à rappeler que, dans le cad re de sa participation au Plan d’action pour
l’adhésion (MAP), le demandeur avait reconnu qu’une invitation à devenir me mbre de l’Alliance
dépendait du règlement de la divergence au suje t du nom. En1999, LjubcoGeorgievski, alors
premier ministre de l’Etat demandeur, avait déclaré : «Nous sommes pleinement conscients que le
renforcement de nos relations avec l’Union européenne et l’OTAN dans une perspective
d’intégration de mon pays à ces deux organisatio ns dépend, dans une large mesure,…de la
résolution des questions en suspens.» 6 Dans cette même lettre, le premier ministre avait également
déclaré: «La seule diverg7nce bilatérale [opposan t nos deux pays] est mentionnée à l’article5 de
[l’accord intérimaire]» . En outre, Nikola Gruevski, premier ministre actuel de l’Etat demandeur, a
admis à l’occasion d’une réunion avec le conseil de l’Atlantique Nord le 23janvier2008 que «le
principal point mentionné par de nombreux ambassadeurs port[ait] sur les risques potentiels, la
question à régler étant celle du différend avec la Grèce relativement au nom, question à propos de
laquelle nombre d’entre eux [avaie]nt souligné la nécessité d’intensifier les discussions» . 8
Le 5 avril 2011
Les agents de la République hellénique,
(Signé) Georges S AVVAIDES ,
(Signé) Maria T ELALIAN .
___________
4 Aide-mémoire adressé aux Etats membres de l’OTAN (mémoire, annexe 129, p. 2). Pour davantage d’éléments
sur les principes régissant le processus de consultation au sein de l’OTAN, voir le document intitulé Texte du rapport du
Comité des Trois sur la coopération non militaire au sein de l’OTAN(approuvé par le conseil de l’Atlantique Nord),
Bruxelles, 13 décembre 1956, réédité dans le Manuel de l’OTAN, Documentation, Bureau de l’information et de la presse
de l’OTAN, 1999, p.133[VF] (contre-mém oire, annexe19) et le résumé qui en est fait dans le contre-mémoire
(par. 5.12).
5 Lettre datée du 31mars2008 adressée à tous les Etat s membres de l’OTAN par le premier ministre grec,
M. Kostas Karamanlis (réplique, annexe 6, p. 28).
6 Lettre en date du 21janvier1999 adressée au ministre grec des affaires ngères par le premier ministre de
l’Etat demandeur (contre-mémoire, annexe 39).
7 Ibid.
8 Point de presse conjoint du secrétaire général de l’OTAN, M. Jaap de H oop Scheffer, et du premier ministre du
demandeur, M. Nikola Gruevski, 23 janvier 2008 (contre-mémoire, annexe 26).
Réponse écrite de la Grèce à la question posée à l'audience publique du 30 mars 2011 par M. le juge Bennouna (traduction)