1.NTERNATIONAL COURT OF JUSTlCE
REPORTS OF JUDGMENTS,
ADVISORY OPINIONS AND ORDERS
NUCLEAR TESTS CASE
(AUSTRALIA v.FRANCE)
JUDGMENT OF 20 DECEMBER 1974
COUR INTERNATIONALE DE JUSTICE
RECUEIL DES ARRÊTS,
AVLSCONSULTATLFS ET ORDONNANCES
AFFAIRE DES ESSAISNUCLÉAIRES
(AUSTRALIE c. FRANCE) Officia1citatio:
Nuclear Tests(Australiav.France),Judgrnent,
I.C.J.Reports 1974,p.253.
Mode officiel de citatio:
Essais nucléaires(Australiec.France),arrêt,
C.1.J. Recueil 1974,p.253.
Salesnumber :
No de vente: 400 20 DECEMBER 1974
JUDGMENT
NUCLEAR TESTS CASE
(AUSTRALIA v.FRANCE)
AFFAIRE DES ESSAIS NUCLÉAIRES
(AUSTRALIEc. FRANCE) COUR INTERNATIONALE DE JUSTICE
1974
20 décembre 1974 20 décembre
Rôle général
no 58
AFFAIRE DES ESSAIS NUCLÉAIRES
(AUSTRALIE c. FRANCE)
Questions de compétence et de recevabi-itNécessitéd'un examen préalable
portant sur la question essentiellement préliminaire de l'existence d'un diffé-
rend - Exercice d'un pouvoir inhérentde la Cour.
Analyse de la demande formulée dans la requêteet détermination de son
objet - Portéedes i:onclusions et déclarations du demandeur pour la définition
de la demande - Pouvoir de la Cour d'interpréter les conclusi-nsDéclara-
tions publiques faites au nom du défendeuravant et aprèslôture de l'instance.
Les actes unilatéraux comme sources d'obligations juridiques Principe de
la bonnefoi.
Règlement du diférend par l'effet d'une déclaration unilatérale créantune
obligation juridiqu- Le fait que le demandeur n'exerce pas son droit de se
désister n'empêcheas la Courde parvenirà sa propre conclusio- La dispari-
tion du diflérend entraîne celle de l'objet de la dema-deLa Cour ne peut
exercer sacompétence que s'il existe réellement un différendentre lesParties.
Présents:M. LACHS,Président; MM. FORSTERG , ROS,BENGZONP ,ETRÉN,
ONYEAMA,DILLARD,IGNACIO-PINTO DE CASTRO,MOROZOV,
JIMÉNEZ DE ARÉCHAGA si,r Humphrey WALDOCKM , M. NAGEN-
DRA SINGH,RUDA,juges; sir Garfield BARWICKju ,ge ad hoc:
M. AQUARONE G,refier.
En l'affairedes essais nucléaires,
entre
l'Australie,
représentée par
M. P. Brazil, membre du barreau d'Australie, membre du service de
l'Attorney-General d'Australie,
comme agent, assistépar
S. Exc. M. F. J.Blakeney, C.B.E., ambassadeur d'Australie aux Pays-Bas,
comme coagent,
l'honorable Lionel Murphy, Q.C., sénateur, Attorney-General d'Australie,
M. M. H. Byers, Q.C., Solicitor-General d'Australie,
M. E. Lauterpacht, Q.C., membre du barreau d'Angleterre, lecturer à
l'université de Cambridge,
M. D. P. O'Connell, membre des barreaux d'Angleterre, d'Australie et de
Nouvelle-Zélande, professeur de droit international publicà l'université
d'Oxford (chaire Chichele),
comme conseils,
et par
M. H. Messel, directeur de l'écolede physique de l'université de Sydney,
M. D. J. Stevens, directeur du laboratoire australien des radiations,
M. H. Burmester, membre du barreau d'Australie, membre du service de
l'Attorney-General,
M. F. M. Douglas, membre du barreau d'Australie, membre du service de
l'Attorney-General,
M. J. F. Browne, rnembre du barreau d'Australie, fonctionnaire du départe-
ment des affaires étrangères,
M. C. D. Mackenzie, membre du barreau d'Australie, troisième secrétaire
à l'ambassade d'Australie aux Pays-Bas,
comme conseillers,,
la République française,
ainsi composée,
rend l'arrêtsuivant:
1. Par lettre du 9 mai 1973 reçue au Greffe de la Cour le mêmejour l'am-
bassadeur d'Australie aux Pays-Bas a transmis au Greffier une requêteintro-
duisant une instance contre la France au sujet d'un différendportant sur des
essais d'armes nucléaires dans l'atmosphère auxquels le Gouvernement
français procéderait dans l'océanPacifique. Pour établir la compétence de la
Cour, la requête invoquel'article 17 de l'Acte généralpour le règlement paci-
fique des différends internationaux conclu à Genève le 26 septembre 1928,
rapproché de I'article 36, paragraphe 1, et de l'article 37 du Statut de la Cour,
et subsidiairement I'iirticle 36, paragraphe 2, du Statut de la Cour.
2. Conformément à l'article 40, paragraphe 2, du Statut, la requêtea kt6
immédiatement communiquée au Gouvernement français. Conformément au
paragraphe 3 du même article,les autres Etats admis à ester devant la Cour
ont étéinformés de 1.arequête. 3. En application de I'article 31, paragraphe 2, du Statyt, le Gouvernement
australien a désigné letrès honorable sir Garfield Barwick, Chief Justice
d'Australie, pour siégercomme juge ad hoc en I'affaire.
4. Dans une lettre de l'ambassadeur de France aux Pays-Bas datée du
16 mai 1973 et remise par celui-ci au Greffier le mêmejour, le Gouvernement
français a fait savoir que, pour les motifs exposés dans la lettre et dans une
annexe jointe à celle-ci, il estime que la Cour n'a manifestement pas compé-
tence en I'espèce,qu'il ne peut accepter sa juridiction, et qu'en conséquence le
Gouvernement français n'a pas l'intention de désigner un agent et demande a
la Cour d'ordonner que I'affaire soit rayée de son rôle. Le Gouvernement
français n'a pas désigné d'agent.
5. En même temps que la requête introductive d'instance, l'agent de
l'Australie a déposéau Greffe le 9 mai 1973 une demande en indication de
mesures conservatoires fondée sur I'article 33 del'Acte généralde 1928 pour
le règlement pacifique des différends internationaux, I'article 41 du Statut et
I'article 66 du Règlement de la Cour. Par ordonnance du 22juin 1973, la Cour
a indiqué, sur la base de l'article 41 du Statut, certaines mesures conserva-
toires en l'espèce.
6. Par la même ordonnance du 22 juin 1973, la Cour, considérant qu'il
était nécessaire de régler aussi rapidement que possible les questions relatives
à sa compétence et a la recevabilité de la requête, a décidéque les pièces
écrites porteraient d'abord sur ces questions et a fixéla date d'expiration des
délais au 21 septembre 1973 pour le dépôt du mémoire du Gouvernement
australien et au 21 décembre 1973 pour le dépôt du contre-mémoire du
Gouvernement français. Le coagent de l'Australie ayant demandé que soit
prorogé au 23 novembre 1973 le délai dans lequel le mémoire devait être
déposé,la date d'expiration des délaisfixéspar l'ordonnance du 22 juin 1973
a été reportée parordonnancedu 28 août 1973 au 23 novembre 1973 pour le
mémoire du Gouvernement australien et au 19 avril 1974 pour le contre-
mémoire du Gouvernement français. Le mémoire du Gouvernement austra-
lien a étédéposédans ledélaiainsi prorogé et il a étécommuniquéau Gouver-
nement français. Le Gouvernement français n'a pas déposédecontre-mémoire
et, la procédure écrite étant ainsi terminée, l'affaire s'est trouvée en état
le 20 avril 1974,c'est-à-dire le lendemain du jour où expirait ledélaifixépour
le dépôt du contre-mémoire du Gouvernement français.
7. Le 16 mai 1973, le Gouvernement fidjien a déposé auGreffe, conformé-
ment a I'article 62 LIStatut, une requête a fin d'intervention dans l'instance.
Par ordonnance du 12 juillet 1973, la Cour, eu égard a son ordonnance du
22 juin 1973 prescrivant que les pièces écrites porteraient d'abord sur les
questions relatives a sa compétence et à la recevabilité de la requête, a décidé
de surseoir à l'examen de la requête par laquelle le Gouvernement fidjien
demandait à intervenir jusqu'a ce qu'elle eût statué sur ces questions.
8. Le 24juillet 1973, le Greffier a adressé la notification prévue à I'article 63
du Statut aux Etats, autres que les Parties a l'instance, qui existaient encore
et étaient indiqués dans les documents pertinents de la Sociétédes Nations
comme parties a l'Acte généralpour le règlement pacifique des différends
internationaux conclu a Genève le 26 septembre 1928, qui était invoqué dans
la requête comme l'un des fondements de la compétence de la Cour.
9. Les Gouvernemients de l'Argentine, de Fidji, de la Nouvelle-Zélande et
du Pérou ont demandé que les pièces de la procédure écrite soient tenues à leur disposition conformément à l'article 48, paragraphe 2, du Règlement. Les
Parties ont étéconsultées dans chaque cas et, le Gouvernement français
maintenant la position prise dans la lettre du 16 mai 1973 pour refuser
de donner un avis, la Cour, ou le Président, a décidéde faire droit à ces
demandes.
10. Les Parties ayant étédûment averties, des audiences publiques ont eu
lieu les4, 5, 6, 8, 9 et II juillet 1974, durant lesquelles la Cour a entendu
M. P. Brazil, agent de l'Australie, et l'honorable Lionel Murphy, Q.C.,
sénateur,M. M. H. Byers, Q.C., M. E. Lauterpacht, Q.C., et M. D. P. O'Con-
nell, conseils, plaider pour le Gouvernement australien sur les questions
relativesà la compétence de la Cour et à la recevabilité de la requête. Le
Gouvernement français n'étaitpas représentéaux audiences.
11. Dans la procédure écrite,les conclusions ci-après ont étédéposéesau
nom du Gouvernement australien:
dans la requête:
«Le Gouvernement nustralien prie la Cour de dire etjuger que, pour
l'un quelconque ou l'ensemble des motifs exposés ci-dessus ou pour tout
autre motif jugépertinentpar la Cour, la poursuite desessais atmosphéri-
ques d'armes nucléairesdans l'océan PacifiqueSud n'est pas compatible
avec les règles applicables du droit international et
Ordonner
à la République française de ne plus faire de tels essais»
dans le mémoire:
«Le Gouvernement australien s'estime fondé àce que la Cour dise et
juge que:
a) la Cour a compétence pour connaître du différendqui fait l'objet de
la requêtedéposépar le Gouvernement australien le 9 mai 1973;
b) la requêteest recevable. »
12. A l'issue de la procédure orale, les conclusions écrites ci-après ont été
déposéesau Greffe au nom du Gouvernementaustralien:
«Les conclusions finales du Gouvernement australien sont les sui-
vantes:
a) la Cour a compétence pour connaître du différendqui fait l'objet de la
requêtedéposéepar le Gouvernement australien le 9 mai 1973;
b) la requêteest recevable;
Et en conséquence le Gouvernement australien s'estime fondé à ce
que la Cour dise et juge qu'elle a pleine compétence pour connaître de la
requêtede l'Australie sur le fond du différend.»
13. Aucune pièceécrite n'ayant étédéposéepar le Gouvernement français,
et celui-ci ne s'étant pas fait représenterla procédure orale, aucune conclu-
sion n'a étéprise formellement par ce gouvernement. Toutefois l'attitude du
Gouvernement français en ce qui concerne la question de la compétence de
la Cour a étédéfiniedans la lettre précitéede l'ambassadeur de France aux
7Pays-Bas en date du 16 mai 1973, et dans le document qui y était joint en
annexe. La lettre de l'ambassadeur contenait notamment ce passage:
« ainsi qu'ilen a averti le Gouvernement australien, le Gouvernement de
la Républiqueestimeque la Cour n'a manifestementpas compétence dans
cette affaire et qu'il ne peut accepter sa juridiction)).
14. Comme il a été indiqué(paragraphe 4), l'ambassadeur de France
déclarait aussi dans sa lettre du 16 mai 1973 que le Gouvernement
français ((demande respectueusement à la Cour de bien vouloir ordonner
que cette affaire soit rayéede son rôle 1)Au début de l'audience publique
consacrée à la demande en indication de mesures conservatoires qui s'est
tenue le 21 mai 19713l,e Président a annoncé: ((II a étédûmentpris acte de
cette demande ...eitla Cour l'examinera le moment venu, conformément
à l'article 36, paragraphe 6, de son Statut.)) Dans son ordonnance du
22 juin 1973, la Cour a dit que, pour les raisons énoncéesdans cette
ordonnance, elle ne pouvait ((faire droit, au stade actuelde la procédure, ))
à la demande du Gouvernement français. Ayant eu depuis lors la possibi-
litéd'examiner cette demande compte tenu de la suite de la procédure, la
Cour estime que la présente affaire n'est pas de celles auxquelles il con-
viendrait d'appliquer la procédure sommaire de radiation du rôle.
15. 11est regrettable que le Gouvernement français ne se soit pas
présentépour développerses argumentssur lesquestionsqui seposent en la
phase actuelle de la procédure et qu'ainsi la Cour n'ait pas eu l'aide que
l'exposéde ces arguments et toute preuve fournie à l'appui auraient pu
lui apporter. La Cour doit cependant poursuivre l'affaire pour aboutir à
une conclusion et, ce faisant, doit tenir compte non seulement des preuves
et des arguments qui lui sont présentéspar le demandeur, mais aussi de
toute documentatiion ou preuve pertinente. Elle doit sur cette base
s'assurer en premier lieu qu'il n'existe aucun obstacle à l'exercice de
sa fonction judiciaire et en second lieu, s'il n'existe aucun obstacle de ce
genre, que la requete est fondéeen fait et en droit.
16. La présente affaire concerne un différend entre le Gouvernement
australien et le Gouvernement français au sujet d'essais d'armes nu-
cléaires effectuésen atmosphère par ce dernier dans l'océan Pacifique
Sud. Attendu que, dans la phase actuelle de l'instance, la Cour ne doit trai-
ter que de questions préliminaires, il convient de rappeler que, dans une
phase de cette nature, elle doit se placer dans l'optique qu'elle a définie en
ces termes dans les affaires de la Compétenceenmatièredepêclzeries: ((La question étantainsi limitée,la Cour s'abstiendra non seule-
ment d'exprimer une opinion sur despoints defond, mais aussi de se
prononcer d'une manièrequi pourrait préjugerou paraître préjuger
toute décision qu'ellepourrait rendre sur le fond.)) (C.I.J. Recueil
1973, p. 7 et 54.)
Il y a lieu cependant de résumerles principaux faits qui sontà l'origine de
l'affaire.
17. Avant le dépôt dela requêteintroductive d'instance en l'espèce,le
Gouvernement français avait procédé à des essais atmosphériques d'en-
gins nucléaires à son centre d'expérimentations du Pacifique, dans le
territoire de la Polynésie française, en 1966, 1967, 1968, 1970, 1971 et
1972. Le lieu utilisépour les explosions a étéprincipalement l'atoll de
Mururoa, situé à quelque 6000 kilomètres à l'est du continent australien.
Le Gouvernement français a institué des (zones interdites ))aux aéronefs
et des (zones dangereuses )pour la navigation aérienne etmaritime, afin
d'empêcherles avions et les navires d'approcher du centre d'expérimen-
tations; ces zones ont été établiecshacune des annéesoù des essais ont eu
lieu, pour la durée deces essais.
18. Comme le Comitéscientifique des Nations Unies pour l'étudedes
effets des rayonnements ionisants l'a indiquédans ses rapports successifs
à l'Assemblée générale,les essais d'engins nucléaires effectuésdans
l'atmosphère ont libérédans celle-ci et disséminé ensuitedans le monde
entier à des degrés variablesdes quantités mesurables de matièresradio-
actives. L'Australie affirme que les essais atmosphériques français ont
provoquédes retombéesde cette nature en territoire australien. La France
soutient entre autres que les élémentsradioactifs produits par ses expé-
riences sont si minimes qu'ils ne peuvent êtreconsidérésque comme
négligeables et que les retombées sur le territoire australien qui en
résultent ne constituent pas un danger pour la santé de la population
australienne. Ces points litigieux intéressant manifestement le fond de
l'affaire, la Cour doit s'abstenir, pour les raisons précédemment in-
diquées, d'exprimer une opinion à leur sujet.
19. Par lettres du 19 septembre 1973 et des 29 août et 11 novembre
1974,le Gouvernement australien a informé la Cour que, après l'ordon-
nance du 22 juin 1973 qui, à titre de mesures conservatoires prises en
vertu de l'article 41 du Statut, indiquait notamment que le Gouvernement
français devait s'abstenir de procéder à des essais nucléairesprovoquant
le dépôt de retombées radioactives sur le territoire de l'Australie, deux
nouvelles séries d'essaisatmosphériques ont eu lieu au centre d'expéri-
mentations du Pacifique en juillet et août 1973 et de juin à septembre
1974. Ces lettres indiquaient aussi que l'on avait enregistré sur le terri-
toire australien des retombées qui, selon le Gouvernement australien,étaient manifestement attribuables à ces essais, et que, ccde l'avis du
Gouvernement australien, l'attitude du Gouvernement français constitue
une violation claire et délibérée de I'ordonnancerendue par la Cour le
22 juin 1973 ».
20. Un certain nombre de déclarations autorisées ont été récemment
faites au nom du Gouvernement français, concernant les intentions de
celui-ci au sujet de ses futures expériences nucléairesdans l'océan Paci-
fique Sud. La portée de ces déclarations et leur incidence sur la présente
instance seront examinéesen détaildans la suite de l'arrêt.
21. La requête invoque, comme base de la compétence de la Cour:
c<i) l'article17 de l'Acte généralpour le règlement pacifique des
différends internationaux (1928) rapproché de l'article 36,
paragraphe 1,et de l'article 37 du Statut de la Cour. L'Australie
et la République française ont toutes deux adhéré à l'Acte
généralle 21 mai 1931...
ii) subsidiairement, l'article 36, paragraphe 2, du Statut de la Cour.
L'Australie et la République française ont toutes deux déposé
des déclarations aux termes de cet article.))
22. La portée de la présente phase de la procédure a étédéfiniedans
I'ordonnance rendue par la Cour le 22 juin 1973, qui demandait aux
Parties de traiter d'abord des questions relatives à la compétence de la
Cour et à la recevabilité de la requête.Pour cette raison, ainsi qu'il a été
indiqué, non seulement les Parties mais la Cour elle-même doivent
s'abstenir d'aborder la demande au fond. Cependant, quand elle examine
ces questions de caractère préliminaire, la Cour a le droit et, dans cer-
taines circonstance:;, peut avoir l'obligation de prendre en considération
d'autres questions qui, sans qu'on puisse les classer peut-être a stricte-
ment parler parmi les problèmes de compétence ou de recevabilité,appel-
lent par leur nature une étude préalableà celle de ces problèmes.
23. A cet égard, il convient de souligner que la Cour possède un
pouvoir inhérent qui l'autorise à prendre toute mesure voulue, d'une part
pour faire en sorte que, si sa compétence au fond est établie, l'exercice de
cette compétence ine se révèlepas vain, d'autre part pour assurer le
règlement régulier de tous les points en litige ainsi que le respect des
((limitations inhérentes à I'exercicede la fonction judiciaire» de la Cour
et pour ((conserver son caractère judiciaire » (Cameroun septentrional,
arrêt,C.I.J. Recueil 1963,p. 29). Un pouvoir inhérent de ce genre, sur la
base duquel la Cour est pleinement habilitée à adopter toute conclusion
éventuellement nécessaireaux fins qui viennent d'être indiqùées, découle
de l'existence mêmede la Cour, organe judiciaire établi par le consente-
10ment des Etats, et lui est conféréafin que sa fonction judiciaire fonda-
mentale puisse êtresauvegardée.
24. Eu égard à c:esconsidérations, la Cour doit examiner d'abord une
question qu'elle estime essentiellement préliminaire, à savoir l'existence
d'un différend,car que la Cour ait ou non compétenceen l'espècela solu-
tion de cette question pourrait exercer une influence décisivesur la suite
de l'instance. II lui incombe donc d'analyser de façon précise lademande
que l'Australie lui adresse dans sa requête. La présentephase de I'ins-
tance n'ayant étéconsacréequ'à des questions préliminaires, le deman-
deur n'a pas eu l'occasion de développer complètement ses thèses sur le
fond. Il reste que c'est par rapport à la requête,laquelle doit, d'après
l'article 40du Statut, indiquerccl'objet du différendN, que la Cour doit
examiner la nature et l'existencedu différendporté devant elle.
25. La Cour rappelle que la demande présentéedans la requête
(paragraphe 1 I ci-dessus) tend à ce que la Cour dise et juge que cla
poursuite des essais atmosphériques d'armes nucléaires dans l'océan
Pacifique Sud n'est pas compatible avec les règles applicables du droit
international »- la requêtespécifiant enquoi de nouveaux essais viole-
raient le droit international et ordonne (à la République française de
ne plus faire de telisessais ».
26. La correspondance diplomatique échangée cesdernières années
entre 1'~ustralie et la France montre les préoccupations que les expé-
riences nucléairesfrançaises effectuéesen atmosphère dans la région du
Pacifique Sud suscitent en Australie et indique que celle-ci a eu pour
objectif lacessatioci des essais. Ainsi, dans une note du 3janvier 1973, le
ou verne m auetalien priait le Gouvernement français ((de s'abstenir
de tous nouveaux essais nucléaires en atmosphère dans la région du
Pacifique et de lui donner l'assurance formelle qu'il n'y sera procédé à
aucun nouvel essai de ce genre )).Dans la requête, le Gouvernement
australien a dità propos de-cette note et de la réponsedu Gouvernement
français en date du 7 février 1973:
((Ce sont ces notes, des 3janvier et 7 février1973,que la Cour est
respectueusement invitée à examiner avec la plus grande attention
car ce sont elles qui mettent en pleine lumière lanature et l'ampleur
du différend qui oppose maintenant les Parties de façon si regret-
table. Le Gouvernement australien soutenait que la poursuite des
essais par la France était illégaleet demandait leur cessation. Le
Gouvernement français affirmait la légalitéde son comportement et
ne laissait pas entrevoir l'arrêt des essaisar. 15).
Que tel ait étél'objet de la demande, c'est ceque confirme avec nettetéla
demande en indication de mesures conservatoires que le requérant a
présentée à la Cour le9 mai 1973etoù figure cette remarque:
((Ainsi qu'il est indiqué dans la requête,l'Australie a cherché à
obtenir de la Rkpublique française qu'elle s'engageen permanence à ne plus procéder dans le Pacifique à de nouveaux essais nucléaires
dans I'atmosphère. La République française a expressément refusé
de prendre un tel engagement. IIressort clairement d'une déclaration
du ministre des armées faite devant le Parlement français le 2 mai
1973 que le Gouvernement français, passant outre aux protestations
de l'Australie et d'autres pays, n'envisage pas d'annuler ni de mo-
difier le programme d'expérimentation nucléaire prévu.n (Par. 69.)
27. La nature de la demande australienne se trouve préciséeencore par
la manière dont I'PLustralie,par l'intermédiaire de son Attorney-General,
a réagiaux déclarations mentionnées au paragraphe 20 qui ont été faites
au nom du Gouvernement français-en ce qui concerne les expériences
nucléaires dans l'océan Pacifique Sud. Lors de la procédure orale,
l'Attorney-General (d'Australie a esquissél'historique du différend depuis
l'ordonnance du 22juin 1973et rappeléun communiqué de la présidence
de la République française en date du 8juin 1974. Dans les observations
qu'il a formulées sur ce document, l'Attorney-General a indiqué qu'on
pouvait peut-être à l'analyse y voir la preuve d'une certaine évolution de
la controverse entr~eles Parties, tout en soulignant que, de l'avis de son
gouvernement, cette évolution n'étaitpas de nature à résoudre le différend
à sa satisfaction. Plus particulièrement, il a rappeléà la Cour que (I'Aus-
tralie a maintes fois ré~été au'elle souhaite obtenir de la France I'assu-
rance qu'il ne sera pas procédéà de nouvelles explosions nucléaires dans
I'atmosphère ...mais cette assurance n'a pas étédonnée 1).L'Attorney-
General a poursuivi en ces termes à propos du communiqué du 8 juin :
<(Le but du Gouvernement australien est d'exclure complètement
les expérience:;atmosphériques. 11a maintes fois demandé l'assu-
rance que les essais dans I'atmosphère prendraient fin. 11n'a pas
obtenu cette assurance. On ne saurait voir dans la récente déclara-
tion présidentielle française un engagement ferme, explicite et de
caractère ob1ig;atoirede s'abstenir de procéder à de nouveaux essais
dans I'atmosphère. Le Gouvernement français se réserve donc
toujours le drloit d'effectuer des essais nucléaires en atmosphère. ))
(Audience du 4 juillet 1974.)
Il ressort de ces dBclarations que, si le Gouvernement français avait pris
ce que l'Australie .aurait pu interpréter comme ((un engagement ferme,
explicite et de caractère obligatoire de s'abstenir de procéder à de nou-
veaux essais dans l'atmosphère)), le Gouvernement demandeur aurait
considéréqu'il avait atteint son objectif.
28. Plus tard, le 26 septembre 1974,répondant à une question poséeau
Sénat australien sur les informations d'après lesquelles la France avait
annoncé qu'elle avait terminé ses essais nucléaires dans I'atmosphère,
l'Attorney-General d'Australie a dit:
((D'après les renseignements en ma possession, il semble que le
ministre des Affaires étrangèresde France ait dit en fait: ((Parvenus désormais, dans la technologie nucléaire, à un degré où il nous
devient possible de poursuivre nos programmes par des essais
souterrains, nous avons pris nos dispositions pour nous engager dans
cette voie dèsl'annéeprochaine ))..cette déclaration est fort loin de
représenter un engagement suivant lequel le Gouvernement français
n'effectuerait plus d'essais dans l'atmosphère à son centre d'expéri-
mentations du Pacifique ...II existe une différence fondamentale
entre une affirrnation selon laquelle des dispositions sont prises pour
poursuivre le programme d'expérimentation par des essais souter-
rains dès l'annéeprochaine et l'assurance qu'iln'y aura plus d'essais
dans l'atmosphère. 11semble que, bien qu'il fasse apparemment un
pas dans la borine direction, leGouvernement françaiscontinue de se
réserverledroit de se livrer àdes essais nucléairesdans l'atmosphère.
D'un point de vue juridique, l'Australie n'a rien obtenu du Gouver-
nement français qui la protège contre de nouveaux essais atmosphé-
riques au cas ,où le Gouvernement français déciderait par la suite
d'y procéder. )>
Sans commenter pour le moment l'interprétation que l'Attorney-General
a donnéedes déclarations françaises portées à sa connaissance, la Cour
voudrait faire observer qu'il est clair que, selon le Gouvernement austra-
lien,((I'assurance qu'il n'yaura plusd'essaisdans l'atmosphère >)pourrait
suffirea protéger l'Australie.
29. Compte tenui de ces déclarations, il est essentiel d'examiner si le
Gouvernement australien sollicite de la Cour un jugement qui ne ferait
que préciser le lien juridique entre le demandeur et le défendeur par
rapport aux questions en litige, ou un jugement conçu de façon telle que
son libellé obligerait l'une des Parties ou les deux à prendre ou à s'abs-
tenir de prendre certaines mesures. C'est donc le devoir de la Cour de
circonscrire le véritable problèmeen cause et de préciser l'objet de la
demande. Il n'a jamais été contesté que la Cour est en droit et qu'elle a
mêmele devoir d'interpréter les conclusions des parties; c'est l'un des
attributs de sa fonction judiciaire. Assurément, quand la demande n'est
pas formuléecomme il convient parce que les conclusions des parties sont
inadéquates, la Cour n'a pas le pouvoir de (se substituer [aux Parties]
pour en formuler cle nouvelles sur la base des seules thèses avancéeset
faits allégués))(C.P.J.I. sérieA no 7, p. 35), mais tel n'est pas le cas en
l'espèceet la question d'une formulation nouvelle des conclusions par la
Cour ne se pose pa.s non plus. En revanche, la Cour a exercé à maintes
reprises le pouvoir qu'elle possèded'écarter,s'il est nécessaire,certaines
thèsesou certains arguments avancéspar une partie comme élémend t e ses
conclusions quand elle lesconsidère, non pascomme des indications de ce
que la partie lui demande de décider, maiscomme des motifs invoqués
pour qu'elle se prononce dans le sens désiré. C'est ainsq iue, dans l'affaire
desPêcheries, laCa,ura dit de neuf des treize points que comportaient les
conclusions du demandeur: (Ce sont là des élémentsqui, le cas échéant,
pourraient fournir les motifs de l'arrêtet non en constituer l'objet »
13 (C.I.J. Recueil 1951, p. 126). De même,dans l'affaire des Minquiers et
Ecréhous, laCour arelevéque :
((Les conclusions du Gouvernement du Royaume-Uni,reproduites
ci-dessus, consistent en trois paragraphes, les deux derniers étant les
motifs à l'appui de la première proposition qui doit être considérée
comme la conc;lusion finale de ce gouvernement. Les conclusions du
Gouvernement français se composent de dix paragraphes, les
premiers neuf étant les motifs qui conduisent à la dixième proposi-
tion, qui doit &treconsidéréecomme la conclusion finale de ce gou-
vernement.)) (C.I.J. Recueil 1953, p. 52; voir aussi Nottebohm,
deuxièmephase, arrêt,C.I.J. Recueil 1955,p. 16.)
30. Dans les circonstances de l'espèce, et bien que dans sa requêtele
demandeur ait employé la formule traditionnelle consistant à prier la
Cour de ((dire et juger ))(et des termes analogues étaient employés dans
lesaffaires citées au paragraphe précédent),c'est à la Cour qu'il appartient
de s'assurer du but et de l'objet véritable de la demande et elle ne saurait,
pour ce faire, s'en tenir au sens ordinaire des termes utilisés; elle doit
considérer l'ensemble de la requête, les arguments développés de-
vant la Cour par le demandeur, les échanges diplomatiques qui ont
été portésà son attention et les déclarations publiques faites au nom du
gouvernement demandeur. Si ces élémentsdélimitent nettementl'objet de
la demande, ils ne peuvent manquer d'influer sur l'interprétation des
conclusions. En l'espèce, il apparaît nettement que l'affaire trouve son
origine dans les essais nucléaires atmosphériques effectuéspar la France
dans la région du Pacifique Sud et que le demandeur a eu pour objectif
initial et conserve pour objectif ultime la cessation de ces essais; dans ces
conditions, on ne saurait considérer que sa demande tende à obtenir un
jugement déclaratoire. Dès lors que l'arrêtdont l'Australie sollicite le
prononcé devrait se fonder d'après elle sur une constatation de la Cour
relative aux questions de droit, une telle constatation ne serait qu'un
moyen utilisé en vue d'une fin et non une fin en soi. La Cour a bien enten-
du conscience du rôle jouépar lesjugements déclaratoires mais la présente
affaire n'est pas de celles où un teljugement est demandé.
31. Etant donné l'objet de la demande, à savoir empêcherde nouveaux
essais, la Cour a l'obligation de tenir compte de tout fait intéressant le
comportement du défendeur survenu depuis le dépôt de la requête. De
plus, ainsi qu'il a étémentionné, le demandeur lui-mêmea implicitement
admis que des événements postérieursà la requête pouvaient être perti-
nents quand il a appelé l'attention de la Cour sur le communiqué du
8 juin 1974 et présenté desobservations à son sujet. Dans ces conditions
la Cour est tenue de:prendre en considération des faits nouveaux survenus
tant avant qu'après la clôture de la procédure orale. Etant donné la non-
comparution du défendeur, il incombe tout particulièrement à la Cour de
s'assurer qu'elle est bien en possession de tous les faits disponibles.
32. A l'audience du 4 juillet 1974, alors qu'il énuméraitles faits nou-
veaux intéressant l'instance qui s'étaient produits depuis que les conseilsde 1'Australies'étaientadressésà la Cour en mai 1973,i'Attorney-General
d'Australie a fait la déclaration suivante:
c(Vous vous rappellerez que l'Australie a maintes fois répété
qu'elle souhaite obtenir de la France l'assurance qu'il ne sera pas
procédé à de nouvelles explosions nucléairesdans l'atmosphère. De
fait, la Cour s'en souvient, cette assurance a été demandéeau Gou-
vernement français par le Gouvernementaustralien dans une note du
3janvier 1973,mais elle n'a pas étédonnée.
Je rappelle à la Cour qu'au paragraphe 427 de son mémoire le
Gouvernement australien a fait une déclaration, alors absolument
exacte, selon laquelle le Gouvernement français n'avait pas mani-
festé lamoindre intention d'interrompre le programme d'expériences
prévupour 19'74 et 1975.11faut désormaisenvisager cette déclaration
dans la perspective des problèmes que je vais maintenant aborder et
qui portent sur les communications officielles du Gouvernement
français relatives ses plans actuels.))
L'Attorney-Genera! a évoqué longuementun communiqué de la prési-
dence de la République française en date du 8juin 1974et il a exposé à
la Cour I'interprétation que le Gouvernement australien en donnait.
Depuis lors, des autorités françaises ont fait au sujet des expériences
futures un certainnombre de déclarations publiques allant toutes dans le
même sens,qui sont autant d'élémentspropres à aider la Cour àévaluer
I'interprétation desdocuments antérieurs présentéepar le demandeur et
qu'il importe d7exa.minerpour déterminer si elles consacrent un change-
ment dans lesintentions de la France relativeà son comportement futur.
Il est vrai que ces déclarations n'ont pas été faitesdevant la Cour mais
elles sont du domaine public, sont connues du Gouvernement australien
et l'une d'elles aitécommentée par l'Attorney-General le 26 septembre
1974devant le Sénataustralien. II est bien entendu nécessaired'examiner
toutes ces déclarations, celle qui a étéportée I'attention de la Cour en
juillet 1974comme cellesqui ont étéfaitesultérieurement.
33. Si la Cour avait estiméque l'intérêt dela justice l'exigeait, elle
aurait certes pu donner aux Parties la possibilitéde lui présenter leurs
observationssur le!;déclarations postérieureà la clôture de la procédure
orale, par exemple en rouvrant celle-ci. Cette façon de procédern'aurait
cependant étépleinement justifiéeque si le sujet de ces déclarationsavait
été entièrement nouveau, n'avaitpas étéévoquéen cours d'instance, ou
était inconnu des Parties. Manifestement, tel n'estpas le cas. Leséléments
essentiels que la Cour doit examiner ont étéintroduits dans la procédure
par le demandeur lui-mêmependant les audiences, et d'une façon qui
n'était pas seulementincidente,quand il a appelé l'attention dela Coursur
une déclaration antérieuredes autoritésfrançaises, produit lesdocuments
où elle figurait et présentéune interprétation de son caractère, en particu-
lier sur le pointde.savoir si elle renfermait une assurance ferme. C'est
donc à l'initiative du demandeur que la déclaration et l'interprétation
qu'en donne l'Australie se trouvent soumises à la Cour. De plus, ledemandeur a publiquement formulédes observations par la suite (para-
graphe 28 ci-dessus) sur des déclarations faites par les autorités fran-
çaises aprèsla clôture de la procédure orale. La Cour est donc en posses-
sion non seulement des déclarationsdes autoritésfrançaises concernant la
cessation des essais nucléaires dans I'atmos~hère. mais aussi des vues
exprimées par le demandeur à leur sujet. Bien que la Cour, en tant
qu'organe judiciaiire, ait conscience de l'importance du principe que
traduit la maxime ,audalteram partem, elle ne pense pas que ce principe
l'empêche deprendre en considération des déclarations postérieures à la
procédureorale et qui se bornent à compléter et à renforcer des points
déjàdiscutéspendant cette procédure - déclarations que le demandeur
ne peut pas ignorer. C'est pourquoi le demandeur ayant présenté desob-
servations sur les dtclarations faites par les autoritésfrançaises aussi bien
avant qu'après la procédure orale, il pouvait raisonnablement escompter
que la Cour traite de ce sujet et aboutisàeses propres conclusions sur le
sens et leseffetsde cesdéclarations. La Cour, ayant pris note des observa-
tions du demandeur et ne s'estimant pas tenue de consulter les Parties sur
la base de sa décision, considère qu'il ne servirait à rien de rouvrir la
procédure orale.
34. 11convient d'examiner les déclarations mentionnéesplus haut dans
l'ordre chronologique. La première est celleque contient le communiqué
publiépar la prési,dencede la République française le 8 juin 1974, peu
avant le débutde la campagne d'essais nucléaireslancéepar la France en
1974 :
((Le Journar'Oficiel du 8 juin 1974 publie l'arrêtéremettant en
vigueur lesmesures de sécuritéde la zoned'expérimentation nucléaire
du Pacifique Sud.
La présidence de la République précise, à cette occasion, qu'au
point où en est parvenue l'exécutionde son programme de défense en
moyens nucléa.iresla France sera en mesure de passer au stade des
tirs souterrains aussitôt quea série d'expériences prévuep sour cet
été seraachev6e.1)
Copie du commui~iquéa été transmise au département des affaires
étrangères d'Australie sousle couvert d'une note du Il juin 1974 de
l'ambassade de France à Canberra et, ainsi qu'on l'a vu, le texte du com-
muniquéa étéporte) àl'attention de la Cour pendant la procédure orale.
35. La Cour ne peut manquer de relever en outre que mention d'un
document a étéfaite en audience publique par un conseil dans I'ins-
tance parallèle introduite le 9 mai 1973par la Nouvelle-Zélande contre
la France.A I'audiemcedu IOjuillet 1974,l'Attorney-Generalde Nouvelle-
Zélande, après avoir évoquéle communiqué précitédu 8 juin 1974, a
indiqué que, le 10juin 1974, l'ambassade de France à Wellington avait
adressé au ministère des affaires étrangèresde Nouvelle-Zélande une
note dont il a lu lepassagesuivant: ESSAISNUCLÉAIRES(ARRÊT) 266
«la France, au point où en est parvenue l'exécutionde son pro-
gramme de défenseen moyens nucléaires, sera en mesure de passer
au stade des tirs souterrains aussitôt que la série d'expériences
prévues pour cet étésera achevée.
Ainsi, les essais atmosphériques qui seront prochainement effec-
tués seront normalement les derniers de ce type. ))
36. La Cour doit examiner aussi les déclarations faites en la matière
par les autorités françaises après la procédure orale, à savoir le 25juillet
1974par le présidentde la République, le 16août 1974par le ministre de
la défense,le 25 septembre 1974 par le ministre des affaires étrangères
devant l'Assembléegénérale desNations Unies et le 11octobre 1974par
le ministre de la défense.
37. La déclaration qu'il convient d'examiner d'abord est celle que le
président dela République a faite le 25juillet 1974lors d'une réunionde
presse dans les terrnes suivants:
«sur cette question des essais nucléaires,vous savez que le premier
ministre s'étaitexprimépubliquement à l'Assembléenationale, lors
du discours de présentation du programme du Gouvernement. II
avait indiqué que les expériences nucléaires françaises seraientpour-
suivies. J'avais moi-même précisé que cette campagne d'expériences
atmosphérique:^serait la dernière, et donc les membres du gouverne-
ment étaient complètement informésde nos intentions à cet égard..)>
38. Le 16 août 1974, au cours d'une interview donnée à la télévision
française, le ministre de la défensea dit que le Gouvernement français
avait tout mis en oeuvrepour que les essais nucléairesde 1974soient les
derniers à se déroul,erdans l'atmosphère.
39. Le 25 septernbre 1974, le ministre des affaires étrangères a dit,
s'adressant à l'Assemblée générale deN sations Unies:
(Parvenus désormais, dans la technologie nucléaire, à un degré
où il devient possible de poursuivre nos programmes par des essais
souterrains, nous avons pris nos dispositions pour nous engager
dans cette voie:dèsl'année prochaine. ))
40. Le 11octobre 1974,le ministre de la défensea tenu une conférence
de presse au cours de laquelle il a dit par deux fois en termes presque
identiques qu'il n'y aurait pas d'essai aérienen 1975 et que la France
était prête à procéder à des essais souterrains. La remarque ayant été
faite qu'il n'avait pas ajouté (normalement D,il en a convenu. Cette
indication est intéressante eu égardau passage de la note de l'ambassade
de France à Wellington au ministèredes affaires étrangèresde Nouvelle-
Zélande en date du 10juin 1974, citéau paragraphe 35 ci-dessus, où il
est préciséque les essais atmosphériques envisagés((seront normalement
les derniers de ce type)). Le ministre a mentionné aussi que d'autres
gouvernements,qu'ils aient étéofficiellementavisésou non de la décision, ESSAIS NUCLÉAIRES (ARRÊT) 267
ont pu la connaître à la lecture des journaux et des communiqués de la
présidence dela Ré:publique.
41. Vu ce qui précède, laCour estime que la France a rendu publique
son intention de cesser de procéder à des expériences nucléairesen atmo-
sphère, une fois terminéela campagne d'essais de 1974. La Cour doit en
particulier tenir compte de la déclaration du président de la République
en date du 25 juillet 1974(paragraphe 37 ci-dessus) suivie de la déclara-
tion du ministre de la défense endate du 11octobre 1974(paragraphe 40
ci-dessus). L'une el:l'autre révèlentque les déclarations officielles faites
au nom de la France sur la question des futures expériences nucléaires
ne sont pas suborcdonnées à ce que pouvait éventuellement impliquer
l'indication contenue dans le terme c(normalement n.
42. Avant d'exarminer si les déclarations des autorités françaises
répondent à l'objet de la demande australienne tendant à ce qu'il soit
mis fin aux essais nucléaires enatmosphère dans le Pacifique Sud, il faut
d'abord déterminerla naturede ces déclarationsainsi que leur portée sur
le plan international.
43. Il est reconnu que des déclarations revêtantla forme d'actes uni-
latéraux et concernant des situations de droit ou de fait peuvent avoir
pour effet de créer des obligations juridiques. Des déclarations de cette
nature peuvent avoir et ont souvent un objet très précis.Quand 1'Etat
auteur de la déclaration entend êtreliéconformément a ses termes, cette
intention confère ?Lsa prise de position le caractère d'un engagement
juridique, 1'Etat intéresséétant désormais tenu en droit de suivre une
ligne de conduite conforme à sa déclaration. Un engagement de cette
nature, exprimé publiquement et dans l'intention de se lier, mêmehors
du cadre de négociations internationales, a un effet obligatoire. Dans ces
conditions, aucune contrepartie n'est nécessairepour que la déclaration
prenne effet,non plus qu'une acceptation ultérieureni même uneréplique
ou une réactiond'autres Etats, car cela serait incompatible avec la nature
strictement unilatérale de l'actejuridique par lequelI'Etat s'estprononcé.
44. Bien entendu, tout acte unilatéral n'entraîne pas des obligations
mais un Etat peut choisir d'adopter une certaine position sur un sujet
donné dans I'intention de se lier - ce qui devra être déterminé en inter-
prétant I'acte. Lorsque des Etats font des déclarations qui limitent leur
liberté d'actionfuture, une interprétation restrictive s'impose.
45. Pour ce qui est de la forme, il convient de noter que ce n'est pas là
un domaine dans lequel le droit international impose des règles strictesou
spéciales.Qu'une dkclaration soit verbale ou écrite, celan'entraîne aucune
différenceessentielle,car de tels énoncésfaitsdans des circonstances parti-
culières peuvent co~nstituerdes engagements en droit international sans
avoir nécessairement à êtreconsignéspar écrit.La forme n'est donc pasdécisive.Comme la Cour l'a dit dans son arrêt sur les exceptions pré-
liminaires en l'affaire du Templede Préah Vihéar:
[comme]c'est généralementle cas en droit international qui insiste
particulièrement sur les intentions des parties, lorsque la loi ne
prescrit pas de forme particulière, les parties sont libres de choisir
celle qui leur plaît, pourvu que leur intention en ressorte clairement))
(C.1.J. Recueil ,1961,p. 31).
La Cour a ajouté dans la mêmeaffaire: ((la seule question pertinente est
de savoir si la rédaction employée dans une déclaration donnée révèle
clairement l'intention ..))(ibid., p. 32).
46. L'un des principes de base qui président à la création et à l'exé-
cution d'obligations juridiques, quelle qu'en soit la source, est celui de la
bonne foi. La confiance réciproque est une condition inhérente de la co-
opération internationale, surtout à une époqueoù, dans bien des domai-
nes, cette coopération est de plus en plus indispensable. Tout comme la
règle du droit des traités pacta sunt servanda elle-même,le caractère
obligatoire d'un engagement international assumé par déclaration uni-
latéralerepose sur la bonne foi. Les Etats intéressés peuventdonc tenir
compte des déclarations unilatérales et tabler sur elles; ils sont fondés à
exiger que l'obligaticsnainsi crééesoit respectée.
47. Ayant examiné les principes juridiques en jeu, la Cour en vient
plus précisément auxdéclarations du Gouvernement français. Le Gou-
vernement australien a indiqué à la Cour pendant la procédure orale
comment il interprétait la première de ces déclarations (paragraphe 27
ci-dessus). Au sujet de celles qui ont suivi,n peut se référera ce qu'a dit
l'Attorney-General devant le Sénat australien le 26 septembre 1974(para-
graphe 28ci-dessus). En réponse à une question relativeà des informations
d'après lesquelles la France avait annoncé qu'elle avait terminé ses essais
nucléaires enatmosphère, il a dit que la déclaration du ministre des af-
faires étrangères deFrance en datedu 25 septembre 1974(paragraphe 39
ci-dessus) ((est fort loin de représenter un engagement suivant lequel le
Gouvernement frani;ais n'effectuerait plus d'essais dans l'atmosphère à
son centre d'expérinientations du Pacifique ))et que la France ((continue
de se réserverle droit de se livrer à des essais nucléaires dans I'atmo-
sphère )de sorte que ccD'un point de vue juridique, l'Australie n'a rien
obtenu du Gouvernement français qui la protège contre de nouveaux
essais atmosphériquirs ».
48. On notera que l'Australie a admis que le différendpourrait être
résolu par une déclaration unilatérale, de la nature préciséeplus haut,
qui serait donnée par la France et sa conclusion qu'en fait aucun ((en-
gagement ferme, explicite et decaractère obligatoire »n'a étépris procède
de l'idéeque I'assuriince ne revêtpas une forme absolue, qu'il faut ((dis-tinguer l'affirmation selon laquelle les essais seront désormais souterrains
de l'assurance qu'il n'y aura plus de nouveaux essais dans l'atmosphère »,
que ((la possibilité d'une reprise des essais en atmosphère après le début
des tirs souterrains ne saurait êtreexclue ))et qu'ainsi ((le Gouvernement
français continue dt: se réserverle droit de se livrer à des essais nucléaires
dans l'atmosphère 1).II appartient cependant à la Cour de se faire sa
propre opinion sur le sens et la portée que l'auteur a entendu donner à
une déclaration unilatérale d'où peut naître une obligation juridique, et à
cet égard elle ne peut êtreliéepar les thèses d'un autre Etat qui n'est en
rien partie au texte.
49. Parmi les déclarations du Gouvernement français en possession
desquelles la Cour se trouve, il est clair que les plus importantes sont
celles du président de la République. Etant donné ses fonctions, il n'est
pas douteux que les communications ou déclarations publiques, verbales
ou écrites, quiémanent de lui en tant que chef de I'Etat, représentent dans
le domaine des relations internationales des actes de I'Etat français. Ses
déclarations et celles des membres du Gouvernement français agissant
sous son autorité, jiisques et ycompris la dernière déclaration du ministre
de la défense, endartedu 1 1 octobre 1974,doivent êtreenvisagéescomme
un tout. Ainsi, quelle qu'ait pu en êtrela forme, ilconvient de les considé-
rer comme constituant un engagement de I'Etat, étant donnéleur inten-
tion et les circonstances dans lesquelles elles sont intervenues.
50. Les déclarations unilatérales des autorités françaises ont étéfaites
publiquement en dehors de la Cour et erga omnes, mêmesi la première a
étécommuniquée au Gouvernement australien. Ainsi qu'on l'a vu plus
haut, pour que ces déclarations eussent un effet juridique, il n'était pas
nécessaire qu'elles fussent adresséesà un Etat particulier, ni qu'un Etat
quelconque signifiât son acceptation. Les caractères générauxde ces
déclarations et leur nature sont les élémentsdécisifsquand ils'agit d'en
apprécier les effets juridiques; c'està leur interprétation que la Cour doit
procéder maintenant. La Cour est en droit de partir de la présomption
que ces déclarations n'ont pas étéfaites in I1acuomais à propos des essais
qui forment l'objet mêmede l'instance, bien que la France ne se soit pas
présentéeen l'espèce.
51. Quand il a annoncé que la série d'essais atmosphériques de 1974
serait la dernière, le Gouvernement français a signifiépar là à tous les
Etats du monde, y compris le demandeur, son intention de mettre effec-
tivement fin à ces essais. II ne pouvait manquer de supposer que d'autres
Etats pourraient prendre acte de cette déclaration et compter sur son
effectivité. La validité de telles déclarations et leurs conséquences juridi-
ques doivent être envisagéesdans le cadre généralde la sécurité des rela-
tions internationales et de la confiance mutuelle si indispensable dans
les rapports entre Eltats. C'est du contenu réelde ces déclarations et des
circonstances dans lesquelles elles ont été faitesque la portée juridique de
l'acte unilatéral doit être déduite.L'objet des déclarations étant clair et
celles-ci étant adressées à la communauté internationale dans son en-
semble, la Cour tient qu'elles constituent un engagement comportant deseffets juridiques. La Cour estime que le président de la République, en
décidant la cessation effective des essais atmosphériques, a pris un
engagement vis-à-vis de la communauté internationale à qui il s'adres-
sait. Certes le Gouvernement français a constamment soutenu, en parti-
culier dans la note que l'ambassadeur de France à Canberra a adresséele
7 février 1973 au ]premier ministre et ministre des affaires étrangères
d'Australie, qu'a ilest convaincu que ses expériences nucléaires n'ont
violéaucune règle du droit international ))et il n'a pas reconnu non plus
qu'il étaittenu de mettre fin à ses expériencespar une règlede droit inter-
national mais cela rie change rien aux conséquencesjuridiques des décla-
rations étudiéesplus haut. La Cour estime que l'engagement unilatéral
résultant de ces d<Sclarations ne saurait être interprétécomme ayant
comporté l'invocation d'un pouvoir arbitraire de revision. La Cour
constate en outre que le Gouvernement français a assumé une obligation
dont il convient de comprendre l'objet préciset les limites dans les termes
mêmesoù ils sont expriméspubliquement.
52. La Cour est donc en présence d'une situation où l'objectif du
demandeur a étéefkctivement atteint, du fait que la Cour constate que la
France a pris l'engagement de ne plus procéder à des essais nucléaires en
atmosphère dans le Pacifique Sud.
53. La Cour constate qu'aucune question de dédommagement ne se
pose en l'espèce, piYsque le demandeur n'a présentéaucune demande à
cet effet, ni avant rii pendant la procédure, et que son objectif initial et
son but ultime éta.ientd'obtenir une protection ((contre de nouveaux
essais atmosphériqiies ))(voir paragraphe 28 ci-dessus).
54. Bien entendu, il aurait étéloisible à l'Australie, si elle avait con-
sidéré l'affairecom:me effectivement close, de se désister conformément
au Règlement. Si elle ne l'a pas fait, cela n'empêchepas la Cour d'arriver à
sa propre conclusion sur 1; question. II est vrai (la Cour ne saurait
faire état des déclarations, admissions ou propositions qu'ont pu faire
les Parties au cour:; de négociations directes qui ont eu lieu entre elles,
lorsque ces négocia1:ionsn'ont pas abouti à un accord complet ))(Usine de
Cliorzciw (fond), C.P.J.I. série A no 17, p. 51). Mais telle n'est pas en
l'espècela situation qui se présenteà la Cour. Le demandeur a clairement
indiqué ce qui lui donnerait satisfaction et le défendeur a agi indépen-
damment; la question qui se pose à la Cour est donc celle de I'interpré-
tation du comportement des deux Parties. La conclusion à laquelle cette
interprétation a amené la Cour ne signifie pas qu'elle opère elle-même
un retrait de la derriande; elle se borne à établir l'objet de cette demande
et l'effet des actes du défendeur, comme elle est tenue de le faire. En pré-
tendant que des diSclarations faites au nom de la France ne sauraient
mettre fin au différend, on irait à l'encontre des vues exprimées sans
équivoque par le demandeur aussi bien devant la Cour qu'en dehors.
55. La Cour, cornme organe juridictionnel, a pour tâche de résoudre
des différends existant entre Etats. L'existence d'un différend estdonc lacondition première de l'exercice de sa fonction judiciaire; on ne peut se
contenter à cet égard des affirmations d'une partie car ((l'existence d'un
différend international demande à êtreétablie objectivement ))par la
Cour (Interprétation des traités depaix conclus avec la Bulgarie, la
Hongrie et la Roumanie, première phase, avis consultatiL C.I.J. Recueil
1950, p. 74). Le différenddont la Cour a été saisiedoit donc persister au
moment où elle statue. Elle doit tenir compte de toute situation dans
laquelle ledifférenda disparu parce que l'objet de la demande a été atteint
d'une autre manière. Si les déclarations de la France concernant la ces-
sation effective des expériences nucléaires ont la portée que la Cour
a décrite,autrement dit si elles ont éliminéle différend,il faut en tirer les
conséquencesqui s'imposent.
56. On pourrait soutenir que, bien que la France se soit obligée,par
déclaration unilatérale. à ne DaSeffectuer d'essais nucléaires enatmo-
sphèredans l'océanPacifique Sud, un arrêtde la Cour sur ce point pour-
rait encore présenter de l'intérêctar, s'iladoptait les thèsesdu demandeur
il renforcerait la position de celui-ci en constatant l'obligation du défen-
deur. Cependant, la Cour ayant conclu que le défendeur a assuméune
obligation de comportement sur la cessation effective des expériences
nucléaires, aucune autre action judiciaire n'est nécessaire.Le deman-
deur a cherché à maintes reprises à obtenir du défendeur l'assurance que
les essais prendraient fin et celui-ci a, de sa propre initiative, fait une
série dedéclarations d'où il résultequ'ils prendront fin. C'est pourquoi
la Cour conclut que, le différendayant disparu, la demande présentéepar
l'Australie ne comporte plus d'objet. Il en résultequ'aucune autre cons-
tatation n'aurait de raison d'être.
57. Cela n'est pas à dire que la Cour ait la faculté de choisirparmi les
alTaires qui lui sont soumises celles qui lui paraissent se prêter à une
dkcision et de refuser de statuer sur les autres. L'article 38 du Statut dis-
pose que la mission de la Cour est ((de réglerconformément au droit
international les difrérendsqui lui sont soumis ))en dehors de l'article 38
lui-même,d'autres dispositions du Statut et du Règlement indiquent
aussi que la Cour ne peut exercer sa compétence contentieuse que s'il
existe réellementun différendentre les parties. En n'allant pas plus loin
en l'espècela Cour ne fait qu'agir conformément à une interprétation
correcte de sa fonction judiciaire.
58. La Cour a indiquédans le passé desconsidérations qui pouvaient
l'amener à ne pas statuer. La présenteaffaire est l'une de celles dans les-
quelles ((lescirconstances qui se sont produites ...rendent toute décision
judiciaire sans objet )(Cameroun septentrional, arrêt,C.I.J. Recueil 1963,
p. 38). La Cour ne voit donc pas de raison de laisser se poursuivre une
procédurequ'elle sait condamnée à rester stérile.Sile règlementjudiciaire
peut ouvrir la voie de l'harmonie internationale lorsqu'il existe un conflit,
il n'est pas moins vrai que la vaine poursuite d'un procès compromet
cette harmonie.
59. La Cour conclut donc qu'aucun autre prononcé n'est nécessaireen l'espèce.Il n'entre pas dans la fonction juridictionnelle de la Cour de
traiter des questions dans l'abstrait, une fois qu'elle est parvenue la
conclusion qu'il n'y a plus lieu de statuer au fond. La demande ayant
manifestement perdu son objet, il n'y a rienjuger.
60. Dès lors que la Cour a constaté qu'un Etat a pris un engagement
quant àson comportement futur, il n'entre pas dans sa fonction d'envi-
sager que cet Etat ne le respecte pas. La Cour fait observer que, si le fon-
dement du présent arrêtétait remis en cause, le requérant pourrait de-
mander un examen de la situation conformément aux dispositions du
Statut; la dénonciation par la France, dans une lettre du 2 janvier 1974,
de l'Actegénérapl our lerèglementpacifiquedes différendsinternationaux,
qui est invoqué comme l'un des fondements de la compétencede la Cour
en l'espèce,ne saurait en soi faire obstacle la présentation d'une telle
demande.
*
* *
61. Dans l'ordonnance déjà mentionnéedu 22 juin 1973, la Cour a
préciséque les mesures conservatoires indiquées l'étaient«en attendant
son arrêtdéfinitifdans l'instance introduite le 9 mai 1973par l'Australie
contre la France D. L'ordonnance cesse donc de produire ses effets dès
le prononcé du présentarrêtet les mesures conservatoiresprennent finen
mêmetemps.
*
* *
62. Par ces motifs,
par neuf voix contre six,
dit que la demande de l'Australie est désormais sans objet et qu'il n'y
a dèslors pas lieuà statuer.
Fait en anglais et en français, le texte anglaisfaisant foi, au palais de la
Paix, à La Haye, le vingt décembremil neuf cent soixante-quatorze, en
trois exemplaires, dont l'un restera déposé aux archivesde la Cour etdont
les autres seront transmis respectivement au Gouvernement australien et
au Gouvernement de la Républiquefrançaise.
Le Président,
(Signé) Manfred LACHS.
Le Greffier,
(Signé) S. AQUARONE.
23 ESSAISNUCLÉAIRES(ARRÊT)
M. LACHS, Président, fait la déclaration suivante:
[Traduction]
La bonne administration de lajustice et le respectàdla Cour exigent
que l'issuede sesdélibérationsreste strictement secrèteet que sesdécisions
ne soient diffusées enaucun de leurs élémentsavant d'être officiellement
rendues. II est donc regrettable qu'en l'espèce,avant la lecture publique
Je l'ordonnance de la Cour en date du 22juin 1973,une déclaration ait
étéfaite et des nouvelles de presse aient paru, qui dépassaient ce qui est
juridiquement admissible s'agissant d'une affaisub judice.
La Cour a ététrès sérieusement préoccupée par cette question et une
enquêtea étéordonnée pendant laquelle toutes les voies qui pouvaient
lui être ouvertesontétéexplorées.
La Cour a conclu, dans sa résolutiondu 21 mars 1974,que ses recher-
ches ne lui avaient pas permis d'identifier une source exacte pour les
déclarationset les informations publiées.
J'ai la certitude que la Cour a fait tout ce qui était enson pouvoir
égard et qu'elle a traité de la question avec tout le sérieuxque celle-ci
méritait.
MM. BENGZON, ONYEAMA, DILLARD, JIMENE ZE ARÉCHAG etAsir
Humphrey WALDOCK, juges, font la déclaration commune suivante:
[Traduction]
Certaines critiques ont étéémisessur la manière dont la Cour a traité
de la question viséepar le Président dans la déclaration qui précède.
Nous tenons àpréciserpar la présentedéclaration quenousneconsidérons
pas ces critiques comme justifiées enquoi que ce soit.
La Cour a procédé a un examen détailléde la question grâce aux
divers moyens dont elle dispose: elle a eu recourss services, convoqué
l'agent de l'Australie pour qu'il soit interrogé, effectuéses recherches et
ses enquêtes propres.Suggérerque la Cour n'aurait pas traitéde la ques-
tion avec tout le sérieux et le soin nécessaires serait selon nous sans
fondement. Les communiqués qu'elle a publiésle 8 août 1973d'abord,
le 26 mars 1974ensuite, traduisent et soulignent d'ailleurs le sérieux avec
lequel la Cour a envisagécette question.
L'examen que la Cour a fait de la question ne lui a pas permis d'iden-
tifier une source d'information exacte sur laquelle se fondaient les décla-
rations et les nouvelles de presse mentionnées par le Président. Quand
la Cour a décide,par onze voix contre trois, de clore son examen, elle l'a
fait pour la raison sérieuseque la poursuite des recherches et des enquêtes
avait trèspeu de chance, d'aprèselle, de fournir davantaged'informations
utiles.
24 ESSAISNUCLÉAIRES (ARRÊT) 274
MM. FORSTERG , ROS, PETRÉN et IGNACIO-PINTO juges, joignent à
l'arrêtles exposésde leur opinion individuelle.
MM. ONYEAMA, DILLARD ,IMÉNEZ DE ARÉCHAGA et sir Humphrey
WALDOCK juges, joignent à l'arrêt uneopinion dissidente commune.
M. DE CASTRO j,ge, et sir GarfieldBARWICK juge ad /roc, joignent à
l'arrêtles exposésde leur opinion dissidente.
(Paraphé)M.L.
(Paraphé)S.A.
1.NTERNATIONAL COURT OF JUSTlCE
REPORTS OF JUDGMENTS,
ADVISORY OPINIONS AND ORDERS
NUCLEAR TESTS CASE
(AUSTRALIA v.FRANCE)
JUDGMENT OF 20 DECEMBER 1974
COUR INTERNATIONALE DE JUSTICE
RECUEIL DES ARRÊTS,
AVLSCONSULTATLFS ET ORDONNANCES
AFFAIRE DES ESSAISNUCLÉAIRES
(AUSTRALIE c. FRANCE) Officia1citatio:
Nuclear Tests(Australiav.France),Judgrnent,
I.C.J.Reports 1974,p.253.
Mode officiel de citatio:
Essais nucléaires(Australiec.France),arrêt,
C.1.J. Recueil 1974,p.253.
Salesnumber :
No de vente: 400 20 DECEMBER 1974
JUDGMENT
NUCLEAR TESTS CASE
(AUSTRALIA v.FRANCE)
AFFAIRE DES ESSAIS NUCLÉAIRES
(AUSTRALIEc. FRANCE) INTERNATIONAL COURT OF JUSTICE
YEAR 1974
20 December
General List 20 December 1974
No. 58
NUCLEARTESTSCASE
(AUSTRALIA v. FRANCE)
Questions of jurisdiction and admissibility-Pexamination required of
question of existence of dispute as essentially preliminary matterofxercise
inherent jurisdiction of the Court.
Analysis of claim on theis of the Application and determination of object
of claim-Significancof submissions and of statements of the Applicant for
definition of the claim-Powerof Court to interpret submissions-Public
statements made on behalfof Respondent before and after oral proceedings.
Unilateral acts creative of legal obligations-Prof good faith.
Resolution of dispute by unilateral declaratiorrgiving rise to legal obligation
-Applicant'snon-exercise of right of discontinuance of proceedings no bar to
independentfinding by Court-Disappearanceof dispute resulting in claim no
longer having any object-Jurisdictioonly to be exercised when dispute
genuinely exists between the Parties.
JUDGMENT
Present: PresidentLACHS; Judges FORSTER,GROS, BENGZON, PETRÉN,
ONYEAMA D,ILLARDI,GNACIO-PINTO D, CASTRO M, OROZOVJ,IMENEZ
DE ARÉCHAGA S,ir Humphrey WALDOCKN , AGENDRA SINGH,RUDA;
Judge ad hoc Sir Garfield BARWICK; egistrar AQUARONE.
In the Nuclear Tests case,
between
Australia,
representedby
Mr. P. Brazil, of the Australian Bar, Officer of the Australian Attorney-
General's Depart ment,
as Agent, COUR INTERNATIONALE DE JUSTICE
1974
20 décembre 1974 20 décembre
Rôle général
no 58
AFFAIRE DES ESSAIS NUCLÉAIRES
(AUSTRALIE c. FRANCE)
Questions de compétence et de recevabi-itNécessitéd'un examen préalable
portant sur la question essentiellement préliminaire de l'existence d'un diffé-
rend - Exercice d'un pouvoir inhérentde la Cour.
Analyse de la demande formulée dans la requêteet détermination de son
objet - Portéedes i:onclusions et déclarations du demandeur pour la définition
de la demande - Pouvoir de la Cour d'interpréter les conclusi-nsDéclara-
tions publiques faites au nom du défendeuravant et aprèslôture de l'instance.
Les actes unilatéraux comme sources d'obligations juridiques Principe de
la bonnefoi.
Règlement du diférend par l'effet d'une déclaration unilatérale créantune
obligation juridiqu- Le fait que le demandeur n'exerce pas son droit de se
désister n'empêcheas la Courde parvenirà sa propre conclusio- La dispari-
tion du diflérend entraîne celle de l'objet de la dema-deLa Cour ne peut
exercer sacompétence que s'il existe réellement un différendentre lesParties.
Présents:M. LACHS,Président; MM. FORSTERG , ROS,BENGZONP ,ETRÉN,
ONYEAMA,DILLARD,IGNACIO-PINTO DE CASTRO,MOROZOV,
JIMÉNEZ DE ARÉCHAGA si,r Humphrey WALDOCKM , M. NAGEN-
DRA SINGH,RUDA,juges; sir Garfield BARWICKju ,ge ad hoc:
M. AQUARONE G,refier.
En l'affairedes essais nucléaires,
entre
l'Australie,
représentée par
M. P. Brazil, membre du barreau d'Australie, membre du service de
l'Attorney-General d'Australie,
comme agent, assisted by
H.E. Mr. F. J.Blakeney, C.B.E., Ambassador of Australia,
as Co-Agent,
Senator the Honourable Lionel Murphy, Q.C., Attorney-General of
Australia,
Mr. M. H. Byers, Q.C., Solicitor-General of Australia,
Mr. E. Lauterpacht, Q.C., of the English Bar, Lecturer in the University of
Cambridge,
Professor D. P. O'Connell, of the English, Australian and New Zealand
Bars, Chichele Professor of Public International Law in the University of
Oxford,
as Counsel,
and by
Professor H. Messel, Head of School of Physics, University of Sydney,
Mr. D. J. Stevens, Director, Australian Radiation Laboratory,
Mr. H. Burmester, of the Australian Bar, Officer of the Attorney-General's
Department,
Mr. F. M. Douglas, of the Australian Bar, Officer ofthe Attorney-General's
Department,
Mr: J. F. Browne, of the Australian Bar, Officer of the Department of
Foreign Affairs,
Mr. C. D. Mackenzie, of the Australian Bar, hi rdSecretary, Australian
Embassy, The Hague,
as Advisers,
and
the French Republic,
composed as above,
delivers thefollowing Judgment:
1. By a letter of 9 May 1973, received in the Registry of the Court the same
day, the Ambassador of Australia to the Netherlands transmitted to the
Registrar an Application instituting proceedings againstFrance in respect of a
dispute concerning the holding of atmospheric tests of nuclear weapons by
the French Government in the Pacific Ocean. In order to found to the juris-
diction of the Court, the Application relied on Article 17of the General Act
for the Pacific Settlement of International Disputes done at Geneva on 26
September 1928, read together with Articles 36, paragraph 1, and 37 of the
Statute of the Court, and alternatively on Article 36, paragraph 2, of the
Statute of the Court.
2. Pursuant to Article 40, paragraph 2, of the Statute, the Application was
at once communicated to the French Government. In accordance with
paragraph 3 of that Article, al1other States entitled to appear before the Court
were notified of the Application. assistépar
S. Exc. M. F. J.Blakeney, C.B.E., ambassadeur d'Australie aux Pays-Bas,
comme coagent,
l'honorable Lionel Murphy, Q.C., sénateur, Attorney-General d'Australie,
M. M. H. Byers, Q.C., Solicitor-General d'Australie,
M. E. Lauterpacht, Q.C., membre du barreau d'Angleterre, lecturer à
l'université de Cambridge,
M. D. P. O'Connell, membre des barreaux d'Angleterre, d'Australie et de
Nouvelle-Zélande, professeur de droit international publicà l'université
d'Oxford (chaire Chichele),
comme conseils,
et par
M. H. Messel, directeur de l'écolede physique de l'université de Sydney,
M. D. J. Stevens, directeur du laboratoire australien des radiations,
M. H. Burmester, membre du barreau d'Australie, membre du service de
l'Attorney-General,
M. F. M. Douglas, membre du barreau d'Australie, membre du service de
l'Attorney-General,
M. J. F. Browne, rnembre du barreau d'Australie, fonctionnaire du départe-
ment des affaires étrangères,
M. C. D. Mackenzie, membre du barreau d'Australie, troisième secrétaire
à l'ambassade d'Australie aux Pays-Bas,
comme conseillers,,
la République française,
ainsi composée,
rend l'arrêtsuivant:
1. Par lettre du 9 mai 1973 reçue au Greffe de la Cour le mêmejour l'am-
bassadeur d'Australie aux Pays-Bas a transmis au Greffier une requêteintro-
duisant une instance contre la France au sujet d'un différendportant sur des
essais d'armes nucléaires dans l'atmosphère auxquels le Gouvernement
français procéderait dans l'océanPacifique. Pour établir la compétence de la
Cour, la requête invoquel'article 17 de l'Acte généralpour le règlement paci-
fique des différends internationaux conclu à Genève le 26 septembre 1928,
rapproché de I'article 36, paragraphe 1, et de l'article 37 du Statut de la Cour,
et subsidiairement I'iirticle 36, paragraphe 2, du Statut de la Cour.
2. Conformément à l'article 40, paragraphe 2, du Statut, la requêtea kt6
immédiatement communiquée au Gouvernement français. Conformément au
paragraphe 3 du même article,les autres Etats admis à ester devant la Cour
ont étéinformés de 1.arequête. 3. Pursuant to Article 31, paragraph 2, of the Statute of the Court, the
Government of Australia chose the Right Honourable Sir Garfield Barwick,
Chief Justice of Australia, to sit as judge ad hocin the case.
4. By a letter dated 16 May 1973 from the Ambassador of France to the
Netherlands, handed by him to the Registrar the same day, the French
Government stated that, for reasons set out in the letter and an Annex
thereto, it considered that the Court was manifestly not competent in the
case, and that it could not accept the Court's jurisdiction; and that accor-
dingly the French Government did not intend to appoint an agent, and re-
quested the Court to remove the case from its list. Nor has an agent been
appointed by the French Government.
5. On 9 May 1973, the date of filing of the Application instituting pro-
ceedings, the Agent of Australia also filed in the Registry of the Court a
request for the indication of interim measures of protection under Article 33
of the 1928 General Act for the Pacific Settlement of International Disputes
and Article 41 of the Statute and Article 66 of the Rules of Court. By an
Order dated 22 June 1973theCourt indicated, on the basis of Article 41 of the
Statute, certain interim measures of protection in the case.
6. By the same Order of 22 June 1973, the Court, considering that it was
necessary to resolve as soon as possible the questions of the Court's juris-
diction and of the admissibility of the Application, decided that the written
proceedings should first be addressed to the questions of the jurisdiction of
the Court to entertain the dispute and of the admissibility of the Application,
and fixed 21 September 1973 as the time-limit for the filing of a Memorial by
the Government of Australia and 21 December 1973 as the time-limit for a
Counter-Memorial by the French Government. The Co-Agent of Australia
having requested an extension to 23 November 1973 of the time-limit fixed
for the filing of the Memorial, the time-limits fixed by the Order of 22 June
1973were extended, by an Order dated 28 August 1973, to 23 November 1973
for the Memorial and 19April 1974for the Counter-Memorial. The Memorial
of theGovernment of Australia was filed within the extended time-limit fixed
therefor, and was communicated to the French Government. No Counter-
Memorial was filed by the French Government and, the written proceedings
being thus closed, the case was ready for hearing on 20 April 1974, the day
following the expiration of the time-limit fixed for the Counter-Memorial of
the French Government.
7. On 16 May 1973 the Government of Fiji filed in the Registry of the
Court a request under Article 62 of the Statute to be permitted to intervene in
these proceedings. By an Order of 12 July 1973 the Court, having regard to
its Order of 22 June 1973 by which the written proceedings were first to be
addressed to the questions of the jurisdiction of the Court and of the admissi-
bility of the Application, decided to defer its consideration of the application
of the Government of Fiji for permission to intervene until the Court should
have pronounced upon these questions.
8. On 24 July 1973, the Registrar addressed the notification provided for
in Article 63 of the Statute to the States, other than the Parties to the case,
which were still in existence and were listed in the relevant documents of the
League of Nations as parties to the General Act for the Pacific Settlement of
International Disputes, done at Geneva on 26 September 1928, which was
invoked in the Application as a basis of jurisdiction.
9. The Governments of Argentina, Fiji, New Zealand and Peru requested
that the pleadings and annexed documents should be made available to them 3. En application de I'article 31, paragraphe 2, du Statyt, le Gouvernement
australien a désigné letrès honorable sir Garfield Barwick, Chief Justice
d'Australie, pour siégercomme juge ad hoc en I'affaire.
4. Dans une lettre de l'ambassadeur de France aux Pays-Bas datée du
16 mai 1973 et remise par celui-ci au Greffier le mêmejour, le Gouvernement
français a fait savoir que, pour les motifs exposés dans la lettre et dans une
annexe jointe à celle-ci, il estime que la Cour n'a manifestement pas compé-
tence en I'espèce,qu'il ne peut accepter sa juridiction, et qu'en conséquence le
Gouvernement français n'a pas l'intention de désigner un agent et demande a
la Cour d'ordonner que I'affaire soit rayée de son rôle. Le Gouvernement
français n'a pas désigné d'agent.
5. En même temps que la requête introductive d'instance, l'agent de
l'Australie a déposéau Greffe le 9 mai 1973 une demande en indication de
mesures conservatoires fondée sur I'article 33 del'Acte généralde 1928 pour
le règlement pacifique des différends internationaux, I'article 41 du Statut et
I'article 66 du Règlement de la Cour. Par ordonnance du 22juin 1973, la Cour
a indiqué, sur la base de l'article 41 du Statut, certaines mesures conserva-
toires en l'espèce.
6. Par la même ordonnance du 22 juin 1973, la Cour, considérant qu'il
était nécessaire de régler aussi rapidement que possible les questions relatives
à sa compétence et a la recevabilité de la requête, a décidéque les pièces
écrites porteraient d'abord sur ces questions et a fixéla date d'expiration des
délais au 21 septembre 1973 pour le dépôt du mémoire du Gouvernement
australien et au 21 décembre 1973 pour le dépôt du contre-mémoire du
Gouvernement français. Le coagent de l'Australie ayant demandé que soit
prorogé au 23 novembre 1973 le délai dans lequel le mémoire devait être
déposé,la date d'expiration des délaisfixéspar l'ordonnance du 22 juin 1973
a été reportée parordonnancedu 28 août 1973 au 23 novembre 1973 pour le
mémoire du Gouvernement australien et au 19 avril 1974 pour le contre-
mémoire du Gouvernement français. Le mémoire du Gouvernement austra-
lien a étédéposédans ledélaiainsi prorogé et il a étécommuniquéau Gouver-
nement français. Le Gouvernement français n'a pas déposédecontre-mémoire
et, la procédure écrite étant ainsi terminée, l'affaire s'est trouvée en état
le 20 avril 1974,c'est-à-dire le lendemain du jour où expirait ledélaifixépour
le dépôt du contre-mémoire du Gouvernement français.
7. Le 16 mai 1973, le Gouvernement fidjien a déposé auGreffe, conformé-
ment a I'article 62 LIStatut, une requête a fin d'intervention dans l'instance.
Par ordonnance du 12 juillet 1973, la Cour, eu égard a son ordonnance du
22 juin 1973 prescrivant que les pièces écrites porteraient d'abord sur les
questions relatives a sa compétence et à la recevabilité de la requête, a décidé
de surseoir à l'examen de la requête par laquelle le Gouvernement fidjien
demandait à intervenir jusqu'a ce qu'elle eût statué sur ces questions.
8. Le 24juillet 1973, le Greffier a adressé la notification prévue à I'article 63
du Statut aux Etats, autres que les Parties a l'instance, qui existaient encore
et étaient indiqués dans les documents pertinents de la Sociétédes Nations
comme parties a l'Acte généralpour le règlement pacifique des différends
internationaux conclu a Genève le 26 septembre 1928, qui était invoqué dans
la requête comme l'un des fondements de la compétence de la Cour.
9. Les Gouvernemients de l'Argentine, de Fidji, de la Nouvelle-Zélande et
du Pérou ont demandé que les pièces de la procédure écrite soient tenues à in accordance with Article 48, paragraph 2, of the Rules of Court. The Parties
were consulted on each occasion, and the French Government having main-
tained the position stated in the letter of 16 May 1973, and thus declined to
express an opinion, the Court or the President decided to accede to these
requests.
10. On 4-6, 8-9 and 11 July 1974, after due notice to the Parties, public
hearings were held, in the course of which theCourt heard the oral argument,
on the questions of the Court's jurisdiction and of the admissibility of the
Application, advanced by Mr. P. Brazil, Agent of Australia and Senator the
Honourable Lionel Murphy, Q.C., Mr. M. H. Byers, Q.C., Mr. E. Lauter-
pacht, Q.C., and Professor D. P. O'Connell, counsel, on behalf of the Govern-
ment of Australia. The French Government was not represented at the
hearings.
11. In the course of the written proceedings, the following submissions
were presented on behalf of the Government of Australia:
in the Application:
"The Government of Australia asks the Court to adjudge and
declare that, for the above-mentioned reasons or any of them or
for any other reason that the Court deems to be relevant, the carrying
out of further atmospheric nuclear weapon tests in the South Pacific
Ocean is not consistent with applicable rules of international law.
And to Order
that the French Republic shall not carry out any further such tests."
in the Mernorial:
"The Government of Australia submits to the Court that it is entitled
to a declaration and judgment that:
(a) the Court has jurisdiction to entertain the dispute, the subject of the
Application filed by the Government of Australia on 9 May 1973;
and
(6) the Application is admissible."
12. During the oral proceedings, the following written submissions were
filed in the Registry of the Court on behalf of the Government of Australia:
"The final submissions of the Government of Australia are that:
(a) the Court has jurisdiction to entertain the dispute the subject of the
Application filed by the Government of Australia on 9 May 1973;
and
(b) the Application is admissible
and that accordingly the Government of Australia is entitled to a decla-
ration and judgment that the Court has full competence to proceed to
entertain the Application by Australia on the Merits of the dispute."
13. No pleadings were filed by the French Government, and it was not
represented at the oral proceedings; no formal submissions were therefor
made by that Government. The attitude of the French Government with
regard to the question of the Court's jurisdiction was however defined in the
above-mentioned letter of 16 May 1973 from the French Arnbassador to the
7 leur disposition conformément à l'article 48, paragraphe 2, du Règlement. Les
Parties ont étéconsultées dans chaque cas et, le Gouvernement français
maintenant la position prise dans la lettre du 16 mai 1973 pour refuser
de donner un avis, la Cour, ou le Président, a décidéde faire droit à ces
demandes.
10. Les Parties ayant étédûment averties, des audiences publiques ont eu
lieu les4, 5, 6, 8, 9 et II juillet 1974, durant lesquelles la Cour a entendu
M. P. Brazil, agent de l'Australie, et l'honorable Lionel Murphy, Q.C.,
sénateur,M. M. H. Byers, Q.C., M. E. Lauterpacht, Q.C., et M. D. P. O'Con-
nell, conseils, plaider pour le Gouvernement australien sur les questions
relativesà la compétence de la Cour et à la recevabilité de la requête. Le
Gouvernement français n'étaitpas représentéaux audiences.
11. Dans la procédure écrite,les conclusions ci-après ont étédéposéesau
nom du Gouvernement australien:
dans la requête:
«Le Gouvernement nustralien prie la Cour de dire etjuger que, pour
l'un quelconque ou l'ensemble des motifs exposés ci-dessus ou pour tout
autre motif jugépertinentpar la Cour, la poursuite desessais atmosphéri-
ques d'armes nucléairesdans l'océan PacifiqueSud n'est pas compatible
avec les règles applicables du droit international et
Ordonner
à la République française de ne plus faire de tels essais»
dans le mémoire:
«Le Gouvernement australien s'estime fondé àce que la Cour dise et
juge que:
a) la Cour a compétence pour connaître du différendqui fait l'objet de
la requêtedéposépar le Gouvernement australien le 9 mai 1973;
b) la requêteest recevable. »
12. A l'issue de la procédure orale, les conclusions écrites ci-après ont été
déposéesau Greffe au nom du Gouvernementaustralien:
«Les conclusions finales du Gouvernement australien sont les sui-
vantes:
a) la Cour a compétence pour connaître du différendqui fait l'objet de la
requêtedéposéepar le Gouvernement australien le 9 mai 1973;
b) la requêteest recevable;
Et en conséquence le Gouvernement australien s'estime fondé à ce
que la Cour dise et juge qu'elle a pleine compétence pour connaître de la
requêtede l'Australie sur le fond du différend.»
13. Aucune pièceécrite n'ayant étédéposéepar le Gouvernement français,
et celui-ci ne s'étant pas fait représenterla procédure orale, aucune conclu-
sion n'a étéprise formellement par ce gouvernement. Toutefois l'attitude du
Gouvernement français en ce qui concerne la question de la compétence de
la Cour a étédéfiniedans la lettre précitéede l'ambassadeur de France aux
7Netherlands, and the document annexed thereto. The said letter stated in
particular that:
". ..the Government of the [French] Republic, as it has notified the
Australian Government, considers that the Court is manifestly not
competent in this case and that it cannot accept itsjuridiction".
14. As indicated above (paragraph 4), the letter from the French
Ambassador of 16 May 1973 also stated that the French Government
"respectfully requests the Court to be so good as to order that the case be
removed from the list". At the opening of the public hearing concerning
the request for interim measures of protection, held on 21 May 1973, the
President announced that "this request ... has been duly noted, and the
Court will deal with it in due course, in application of Article 36, para-
graph 6, of the Statute of the Court". In its Order of 22 June 1973, the
Court stated that the considerations therein set out did not "permit the
Court to accede at the present stage of the proceedings" to that request.
Having now had the opportunity of examining the request in the light of
the subsequent proceedings, the Court finds that the present case is not
one in which the procedure of summary removal from the list would be
appropriate.
15. It is to be regretted that the French Government has failed to
appear in order to put forward its arguments on the issues arising in the
present phase of the proceedings, and the Court has thus not had the
assistance it might have derived from such arguments or from any
evidence adduced in support of them. The Court nevertheless has to
proceed and reach a conclusion, and in doing so must have regard not
only to the evidence brought before it and the arguments addressed to it
by the Applicant, but also to any documentary or other evidence which
may be relevant. It must on this basis satisfy itself, first that there exists
no bar to the exercise of its judicial function, and secondly, if no such bar
exists, that the Application is well founded in fact and in law.
16. The present case relates to a dispute between the Government of
Australia and the French Government concerning the holding of atmos-
pheric tests of nuclear weapons by the latter Government in the South
Pacific Ocean. Since in the present phase of the proceedings the Court has
to deal only with preliminary matters, it is appropriate to recall that its
approach to a phase of this kind must be, as it was expressed in the
Fisheries Jurisdiction cases, as follows:Pays-Bas en date du 16 mai 1973, et dans le document qui y était joint en
annexe. La lettre de l'ambassadeur contenait notamment ce passage:
« ainsi qu'ilen a averti le Gouvernement australien, le Gouvernement de
la Républiqueestimeque la Cour n'a manifestementpas compétence dans
cette affaire et qu'il ne peut accepter sa juridiction)).
14. Comme il a été indiqué(paragraphe 4), l'ambassadeur de France
déclarait aussi dans sa lettre du 16 mai 1973 que le Gouvernement
français ((demande respectueusement à la Cour de bien vouloir ordonner
que cette affaire soit rayéede son rôle 1)Au début de l'audience publique
consacrée à la demande en indication de mesures conservatoires qui s'est
tenue le 21 mai 19713l,e Président a annoncé: ((II a étédûmentpris acte de
cette demande ...eitla Cour l'examinera le moment venu, conformément
à l'article 36, paragraphe 6, de son Statut.)) Dans son ordonnance du
22 juin 1973, la Cour a dit que, pour les raisons énoncéesdans cette
ordonnance, elle ne pouvait ((faire droit, au stade actuelde la procédure, ))
à la demande du Gouvernement français. Ayant eu depuis lors la possibi-
litéd'examiner cette demande compte tenu de la suite de la procédure, la
Cour estime que la présente affaire n'est pas de celles auxquelles il con-
viendrait d'appliquer la procédure sommaire de radiation du rôle.
15. 11est regrettable que le Gouvernement français ne se soit pas
présentépour développerses argumentssur lesquestionsqui seposent en la
phase actuelle de la procédure et qu'ainsi la Cour n'ait pas eu l'aide que
l'exposéde ces arguments et toute preuve fournie à l'appui auraient pu
lui apporter. La Cour doit cependant poursuivre l'affaire pour aboutir à
une conclusion et, ce faisant, doit tenir compte non seulement des preuves
et des arguments qui lui sont présentéspar le demandeur, mais aussi de
toute documentatiion ou preuve pertinente. Elle doit sur cette base
s'assurer en premier lieu qu'il n'existe aucun obstacle à l'exercice de
sa fonction judiciaire et en second lieu, s'il n'existe aucun obstacle de ce
genre, que la requete est fondéeen fait et en droit.
16. La présente affaire concerne un différend entre le Gouvernement
australien et le Gouvernement français au sujet d'essais d'armes nu-
cléaires effectuésen atmosphère par ce dernier dans l'océan Pacifique
Sud. Attendu que, dans la phase actuelle de l'instance, la Cour ne doit trai-
ter que de questions préliminaires, il convient de rappeler que, dans une
phase de cette nature, elle doit se placer dans l'optique qu'elle a définie en
ces termes dans les affaires de la Compétenceenmatièredepêclzeries: "The issue being thus limited, the Court will avoid not only al1
expressions of opinion on matters of substance, but also any pro-
nouncement which might prejudge or appear to prejudge any
eventual decision on the merits." (I.C.J. Reports 1973,pp. 7 and 54.)
It will however be necessary to give a summary of the principal facts
underlying the case.
17. Prior to the filing of the Application instituting proceedings in this
case, the French Government had carried out atmospheric tests of
nuclear devices at its Centre d'expérimentations du Pacifique, in the
territory of French Polynesia, in the years 1966, 1967, 1968, 1970, 1971
and 1972.The main firing site used has been Mururoa atoll some 6,000
kilometres to the east of the Australian mainland. The French Govern-
ment has created "Prohibited Zones" for aircraftand "Dangerous Zones"
for aircraft and shipping, inorder to exclude aircraft and shipping from
the area of the tests centre; these "zones" have been put into effect
during the period of testing in each year in which tests have been carried
out.
18. As the United Nations Scientific Committee on the Effects of
Atomic Radiation has recorded in its successive reports to the General
Assembly, the testing of nuclear devices in the atmosphere has entailed
the release into the atmosphere, and the consequent dissipation in
varying degrees throughout the world, of measurable quantities of radio-
active matter. It is asserted by Australia that the French atmospheric
tests have caused somefall-out of this kind to be deposited on Australian
territory; France has maintained in particular that the radio-activeatter
produced by its tests has been so infinitesimal that it may be regarded as
negligible, and that such fall-out on Australian territory does not con-
stitute a danger to the health of the Australian population. These dis-
puted points are clearly matters going to the merits of the case, and the
Court must therefore refrain, for the reasons given above, from ex-
pressing any view on them.
19. Byletters of 19September 1973,29 August and 11November 1974,
the Government of Australia informed the Court that subsequent to the
Court's Order of 22 June 1973 indicating, as interim measures under
Article 41 of the Statute.(interalia)that the French Government should
avoid nuclear tests causing the deposit of radio-active fall-out in Aus-
tralian territory, two further series of atmospheric tests, in the months of
July and August 1973and June to September 1974,had been carried out
at the Centre d'expérimentations du Pacifique. The letters also stated
that fall-out had been recorded on Australian territory which, according
to the Australian Government, was clearly attributable to these tests, ((La question étantainsi limitée,la Cour s'abstiendra non seule-
ment d'exprimer une opinion sur despoints defond, mais aussi de se
prononcer d'une manièrequi pourrait préjugerou paraître préjuger
toute décision qu'ellepourrait rendre sur le fond.)) (C.I.J. Recueil
1973, p. 7 et 54.)
Il y a lieu cependant de résumerles principaux faits qui sontà l'origine de
l'affaire.
17. Avant le dépôt dela requêteintroductive d'instance en l'espèce,le
Gouvernement français avait procédé à des essais atmosphériques d'en-
gins nucléaires à son centre d'expérimentations du Pacifique, dans le
territoire de la Polynésie française, en 1966, 1967, 1968, 1970, 1971 et
1972. Le lieu utilisépour les explosions a étéprincipalement l'atoll de
Mururoa, situé à quelque 6000 kilomètres à l'est du continent australien.
Le Gouvernement français a institué des (zones interdites ))aux aéronefs
et des (zones dangereuses )pour la navigation aérienne etmaritime, afin
d'empêcherles avions et les navires d'approcher du centre d'expérimen-
tations; ces zones ont été établiecshacune des annéesoù des essais ont eu
lieu, pour la durée deces essais.
18. Comme le Comitéscientifique des Nations Unies pour l'étudedes
effets des rayonnements ionisants l'a indiquédans ses rapports successifs
à l'Assemblée générale,les essais d'engins nucléaires effectuésdans
l'atmosphère ont libérédans celle-ci et disséminé ensuitedans le monde
entier à des degrés variablesdes quantités mesurables de matièresradio-
actives. L'Australie affirme que les essais atmosphériques français ont
provoquédes retombéesde cette nature en territoire australien. La France
soutient entre autres que les élémentsradioactifs produits par ses expé-
riences sont si minimes qu'ils ne peuvent êtreconsidérésque comme
négligeables et que les retombées sur le territoire australien qui en
résultent ne constituent pas un danger pour la santé de la population
australienne. Ces points litigieux intéressant manifestement le fond de
l'affaire, la Cour doit s'abstenir, pour les raisons précédemment in-
diquées, d'exprimer une opinion à leur sujet.
19. Par lettres du 19 septembre 1973 et des 29 août et 11 novembre
1974,le Gouvernement australien a informé la Cour que, après l'ordon-
nance du 22 juin 1973 qui, à titre de mesures conservatoires prises en
vertu de l'article 41 du Statut, indiquait notamment que le Gouvernement
français devait s'abstenir de procéder à des essais nucléairesprovoquant
le dépôt de retombées radioactives sur le territoire de l'Australie, deux
nouvelles séries d'essaisatmosphériques ont eu lieu au centre d'expéri-
mentations du Pacifique en juillet et août 1973 et de juin à septembre
1974. Ces lettres indiquaient aussi que l'on avait enregistré sur le terri-
toire australien des retombées qui, selon le Gouvernement australien,259 NUCLEAR TESTS(JUDGMENT)
and that "in the opinion of the Government of Australia the conduct of
the French Government constitutes a clear and deliberate breach of the
Order of the Court of 22 June 1973".
20. Recently a number of authoritative statements have been made on
behalf of the French Government concerning its intentions as to future
nuclear testing in the South Pacific Ocean. The significance of these
statements, and their effect for the purposes of the present proceedings,
will be examined in detail later in the present Judgment.
21. The Application founds the jurisdiction of the Court on the follow-
ing basis :
"(i) Article 17 of the General Act for the Pacific Settlement of
International Disputes, 1928, read together with Articles 36 (1)
and 37 of the Statute of the Court. Australia and the French
Republic both acceded to the General Act on 21 May 1931 ...
(ii) Alternatively, Article 36(2) of the Statute of the Court. Aus-
tralia and the French Republic have both made declarations
thereunder."
22. The scope of the present phase of the proceedings was defined by
the Court's Order of 22 June 1973,by which the Parties were called upon
to argue, in the first instance, questions of the jurisdiction of the Court
and the admissibility of the Application. For this reason, as already
indicated, not only the Parties but also the Court itself must refrain from
entering into the merits of the claim. However, while examining these
questions of a preliminary character, the Court is entitled, and in some
circumstances may be required, to go into other questions which may not
be strictly capable of classification as matters of jurisdiction or admis-
sibility but are of such a nature as to require examination in priority to
those matters.
23. In this connection, it should be emphasized that the Court pos-
sesses an inherent jurisdiction enabling it to take such action as may be
required, on the one hand to ensure that the exercise of its jurisdiction
over the merits, if and when established, shall not be frustrated, and on
the other, to provide for the orderly settlement of al1matters in dispute,
to ensure the observance of the "inherent limitations on the exercise of
the judicial function" of the Court, and to "maintain its judicial char-
acter" (Northern Cameroons, Judgment, I.C.J. Reports 1963, at p. 29).
Such inherent jurisdiction, on the basis of which the Court is fully
empowered to make whatever findings may be necessary for the purposes
just indicated, derives from the mere existence of the Court as a judicialétaient manifestement attribuables à ces essais, et que, ccde l'avis du
Gouvernement australien, l'attitude du Gouvernement français constitue
une violation claire et délibérée de I'ordonnancerendue par la Cour le
22 juin 1973 ».
20. Un certain nombre de déclarations autorisées ont été récemment
faites au nom du Gouvernement français, concernant les intentions de
celui-ci au sujet de ses futures expériences nucléairesdans l'océan Paci-
fique Sud. La portée de ces déclarations et leur incidence sur la présente
instance seront examinéesen détaildans la suite de l'arrêt.
21. La requête invoque, comme base de la compétence de la Cour:
c<i) l'article17 de l'Acte généralpour le règlement pacifique des
différends internationaux (1928) rapproché de l'article 36,
paragraphe 1,et de l'article 37 du Statut de la Cour. L'Australie
et la République française ont toutes deux adhéré à l'Acte
généralle 21 mai 1931...
ii) subsidiairement, l'article 36, paragraphe 2, du Statut de la Cour.
L'Australie et la République française ont toutes deux déposé
des déclarations aux termes de cet article.))
22. La portée de la présente phase de la procédure a étédéfiniedans
I'ordonnance rendue par la Cour le 22 juin 1973, qui demandait aux
Parties de traiter d'abord des questions relatives à la compétence de la
Cour et à la recevabilité de la requête.Pour cette raison, ainsi qu'il a été
indiqué, non seulement les Parties mais la Cour elle-même doivent
s'abstenir d'aborder la demande au fond. Cependant, quand elle examine
ces questions de caractère préliminaire, la Cour a le droit et, dans cer-
taines circonstance:;, peut avoir l'obligation de prendre en considération
d'autres questions qui, sans qu'on puisse les classer peut-être a stricte-
ment parler parmi les problèmes de compétence ou de recevabilité,appel-
lent par leur nature une étude préalableà celle de ces problèmes.
23. A cet égard, il convient de souligner que la Cour possède un
pouvoir inhérent qui l'autorise à prendre toute mesure voulue, d'une part
pour faire en sorte que, si sa compétence au fond est établie, l'exercice de
cette compétence ine se révèlepas vain, d'autre part pour assurer le
règlement régulier de tous les points en litige ainsi que le respect des
((limitations inhérentes à I'exercicede la fonction judiciaire» de la Cour
et pour ((conserver son caractère judiciaire » (Cameroun septentrional,
arrêt,C.I.J. Recueil 1963,p. 29). Un pouvoir inhérent de ce genre, sur la
base duquel la Cour est pleinement habilitée à adopter toute conclusion
éventuellement nécessaireaux fins qui viennent d'être indiqùées, découle
de l'existence mêmede la Cour, organe judiciaire établi par le consente-
10organ established by the consent of States, and is conferred upon it in
order that its basic judicial functions may be safeguarded.
24. With these considerations in mind, the Court has first to examine
a question which it finds to be essentially preliminary, namely the exis-
tence of a dispute, for, whether or not the Court has jurisdiction in the
present case, the resolution of that question could exert a decisive in-
fluence on the continuation of the proceedings. It will therefore beneces-
sary to make a detailed analysis of the claim submitted to the Court by
the Application of Australia. The present phase of the proceedings
having been devoted solely to preliminary questions, the Applicant has
not had the opportunity of fully expounding its contentions on the
merits. However the Application, which is required by Article 40 of the
Statute of the Court to indicate "the subject of the dispute", must be the
point of reference for the consideration by the Court of the nature and
existence of the dispute brought before it.
25. The Court would recall that the submission made in the Applica-
tion (paragraph 11above) is that the Court should adjudge and declare
that "the carrying out of further atmospheric nuclear weapon tests in the
South PacificOcean is not consistent with applicable rules of international
lawW-the Application having specified in what respect further tests
were alleged to be in violation of international law-and should order
"that the French Republic shall not carry outany further such tests".
26. The diplomatic correspondence of recent years between Australia
and France reveals Australia's preoccupation with French nuclear
atmospheric tests in the South Pacific region, and indicates that its
objective has been to bring about their termination. Thus in a Note
dated 3January 1973the Australian Government made it clear that it was
inviting the French Government "to refrain from anyfurther atmospheric
nuclear tests in the Pacific area and formally to assure the Australian
Government that no more such tests will be held in the Pacific area". In
the Application, the Government of Australia observed in connection
with thisNote (and the French reply of 7 February 1973)that:
"It is atthese Notes, of 3 January and 7 February 1973,that the
Court is respectfully invited to look most closely; for it is in them
that the shape and dimensions of the dispute which now so sadly
divides the parties appear so clearly. The Government of Australia
claimed that the continuance of testing by France isillegal and called
for the cessation of tests. The Government of France asserted the
legality of its conduct and gave no indication that the tests would
stop." (Para. 15 of the Application.)
That this was the object of the claim also clearly emerges fromthe request
for the indication of interim measures of protection, submitted to the
Court by the Applicant on 9 May 1973,in which it was observed:
"As is stated in the Application, Australia has sought to obtain
from the French Republic a permanent undertaking to refrain fromment des Etats, et lui est conféréafin que sa fonction judiciaire fonda-
mentale puisse êtresauvegardée.
24. Eu égard à c:esconsidérations, la Cour doit examiner d'abord une
question qu'elle estime essentiellement préliminaire, à savoir l'existence
d'un différend,car que la Cour ait ou non compétenceen l'espècela solu-
tion de cette question pourrait exercer une influence décisivesur la suite
de l'instance. II lui incombe donc d'analyser de façon précise lademande
que l'Australie lui adresse dans sa requête. La présentephase de I'ins-
tance n'ayant étéconsacréequ'à des questions préliminaires, le deman-
deur n'a pas eu l'occasion de développer complètement ses thèses sur le
fond. Il reste que c'est par rapport à la requête,laquelle doit, d'après
l'article 40du Statut, indiquerccl'objet du différendN, que la Cour doit
examiner la nature et l'existencedu différendporté devant elle.
25. La Cour rappelle que la demande présentéedans la requête
(paragraphe 1 I ci-dessus) tend à ce que la Cour dise et juge que cla
poursuite des essais atmosphériques d'armes nucléaires dans l'océan
Pacifique Sud n'est pas compatible avec les règles applicables du droit
international »- la requêtespécifiant enquoi de nouveaux essais viole-
raient le droit international et ordonne (à la République française de
ne plus faire de telisessais ».
26. La correspondance diplomatique échangée cesdernières années
entre 1'~ustralie et la France montre les préoccupations que les expé-
riences nucléairesfrançaises effectuéesen atmosphère dans la région du
Pacifique Sud suscitent en Australie et indique que celle-ci a eu pour
objectif lacessatioci des essais. Ainsi, dans une note du 3janvier 1973, le
ou verne m auetalien priait le Gouvernement français ((de s'abstenir
de tous nouveaux essais nucléaires en atmosphère dans la région du
Pacifique et de lui donner l'assurance formelle qu'il n'y sera procédé à
aucun nouvel essai de ce genre )).Dans la requête, le Gouvernement
australien a dità propos de-cette note et de la réponsedu Gouvernement
français en date du 7 février 1973:
((Ce sont ces notes, des 3janvier et 7 février1973,que la Cour est
respectueusement invitée à examiner avec la plus grande attention
car ce sont elles qui mettent en pleine lumière lanature et l'ampleur
du différend qui oppose maintenant les Parties de façon si regret-
table. Le Gouvernement australien soutenait que la poursuite des
essais par la France était illégaleet demandait leur cessation. Le
Gouvernement français affirmait la légalitéde son comportement et
ne laissait pas entrevoir l'arrêt des essaisar. 15).
Que tel ait étél'objet de la demande, c'est ceque confirme avec nettetéla
demande en indication de mesures conservatoires que le requérant a
présentée à la Cour le9 mai 1973etoù figure cette remarque:
((Ainsi qu'il est indiqué dans la requête,l'Australie a cherché à
obtenir de la Rkpublique française qu'elle s'engageen permanence à further atmospheric nuclear tests in the Pacific. However, the French
Republic has expressly refused to give any such undertaking. It was
made clear in a statement in the French Parliament on 2 May 1973
by the French Secretary of State for the Armies that the French
Government, regardless of the protests made by Australia and other
countries, does not envisage any cancellation or modification of the
programme of nuclear testing as originally planned." (Para. 69.)
27. Further light is thrown on the nature of the Australian claim by the
reaction of Australia, through its Attorney-General, to statements,
referred to in paragraph 20 above, made on behalf of France and relating
to nuclear tests in the South Pacific Ocean. In the course of the oral
proceedings, the Attorney-General of Australia outlined the history of the
dispute subsequent to the Order of 22 June 1973, and included in this
review mention of a communiqué issued by the Office of the President
of the French Republic on 8 June 1974. The Attorney-General's com-
ments on this document indicated that it merited analysis as possible
evidence of a certain development in the controversy between the Parties,
though at the same time he made it clear that this development was not, in
his Government's view, of such a nature as to resolve the dispute to its
satisfaction. More particularly he reminded the Courtthat "Australia has
consistently stated that it would welcome a French statement to the
effect that no further atmospheric nuclear tests would be conducted .. .
but no such assurance was given". The Attorney-General continued, with
reference to the communiqué of 8 June:
"The concern of the Australian Government is to exclude com-
pletely atmospheric testing. It has repeatedly sought assurances that
atmospheric tests will end. It has not received those assurances. The
recent French Presidential statement cannot be read as a firm,
explicit and binding undertaking to refrain from further atmospheric
tests. It follows that the Government of France is still reserving to
itself the right to carry out atmospheric nuclear tests." (Hearing of
4 July 1974.)
Itis clear from these statements that if the French Government had given
what could have been construed by Australia as "a firm, explicit and
binding undertaking to refrain from further atmospheric tests", the
applicant Government would have regarded its objective as having been
achieved.
28. Subsequently, on 26 September 1974, the Attorney-General of
Australia, replying to a question put in the Australian Senate with regard
to reports that France had announced that it had finished atmospheric
nuclear testing, said :
"From the reports 1have received it appears that what the French
Foreign Minister actually said was 'We have now reached a stage in ne plus procéder dans le Pacifique à de nouveaux essais nucléaires
dans I'atmosphère. La République française a expressément refusé
de prendre un tel engagement. IIressort clairement d'une déclaration
du ministre des armées faite devant le Parlement français le 2 mai
1973 que le Gouvernement français, passant outre aux protestations
de l'Australie et d'autres pays, n'envisage pas d'annuler ni de mo-
difier le programme d'expérimentation nucléaire prévu.n (Par. 69.)
27. La nature de la demande australienne se trouve préciséeencore par
la manière dont I'PLustralie,par l'intermédiaire de son Attorney-General,
a réagiaux déclarations mentionnées au paragraphe 20 qui ont été faites
au nom du Gouvernement français-en ce qui concerne les expériences
nucléaires dans l'océan Pacifique Sud. Lors de la procédure orale,
l'Attorney-General (d'Australie a esquissél'historique du différend depuis
l'ordonnance du 22juin 1973et rappeléun communiqué de la présidence
de la République française en date du 8juin 1974. Dans les observations
qu'il a formulées sur ce document, l'Attorney-General a indiqué qu'on
pouvait peut-être à l'analyse y voir la preuve d'une certaine évolution de
la controverse entr~eles Parties, tout en soulignant que, de l'avis de son
gouvernement, cette évolution n'étaitpas de nature à résoudre le différend
à sa satisfaction. Plus particulièrement, il a rappeléà la Cour que (I'Aus-
tralie a maintes fois ré~été au'elle souhaite obtenir de la France I'assu-
rance qu'il ne sera pas procédéà de nouvelles explosions nucléaires dans
I'atmosphère ...mais cette assurance n'a pas étédonnée 1).L'Attorney-
General a poursuivi en ces termes à propos du communiqué du 8 juin :
<(Le but du Gouvernement australien est d'exclure complètement
les expérience:;atmosphériques. 11a maintes fois demandé l'assu-
rance que les essais dans I'atmosphère prendraient fin. 11n'a pas
obtenu cette assurance. On ne saurait voir dans la récente déclara-
tion présidentielle française un engagement ferme, explicite et de
caractère ob1ig;atoirede s'abstenir de procéder à de nouveaux essais
dans I'atmosphère. Le Gouvernement français se réserve donc
toujours le drloit d'effectuer des essais nucléaires en atmosphère. ))
(Audience du 4 juillet 1974.)
Il ressort de ces dBclarations que, si le Gouvernement français avait pris
ce que l'Australie .aurait pu interpréter comme ((un engagement ferme,
explicite et de caractère obligatoire de s'abstenir de procéder à de nou-
veaux essais dans l'atmosphère)), le Gouvernement demandeur aurait
considéréqu'il avait atteint son objectif.
28. Plus tard, le 26 septembre 1974,répondant à une question poséeau
Sénat australien sur les informations d'après lesquelles la France avait
annoncé qu'elle avait terminé ses essais nucléaires dans I'atmosphère,
l'Attorney-General d'Australie a dit:
((D'après les renseignements en ma possession, il semble que le
ministre des Affaires étrangèresde France ait dit en fait: ((Parvenus our nuclear technology that makes it possible for us to continue our
program by underground testing, and we have taken steps to do so as
early as next year'... this statement falls far short of a commitment
or undertaking that there will be no more atmospheric tests con-
ducted by the French Government at its Pacific Tests Centre ...
There is a basic distinction between an assertion that steps are being
taken to continue the testing program by underground testing as
early as next year and an assurance that no further atmospheric tests
will take place. It seems that the Government of France, while
apparently taking a step in the right direction, is still reserving to
itself the right to carry out atmospheric nuclear tests. In legal terms,
Australia has nothingfrom the French Government which protects it
against anyfurther atmospheric tests should the French Government
subsequently decide to hold them."
Without commenting for the moment on the Attorney-General's inter-
pretation of the French statements brought to his notice, the Court would
observe that it is clear that the Australian Government contemplated the
possibility of "an assurance that no further atmospheric tests will take
place" being sufficientto protect Australia.
29. In the light of these statements, it is essential to consider whether
the Government of Australia requests a judgment by the Court which
would only state the legal relationship between the Applicant and the
Respondent with regard to the matters in issue, or a judgment of a type
which in terms requires one or both of the Parties to take, or refrain from
taking, some action. Thus it is the Court's duty to isolate the real issue in
the case and to identify the object of the claim. It has never been con-
tested that the Court isentitled to interpret the submissions of the parties,
and in fact is bound to do so; this is one of the attributes of itsjudicial
functions. It is true that, when the claim is not properly formulated
because the submissions of the parties are inadequate, the Court has no
power to "substitute itself for them and formulate new submissions
simply on the basis of arguments and facts advanced" (P.C.I.J., Series A,
No. 7,p. 35)b,ut that is not the case here, nor is it a case of the reformula-
tion of submissions by the Court. The Court has on the other hand
repeatedly exercised the power to exclude, when necessary, certain con-
tentions or arguments which were advanced by a party as part of the
submissions, but which were regarded by the Court, not as indications of
what the party was asking the Court to decide, but as reasons advanced
why the Court should decide in the sense contended for by that party.
Thus in the Fisheriescase, the Court said of nine of the thirteen points in
the Applicant's submissions: "These are elements which might furnish
reasons in support of the Judgment, but cannot constitute the decision" désormais, dans la technologie nucléaire, à un degré où il nous
devient possible de poursuivre nos programmes par des essais
souterrains, nous avons pris nos dispositions pour nous engager dans
cette voie dèsl'annéeprochaine ))..cette déclaration est fort loin de
représenter un engagement suivant lequel le Gouvernement français
n'effectuerait plus d'essais dans l'atmosphère à son centre d'expéri-
mentations du Pacifique ...II existe une différence fondamentale
entre une affirrnation selon laquelle des dispositions sont prises pour
poursuivre le programme d'expérimentation par des essais souter-
rains dès l'annéeprochaine et l'assurance qu'iln'y aura plus d'essais
dans l'atmosphère. 11semble que, bien qu'il fasse apparemment un
pas dans la borine direction, leGouvernement françaiscontinue de se
réserverledroit de se livrer àdes essais nucléairesdans l'atmosphère.
D'un point de vue juridique, l'Australie n'a rien obtenu du Gouver-
nement français qui la protège contre de nouveaux essais atmosphé-
riques au cas ,où le Gouvernement français déciderait par la suite
d'y procéder. )>
Sans commenter pour le moment l'interprétation que l'Attorney-General
a donnéedes déclarations françaises portées à sa connaissance, la Cour
voudrait faire observer qu'il est clair que, selon le Gouvernement austra-
lien,((I'assurance qu'il n'yaura plusd'essaisdans l'atmosphère >)pourrait
suffirea protéger l'Australie.
29. Compte tenui de ces déclarations, il est essentiel d'examiner si le
Gouvernement australien sollicite de la Cour un jugement qui ne ferait
que préciser le lien juridique entre le demandeur et le défendeur par
rapport aux questions en litige, ou un jugement conçu de façon telle que
son libellé obligerait l'une des Parties ou les deux à prendre ou à s'abs-
tenir de prendre certaines mesures. C'est donc le devoir de la Cour de
circonscrire le véritable problèmeen cause et de préciser l'objet de la
demande. Il n'a jamais été contesté que la Cour est en droit et qu'elle a
mêmele devoir d'interpréter les conclusions des parties; c'est l'un des
attributs de sa fonction judiciaire. Assurément, quand la demande n'est
pas formuléecomme il convient parce que les conclusions des parties sont
inadéquates, la Cour n'a pas le pouvoir de (se substituer [aux Parties]
pour en formuler cle nouvelles sur la base des seules thèses avancéeset
faits allégués))(C.P.J.I. sérieA no 7, p. 35), mais tel n'est pas le cas en
l'espèceet la question d'une formulation nouvelle des conclusions par la
Cour ne se pose pa.s non plus. En revanche, la Cour a exercé à maintes
reprises le pouvoir qu'elle possèded'écarter,s'il est nécessaire,certaines
thèsesou certains arguments avancéspar une partie comme élémend t e ses
conclusions quand elle lesconsidère, non pascomme des indications de ce
que la partie lui demande de décider, maiscomme des motifs invoqués
pour qu'elle se prononce dans le sens désiré. C'est ainsq iue, dans l'affaire
desPêcheries, laCa,ura dit de neuf des treize points que comportaient les
conclusions du demandeur: (Ce sont là des élémentsqui, le cas échéant,
pourraient fournir les motifs de l'arrêtet non en constituer l'objet »
13(I.C.J. Reports 1951,p. 126). Similarly in the Minquiers andEcrehos case,
the Court observed that:
"The Submissions reproduced above and presented by the United
Kingdom Government consist of three paragraphs, the last two
being reasons underlying the first, which must be regarded as the
final Submission of that Government. The Submissions of the French
Government consist of ten paragraphs, the first nine being reasons
leading up to the last, which must be regarded as the final Submis-
sion of that Government." (I.C.J. Reports 1953, p. 52; see also
Nottebohm, SecondPhase, Judgment,I.C.J. Reports 1955,p. 16.)
30. In the circumstances of the present case, although the Applicant
has in its Application used the traditional formula of asking the Court
"to adjudge and declare" (a formula similar to those used in the cases
quoted in the previous paragraph), the Court must ascertain the true
object and purpose of the claim and in doing so it cannot confine itself
to the ordinary meaning of the words used; it must take into account the
Application as a whole, the arguments of the Applicant before the Court,
the diplomatic exchanges brought to the Court's attention, and public
statements made on behalf of the applicant Government. If these clearly
circumscribe the object of the claim, the interpretation of the submissions
must necessarily be affected. Lnthe present case, it is evident that the
fons et origo of the case was the atmospheric nuclear tests conducted by
France in the South Pacific region, and that the original and ultimate
objective of the Applicant was and has remained to obtain a termination
of those tests; thus its claim cannot be regarded as being a claim for a
declaratory judgment. While the judgment of the Court which Australia
seeks to obtain would in its view have been based on a finding by the
Court on questions of law, such finding would be only a means toan end,
and not an end in itself. The Court is of course aware of the role of
declaratory judgments, but the present case is not one in which such a
judgment is requested.
31. In view of the object of the Applicant's claim, namely to prevent
further tests, the Court has to take account of any developments, since
the filing of the Application, bearing upon the conduct of the Respondent.
Moreover, as already mentioned, the Applicant itself impliedly recog-
nized the possible relevance of events subsequent to the Application, by
drawing the Court's attention to the communiqué of 8 June 1974, and
making observations thereon. In these circumstances the Court is bound
to take note of further developments, both prior to and subsequent to
the close of the oral proceedings. In view of the non-appearance of the
Respondent, it is especially incumbent upon the Court to satisfy itself
that it is in possession of al1the available facts.
32. At the hearing of 4 July 1974,in the course of a review of develop-
ments in relation to the proceedings since counsel for Australia had (C.I.J. Recueil 1951, p. 126). De même,dans l'affaire des Minquiers et
Ecréhous, laCour arelevéque :
((Les conclusions du Gouvernement du Royaume-Uni,reproduites
ci-dessus, consistent en trois paragraphes, les deux derniers étant les
motifs à l'appui de la première proposition qui doit être considérée
comme la conc;lusion finale de ce gouvernement. Les conclusions du
Gouvernement français se composent de dix paragraphes, les
premiers neuf étant les motifs qui conduisent à la dixième proposi-
tion, qui doit &treconsidéréecomme la conclusion finale de ce gou-
vernement.)) (C.I.J. Recueil 1953, p. 52; voir aussi Nottebohm,
deuxièmephase, arrêt,C.I.J. Recueil 1955,p. 16.)
30. Dans les circonstances de l'espèce, et bien que dans sa requêtele
demandeur ait employé la formule traditionnelle consistant à prier la
Cour de ((dire et juger ))(et des termes analogues étaient employés dans
lesaffaires citées au paragraphe précédent),c'est à la Cour qu'il appartient
de s'assurer du but et de l'objet véritable de la demande et elle ne saurait,
pour ce faire, s'en tenir au sens ordinaire des termes utilisés; elle doit
considérer l'ensemble de la requête, les arguments développés de-
vant la Cour par le demandeur, les échanges diplomatiques qui ont
été portésà son attention et les déclarations publiques faites au nom du
gouvernement demandeur. Si ces élémentsdélimitent nettementl'objet de
la demande, ils ne peuvent manquer d'influer sur l'interprétation des
conclusions. En l'espèce, il apparaît nettement que l'affaire trouve son
origine dans les essais nucléaires atmosphériques effectuéspar la France
dans la région du Pacifique Sud et que le demandeur a eu pour objectif
initial et conserve pour objectif ultime la cessation de ces essais; dans ces
conditions, on ne saurait considérer que sa demande tende à obtenir un
jugement déclaratoire. Dès lors que l'arrêtdont l'Australie sollicite le
prononcé devrait se fonder d'après elle sur une constatation de la Cour
relative aux questions de droit, une telle constatation ne serait qu'un
moyen utilisé en vue d'une fin et non une fin en soi. La Cour a bien enten-
du conscience du rôle jouépar lesjugements déclaratoires mais la présente
affaire n'est pas de celles où un teljugement est demandé.
31. Etant donné l'objet de la demande, à savoir empêcherde nouveaux
essais, la Cour a l'obligation de tenir compte de tout fait intéressant le
comportement du défendeur survenu depuis le dépôt de la requête. De
plus, ainsi qu'il a étémentionné, le demandeur lui-mêmea implicitement
admis que des événements postérieursà la requête pouvaient être perti-
nents quand il a appelé l'attention de la Cour sur le communiqué du
8 juin 1974 et présenté desobservations à son sujet. Dans ces conditions
la Cour est tenue de:prendre en considération des faits nouveaux survenus
tant avant qu'après la clôture de la procédure orale. Etant donné la non-
comparution du défendeur, il incombe tout particulièrement à la Cour de
s'assurer qu'elle est bien en possession de tous les faits disponibles.
32. A l'audience du 4 juillet 1974, alors qu'il énuméraitles faits nou-
veaux intéressant l'instance qui s'étaient produits depuis que les conseilspreviously addressed the Court in May 1973, the Attorney-General of
Australia made the following statement :
"You will recall that Australia has consistently stated it would
welcome a French statement to the effectthat no further atmospheric
nuclear tests would be conducted. Indeed as the Court willremember
such an assurance was sought of the French Government by the
Australian Government by note dated 3 January 1973,but no such
assurance was given.
1 should remind the Court that in paragraph 427 of its Memorial
the Australian Government made a statement, then completely
accurate, to the effect that the French Government had given no
indication of any intention of departing from the programme of
testing planned for 1974and 1975.That statement will need now to
be read in light of the matters to which 1 now turn and which deal
with the official communications by the French Government of its
present plans."
He devoted considerable attention to a communiqué dated 8 June 1974
from the Office of the President of the French Republic, and submitted
to the Court the Australian Government's interpretation of that docu-
ment. Since that time, certain French authorities have made a number of
consistent public statements concerning future tests, which provide
material facilitatingthe Court's task of assessing the Applicant's interpre-
tation of the earlier documents, and which indeed require to be examined
in order to discern whether they embody any modification of intention as
to France's future conduct. It is true thathese statements have not been
made before the Court, but they are in the public domain, and are
known to the Australian Government, and one of them was commented
on by the Attorney-General in the Australian Senate on 26 September
1974.It willclearly be necessary toconsider al1these statements, both that
drawn to the Court's attentionin July 1974and those subsequently made.
33. It would no doubt have been possible for the Court, had it con-
sidered that the interests of justice so required, to have afforded the
Parties the opportunity, e.g., by reopening the oral proceedings, of
addressing to the Court comments on the statements made since the close
of those proceedings. Such a course however would have been fully
justified only if the matter dealt with in those statements had been
completely new, had not been raised during the proceedings, or was
unknown to the Parties. This is manifestly not the case. The essential
material which the Court must examine was introduced into the proceed-
ings by the Applicant itself, by no means incidentally, during the course
of the hearings, when it drew the Court's attention to a statement by the
French authorities made prior to that date, submitted the documents
containing it and presented an interpretation of its character, touching
particularly upon the question whether it contained a firm assurance.
Thus both the statement and the Australian interpretation of itare beforede 1'Australies'étaientadressésà la Cour en mai 1973,i'Attorney-General
d'Australie a fait la déclaration suivante:
c(Vous vous rappellerez que l'Australie a maintes fois répété
qu'elle souhaite obtenir de la France l'assurance qu'il ne sera pas
procédé à de nouvelles explosions nucléairesdans l'atmosphère. De
fait, la Cour s'en souvient, cette assurance a été demandéeau Gou-
vernement français par le Gouvernementaustralien dans une note du
3janvier 1973,mais elle n'a pas étédonnée.
Je rappelle à la Cour qu'au paragraphe 427 de son mémoire le
Gouvernement australien a fait une déclaration, alors absolument
exacte, selon laquelle le Gouvernement français n'avait pas mani-
festé lamoindre intention d'interrompre le programme d'expériences
prévupour 19'74 et 1975.11faut désormaisenvisager cette déclaration
dans la perspective des problèmes que je vais maintenant aborder et
qui portent sur les communications officielles du Gouvernement
français relatives ses plans actuels.))
L'Attorney-Genera! a évoqué longuementun communiqué de la prési-
dence de la République française en date du 8juin 1974et il a exposé à
la Cour I'interprétation que le Gouvernement australien en donnait.
Depuis lors, des autorités françaises ont fait au sujet des expériences
futures un certainnombre de déclarations publiques allant toutes dans le
même sens,qui sont autant d'élémentspropres à aider la Cour àévaluer
I'interprétation desdocuments antérieurs présentéepar le demandeur et
qu'il importe d7exa.minerpour déterminer si elles consacrent un change-
ment dans lesintentions de la France relativeà son comportement futur.
Il est vrai que ces déclarations n'ont pas été faitesdevant la Cour mais
elles sont du domaine public, sont connues du Gouvernement australien
et l'une d'elles aitécommentée par l'Attorney-General le 26 septembre
1974devant le Sénataustralien. II est bien entendu nécessaired'examiner
toutes ces déclarations, celle qui a étéportée I'attention de la Cour en
juillet 1974comme cellesqui ont étéfaitesultérieurement.
33. Si la Cour avait estiméque l'intérêt dela justice l'exigeait, elle
aurait certes pu donner aux Parties la possibilitéde lui présenter leurs
observationssur le!;déclarations postérieureà la clôture de la procédure
orale, par exemple en rouvrant celle-ci. Cette façon de procédern'aurait
cependant étépleinement justifiéeque si le sujet de ces déclarationsavait
été entièrement nouveau, n'avaitpas étéévoquéen cours d'instance, ou
était inconnu des Parties. Manifestement, tel n'estpas le cas. Leséléments
essentiels que la Cour doit examiner ont étéintroduits dans la procédure
par le demandeur lui-mêmependant les audiences, et d'une façon qui
n'était pas seulementincidente,quand il a appelé l'attention dela Coursur
une déclaration antérieuredes autoritésfrançaises, produit lesdocuments
où elle figurait et présentéune interprétation de son caractère, en particu-
lier sur le pointde.savoir si elle renfermait une assurance ferme. C'est
donc à l'initiative du demandeur que la déclaration et l'interprétation
qu'en donne l'Australie se trouvent soumises à la Cour. De plus, lethe Court pursuant to action by the Applicant. Moreover, the Applicant
subsequently publicly expressed its comments (see paragraph 28 above)
on statements made by the French authorities since the closure of the
oral proceedings. The -court is therefore in possession not only of the
statements made by French authorities concerning the cessation of
atmospheric nuclear testing, but also of the views of the Applicant on
them. Although as a judicial body the Court is conscious of the impor-
tance of the principle expressed in the maxim audi alteram partem, it does
not consider that this principle precludes the Court from taking account
ofstatementsmade subsequently to theoral proceedings, and which merely
supplement and reinforce matters already discussed in the course of the
proceedings, statements with which the Applicant must be familiar. Thus
theApplicant, havingcommented on the statements of the French authori-
ties, both that made prior to the oral proceedings and those made subse-
quently, could reasonably expect that the Court would deal withthe matter
and come to its own conclusion on the meaning and effect of those state-
ments. The Court, having taken note of the Applicant's comments, and
feelingno obligation to consult the Partiesnthe basis for itsdecisioqfinds
that the reopening of the oral proceedings would serveno usefulpur'pose.
34. It will be convenient to take the statements referred to above in
chronological order. The first statement is contained in the communiqué
issued by the Office of the President of the French Republic on 8 June
1974, shortly before the commencement of the 1974 series of French
nuclear tests:
"The Decree reintroducing the security measures in the South
Pacific nuclear test zone has been published in the Officia1Journal
of 8 June 1974.
The Office ofthe President of the Republic takes this opportunity
of stating that in viewof the stage reached in carrying out the French
nuclear defence programme France will be in a position to pass on
to the stage of underground explosions as soon as the series of tests
planned for this summer is completed."
A copy of the communiqué was transmitted with a Note dated 11June
1974from the French Embassy in Canberra to the Australian Department
of Foreign Affairs, and as already mentioned, the text of the communiqué
was brought to the attention of the Court in the course of the oral
proceedings.
35. In addition to this, the Court cannot fail to take note of a reference
to a document made by counsel at a public hearing in the proceedings,
parallel to this case, instituted by New Zealand against France on 9 May
1973.At the hearing of 10July 1974in that case, the Attorney-General of
New Zealand, after referring to the communiqué of 8 June 1974, men-
tioned above, stated that on 10June 1974the French Embassy in Wel-
lington sent a Note to the New Zealand Ministry of Foreign Affairs,
containing a passage which the Attorney General read out, and which, in
the translation used by New Zealand, runs as follows:demandeur a publiquement formulédes observations par la suite (para-
graphe 28 ci-dessus) sur des déclarations faites par les autorités fran-
çaises aprèsla clôture de la procédure orale. La Cour est donc en posses-
sion non seulement des déclarationsdes autoritésfrançaises concernant la
cessation des essais nucléaires dans I'atmos~hère. mais aussi des vues
exprimées par le demandeur à leur sujet. Bien que la Cour, en tant
qu'organe judiciaiire, ait conscience de l'importance du principe que
traduit la maxime ,audalteram partem, elle ne pense pas que ce principe
l'empêche deprendre en considération des déclarations postérieures à la
procédureorale et qui se bornent à compléter et à renforcer des points
déjàdiscutéspendant cette procédure - déclarations que le demandeur
ne peut pas ignorer. C'est pourquoi le demandeur ayant présenté desob-
servations sur les dtclarations faites par les autoritésfrançaises aussi bien
avant qu'après la procédure orale, il pouvait raisonnablement escompter
que la Cour traite de ce sujet et aboutisàeses propres conclusions sur le
sens et leseffetsde cesdéclarations. La Cour, ayant pris note des observa-
tions du demandeur et ne s'estimant pas tenue de consulter les Parties sur
la base de sa décision, considère qu'il ne servirait à rien de rouvrir la
procédure orale.
34. 11convient d'examiner les déclarations mentionnéesplus haut dans
l'ordre chronologique. La première est celleque contient le communiqué
publiépar la prési,dencede la République française le 8 juin 1974, peu
avant le débutde la campagne d'essais nucléaireslancéepar la France en
1974 :
((Le Journar'Oficiel du 8 juin 1974 publie l'arrêtéremettant en
vigueur lesmesures de sécuritéde la zoned'expérimentation nucléaire
du Pacifique Sud.
La présidence de la République précise, à cette occasion, qu'au
point où en est parvenue l'exécutionde son programme de défense en
moyens nucléa.iresla France sera en mesure de passer au stade des
tirs souterrains aussitôt quea série d'expériences prévuep sour cet
été seraachev6e.1)
Copie du commui~iquéa été transmise au département des affaires
étrangères d'Australie sousle couvert d'une note du Il juin 1974 de
l'ambassade de France à Canberra et, ainsi qu'on l'a vu, le texte du com-
muniquéa étéporte) àl'attention de la Cour pendant la procédure orale.
35. La Cour ne peut manquer de relever en outre que mention d'un
document a étéfaite en audience publique par un conseil dans I'ins-
tance parallèle introduite le 9 mai 1973par la Nouvelle-Zélande contre
la France.A I'audiemcedu IOjuillet 1974,l'Attorney-Generalde Nouvelle-
Zélande, après avoir évoquéle communiqué précitédu 8 juin 1974, a
indiqué que, le 10juin 1974, l'ambassade de France à Wellington avait
adressé au ministère des affaires étrangèresde Nouvelle-Zélande une
note dont il a lu lepassagesuivant: "France, at the point which has been reached in the execution of
its programme of defence by nuclear means, will be in a position to
move to the stage of underground tests, as soon as the test series
planned for this summer is completed.
Thus the atmospheric tests which are soon to becarried out will,in
the normal course of events, be the last of this type."
36. The Court will also have to consider the relevant statements
made by the French authorities subsequently to the oral proceedings: on
25 July 1974by the President of the Republic; on 16August 1974by the
Minister of Defence; on 25 September 1974by the Minister for Foreign
Affairs in the United Nations General Assembly; and on 11October 1974
by the Minister of Defence.
37. The next statement to be considered, therefore, will be that made
on 25 July at a press conference given by the President of the Republic,
when he said :
". .. on this question of nuclear tests, you know that the Prime
Minister had publicly expressed himself in the National Assembly
in his speech introducing the Government's programme. He had
indicated that French nuclear testing would continue. 1 had myself
made it clear that this round of atmospheric tests would be the last,
and so the members of the Government were completely informed
of Ourintentions in this respect ..."
38. On 16 August 1974,in the course of an interview on French tele-
vision, the Minister of Defence said that the French Government had
done its best to ensure that the 1974nuclear tests would be the last atmos-
pheric tests.
39. On 25 September 1974, the French Minister for Foreign Affairs,
addressing the United Nations General Assembly, said:
"We have now reached a stage in Our nuclear technology that
makes it possible for us to continue our programme by underground
testing, and we have taken steps todo so as early as next year."
40. On 11 October 1974,the Minister of Defence held a press confer-
ence during which he stated twice, in almost identical terms, that there
would not be any atmospheric tests in 1975and that France was ready
to proceed to underground tests. When the comment was made that he
had not added "in the normal course of events", he agreed that he had
not. This latter point is relevant in view of the passage from the Note of
10June 1974from the French Embassy in Wellington to the Ministry of
Foreign Affairs of New Zealand, quoted in paragraph 35 above, to the
effect that the atmospheric tests contemplated "will, in the normal course
of events, be the last of this type". The Minister also mentioned that,
whether or not other governments had been officially advised of the ESSAISNUCLÉAIRES(ARRÊT) 266
«la France, au point où en est parvenue l'exécutionde son pro-
gramme de défenseen moyens nucléaires, sera en mesure de passer
au stade des tirs souterrains aussitôt que la série d'expériences
prévues pour cet étésera achevée.
Ainsi, les essais atmosphériques qui seront prochainement effec-
tués seront normalement les derniers de ce type. ))
36. La Cour doit examiner aussi les déclarations faites en la matière
par les autorités françaises après la procédure orale, à savoir le 25juillet
1974par le présidentde la République, le 16août 1974par le ministre de
la défense,le 25 septembre 1974 par le ministre des affaires étrangères
devant l'Assembléegénérale desNations Unies et le 11octobre 1974par
le ministre de la défense.
37. La déclaration qu'il convient d'examiner d'abord est celle que le
président dela République a faite le 25juillet 1974lors d'une réunionde
presse dans les terrnes suivants:
«sur cette question des essais nucléaires,vous savez que le premier
ministre s'étaitexprimépubliquement à l'Assembléenationale, lors
du discours de présentation du programme du Gouvernement. II
avait indiqué que les expériences nucléaires françaises seraientpour-
suivies. J'avais moi-même précisé que cette campagne d'expériences
atmosphérique:^serait la dernière, et donc les membres du gouverne-
ment étaient complètement informésde nos intentions à cet égard..)>
38. Le 16 août 1974, au cours d'une interview donnée à la télévision
française, le ministre de la défensea dit que le Gouvernement français
avait tout mis en oeuvrepour que les essais nucléairesde 1974soient les
derniers à se déroul,erdans l'atmosphère.
39. Le 25 septernbre 1974, le ministre des affaires étrangères a dit,
s'adressant à l'Assemblée générale deN sations Unies:
(Parvenus désormais, dans la technologie nucléaire, à un degré
où il devient possible de poursuivre nos programmes par des essais
souterrains, nous avons pris nos dispositions pour nous engager
dans cette voie:dèsl'année prochaine. ))
40. Le 11octobre 1974,le ministre de la défensea tenu une conférence
de presse au cours de laquelle il a dit par deux fois en termes presque
identiques qu'il n'y aurait pas d'essai aérienen 1975 et que la France
était prête à procéder à des essais souterrains. La remarque ayant été
faite qu'il n'avait pas ajouté (normalement D,il en a convenu. Cette
indication est intéressante eu égardau passage de la note de l'ambassade
de France à Wellington au ministèredes affaires étrangèresde Nouvelle-
Zélande en date du 10juin 1974, citéau paragraphe 35 ci-dessus, où il
est préciséque les essais atmosphériques envisagés((seront normalement
les derniers de ce type)). Le ministre a mentionné aussi que d'autres
gouvernements,qu'ils aient étéofficiellementavisésou non de la décision,decision, they could become aware of it through the press and by reading
the communiqués issued by the Officeof the President of the Republic.
41. In view of the foregoing, the Court finds that France made public
its intention tocease the conduct of atmospheric nuclear tests following
the conclusion of the 1974 series of tests. The Court must in particular
take into consideration the President's statement of 25 July 1974(para-
graph 37 above) followed by the Defence Minister's statement on 11Oc-
tober 1974(paragraph 40). These reveal that the official statements made
on behalf of France concerning future nuclear testing are not subject to
whatever proviso, if any, was implied by the expression "in the normal
course of events [normalement]".
42. Before considering whether the declarations made by the French
authorities meet the object of the claim by the Applicant that no further
atmospheric nuclear tests should be carried out in the South Pacific, it is
first necessary to determine the status and scope on theinternational Clane
of these declarations.
43. It is well recognized that declarations made by way of unilateral
acts, concerning legal or factual situations, may have the effect ofcreating
legal obligations. Declarations of this kind may be, and often are, very
specific. When it isthe intention of the State making the declaration that
it should become bound according to its terms, that intention confers on
the declaration the character of a legal undertaking, the State being
thenceforth legally required to follow a course of conduct consistent with
the declaration. An undertaking of this kind, if given publicly, and with
an intent to be bound, even though not made within the context of inter-
national negotiations, is binding. In these circumstances, nothing in the
nature of a quidpro quo norany subsequent acceptance of the declaration,
nor even any reply or reaction from other States, is required for the
declaration to take effect,since such a requirement would be inconsistent
with the strictly unilateral nature of the juridical act by which the pro-
nouncement by the state was made.
44. Of course, not al1unilateral acts imply obligation; but a State may
choose to take up a certain position in relation to a particular matter
with the intention of being bound-the intention is to be ascertained by
interpretation of the act. When States make statements by which their
freedom of action is to be limited, a restrictive interpretation is called for.
45. With regard to the question of form, it should be observed that
this is not a domain in which international law imposes any special or
strict requirements. Whether a statement is made orally or in writing
makes no essential difference, for such statements made in particular
circumstances may create commitments in international law, which does
not require that they should be couched in written form. Thus the ques- ESSAIS NUCLÉAIRES (ARRÊT) 267
ont pu la connaître à la lecture des journaux et des communiqués de la
présidence dela Ré:publique.
41. Vu ce qui précède, laCour estime que la France a rendu publique
son intention de cesser de procéder à des expériences nucléairesen atmo-
sphère, une fois terminéela campagne d'essais de 1974. La Cour doit en
particulier tenir compte de la déclaration du président de la République
en date du 25 juillet 1974(paragraphe 37 ci-dessus) suivie de la déclara-
tion du ministre de la défense endate du 11octobre 1974(paragraphe 40
ci-dessus). L'une el:l'autre révèlentque les déclarations officielles faites
au nom de la France sur la question des futures expériences nucléaires
ne sont pas suborcdonnées à ce que pouvait éventuellement impliquer
l'indication contenue dans le terme c(normalement n.
42. Avant d'exarminer si les déclarations des autorités françaises
répondent à l'objet de la demande australienne tendant à ce qu'il soit
mis fin aux essais nucléaires enatmosphère dans le Pacifique Sud, il faut
d'abord déterminerla naturede ces déclarationsainsi que leur portée sur
le plan international.
43. Il est reconnu que des déclarations revêtantla forme d'actes uni-
latéraux et concernant des situations de droit ou de fait peuvent avoir
pour effet de créer des obligations juridiques. Des déclarations de cette
nature peuvent avoir et ont souvent un objet très précis.Quand 1'Etat
auteur de la déclaration entend êtreliéconformément a ses termes, cette
intention confère ?Lsa prise de position le caractère d'un engagement
juridique, 1'Etat intéresséétant désormais tenu en droit de suivre une
ligne de conduite conforme à sa déclaration. Un engagement de cette
nature, exprimé publiquement et dans l'intention de se lier, mêmehors
du cadre de négociations internationales, a un effet obligatoire. Dans ces
conditions, aucune contrepartie n'est nécessairepour que la déclaration
prenne effet,non plus qu'une acceptation ultérieureni même uneréplique
ou une réactiond'autres Etats, car cela serait incompatible avec la nature
strictement unilatérale de l'actejuridique par lequelI'Etat s'estprononcé.
44. Bien entendu, tout acte unilatéral n'entraîne pas des obligations
mais un Etat peut choisir d'adopter une certaine position sur un sujet
donné dans I'intention de se lier - ce qui devra être déterminé en inter-
prétant I'acte. Lorsque des Etats font des déclarations qui limitent leur
liberté d'actionfuture, une interprétation restrictive s'impose.
45. Pour ce qui est de la forme, il convient de noter que ce n'est pas là
un domaine dans lequel le droit international impose des règles strictesou
spéciales.Qu'une dkclaration soit verbale ou écrite, celan'entraîne aucune
différenceessentielle,car de tels énoncésfaitsdans des circonstances parti-
culières peuvent co~nstituerdes engagements en droit international sans
avoir nécessairement à êtreconsignéspar écrit.La forme n'est donc pastion of form is not decisive. As the Court said in its Judgment on the
preliminary objections in the case concerningthe Temple ofPreah Vihear :
"Where ... as is generally the case in international law, which
places the principal emphasis on the intentions of the parties, the
law prescribes no particular form, parties are free to choose what
form they please provided their intention clearly results from it."
(I.C.J.Reports 1961,p. 31 .)
The Court further stated in the same case: ". .. the solerelevant question
is whether the language employed in any given declaration does reveal a
clear intention ..." (ibid.,p. 32).
46. One of the basic principles governing the creation and perfor-
mance of legal obligations, whatever their source, is the principle of
good faith. Trust and confidence are inherent in international co-opera-
tion, in particular in an age when this CO-operation in many fields is
becoming increasingly essential. Just as the very rule of pacta sunt
servandain the law of treaties is based on good faith, soalso isthe binding
character of an international obligation assumed by unilateral declara-
tion. Thus interested States may take cognizance of unilateral declarations
and place confidence in them, and are entitled to require that the obli-
gation thus created be respected.
47. Having examined the legal principles involved, the Court will now
turn to the particular statements made by the French Government. The
Government of Australia has made known to the Court at the oral
proceedings its own interpretation of the first such statement (paragraph
27 above). As to subsequent statements, reference may be made to what
was said in the Australian Senate by the Attorney-General on 26 Sep-
tember 1974 (paragraph 28 above). In reply to a question concerning
reports that France had announced that it had finished atmospheric
nuclear testing, he said that the statement of the French Foreign Minister
on 25 September (paragraph 39 above) "falls far short of an undertaking
that there will be no more atmospheric tests conducted by the French
Government at its Pacific Tests Centre" and that France was "still re-
serving to itself the right to carry out atmospheric nuclear tests" so that
"In legal terms, Australia has riothing from the French Government
which protects it against any further atmospheric tests".
48. It will be observed that Australia has recognized the possibility
of the dispute being resolved by a unilateral declaration, of the kind
specified above, on the part of France, and its conclusion that in fact no
"commitment" or "firm, explicit and binding undertaking" had been
given is based on the view that the assurance is not absolute in its terms,décisive.Comme la Cour l'a dit dans son arrêt sur les exceptions pré-
liminaires en l'affaire du Templede Préah Vihéar:
[comme]c'est généralementle cas en droit international qui insiste
particulièrement sur les intentions des parties, lorsque la loi ne
prescrit pas de forme particulière, les parties sont libres de choisir
celle qui leur plaît, pourvu que leur intention en ressorte clairement))
(C.1.J. Recueil ,1961,p. 31).
La Cour a ajouté dans la mêmeaffaire: ((la seule question pertinente est
de savoir si la rédaction employée dans une déclaration donnée révèle
clairement l'intention ..))(ibid., p. 32).
46. L'un des principes de base qui président à la création et à l'exé-
cution d'obligations juridiques, quelle qu'en soit la source, est celui de la
bonne foi. La confiance réciproque est une condition inhérente de la co-
opération internationale, surtout à une époqueoù, dans bien des domai-
nes, cette coopération est de plus en plus indispensable. Tout comme la
règle du droit des traités pacta sunt servanda elle-même,le caractère
obligatoire d'un engagement international assumé par déclaration uni-
latéralerepose sur la bonne foi. Les Etats intéressés peuventdonc tenir
compte des déclarations unilatérales et tabler sur elles; ils sont fondés à
exiger que l'obligaticsnainsi crééesoit respectée.
47. Ayant examiné les principes juridiques en jeu, la Cour en vient
plus précisément auxdéclarations du Gouvernement français. Le Gou-
vernement australien a indiqué à la Cour pendant la procédure orale
comment il interprétait la première de ces déclarations (paragraphe 27
ci-dessus). Au sujet de celles qui ont suivi,n peut se référera ce qu'a dit
l'Attorney-General devant le Sénat australien le 26 septembre 1974(para-
graphe 28ci-dessus). En réponse à une question relativeà des informations
d'après lesquelles la France avait annoncé qu'elle avait terminé ses essais
nucléaires enatmosphère, il a dit que la déclaration du ministre des af-
faires étrangères deFrance en datedu 25 septembre 1974(paragraphe 39
ci-dessus) ((est fort loin de représenter un engagement suivant lequel le
Gouvernement frani;ais n'effectuerait plus d'essais dans l'atmosphère à
son centre d'expérinientations du Pacifique ))et que la France ((continue
de se réserverle droit de se livrer à des essais nucléaires dans I'atmo-
sphère )de sorte que ccD'un point de vue juridique, l'Australie n'a rien
obtenu du Gouvernement français qui la protège contre de nouveaux
essais atmosphériquirs ».
48. On notera que l'Australie a admis que le différendpourrait être
résolu par une déclaration unilatérale, de la nature préciséeplus haut,
qui serait donnée par la France et sa conclusion qu'en fait aucun ((en-
gagement ferme, explicite et decaractère obligatoire »n'a étépris procède
de l'idéeque I'assuriince ne revêtpas une forme absolue, qu'il faut ((dis-that there is a "distinction between an assertion that tests will go under-
ground and an assurance that no further atmospheric tests will take
place", that "the possibility of further atmospheric testing taking place
after the commencement of underground tests cannot be excluded" and
that thus "the Government of France is still reserving to itself the right to
carry out atmospheric nuclear tests". The Court must however form its
own viewof the meaning and scope intended by the author of a unilateral
declaration which may create a legal obligation, and cannot in this res-
pect be bound by the view expressed by another State which is in no way
a party to the text.
49. Of the statements by the French Government now before the
Court, the most essential are clearly those made by the President of the
Republic. There can be no doubt, in view of his functions, that his public
communications or statements, oral or written, as Head of State, are in
international relations acts ofthe French State. His statements, and those
of members of the French Government acting under his authority, up to
the last statement made by the Minister of Defence (of 11October 1974),
constitute a whole. Thus, in whatever form these statements were ex-
pressed, they must be held to constitute an engagement of the State,
having regard to their intention and to the circumstances in which they
were made.
50. The unilateral statements of the French authorities were made
outside the Court, publicly and erga omnes,even though the first of them
was communicated to the Government of Australia. As was observed
above, to have legal effect, there was no need for these statements to be
addressed to a particular State, nor was acceptance by any other State
required. The general nature and characteristics of these statements are
decisive for the evaluation of the legal implications, and it is to theter-
pretation of the statements that the Court must now proceed. The Court
is entitled to presume, at the outset, that these statements were not made
in vacuo,but in relation to the tests which constitute the very object of the
present proceedings, although France has not appeared in the case.
51. In announcing that the 1974 series of atmospheric tests would be
the last, the French Government conveyed to the world at large, including
the Applicant, its intention effectively to terminate these tests. It was
bound to assume that other States might take note of these statements
and rely on their being effective. The validity of these statements and
their legal consequences must be considered within the general frame-
work of the security of international intercourse, and the confidence and
trust which are so essential in the relations among States. It is from the
actual substance of these statements, and from the circumstances atten-
ding their making, that the legalimplications of the unilateral act must be
deduced. The objects of these statements are clear and they wereaddressed
to the international community as a whole, and the Court holds that they
constitute an undertaking possessing legal effect. The Court considers
20tinguer l'affirmation selon laquelle les essais seront désormais souterrains
de l'assurance qu'il n'y aura plus de nouveaux essais dans l'atmosphère »,
que ((la possibilité d'une reprise des essais en atmosphère après le début
des tirs souterrains ne saurait êtreexclue ))et qu'ainsi ((le Gouvernement
français continue dt: se réserverle droit de se livrer à des essais nucléaires
dans l'atmosphère 1).II appartient cependant à la Cour de se faire sa
propre opinion sur le sens et la portée que l'auteur a entendu donner à
une déclaration unilatérale d'où peut naître une obligation juridique, et à
cet égard elle ne peut êtreliéepar les thèses d'un autre Etat qui n'est en
rien partie au texte.
49. Parmi les déclarations du Gouvernement français en possession
desquelles la Cour se trouve, il est clair que les plus importantes sont
celles du président de la République. Etant donné ses fonctions, il n'est
pas douteux que les communications ou déclarations publiques, verbales
ou écrites, quiémanent de lui en tant que chef de I'Etat, représentent dans
le domaine des relations internationales des actes de I'Etat français. Ses
déclarations et celles des membres du Gouvernement français agissant
sous son autorité, jiisques et ycompris la dernière déclaration du ministre
de la défense, endartedu 1 1 octobre 1974,doivent êtreenvisagéescomme
un tout. Ainsi, quelle qu'ait pu en êtrela forme, ilconvient de les considé-
rer comme constituant un engagement de I'Etat, étant donnéleur inten-
tion et les circonstances dans lesquelles elles sont intervenues.
50. Les déclarations unilatérales des autorités françaises ont étéfaites
publiquement en dehors de la Cour et erga omnes, mêmesi la première a
étécommuniquée au Gouvernement australien. Ainsi qu'on l'a vu plus
haut, pour que ces déclarations eussent un effet juridique, il n'était pas
nécessaire qu'elles fussent adresséesà un Etat particulier, ni qu'un Etat
quelconque signifiât son acceptation. Les caractères générauxde ces
déclarations et leur nature sont les élémentsdécisifsquand ils'agit d'en
apprécier les effets juridiques; c'està leur interprétation que la Cour doit
procéder maintenant. La Cour est en droit de partir de la présomption
que ces déclarations n'ont pas étéfaites in I1acuomais à propos des essais
qui forment l'objet mêmede l'instance, bien que la France ne se soit pas
présentéeen l'espèce.
51. Quand il a annoncé que la série d'essais atmosphériques de 1974
serait la dernière, le Gouvernement français a signifiépar là à tous les
Etats du monde, y compris le demandeur, son intention de mettre effec-
tivement fin à ces essais. II ne pouvait manquer de supposer que d'autres
Etats pourraient prendre acte de cette déclaration et compter sur son
effectivité. La validité de telles déclarations et leurs conséquences juridi-
ques doivent être envisagéesdans le cadre généralde la sécurité des rela-
tions internationales et de la confiance mutuelle si indispensable dans
les rapports entre Eltats. C'est du contenu réelde ces déclarations et des
circonstances dans lesquelles elles ont été faitesque la portée juridique de
l'acte unilatéral doit être déduite.L'objet des déclarations étant clair et
celles-ci étant adressées à la communauté internationale dans son en-
semble, la Cour tient qu'elles constituent un engagement comportant desthat the President of the Republic, in deciding upon the effective cessation
of atmospheric tests, gave an undertaking to the international community
to which his words were addressed. It is true that the French Government
has consistently maintained, for example in a Note dated 7 February 1973
from the French Ambassador in Canberra to the Prime Minister and
Minister for Foreign Affairs of Australia, that it "has the conviction that
its nuclear experiments have not violated any rule of international law",
nor did France recognize that it was bound by any rule of international
law to terminate its tests, but this does not affect the legal consequences
of the statements examined above. The Court finds that the unilateral
undertaking resulting from these statements cannot be interpreted as
having been made in implicit reliance on an arbitrary power of reconsi-
deration. TheCourt finds furtherthat the French Government has under-
taken an obligation the precise nature and liinits of which must be under-
stood in accordance with the actual terms in which they have been
publicly expressed.
52. Thus the Court faces a situation in which the objective of the
Applicant has in effect been accomplished, inasmuch as the Court finds
that France has undertaken the obligation to hold no further nuclear
tests in the atmosphere in the South Pacific.
53. The Court finds that no question of damages arises in the present
case, since no such claim has been raised by the Applicant either prior
to or during the proceedings, and the original and ultimate objective of
Applicant has been to seek protection "against any further atmospheric
test" (see paragraph 28 above).
54. It would of course have been open to Australia, if it had considered
that the case had in effect been concluded, to discontinue the proceedings
in accordance with the Rules of Court. If it has not done so, this does not
prevent the Court from making its own independent finding on the sub-
ject. It is true that "the Court cannot take into account declarations,
admissions or proposals which the Parties may have made during direct
negotiations between themselves, when such negotiations have not led
to a complete agreement" (Factory ut Clzorz6w (Merits) , P.C.I.J.,Series
A, No. 17, p.51). However, in the present case, that is not the situation
before the Court. The Applicant has clearly indicated what would satisfy
its claim, and the Respondent has independently taken action; the
question for the Court is thus one of interpretation of the conduct of
each of the Parties. The conclusion at which the Court has arrived as a
result of such interpretation does not mean that it is itself effecting a
compromise of the claim; the Court is merely ascertaining the object of
the claim and the effect of the Respondent's action, and this it is obliged
to do. Any suggestion that the dispute would not be capable of being
terminated by statements made on behalf of France would run counter
to the unequivocally expressed views of the Applicant both before the
Court and elsewhere.
55. The Court, as a court of law, is called upon to resolve existing
disputes between States. Thus the existence of a dispute is the primaryeffets juridiques. La Cour estime que le président de la République, en
décidant la cessation effective des essais atmosphériques, a pris un
engagement vis-à-vis de la communauté internationale à qui il s'adres-
sait. Certes le Gouvernement français a constamment soutenu, en parti-
culier dans la note que l'ambassadeur de France à Canberra a adresséele
7 février 1973 au ]premier ministre et ministre des affaires étrangères
d'Australie, qu'a ilest convaincu que ses expériences nucléaires n'ont
violéaucune règle du droit international ))et il n'a pas reconnu non plus
qu'il étaittenu de mettre fin à ses expériencespar une règlede droit inter-
national mais cela rie change rien aux conséquencesjuridiques des décla-
rations étudiéesplus haut. La Cour estime que l'engagement unilatéral
résultant de ces d<Sclarations ne saurait être interprétécomme ayant
comporté l'invocation d'un pouvoir arbitraire de revision. La Cour
constate en outre que le Gouvernement français a assumé une obligation
dont il convient de comprendre l'objet préciset les limites dans les termes
mêmesoù ils sont expriméspubliquement.
52. La Cour est donc en présence d'une situation où l'objectif du
demandeur a étéefkctivement atteint, du fait que la Cour constate que la
France a pris l'engagement de ne plus procéder à des essais nucléaires en
atmosphère dans le Pacifique Sud.
53. La Cour constate qu'aucune question de dédommagement ne se
pose en l'espèce, piYsque le demandeur n'a présentéaucune demande à
cet effet, ni avant rii pendant la procédure, et que son objectif initial et
son but ultime éta.ientd'obtenir une protection ((contre de nouveaux
essais atmosphériqiies ))(voir paragraphe 28 ci-dessus).
54. Bien entendu, il aurait étéloisible à l'Australie, si elle avait con-
sidéré l'affairecom:me effectivement close, de se désister conformément
au Règlement. Si elle ne l'a pas fait, cela n'empêchepas la Cour d'arriver à
sa propre conclusion sur 1; question. II est vrai (la Cour ne saurait
faire état des déclarations, admissions ou propositions qu'ont pu faire
les Parties au cour:; de négociations directes qui ont eu lieu entre elles,
lorsque ces négocia1:ionsn'ont pas abouti à un accord complet ))(Usine de
Cliorzciw (fond), C.P.J.I. série A no 17, p. 51). Mais telle n'est pas en
l'espècela situation qui se présenteà la Cour. Le demandeur a clairement
indiqué ce qui lui donnerait satisfaction et le défendeur a agi indépen-
damment; la question qui se pose à la Cour est donc celle de I'interpré-
tation du comportement des deux Parties. La conclusion à laquelle cette
interprétation a amené la Cour ne signifie pas qu'elle opère elle-même
un retrait de la derriande; elle se borne à établir l'objet de cette demande
et l'effet des actes du défendeur, comme elle est tenue de le faire. En pré-
tendant que des diSclarations faites au nom de la France ne sauraient
mettre fin au différend, on irait à l'encontre des vues exprimées sans
équivoque par le demandeur aussi bien devant la Cour qu'en dehors.
55. La Cour, cornme organe juridictionnel, a pour tâche de résoudre
des différends existant entre Etats. L'existence d'un différend estdonc lacondition forthe Court to exerciseitsjudicial function; it is not sufficient
for one party to assert that there is a dispute, since "whether there exists
an international dispute is a matter for objective determination" by the
Court (Interpretation of Peace Treaties with Bulgaria, Hungary and
Romania (First Phase), Advisory Opinion,I.C.J. Reports 1950, p. 74).
The dispute brought before it must therefore continue to exist at the time
when theCourt makes its decision. It must not fail to take cognizance of a
situation in which the dispute has disappeared because the object of the
claim has been achieved by other means. If the declarations of France
concerning the effectivecessation of the nuclear tests have the significance
described by the Court, that is to say if they have caused the dispute to
disappear, al1 the necessary consequences must be drawn from this
finding.
56. It may be argued that although France may have undertaken such
an obligation, by a unilateral declaration, not to carry out atmospheric
nuclear tests in the South Pacific Ocean, a judgment of the Court on this
subject might still be of value because, if thejudgment upheld the Appli-
cant's contentions, it would reinforce the position of the Applicant by
affirming the obligation of the Respondent. However, the Court having
found that the Respondent has assumed an obligation as to conduct,
concerning the effective cessation of nuclear tests, no further judicial
action is required. The Applicant has repeatedly sought from the Res-
pondent an assurance that the tests would cease, and the Respondent
has, on its own initiative, made a series of statements to the effect that
they will cease. Thus the Court concludes that, the dispute having disap-
peared, the claim advanced by Australia no longer has any object. It fol-
lows that any further finding would have no raisond'être.
57. This is not to say that the Court may select from the cases sub-
mitted to it those it feels suitable for judgment while refusing to give
judgment in others. Article 38 of the Court's Statute provides that its
function is "to decide in accordance with international law such disputes
asare submitted to it"; but not only Article 38 itself but other provisions
of the Statute and Rules also make it clear that the Court can exercise its
jurisdiction in contentious proceedings only when a dispute genuinely
exists between the parties. In refraining from further action in this case
the Court is therefore merely acting in accordance with the proper inter-
pretation of itsjudicial function.
58. The Court has in the past indicated considerations which would
lead it to decline to give judgment. The present case is one in which
"circumstances that have ... arisen render any adjudication devoid of
purpose" (Northern Cameroons, Judgment,I.C.J. Reports 1963, p. 38).
The Court therefore sees no reason to allow the continuance of proceed-
ings which it knows are bound to be fruitless. While judicial settlement
may provide a path to international harmony in circumstances of conflict,
it is none the less true that the needless continuance of litigation is an
obstacle to such harmony.
59. Thus the Court finds that no further pronouncement is requiredcondition première de l'exercice de sa fonction judiciaire; on ne peut se
contenter à cet égard des affirmations d'une partie car ((l'existence d'un
différend international demande à êtreétablie objectivement ))par la
Cour (Interprétation des traités depaix conclus avec la Bulgarie, la
Hongrie et la Roumanie, première phase, avis consultatiL C.I.J. Recueil
1950, p. 74). Le différenddont la Cour a été saisiedoit donc persister au
moment où elle statue. Elle doit tenir compte de toute situation dans
laquelle ledifférenda disparu parce que l'objet de la demande a été atteint
d'une autre manière. Si les déclarations de la France concernant la ces-
sation effective des expériences nucléaires ont la portée que la Cour
a décrite,autrement dit si elles ont éliminéle différend,il faut en tirer les
conséquencesqui s'imposent.
56. On pourrait soutenir que, bien que la France se soit obligée,par
déclaration unilatérale. à ne DaSeffectuer d'essais nucléaires enatmo-
sphèredans l'océanPacifique Sud, un arrêtde la Cour sur ce point pour-
rait encore présenter de l'intérêctar, s'iladoptait les thèsesdu demandeur
il renforcerait la position de celui-ci en constatant l'obligation du défen-
deur. Cependant, la Cour ayant conclu que le défendeur a assuméune
obligation de comportement sur la cessation effective des expériences
nucléaires, aucune autre action judiciaire n'est nécessaire.Le deman-
deur a cherché à maintes reprises à obtenir du défendeur l'assurance que
les essais prendraient fin et celui-ci a, de sa propre initiative, fait une
série dedéclarations d'où il résultequ'ils prendront fin. C'est pourquoi
la Cour conclut que, le différendayant disparu, la demande présentéepar
l'Australie ne comporte plus d'objet. Il en résultequ'aucune autre cons-
tatation n'aurait de raison d'être.
57. Cela n'est pas à dire que la Cour ait la faculté de choisirparmi les
alTaires qui lui sont soumises celles qui lui paraissent se prêter à une
dkcision et de refuser de statuer sur les autres. L'article 38 du Statut dis-
pose que la mission de la Cour est ((de réglerconformément au droit
international les difrérendsqui lui sont soumis ))en dehors de l'article 38
lui-même,d'autres dispositions du Statut et du Règlement indiquent
aussi que la Cour ne peut exercer sa compétence contentieuse que s'il
existe réellementun différendentre les parties. En n'allant pas plus loin
en l'espècela Cour ne fait qu'agir conformément à une interprétation
correcte de sa fonction judiciaire.
58. La Cour a indiquédans le passé desconsidérations qui pouvaient
l'amener à ne pas statuer. La présenteaffaire est l'une de celles dans les-
quelles ((lescirconstances qui se sont produites ...rendent toute décision
judiciaire sans objet )(Cameroun septentrional, arrêt,C.I.J. Recueil 1963,
p. 38). La Cour ne voit donc pas de raison de laisser se poursuivre une
procédurequ'elle sait condamnée à rester stérile.Sile règlementjudiciaire
peut ouvrir la voie de l'harmonie internationale lorsqu'il existe un conflit,
il n'est pas moins vrai que la vaine poursuite d'un procès compromet
cette harmonie.
59. La Cour conclut donc qu'aucun autre prononcé n'est nécessaire272 NUCLEAR TESTS (JUDGMENT)
in the present case. It does not enter into the adjudicatory functions of the
Court to deal with issues inabstracto, once it has reached the conclusion
that the merits of the case no longerfaIl to be determined. The object of
the claim having clearly disappeared, there is nothing on which to give
judgment. *
60. Once the Court has found that a State has entered into a commit-
ment concerning its future conduct it is not the Court's function to
contemplate that it will not comply with it. However, the Court observes
that if the basis of this Judgment were to be affected, the Applicant could
request an examination of the situation in accordance with the provisions
of the Statute; the denunciation by France, by letter dated 2 January
1974, of the General Act for the Pacific Settlement of International Dis-
putes, which is relied on as a basis of jurisdiction in the present case,
cannot by itself constitute an obstacle to the presentation of such a
request.
*
* *
61. In its above-mentioned Order of 22 June 1973, the Court stated
that the provisional measures therein set out were indicated "pending its
finaldecision in the proceedings instituted on 9 May 1973 by Australia
against France". It follows that such Order ceases to be operative upon
the delivery of the present Judgment, and that the provisional measures
lapse at thesame time.
62. For these reasons,
by nine votes to six,
finds that the claim of Australia no longer has any object and that the
Court is therefore not called upon to give a decision thereon.
Done in English and in French, the English text being authoritative,
at the Peace Palace, The Hague, this twentieth day of December, one
thousand nine hundred and seventy-four, in three copies, one of which
will be placed in the archives of the Court and the others transmitted to
the Government of Australia and the Government of the French Repub-
lic, respectively.
(Signed) Manfred LACHS,
President.
(Signed) .S. AQUARONE,
Registrar.en l'espèce.Il n'entre pas dans la fonction juridictionnelle de la Cour de
traiter des questions dans l'abstrait, une fois qu'elle est parvenue la
conclusion qu'il n'y a plus lieu de statuer au fond. La demande ayant
manifestement perdu son objet, il n'y a rienjuger.
60. Dès lors que la Cour a constaté qu'un Etat a pris un engagement
quant àson comportement futur, il n'entre pas dans sa fonction d'envi-
sager que cet Etat ne le respecte pas. La Cour fait observer que, si le fon-
dement du présent arrêtétait remis en cause, le requérant pourrait de-
mander un examen de la situation conformément aux dispositions du
Statut; la dénonciation par la France, dans une lettre du 2 janvier 1974,
de l'Actegénérapl our lerèglementpacifiquedes différendsinternationaux,
qui est invoqué comme l'un des fondements de la compétencede la Cour
en l'espèce,ne saurait en soi faire obstacle la présentation d'une telle
demande.
*
* *
61. Dans l'ordonnance déjà mentionnéedu 22 juin 1973, la Cour a
préciséque les mesures conservatoires indiquées l'étaient«en attendant
son arrêtdéfinitifdans l'instance introduite le 9 mai 1973par l'Australie
contre la France D. L'ordonnance cesse donc de produire ses effets dès
le prononcé du présentarrêtet les mesures conservatoiresprennent finen
mêmetemps.
*
* *
62. Par ces motifs,
par neuf voix contre six,
dit que la demande de l'Australie est désormais sans objet et qu'il n'y
a dèslors pas lieuà statuer.
Fait en anglais et en français, le texte anglaisfaisant foi, au palais de la
Paix, à La Haye, le vingt décembremil neuf cent soixante-quatorze, en
trois exemplaires, dont l'un restera déposé aux archivesde la Cour etdont
les autres seront transmis respectivement au Gouvernement australien et
au Gouvernement de la Républiquefrançaise.
Le Président,
(Signé) Manfred LACHS.
Le Greffier,
(Signé) S. AQUARONE.
23 President LACHSmakes the following declaration :
Good administration of justice and respect for the Court require
that the outcome of its deliberations be kept in strict secrecy and nothing
of its decision be published until it is officially rendered. It was therefore
regrettable that in the present case, prior to the public reading of the
Court's Order of 22 June 1973, a statement was made and press reports
appeared which exceeded what is legally admissible in relation to a case
subjudice.
The Court was seriously concerned with the matter and an enquiry
was ordered in the course of which al1possible avenues accessible to the
Court were explored.
The Court concluded, by a resolution of 21 March 1974, that its
investigations had not enabled it to identify any specific source of the
statements and reports published.
1 remain satisfied that the Court had done everything possible in this
respect and that it dealt with the matter with al1the seriousness for which
it called.
Judges BENGZONO , NYEAMA D,ILLARDJ ,IMENEZ DE ARECHAGA and Sir
Humphrey WALDOCK make the followingjoint declaration:
Certain criticisms have been made of the Court's handling of the
matter to which the President alludes in the preceding declaration. We
wish by our declaration to make it clear that we do not consider those
criticisms to be in any way justified.
The Court undertook a lengthy examination of the matter by the several
means at its disposal: through its services, by convoking the Agent for
Australia and having him questioned, and by its own investigations and
enquiries. Any suggestion that the Court failed to treat the matter with
al1the seriousness and care which it required is, in our opinion, without
foundation.The seriousness with which the Court regarded the matter is
indeed reflected and emphasized in the communiqués which it issued,
first on8August 1973and subsequently on 26 March 1974.
The examination of the matter carried out by the Court did not enable
it to identify any specific source of the information on which were based
the statements and press reports to which the President has referred.
When the Court, by eleven votes to three, decided to conclude its exami-
nation it did so for the solid reason that to pursue its investigations and
inquiries would in its view, be very unlikely to produce further useful
information. ESSAISNUCLÉAIRES(ARRÊT)
M. LACHS, Président, fait la déclaration suivante:
[Traduction]
La bonne administration de lajustice et le respectàdla Cour exigent
que l'issuede sesdélibérationsreste strictement secrèteet que sesdécisions
ne soient diffusées enaucun de leurs élémentsavant d'être officiellement
rendues. II est donc regrettable qu'en l'espèce,avant la lecture publique
Je l'ordonnance de la Cour en date du 22juin 1973,une déclaration ait
étéfaite et des nouvelles de presse aient paru, qui dépassaient ce qui est
juridiquement admissible s'agissant d'une affaisub judice.
La Cour a ététrès sérieusement préoccupée par cette question et une
enquêtea étéordonnée pendant laquelle toutes les voies qui pouvaient
lui être ouvertesontétéexplorées.
La Cour a conclu, dans sa résolutiondu 21 mars 1974,que ses recher-
ches ne lui avaient pas permis d'identifier une source exacte pour les
déclarationset les informations publiées.
J'ai la certitude que la Cour a fait tout ce qui était enson pouvoir
égard et qu'elle a traité de la question avec tout le sérieuxque celle-ci
méritait.
MM. BENGZON, ONYEAMA, DILLARD, JIMENE ZE ARÉCHAG etAsir
Humphrey WALDOCK, juges, font la déclaration commune suivante:
[Traduction]
Certaines critiques ont étéémisessur la manière dont la Cour a traité
de la question viséepar le Président dans la déclaration qui précède.
Nous tenons àpréciserpar la présentedéclaration quenousneconsidérons
pas ces critiques comme justifiées enquoi que ce soit.
La Cour a procédé a un examen détailléde la question grâce aux
divers moyens dont elle dispose: elle a eu recourss services, convoqué
l'agent de l'Australie pour qu'il soit interrogé, effectuéses recherches et
ses enquêtes propres.Suggérerque la Cour n'aurait pas traitéde la ques-
tion avec tout le sérieux et le soin nécessaires serait selon nous sans
fondement. Les communiqués qu'elle a publiésle 8 août 1973d'abord,
le 26 mars 1974ensuite, traduisent et soulignent d'ailleurs le sérieux avec
lequel la Cour a envisagécette question.
L'examen que la Cour a fait de la question ne lui a pas permis d'iden-
tifier une source d'information exacte sur laquelle se fondaient les décla-
rations et les nouvelles de presse mentionnées par le Président. Quand
la Cour a décide,par onze voix contre trois, de clore son examen, elle l'a
fait pour la raison sérieuseque la poursuite des recherches et des enquêtes
avait trèspeu de chance, d'aprèselle, de fournir davantaged'informations
utiles.
24 Judges FORSTERG,ROS,PETRÉand IGNACIO-PINaTppend separate
opinions to the Judgmentof the Court.
JudgesONYEAMD A,LLARD,JIMÉNEDE ARECHAG nd Sir Humphrey
WALDOCa ppenda joint dissentingopinion, andDEuCASTROand
Judgead hocSir Garfield BARWIappend dissenting opinions to the
Judgmentof the Court.
(Initialled) M.L.
(Initialled) S.A. ESSAISNUCLÉAIRES (ARRÊT) 274
MM. FORSTERG , ROS, PETRÉN et IGNACIO-PINTO juges, joignent à
l'arrêtles exposésde leur opinion individuelle.
MM. ONYEAMA, DILLARD ,IMÉNEZ DE ARÉCHAGA et sir Humphrey
WALDOCK juges, joignent à l'arrêt uneopinion dissidente commune.
M. DE CASTRO j,ge, et sir GarfieldBARWICK juge ad /roc, joignent à
l'arrêtles exposésde leur opinion dissidente.
(Paraphé)M.L.
(Paraphé)S.A.
Arrêt du 20 décembre 1974