Arrêt du 1er juillet 1994

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087-19940701-JUD-01-00-EN
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1NTE:RNATIONAL COURT OF JUSTICE

R.EPORTS OF JUDGMENTS,
ADVISORY OPINIONS AND ORDERS

CASE CONCER.NINGMARITIME DELIMITATION
AND TERRITORIAL QUESTIONS

BETWEEN QATAR AND BAHRAIN

(QATAR iBAHRAIN)

JURISDICTION AND ADMISSIBILITY

JUDGMENT OF 1JULY 1994

COIJR INTERNATIONALE DE JUSTICE

RECUEIL DES ARRÊTS,
AVIS CONSULTATIFS ET ORDONNANCES

AFFAIRE DE LA DÉLIMITATION MARITIME
ET DES (?UESTIONS TERRITORIALES

ENTRE QATAR ET BAHREIN
(QATAR c.BAHREIN)

ARRÊT DU lKRJUILLET 1994 Official citation :
Muritirne Deliinitationund Territoriul Questions
berireenQutur unclBahruin,Jurisdictionund Admissihilifi~,Judgtnent,
IC.J. Report.71994.12 1

Mode officiel citation:
DPlirîiitutionmuritirnccf questions tcrritorialcs
entre Qatur et Buhreïn,c80rnet rccei~uh;,irre^t,
C.1J. Rctueil 1994,12 1

%k ""Ill..*651 1
ISSN 0074-4441 Node vente:
ISBN 92-1-070716-9 1JULY 1994

JUDGMENT

MARITIME DELIMITATION AND TERRITORIAL QUESTIONS
BETWEEN QATAR AND BAHRAIN
(QATAR v.BAHRAIN)

JUR18SDICTIONAND ADMISSIBILITY

DÉLIMITATION IMARITIME ET QUESTIONS TERRITORIALES
ENTRE QATAR ET BAHREIN

lEKJUILLET 1994

ARRÊT COUR INTERNATIONALE DE JUSTICE

ANNÉE 1994

lerjuillet 1994

AFFAIRE DE:LA DÉLIMITATION MARITIME
ET DES QUESTIONS TERRITORIALES

ENTRE QATAR ET BAHREIN

Cotnpétencetir IIIC'our- Nutrlre,juridique des te.utrs ini~.~our ,/i,nr/~r
lu i~or?lpc;t-~eEc11unge.se 1ertre.s(/c 1987 et ((procks-i,erbal» d~.1990 crc;rint
portr les Prrrtrlrs~1r.o.st ckesob1igrrtiorz.esn &oit internationcilet constitirrrnt
de>cefuit tkcstlcc,orr/sinternutiontru.~.
1nrcntion.s(/es signrrtuiresdzrte-teConduite ultkrieurc.do.sParties.
Fornzulc ir?~pliyirrti~~I'ensrrnhlc t/u diff?rerlri serait soùrItrCour
- Requrtr c~ornprrnurz.tseulenzrntc~ert.~clc;l;rnents(lu dia?rcnd.
O(~c~rrsiclonnée(tu.\-Purtic~spur /r Corrr.de lrri.souc>rzscmhledirdi/:
fkren(/- Solrniission soit pur dc~n~arc,onjointc, soit pur dc;nzurnrsiiili-
r/zrc/lc~.s.

Prc;sent.r: M. BEDJACI~PJIr,l.sit/ent: M. SCHWEBEV,ice-Prkside;tM. ODA.
sir Robert JENNINGS , M. TARASSOV G,UILLAUMS EH. AHABCDUEFN.
AGIIILARIWAWDSLEY W.EERAMANTR RAY, JEVA. HERCZEGHS , HI,
FLEISCHIIAIJE KRO,ROMA ju,ges; MM. VALTICOR S,IJDA,~U~LadShoc;
M. V.~LFN<.IA-OSPIG Nl.(:,fj~'l..

En l'affaire de la délimitation maritime et des questions territoriales entre
Qatar et Bahreïn.

rntrr

I'Etat de Qatar.représentépar
S. Exc. M. Najeeb Al-Nauimi, ministre conseiller juridique,

comme agent et conseil;
M. Adel Sherbini, expert juridique,
M. Sami Abushaikha., expert juridique,
comme conseillersjui-idiques;
M. Jean-Pierre Quéneudec, professeurdedroit international à l'universitéde
Paris1,
M. Jean Salmon, professeur à l'université libre de Bruxelles.

M. R. K. P. Shankardass, Senior Advocute à la Cour suprêmede I'lnde,
ancien présidentde l'Association internationale du barreau,
sir Ian Sinclair, K.C.M.G., Q.C., Brlrrister ut Lrric,membre de l'Institut de
droit international.,
sir FrancisVallat, G.B.E., K.C.M.G., Q.C., professeur éméritede droit inter-
national à l'universitéde Londres.
comme conseils et avocats;
M. Richard Meese, a.vocat, associédu cabinet Frere Cholmeley, Paris,
MlleNanette E. Pilkington, avocat. cabinet Frere Cholmeley, Paris,
M. David S. Sellers, Soliritor, cabinet Frere Cholmeley, Paris,

et

1'Etatde Bahrein,
représentépar
S. Exc. M. Husseïn Mohammed Al Baharna, ministre d'Etat chargé des
affaires juridiques, Brrrristrr ut Law, membre de la Commission du droit

international de l'Organisation des Nations Unies.
comme agent et conseil;
M. Derek W. Bowetit,C.B.E., Q.C.. F.B.A., professeur émérite, ancientitu-
laire de la chairehewell iil'universitéde Cambridge,
M. Keith Highet, membre des barreaux du district de Columbia et de
New York.
t M. Eduardo Jiménezde Aréchaga, professeur de droit international à la
facultéde droit de l'université catholique de Montevideo, Uruguay,
M. Elihu Lauterpacht, C.B.E., Q.C., professeur honoraire de droit interna-
tional et directeur du Research Centre for International Law de ]'Univer-
sitéde Cambridge; membre de l'Institut de droit international,

M. Prosper Weil, prcifesseurémérite àl'Universitéde droit, d'économieet de
sciences socialesl: Paris,
comme conseils et avocats:
M. Donald W. Jones, Soliritor. cabinet Trowers et Hamlins. Londres,
M. John H. A. McHugo, Soliritor, cabinet Trowers et Hamlins. Londres,
M. David Biggerstaff, Solicifor, cabinet Trowers et Hamlins. Londres,

comme conseils,

ainsi composée,

après délibéréen chambre du conseil,
rend l'arrêt.suivant 1. Le 8 juillet 1991, le ministre des affaires étrangèresde 1'Etat de Qatar
(dénomméci-après <<Q;dtar»)a déposéau Greffe de la Cour une requêteintro-
duisant une instance contre 1'Etat de Bahreïn (dénomméci-après <<Bahreïn »)
au sujet de certains diffërends entre les deux Etats relatàfla souveraineté sur
les îles Hawar. aux droits souverains sur les hauts-fonds de Dibal et de Qit'at

Jaradah. et à la délimilation des zones maritimes entre les deux Etats.

2. Conformément ail paragraphe 2 de l'article 40 du Statut de la Cour, la
requête aétéimmédiai.ementcommuniquée par le Greffier au Gouvernement
de Bahreïn: conformément au paragraphe 3 du même article.le Greffier en a
informétous les autres Etats admis à ester devant la Cour.

3. Dans sa requête,Qatar fondait la compétencede la Cour sur deux accords
que les Parties auraient conclus en décembre 1987et en décembre 1990,respec-
tivement: selon le demandeur. l'objet et la portéede l'engagement ainsi pris en
ce qui concerne la conipétence de la Cour étaient déterminéspar une formule
proposée à Qatar par Bahreïn le 26 octobre 1988 et acceptée par Qatar en
décembre 1990.
4. Par lettres adressées au Greffier de la Cour le 14 juillet 1991 et le

18 août 1991. Bahreïn a contesté la base de compétence invoquée par Qatar.
Au cours d'une réunion que le Présidentde la Cour a tenue avec les représen-
tants des Parties le 2 octobre 1991, il a étéconvenu qu'il serait statué séparé-
ment, avant toute procédure sur le fond, sur les questions de compétenceet de
recevabilité.
5. Par une ordonnance en date du 11octobre 1991. le Présidentde la Cour,
se référant à cette réunion, a considéréqu'il était nécessaireque la Cour fût
informéede tous les nioyens de fait et de droit sur lesquels les Parties se fon-
daient au sujet de ces cluestions; le Président.après avoir consulté les Parties en
vertu de l'article 3du Règlement, et compte tenu de l'accord intervenu entre
elles au sujet de la procédure. a décidque les piècesde la procédure écritepor-
teraient d'abord sur la question de la compétencede la Cour pour connaître du
différendet sur celle de la recevabilitéde la requête.

6. Par cette mêmeordonnance, le Président a fixéau 10février 1992 la date
d'expiration du délaipour le dépôtdu mémoirede Qatar et au 11juin 1992 la
date d'expiration du délaipour le dépôt du contre-mémoire de Bahreïn sur les
questions de compétenceet de recevabilité; ces piècesont étédûment déposées
dans les délaisainsi fixés.Par ordonnance en date du 26 juin 1992. la Cour,
considérant que la présentation d'autres pièces de procédure par les Parties
était nécessaire. a prescrit la présentation d'une réplique de Qatar et d'une
duplique de Bahreïn sur les questions de compétenceet de recevabilité, eta fixé
respectivement au 28 septembre 1997et au 29 décembre 1992 les dates d'expi-
ration des delais pour le dépôtde ces pièces; celles-ci ont étédûment déposées
dans les délaisainsi fi:&.
7. La Cour ne comptant sur le siègeaucun juge de la nationalité des Parties,
chacune d'elles a procédé.dans l'exercice du droit que lui confère le para-
graphe 3 de l'article 31 du Statut,à la désignation d'un juge u(/ hoc pour sié-
ger en l'affaire: Bahre'ina désignéM. Nicolas Valticos, et Qatar M. JoséMaria

Ruda.
8. Au coursd'une réunion tenue avec le Greffier le 8janvier 1993. lesagents
des deux Parties ont déclaréque leurs gouvernements respectifs étaient conve-
nus qu'aucune d'elles ne ferait entendre de témoins ou d'experts à l'audience. D~LIMITATION MARITIME ET QUESTIONS TFRRlTORlALES (ARRFT) 115

Cet accord a été confirméau Greffier par une lettre de I'agent de Qatar du
20 novembre 1993et une lettre de I'agent de Bahreïn du 23 novembre 1993.
9. Par une lettre adressée au Greffier le 11janvier 1994,I'agent de Bahreïn,
se référant à l'article 56 du Règlement, a soumis certains documents que son
gouvernement désirait produire et mentionner au cours de la procédure orale.

Des copies eii ont étécommuniquées à I'agent de Qatar qui, par une lettre en
date du 10février1994,a indiquéque son gouvernement ne s'opposait pas à la
production desdocuments soumis par Bahreïn, se réservaitle droit de présenter
des observations à leur sujet et soumettait des documents en vertu du para-
graphe 3 de l'article 56 du Règlement. Des copies de ces derniers ont étécom-
muniquées à I'agent de Bahreïn.
10. Conformément ;iu paragraphe 2 de l'article 53 du Règlement. la Cour.
après s'être renseignée auprès des Parties. a décidéque des exemplaires des
pièces de procédure et des documents annexés seraient rendus accessibles au
public à l'ouverture de la procédure orale.

I1. Au cours d'audiences publiques tenues entre le 28 février et le
11 mars 1994. la Cour a entendu les exposésoraux qu'ont prononcés devant
elle:
Pour Qutur: S. Exc. M. Najeeb Al-Nauimi. rrgrnt.
sir lan Sinclair, Q.C..
M. R. K. P. Shankardass,
M. Jean Salmon,

M. Jean-Pierre Quéneudec.
sir Francis Vallat, Q.C.
Pour Bcrhreïti: S. Exc. M. Husseïn Mohammed Al Baharna, ugt~~t.
M. Derek W. Bowett, Q.C.,
M. Elihu Lauterpacht, Q.C.,
M. Eduardo Jiménezde Aréchaga,
M. Prosper Weil,

M. Keith Highet.
12. A l'audience, desquestions ont étéposéesaux deux Parties par un membre
de la Cour. II y a été répondupar écritaprès la clôture de la procédure orale
conformémeiit au paragraphe 4 de l'article 61 et à l'article 72 du Règlement
de la Cour. et chacune des Parties a présenté desobservations écrites sur la
réponse fournie par l'autre.

13. Au cours de la procédure écrite,les conclusions ci-après ont été présen-
téespar les Parties:
Au noni (1. Qrrtlrr,

dans le mémoireet la réplique
~I'Etat de Qatar prie respectueusement la Cour de dire et juger, rejetant
toutes revendications et conclusions contraires. que:

La Cour a compétence pour statuer sur le différendqui lui a étésoumis
dans la requête déposée par Qatar le 8 juillet 1991 et que la requêtede
Qatar est recevab'ie.)

Au tioni dc Balrrc~itl,
dans le contre-mémoire et la duplique:

«L'Etat de Bahreïn prie respectueusement la Cour de dire et juger. reje-
tant toutes revendications et conclusions contraires, qu'elle n'a pas coin- DELIMITATIO M ARITIME ET QUESTIONS TkRRITORIALES(ARRÈT) 116

pétencepour stat~iersur le différend quilui a été sousans la requête
déposée par Qatar le8juillet 1991»
14. A l'audience,les Parties ont présenté des conclusions identiiscelles
qu'elles avaientrésenliesau cours de la procédure écrite.

15. Le différend entre Bahreïn et Qatar a une longue histoire qu'il

n'est pas nécessairede rappeler à ce stade. En revanche, il paraît utile de
résumerles circonstainces dans lesquelles une solution à ce différend a été
recherchéeau cours des deux dernières décennies.
16. Cette recherche a été opérédeans le cadre d'une médiation, parfois
qualifiéede «bons offices)), menéeà partir de 1976 par le roi d'Arabie

saoudite avec l'accord des émirsde Bahreïn et deQatar. Le premier résul-
tat de cette médiation fut l'approbation d'un ensemble de «principes
pour un cadre de règlement))lors d'une réunion tripartite tenue en mars
1983.
Le premier principe précisait que:

((Toiites les questions en litige entre les deux Etats au sujet de la
souveraineté sur les îles, des frontières maritimes et des eaux territo-
riales doivent ètre considéréescomme des questions complémen-

taires formant Lintout indivisible qui doit faire l'objet d'un règle-
ment d'ensemble. »
Les deuxièmeet troisième principes tendaient au maintien du stutu yuo

et d'un climat de confiance entre les Parties. Le troisième principe pré-
voyait en outre l'engagement de celles-ci (<àne soumettre le différend à
aucune organisation internationale)).
En application du quatrième principe était constituée une commission
tripartite chargée de rechercher au fond des solutions acceptables par les
deux Parties.

Enfin, selon le cinquième principe:
((Au cas où les négociations viséespar le quatrième principe ne
permettraient pas d'aboutir à un accord sur une ou plusieurs des

questions en litige susmentionnées, les gouvernements des deux pays
s'attacheront, en consultation avec le Gouvernement de l'Arabie
saoudite, à déterminer les meilleurs moyens de réglerladite ou les-
dites questions, sur la base des dispositions du droit international.
La décision que prendra l'instance choisie d'un commun accord A

cette fin sera définitive etobligatoi>>.
17. Aucun progrès ne fut réalisédans la solution du différendau cours
des annéesqui suivirent. Le roi d'Arabie saoudite adressa alorsaux émirs

de Qatar et de Bahreïn des lettres rédigéesen termes identiques, datéesdu
19 décembre 1987,dans lesquelles il formulait de nouvelles propositions.
Ces dernières furent acceptéespar lettres des deux chefs d7Etat datéesres-
pectivement des 21 et 26 décembre 1987. Les propositions saoudiennes
ainsi agrééescomportaient quatre points. Selon le premier:

«Toutes les questions en litige seront soumises à la Cour interna-
tionale de Justice, à La Haye, pour qu'elle rende une décisiondéfi-
nitive et obligatoire pour les deux parties, qui devront en exécuterles

dispositions.))
Le deuxième poinl. tendait une nouvelle fois au maintien du statu quo.

En vertu du troisième était formée une commission composéede repré-
sentants des Etats de Bahreïn et de Qatar et du Royaume d'Arabie saou-
dite; cette commission était constituée

«en vue d'entrer en rapport avec la Cour internationale de Justice et
d'accomplir les formalités requises pour que le différend soitsoumis
à la Cour conformément à son Règlement et à ce qu'elle prescrira,

afin que la Cour puisse rendre une décisiondéfinitiveet obligatoire
pour les deux parties)).
Enfin, d'après lequatrième point, le Royaume d'Arabie saoudite devait

continuer ((d'exercer ses bons offices pour assurer la mise en Œuvre des
présentes dispositions ».
Le 21 décembre 1087étaiten outre publiéeune déclaration saoudienne
dont les termes furent approuvés par les deux Parties. Cette déclaration
précisait que Bahreïn et Qatar acceptaient

«que la question soit soumise à l'arbitrage, en application des prin-
cipes énoncésdans le cadre de règlement qui a étéfixépar accord des

deux Etats frères, en particulier le cinquième principe))
retenu en 1983, dont les termes étaient rappelés. La déclaration ajoutait

que «conformémeni. aux cinq principes)), il était convenu de constituer
une commission tripartite dont la tâche était décritedans les termes
mêmes des échangesde lettres de décembre 1987.
18. Cette commission tripartite tint une réunion préliminaireà Riyadh
en décembre 1987.Qatar présenta alors un projet de lettre commune à la
Cour envisageant expressément, entre autres, la rédaction d'un compro-

mis. ~ahreïn proposa un accord de caractère procédural concernant
l'organisation et le lonctionnement de la commission.
Puis celle-ci tint sa première réunion officielle le 17 janvier 1988.
Bahreïn déposa alors une version reviséede son projet, précisant expres-
sément que la commission était constituée dans le but de conclure un

compromis. Après discussion, il fut convenu que chaque Partie préseiite-
rait un projet de compromis.
Divers projets furent ensuite présentésà la commission par Bahreïn et
Qatar, mais aucun accord ne put intervenir lors des quatre premières réu-
nions. Puis, le 26 octobre 1988. à la suite d'une initiative de l'Arabie
saoudite, le prince héritierde Bahreïn, lors d'une visite à Qatar, transmit

au prince héritier deQatar un texte (qualifiéensuite de ((formule bahreï-
nite))) se lisant comme suit: « Qurstiori
Les parties prient la Cour de trancher toute question relative à un

droit territorial ouà tout autre titre ou intérêtqui peut faire l'objet
d'un différend entre elles; et de tracer une limite maritime unique
entre leurszonesmaritimes respectives, comprenant les fondsmarins,
le sous-sol et les eauxsurjacentes. »

Lors de la cinquikme réunion de la commission, le 15novembre 1988,
le représentant de l'.Arabiesaoudite lança un appel aux Parties pour que
celles-ci parviennent à un accord et précisaque

«le jour de l'ouverture de la réunion au sommet du Conseil de coo-
pération [des Eitatsarabes du Golfe, en décembre 1988,]marquera la
fin de la mission de la commission, qu'elle ait ou non réussià réaliser
ce qu'on attendait d'elle)).

La commission tint sa sixièmeréunion les 6 et7 décembre 1988.Qatar
proposa alors un nouveau libellédu texte soumis par Bahreïn. Il proposa
en outre

((qu'ily ait deux annexes à l'accord à soumettre à la Cour, l'une
émanant deQatar et l'autre de Bahreïn. Chaque Etat définiraitdans
son annexe les ,points en litige qu'il souhaite porter devant lCour. »

Bahreïn déclara qu'il étudierait ces propositions.
La commission tripartite procéda par ailleurs à une discussion

«en vue de définirde façon exhaustive les questions qui seraient sou-
mises à la Cour, à savoir:

1. Les îles Hawar, y compris l'île de Janan;
2. Fasht al Dibal et Qit'at Jaradah;
3. Les lignes de base archipélagiques;
4. Zubarah;

5. Les zones désignéespour la pêchedes perles et pour la pêchedes
poissons et toutes autres questions liéesaux limites maritimes.))
Les deux Parties; convinrent en principe des points ainsi mention-

nés,mais Qatar précisaqu'il ne pourrait accepter de faire figurer la ques-
tion de Zubarah sur cette liste que «s'il s'agissait de droits privés))et non
de souveraineté sur Zubarah. Bahreïn répondit qu'il avait l'intention de
faire valoir ses revendications devant la Cour sur ce point ((sans aucune
limitation D.
Le médiateur saoudien considéra que la mission de la commission tri-
partite devait prendre fin avec cette sixième réunion. De fait, la commis-

sion ne s'est plus rkunie.
19. L'affaire revint en discussion deux ans plus tard, à l'occasion de la
réunion annuelle du Conseil de coopération des Etats arabes du Golfe
qui se tint en décembre 1990à Doha. Qatar fit alors connaître qu'il était
prêtà accepter la formule bahreïnite. Puis, à l'issue de la réunion, lesministres des affaires. étrangèresde Bahreïn, de Qatar et d'Arabie saou-
dite signèrent un prcicès-verbalconstatant que, ((dans le cadre des bons
offices du roi Fahd Ben Abdul Aziz», des consultationsconcernant le dif-
férendexistant entre Bahreïn et Qatar avaient eu lieu entre les ministres
des affaires étrangères de ces deux Etats en présence du ministre des
affaires étrangères d'Arabie saoudite.

Ce procès-verbal a étérédigé enarabe; les traductions en anglais four-
nies par les Parties dLivergentsur certains points. La traduction en fran-
çais du texte anglais fourni par Qatar est la suivante:
[Truciuction du GrrJfe]

((11a été convenude ce qui suit:
1)réaffirmerce dont les deux parties étaient convenues précédem-

ment ;
2) poursuivre les bons offices exercésentre les deux pays par le
Serviteur des deux Lieux saints, le roi Fahd Ben Abdul Aziz, jus-
qu'au mois de chawwal 141 1 de l'hégire,correspondant au mois
de mai de I'ann'ie 1991. A l'expiration de ce délai, les parties pour-
ront soumettre la question à la Cour internationale de Justice con-
formément à la formule bahreïnite. qui a étéacceptéepar Qatar, et à

la procédure qui en résulte. Les bons offices de l'Arabie saoudite se
poursuivront pe.ndant que la question sera soumise à l'arbitrage;
3) si l'on parvient à une solution fraternelle acceptable par les
deux parties, l'affaire sera retiréede l'arbitrage.))

La traduction en français du texte anglais fourni par Bahreïn se lit comme
suit:
( Truhlction du GrclfJf]

« Ila étéconvenu de ce qui suit:
1. Réaffirmer ce dont les deux parties étaient convenues précé-

demment.
2. Les bons offices du Serviteur des deux Lieux saints, le roi Fahd
b. Abdul Aziz, :sepoursuivront entre les deux pays jusqu'au mois de
chawual 141 1de l'hégire,correspondant à mai 1991. Les deux par-
ties pourront. AIl'expiration de ce délai, soumettre la question à la
Cour internationale de Justice conformément à la formule bahreï-
nite, que 1'Etat de Qatar a acceptée. et aux procédures qui en dé-

coulent. Les bons offices du Royaume de l'Arabie saoudite se pour-
suivront pendant que la question sera soumise à l'arbitrage.

3. Si l'on parvient à une solution fraternelle acceptable par les
deux parties, l'affaire sera retiréede l'arbitrage.))

20. Les bons offi,cesdu roi Fahd n'aboutirent pas dans le délai ainsi
fixéet Qatar, le 8 juillet 1991, introduisit devant la Cour une instance
contre Bahreïn

«au sujet de certains différends existant entre eux relativement à la DÉLIMITATION MARITIME ET QUESTIONS TERRITORIALES (ARRET) 120

souveraineté sur les îles Hawar, aux droits souverains sur les hauts-
fonds de Dibal et de Qit'at Jaradah et à la délimitation des zones
maritinies entre les deux Etatsn.

Selon Qatar, les deux Etats:
«se sont l'un et l'autre expressément engagés,dans leurs accords de
décembre 1987 ...et de décembre 1990 ...,à soumettre leurs diffé-

rends a la COLI^)).
Les deux Parties ayant «donné leur consentement par les accords inter-
nationaux susvisés)),Qatar considère que la Cour est en mesure «dlexer-
cer sa compétence pour se prononcer sur ces différends))et par voie de

conséquence sur sa requête.
Bahreïn soutient au contraire que le procès-verbal de 1990ne constitue
pas un instrument juridiquement contraignant. Il ajoute qu'en tout état
de cause les dispositions combinées des échanges de lettres de 1987 et du
procès-verbal de 1990 ne permettaient pas Qatar de saisir unilatérale-

ment la Cour. A cet effet Bahreïn souligne que, dans une première ver-
sion, le procès-verbal de 1990 donnait à ((l'une ou l'autre des deux par-
ties)) le droit de saisir la Cour et que, sur ses instances, ce texte a été
modifiépour ne permettre une telle saisine que par ((les deux parties)).
Bahreïn en déduitque la Cour n'est pas compétente pour connaître de la
requêtede Qatar.

21. La Cour s'interrogera en premier lieu sur la nature des textes invo-
quéspar Qatar, puis elle entamera l'analyse de leur contenu.
32. Les Parties sointd'accord pour considérerles échangesde lettres de
décembre 1987 comme constituant un accord international ayant force
obligatoire dans leurs relations mutuelles. Bahreïn soutient en revanche

que le procès-verbal du 35 décembre 1990 n'est qu'un simple compte
rendu de négociation, analogue aux procès-verbaux de la commission tri-
partite, qu'il n'a par suite pas valeur d'accord international et qu'il ne
saurait dès lors fournir de base à la compétence de la Cour.
23. La Cour observera en premier lieu qu'un accord international peut

prendre des formes variées et se présenter sous des dénominations di-
verses. Le paragraphe 1 a) de l'articl2 de la convention de Vienne sur le
droit des traités du 23 mai 1969 dispose qu'aux fins de cette convention

(cl'expression «i:raité»s'entend d'un accord international conclu par
écritentre Etat:; et régipar le droit international, qu'il soit consigné
dans un instrurnent unique ou dans deux ou plusieurs instruments
connexes. et quelle que soit sa dénomination particulière)).

Par ailleurs, comml: la Cour l'a noté dans le cas d'un communiqué
conjoint,

«il n'existe pa:i de règle de droit international interdisant qu'un DELIMITATION MARITIME ET QUtSTlONS TERRITORIALES (ARRÈT)
121

communiqué conjoint constitue un accord international destiné à
soumettre un différend à l'arbitrage ou au règlement judiciaire))
(Pluteuu continental de lu rner Egée, urrêt, C.I.J. Recueil 1978,
p. 39, par. 96).

En vue de déterminer si un tel accord a été conclu,«la Cour doit tenir
compte avant tout 'destermes employés et des circonstances dans les-
quelles le communiqué a étéélaboré))(ibid. j.
24. Le procès-verbal de 1990 vise les consultations menées entre les
deux ministres des affaires étrangères de Bahreïn et de Qatar en présence

du ministre des affaires étrangères d'Arabie saoudite. Il énonce ensuite ce
dont il a été((convenu)) entre les Parties. Il réaffirmeen son paragraphe 1
les engagements antférieurementsouscrits (ce qui couvre à tout le moins
l'accord constitué par les échanges de lettres de décembre 1987). Il dis-
pose en son paragraphe 2 que le roi d'Arabie saoudite poursuivra ses
bons offices jusqu'en mai 1991, et exclut qu'auparavant le différend soit

soumis à la Cour. Il traite des conditions dans lesquelles le différend
pourra ultérieurement être porté devantla Cour. Puis il note I'accepta-
tion par Qatar de la formule bahreïnite. II dispose que les bons offices de
l'Arabie saoudite se poursuivront pendant que l'affaire sera pendante
devant la Cour et ajoute que, si un compromis est alors trouvé, l'affaire
sera retiréedu rôle (le la Cour.

25. Le procès-verbal de 1990 comporte donc le rappel d'obligations
passées;il confie au roi Fahd le soin de tenter de trouver une solution au
différend dans un délai de six mois; iltraite enfin des conditions dans
lesquelles la Cour pourra êtresaisie après mai 1991.

Ainsi. et contrairement à ce que soutient Bahreïn, cet instrument n'est
pas un simple compte rendu de réunion, analogue à ceux établisdans le
cadre de la commission tripartite. Il ne se borne pas à relater des discus-
sions et à résumer des points d'accord et de désaccord. 11énumèreles
engagements auxquels les Parties ont consenti. Il créeainsi pour les Par-
ties des droits et des obligations en droit international. Il constitue un

accord international.
26. Bahreïn fait cependant valoir que les signataires du procès-verbal
n'ont jamais eu l'intention de conclure un accord de cette nature. 11pro-
duit à cet effet une déclaration de son ministre des affaires étrangères,
datéedu 21 mai 1992, par laquelle l'intéressé précise: «à aucun moment
je n'ai estiméqu'en signant le procès-verbal j'engageais Bahreïn par un

accord obligatoire en droit)). Le ministre ajoute que, selon la Constitu-
tion de Bahreïn, les ((traités((relatifs au territoire de I'Etatn ne peuvent
entrer en vigueur qu'après avoir été effectivementadoptés comme des
lois)). II indique qu'il n'aurait dès lors pas eu qualité pour signer un
accord international prenant effet à la signature. Conscient de cette situa-
tion, il aurait étéprêt à souscrire à une déclaration consignant une

entente politique, miaisnon à un accord juridiquement contraignant.
27. La Cour n'estime pas nécessairede s'interroger sur ce qu'ont pu DELIMITATIO MARITIME ET QUESTIONS TERRITORIALES (ARRET) 122

êtreles intentions du ministre des affaires étrangères de Bahreïn, comme
d'ailleurs celles du ministre des affaires étrangèresdeQatar. En effet, les

deux ministres ont signéun texte consignant des engagements acceptés
par leurs gouvernements, et dont certains devaient recevoir immédiate-
ment application. Ayant signéun tel texte, le ministre des affaires étran-
gères de Bahreïn ne saurait soutenir ultérieurement qu'il n'entendait
souscrirequ'à une ((dléclarationconsignant une entente politique)), et non

à un accord international.
78. Bahreïn contente cependant encore qu'un accord international ait
étéconclu. en développant une autre argumentation. Selon lui, la con-
duite ultérieuredes Parties démontrerait qu'elles n'ont jamais considéréle
procès-verbal de 19910comme un accord de cette nature. Telle aurait été

non seulement la position de Bahreïn. mais encore celle de Qatar. Bahreïn
expose en effet que Qatar a attendu juin 1991 pour demander au Secré-
tariat de l'organisation des Nations Unies d'enregistrer le procès-verbal de
décembre 1990 par kipplication de l'article 102 de la Charte, enregistre-
ment auquel Bahreïn a d'ailleurs fait objection. Bahreïn ajoute que. con-

trairement aux presci-iptions de l'article 17du pacte de la Ligue des Etats
arabes, Qatar n'a pas déposéle procès-verbal de 1990au Secrétariatgéné-
ral de celle-ci; etqui'il n'a pas davantage suivi les procédures requises
par sa propre Constitution pour la conclusion des traités. Ce comporte-

ment établirait que Qatar, comme Bahreïn, n'ajamais considéréle procès-
verbal de 1990 comme un accord international.
29. La Cour observera qu'un traité ou accord international non enre-
gistréauprès du Secrétariat de l'organisation des Nations Unies ne peut,
selon les dispositionij de l'article 102 de la Charte, être invoquépar les

parties devant un organe de l'organisation des Nations Unies. Le défaut
d'enregistrement ou I'enregistrement tardif est en revanche sans consé-
quence sur la validité,mêmede l'accord. qui n'en lie pas moins les parties.
Dès lors la Cour ne saurait déduire de la circonstance que Qatar ait sol-
licitéI'enregistrement du procès-verbal de 1990 six mois seulement après

sa signature que cet Etat considérait, en décembre1990,ledit procès-verbal
comme ne constituant pas un accord international. La même conclusion
s'impose s'agissant dludéfaut d'enregistrement de l'instrument au Secré-
tariat généralde la Ligue des Etatsarabes. La Cour ne trouve par ailleurs
pas d'élémentau dossier qui lui permettrait de déduirede la méconnais-

sance éventuellepar Qatar de ses règlesconstitutionnelles relatives à la
conclusion des traité:;que celui-ci n'avait pas l'intention de conclure ou ne
considérait pas avoir conclu un instrument de cette nature; et une telle
intention, mêmesi clle était établie,ne saurait prévaloir sur les termes
mêmesde l'instrument concerné. Dèslors l'argumentation de Bahreïn sur

ces points ne peut davantage être acceptée.
30. La Cour arrive à la conclusion que le procès-verbal du 25 décembre
1990, comme les éch~anged se lettres de décembre 1987, constitue un ac-
cord interiTational créant des droits et des obligations pour les Parties. 31. Abordant maintenant l'analyse du contenu de ces textes, ainsi que
des droits et des obligations qu'ils engendrent, la Cour observera en pre-
mier lieu que, par les échangesde lettres de décembre 1987citésau para-

graphe 17 ci-dessus, Bahreïn et Qatar sont convenus que:

((Toutes les questions en litige seront soumises à la Cour interna-
tionale de Justice, à La Haye, pour qu'elle rende une décisiondéfi-
nitive et obligatoire pour les deux parties, qui devront en exécuterles
dispositions. »

Les mêmes échangesde lettres constituaient une commission tripar-
tite

<<envue d'entrer en rapport avec la Cour internationale de Justice et

d'accomplir les formalités requises pour que le différend soitsoumis
à la Cour)).

Les Parties avaient ainsi pris l'engagement de soumettre toutes les ques-
tionsen litige à la Cour et de déterminer, avec l'aide de l'Arabie saoudite,
les formes dans lesqiielles la Cour devait êtresaisie conformément à I'en-
gagement ainsi souscrit.

32. La détermination des ((questionsen litige)) fit l'objet de longues
négociations au sein de la commission tripartite. Celles-ci n'aboutirent
pas en 1988 et la quiestion ne fut régléeque par le procès-verbal de dé-
cembre 1990.Celui-ci a pris note du fait que Qatar a en définitiveaccepté
la formule bahreïnite. Ainsi, les deux Parties ont acceptéque la Cour, une

fois saisie, tranche (otoute question relative à un droit territorial ou à tout
autre titre ou intérêiq.ui peut faire l'objet d'un différend entre [les Par-
ties]));et trace «une limite maritime unique entre leurs zones maritimes
respectives, compreriant les fonds marins, le sous-sol et les eaux surja-
centes >).
33. La formule ainsi agrééefixait les limites du différenddont la Cour

aurait à connaître. Elle avait pour but de circonscrire ce différend. mais,
quel que soit le mode de saisine, elle laissait à chacune des Parties la pos-
sibilitéde présenter ;lla Cour ses propres prétentions dans le cadre ainsi
fixé.Par exemple, elle permettait à Qatar de présenter ses prétentions
concernant les îles Hiawar, comme elle permettait à Bahreïn de présenter

les siennes concernant Zubarah. Mais si la formule bahreïnite permettait
la présentation par chacune des Parties de prétentions distinctes, elle n'en
supposait pas moins que l'ensemble du différend soit soumis à la Cour.

34. La Cour not'e que pour l'instant elle dispose seulement d'une
requêtede Qatar exposant les prétentions spécifiquesde cet Etat dans le

cadre de la formule bahreïnite. L'article 40 du Statut, qui stipule que les
affaires sont portéesdevant la Cour «soit par notification du compromis,
soit par une requête)),prévoiten outre que, «dans les deux cas, l'objet du
différend et les parties doivent êtreindiqués)).Ces indications sont donc
des conditions comrnunes aux deux modes de saisine de la Cour. Elles DÉ~.IMITATIOI\I MARITIME ET QUESTIONS TERRITORIALE(ARRÈT) 124

sont également prescritespar le Règlement: à l'article 38, pour les affaires
introduites par voie de requête;et A l'article 39, dans le cas de notification
d'un compromis. En l'espèce,l'identitédes parties ne soulèvepas de pro-

blème, mais il en va autrement de I'objet du différend.

35. Quel est, en I'isccurrence,«l'objet du différend>mentionné dans la
requêtede Qatar? Cette requête expose uniquement les questions que
Qatar entend voir trancher par la Cour. Les ((demandes)) formuléespar
Qatar dans sa requêtesont en effet les suivantes:

«Se réservant le droit de compléter ou de modifier ses demandes,
1'Etat de Qatar prie la Cour de:

1. Dire et juger conformément au droit international
A) que 1'Etat de Qatar a souveraineté sur les îles Hawar; et

B) que 1'Ei.atde Qatar a des droits souverains sur les hauts-
fonds di: Dibal et de Qit'at Jaradah;
et

II. Compte dûrnent tenu de la ligne de partage des fonds marins des
deux Etats décritedans la décisionbritannique du 23 décembre
1947,tracer conformément au droit international une limite mari-

time uniqui: entre les zones maritimes comprenant les fonds
marins, le sous-sol et les eaux surjacentes qui relèvent respecti-
vement de 1'Etat de Qatar et de 1'Etat de Bahreïn.))

36. Devant la Cour, Bahreïn a clairement exprimé l'opinion que la
requêtede Qatar ne comprend que certains des éléments constitutifs de

I'objet du litige que la formule bahreïnite était censéecouvrir; la requête
omet en particulier toute référenceà un différend concernant Zubarah,
auquel Bahreïn attache de l'importance, bien qu'il ne s'agisse pas de son
seul sujet de préocciqation. Qatar a en fait reconnu que sa requêtene
porte que sur une partie du différend visépar la formule bahreïnite et a
invité Bahreïnà réglerla question en présentant une requête distincteou

une demande reconventionnelle portant. par exemple, sur Zubarah.

37. Or, dès 1983, les Parties, en approuvant les ((principes pour un
cadre de règlement)), auxquels il a étéfait référencedans l'accord
de 1987. étaient convenues que:

((Toutes les questions en litige entre les deux Etats au sujet de la

souveraineté sur les îles, des frontières maritimes et des eaux territo-
riales doivent étre considéréescomme des questions complémen-
taires formant un tout indivisible qui doit faire l'objet d'un règlement
d'ensemble. »

L'accord de 1987 prévoit que «toutes les questions en litige seront sou-mises à la Cour internationale de Justice, à La Haye, ..)) Le procès-
verbal de décembre 1990 se réfère à la soumission de la ((question)) (au
singulier) a la Cour internationale de Justice; il se réfèrede même a la
soumission de la ((q~iestion))à l'arbitrage. Il ajoute enfin que, si les bons

offices du roi d'Arabie saoudite - qui portaient certainement sur I'en-
semble du différend - aboutissent, ((l'affaire sera retiréede l'arbitrage)).
Les auteurs de la formule bahreïnite l'avaient conçue dans cette perspec-
tive en vue de permettre que la Cour soit saisie de l'ensemble de ces ques-
tions, telles que définiespar chacune des Parties dans le cadre général

ainsi agréé.
38. La Cour a en conséquencedécidéde donner aux Parties l'occasion
de lui soumettre I'erisemble du différend tel qu'il est circonscrit par le
procès-verbal de 1900 et la formule bahreïnite, que toutes deux ont
acceptés.Une telle soumission de l'ensemble du différendpourra résulter

soit d'une démarche conjointe des deux Parties, accompagnée au besoin
d'annexes appropriées, soit de démarches individuelles. Quelle que soit
cependant la méthode ainsi choisie, elle devra avoir pour effet que la
Cour soit saisie de ((toute question relative à un droit territorial ou à tout
autre titre ou intérêqtui peut faire l'objet d'un différendentre)) les Parties

et d'une demande de ((tracer une limite maritime unique entre leurszones
maritimes respective:^ ,omprenant les fonds marins, le sous-sol et les
eaux surjacentes)). Cf: processus devra êtreachevédans les cinq mois sui-
vant le prononce du présent arrêt.
39. Une fois l'ensemble du différend soumis a la Cour, celle-ci fixera

les délaisdans lesquels il sera procédéau dépôtsimultanédes piècesde la
procédure écrite, chaque Partie déposant dans les mêmes délais un
mémoire. puis un contre-mémoire.

40. La Cour observe que Bahreïn a accordé de l'importance a une

question abordée à l'articleV d'un projet de compromis proposé par lui
au cours des discussions tenues en 1988 au sein de la commission tripar-
tite; le texte de cetaiticle se lisait comme suit:

«Ni l'une ni l'autre des parties n'invoquera comme moyen de
preuve ou comme argument, ni ne révélerapubliquement de quelque
manière que ce soit, la nature ou le contenu de propositions ten-

dant à un règlement des questions [à porter devant la Cour], ou de
réponses à ces propositions, faites au cours de négociations ou de
discussions menties entre les parties avant la date du présent com-
promis, soit directement soit iitravers une médiation. ))

Qatar s'est opposéà l'adoption d'un tel articleet aucune disposition de ce

genre ne figure dans le procès-verbal de 1990. En tout état de cause, il
existe en ce domaine une règle de droit international coutumier que laCour permanente de Justice internationale a énoncéeen 1927 en préci-
sant qu'elle ne saurait faire état des déclarations, admissions ou proposi-
tions qu'ont pu faire les parties au cours des négociations directes qui ont
eu lieu entre elles, lorsque les négociationsen question n'ont pas abouti à

un accord entre les parties (Usitic) (1. Cl1orroii~,c.or?il)c;tt.r~c.r.,P.J.I.
sc;rieAn" Y. p. 19;voir aussi Usirlc (1.Cl~orzriiit(rlr~nlrrr~elc~itlrl~n~rlitc;),
/on(/. C.P. J.1. .sc;riiino 17, p. 5 1.62-63). La Chambre constituée pour
connaître de l'affaire du Di,ff~rer1ti,fiont(rlicterrcstrcj, iris~rluircct 111rrr.i-
tir?ic.(El Su/rcrr~or/~~~~~~~/~ Nicraru.g;uu (inferi'rtlutlt)) a reconnu la

pérennitéde cette règle et a expliqué comme suit le (/ic.tur~~e la Cour
permanente :

«Cette remarque vise ... la pratique courante et louable - qui de
fait est inhérente aux négociations - selon laquelle les parties à un
différend, ayant chacune présentéses positions de principe, définis-

sant ainsi la portée du différend. en viennent à suggérerdes conces-
sions réciproqu~:~,dans la limite ainsi définie. en vue de parvenir
d'un commun accord à un règlement. Si aucun accord n'est conclu.
aucune des deux parties ne peut êtretenue de faire les concessions
ainsi suggérées.))(C.I.J. Rc.cirei11992. p. 406, par. 73.)

41. Par ces motifs,

1) Par quinze voix contre une,

Dit que les échangesde lettres entre le roi d'Arabie saoudite et l'émir
de Qatar, datées des 19 et 21 décembre 1987. et entre le roi d'Arabie

saoudite et l'émirde Bahreïn. datées des 19 et 26 décembre 1987, ainsi
que le document ii~titulé<<procès-verbal», signé à Doha le 25 dé-
cembre 1990par les ministres des affairesétrangères de Bahreïn, de Qatar
et de l'Arabie saoudite, constituent des accords internationaux créant des
droits et des obligations pour les Parties;

POUR : M. Bedjaoui, Prc;siilc.nt;M. Schwebel, Vice-Prc;siiic~ :rsitr Robert
Jennings. MM. T'arassov. Guillaume.Shahabuddeen, Aguilar Mawdsley.
Weeramantry, Ranjeva. 1-lerczegh.Shi, Fleischhauer. Koroma, jirgcs;
MM. Valticos.Ruda,,jirgcsad hoc:

<.ONTRI : h4. Oda, jl,gil.

2) Par quinze voix contre une,

Dit qu'aux termec;de ces accords les Parties ont pris l'engagement de
soumettre à la Cour l'ensemble du différend qui les oppose, tel que cir-
conscrit dans le texte proposé par Bahreïn à Qatar le 26 octobre 1988, etaccepté par Qatar en décembre 1990, que le procès-verbal de Doha

de 1990 dénomme 1i«formule bahreïnite » ;
PWR: M. Bedjaoui. Prc;.~i(/cnt;M. Schwebel. Vicx~-Prc;si&nt;sir Robert
Jennings, MM. Tarassov. Guillaume, Shahabuddeen. Aguilar Mawdsley,
Weeramantry. R.anjeva. Herczegh. Shi, Fleischhauer. Koroma, ,juges;
MM. Valticos. Ruda. jugcs ad hoc;

CONTRI; :M. Oda, ,/l4gh'('.

3) Par quinze voix contre une.

DPci(/c>de donner aux Parties l'occasion de soumettre à la Cour I'en-
semble du différend:
POUR :M. Bedjaoui. Prc;.ridcvzt:M. Schwebel, Vico-Prc;.sic/cv itsir Robert

Jennings. MM. Irarassov, Guillaume. Shahabuddeen. Aguilar Mawdsley.
Weeramantry, R.anjeva, Herczegh, Shi, Fleischhauer. Koroma. ,jlr,ycs;
MM. Valticos, Ruda.,jirges ad hoc;
CONTK~ M: . Oda, jirgc.

4) Par quinze voix contre une.

F~.YLau 30 novemibre 1994 la date d'expiration du délaidans lequel les
Parties devront agir conjointement ou individuellement à cette fin;

POLIR:M. Bedjaoui. Président: M. Schwebel. Viw-Prc;sident ; sir Robert
Jennings. MM. ITarassov, Guillaume, Shahabuddeen, Aguilar Mawdsley,
Weeramantry. P.anjeva. Herczegh. Shi. Fleischhauer, Koroma, juges;
MM. Valticos, R.uda,,jugc.sad hoc:
CONTRI: :M. Oda, jllg~'.

5) Par quinze voix contre une.

Réscri>e toute autre question pour décision ultérieure.

POLR : M. Bedjaoui. Présiti~nt ; M. Schwebel, Vic,c.-Prc;.sidcws t:ir Robert
Jennings. MM. Tarassov, Guillaume, Shahabuddeen, Aguilar Mawdsley.
Weeramantry, F1.anjeva.Herczegh, Shi. Fleischhauer. Koroma. juge.~:
MM. \'alticos, R.uda, juges ad hoc;
CONTRF :M. Oda, jrrgcJ.

Fait en anglais eten français, le texte anglais faisant foi, au Palais de la
Paix, à La Haye, le premier juillet mil neuf cent quatre-vingt-quatorze, en
trois exemplaires, dont l'un restera déposéaux archives de la Cour et les

autres seront transmis respectivement au Gouvernement de I'Etat de
Qatar et au Gouvernement de 1'Etat de Bahreïn.

Le Président,

(Signé) Mohammed BEDJAOUI.

Le Greffier,

(Signé) Eduardo VALENCIA-OSPINA. DL.LIMITATIM ARITIME ET QU~STIONS TERRITORIALES (ARRET)128

M. SHAHAINJDDEjE uIe,,joint une déclaratiAnl'arrêt.

M. SCHWEBEV I.,ice-Président,et M. V~l.ricos, jughoc,joignent A

l'arrêtles exposésde leur opinion individuelle.

M. ODA,juge, joint à l'arrêtl'exposéde son opinion dissidente.

(Paruphé) M.B.

(Puruphc;) E.V.O.

Bilingual Content

1NTE:RNATIONAL COURT OF JUSTICE

R.EPORTS OF JUDGMENTS,
ADVISORY OPINIONS AND ORDERS

CASE CONCER.NINGMARITIME DELIMITATION
AND TERRITORIAL QUESTIONS

BETWEEN QATAR AND BAHRAIN

(QATAR iBAHRAIN)

JURISDICTION AND ADMISSIBILITY

JUDGMENT OF 1JULY 1994

COIJR INTERNATIONALE DE JUSTICE

RECUEIL DES ARRÊTS,
AVIS CONSULTATIFS ET ORDONNANCES

AFFAIRE DE LA DÉLIMITATION MARITIME
ET DES (?UESTIONS TERRITORIALES

ENTRE QATAR ET BAHREIN
(QATAR c.BAHREIN)

ARRÊT DU lKRJUILLET 1994 Official citation :
Muritirne Deliinitationund Territoriul Questions
berireenQutur unclBahruin,Jurisdictionund Admissihilifi~,Judgtnent,
IC.J. Report.71994.12 1

Mode officiel citation:
DPlirîiitutionmuritirnccf questions tcrritorialcs
entre Qatur et Buhreïn,c80rnet rccei~uh;,irre^t,
C.1J. Rctueil 1994,12 1

%k ""Ill..*651 1
ISSN 0074-4441 Node vente:
ISBN 92-1-070716-9 1JULY 1994

JUDGMENT

MARITIME DELIMITATION AND TERRITORIAL QUESTIONS
BETWEEN QATAR AND BAHRAIN
(QATAR v.BAHRAIN)

JUR18SDICTIONAND ADMISSIBILITY

DÉLIMITATION IMARITIME ET QUESTIONS TERRITORIALES
ENTRE QATAR ET BAHREIN

lEKJUILLET 1994

ARRÊT INTERNATIONAL COURT OF JUSTICE

1994
I July YEAR 1994
Gcneral List
No. 87 1 July 1994

CASECONCERNING MARITIME DELIMITATION

AND TERRITORIAL QUESTIONS

BETWEEN QATAR AND BAHRAIN

(QATAR 11.BAHRAIN)

JURISDlCTION AND ADMISSIBILITY

Jirri.~~lic,tioorf~'tlie -oiLeguI nrrturrof'tc.ut.vrclierlon tu,fhrnd jurisdic-
/ion- 1987 c.1-c~1rcrtgje'.lsetters 1990 "Miriutcs" crcltrtiriglits uridobli-
grrtiorrNI itrtrrrrr~tiotru1I(11,rfir tlic'P~rtie.~r~tidtllconstitlrfingN~~c~II~I-

riontil ugre~ji<~tits.
1nto1tion.sq/'tlic sigrlutorufflic tr.u- S~rhseqircfc.oridiruf'f/rr Ptrrfics.
Forr?~~rIii?i/~lj~itifglzut tlrf iq/'tllr (li~put~t~oul(hie .~uhr?rittedtu the
Coirrt- Applic~~tiorloti~prisingorllj,soniqf the elcrllent<!ftlir clisp~rtc.
Oppo~.t~uiitj(.~florrledto tlrcPortirs bj tlrr Court to crisirrcslthr~iissionto it qf
thc cvitirr c/i.~-irtSuhriris.riorrrithcr bj ,joint rrc.tor sepric,t.v.

JUDGMENT

Pre.trnt: Prc>.tit/c,t EDJ-~oL;~V;icc~-Prc.~ic/cSt HWEBELJ ;uclge.~ODA, Sir

Robert .IFIVNINGT SA, RASSOV.GL~ILLAIJMS I:I.IAIIABLDDEEN A. CILAR
MAM.DSI.EL.W , ~ERAMANTRL.R , ANJEVA. HERCZLGH,SIII, FLEISCH-
I R.KOROMAJ :u(/~c.sad hoc VALTICOS R.~A: R<yistrrrrVALENCIA-
OSPIN A.

In the caseconcerning maritimedelimitation and territorial questionsbetween
Qatar and Bahrain.

het~i.een

the State of Qatar, COUR INTERNATIONALE DE JUSTICE

ANNÉE 1994

lerjuillet 1994

AFFAIRE DE:LA DÉLIMITATION MARITIME
ET DES QUESTIONS TERRITORIALES

ENTRE QATAR ET BAHREIN

Cotnpétencetir IIIC'our- Nutrlre,juridique des te.utrs ini~.~our ,/i,nr/~r
lu i~or?lpc;t-~eEc11unge.se 1ertre.s(/c 1987 et ((procks-i,erbal» d~.1990 crc;rint
portr les Prrrtrlrs~1r.o.st ckesob1igrrtiorz.esn &oit internationcilet constitirrrnt
de>cefuit tkcstlcc,orr/sinternutiontru.~.
1nrcntion.s(/es signrrtuiresdzrte-teConduite ultkrieurc.do.sParties.
Fornzulc ir?~pliyirrti~~I'ensrrnhlc t/u diff?rerlri serait soùrItrCour
- Requrtr c~ornprrnurz.tseulenzrntc~ert.~clc;l;rnents(lu dia?rcnd.
O(~c~rrsiclonnée(tu.\-Purtic~spur /r Corrr.de lrri.souc>rzscmhledirdi/:
fkren(/- Solrniission soit pur dc~n~arc,onjointc, soit pur dc;nzurnrsiiili-
r/zrc/lc~.s.

Prc;sent.r: M. BEDJACI~PJIr,l.sit/ent: M. SCHWEBEV,ice-Prkside;tM. ODA.
sir Robert JENNINGS , M. TARASSOV G,UILLAUMS EH. AHABCDUEFN.
AGIIILARIWAWDSLEY W.EERAMANTR RAY, JEVA. HERCZEGHS , HI,
FLEISCHIIAIJE KRO,ROMA ju,ges; MM. VALTICOR S,IJDA,~U~LadShoc;
M. V.~LFN<.IA-OSPIG Nl.(:,fj~'l..

En l'affaire de la délimitation maritime et des questions territoriales entre
Qatar et Bahreïn.

rntrr

I'Etat de Qatar.represented by
H.E. Mr. Najeeb Al-Nauimi, Minister Legal Adviser,

as Agent and Counsel;
Mr. Adel Sherbini, Legal Expert.
Mr. Sami Abushaikha, Legal Expert,
as Legal Advisers:
Mr. Jean-Pierre Quéneudec. Professorof lnternational Law at the University
of Paris1.
Mr. Jean Salmon, Professor at the Universitélibre de Bruxelles,

Mr. R. K. P. Shankardass, Senior Advocate, Supreme Court of India,
Former President of the International Bar Association,
Sir Ian Sinclair, K.C.M.G., Q.C., Barrister at Law, Member of the Institute
of International Law,
Sir Francis Vallat. G.B.E.. K.C.M.G.. Q.C.. Professor emeritus of Interna-
tional Law at the University of London.
as Counsel and Advocates;
Mr. Richard Meese, Advocate, partner in Frere Cholmeley, Paris.
Miss Nanette E. Pilkington. Advocate, Frere Cholmeley, Paris.
Mr. David S. Sellers. Solicitor. Frere Cholmeley. Paris,

utzd

the State of Bahrain,
represented by
H.E. Mr. Husain Mohammed Al Baharna, Minister of State for Legal

Affairs, Barrister at Law. Member of the International Law Commission
of the United Nations,
as Agent and Counsel:
Mr. Derek W. Bowett, C.B.E., Q.C., F.B.A., Whewell Professor emeritus at
the University of Cambridge,
Mr. Keith Highet, Member of the Bars of the District of Columbia and
New York.
t Mr. Eduardo Jiménezde Aréchaga,Professor of lnternational Law at the
Law School, Catholic University, Montevideo, Uruguay,
Mr. Elihu Lauterpacht, C.B.E., Q.C., Honorary Professor of International

Law and Director of the Research Centre for lnternational Law, Univer-
sity of Cambridge: Member of the Institute of International Law,
Mr. Prosper Weil, Professor emeritus at the Universitéde droit, d'économie
et de sciencessociales de Paris.
as Counsel and Advocates;
Mr. Donald W. Jones. Solicitor, Trowers & Hamlins, London,
Mr. John H. A. McHugo. Solicitor, Trowers & Hamlins, London,
Mr. David Biggerstaff, Solicitor. Trowers& Hamlins, London.

as Counsel,

THECOCRT,
composed as above.

after deliberation,
ck~1ii~erfl.isc f011oigirdgmrnt:représentépar
S. Exc. M. Najeeb Al-Nauimi, ministre conseiller juridique,

comme agent et conseil;
M. Adel Sherbini, expert juridique,
M. Sami Abushaikha., expert juridique,
comme conseillersjui-idiques;
M. Jean-Pierre Quéneudec, professeurdedroit international à l'universitéde
Paris1,
M. Jean Salmon, professeur à l'université libre de Bruxelles.

M. R. K. P. Shankardass, Senior Advocute à la Cour suprêmede I'lnde,
ancien présidentde l'Association internationale du barreau,
sir Ian Sinclair, K.C.M.G., Q.C., Brlrrister ut Lrric,membre de l'Institut de
droit international.,
sir FrancisVallat, G.B.E., K.C.M.G., Q.C., professeur éméritede droit inter-
national à l'universitéde Londres.
comme conseils et avocats;
M. Richard Meese, a.vocat, associédu cabinet Frere Cholmeley, Paris,
MlleNanette E. Pilkington, avocat. cabinet Frere Cholmeley, Paris,
M. David S. Sellers, Soliritor, cabinet Frere Cholmeley, Paris,

et

1'Etatde Bahrein,
représentépar
S. Exc. M. Husseïn Mohammed Al Baharna, ministre d'Etat chargé des
affaires juridiques, Brrrristrr ut Law, membre de la Commission du droit

international de l'Organisation des Nations Unies.
comme agent et conseil;
M. Derek W. Bowetit,C.B.E., Q.C.. F.B.A., professeur émérite, ancientitu-
laire de la chairehewell iil'universitéde Cambridge,
M. Keith Highet, membre des barreaux du district de Columbia et de
New York.
t M. Eduardo Jiménezde Aréchaga, professeur de droit international à la
facultéde droit de l'université catholique de Montevideo, Uruguay,
M. Elihu Lauterpacht, C.B.E., Q.C., professeur honoraire de droit interna-
tional et directeur du Research Centre for International Law de ]'Univer-
sitéde Cambridge; membre de l'Institut de droit international,

M. Prosper Weil, prcifesseurémérite àl'Universitéde droit, d'économieet de
sciences socialesl: Paris,
comme conseils et avocats:
M. Donald W. Jones, Soliritor. cabinet Trowers et Hamlins. Londres,
M. John H. A. McHugo, Soliritor, cabinet Trowers et Hamlins. Londres,
M. David Biggerstaff, Solicifor, cabinet Trowers et Hamlins. Londres,

comme conseils,

ainsi composée,

après délibéréen chambre du conseil,
rend l'arrêt.suivant 1. Le 8 juillet 1991, le ministre des affaires étrangèresde 1'Etat de Qatar
(dénomméci-après <<Q;dtar»)a déposéau Greffe de la Cour une requêteintro-
duisant une instance contre 1'Etat de Bahreïn (dénomméci-après <<Bahreïn »)
au sujet de certains diffërends entre les deux Etats relatàfla souveraineté sur
les îles Hawar. aux droits souverains sur les hauts-fonds de Dibal et de Qit'at

Jaradah. et à la délimilation des zones maritimes entre les deux Etats.

2. Conformément ail paragraphe 2 de l'article 40 du Statut de la Cour, la
requête aétéimmédiai.ementcommuniquée par le Greffier au Gouvernement
de Bahreïn: conformément au paragraphe 3 du même article.le Greffier en a
informétous les autres Etats admis à ester devant la Cour.

3. Dans sa requête,Qatar fondait la compétencede la Cour sur deux accords
que les Parties auraient conclus en décembre 1987et en décembre 1990,respec-
tivement: selon le demandeur. l'objet et la portéede l'engagement ainsi pris en
ce qui concerne la conipétence de la Cour étaient déterminéspar une formule
proposée à Qatar par Bahreïn le 26 octobre 1988 et acceptée par Qatar en
décembre 1990.
4. Par lettres adressées au Greffier de la Cour le 14 juillet 1991 et le

18 août 1991. Bahreïn a contesté la base de compétence invoquée par Qatar.
Au cours d'une réunion que le Présidentde la Cour a tenue avec les représen-
tants des Parties le 2 octobre 1991, il a étéconvenu qu'il serait statué séparé-
ment, avant toute procédure sur le fond, sur les questions de compétenceet de
recevabilité.
5. Par une ordonnance en date du 11octobre 1991. le Présidentde la Cour,
se référant à cette réunion, a considéréqu'il était nécessaireque la Cour fût
informéede tous les nioyens de fait et de droit sur lesquels les Parties se fon-
daient au sujet de ces cluestions; le Président.après avoir consulté les Parties en
vertu de l'article 3du Règlement, et compte tenu de l'accord intervenu entre
elles au sujet de la procédure. a décidque les piècesde la procédure écritepor-
teraient d'abord sur la question de la compétencede la Cour pour connaître du
différendet sur celle de la recevabilitéde la requête.

6. Par cette mêmeordonnance, le Président a fixéau 10février 1992 la date
d'expiration du délaipour le dépôtdu mémoirede Qatar et au 11juin 1992 la
date d'expiration du délaipour le dépôt du contre-mémoire de Bahreïn sur les
questions de compétenceet de recevabilité; ces piècesont étédûment déposées
dans les délaisainsi fixés.Par ordonnance en date du 26 juin 1992. la Cour,
considérant que la présentation d'autres pièces de procédure par les Parties
était nécessaire. a prescrit la présentation d'une réplique de Qatar et d'une
duplique de Bahreïn sur les questions de compétenceet de recevabilité, eta fixé
respectivement au 28 septembre 1997et au 29 décembre 1992 les dates d'expi-
ration des delais pour le dépôtde ces pièces; celles-ci ont étédûment déposées
dans les délaisainsi fi:&.
7. La Cour ne comptant sur le siègeaucun juge de la nationalité des Parties,
chacune d'elles a procédé.dans l'exercice du droit que lui confère le para-
graphe 3 de l'article 31 du Statut,à la désignation d'un juge u(/ hoc pour sié-
ger en l'affaire: Bahre'ina désignéM. Nicolas Valticos, et Qatar M. JoséMaria

Ruda.
8. Au coursd'une réunion tenue avec le Greffier le 8janvier 1993. lesagents
des deux Parties ont déclaréque leurs gouvernements respectifs étaient conve-
nus qu'aucune d'elles ne ferait entendre de témoins ou d'experts à l'audience.Registrar by a letter from the Agent of Qatar dated 20 November 1993and a
letter from the Agent of Bahrain dated 23 November 1993.
9. By a letter addressed to the Registrar on II January 1994 the Agent of
Bahrain, referring to Article 56 of the Rules of Court, submitted certain docu-
ments which Bahrain wished to produce and refer to during the oral proceed-
ings. Copies were communicated to the Agent of Qatar who. by a letter dated
10February 1994,indicated that Qatar did not object to the production of the
documents submitted by Bahrain. reserved the right to comment thereon, and

submitted documents under Article 56. paragraph 3, of die Rules of Court.
Copies were communicated to the Agent of Bahrain.

10. In accordance with Article 53. paragraph 2, of the Rules of Court, the
Court. after ascertaining the views of the Parties. decided that copies of the
pleadings and annexed documents should be made accessibleto the public from
the date of the opening of the oral proceedings.
II. At public hearings held between 28 February and 11 March 1994, the
Court heard the oral arguments addressed to it by the following:

For Qatar: H.E. Mr. Najeeb Al-Nauirni, Agent,
Sir lan Sinclair, Q.C.,
Mr. R. K. P. Shankardass.
Mr. Jean Salmon.
Mr. Jean-Pierre Quéneudec.
Sir Francis Vallat. Q.C.
For Buhruin: H.E. Mr. Husain Mohammed Al Baharna, Agent,

Mr. Derek W. Bowett, Q.C.,
Mr. Elihu Lauterpacht, Q.C.,
Mr. Eduardo Jiménezde Aréchaga,
Mr. Prosper Weil,
Mr. Keith Highet.
12. During the oral proceedings. questions were put by a Member of the
Court to both Parties. In accordance with Article 61, paragraph 4, and

Article 72 of the Rules of Court, the Parties supplied written replies to these
questions after the close of the hearings, and each Party commented in writing
upon the reply given by the other.
13. In the course of the written proceedings, the following submissions were
presented by the Parties :
On hclicrijof'Qutur,

in the Memorial and in the Reply:
"the State of Qatar respectfully requests the Court to adjudge and declare,
rejecting al1contrary claims and submissions, that -

The Court has jurisdiction to entertain the dispute referred to in the
Application filed by Qatar on 8 July 1991and that Qatar's Application is
admissible."

On heliulf (?/'(r1iruiri.
in the Counter-Memorial and in the Rejoinder:
"The State of Bahrain respectfully requests the Court to adjudge and

declare, rejecting al1 contrary claims and submissions, that the Court is D~LIMITATION MARITIME ET QUESTIONS TFRRlTORlALES (ARRFT) 115

Cet accord a été confirméau Greffier par une lettre de I'agent de Qatar du
20 novembre 1993et une lettre de I'agent de Bahreïn du 23 novembre 1993.
9. Par une lettre adressée au Greffier le 11janvier 1994,I'agent de Bahreïn,
se référant à l'article 56 du Règlement, a soumis certains documents que son
gouvernement désirait produire et mentionner au cours de la procédure orale.

Des copies eii ont étécommuniquées à I'agent de Qatar qui, par une lettre en
date du 10février1994,a indiquéque son gouvernement ne s'opposait pas à la
production desdocuments soumis par Bahreïn, se réservaitle droit de présenter
des observations à leur sujet et soumettait des documents en vertu du para-
graphe 3 de l'article 56 du Règlement. Des copies de ces derniers ont étécom-
muniquées à I'agent de Bahreïn.
10. Conformément ;iu paragraphe 2 de l'article 53 du Règlement. la Cour.
après s'être renseignée auprès des Parties. a décidéque des exemplaires des
pièces de procédure et des documents annexés seraient rendus accessibles au
public à l'ouverture de la procédure orale.

I1. Au cours d'audiences publiques tenues entre le 28 février et le
11 mars 1994. la Cour a entendu les exposésoraux qu'ont prononcés devant
elle:
Pour Qutur: S. Exc. M. Najeeb Al-Nauimi. rrgrnt.
sir lan Sinclair, Q.C..
M. R. K. P. Shankardass,
M. Jean Salmon,

M. Jean-Pierre Quéneudec.
sir Francis Vallat, Q.C.
Pour Bcrhreïti: S. Exc. M. Husseïn Mohammed Al Baharna, ugt~~t.
M. Derek W. Bowett, Q.C.,
M. Elihu Lauterpacht, Q.C.,
M. Eduardo Jiménezde Aréchaga,
M. Prosper Weil,

M. Keith Highet.
12. A l'audience, desquestions ont étéposéesaux deux Parties par un membre
de la Cour. II y a été répondupar écritaprès la clôture de la procédure orale
conformémeiit au paragraphe 4 de l'article 61 et à l'article 72 du Règlement
de la Cour. et chacune des Parties a présenté desobservations écrites sur la
réponse fournie par l'autre.

13. Au cours de la procédure écrite,les conclusions ci-après ont été présen-
téespar les Parties:
Au noni (1. Qrrtlrr,

dans le mémoireet la réplique
~I'Etat de Qatar prie respectueusement la Cour de dire et juger, rejetant
toutes revendications et conclusions contraires. que:

La Cour a compétence pour statuer sur le différendqui lui a étésoumis
dans la requête déposée par Qatar le 8 juillet 1991 et que la requêtede
Qatar est recevab'ie.)

Au tioni dc Balrrc~itl,
dans le contre-mémoire et la duplique:

«L'Etat de Bahreïn prie respectueusement la Cour de dire et juger. reje-
tant toutes revendications et conclusions contraires, qu'elle n'a pas coin- withoutjurisdiction over the disputebrought before it by the Application
filedby Qatar on 8 July 1991."
14. In the courseof the oral proceedings submissionswerepresentedby the
Parties identicalto those presented by them in the written proceedings.

15. The dispute between Bahrain and Qatar has a long history which

there is no need to recall at this stage. However. it seems useful to sum-
marize the circumstances in which a solution to that dispute has been
sought over the past two decades.
16. These endeavours to find asolution took place in the context of a
mediation, sometimes referred to as "good offices", beginning in 1976, by
the King of Saudi Arabia with the agreement of the Amirs of Bahrain

and Qatar. The first consequence of that mediation was that a set of
"Principles for the Framework for Reaching a Settlement" was approved
during a tripartite meeting in March 1983.
The first principle specified that

"All issues of dispute between the two countries, relating to sov-
ereignty over the islands, maritime boundaries and territorial waters,
are to be considered as complementary, indivisible issues, to be
solved comprehensively together."

The second and third principles were aimed at the maintenance of the
status quo, and of a cordial atmosphere between the Parties. The third
principle also provided that the Parties undertook "not to present the dis-

pute to any international organization".
Under the fourth principle, a Tripartite Committee was formed, with
the aim of reaching substantive solutions acceptable to the two Parties.

Lastly, according to the fifth principle.

"In case that the negotiations provided for in the fourth principle
fail to reach agreement on the solution of one or more of the afore-
said disputed matters, the Governments of the two countries shall
undertake, in consultation with the Government of Saudi Arabia, to

determine the best means of resolving that matter or matters, on the
basis of the provisions of international law. The ruling of the author-
ity agreed upon for this purpose shall be final and binding."

17. For the next few years, there was no progress towards a settlement
of the dispute. The King of Saudi Arabia then sent the Amirs of Qatar
and Bahrain letters in identical terms dated 19 December 1987, in which
he put forward new proposals. Those proposals were accepted by letters
from the two Heads of State, dated respectively 21 and 26 Decem-

ber 1987. The Saudi proposals thus adopted included four points. DELIMITATIO M ARITIME ET QUESTIONS TkRRITORIALES(ARRÈT) 116

pétencepour stat~iersur le différend quilui a été sousans la requête
déposée par Qatar le8juillet 1991»
14. A l'audience,les Parties ont présenté des conclusions identiiscelles
qu'elles avaientrésenliesau cours de la procédure écrite.

15. Le différend entre Bahreïn et Qatar a une longue histoire qu'il

n'est pas nécessairede rappeler à ce stade. En revanche, il paraît utile de
résumerles circonstainces dans lesquelles une solution à ce différend a été
recherchéeau cours des deux dernières décennies.
16. Cette recherche a été opérédeans le cadre d'une médiation, parfois
qualifiéede «bons offices)), menéeà partir de 1976 par le roi d'Arabie

saoudite avec l'accord des émirsde Bahreïn et deQatar. Le premier résul-
tat de cette médiation fut l'approbation d'un ensemble de «principes
pour un cadre de règlement))lors d'une réunion tripartite tenue en mars
1983.
Le premier principe précisait que:

((Toiites les questions en litige entre les deux Etats au sujet de la
souveraineté sur les îles, des frontières maritimes et des eaux territo-
riales doivent ètre considéréescomme des questions complémen-

taires formant Lintout indivisible qui doit faire l'objet d'un règle-
ment d'ensemble. »
Les deuxièmeet troisième principes tendaient au maintien du stutu yuo

et d'un climat de confiance entre les Parties. Le troisième principe pré-
voyait en outre l'engagement de celles-ci (<àne soumettre le différend à
aucune organisation internationale)).
En application du quatrième principe était constituée une commission
tripartite chargée de rechercher au fond des solutions acceptables par les
deux Parties.

Enfin, selon le cinquième principe:
((Au cas où les négociations viséespar le quatrième principe ne
permettraient pas d'aboutir à un accord sur une ou plusieurs des

questions en litige susmentionnées, les gouvernements des deux pays
s'attacheront, en consultation avec le Gouvernement de l'Arabie
saoudite, à déterminer les meilleurs moyens de réglerladite ou les-
dites questions, sur la base des dispositions du droit international.
La décision que prendra l'instance choisie d'un commun accord A

cette fin sera définitive etobligatoi>>.
17. Aucun progrès ne fut réalisédans la solution du différendau cours
des annéesqui suivirent. Le roi d'Arabie saoudite adressa alorsaux émirs

de Qatar et de Bahreïn des lettres rédigéesen termes identiques, datéesdu
19 décembre 1987,dans lesquelles il formulait de nouvelles propositions.
Ces dernières furent acceptéespar lettres des deux chefs d7Etat datéesres-
pectivement des 21 et 26 décembre 1987. Les propositions saoudiennes
ainsi agrééescomportaient quatre points.117 MARITIME DELIMITATION AND TERRITORIAL QUESTIONS (JUDGMENT)

The first was that
"Al1 the disputed matters shall be referred to the International
Court of Justice, at The Hague, for a final ruling binding upon both

parties, who shall have to execute its terms."

The second point was once more directed at the maintenance of the
status quo.
The third provided for formation of a committee composed of repre-
sentatives of the States of Bahrain and Qatar and of the Kingdom of
Saudi Arabia,

"for the purpose of approaching the International Court of Justice,
and satisfying the necessary requirements to have the dispute sub-
mitted to the Court in accordance with its regulations and instruc-

tions so that a final ruling, binding upon both parties, be issued".

Lastly, according to the fourth point, the Kingdom of Saudi Arabia

was to "continue its good offices to guarantee the implementation of
these terms".
In addition, on 21 December 1987 an announcement was issued by
Saudi Arabia, the terms of which were approved by the two Parties. That
announcement stated that Bahrain and Qatar accepted

"that the matter be submitted for arbitration, in pursuance of the
principles of the framework for settlement which had been agreed by
the two sisterly States, particularly the fifth principle"

as adopted in 1983,the text of which was quoted. It went on to state that
"under the five principles" it had been agreed to establish a Tripartite
Committee whose task was described in the same terms as in the exchanges

of letters of December 1987.
18. That Tripartite Committee held a preliminary meeting in Riyadh
in December 1987. Qatar then presented a draft of a joint letter to the
Court which expressly contemplated, inter uliu, the drafting of a special
agreement. Bahrain proposed an agreement of a procedural character,
relating to the organization and functioning of the Committee.

The Committee subsequently held its first forma1 meeting on 17Janu-
ary 1988.Bahrain then filed a revised version of its draft stating expressly
that the Cornmittee was formed with the aim of reaching a special agree-
ment. After a discussion, it was agreed that each of the Parties would
present a draft special agreement.
Several texts were subsequently presented to the Committee by Bah-

rain and Qatar, but no agreement could be reached in the course of the
first four meetings. Then, on 26 October 1988, following an initiative by
Saudi Arabia, the Heir Apparent of Bahrain, when on a visit to Qatar,
transmitted to the Heir ~p~areilt of Qatar a text (subsequently known as
the "Bahraini formula") which reads as follows: Selon le premier:

«Toutes les questions en litige seront soumises à la Cour interna-
tionale de Justice, à La Haye, pour qu'elle rende une décisiondéfi-
nitive et obligatoire pour les deux parties, qui devront en exécuterles

dispositions.))
Le deuxième poinl. tendait une nouvelle fois au maintien du statu quo.

En vertu du troisième était formée une commission composéede repré-
sentants des Etats de Bahreïn et de Qatar et du Royaume d'Arabie saou-
dite; cette commission était constituée

«en vue d'entrer en rapport avec la Cour internationale de Justice et
d'accomplir les formalités requises pour que le différend soitsoumis
à la Cour conformément à son Règlement et à ce qu'elle prescrira,

afin que la Cour puisse rendre une décisiondéfinitiveet obligatoire
pour les deux parties)).
Enfin, d'après lequatrième point, le Royaume d'Arabie saoudite devait

continuer ((d'exercer ses bons offices pour assurer la mise en Œuvre des
présentes dispositions ».
Le 21 décembre 1087étaiten outre publiéeune déclaration saoudienne
dont les termes furent approuvés par les deux Parties. Cette déclaration
précisait que Bahreïn et Qatar acceptaient

«que la question soit soumise à l'arbitrage, en application des prin-
cipes énoncésdans le cadre de règlement qui a étéfixépar accord des

deux Etats frères, en particulier le cinquième principe))
retenu en 1983, dont les termes étaient rappelés. La déclaration ajoutait

que «conformémeni. aux cinq principes)), il était convenu de constituer
une commission tripartite dont la tâche était décritedans les termes
mêmes des échangesde lettres de décembre 1987.
18. Cette commission tripartite tint une réunion préliminaireà Riyadh
en décembre 1987.Qatar présenta alors un projet de lettre commune à la
Cour envisageant expressément, entre autres, la rédaction d'un compro-

mis. ~ahreïn proposa un accord de caractère procédural concernant
l'organisation et le lonctionnement de la commission.
Puis celle-ci tint sa première réunion officielle le 17 janvier 1988.
Bahreïn déposa alors une version reviséede son projet, précisant expres-
sément que la commission était constituée dans le but de conclure un

compromis. Après discussion, il fut convenu que chaque Partie préseiite-
rait un projet de compromis.
Divers projets furent ensuite présentésà la commission par Bahreïn et
Qatar, mais aucun accord ne put intervenir lors des quatre premières réu-
nions. Puis, le 26 octobre 1988. à la suite d'une initiative de l'Arabie
saoudite, le prince héritierde Bahreïn, lors d'une visite à Qatar, transmit

au prince héritier deQatar un texte (qualifiéensuite de ((formule bahreï-
nite))) se lisant comme suit: The Parties request the Court to decide any matter of territorial
right or other title or interest which may be a matter of difference

between them; and to draw a single maritime boundary between
their respective maritime areas of seabed, subsoil and superjacent
waters."

During the fifth meeting of the Committee on 15 November 1988, the
representative of Saudi Arabia appealed to the Parties to come to an
agreement and pointed out that

"the date of the beginning of the CCASG [Co-operation Council of
Arab States of the Gulfj suinmit [in December 19881is the date for
ter~ninating the Committee's mission whether or not it succeeded to
achieve what was requested from it".

The Committee held its sixth meeting on 6-7 December 1988. Qatar
asked for a reformulation of the text presented by Bahrain. and also pro-
posed

"that the agreement which would be submitted to the Court should
have two annexes, one Qatari and the other Bahraini. Each State
would define in its annex the subjects of dispute it wants to refer to
the Court."

Bahrain stated that these proposals would be studied.
The Tripartite Committee proceeded moreover to a discussion with the

"objective of defining exhaustively the matters which would be
referred to the Court, which are:

1. The Hawar Islands, including the island of Janan
2. Fasht al Dibal and Qit'at Jaradah
3. The archipelagic baselines
4. Zubarah
5. The areas for fishing for pearls and for fishing for swimming fish
and any other matters connected with maritime boundaries."

The two Parties agreed in principle upon the points thus mentioned,
although Qatar made it clear that it could only accept the inclusion of the
question of Zubarah in that list "if the content relates to private rights",

not to sovereignty over Zubarah. Bahrain's reply was that it intended to
submit its claims in that regard to the Court, "without any limitation".

With this sixth meeting, the Saudi mediator considered that the mis-
sion of the Tripartite Committee would come to an end, and in fact no
further meetings of the Committee were held.
19. The matter was again the subject of discussion two years later, on

the occasion of the annual meeting of the Co-operation Council of Arab
States of the Gulf at Doha in December 1990.Qatar then let it be known
that it was ready to accept the Bahraini formula. Following that meeting, « Qurstiori
Les parties prient la Cour de trancher toute question relative à un

droit territorial ouà tout autre titre ou intérêtqui peut faire l'objet
d'un différend entre elles; et de tracer une limite maritime unique
entre leurszonesmaritimes respectives, comprenant les fondsmarins,
le sous-sol et les eauxsurjacentes. »

Lors de la cinquikme réunion de la commission, le 15novembre 1988,
le représentant de l'.Arabiesaoudite lança un appel aux Parties pour que
celles-ci parviennent à un accord et précisaque

«le jour de l'ouverture de la réunion au sommet du Conseil de coo-
pération [des Eitatsarabes du Golfe, en décembre 1988,]marquera la
fin de la mission de la commission, qu'elle ait ou non réussià réaliser
ce qu'on attendait d'elle)).

La commission tint sa sixièmeréunion les 6 et7 décembre 1988.Qatar
proposa alors un nouveau libellédu texte soumis par Bahreïn. Il proposa
en outre

((qu'ily ait deux annexes à l'accord à soumettre à la Cour, l'une
émanant deQatar et l'autre de Bahreïn. Chaque Etat définiraitdans
son annexe les ,points en litige qu'il souhaite porter devant lCour. »

Bahreïn déclara qu'il étudierait ces propositions.
La commission tripartite procéda par ailleurs à une discussion

«en vue de définirde façon exhaustive les questions qui seraient sou-
mises à la Cour, à savoir:

1. Les îles Hawar, y compris l'île de Janan;
2. Fasht al Dibal et Qit'at Jaradah;
3. Les lignes de base archipélagiques;
4. Zubarah;

5. Les zones désignéespour la pêchedes perles et pour la pêchedes
poissons et toutes autres questions liéesaux limites maritimes.))
Les deux Parties; convinrent en principe des points ainsi mention-

nés,mais Qatar précisaqu'il ne pourrait accepter de faire figurer la ques-
tion de Zubarah sur cette liste que «s'il s'agissait de droits privés))et non
de souveraineté sur Zubarah. Bahreïn répondit qu'il avait l'intention de
faire valoir ses revendications devant la Cour sur ce point ((sans aucune
limitation D.
Le médiateur saoudien considéra que la mission de la commission tri-
partite devait prendre fin avec cette sixième réunion. De fait, la commis-

sion ne s'est plus rkunie.
19. L'affaire revint en discussion deux ans plus tard, à l'occasion de la
réunion annuelle du Conseil de coopération des Etats arabes du Golfe
qui se tint en décembre 1990à Doha. Qatar fit alors connaître qu'il était
prêtà accepter la formule bahreïnite. Puis, à l'issue de la réunion, les1 19 MARITIME DELIMITATION AND TLRRITORIAL QUESTIONS (JUDGMENT)

the Foreign Ministers of Bahrain, Qatar and Saudi Arabia signed Min-
utes recording that "Within the framework of the good offices of. . .
King Fahd Ben Abdul Aziz", consultations concerning the existing dis-
pute between Bahrain and Qatar had taken place between the Foreign
Ministers of those States in the presence of the Foreign Minister of

Saudi Arabia.
The text of those Minutes was in Arabic, and the English translations
supplied by the Parties differ on certain points. The translation supplied
by Qatar is as follows:

"The following was agreed
(1) to reaffirm what was agreed previously between the two

parties;
(2) to continue the good offices of the Custodian of the Two Holy
Mosques, King Fahd Ben Abdul Aziz, between the two countries till
the month of Shawwal, 141 1 H. corresponding to May of the next
year 1991. After the end of this period, the parties may submit the
matter to the International Court of Justice in accordance with the

Bahraini formula, which has been accepted by Qatar, and the pro-
ceedings arising therefrom. Saudi Arabia's good offices will continue
during the submission of the matter to arbitration;
(3) should a brotherly solution acceptable to the two parties be
reached, the case will be withdrawn from arbitration."

The translation supplied by Bahrain is as follows:

"The following was agreed :
1. To reaffirm what was previously agreed between the two

parties.
2. The good offices of the Custodian of the Two Holy Mosques,
King Fahd b. Abdul Aziz will continue between the two countries
until the month of Shawwal 141 1A.H., corresponding to May 1991.
The two parties may, at the end of this period, submit the matter to
the International Court of Justice in accordance with the Bahraini
formula, which the State of Qatar has accepted, and with the pro-

cedures consequent on it. The good offices of the Kingdom of
Saudi Arabia will continue during the period when the matter is
under arbitration.
3. If a brotherly solution acceptable to the two parties is reached,
the case will be withdrawn from arbitration."

20. The good offices of King Fahd did not lead to the desired outcome
within the time-limit thus fixed, and on 8 July 1991Qatar instituted pro-
ceedings before the Court against Bahrain

"in respect of certain existing disputes between them relating to sov-ministres des affaires. étrangèresde Bahreïn, de Qatar et d'Arabie saou-
dite signèrent un prcicès-verbalconstatant que, ((dans le cadre des bons
offices du roi Fahd Ben Abdul Aziz», des consultationsconcernant le dif-
férendexistant entre Bahreïn et Qatar avaient eu lieu entre les ministres
des affaires étrangères de ces deux Etats en présence du ministre des
affaires étrangères d'Arabie saoudite.

Ce procès-verbal a étérédigé enarabe; les traductions en anglais four-
nies par les Parties dLivergentsur certains points. La traduction en fran-
çais du texte anglais fourni par Qatar est la suivante:
[Truciuction du GrrJfe]

((11a été convenude ce qui suit:
1)réaffirmerce dont les deux parties étaient convenues précédem-

ment ;
2) poursuivre les bons offices exercésentre les deux pays par le
Serviteur des deux Lieux saints, le roi Fahd Ben Abdul Aziz, jus-
qu'au mois de chawwal 141 1 de l'hégire,correspondant au mois
de mai de I'ann'ie 1991. A l'expiration de ce délai, les parties pour-
ront soumettre la question à la Cour internationale de Justice con-
formément à la formule bahreïnite. qui a étéacceptéepar Qatar, et à

la procédure qui en résulte. Les bons offices de l'Arabie saoudite se
poursuivront pe.ndant que la question sera soumise à l'arbitrage;
3) si l'on parvient à une solution fraternelle acceptable par les
deux parties, l'affaire sera retiréede l'arbitrage.))

La traduction en français du texte anglais fourni par Bahreïn se lit comme
suit:
( Truhlction du GrclfJf]

« Ila étéconvenu de ce qui suit:
1. Réaffirmer ce dont les deux parties étaient convenues précé-

demment.
2. Les bons offices du Serviteur des deux Lieux saints, le roi Fahd
b. Abdul Aziz, :sepoursuivront entre les deux pays jusqu'au mois de
chawual 141 1de l'hégire,correspondant à mai 1991. Les deux par-
ties pourront. AIl'expiration de ce délai, soumettre la question à la
Cour internationale de Justice conformément à la formule bahreï-
nite, que 1'Etat de Qatar a acceptée. et aux procédures qui en dé-

coulent. Les bons offices du Royaume de l'Arabie saoudite se pour-
suivront pendant que la question sera soumise à l'arbitrage.

3. Si l'on parvient à une solution fraternelle acceptable par les
deux parties, l'affaire sera retiréede l'arbitrage.))

20. Les bons offi,cesdu roi Fahd n'aboutirent pas dans le délai ainsi
fixéet Qatar, le 8 juillet 1991, introduisit devant la Cour une instance
contre Bahreïn

«au sujet de certains différends existant entre eux relativement à la120 MARITIME DELIMITATION AND TERRITORIAL QUESTIONS (JUDGMENT)

ereignty over the Hawar islands, sovereign rights over the shoals of
Dibal and Qit'at Jaradah, and the delimitation of the maritime areas
of the two States".

According to Qatar, the two States:
"have made express commitments in the agreements of Decem-

ber 1987 . . .and December 1990 . . .,to refer their disputes to the
. .. Court".
As both Parties had "given their requisite consent through the interna-

tional agreements referred to above", Qatar considers that the Court has
been enabled "to exercise jurisdiction to adjudicate upon those disputes"
and, as a consequence, upon the Application of Qatar.
Bahrain maintains on the contrary that the 1990 Minutes do not con-
stitute a legally binding instrument. It goes on to say that, in any event,

the combined provisions of the 1987exchanges of letters and of the 1990
Minutes were not such as to enable Qatar to seise the Court unilaterally.
It emphasizes in this respect that a preliminary version of the 1990 Min-
utes provided that "Either of the two parties" should be entitled to seise
the Court, and that, on the insistence of Bahrain, this text was modified
to permit of such seisin only by "the two parties". From this Bahrain

concludes that the Court lacks jurisdiction to deal with the Application
of Qatar.

21. The Court will first enquire into the nature of the texts upon which

Qatar relies before turning to an analysis of the content of those texts.
22. The Parties agree that the exchanges of letters of December 1987
constitute an international agreement with binding force in their mutual
relations. Bahrain however maintains that the Minutes of 25 Decem-
ber 1990 were no more than a simple record of negotiations, similar in
nature to the Minutes of the Tripartite Committee; that accordingly they

did not rank as an international agreement and could not. therefore,
serve as a basis for the jurisdiction of the Court.
23. The Court would observe, in the first place, that international
agreements may take a number of forms and be given a diversity of
names. Article 2, paragraph (1) (LI),of the Vienna Convention on the

Law of Treaties of 23 May 1969 provides that for the purposes of that
Convention,
" 'treaty' means an international agreementconcluded between States
in written form and governed by international law, whether em-

bodied in a single instrument or in two or more related instruments
and whatever its particular designation".
Furthermore, as the Court said, in a case concerning a joint commu-

niqué,
"it knows of no rule of international law which might preclude a DÉLIMITATION MARITIME ET QUESTIONS TERRITORIALES (ARRET) 120

souveraineté sur les îles Hawar, aux droits souverains sur les hauts-
fonds de Dibal et de Qit'at Jaradah et à la délimitation des zones
maritinies entre les deux Etatsn.

Selon Qatar, les deux Etats:
«se sont l'un et l'autre expressément engagés,dans leurs accords de
décembre 1987 ...et de décembre 1990 ...,à soumettre leurs diffé-

rends a la COLI^)).
Les deux Parties ayant «donné leur consentement par les accords inter-
nationaux susvisés)),Qatar considère que la Cour est en mesure «dlexer-
cer sa compétence pour se prononcer sur ces différends))et par voie de

conséquence sur sa requête.
Bahreïn soutient au contraire que le procès-verbal de 1990ne constitue
pas un instrument juridiquement contraignant. Il ajoute qu'en tout état
de cause les dispositions combinées des échanges de lettres de 1987 et du
procès-verbal de 1990 ne permettaient pas Qatar de saisir unilatérale-

ment la Cour. A cet effet Bahreïn souligne que, dans une première ver-
sion, le procès-verbal de 1990 donnait à ((l'une ou l'autre des deux par-
ties)) le droit de saisir la Cour et que, sur ses instances, ce texte a été
modifiépour ne permettre une telle saisine que par ((les deux parties)).
Bahreïn en déduitque la Cour n'est pas compétente pour connaître de la
requêtede Qatar.

21. La Cour s'interrogera en premier lieu sur la nature des textes invo-
quéspar Qatar, puis elle entamera l'analyse de leur contenu.
32. Les Parties sointd'accord pour considérerles échangesde lettres de
décembre 1987 comme constituant un accord international ayant force
obligatoire dans leurs relations mutuelles. Bahreïn soutient en revanche

que le procès-verbal du 35 décembre 1990 n'est qu'un simple compte
rendu de négociation, analogue aux procès-verbaux de la commission tri-
partite, qu'il n'a par suite pas valeur d'accord international et qu'il ne
saurait dès lors fournir de base à la compétence de la Cour.
23. La Cour observera en premier lieu qu'un accord international peut

prendre des formes variées et se présenter sous des dénominations di-
verses. Le paragraphe 1 a) de l'articl2 de la convention de Vienne sur le
droit des traités du 23 mai 1969 dispose qu'aux fins de cette convention

(cl'expression «i:raité»s'entend d'un accord international conclu par
écritentre Etat:; et régipar le droit international, qu'il soit consigné
dans un instrurnent unique ou dans deux ou plusieurs instruments
connexes. et quelle que soit sa dénomination particulière)).

Par ailleurs, comml: la Cour l'a noté dans le cas d'un communiqué
conjoint,

«il n'existe pa:i de règle de droit international interdisant qu'un121 MARITIME nELlMlTATlO AND TERRITORIAL QUESTIONS (JUDGMENT)

joint communiqué from constituting an international agreement to
submit a dispute to arbitration or judicial settlement" (AegeanSru
Continenttrl Shelf; Judgrnent. 1.J. Reports IY78, p. 39, para. 96).

In order to ascertain whether an agreement of that kind has been con-
cluded, "the Court must have regard above al1to its actual terms and to
the particular circumstances in which it was drawn up" (ihid.).
24. The 1990 Minutes refer to the consultations between the two
Foreign Ministers of Bahrain and Qatar, in the presence of the Foreign

Minister of Saudi Arabia, and state what had been "agreed" between the
Parties. In paragraph 1 the commitments previously entered into are re-
affirmed (which includes, at the least, the agreement constituted by the
exchanges of letters of December 1987).In paragraph 2, the Minutes pro-
vide for the good offices of the King of Saudi Arabia to continue

until May 1991, and exclude the submission of the dispute to the Court
prior thereto. The circumstances are addressed under which the dispute
may subsequently be submitted to the Court. Qatar's acceptance of the
Bahraini formula is placed on record. The Minutes provide that the
Saudi good offices are to continue while the case is pending before the
Court, and go on to Say that, if a compromise agreement is reached

during that time, the case is to be withdrawn.
25. Thus the 1990 Minutes include a reaffirmation of obligations pre-
viously entered into; they entrust King Fahd with the task of attempting
to find a solution to the dispute during a period of six months; and,
lastly, they address the circumstances under which the Court could be

seised after May 1991.
Accordingly, and contrary to the contentions of Bahrain, the Minutes
are not a simple record of a meeting, similar toose drawn up within the
framework of the Tripartite Committee; they do not merely give an
account of discussions and summarize points of agreement and disagree-
ment. They enumerate the commitments to which the Parties have con-

sented. They thus create rights and obligations in international law for
the Parties. They constitute an international agreement.
26. Bahrain however maintains that the s"gnatories of the Minutes
never intended to conclude an agreement of this kind. It submitted a
statement made by the Foreign Minister of Bahrain and dated

21 May 1992, in which he States that "at no time did 1consider that in
signing the Minutes 1was committing Bahrain to a legally binding agree-
ment". He goes on to Saythat, according to the Constitution of Bahrain,
"treaties 'concerning the territory of the State'n come into effect only
after their positive enactment as a law". The Minister indicates that he
would therefore not have been permitted to sign an international agree-

ment taking effect at the time of the signature. He was aware of that situ-
ation, and was prepared to subscribe to a statement recording a political
understanding, but not to sign a legally binding agreement.
27. The Court does not find it necessary to consider what might have DELIMITATION MARITIME ET QUtSTlONS TERRITORIALES (ARRÈT)
121

communiqué conjoint constitue un accord international destiné à
soumettre un différend à l'arbitrage ou au règlement judiciaire))
(Pluteuu continental de lu rner Egée, urrêt, C.I.J. Recueil 1978,
p. 39, par. 96).

En vue de déterminer si un tel accord a été conclu,«la Cour doit tenir
compte avant tout 'destermes employés et des circonstances dans les-
quelles le communiqué a étéélaboré))(ibid. j.
24. Le procès-verbal de 1990 vise les consultations menées entre les
deux ministres des affaires étrangères de Bahreïn et de Qatar en présence

du ministre des affaires étrangères d'Arabie saoudite. Il énonce ensuite ce
dont il a été((convenu)) entre les Parties. Il réaffirmeen son paragraphe 1
les engagements antférieurementsouscrits (ce qui couvre à tout le moins
l'accord constitué par les échanges de lettres de décembre 1987). Il dis-
pose en son paragraphe 2 que le roi d'Arabie saoudite poursuivra ses
bons offices jusqu'en mai 1991, et exclut qu'auparavant le différend soit

soumis à la Cour. Il traite des conditions dans lesquelles le différend
pourra ultérieurement être porté devantla Cour. Puis il note I'accepta-
tion par Qatar de la formule bahreïnite. II dispose que les bons offices de
l'Arabie saoudite se poursuivront pendant que l'affaire sera pendante
devant la Cour et ajoute que, si un compromis est alors trouvé, l'affaire
sera retiréedu rôle (le la Cour.

25. Le procès-verbal de 1990 comporte donc le rappel d'obligations
passées;il confie au roi Fahd le soin de tenter de trouver une solution au
différend dans un délai de six mois; iltraite enfin des conditions dans
lesquelles la Cour pourra êtresaisie après mai 1991.

Ainsi. et contrairement à ce que soutient Bahreïn, cet instrument n'est
pas un simple compte rendu de réunion, analogue à ceux établisdans le
cadre de la commission tripartite. Il ne se borne pas à relater des discus-
sions et à résumer des points d'accord et de désaccord. 11énumèreles
engagements auxquels les Parties ont consenti. Il créeainsi pour les Par-
ties des droits et des obligations en droit international. Il constitue un

accord international.
26. Bahreïn fait cependant valoir que les signataires du procès-verbal
n'ont jamais eu l'intention de conclure un accord de cette nature. 11pro-
duit à cet effet une déclaration de son ministre des affaires étrangères,
datéedu 21 mai 1992, par laquelle l'intéressé précise: «à aucun moment
je n'ai estiméqu'en signant le procès-verbal j'engageais Bahreïn par un

accord obligatoire en droit)). Le ministre ajoute que, selon la Constitu-
tion de Bahreïn, les ((traités((relatifs au territoire de I'Etatn ne peuvent
entrer en vigueur qu'après avoir été effectivementadoptés comme des
lois)). II indique qu'il n'aurait dès lors pas eu qualité pour signer un
accord international prenant effet à la signature. Conscient de cette situa-
tion, il aurait étéprêt à souscrire à une déclaration consignant une

entente politique, miaisnon à un accord juridiquement contraignant.
27. La Cour n'estime pas nécessairede s'interroger sur ce qu'ont pubeen the intentions of the Foreign Minister of Bahrain or, for that mat-
ter, those of the Foreign Minister of Qatar. The two Ministers signed a
text recording commitments accepted by their Governments, some of
which were to be given immediate application. Having signed such a text,
the Foreign Minister of Bahrain is not in a position subsequently to Say

that he intended to subscribe only to a "statement recording a political
understanding", and not to an international agreement.

28. Bahrain however bases its contention, that no international agree-
ment was concluded, also upon another argument. It maintains that the

subsequent conduct of the Parties showed that they never considered the
1990 Minutes to be an agreement of this kind; and that not only was this
the position of Bahrain, but it was also that of Qatar. Bahrain points out
that Qatar waited until June 1991before it applied to the United Nations
Secretariat to register the Minutes of December 1990under Article 102 of
the Charter; and moreover that Bahrain objected to such registration.

Bahrain also observes that, contrary to what is laid down in Article 17of
the Pact of the League of Arab States, Qatar did not file the 1990 Min-
utes with the General Secretariat of the League; nor did it follow the pro-
cedures required by its own Constitution for the conclusion of treaties.
This conduct showed that Qatar, like Bahrain, never considered the 1990
Minutes to be an international agreement.

29. The Court would observe that an international agreement or treaty
that has not been registered with the Secretariat of the United Nations
inay not, according to the provisions of Article 102 of the Charter, be
invoked by the parties before any organ of the United Nations. Non-
registration or late registration, on the other hand, does not have any con-

sequence for the actual validity of the agreement, which remains no less
binding upon the parties. The Court therefore cannot infer from the fact
that Qatar did not apply for registration of the 1990 Minutes until six
months alter they were signed that Qatar considered, in December 1990,
that those Minutes did not constitute an international agreement. The
same conclusion follows as regards the non-registration of the text with

the General Secretariat of the Arab League. Nor is there anything in the
material before the Court which would justify deducing from any dis-
regard by Qatar of its constitutional rules relating to the conclusion of
treaties that it did not intend to conclude, and did not consider that it
had concluded, an instrument of that kind; nor could any such intention,

even if shown to exist, prevail over the actual terms of the instrument in
question. Accordingly Bahrain's argument on these points also cannot be
accepted.
30. The Court concludes that the Minutes of 25 December 1990, like
the exchanges of letters of December 1987, constitute an international
agreement creating rights and obligations for the Parties. DELIMITATIO MARITIME ET QUESTIONS TERRITORIALES (ARRET) 122

êtreles intentions du ministre des affaires étrangères de Bahreïn, comme
d'ailleurs celles du ministre des affaires étrangèresdeQatar. En effet, les

deux ministres ont signéun texte consignant des engagements acceptés
par leurs gouvernements, et dont certains devaient recevoir immédiate-
ment application. Ayant signéun tel texte, le ministre des affaires étran-
gères de Bahreïn ne saurait soutenir ultérieurement qu'il n'entendait
souscrirequ'à une ((dléclarationconsignant une entente politique)), et non

à un accord international.
78. Bahreïn contente cependant encore qu'un accord international ait
étéconclu. en développant une autre argumentation. Selon lui, la con-
duite ultérieuredes Parties démontrerait qu'elles n'ont jamais considéréle
procès-verbal de 19910comme un accord de cette nature. Telle aurait été

non seulement la position de Bahreïn. mais encore celle de Qatar. Bahreïn
expose en effet que Qatar a attendu juin 1991 pour demander au Secré-
tariat de l'organisation des Nations Unies d'enregistrer le procès-verbal de
décembre 1990 par kipplication de l'article 102 de la Charte, enregistre-
ment auquel Bahreïn a d'ailleurs fait objection. Bahreïn ajoute que. con-

trairement aux presci-iptions de l'article 17du pacte de la Ligue des Etats
arabes, Qatar n'a pas déposéle procès-verbal de 1990au Secrétariatgéné-
ral de celle-ci; etqui'il n'a pas davantage suivi les procédures requises
par sa propre Constitution pour la conclusion des traités. Ce comporte-

ment établirait que Qatar, comme Bahreïn, n'ajamais considéréle procès-
verbal de 1990 comme un accord international.
29. La Cour observera qu'un traité ou accord international non enre-
gistréauprès du Secrétariat de l'organisation des Nations Unies ne peut,
selon les dispositionij de l'article 102 de la Charte, être invoquépar les

parties devant un organe de l'organisation des Nations Unies. Le défaut
d'enregistrement ou I'enregistrement tardif est en revanche sans consé-
quence sur la validité,mêmede l'accord. qui n'en lie pas moins les parties.
Dès lors la Cour ne saurait déduire de la circonstance que Qatar ait sol-
licitéI'enregistrement du procès-verbal de 1990 six mois seulement après

sa signature que cet Etat considérait, en décembre1990,ledit procès-verbal
comme ne constituant pas un accord international. La même conclusion
s'impose s'agissant dludéfaut d'enregistrement de l'instrument au Secré-
tariat généralde la Ligue des Etatsarabes. La Cour ne trouve par ailleurs
pas d'élémentau dossier qui lui permettrait de déduirede la méconnais-

sance éventuellepar Qatar de ses règlesconstitutionnelles relatives à la
conclusion des traité:;que celui-ci n'avait pas l'intention de conclure ou ne
considérait pas avoir conclu un instrument de cette nature; et une telle
intention, mêmesi clle était établie,ne saurait prévaloir sur les termes
mêmesde l'instrument concerné. Dèslors l'argumentation de Bahreïn sur

ces points ne peut davantage être acceptée.
30. La Cour arrive à la conclusion que le procès-verbal du 25 décembre
1990, comme les éch~anged se lettres de décembre 1987, constitue un ac-
cord interiTational créant des droits et des obligations pour les Parties.123 MARITIME DELIMITATION AND TERRITORIAL QUESTIONS (JUDGMENT)

31. Turning now toan analysis of the content of these texts, and of the

rights and obligations to which they give rise, the Court would first
observe that, by the exchanges of letters of December 1987 quoted in
paragraph 17 above, Bahrain and Qatar agreed that

"All the disputed matterç shall be referred to the International
Court of Justice, at The Hague, for a final ruling binding upon both
parties, who shall have to execute its terms."

The same exchanges of letters constituted a Tripartite Committee

"for the purpose of approaching the International Court of Justice,
and satisfying the necessary requirements to have the dispute sub-
mitted to the Court".

The Parties thus entered into an undertaking to refer al1 the disputed
matters to the Court and to determine. with the assistance of Saudi
Arabia, the way in which the Court was to be seised in accordance with

the undertaking thus given.
32. The determination of the "disputed matters" was the subject of
lengthy negotiations at meetings of the Tripartite Committee. Those
negotiations were unsuccessful in 1988and the question was only settled
by the Minutes of December 1990. Those Minutes placed on record the
fact that Qatar had finally accepted the Bahraini formula. Both Parties

thus accepted that the Court, once seised, should decide "any matter of
territorial right or other title or interest which may be a matter of differ-
ence between [the Parties]"; and should "draw a single maritime bound-
ary between their respective maritime areas of seabed, subsoil and super-
jacent waters".
33. The formula thus adopted determined the limits of the dispute
with which the Court would be asked to deal. It was devised to circum-

scribe that dispute, but,'whatever the manner of seisin, it left open the
possibility for each of the Parties to present its own claims to the Court,
within the framework thus fixed. For example, it permitted Qatar to
present its claims in respect of the Hawar islands, just as it permitted
Bahrain to present its claims in respect of Zubarah. However, while the
Bahraini formula permitted the presentation of distinct claims by each of

the Parties, it nonetheless presupposed that the whole of the dispute
would be submitted to the Court.
34. The Court notes that at present it has before it solely an Applica-
tion by Qatar setting out the particular claims of that State within the
framework of the Bahraini formula. Article 40 of the Court's Statute,
which provides that cases are brought before the Court "either by the

notification of the special agreement or by a written application", also
provides that, "In either case the subject of the dispute and the parties
shall be indicated." These indications are thus requirements common to 31. Abordant maintenant l'analyse du contenu de ces textes, ainsi que
des droits et des obligations qu'ils engendrent, la Cour observera en pre-
mier lieu que, par les échangesde lettres de décembre 1987citésau para-

graphe 17 ci-dessus, Bahreïn et Qatar sont convenus que:

((Toutes les questions en litige seront soumises à la Cour interna-
tionale de Justice, à La Haye, pour qu'elle rende une décisiondéfi-
nitive et obligatoire pour les deux parties, qui devront en exécuterles
dispositions. »

Les mêmes échangesde lettres constituaient une commission tripar-
tite

<<envue d'entrer en rapport avec la Cour internationale de Justice et

d'accomplir les formalités requises pour que le différend soitsoumis
à la Cour)).

Les Parties avaient ainsi pris l'engagement de soumettre toutes les ques-
tionsen litige à la Cour et de déterminer, avec l'aide de l'Arabie saoudite,
les formes dans lesqiielles la Cour devait êtresaisie conformément à I'en-
gagement ainsi souscrit.

32. La détermination des ((questionsen litige)) fit l'objet de longues
négociations au sein de la commission tripartite. Celles-ci n'aboutirent
pas en 1988 et la quiestion ne fut régléeque par le procès-verbal de dé-
cembre 1990.Celui-ci a pris note du fait que Qatar a en définitiveaccepté
la formule bahreïnite. Ainsi, les deux Parties ont acceptéque la Cour, une

fois saisie, tranche (otoute question relative à un droit territorial ou à tout
autre titre ou intérêiq.ui peut faire l'objet d'un différend entre [les Par-
ties]));et trace «une limite maritime unique entre leurs zones maritimes
respectives, compreriant les fonds marins, le sous-sol et les eaux surja-
centes >).
33. La formule ainsi agrééefixait les limites du différenddont la Cour

aurait à connaître. Elle avait pour but de circonscrire ce différend. mais,
quel que soit le mode de saisine, elle laissait à chacune des Parties la pos-
sibilitéde présenter ;lla Cour ses propres prétentions dans le cadre ainsi
fixé.Par exemple, elle permettait à Qatar de présenter ses prétentions
concernant les îles Hiawar, comme elle permettait à Bahreïn de présenter

les siennes concernant Zubarah. Mais si la formule bahreïnite permettait
la présentation par chacune des Parties de prétentions distinctes, elle n'en
supposait pas moins que l'ensemble du différend soit soumis à la Cour.

34. La Cour not'e que pour l'instant elle dispose seulement d'une
requêtede Qatar exposant les prétentions spécifiquesde cet Etat dans le

cadre de la formule bahreïnite. L'article 40 du Statut, qui stipule que les
affaires sont portéesdevant la Cour «soit par notification du compromis,
soit par une requête)),prévoiten outre que, «dans les deux cas, l'objet du
différend et les parties doivent êtreindiqués)).Ces indications sont donc
des conditions comrnunes aux deux modes de saisine de la Cour. Elles 124 MARITIME DELIMITATION ANI> T1:RRITORIAL QUESTIONS (JUDCMENT)

both modes of approach to the Court. They are also laid down in the
Rules of Court in Article 38 for cases instituted by application; and in
Article 39 for notification of a special agreement. In the present case the
identity of the parties presents no difficulty; but the subject of the dispute

is another matter.
35. What, then, is "the subject of the dispute" referred to in Qatar's
Application? That Application only presents the questions which Qatar
would like the Court to decide. Qatar's "requests" in its Application are
thus as follows:

"Reserving its right to supplement or amend its requests, the State
of Qatar requests the Court:

1. To adjudge and declare in accordance with international law
(A) that the State of Qatar has sovereignty over the Hawar
islands: and.

(B) that the State of Qatar has sovereign rights over Dibal and
Qit'at Jaradah shoals;
and

II. With due regard to the line dividing the sea-bed of the two States
as described in the British decision of 23 December 1947, to
draw in accordance with international law a single maritime

boundary between the maritime areas of sea-bed. subsoil and
superjacent waters appertaining respectively to the State of Qatar
and the State of Bahrain."

36. In argument before the Court it was made abundantly clear by
Bahrain that in its view the Qatar Application comprises only some of
the elements of the subject-matter intended to be comprised in the Bah-

raini formula; in particular there is the omission of any reference to a
dispute over Zubarah to which Bahrain attaches importance, though this
is not the sole subject of its concern. The fact that the subject-matter of
Qatar's Application corresponds to only part of the dispute contem-
plated by the Bahraini formula was in effect acknowledged by Qatar,

which invited Bahrain to remedy the matter by bringing a separate appli-
cation or a counter-claim respecting, for example. Zubarah.
37. As early as 1983,the Parties, when adopting the "Principles for the
Framework for Reaching a Settlement" (to which reference was made in
the 1987 agreement) had agreed that

"All issues of dispute between the two countries, relating to sov-
ereignty over the islands, maritime boundaries and territorial waters,

are to be considered as complementary, indivisible issues, to be
solved comprehensively together."

The 1987 agreement provides that "All the disputed matters shall be DÉ~.IMITATIOI\I MARITIME ET QUESTIONS TERRITORIALE(ARRÈT) 124

sont également prescritespar le Règlement: à l'article 38, pour les affaires
introduites par voie de requête;et A l'article 39, dans le cas de notification
d'un compromis. En l'espèce,l'identitédes parties ne soulèvepas de pro-

blème, mais il en va autrement de I'objet du différend.

35. Quel est, en I'isccurrence,«l'objet du différend>mentionné dans la
requêtede Qatar? Cette requête expose uniquement les questions que
Qatar entend voir trancher par la Cour. Les ((demandes)) formuléespar
Qatar dans sa requêtesont en effet les suivantes:

«Se réservant le droit de compléter ou de modifier ses demandes,
1'Etat de Qatar prie la Cour de:

1. Dire et juger conformément au droit international
A) que 1'Etat de Qatar a souveraineté sur les îles Hawar; et

B) que 1'Ei.atde Qatar a des droits souverains sur les hauts-
fonds di: Dibal et de Qit'at Jaradah;
et

II. Compte dûrnent tenu de la ligne de partage des fonds marins des
deux Etats décritedans la décisionbritannique du 23 décembre
1947,tracer conformément au droit international une limite mari-

time uniqui: entre les zones maritimes comprenant les fonds
marins, le sous-sol et les eaux surjacentes qui relèvent respecti-
vement de 1'Etat de Qatar et de 1'Etat de Bahreïn.))

36. Devant la Cour, Bahreïn a clairement exprimé l'opinion que la
requêtede Qatar ne comprend que certains des éléments constitutifs de

I'objet du litige que la formule bahreïnite était censéecouvrir; la requête
omet en particulier toute référenceà un différend concernant Zubarah,
auquel Bahreïn attache de l'importance, bien qu'il ne s'agisse pas de son
seul sujet de préocciqation. Qatar a en fait reconnu que sa requêtene
porte que sur une partie du différend visépar la formule bahreïnite et a
invité Bahreïnà réglerla question en présentant une requête distincteou

une demande reconventionnelle portant. par exemple, sur Zubarah.

37. Or, dès 1983, les Parties, en approuvant les ((principes pour un
cadre de règlement)), auxquels il a étéfait référencedans l'accord
de 1987. étaient convenues que:

((Toutes les questions en litige entre les deux Etats au sujet de la

souveraineté sur les îles, des frontières maritimes et des eaux territo-
riales doivent étre considéréescomme des questions complémen-
taires formant un tout indivisible qui doit faire l'objet d'un règlement
d'ensemble. »

L'accord de 1987 prévoit que «toutes les questions en litige seront sou-125 MARITIME DELIMITATION AND TERRITORlAL QUESTIONS (JUDGMENT)

referred to the International Court of Justice, at The Hague, . . .".The
1990 Minutes refer to the "matter" (in the singular) being submitted to
the International Court of Justice; they also refer to the "matter" being

submitted to arbitration. Finally they provide that if the good offices of
the King of Saudi Arabia - which were certainly directed to the whole
of the dispute - were successful, "the case will be withdrawn from arbi-
tration". The authors of the Bahraini formula conceived of it with a view
to enabling the Court to be seised of the whole of those questions, as

defined by each of the Parties within the general framework thus adopted.

38. The Court has consequently decided to afford the Parties the
opportunity to ensure the submission to the Court of the entire dispute as
it is comprehended within the 1990Minutes and the Bahraini formula, to

which they have both agreed. Such submission of the entire dispute could
be effected by a joint act by both Parties with, if need be, appropriate
annexes, or by separate acts. Whichever of these methods is chosen, the
result should be that the Court has before it "any matter of territorial
right or other title or interest which may be a matter of difference

between" the Parties, and a request that it "draw a single maritime
boundary between their respective maritime areas of seabed, subsoil and
superjacent waters". This process must be completed within five months
of the date of this Judgment.

39. On the completion thus of the reference of the whole dispute to the
Court, the Court will fix time-limits for the simultaneous filing of plead-
ings, Le., each Party will file a Memorial and then a Counter-Memorial
within the same time-limits.

40. The Court notes that Bahrain has attached importance to a matter
which was referred to in Article V of a draft Special Agreement put for-
ward by Bahrain during the 1988 discussions in the Tripartite Commit-
tee, which Article provided :

"Neither party shall introduce into evidence or argument, or pub-
licly disclose in any manner, the nature or content of proposals

directed to a settlement of the issues [to be referred to the Court], or
responses thereto, in the course of negotiations or discussions
between the parties undertaken prior to the date of this Agreement,
whether directly or through any mediation."

The inclusion of an Article on these lines was objected to by Qatar, and
no such provision appears in the 1990 Minutes. In any event, there is a
rule of customary international law in this domain, defined in 1927by themises à la Cour internationale de Justice, à La Haye, ..)) Le procès-
verbal de décembre 1990 se réfère à la soumission de la ((question)) (au
singulier) a la Cour internationale de Justice; il se réfèrede même a la
soumission de la ((q~iestion))à l'arbitrage. Il ajoute enfin que, si les bons

offices du roi d'Arabie saoudite - qui portaient certainement sur I'en-
semble du différend - aboutissent, ((l'affaire sera retiréede l'arbitrage)).
Les auteurs de la formule bahreïnite l'avaient conçue dans cette perspec-
tive en vue de permettre que la Cour soit saisie de l'ensemble de ces ques-
tions, telles que définiespar chacune des Parties dans le cadre général

ainsi agréé.
38. La Cour a en conséquencedécidéde donner aux Parties l'occasion
de lui soumettre I'erisemble du différend tel qu'il est circonscrit par le
procès-verbal de 1900 et la formule bahreïnite, que toutes deux ont
acceptés.Une telle soumission de l'ensemble du différendpourra résulter

soit d'une démarche conjointe des deux Parties, accompagnée au besoin
d'annexes appropriées, soit de démarches individuelles. Quelle que soit
cependant la méthode ainsi choisie, elle devra avoir pour effet que la
Cour soit saisie de ((toute question relative à un droit territorial ou à tout
autre titre ou intérêqtui peut faire l'objet d'un différendentre)) les Parties

et d'une demande de ((tracer une limite maritime unique entre leurszones
maritimes respective:^ ,omprenant les fonds marins, le sous-sol et les
eaux surjacentes)). Cf: processus devra êtreachevédans les cinq mois sui-
vant le prononce du présent arrêt.
39. Une fois l'ensemble du différend soumis a la Cour, celle-ci fixera

les délaisdans lesquels il sera procédéau dépôtsimultanédes piècesde la
procédure écrite, chaque Partie déposant dans les mêmes délais un
mémoire. puis un contre-mémoire.

40. La Cour observe que Bahreïn a accordé de l'importance a une

question abordée à l'articleV d'un projet de compromis proposé par lui
au cours des discussions tenues en 1988 au sein de la commission tripar-
tite; le texte de cetaiticle se lisait comme suit:

«Ni l'une ni l'autre des parties n'invoquera comme moyen de
preuve ou comme argument, ni ne révélerapubliquement de quelque
manière que ce soit, la nature ou le contenu de propositions ten-

dant à un règlement des questions [à porter devant la Cour], ou de
réponses à ces propositions, faites au cours de négociations ou de
discussions menties entre les parties avant la date du présent com-
promis, soit directement soit iitravers une médiation. ))

Qatar s'est opposéà l'adoption d'un tel articleet aucune disposition de ce

genre ne figure dans le procès-verbal de 1990. En tout état de cause, il
existe en ce domaine une règle de droit international coutumier que laPermanent Court of International Justice, namely that the Court cannot
take account of declarations, admissions or proposais which the parties
may have made in the course of direct negotiations when the negotiations
in question have not led to an agreement between the parties (Fuctorj ut

Chorzdit., Juri.~dic~tiotP..C.1.J., Seric)sA, No. 9, p. 19; see also Frrcto~y
~rfClrovidii. (Ckuitrrji~r Itrci'etvîrzi!, crit.~,P.C.I.J., Scri(~.A, No. 17,
pp. 5 1,62-63). The continued existence of the rule was recognized by the
Chamber formed to deal with the case concerning the Lund, Islunclclnt1
Muritit~le Fvontirr Disputc~ (El S~~~vcrdor/Honr/ur~rN .i; .crrrrguinter-

ijcning), which commented as follows on the dictuin of the Permanent
Court:

"This observation . . . refers to the common and laudable prac-
tice - which, indeed, is of the essence of negotiations - whereby
the parties to a dispute, having each advanced their contentions in
principle, which thus define the extent of the dispute, proceed to ven-

ture suggestions for mutual concessions, within the extent so defined,
with a view to reaching an agreed settlement. If no agreement is
reached, neither party can be held to such suggested concessions."
(1.C.J. Rf2/~orts1993, p. 406, para. 73.)

41. For these reasons,

(1) By 15 votes to 1,

Fitltls that the exchanges of letters between the King of Saudi Arabia
and the Amir of Qatar dated 19and 21 December 1987,and between the
King of Saudi Arabia and the Amir of Bahrain dated 19 and 26 Decem-
ber 1987, and the document headed "Minutes" and signed at Doha on

25 December 1990 by the Ministers for Foreign Affairs of Bahrain, Qatar
and Saudi Arabia, are international agreements creating rights and obli-
gations for the Parties:

INFAVOLIR: P~~,.sf~leBtletdjaoui; Vir~c~Prc,.si~cnhtwebel; J~r(1g.ir Robert
Jennings. Tarassov, Guillaume,Shahabuddeen, Aguilar Mawdsley, Weera-
mantry. Ranjeva, Herclegh, Shi. Fleischhauer, Koroma: Juclgcsad hoc
Valticos, Ruda:
AG!\INST: J11(1gOcda.

(2) By 15 votes to 1,

Fintl.sthat by the terms of those agreements the Parties have under-
taken to submit to the Court the whole of the dispute between them, as

circumscribed by the text proposed by Bahrain to Qatar on 76 Octo-Cour permanente de Justice internationale a énoncéeen 1927 en préci-
sant qu'elle ne saurait faire état des déclarations, admissions ou proposi-
tions qu'ont pu faire les parties au cours des négociations directes qui ont
eu lieu entre elles, lorsque les négociationsen question n'ont pas abouti à

un accord entre les parties (Usitic) (1. Cl1orroii~,c.or?il)c;tt.r~c.r.,P.J.I.
sc;rieAn" Y. p. 19;voir aussi Usirlc (1.Cl~orzriiit(rlr~nlrrr~elc~itlrl~n~rlitc;),
/on(/. C.P. J.1. .sc;riiino 17, p. 5 1.62-63). La Chambre constituée pour
connaître de l'affaire du Di,ff~rer1ti,fiont(rlicterrcstrcj, iris~rluircct 111rrr.i-
tir?ic.(El Su/rcrr~or/~~~~~~~/~ Nicraru.g;uu (inferi'rtlutlt)) a reconnu la

pérennitéde cette règle et a expliqué comme suit le (/ic.tur~~e la Cour
permanente :

«Cette remarque vise ... la pratique courante et louable - qui de
fait est inhérente aux négociations - selon laquelle les parties à un
différend, ayant chacune présentéses positions de principe, définis-

sant ainsi la portée du différend. en viennent à suggérerdes conces-
sions réciproqu~:~,dans la limite ainsi définie. en vue de parvenir
d'un commun accord à un règlement. Si aucun accord n'est conclu.
aucune des deux parties ne peut êtretenue de faire les concessions
ainsi suggérées.))(C.I.J. Rc.cirei11992. p. 406, par. 73.)

41. Par ces motifs,

1) Par quinze voix contre une,

Dit que les échangesde lettres entre le roi d'Arabie saoudite et l'émir
de Qatar, datées des 19 et 21 décembre 1987. et entre le roi d'Arabie

saoudite et l'émirde Bahreïn. datées des 19 et 26 décembre 1987, ainsi
que le document ii~titulé<<procès-verbal», signé à Doha le 25 dé-
cembre 1990par les ministres des affairesétrangères de Bahreïn, de Qatar
et de l'Arabie saoudite, constituent des accords internationaux créant des
droits et des obligations pour les Parties;

POUR : M. Bedjaoui, Prc;siilc.nt;M. Schwebel, Vice-Prc;siiic~ :rsitr Robert
Jennings. MM. T'arassov. Guillaume.Shahabuddeen, Aguilar Mawdsley.
Weeramantry, Ranjeva. 1-lerczegh.Shi, Fleischhauer. Koroma, jirgcs;
MM. Valticos.Ruda,,jirgcsad hoc:

<.ONTRI : h4. Oda, jl,gil.

2) Par quinze voix contre une,

Dit qu'aux termec;de ces accords les Parties ont pris l'engagement de
soumettre à la Cour l'ensemble du différend qui les oppose, tel que cir-
conscrit dans le texte proposé par Bahreïn à Qatar le 26 octobre 1988, et 127 MARITIME DFLIMITATION AND TERRITORIAL QUESTIONS (JIJDUMENT)

ber 1988, and accepted by Qatar in December 1990, referred to in the
1990 Doha Minutes as the "Bahraini formula";

INFAVOUR P:resirlent Bedjaoui; Vicc-Prc.sir/crltSchwebel;Jlrt/grsir Robert
Jennings, Tarassov. Guillaume, Shahabuddeen, Aguilar Mawdsley.Weera-
mantry, Ranjeva, Herczegh, Shi. Fleischhauer. Koroma; Judges ad hoc
Valticos, Ruda;
AC~AINJ SuTtl:g('Oda.

(3) By 15 votes to 1,

Dccirlrs to afford the Parties the opportunity to submit to the Court
the whole of the dispute;

IN FAVOIJR: Pr(~.~ir/~Btedjaoui; Vicc-Prcsitr'c'tchwebel;Judges Sir Robert
Jennings,Tarassov, Guillaume, Shahabuddeen. Aguilar Mawdsley.Weera-
mantry, Ranjeva, Herczegh, Shi, Fleischhauer. Koroma; Jurlgrs ad hoc
Valticos, Ruda ;

AGAINST :Jurlg~'Oda.

(4) By 15 votes to 1.
Fi.\-rs30 Noveinber 1994as the time-limit within which the Parties are,

jointly or separately, to take action to this end;
IN FAVOUR : Prrsident Bedjaoui ; Viw-Prrsident Schwebel ;Ju(lgrs Sir Robert
Jennings. Tarassov. Guillaume. Shahabuddeen. Aguilar Mawdsley.Weera-
mantry, Ranjeva, Herczegh. Shi. Fleischhauer, Koroma; Jlrr/gesad hoc

Valticos, Ruda :
.~C;AINSJT~:rdgeOda.

(5) By 15 votes to 1,

Reserves any other matters for subsequent decision.
INFAVO~R P:resirlent Bedjaoui; L'i<~e-Pre.sit~crlhtwebel;Judgrs Sir Robert
Jennings, Tarassov, Guillaume. Shahabuddeen, Aguilar Mawdsley, Weera-
mantry, Ranjeva, Herczegh, Shi, Fleischhauer,Koroma; Judges ad hoc
Valticos, Ruda ;

AG41NST: Jlltig~'Oda.

Done in English and in French, the English text being authoritative, at

the Peace Palace. The Hague, this first day of July, one thousand nine
hundred and ninety-four, in three copies, one of which will be placed in
the archives of the Court and the others transmitted to the Government
of the State ofQatar and theCovernment of the State of Bahrain, respec-
tively.

(Signet!) Mohammed BEDJAOUI,
President.

(Sigilrd) Eduardo VALENCIA-OSPINA,

Registrar.accepté par Qatar en décembre 1990, que le procès-verbal de Doha

de 1990 dénomme 1i«formule bahreïnite » ;
PWR: M. Bedjaoui. Prc;.~i(/cnt;M. Schwebel. Vicx~-Prc;si&nt;sir Robert
Jennings, MM. Tarassov. Guillaume, Shahabuddeen. Aguilar Mawdsley,
Weeramantry. R.anjeva. Herczegh. Shi, Fleischhauer. Koroma, ,juges;
MM. Valticos. Ruda. jugcs ad hoc;

CONTRI; :M. Oda, ,/l4gh'('.

3) Par quinze voix contre une.

DPci(/c>de donner aux Parties l'occasion de soumettre à la Cour I'en-
semble du différend:
POUR :M. Bedjaoui. Prc;.ridcvzt:M. Schwebel, Vico-Prc;.sic/cv itsir Robert

Jennings. MM. Irarassov, Guillaume. Shahabuddeen. Aguilar Mawdsley.
Weeramantry, R.anjeva, Herczegh, Shi, Fleischhauer. Koroma. ,jlr,ycs;
MM. Valticos, Ruda.,jirges ad hoc;
CONTK~ M: . Oda, jirgc.

4) Par quinze voix contre une.

F~.YLau 30 novemibre 1994 la date d'expiration du délaidans lequel les
Parties devront agir conjointement ou individuellement à cette fin;

POLIR:M. Bedjaoui. Président: M. Schwebel. Viw-Prc;sident ; sir Robert
Jennings. MM. ITarassov, Guillaume, Shahabuddeen, Aguilar Mawdsley,
Weeramantry. P.anjeva. Herczegh. Shi. Fleischhauer, Koroma, juges;
MM. Valticos, R.uda,,jugc.sad hoc:
CONTRI: :M. Oda, jllg~'.

5) Par quinze voix contre une.

Réscri>e toute autre question pour décision ultérieure.

POLR : M. Bedjaoui. Présiti~nt ; M. Schwebel, Vic,c.-Prc;.sidcws t:ir Robert
Jennings. MM. Tarassov, Guillaume, Shahabuddeen, Aguilar Mawdsley.
Weeramantry, F1.anjeva.Herczegh, Shi. Fleischhauer. Koroma. juge.~:
MM. \'alticos, R.uda, juges ad hoc;
CONTRF :M. Oda, jrrgcJ.

Fait en anglais eten français, le texte anglais faisant foi, au Palais de la
Paix, à La Haye, le premier juillet mil neuf cent quatre-vingt-quatorze, en
trois exemplaires, dont l'un restera déposéaux archives de la Cour et les

autres seront transmis respectivement au Gouvernement de I'Etat de
Qatar et au Gouvernement de 1'Etat de Bahreïn.

Le Président,

(Signé) Mohammed BEDJAOUI.

Le Greffier,

(Signé) Eduardo VALENCIA-OSPINA.128 MARITIMF DELIMITATION AND TLRRITORI4L QUESTIONS (JUDGMENT)

Judge SHAHABUDDEa EpNpends a declaration to the Judgment of the
Court.

Vice-President SCHWEUE and Judge (ilhoc VALTICOaS ppend separate

opiiiions to the Judgment of the Court.

Judge ODAappends a dissenting opinion to the Judgment of the Court.

(Itriri(~//o(/)M.B.

jInititrl/t~E.V.O. DL.LIMITATIM ARITIME ET QU~STIONS TERRITORIALES (ARRET)128

M. SHAHAINJDDEjE uIe,,joint une déclaratiAnl'arrêt.

M. SCHWEBEV I.,ice-Président,et M. V~l.ricos, jughoc,joignent A

l'arrêtles exposésde leur opinion individuelle.

M. ODA,juge, joint à l'arrêtl'exposéde son opinion dissidente.

(Paruphé) M.B.

(Puruphc;) E.V.O.

ICJ document subtitle

Compétence et recevabilité

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Document Long Title

Arrêt du 1<sup>er</sup> juillet 1994

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