Non-Corrigé
Uncorrected
CR 2008/2
Cour internationale International Court
de Justice of Justice
LAAYE THHEGUE
ANNÉE 2008
Audience publique
tenue le mardi 22 janvier 2008, à 10 heures, au Palais de la Paix,
sous la présidence de Mme Higgins, président,
en l’affaire relative à Certaines questions concernant l’entraide judiciaire en matière pénale
(Djibouti c. France)
________________
COMPTE RENDU
________________
YEAR 2008
Public sitting
held on Tuesday 22 January 2008, at 10 a.m., at the Peace Palace,
President Higgins presiding,
in the case concerning Certain Questions of Mutual Assistance in Criminal Matters
(Djibouti v. France)
____________________
VERBATIM RECORD
____________________ - 2 -
Présents : Mme Higgins,président
Al-Kh.vse-prh,ident
RanMjva.
Shi
Koroma
Parra-Aranguren
Buergenthal
Owada
Simma
Tomka
Keith
Sepúlveda-Amor
Bennouna
Skoteiskov,
GuMilMu.me
juYessuf, ad hoc
Cgoefferr,
⎯⎯⎯⎯⎯⎯ - 3 -
Present: Presieitgins
Vice-Presi-nhtasawneh
Judges Ranjeva
Shi
Koroma
Parra-Aranguren
Buergenthal
Owada
Simma
Tomka
Keith
Sepúlveda-Amor
Bennouna
Skotnikov
Judges ad hoc Guillaume
Yusuf
Registrar Couvreur
⎯⎯⎯⎯⎯⎯ - 4 -
Le Gouvernement de la République de Djibouti est représenté par :
S. Exc. M. Siad Mohamed Doualeh, ambassadeur de la République de Djibouti auprès de la
Confédération suisse,
comme agent ;
M. Phon van den Biesen, avocat, Amsterdam,
comme agent adjoint ;
M. Luigi Condorelli, professeur à la faculté de droit de l’Université de Florence,
comme conseil et avocat ;
M. Djama Souleiman Ali, procureur général de la République de Djibouti,
M. Makane Moïse Mbengue, docteur en droit, chercheur, Hauser Global Law School Program de
la faculté de droit de l’Université de New York,
M. Michail S. Vagias, Ph.D. Cand. à l’Université de Leyde, chercheur, Greek State Scholarship’s
Foundation,
M. Paolo Palchetti, professeur associé à l’Université de Macerata (Italie),
Mme Souad Houssein Farah, conseiller juridique à la présidence de la République de Djibouti,
comme conseils.
Le Gouvernement de la République française est représenté par :
Mme Edwige Belliard, directeur des affaires ju ridiques du ministère des affaires étrangères et
européennes,
comme agent ;
M. Alain Pellet, professeur à l’Université ParisX-Nanterre, membre et ancien président de la
Commission du droit international des Nations Unies, associé de l’Institut de droit international,
M. Hervé Ascencio, professeur à l’Université de Paris I (Panthéon-Sorbonne),
comme conseils ;
M. Samuel Laine, chef du bureau de l’entraide pénale internationale au ministère de la justice,
comme conseiller ; - 5 -
The Government of the Republic of Djibouti is represented by:
Mr. Siad Mohamed Doualeh, Ambassador of the Republic of Djibouti to the Swiss Confederation,
as Agent;
Mr. Phon van den Biesen, Attorney at Law, Amsterdam,
as Deputy Agent;
Mr. Luigi Condorelli, Professor at the Faculty of Law of the University of Florence,
as Counsel and Advocate;
Mr. Djama Souleiman Ali, Public Prosecutor of the Republic of Djibouti,
Mr. Makane Moïse Mbengue, Doctor of Law, Researcher, Hauser Global Law School Program,
New York University School of Law,
Mr.MichailS.Vagias, Ph.D. Cand. Leiden Univ ersity, Scholar of the Greek State Scholarships
Foundation,
Mr. Paolo Palchetti, Associate Professor at the University of Macerata (Italy),
Ms Souad Houssein Farah, Legal Adviser to the Presidency of the Republic of Djibouti
as Counsel.
The Government of the French Republic is represented by:
Ms Edwige Belliard, Director of Legal Affairs, Ministry of Foreign and European Affairs,
as Agent;
Mr. Alain Pellet, Professor at the University of Paris X-Nanterre, Member and former Chairman of
the United Nations International Law Commi ssion, Associate of the Institut de droit
international,
Mr. Hervé Ascencio, Professor at the University of Paris I (Panthéon-Sorbonne),
as Counsel;
Mr.Samuel Laine, Head of the Office of Inte rnational Mutual Assistance in Criminal Matters,
Ministry of Justice,
as Adviser; - 6 -
Mlle Sandrine Barbier, chargée de mission à la direction des affaires juridiques du ministère des
affaires étrangères et européennes,
M. Antoine Ollivier, chargé de mission à la di rection des affaires juridiques du ministère des
affaires étrangères et européennes,
M. Thierry Caboche, conseiller des affaires étrangères à la direction de l’Afrique et de l’océan
Indien du ministère des affaires étrangères et européennes,
comme assistants. - 7 -
MsSandrine Barbier, Chargée de mission, Director ate of Legal Affairs, Ministry of Foreign and
European Affairs,
Mr.Antoine Ollivier, Chargé de mission, Directorate of Legal Affairs, Ministry of Foreign and
European Affairs,
Mr.Thierry Caboche, Foreign Affa irs Counsellor, Directorate for Africa and the Indian Ocean,
Ministry of Foreign and European Affairs,
as Assistants. - 8 -
Le PRESIDENT: Veuillez vous asseoir. L’audience est ouverte, la Cour se réunit
aujourd’hui pour entendre la suite du premier tour de plaidoiries de la République de Djibouti et je
donne la parole à M. le professeur Condorelli.
M. CONDORELLI :
PRINCIPES ET RÈGLES DE LA CONVENTION D ENTRAIDE JUDICIAIRE EN MATIÈRE PÉNALE
ENTRE LE GOUVERNEMENT DE LA R ÉPUBLIQUE DE D JIBOUTI ET LE G OUVERNEMENT
DE LA R ÉPUBLIQUE FRANÇAISE DU 27 SEPTEMBRE 1986
1. Les principes de la convention de 1986
1. Madame le président, Messieurs de la Cour, le moment est venu de centrer l’attention sur
la convention d’entraide judiciaire en matière pénale de 1986. Je rappelle que ma mission à cet
égard est de relever les principes et les règlesla convention qui sont pertinents aux fins du
règlement du présent différend et de présenter à la C our le point de vue de Djibouti quant à leur
interprétation. Bien entendu, l’exposé qui suit vise à mettre en lumière les points d’accord et de
désaccord entre les Parties en la matière, ainsi qu’à élucider les raisons qui devraient permettre à la
Cour de rejeter l’interprétation prônée par la Fran ce et de faire droit aux arguments du demandeur.
Ensuite, avec votre permission, Madame le président, je céderai la place à la barre à l’agent adjoint
e
de Djibouti, M van den Biesen, qui ⎯ainsi que je l’ai déjà annoncé ⎯ analysera les faits de
l’affaire et démontrera que la France a violéen l’espèce l’obligation centrale découlant de la
convention d’accorder à Djibouti l’entraide judiciaire «la plus large possible» en refusant
d’exécuter la commission rogatoire demandée par la Partie djiboutienne concernant le «dossier
Borrel».
2. Madame le président, on peut utiliser commepoint de départ le constat qu’il y a accord
entre les Parties quant au fait que la convention de 1986 est toujours en vigueur entre elles et les lie
pleinement. Les écritures des Parties permettent aussi de constater qu’elles concordent à
reconnaître que les dispositions principales jouant un rôle direct aux fins du litige qui les oppose
sont les articles 1 (par. 1), 2, 3 (par. 1) et 17. En bref, l’article 1 engage les deux Etats à s’accorder
mutuellement «l’entraide judiciaire la plus large possible». L’article 2 indique les raisons au nom
desquelles l’entraide pourrait être refusée. L’article17 établit que tout refus de l’entraide sera - 9 -
«motivé». Enfin, l’article3 s’occupe en particu lier des «commissions rogatoires» et prescrit que
l’Etat requis «fera exécuter, conformément à sa législation» ces commissions rogatoires. Il s’agit là
d’un régime juridique assez usuel dans les traités de ce genre et ⎯à première vue du moins ⎯
simple et clair. En reliant ces divers éléments dans une synthèse d’ensemble, on pourrait dire qu’il
y a une règle, à savoir celle d’après laquelle l’Etat requis doit accomplir tous les efforts possibles
pour accorder l’entraide demandée (y compris en matière de commissions rogatoires), et une
exception : celle qui lui permet de refuser l’entrai de requise, mais seulement pour l’une ou l’autre
des trois raisons listées. Cependant, il ne saurait y avoir refus de l’entraide sans motivation.
3. La République de Djibouti est parfaitement consciente des obligations que l’article 60 du
Règlement de la Cour fait peser sur les Partie s concernant les exposés oraux, ceux-ci devant
s’inspirer de la nécessité d’une bonne administrati on de la justice et porter essentiellement «sur les
points qui divisent encore les parties». Dans ce but, afin d’aider la Cour à identifier exactement les
questions d’interprétation de la convention de 1986 sur lesquelles les Parties s’opposent réellement
dans leurs écritures, et sont donc à trancher par la Cour, il me semble opportun de suggérer d’entrée
de jeu que les vrais points litigieux tournent tous principalement autour de l’interprétation des
articles 1, 2 litt. c), et 17 de la convention et, bien entendu, du rapport existant entre leurs
prescriptions relatives. Pour le reste, si l’on rega rde la substance en laissant de côté les différences
même prononcées de ton ou de vocabulaire, et si l’on refuse d’accorder trop d’importance aux
détails mineurs et aux propos de caractère pol émique portant essentiellement sur l’usage de
certaines expressions de part et d’autre, on ne saurait dire à mon sens qu’il y a vrai désaccord
fondamental.
4. Prenons pour commencer l’article1, prem ière des «dispositions générales», applicables
dans tous les domaines couverts par la convention : il y est question de l’engagement des parties «à
s’accorder mutuellement, selon les dispositions de la présente convention, l’entraide judiciaire la
plus large possible». Selon le contre-mémoire français, si les Parties ont pris soin d’établir que
l’entraide doit être la plus large possible, «c’est qu’ils envisageaient des cas où cela serait
impossible, tout en souhaitant que ces cas soient peu fréquents» 1. Eh bien, Madame le président,
1
CMF, p. 27, par. 3.35. - 10 -
nul ne saurait contester une telle évidence ! Comme nul ne saurait contester que l’entraide doit être
accordée «selon les dispositions de la convention», ce qui fait renvoi à la suite du document, «y
compris l’article2 sur le refus d’entraide», c’est ce que souligne la France 2. C’est très bien dit,
comme il est très bien dit que les dispositions générales des articles premier et 2 sont évidemment
applicables aux commissions rogato ires internationales dont il est question à l’article 3, ainsi qu’à
3
toutes les autres formes d’entraide judiciaire régies par la convention , ceci impliquant alors
incontestablement que les commissions rogatoires doivent être exécutées elles aussi dans la mesure
«la plus large possible», à l’ex ception des seuls cas où un refus serait justifié sur la base de
l’article 2. En somme, même si, d’après le libellé de l’article 3, sur l’Etat requis pèse l’obligation
de répondre positivement aux demandes de commission rogatoire, une telle obligation ne saurait
4
être qualifiée d’«obligation de résultat absolue» , ainsi que la France le suggère à juste titre,
puisque l’article2 admet justement la possibilité qu’une certaine demande ne soit pas satisfaite
pour une raison admise expressément par la convention.
5. Il est toutefois important de souligner que l’obligation de s’accorder mutuellement
l’entraide judiciaire «la plus large possible» ne doit pas être interprétée de façon trop étriquée,
comme semble le faire le défendeur. La conventi on de 1986, en effet, demande à chaque partie de
faire le maximum d’effort pour subvenir aux besoins de l’autre partie en matière d’entraide
judiciaire. Autrement dit, il serait réducteur de lire l’article 1 comme se bornant à prescrire que
l’entraide doit être accordée quand aucun motif de re fus ne subsiste. L’article 1 va bien au-delà de
ça : il a un rôle et une portée bien plus larges et significatifs, puisqu’il engage les deux Etats à une
coopération pleine, sincère, prompte et efficace en la matière, s’inspirant de l’amitié et du respect
mutuel qui doivent caractériser leurs relations d’après le traité de 1977, dont j’ai présenté hier à la
Cour les aspects davantage pertinents aux fins du règlement du présent différend.
6. Je reviens aux points d’accord entre les Parties, que j’évoquais il y a un instant. Une mise
au point s’impose à ce sujet. C’est que nulle part le contre-mémoire n’affirme en toutes lettres,
avec la limpidité qui serait souhaitable que, puisque l’ entraide doit être la plus large possible, les
2 Ibid.
3
CMF, p. 27, par. 3.36.
4 Ibid. - 11 -
seuls et uniques cas dans lesquels il est permis par la convention de faire valoir qu’elle est
impossible sont ceux résultant de la liste, exhaustive et fermée, figurant à l’article2. Certes, la
France n’ose alléguer nulle part à mots ouvert s que d’ultérieures cau ses de refus seraient
admissibles. Mais elle entretient au demeurant une sorte de flou artistique à ce sujet, par exemple
quand elle affirme que «[t]rois motifs de refus sont distingués à l’article 2». Mais non, Madame le
président : l’article 2 ne distingue pas trois motifs, en les mettant en évidence parmi d’autres qui
seraient pour ainsi dire «indistincts»! L’article 2 fixe et délimite les seuls trois motifs de refus
auxquels les parties pourraient avoir recours, et in terdit de ce fait même de faire appel à d’autres
motifs quels qu’ils soient. Egalement, il est fort approximatif et fourvoyant d’énoncer que
5
l’article2 dispose expressément que «l’e ntraide judiciaire peut être refusée» . Point à la ligne.
Mais non, Madame le président! L’article2 dispose expressément que l’entraide pourra être
refusée si (et seulement si) l’un des trois motifs énumérés est correctement invoqué! Je suis
certain que la Cour trouvera l’occasion de tirer au cl air tout cela, notamment si la France persiste à
utiliser un langage si ambigu.
2. La signification des termes d’après lesquels l’Etat requis doit exécuter la commission
rogatoire demandée «conformément à sa législation»
7. Une autre mise au point est nécessaire, concernant cette fois-ci l’article 3, dont un membre
de phrase souligne que l’exécution par l’Etat requis d’une commission rogatoire demandée par
l’autre partie se fera «conformément à la législa tion» du premier. La Partie défenderesse lance
toutes sortes d’accusations virulentes contre le demandeur, qui se rendrait coupable de méconnaître
6
l’ensemble du sens de l’article et en donnerait une interprétation erronée méritant d’être qualifiée
de «regrettable» 7. Mais où est l’erreur ? Djibouti n’a ja mais soutenu que la commission rogatoire
devrait être exécutée par l’Etat requis sans passer par la procédure prévue à cet effet par son droit
interne ! Djibouti soutient en revanche, et confirme maintenant avec pleine assurance sous les yeux
de la Cour, que la convention de 1986 interdit explicitement que cette procédure, dont il est
indéniable qu’elle doit être suivie, aboutisse à un refus de l’entraide pour des motifs autres que
5Ibid.
6
CMF, p. 25, par. 3.26.
7CMF, p. 26, par. 3.30. - 12 -
ceux admis par l’article 2. Si cela devait arriver, l’Etat requis se rendrait de ce fait même l’auteur
d’une violation de la conventi on et engagerait sa responsabilité in ternationale pour fait illicite:
ai-je besoin de rappeler l’article 27 de la convention de Vienne sur le droit des traités, qui codifie le
principe coutumier incontestable et ⎯ que je sache ⎯ incontesté d’après lequel un Etat ne saurait
s’abriter derrière son droit interne afin de ju stifier son manquement quant au respect de ses
obligations conventionnelles ? Chacun sait, en effet, que si le droit interne d’un Etat fait obstacle à
l’observation par lui d’un traité international a uquel il a souverainement décidé de se lier, alors
l’Etat concerné doit modifier son droit inte rne, seule manière d’éviter la responsabilité
internationale pour violation du traité en question.
8. Cette dernière remarque, sur laquelle ⎯ j’en suis sûr ⎯ le défendeur voudra très
certainement convenir, donne l’occasion à Djibouti d’apporter une précision, et d’enlever un
malentendu, concernant les sacro-saints princip es constitutionnels internes de la séparation des
pouvoirs et de l’indépendance de la magistrature : aux dires du défendeur, l’interprétation de la
8
convention de 1986 prônée par Djibouti «réduirait à néant» les principes en question . Mais la
France interprète mal le point de vue exprimé par le demandeur. Celui-ci n’a jamais prétendu que
pour respecter la convention, la France devrait viol er les principes en ques tion en faisant en sorte
que ses organes exécutifs empiètent sur les préroga tives de ses organes judiciaires afin de leur
imposer l’exécution d’une commission rogatoire, alors que ⎯ nous assure-t-on ⎯ d’après la
législation française la décision d’exécuter ou de refuser une telle commission rogatoire relève de
la compétence exclusive des organes judiciaires. La question n’est pas là: la question est que,
quelle que soit l’autorité interne compétente à octroyer ou à refuser la commission rogatoire
d’après la législation de l’Etat requis, sa décision doit être respectueuse des obligations pesant sur
l’Etat aux termes de la convention, sans quoi la responsabilité internationale de l’Etat serait
engagée ; et cela fait plaisir de constater que la France reconnaît en passant tout cela 9.
9. Autrement dit, chaque Etat s’organise souve rainement à sa façon et est partant libre de
décider comment distribuer les diverses fonctions et compétences entre ses divers organes exécutifs
et judiciaires, y compris suivant sa propre manièr e de concevoir le princi pe constitutionnel de la
8
CMF, p. 26, par. 3.32.
9CMF, p. 26, par. 3.33. - 13 -
séparation des pouvoirs. Mais ce principe, toujours d’après l’article 27 de la convention de Vienne,
ne saurait justifier une quelconque violation des obligations internationales incombant à l’Etat en
tant qu’unité, en tant que suje t de droit international, et ce quel que soit l’organe (exécutif,
judiciaire ou autre) du même Etat qui en est l’aute ur. Là encore, c’est à peine le cas de rappeler
l’article4, paragraphe 1, des articles sur la responsabilité de l’Etat pour fait internationalement
illicite, d’après lequel «[l]e comportement de tout organe de l’Etat est considéré comme un fait de
l’Etat d’après le droit international, que cet organe exerce des fonctions législative, exécutive,
judiciaire ou autres, quelle que soit la position qu’ il occupe dans l’organisation de l’Etat». Y
compris donc, cela va de soi, si la position que l’organe occupe dans l’ organisation de l’Etat
comporte un degré plus ou moins important d’indé pendance par rapport à l’exécutif du même Etat.
Votre Cour l’a souligné en 1999 par ces mots : «[L]e comportement d’un organe d’Etat ⎯ même
indépendant du pouvoir exécutif ⎯ doit être regardé comme un fait de cet Etat.» ( Différend relatif
à l’immunité de juridiction d’ un rapporteur spécial de la Commission des droits de l’homme , avis
consultatif, C.I.J. Recueil 1999, p. 88, par. 63.)
10. Il faut par ailleurs relever que les exigences de la vie internationale, et l’intérêt évident
qu’a chaque Etat d’éviter autant que possible d’en courir dans la responsab ilité internationale pour
violation des engagements internationaux pesant sur lui, doivent normalement amener les
gouvernements des Etats souverains, au vu des co mpétences centrales qui leur reviennent en
matière de relations internationales d’après la plupart des constitutions nationales, à se soucier du
respect desdits engagements de la part de l’ensemble de l’appareil organique de l’Etat et à veiller à
ce que les diverses activités et fonctions de cet a ppareil organique se déroulent en conformité avec
le droit international. Il faut donc s’attendre des gouvernements des Etats qu’ils prennent toutes les
mesures permises par leur législation afin d’obt enir de tous les organes internes des conduites
respectueuses des obligations internationales pesant sur l’Etat. C’est ce qu’entendait mettre en
évidence le mémoire de Djibouti dans un passage qui a scandalisé à tort le défendeur 10: mais si
pour la France scandale il y a, ce n’est certes pas le demandeur qui en porte la responsabilité, mais
bien la Cour ! En effet, Djibouti n’a fait que reprendre votre enseignement en la matière.
10
Mémoire de Djibouti, p. 36, par. 87; CMF, p. 26, par. 3.32. - 14 -
11. Permettez-moi de m’expliquer sur ce point. Il se peut effectivement que le droit interne
d’un Etat n’accorde pas au gouvernement de moyens efficaces lui permettant d’obtenir de tous les
organes internes des conduites resp ectueuses des obligations internationales pesant sur l’Etat: il
pourrait en aller de la sorte, par exemple, à l’ég ard du parlement national légiférant de manière à
violer le droit international, voire au regard de juges internes contredisant par leurs décisions des
engagements internationaux de l’Etat. Ainsi, le défendeur nous informe aujourd’hui dans son
contre-mémoire que le refus d’accorder une réponse favorable à la demande de commission
rogatoire décernée par l’autorité judiciaire djiboutienne relève en France de la «décision souveraine
de l’autorité judiciaire compétente» 11 et que les autorités exécutives ne peuvent rien ordonner aux
12
autorités judiciaires en droit interne , à ce sujet tout au moins. Cela implique alors que, si la
«décision souveraine» de l’autorité judiciaire fra nçaise enfreint l’article 2 de la convention, la
responsabilité internationale de la France est de ce fait engagée sans que le Gouvernement français
puisse faire quoi que ce soit pour l’éviter. Une telle condition d’impuissance, toutefois, ne saurait,
ni alléger le poids des obligations internationales de l’Etat, ni justif ier leur violation. Ainsi, dans
l’affaire LaGrand, la Cour a maintenu que «la responsabilité internationale d’un Etat est engagée
par l’action des organes et autor ités compétents agissant dans cet Etat, quels qu’ils soient» et a
souligné qu’en conséquence la r esponsabilité internationale des Etat s-Unis était engagée, dans le
cas d’espèce, même si la mise en Œuvre des engageme nts internationaux pertinents relevait de la
compétence de l’un des Etats fédérés (l’Ariz ona) et non pas de celle de l’Etat fédéral ( LaGrand
(Allemagne c. Etats-Unis d’Amérique), mesures conservatoires, ordonnance du 3mars1999 ,
C.I.J. Recueil 1999, p. 16, par. 28). La Cour de surcroît ⎯ ne l’oublions pas ⎯ n’a pas ménagé ses
mots : elle a rappelé que, même face à des autorités internes indépendantes d’après la Constitution
fédérale, tels les gouvernements des Etats fédéré s, «les Etats-Unis doivent prendre toutes les
mesures dont ils disposent» afin d’obtenir de ces autorités le respect des engagements
internationaux pesant sur les Etats-Unis mêmes. La France aurait dû, me semble-t-il, se souvenir
de cet important dictum de la Cour, au lieu de critiquer âprement le point de vue analogue qu’a
exprimé le demandeur.
11
CMF, annexe 5.
12CMF, p. 26, par. 3.33. - 15 -
3. L’attribution à la France des assurances reçu es par Djibouti quant à la réussite de la
demande de commission rogatoire
12. En somme, il convient de répéter que tous les comportements, actes et décisions
d’organes tant judiciaires qu’exécutifs français to mbant sous l’emprise de la convention de1986
sont à qualifier de faits de l’Etat en droit international et en e ngagent la responsabilité
internationale s’ils en enfreignent les obligations . Cette vérité évidente est de mise non seulement
pour la décision de refus de l’entraide judiciaire , quel que soit l’organe ha bilité à l’adopter suivant
la législation française : elle s’applique aussi a ux déclarations des organes exécutifs français ayant
donné de pleines assurances à Djibouti quant à la réussite i
mminente de la démarche visant à
obtenir la transmission aux autorités djiboutiennes du dossier Borrel. Nul ne saurait contester que
de telles assurances ⎯sur l’effet juridique desquelles dans notre affaire le prochain orateur
reviendra sous peu ⎯ sont en droit international un fait attri buable à l’Etat français, et ce même au
cas où l’organe les ayant données aurait agi ultra vires en les donnant, c’est-à-dire s’il avait
«outrepass[é] sa compétence», comme nous le rappelle l’article 7 des articles sur la responsabilité
de l’Etat pour fait internationalement illicite.
13. Par connexion, et sans vouloir anticiper sur ce que la prochaine plaidoirie dira au sujet
desdites assurances de réussite adressées à Djibouti par de hauts responsables gouvernementaux
français, il vaut la peine d’attirer d’ores et déjà l’attention de la Cour sur un bien curieux argument
en matière d’attribution (qu’on aurait envie de qualifie r, avec tout le respect, de «cocasse») dont la
France tente de se servir concernant la lettre du 27 janvier 2005 du directeur de cabinet du garde
des sceaux à l’ambassadeur de Djibouti en France 13. Cette lettre, nous signale-t-on 14, «est écrite à
la première personne du singulier» et comporte des expressions comme «j’ai l’honneur de porter à
votre connaissance», «j’ai demandé», «je tenais à vous indiquer». Et alors? Alors, voilà
l’époustouflante conclusion que le contre-mémoire suggère avec le plus grand sérieux : puisque «la
République française n’est pas, grammaticalement parlant, le sujet d’aucune des phrases figurant
dans la lettre», «[d]ès lors, il est évident que le directeur de cabinet du garde des sceaux
n’engageait nullement la République Française» 15. Il serait intéressant de comprendre d’où la
13MD, p. 137, annexe 21.
14
CMF, p. 43, par. 3.89.
15CM, p. 43, par. 3.89-3.90 - 16 -
France tire cette théorie inédite d’après laquelle l’ac te d’un organe de l’Etat agissant ès qualité et
adressé à un autre Etat ne serait pas attribuable à celui-là s’il a été rédigé en utilisant la première
personne du singulier, alors qu’il le serait sans doute en cas d’emploi de la première personne du
pluriel… La Commission du droit international n’avait pas eu l’idée de songer à la grammaire
comme critère d’attribution !
14. Madame le président, cet effort véritablement désespéré du défendeur visant à neutraliser
la lettre du 27 janvier 2005 du directeur de cabinet du garde des sceaux de la République française
à l’ambassadeur de Djibouti en France en dit long, en réalité, quant à son importance. Comme mon
ami et collègue Phon van den Biesen le montrera tout à l’heure, cette lettre représente, en effet, la
réponse officielle du ministère de la justice de l’Etat requis, la France, à la commission rogatoire
adressée par l’Etat requérant, Djibouti, par la voie officielle prescrite par l’article14 de la
convention de 1986. Cet article, rappelons-le, prévoit que «[l]es commissions rogatoires prévues à
l’article3 seront adressées par le ministère de la justice de l’Etat requérant au ministère de la
justice de l’Etat requis et renvoyées par la même voie». La lettre en question n’est donc pas
seulement un acte indiscutablement attribuable à la France d’après les principes de droit
international: elle est aussi l’acte réunissant l es conditions nécessaires pour produire les effets
prévus à l’article 14. Cela sera démontré sous peu à votre Cour.
15. Tout ce que viens d’observer jusqu’ici relève cependant ⎯je l’ai indiqué au début ⎯
des désaccords de détail entre les Parties au sujet de l’interprétation des dispositions pertinentes de
la convention de 1986. Venons -en finalement aux questions fondamentales qui les opposent,
toujours en matière d’interprétation de la conve ntion : on sait que celles-ci portent essentiellement
sur les articles 2, litt. c), et 17.
4. L’article 2 de la convention de 1986 et le refus de l’entraide
16. L’article 2, d’abord. On sait que cette disposition énumère de façon exhaustive les seuls
trois cas dans lesquels une partie peut refuser l’entraide demandée : aucun autre motif de refus n’est
autorisé. La lettre de l’article 2 est d’une clarté exemplaire en ce sens, et elle l’est d’autant plus dès
qu’on en relève l’étroite connexion avec l’autre disposition générale qui précède: l’article1.
Celui-ci prescrit la règle (à savoir, l’obligation des parties contractantes de s’accorder - 17 -
mutuellement l’entraide la plus large possible), alors que l’article 2 identifie les seules exceptions
admissibles.
17. Y a-t-il besoin de prouver ultérieurement cette évidence, concernant le caractère «fermé»
de la liste figurant à l’article 2 ? Sans doute no n ! Mais par excès de prudence, face à l’ambiguïté
déjà observée et critiquée qu’entretient le contre -mémoire français, il convient de faire au moins
une brève référence à la convention européenne d’entraide judi ciaire en matière pénale de
16
Strasbourg du 20avril1959 . Cette convention célèbre ⎯qui a eu, on le sait, beaucoup de
succès ⎯ est intéressante dans notre cas parce qu’elle représente le modèle à l’image duquel la
convention de1986 a été rédigée: en particulier, t outes les dispositions de ce tte dernière qui sont
pertinentes dans notre cas ont été recopiées mot à mot de la convention européenne, avec une seule
variante à l’article2; la variante étant que da ns la convention européenne deux seuls motifs de
refus de l’entraide sont consacrés en son article 2 (qui est là aussi une disposition générale se
référant à toutes les formes d’entraide), et non pas trois comme dans la convention bilatérale
de1986. Toutefois, le motif figurant à l’article 2, litt. c), de la convention de 1986, qui nous
intéresse davantage ici, est libellé exactement comme l’article2, litt. b), de la convention
européenne, virgules comprises. Or, il est très instructif d’observer que, cette convention étant
multilatérale et ouverte, nombreux sont les Etats qui ont ressenti le besoin de se garantir la
possibilité de refuser l’entraide pour des raisons s upplémentaires à celles énum érées à l’article 2.
Ils ont alors formulé des réserves précises et bien explicites dans ce but, ce qui implique clairement
que l’article 2 de la convention européenne est unanimement interprété comme prescrivant une liste
close des raisons admises de refus. Il serait ⎯ me semble-t-il ⎯ paradoxal que l’on interprète
autrement son jumeau, l’article 2 de la convention franco-djiboutienne de 1986 !
5. L’article2, litt. c), de la convention de 1986 : une «self-judging clause» ?
18. Ce point étant, j’espère, définitivemen t acquis, il faut maintenant se tourner vers
l’argument central sur lequel se fonde essentiellemen t l’allégation du défendeur suivant laquelle il
n’aurait nullement violé la convention de1986 : l’argument est que le refus d’exécuter la
16Toutes ces informations concernant la convention européenne de 1959, y compris pour ce qui est de la large
pratique en matière de réserves re latives à son article 2, sont tirées de M. Pisani, F. Mosconi, D. Vigoni, Codice delle
e
Convenzioni di estradizione e di assistenza giudiziaria in materia penale, 4 éd., Milan 2004, p. 571 et suiv. - 18 -
commission rogatoire requise par Djibouti concernant le dossier Borrel serait justifié grâce à la
clause de la convention d’après laquelle
«[l]’entraide pourra être refusée :
. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .
c) [s]i l’Etat requis estime que l’exécution de la demande est de nature à porter
atteinte à sa souveraineté, à sa sécurité, à son ordre public ou à d’autres de ses
intérêts essentiels».
On pourrait résumer la thèse de la France en tr ois mots : pour elle, celle de l’article 2, litt. c) n’est,
ni plus ni moins, qu’une «self-judging clause», c’ est-à-dire une clause permettant des «possibilités
de dérogation, dont le propre est de relever de l’appréciation exclusive de l’Etat qui entend la
17
mettre en Œuvre» . Et la France d’insister :
«L’alinéa c) dont la mise en Œuvre par la France est au cŒur du présent
différend, est particulièrement explicite. Non seulement il commence par «[s]i l’Etat
requis estime», mais l’utilisation d’une suite d’adjectifs possessifs renforce l’idée d’un
pouvoir exclusif d’appréciation conservé par l’ Etat requis. Lui seul détermine si une
demande d’entraide judiciaire est de nature à porter atteinte à «sa» souveraineté, à
«sa» sécurité, à «son» ordre public ou à d’autres de «ses» intérêts essentiels.» 18
19. La thèse que ce pouvoir d’appréciation est «exclusif», c’est-à-dire que l’Etat requis en est
le dépositaire unique, à l’exclusion de toute possibilité de vérification de que lque intensité que ce
soit de la part d’autrui, a des implications évidentes et inévitables, même si le contre-mémoire a la
prudence (ou la pudeur peut-être) de ne pas les arti culer explicitement. La première est que l’Etat
requérant ne disposerait d’aucune sorte de moyen po ur contrôler si les intérêts essentiels de l’Etat
requis sont correctement invoqués ou non. La seconde, sans doute plus impressionnante encore, est
que votre Cour se trouverait elle aussi automatiquement mise hors jeu. En effet, malgré la pleine
compétence que les Parties lui ont reconnue quant au règlement du présent différend, il serait
absolument interdit à votre juridi ction d’exercer réellement cette compétence: la Cour devrait
donner raison à la France, quant à la légalité de son refus d’exécuter la commission rogatoire
demandée par Djibouti, non pas suite à une vérifi cation autonome du respect par la France de la
convention de1986, mais parce que la France a déci dé de son propre chef et de façon totalement
discrétionnaire que son refus respecte la convention.
17
CMF, p. 28, par. 3.39.
18CMF, p. 28, par. 3.40 - 19 -
20. Madame le président, face à une telle interprétation on aurait gr ande envie d’évoquer,
avec sirHerschLauterpacht, la notion de «condition potestative pure» et de répéter à sa suite
qu’«un engagement dans leque l la partie qui s’engage se réserve le droit exclusif de déterminer la
portée ou l’existence même de son obliga tion n’est pas un engagement juridique» ( Certains
emprunts norvégiens (France c. Norvège), C.I.J.Recueil1957 , p.48, opinion individuelle de
sir Hersch Lauterpacht). Au fond, il faut le dire d’emblée : si votre Cour acceptait le point de vue
français, l’entière convention de1986 et toutes ces obligations qu’elle prescrit se trouveraient
simplement réduites à néant, puisque chaque partie aurait toujours le droit de décider
souverainement de refuser l’entraide demandée au nom de son ordre public et de ses intérêts
essentiels, sans avoir à rendre le moindre compte à personne, y compris votre Cour, d’une telle
décision. S’agit-il d’une une conception saine, sens ée? N’est-elle pas en contradiction flagrante
avec les principes mêmes du traité d’amitié et de coopération de1977, dont on a souligné qu’ils
doivent jouer un rôle central dans l’interprétation et l’applica tion des instruments bilatéraux
postérieurs, telle la convention de 19 86 ? Ne contredit-elle pas de front le principe de l’effet utile,
qui impose de ne pas privilégier une interprétation d’un traité dont le résultat serait de vider le texte
de tout effet juridique ? N’implique-t-elle pas, en particulier, que la liste exhaustive des motifs de
refus fixée à l’article 2 perdrait tout son sens, étant donné que pour n’importe quel autre motif ou
prétexte, y compris le plus saugrenu et arbitraire , cet argument pourrait jouer librement au travers
de la «self-judging clause» du litt. c) ?
21. Il est vrai qu’à l’appui de sa thèse, que je me permets de qualifier de «potestative pure»,
la France peut invoquer certains de vos obiter dicta, dont elle fait pour l’heure une utilisation fort
19
discrète et en sourdine dans son contre-mémoire , alors qu’on peut supposer qu’elle leur réservera
sans doute un rôle de prima donna lors de ses prochaines plaidoiries orales. En effet, la Cour s’est
penchée en1986 ( Activités militaires et paramilitaires au Nicaragua et contre celui-ci ), et est
ensuite revenue beaucoup plus rapidement en2003 ( Plates-formes pétrolières (République
islamique d’Iran c.Etats-Unis d’Amérique), arrêt, C.I.J.Recueil2003 , p.183, par.43), sur
certaines dispositions de traités bilatéraux d’amitié permettant à chacune des parties de déroger à
19
CMF, p. 28-29, par. 3.41 et note 22. - 20 -
des obligations conventionnelles pour appliquer les mesures «nécessaires… à la protection des
intérêts vitaux» de cette partie. Face à la préten tion que le recours à de telles clauses relèveraient
de l’appréciation subjective de la partie intéressée, la Cour s’est exprimée ainsi en 1986 :
«Cet article ne peut pas s’interpréter comme faisant échapper à la compétence
de la Cour le présent différend sur la portée du traité. En effet cette disposition, étant
l’une de celles qui constituent le traité, es t régie par l’article XXIV aux termes duquel
tout différend sur «l’interprétation et l’application du traité» est de la compétence de la
Cour. L’articleXXI définit les cas dans lesquels le traité prévoit lui-même des
exceptions au caractère général de ses autres dispositions, mais il ne tend nullement à
faire échapper l’interprétation et l’application de ses propres termes à la compétence
de la Cour prévue par l’article XXIV. Que la Cour soit compétente pour déterminer si
des mesures prises par l’une des Parties re lèvent d’une exception ressort également
a contrario de ce que le texte de l’articleXXI du traité n’a pas repris le libellé
antérieur de l’article XXI de l’accord généra l sur les tarifs douaniers et le commerce.
Cette disposition du GATT, prévoyant des exceptions au jeu normal de l’accord
général, précise que celui-ci ne sera pas interprété comme empêchant une partie
contractante de prendre «toutes mesures qu’elle estimera nécessaires à la protection
des intérêts essentiels de sa sécurité» , dans des domaines comme la fission nucléaire,
les armements, etc. Le traité de1956 fait simplement état au contraire des mesures
«nécessaires» et non pas de celles considérées comme telles par une partie.» (Activités
militaires et paramilitaires au Nicaragua et contre celui-ci (Nicaraguac.Etats-Unis
d’Amérique), fond, arrêt, C.I.J. Recueil 1986, p. 116, par. 222.)
22. Et plus loin la Cour a ajouté que,
«d’après les termes du traité lui-même, la question de savoir si une mesure est
nécessaire à la protection des intérêts vitaux de sécurité d’une partie ne relève pas de
l’appréciation subjective de la partie intér essée, ainsi que la Cour l’a déjà souligné
(paragraphe 222 ci-dessus) : le texte ne vise pas ce que la partie «estime nécessaire»»
(ibid., p. 141, par. 282).
23. Indiscutablement, votre Cour a attribué une importance considérable au fait que, dans
l’affaire qui lui était soumise à l’époque, la clause conventionnelle à interpréter donnait la
possibilité à une partie d’apporter des dérogations à ses obligations conventionnelles en cas de
«mesures nécessaires … à la protection de [ses] intérêts vitaux», et non pas en cas de mesures que
cet Etat «estime nécessaire[s]». Elle a dit assurément que dans le premier cas la question de savoir
si la mesure est nécessaire ou non «ne relève pas de l’appréciation subjective de la partie
intéressée», alors qu’il en va différemment dans l’autre cas, à savoir le cas des mesures que la
partie «estime nécessaires». Toutefois, la Cour n’avait pas à décider et s’est bien gardée d’affirmer
que dans ce second cas l’appréciation subjective de l’Etat ne rencontrerait aucune sorte de limite et
ne serait susceptible d’aucune espèce de contrôle de quelque nature et de quelque portée que ce
soit: ceci notamment lorsque les parties ont, comme ici, habilité la Cour à trancher un différend - 21 -
portant sur une telle question. Certes, une marge d’appréciation
est laissée à l’Etat dans ce cas de
figure, mais la Cour n’a ni déclaré ni laissé entendre qu’il n’y aurait aucune marge du tout! La
Cour n’a pas jugé que l’Etat intéressé disposera it d’un pouvoir d’appréciation, non pas «subjectif»,
mais absolu, face à l’exercice duquel, même tota lement arbitraire, il ne resterait au juge
international compétent qu’à mettre bas son chapeau !
24. Madame et Messieurs les juges, je crois que le présent différend est une occasion de
choix pour que la Cour dise finalement son mot su r l’interprétation qu’il convient de donner à des
clauses d’un accord international qui, à l’instar de l’article 2, litt. c), de la convention de 1986,
autorisent exceptionnellement les Et ats parties à déroger à la plus fondamentale des obligations
qu’ils ont souscrites au moyen de cet accord (dans notre cas, l’obligation de s’accorder l’entraide la
plus large possible) lorsqu’ils «estiment» qu’une telle dérogation est nécessaire pour la préservation
de leur ordre public et de leurs intérêts essentiels. Il s’agit, en effet, d’un problème d’interprétation
qui soulève inévitablement des interrogations de caractère général concernant la latitude du pouvoir
discrétionnaire de l’Etat qui entend se prévaloir d’une «self-judging clause»; il vaut donc sans
doute la peine de présenter d’abord quelques obser vations sur ces aspects généraux. Mais il va
sans dire que c’est surtout à la lumière des principes et des spécificités du traité particulier dont une
telle clause fait partie intégrante qu’il faut raisonner concrètement : autrement dit, l’attention doit
être centrée ici principalement sur la conven tion de 1986, afin de re lever dans celle-ci les
indications permettant de déterminer la signification objective de la clause en question.
6. Remarques générales sur les «self-judging clauses» et sur les limites de l’appréciation
subjective
25. Pour ce qui est des observations générales, la première à faire est la suivante : une chose
est reconnaître qu’un Etat partie, face à une clau se conventionnelle du ge nre de la nôtre, jouit
indiscutablement d’une marge d’appréciation, alors qu’une chose totalement différente est de
prétendre qu’une telle appréciation subjective s’imposerait aux autres parties au traité, ainsi qu’à ce
tiers impartial qu’est le juge inte rnational, dans tous les cas de figure et sans la moindre limite.
Cette thèse équivaudrait à affirmer en substance, on l’a dit, qu’aucune vraie obligation n’a pris
naissance du traité. Parfaitement pertinente est donc ici la remarque méthodologique d’un ancien
président de la Cour, le juge Spender, lorsqu’il observait : - 22 -
«Il nous faut être constamment sur nos gardes, afin que rien de ce que l’on
pourrait dire ⎯ ou de ce que l’on pourrait omettre de dire ⎯ ne vienne donner crédit à
l’idée que les nations ont le droit, en invoqua nt «l’ordre public», de déterminer leurs
propres critères pour définir les obligations qui leur incombent en vertu de
conventions ou de traités internationaux.» (Application de la convention de 1902 pour
régler la tutelle des mineurs (Pays-Bas c. Suède), arrêt, C.I.J. Recueil 1958, p. 121.)
26. Quelle limite alors? Votre Cour a déjà donné une ébauche de réponse à cette
interrogation. Dans son a rrêt de 1952 en l’affaire des Droits des ressortissants des Etats-Unis
d’Amérique au Maroc, la Cour, devant juger à qui revi endrait le pouvoir de choisir les critères
nécessaires pour déterminer la valeur des marchandises aux fins douaniers, s’exprima ainsi: «le
pouvoir d’évaluer appartient aux autorités douanièr es, mais elles doivent en user raisonnablement
et de bonne foi» ( Droits des ressortissants des Etats- Unis d’Amérique au Maroc (France
c. Etats-Unis d’Amérique), arrêt, C.I.J. Recueil 1952, p. 212). Le propos est clair : lorsqu’un Etat a
le pouvoir d’apprécier unilatéralement les conditions lui permettant d’exercer un droit, il a alors
l’obligation d’agir dans le respect des principes de la raisonnabilité et de la bonne foi.
27. Sur ce même concept a insisté également le juge Lauterpacht, par une prise de position
qui apparaît spécialement pertinente ici, puis que la question sur le tapis en l’espèce portait
justement sur l’invocation par un Etat d’une clause de dérogation faisant référence à l’ordre public.
SirHersch a souligné que l’Etat intéressé «ne saurait alors se borner à prouver d’une manière
générale que la loi en vertu de laquelle il a agi relève de l’ex ception permise : il doit prouver que
cette exception a été appliquée d’une manière raisonnable et de bonne foi» ( Application de la
convention de 1902 pour régler la tutelle des mineurs (Pays-Bas cS .uède), arrêt,
C.I.J. Recueil 1958, p. 99, opinion individuelle de sir Hersch Lauterpacht).
28. On peut aussi tirer des confirmations fo rt suggestives de la pleine validité de cette
approche de tout un gr oupe de sentences arbitrales récentes en matière d’investissements dans
20
lesquelles il était question justement de «self-judging clauses» , c’est-à-dire de ce genre de
dispositions conventionnelles dont l’application, à l’instar de l’article2, litt. c), de la convention
franco-djiboutienne de1986, semble dépendre en tièrement, à première vue, de l’appréciation
subjective de l’Etat qui l’invoque. En effet, les conclusions auxquelles les tribunaux arbitraux
20Enron Corporation Ponderosa Assets v. Argentine Republic , sentence du 22 mai 2007, par.322-3CMS
Gas Transmission Company v. Argentine Republic , sentence du 12 mai 2005, par.353-378; Sempra Energy
International v. Argentine Republic, sentence du 28 septembre 2007, par. 364-391. - 23 -
parviennent montrent deuxchoses: d’une part, qu ’il y a une tendance claire à interpréter ces
clauses dans le sens qu’elles n’excluent nullement la compétence de l’arbitre à vérifier le
bien-fondé in facto du recours à l’exception; et, d’autre part, que comme ultima ratio il s’impose en
tout cas de reconnaître la possibilité de vérifier la bonne foi de l’Etat souhaitant s’abriter derrière
une telle exception. Sans aucun doute, l’affirmation de loin la plus intéressante pour nous est celle
qu’on peut lire dans la sentence du 3octobre2006, rendue en l’affaire LG&E c.Argentine . Le
tribunal, à propos d’une clause d’exception contenue dans un traité bilatéral d’investissement entre
l’Argentine et les Etats-Unis, s’est lancé dans la remarque suivante: «Were the Tribunal to
conclude that the provision is self-judging, Arge ntina’s determination would be subject to a good
faith review anyway, which does not significantl y differ from the substantive analysis presented
here.» 21 Aussi synthétique qu’il soit, l’ obiter dictum cité confirme bien qu’en tout cas le choix
subjectif de l’Etat recourant à une clause d’exception (y compris celle libellée avec les mots «si
l’Etat estime») peut être assujetti au minimum à un contrôle extérieur «substantiel» portant sur son
caractère raisonnable et sur la bonne foi. Un contrôle par l’autre partie et, bien entendu, par le juge
international, si les Etats concernés ont consenti à lui soumettre le différend, comme c’est le cas
présentement.
7. La «self-judging clause» de l’article 2, litt. c), de la convention de 1986 et le rôle de
l’obligation de motiver
29. Mais il s’agissait jusqu’ici d’observations générales sur le phénomène des «self-judging
clauses». Il nous faut maintenant passer à l’analyse de la clause spécifique de l’article 2, litt. c), de
la convention de 1986, qui doit être évidemment interprétée «dans son contexte», c’est-à-dire à la
lumière du «tout» dont elle fait partie intégrante et inséparable: le traité dans son entier. Ce qui
saute aux yeux dans cette optique est que le régime du refus de l’entraide n’est pas formé par le
seul article2: l’autre composan te essentielle de ce régime est représentée par l’article17,
établissant, par une formule tranchante et sans nua nces, déjà citée à plusieurs reprises, que «tout
refus d’entraide judiciaire sera motivé».
21
In ICSID Review – Foreign Investment Journal, vol. 21, p. 255, par. 214. - 24 -
30. Une telle formule est courante dans les tr aités bilatéraux de ce genre, qui sont milliers,
même si elle n’est pas présente dans tous : en témoigne l’ouvrage d’un auteur qui s’est penché en
22
profondeur sur ce thème dans une importante monographie récente . Ainsi, par exemple, une
brève recherche menée sur les traités bilatéraux d’en traide judiciaire en matière pénale conclus par
l’Italie m’a permis d’en identifier quelques-uns da ns lesquels l’obligation de motivation ne figure
23
pas .
31. Que vient faire alors une telle obligation, qua nd elle est prévue ? Quel est le rôle que lui
confie l’accord qui la consacre ? L’auteur que je viens de citer est formel à ce sujet :
«Toutes les circonstances qui donnent , ou peuvent donner lieu à un refus de
l’entraide demandée impliquent une apprécia tion qui appartient avant tout à l’Etat
requis. Dans cette optique, l’obligation de motivation vaut pour l’Etat requérant en
tant qu’instrument de contrôle sur la licéité, selon l’instrument international
applicable, de la décision de refus (et, partan t, sur le respect de l’obligation d’entraide
24
qu’il établit).»
C’est donc parfaitement arbitraire, et contraire au principe de l’interprétation harmonieuse ou
systématique des traités internationaux , de prétendre de manière apodictique ⎯comme le fait le
défendeur ⎯ que «[l]’obligation de motiver …n’est pas une condition de licéité [du]
refus,…mais une obligation distincte, résultant de l’article17 de la c onvention» et que «[l]a
position de cette disposition dans la convention témoigne de la volonté des Etats parties de
25
distinguer entre, d’une part, le refus et, d’autre part, la motivation du refus» . Voilà un discours
bien formaliste ! Certes, le lieu où l’obligation de motivation est inscrite est distinct, mais cela ne
l’empêche nullement de jouer le rôle d’instrument permettant à l’autre partie, et maintenant à votre
Cour, de vérifier que les motifs devant être obligatoirement allégués pour justifier le refus sont bien
existants, qu’ils sont sérieux, qu’il sont pertinents et qu’ils ne comportent aucun abus de droit.
22 Annalisa Ciampi, L’assunzione di prove all’estero in materia penale, Padoue, 2004, p. 174.
23 Recherche effectuée en u tilisant l’ouvrage de M.Pisani, F.Mosconi, D.Vigoni, Codice delle Convenzioni di
estradizione e di assistenza giudiziaria in materia penale, 4 éd., Milan, 2004. Les traités en question sont : Italie-Maroc,
12 février 1971, art. 11 (p. 244) ; Italie-Mexique, 22 mai 1899 (remis en vigueur en 1948), art.18 (p.263); et
Italie-Pérou, 24 février 1999, art. 4 (p. 294).
24 Annalisa Ciampi, op. cit., p. 175. L’original en italien est ainsi formulé :
“Tutte le circostanze che danno, o possono dare, luogo ad un rifiuto dell’assistenza richiesta
implicano una valutazione, che spetta innanzitutto allo Stato richiesto. In questa prospettiva, l’obbligo di
motivazione vale per lo Stato richiedente come strumento di controllo sulla liceità, secondo lo strumento
internazionale applicabile, della decisione di rifiuto (e, quindi, sul rispetto degli obblighi di assistenza ivi
sanciti).”
25 CMF, p. 29, par. 3.42. - 25 -
32. La logique du système que forment les articles 1, 2 et 17 de la convention de 1986 est, en
somme, parfaitement identifiable. L’article 1 établit la règle de base liant les parties contractantes :
elles sont assujetties à l’obligation de s’accorder mu tuellement l’entraide la plus large possible;
l’article 2 octroie cependant à chacune d’entre elles la possibilité de se soustraire
exceptionnellement à une telle obligation par déci sion unilatérale, en invoquant l’une des trois
raisons de refus admises; cependant, sur cette partie incombe alors l’ onus probandi ⎯ au moyen
d’une motivation convaincante, requise par l’article 17 ⎯ que le refus se justifie. Il vaut la peine
de rappeler ici ce qui représente un locus classicus du droit international, datant de la fin du
XVIII esiècle : «Whoever will derive to himself advant age by the exception to a general rule, or by
an interference with the generally acknowledged rights of another, is bound to prove that his case is
26
completely within the exception.»
8. L’article 17 de la convention de 1986 et le contenu de la motivation
33. Quant au contenu de la motivation, il fa ut noter aussitôt que le contre-mémoire se
contredit remarquablement! Après avoir préte ndu tirer d’étranges con séquences de la position
distincte de l’article 17 dans la convention de 1986, le défendeur amorce un virage complet et nous
explique quelques lignes plus loin que la disposition en question «prend un sens dans son contexte,
c’est-à-dire en la mettant en relation avec les autr es dispositions de la c onvention…», et que par
conséquent l’article 17 «doit être lu en conjonction avec l’article 2, puisque ce sont les deux seules
27
dispositions à évoquer le refus d’entraide judiciaire» . Voilà qui est fort bien dit ici, Madame le
président! Mais la France ne va pas alors prét endre que l’article 17 doit être lu en conjonction
avec l’article 2, alors que l’article 2 ne devrait pas être, quant à lui, lu en conjonction avec
l’article17! La vérité est que la «conjonction» entre ces deux dispositions est effectivement très
étroite, puisque l’une, l’article 17, prescrit la c ondition essentielle devant être remplie par l’Etat
requis pour pouvoir profiter valabl ement du droit de refuser à titre exceptionnel l’entraide
demandée par l’Etat requérant.
26
Neptune Arbitration, 1797 (United Kingdom/United States , Jay Treaty Arbitrations 1794) (cité par Cheng,
General Principles of Law as Applied by International Courts and Tribunals (1953), p. 306.
27CMF, p. 29, par. 3.44. - 26 -
e
34. La prochaine plaidoirie de M van den Biesen montrera que le refus par la France
d’exécuter la commission rogatoire demandée par Djibouti concernant le «dossier Borrel» n’est
accompagné en réalité d’aucune sorte de motivation : même pas l’indication de la lettre a), b) ou c)
de l’article 2 à laquelle on faisait appel. Tout ce qui a été communiqué est que la commission
28
rogatoire n’aurait pas lieu, un point c’est tout ! Une telle conduite constitue déjà en soi une
violation flagrante de la convention de 1986. Il a fallu à Djibouti attendre le contre-mémoire de la
France pour en savoir officiellement un peu plus : mais ce plus, comme on le verra d’ici peu, est
toujours loin de satisfaire les exigences prescrites par les articles 2 et 17 de la convention.
35. Quelles sont ces exigences? C’est une qu estion à laquelle le contre-mémoire ne dédie
que quelques lignes hâtives, desquelles on déduit que tout ce que l’Etat requis devrait faire est de
29
mentionner le motif de refus retenu, sans beso in «d’aller plus avant dans la motivation» .
Madame le président, soutenir que l’Etat requis, au titre de l’article 17, n’aurait qu’à communiquer
«le motif de refus retenu», signifie bel et bien confondre deux concepts distincts: celui de
«motivation» et celui de «notification». Deux con cepts dont la différence devrait être bien connue
de la France, puisque nombre de ses propres tra ités bilatéraux d’entraide en matière pénale
prescrivent que «tout refus d’entraide judiciaire est motivé et notifié à la partie requérante» : ainsi
est formulé, par exemple, l’article 21 de la conven tion d’entraide judiciaire en matière pénale entre
30
la France et le Paraguay de 1997 . En somme, prétendre transformer l’obligation de motivation
prévue à l’article17 de la c onvention franco-djiboutienne de 19 86 en une simple obligation de
notification contredirait manifestem ent la lettre de cette disposition et la viderait en substance de
tout effet utile.
36. Il n’est point besoin de mettre ici en lu mière combien le défendeur se contredit encore
une fois à ce sujet aussi, puisque, après avoir énoncé cette thèse surprenante, dans le même
contre-mémoire il finit par donner bien tardivement une série de détails, toujours très insatisfaisants
au demeurant ⎯ ainsi qu’on le verra incessamment ⎯ mais des détails quand même ! Ceci alors
qu’il avait soutenu expressément n’avoir aucu ne obligation «d’aller plus avant dans la
28
Lettre du 6 juin 2005 de l’ambassadeur de France à Dji bouti au ministre des affair es étrangères et de la
coopération internationale, CMF, annexe XXII.
29
CMF, p. 30, par. 3.45.
30Pour le texte de la convention: http://www.doc.diplomatie.gouv.fr/pacte/index.html. - 27 -
motivation» ! S’agit-il finalement de la rec onnaissance implicite qu’une telle position n’aurait pas
été défendable devant votre Cour ? On peut se le demander, Madame et Messieurs les juges !
37. Il nous reste tout de même à explic iter encore la position de Djibouti, quant à
l’interprétation à donner de l’obligation de motiver le refus d’entraide, prescrite à l’article 17. Le
fait que les Parties aient décidé de réserver à cette obligation une place importante dans la
convention de 1986 et d’en faire l’instrument uniqu e pour contrôler la légalité de la décision de
refus de l’entraide suggère que l’article 17 doit permettre une vérification de cette décision pouvant
aller au-delà du seul respect des principes de la bonne foi et du caractère raisonnable de la mesure :
ces dernières vérifications, on l’a vu, seraient de toute façon possibles, même en l’absence d’une
disposition explicite comme l’article 17. Le refus d’entraide représentant une dérogation
exceptionnelle à la règle de l’article 1 de la convent ion, il est logique de penser que l’Etat requis a
l’obligation de fournir toutes les informations nécessaires pour permettre à l’Etat requérant de
comprendre pourquoi l’autre Etat a estimé nécessaire de donner une réponse négative à la demande
d’entraide. C’est bien là l’inte rprétation qu’impose, entre autres, la prise en compte des principes
du traité bilatéral d’amitié et de coopération de 1977, dont je me suis permis de souligner hier le
rôle important s’agissant d’interpréter la convention de 1986.
38. Ici aussi la traduction anglaise non officie lle de la convention de 1986, préparée par le
Greffe de la Cour, offre une confirmation d’auta nt plus suggestive qu’elle reprend intégralement
l’article 17 de la version anglaise officielle de l’article 19 de la convention européenne de 1959 que
j’ai déjà citée: «Tout refus de l’entraide judici aire sera motivé» est rendu en anglais par les mots
«Reasons shall be given for any refusal of mutual assistance». Cela met bien en évidence que la
motivation due doit détailler et expliquer de mani ère satisfaisante les raisons véritables ayant
convaincu l’Etat requis à répondre par la négative à la demande d’entraide. Dans ce sillage, la
Cour voudra sans doute prendre note de l’interpréta tion que les Etats de l’Union européenne (y
compris ⎯cela va sans dire ⎯ la France) donnent de l’obligation de motiver le refus d’entraide
judiciaire dans leurs relations réciproques, leurs relations européennes : l’action commune du
29juin1998, adoptée par le Conseil de l’Uni on européenne et relative aux «bonnes pratiques - 28 -
d’entraide judiciaire en matière pénale» 31, enregistre parmi ces «bonnes pratiques» la suivante:
«lorsque tout ou partie de l’aide demandée ne peut être exécutée, adresser aux autorités requérantes
un rapport écrit ou oral expliquant la difficulté et proposant, si possible, d’examiner avec elles les
32
moyens de la résoudre» .
39. Madame le président, il y a de quoi se poser des questions: on a le droit ⎯ me
semble-t-il ⎯ de s’étonner quand on constate que la Fr ance interprète l’obligation de motivation
dans le contexte européen de cette façon exem plaire, parfaitement en harmonie avec les exigences
de la bonne foi, alors qu’elle donne une interpréta tion radicalement différente de l’article 17 de la
convention franco-djiboutienne de 1986, lequel est pourtant formulé exactement comme l’article 19
de la convention européenne de 1959 ?
40. Madame et Messieurs les juges, j’en ai terminé avec la présentation du droit applicable
dans les relations entre Djibouti et la France en matière d’entraide judiciaire relative aux
commissions rogatoires. Je vous serais reconnaissant, Madame le président, de bien vouloir donner
maintenant la parole à l’agent adjo int de la République de Djibouti, M e Phon van den Biesen.
Merci.
The PRESIDENT: Thank you very much, ProfessorCondorelli. I now call to the Bar,
Maître van den Biesen.
Mr. van den BIESEN:
THE BILATERAL TREATIES APPLIED TO THE FACTS OF THIS CASE
Introductory remarks
1. Madam President, Members of the C ourt, now that my friend and colleague,
Luigi Condorelli, has provided the Court with a thorough exposé on the law on mutual assistance in
criminal matters in general, and also on the pa rticulars of both the Convention of 1986 and the
Friendship Treaty of 1977, I will discuss the conclusions to wh ich, in our case and in our view, a
proper application of the law will have to lead.
31
JOCE, L 191/1 du 7.7.98.
32Art. 3 e). - 29 -
Chronology of relevant events
2. In our Memorial we mentioned three international letters rogatory presented by the French
33
Republic in relation to the Borrel case . Actually, there were two earlier ones as well, but for the
essence of our case these do not change the picture. This is a picture of an unreserved, constructive
approach practised by the Djibouti authorities with respect to each one of the consecutive
international letters rogatory 34. These covered a period of more than six years ⎯ from the
beginning of 1996 to half way through 2002 ⎯ while in substance these covered just about every
thinkable variation of assistance: transmitting copies, including copies of fingerprints and copies of
hundreds of photographs; hearing of witnesses in Djibouti; personal inspections of several premises
in Djibouti ⎯ including the presidential palace ⎯ providing reports produced by the telephone
company; organizing reconstructions of the known facts around the death of Judge Borrel, etc.
3. Throughout this period and with respect to each and every topic of the various requests,
the Djibouti authorities provided, indeed, the widest possible mutual assistance, meaning that at all
times they went out of their way to generously satisfy the French investigators, including the
French judicial authorities. On 19April2004 a spokesperson of the French Ministry of Foreign
Affairs acknowledged this and declared:
“nous tenons à réaffirmer l’excellente coopé ration dont ont fait preuve dans cette
affaire les autorités djiboutiennes, notamment dans le cadre de commissions rogatoires
internationales. En particulier, chaque fois que le concours des autorités djiboutiennes
35
a été demandé, celles-ci l’ont accordé sans délai.”
The Respondent has since then only repeated this position and has never changed it nor distanced
itself from it. Therefore, from a perspective of reciprocity alone Djibouti was entitled to nothing
less than, indeed, “la plus large possible” assistance. However, how peculiar is it,
MadamPresident, to now see that the Respondent, when it comes to its own compliance with the
Article1 obligation of the 1986 Convention, adhe res to a totally different perception of what “la
plus large possible” entails, claiming that “la plus large possible” may also be interpreted as
36
“zero” assistance . Clearly, this interpretation is, to put it modestly, entirely implausible and
33MD, Ann. II.2.
34
Ibid.
35MD, Ann.15.
36CMF, paras. 3.34-3.35. - 30 -
cannot be accepted as a starting-point for a pr oper assessment of the lawfulness of the
Respondent’s position.
4. In this respect it is not unimportant to note that from early 2000 onwards several parts of
the French media were strongly criticizing the way in which the French judiciary had conducted the
Borrel investigation. At the same time, th ese media sources began to openly incriminate
high-placed Djibouti authorities with respect to the alleged murder of JudgeBorrel. All of this,
obviously, did not go unnoticed in Djibouti, but it did not affect the openness with which the
Djibouti authorities co-operated in response to the French international letters rogatory.
5. It was only in December2003 that the Djibouti Minister for Foreign Affairs made it
known to his French counterpart, His Excellency Monsieur deVillepin, that, indeed, enough is
enough 37. He suggested that it seemed time that ⎯ after eight years of investigations ⎯ the
judicial investigation could be brought to a conclusion. And he wondered why the French
authorities remained silent vis-à-vis the untruthful attacks on the Djibouti President. Also, he
suggested that those documents qualified as secret-défense, could be declassified if that would help
to speed up the ongoing investigations.
6. Apparently in response to this letter, on 20April 2004, the spokespersons of both the
Ministry of Foreign Affairs and the Ministry of Defence issued the following statement:
“Dans le cadre de l’enquête en cours sur le décès du Juge Borrel, des documents
classifiés ‘secret-défense’ ont récemment fait l’objet d’une décision de
déclassification. Cette mesure avait ét é demandée par les autorités de Djibouti
elles-mêmes. Elle a permis de verser ces documents au dossier d’instruction.
Contrairement aux affirmations avancées par divers organes de presse, rien dans
ces documents ne permet de conclure à la mise en cause des autorités djiboutiennes.
Toute autre déclaration n’est pas conforme à la réalité.” 38
7. This statement, although appreciated as such by the Djiboutian authorities, did not help to
moderate the media attacks on Djibouti’s Head of State. In this context, the Procureur de la
République of the Applicant took a rather rational deci sion. Obviously, he was aware of the fact
that the Djiboutian judiciary earlier had closed its investigation on the death of JudgeBorrel by
concluding that the cause of death was suicide. On the other hand, the presumption on which the
37
MD, Ann. 13.
3MD, Ann. 14. - 31 -
attacks were founded was that JudgeBorrel was murdered. The persiste nce of this murder
presumption no longer excluded that the outcome of the earlier Djibouti investigation did not
provide for the final word and therefore the Procureur called for a reopening of the Djibouti
investigations.
8. Since it was likely that, if any serious foundation for the murder presumption would be
available at all, the French investigation could assist in getting a reopene d Djibouti investigation
started, the Procureur de la République sent a request to his French counterpart in order to obtain
39
copies of the Borrel file. This he did through his letter of 17 June 2004 .
9. Given the history of the mutual co-operation with respect to the Borrel case the Djibouti
authorities expected to receive an immediate, positive response from the French side. An
expectation which was, obviously, also for objective reasons justified. After all, the alleged murder
would have been committed on Djibouti territory, while ⎯ allegedly ⎯ Djibouti individuals would
be implicated. In other words, this was preci sely a case of the sort for which both parties had
agreed to accept a series of obligations laid down in the 1986 Convention.
10. Besides this, on 6 May2004, the Djiboutian Procureur de la République met with the
French State Prosecutor, Monsieur YvesBot, at th e Palace of Justice in Paris. He discussed with
his French colleague his resolution to have the Bo rrel file reopened. At that meeting the French
State Prosecutor confirmed to his Djibouti counterpart, that the French Borrel file would be
40
transmitted to Djibouti as soon as an o fficial request arrived in Paris . The French Prosecutor did
not suggest at all that such a request would be “outside the framework of the 1986 Convention and
41
without regard for its provisions”, a position which the Respondent seems to entertain now .
11. In conformity with this undertaking of th e French State Prosecutor, Monsieur Le Mesle,
Director of the Cabinet of the Minister of Justi ce in Paris, through his letter of 1October2004 to
the Director of the Cabinet of the French Foreig n Minister, made it known: “Cette demande de
communication de pièces sera alors satisfaite, en tenant compte du nécessaire délai qu’imposera la
39MD, Ann. 16.
40
MD, pp. 25, 26, para. 58.
41CMF, para. 3.50 (Eng. translation provided by the Registry of the Court). - 32 -
42
copie des 35tomes de la procédure judiciaire.” This letter also informed the French Foreign
Ministry about the fact that the judge of instruction in charge of the Borrel file ha
d, earlier, refused
to even look into the request since it did not meet the requirements of form required by the 1986
Convention. This problem would be taken care of soon, so wrote the Director of the Cabinet.
12. On that same day, 1 October 2004, the Cabinet of the Minister of Justice sent the
43
Djiboutian Ambassador a set of technical documents . The letter of Monsieur Le Mesle, which I
just mentioned, was among those documents, mean ing that the substance thereof was, indeed,
communicated to Djibouti along the formal lines of communication. This led to the international
letter rogatory of the Djibouti judge of in struction, Madam Leïla Mohamed Ali, dated
3 November 2004 44. The request was transmitted to the Fr ench Ministry of Foreign Affairs by
45
missive dated 6 December 2004 . This Ministry transferred the request to the French Ministry of
Justice on 28 December 2004 46.
13. Thus, 6 December 2004 was the date on which the international letter rogatory, of
3November2004 was formally transmitted to the Fren ch authorities. Obviously, at this point in
time, the French authorities had been aware that th is request would be coming for more than half a
year, i.e., since the Paris meeting between the two State Prosecutors on 6 May 2004.
14. On 27 January 2005 the Director of the Ca binet of the Minister of Justice responded, a
response that constituted an affirmation of a messag e which had already been transmitted. This is
what his letter to the Ambassador of Djibouti says (the letter is in the judges’ folder):
“Suite à notre récente rencontre et ainsi que nous en avons convenu, j’ai
l’honneur de porter à votre connaissance la suite réservée à votre note verbale du
6 décembre 2004.
J’ai demandé à ce que tout soit mis en Œuvre pour que la copie du dossier de
l’instruction judiciaire relative au décès de Monsieur Bernard Borrel soit transmise au
ministre de la justice des affaires pénite ntiaires et musulmanes de la République de
Djibouti avant la fin du mois de février 2005 (ce délai s’explique par le volume du
dossier dont il y a lieu de faire la copie).
42MD, Ann. 18.
43
MD, Ann. 19.
44
MD, Ann. 20.
45CMF, Ann. XIV, p. 2.
46CMF, Ann. XIV. - 33 -
J’ai par ailleurs demandé au Procureur de Paris de faire en sorte que ce dossier
ne connaisse aucun retard injustifié.” 47
In other words, through this official communica tion the Respondent informed the Applicant that
the response to its request was positive and that the execution of this decision would take as little
time as possible.
15. Two days after that, the spokesperson of the Ministry of Foreign Affairs publicly
confirmed the commitment laid down in the lette r just quoted. The Ministry issued a press
statement containing a declaration, which said, among other things:
“A la demande de ces mêmes autorités, une copie du dossier relative au décès
du juge Borrel sera prochainement transmis e à la justice djiboutienne en vue de
permettre aux autorités compétentes de ce pays de décider s’il y a lieu d’ouvrir une
information judiciaire à ce sujet.” 48
This statement then became central to a proce dure in which Madam Borrel filed a civil action
against the press people of the Ministry for alleged unlawful influencing of a judicial decision. The
judgment of the cour d’appel de Paris, delivered in this case on 19 October 2006 recalls this entire
press statement and it acknowledges that the French Ambassador in Djibouti had, indeed, repeated
this same communiqué in Djibouti 4. Thus, the Ambassador of the French Republic provided for
the second confirmation of the decision to transmit the Borrel file, laid down in the mentioned
letter of 27 January 2005. The judgment of the cour d’appel is among the materials in the folder.
16. Then, silence. There was no transfer of the Borrel file before the end of February and no
transfer after the end of February either.
17. From the Counter-Memorial we have learne d that in the meantime, on 8 February 2005,
judge of instruction Clément sent a Soit Transmis to the dean of the judges of instruction, in which
she gave as her opinion that the transfer of the file should be refused 50. According to the cour
d’appel de Paris such a Soit Transmis should be considered to be the response to a request for legal
assistance; also, according to the same judgment such a Soit Transmis is to be considered as a
decision rather than as an advice 51.
47
MD, Ann. 21, p. 137.
48
MD, Ann. 22, p. 141.
49CMF, Ann. XI, p. 3 of the Judgment.
50CMF, Ann. XXI.
51Arrêt de la chambre de l’instruction de la cour d’appel de Paris en date du 19 octobre 2006, Counter-Memorial,
Ann. XI. - 34 -
18. Madam President, on 18 May 2005, the Djibouti Minister for Foreign Affairs, sent a
letter to his French counterpart, in which he refe rred to the commitments made on 27 January 2005
by the Minister of Justice through its Director of the Cabinet, and he stated: “j’ai l’honneur de
52
porter à votre connaissance qu’à ce jour la partie française n’a pas honoré ses engagements” .
19. According to the Respondent’s Counte r-Memorial, on 31 May 2005 a letter would have
been sent to the Ambassador of Djibouti in Paris, by the Director of Criminal Affairs of the French
53
Ministry of Justice . The letter would have informed the Ambassador that judge of instruction
Clément had decided against honouring the request on the grounds laid down in Article 2 (c) of the
Convention. This decision, so says this letter, is not open for appeal. The letter concludes: “Je ne
puis que vous faire part de cette décision souveraine de l’autorité judiciaire compétente.” 54
20. This letter, Madam President, has never been received by the Djibouti Ambassador, as he
55
has confirmed in his letter to the Procureur de la République dated 25 July 2007 . If the
Respondent would have intended to persist with its position with respect to this, alleged, letter it
should have provided proof that the 31 May 2005 le tter was, indeed, sent. This it did not do.
Therefore, it is proven that this letter ⎯ for the purposes of the present case ⎯ is non-existent.
21. There is, however, Madam President, no doubt that the Respondent, eventually,
announced not to be able to honour the interna tional letter rogatory of 3 November 2004. The
letter of the French Ambassador in Djibouti, ad dressed to Djibouti’s Foreign Minister and dated
6 June 2005, is evidence of this 56. The refusal contained in this letter reflects and demonstrates a
clear-cut change of position and it touch es upon the essence of the violations of the
1986 Convention.
22. Madam President, maybe this is a time suitable for a short pause.
52
MD, Ann. 23, p. 143.
53CMF, p. 36, para. 3.68; Ann. V.
54CMF, Ann. V.
55Letter of the Ambassador of the Republic of D jibouti in Paris to Mr. Djama Souleiman AliProcureur de la
République de Djibouti, 25 July 2007, with annex; see Additional Docume nts submitted to the Court by the Republic of
Djibouti, 21 Nov. 2007, Ann. 4, p. 10.
56MD, Ann. 24. - 35 -
The PRESIDENT: Yes. We shall take the mid-morning pause now and resume shortly.
The Court now rises.
The Court adjourned from 11.25 a.m. to 11.40 a.m.
The PRESIDENT: Please be seated. Yes, Maître van den Biesen.
Mr. van den BIESEN: Madam President, before the pause I summarized the chain of events
relevant to this section of our pleadings. Now I would like to turn to an assessment of these facts.
Object and purpose of the request
23. Before I do so, I do need to recall the object and the purpose of the request for assistance,
since the Respondent has raised some doubts about these. According to the international letter
rogatory of 3 November 2004, the Djibouti judge of instruction asked to:
“Nous transmettre la copie certifiée c onforme de la procédure d’information
instruite au Tribunal de Grande Instance de Paris au cabinet de Madame le Juge
d’Instruction Sop57e Clément du chef d’assassinat contre X, dans la mort de
Bernard Borrel”
So, there should be no lack of clarity here: the judge was only aiming at obtaining a certified copy
of the French Borrel file, being, at the time and also today, handled by judge of instruction,
MadamSophieClément. The request did not aim to obtain copies of additional files relevant to
other criminal investigations, however relevant they may be to some of the matters which seem to
have become issues in the course of the Borrel investigations.
24. The purpose of the request also follows from the international letter rogatory of
3November2004, which explicitly refers to the fa ct that the judge had been requested to reopen
the Borrel file in order to investigate the murder of the late Judge Borrel, which was quite a step on
the part of the Djiboutian judiciary, that earlier ha d concluded that this was a suicide case and that
58
the file, accordingly, could be closed .
57
MD, Ann. 20, p. 134.
5MD, Ann. 16, 7 Dec. 2003. - 36 -
Response to Djibouti’s international letter rogatory
25. The Applicant has indicated all along that the 27January 2005 commitment letter
constituted the formal ⎯ positive ⎯ response to its request of 3November 2004. Next the
Applicant has perceived the letter of 6June 20 05 as putting an end to Djibouti’s waiting for the
execution of the commitment of 27January, since it clearly contained a change of position and
informed that the French were not going to honour the request to transmit the Borrel file.
26. Now, what exactly has b een the nature of these responses, given by the Respondent to
the Applicant’s international letter rogatory. Firs t, we will look at the commitments made by the
Respondent, then we will analyse the French refusal.
Commitment
27. As set out before, the French were aware of Djibouti’s being prepared to reopen its
Borrel investigation. Since the French investigations seemed to be the source for a continuous flow
of reports in the French media suggesting or, mo re often, stating this was a murder case and
suggesting or, more often, stating that this murder was ordered by those in high places in Djibouti,
the Djiboutian judiciary sought to use the substance of these investigations as a starting-point for
their renewed efforts. The French side, clearly ⎯ rather: obviously, seen from the perspective and
concept of mutual assistance ⎯ sympathized with this approach and made it known to the Djibouti
authorities, orally as well as in writing 59, that the copies of the file would be transmitted soon.
28. If the oral commitments made by the French State Prosecutor to the Procureur de la
60
République during the meeting of 6 May 2004 in the Palais de Justice in Paris and if the letter of
1 October 2004 61 sent by the Director of the Cabinet of the French Minister of Justice to his
colleague at the Ministry of Foreign Affairs, a copy of which was forwarded to the Djibouti
Ambassador on the same date, if those may be inte rpreted as expressions of a clear intention, there
62
can be no doubt as to the meaning of the 27January 2005 letter . This letter was sent by the
highest office holder of the French Ministry of Justice. This letter was addressed to Djibouti’s
59
See above, para. 15.
60
See above, para. 10.
61MD, Ann. 18, p. 121.
62MD, Ann .21, p. 135. - 37 -
official representative in the French Republic, i.e., His Excellency the Ambassador. This letter was
a direct response to the Ambassador’s missive dated 6December 2004, transmitting the
international letter rogatory of 3 November 2004 to the French authorities. And it says ⎯ and the
letter is in your materials ⎯ it says: “J’ai l’honneur de porter à votre connaissance la suite réservée
à votre note verbale du 6 décembre 2004.” 63 After which the central message follows, which I will,
this time, read in the translation provided by the Registry:
“I have asked for all steps to be taken to ensure that a copy of the record of the
investigation into the death of Mr.Bernard Borrel is transmitted to the Minister of
Justice and Penal and Muslim Affairs of th e Republic of Djibouti before the end of
February 2005 (such time being required b ecause of the volume of material to be
copied).”
29. This letter, this response, was ⎯ according to its wording ⎯ entirely unconditional. No
reference, whatsoever, was made to any specifics flowing from French legislation. No reference to
any other executive or judicial authority that would still have to endorse the transmission of the
file. Nothing of the kind; “it’s a matter of phot ocopying”, that is what the letter conveyed. This
letter contains a crystal clear and unreserved commitment ⎯ commitment by the Respondent to
honour Djibouti’s international letter rogatory in full.
30. Earlier, Professor Condorelli has dealt with procedural aspects, laid down in Article 14 of
the 1986 Convention 64. This provision stipulates that communications with respect to international
letters rogatory are to take place between the two Ministries of Justice. At the French side this
issue was handled at the highest level of the Ministry of Justice, i.e., by the Cabinet of the Minister:
see the initial response of 1October 2004 to the letter of the Procureur de la République of
Djibouti. So, from a procedural perspective the letter of 27 January is Article 14 of the Convention
at work: the Ministry of Justice of France confir ming that action is being taken in response to an
international letter rogatory and stipulating that this action will, indeed, lead to the Borrel file being
sent to the Ministry of Justice in Djibouti before a certain date.
31. It was probably in the light of the widest measure requirement of Article 1, paragraph 1,
of the 1986 Convention that, in the same letter, the Cabinet Director added that he had told ⎯ on
63
CMF, Ann. XIV, p. 2.
6CR 2008/2, p. 16, para. 14 (Condorelli). - 38 -
top of the commitment ⎯ the Procureur de Paris to see to it that this file would not see any
unjustified delay.
32. It is clear that the follow up to this letter would have been nothing other than the actual
transmission of several boxes containing the copied file, which would have been accompanied by a
simple cover letter referring back to the 27January letter. This, evidently, would have been the
case if it weren’t for the blockade raised later on by the judge of instruction. I will get back to that
blockade later.
33. Two days after the Ministry of Justi ce transmitted its commitment to the Djibouti
authorities the French position was made public through a press communiqué of the French
Ministry of Foreign Affairs. The language used in this public statement of 29 January 2005 is
entirely unambiguous ⎯ you will find the statement in the materials in the folder: “A la demande
de ces mêmes autorités, une copie du dossier relative au décès du juge Borrel sera prochainement
65
transmise . . .” Again, no conditionality attached. Again, no reference, whatsoever, to internal
legal requirements which would firs t have to be met. The press communiqué, in itself reflecting
the French position, provides clear evidence as to the fact that the letter of 27 January 2005 indeed,
says what it says: the file will be transmitted. Madam President, yesterday we have seen that the
French authorities consider their press communiqués as evidence of the official French position:
when the Djiboutian Ambassador protested against the convocation of his President, the authorities
66
responded by means of a press communiqué . I mentioned just a minute ago that, as recalled by
the cour d’appel de Paris , the French Ambassador in Djibouti repeated the press communiqué to
67
Djibouti, which constituted the second confirmation of the commitment made .
34. In other words, towards the end of January 2005 both Parties acted in complete
agreement as to the consequences originating fr om the 1986 Convention. In this context it is
relevant, indeed, that at the time this press communiqué was issued the French executive authorities
were firmly of the opinion that only the executive was, in the end, able to decide on the fate of an
international letter rogatory. In other words, bot h the Ministry of Justice and the Ministry of
65MD, Ann. 22, p. 139; emphasis added.
66
CR 2008/1, p. 47, para. 47 (van den Biesen).
67CMF, Ann. XI, p. 3 of the Judgment. - 39 -
Foreign Affairs were convinced that it was up to th e executive to reach a deci sion. Both the letter
and the communiqué, indeed, transmitted the decisi on they had reached with respect to Djibouti’s
request. And this position of both the Ministry of Foreign Affairs and the Ministry of Justice
follows on from the fact that still in 2006 the French Procureur de la République persisted with his
opinion, with his position in the case leadi ng to the judgment of 19October 2006 of the cour
d’appel de Paris 68, which judgment I have mentioned before.
35. Madam President, the Convention does not provide for a mechanism to come back and
withdraw a commitment, once it has been made in compliance with its provisions. One may think
of a more general reason which could possibly, und er certain extraordinary circumstances, justify
such a withdrawal after a commitment has been made, such as unforeseen circumstances arising
subsequently. However, the Respondent has not offered any of those in its Counter-Memorial. On
the contrary, the Respondent now bases its refusal on the consequences of its own national law, but
it goes without saying that those consequences cannot possibly qualify as unforeseen
circumstances.
36. For all these reasons, it is clear that this case is in the first place aimed at making the
Respondent comply with its explicit commitm ent made under the 1986 Convention. The
following, what I am going to say (i.e. para. 37 thro ugh para. 79), is, therefore, to be considered as
the Applicant’s subsidiary position with regard to the Respondent’s obligations under the
Convention.
The letter of 6 June 2005
37. As ProfessorCondorelli set out earlier this morning, the obligations under Article1 are
absolute in the sense that this provision only permits for a few exceptions, exceptions that are
listed ⎯ exhaustively listed in Article2. The part y wishing to have recourse to one of the
exceptions has the burden of proof that the excep tion is, indeed, given the factual circumstances,
available to it. In other words, the Article 1 obligation only yields to a valid recourse to one of the
Article 2 exceptions.
68
CMF, Ann. XI. - 40 -
38. On 6 June 2005 the French Ambassador in Djibouti sent a letter to the Applicant’s
69
Minister for Foreign Affairs . The substantive part of the letter ⎯ it is in the materials that we
provided this morning ⎯ is barely two lines and reads as fo llows: “Après consultation de mes
autorités, je suis au regret de vous informer que nous ne sommes pas en mesure de donner suite à
cette demande.” 70 So, this is the letter, MadamPresident, that would have to be considered as
holding the Respondent’s official response to the international letter rogatory of 3 November 2004,
a response which basically comes down to a bleak: “No, you won’t get what you asked for.” This
letter implied that the Respondent had entirely reve rsed its earlier position, a reversal which is, as
stated before, without any basis in law.
39. In the letter no reference is made to the commitment letter sent by the head of the
Minister of Justice’s Cabinet, on 27 January, while no reference is made either to the alleged letter
of 31 May 2005, which I will discuss later. The 6 June letter is not only in substance, but also in
71
form quite different from the commitment letter of 27January2005 . The earlier one was in
accordance with Article14 of the Convention since it contained a communication from the
Ministry of Justice with a message to Djibouti’s Ministry of Justice. The 6June2005 letter does
not contain, neither in the letter itself nor in the fo rm of an attachment, any reference to a point of
view of the French Minister of Justice. It does not include a request to transmit the contents thereof
to the Djibouti Minister of Justice either, while no message to the Ministry is implied. The letter is,
therefore, not in conformity with Article 14, for which reason alone, it, simply as to the form, may
not be considered to constitute a valid recourse to one of the exceptions of Article2. In other
words, from a legal perspective this letter may be considered as non-existent, which implies that
the obligation to honour the international letter rogatory was not blocked by it.
40. As ProfessorCondorelli set out, the par ties to the Convention may only have valid
recourse to one of the exceptions of Article 2 if a proper motivation, holding a reasoned
69MD, Ann. 24, p. 147.
70
MD, Ann. 24, p. 147.
71MD, Ann. 21, p. 135. - 41 -
72
justification, is part of the response . This also follows from Arti cle 17 of the Convention, which
reinforces the inherent obligation to justify availing oneself of one of the exceptions of Article 2.
41. Whichever way one may wish to read the 6 June 2005 letter, for example by putting a
maximum of good faith into the mind of the addresse e of the letter, the letter does not provide for
any reason to even think that its basis is to be found in Article 2 of the Convention, let alone that it
would provide for any specifics with respect to the precise exception involved, let alone that it
would provide for an explanation as to why one of the Article2 exceptions would be a solid, a
valid, ground to justify the refusal.
42. Again, the only message this letter conveys is a message which could have been
contained in a rubber stamp saying “refus, 6 juin 2005”, except that, here, the stamp is wrapped in a
diplomatic apology.
43. It is probably an understatement to say that the Convention of 1986, more specifically
Article 1 thereof, does not provide for any reason to think that the parties to the Convention would
have envisaged that this would be the accepte d way to not fulfil its core obligation, which ⎯ let it
be repeated ⎯ comes down to an obligation to generously provide assistance once asked to do so.
44. The conclusion, therefore, must be that the refusal contained in the letter of 6 June 2005
cannot be accepted as a valid non-compliance with the Article 1 obligation.
The alleged letter of 31 May 2005
45. As I stated earlier and as declared by the Ambassador of Djibouti in his letter of
25 July 2007 73, the other letter, the letter of 31 May 20 05, was not known to the Applicant before
74
the Respondent submitted it to the Court . Just a minute ago I concluded that this letter must, for
the purposes of our case ⎯ be ignored as non-existent. So, it is only in the alternative, that I will
now have a look at the contents thereof. As the 6 June letter, the present one also needs to be tested
against the requirements of form and substance that flow from the 1986 Convention.
46. Although this letter emanates from the Ministry of Justice, this time the sender is not the
Director of the Cabinet of the Minister, who, through his earlier communication with the Applicant
72
CR 2008/2, pp. 25-27, paras. 33-37.
73
Document 4 of the documents submitted to the Court on 21 November 2007.
74CMF, Ann. V. - 42 -
had made it clear that this issue was being handled at the highest level of the Ministry. Actually,
the letter of 31May does not even seem to bother to refer back to the earlier letter of the highest
official of the Ministry. Apart from that, it does not contain a message for the Djibouti Ministry of
Justice, nor does it contain the sender’s wish that the Ambassador would transmit the message to
his Minister of Justice. So for this letter also, the conclusion must be that it cannot be seen as part
of the communications prescribed by Article14 of the Convention and, therefore, cannot be
considered to constitute a valid recourse to one of the exceptions of Article 2.
47. The contents of the letter of 31 May 200 5 are clearly somewhat more elaborate than
those of 6 June. It contains information about th e procedure followed by the Ministry, i.e., it says
that the international letter rogatory was transmitte d to the judge of instruction in charge of the
Borrel file. Then it continues to inform that the judge of instruction had judged that Article 2 (c) of
the 1986Convention would apply to the request of Djibouti of 3November2004 and that this
provision “ne permettait pas de réserver une répon se favorable”. The letter concludes by stating
that the Director of the Direction des Affaires Criminelles et des Grâces is not able to do anything
else other than “vous faire part de cette décision souveraine de l’autorité judiciaire compétente”.
48. Madam President, if we examine the substanc e of this letter against the requirements of
the Convention only, the paragraph in which reference is being made to Article 2 is relevant. The
paragraph referring to the transmission of the request to JudgeClément for consideration is
informative only as to the internal procedure followed by the Respondent. The paragraph
stipulating the sovereign nature of the ⎯ negative ⎯ decision delivered by the Respondent’s
judicial authority may be relevant for the Responde nt’s executive branch; for the Applicant this is
different, since in its relation with the Respondent this decision as such is not the final word. It is,
in the end, not relevant which procedure the Respondent has followed to reach a position on the
international letter rogatory. At all times it is only the result that counts, it is the result that needs
to be tested against the substantive requirements of the Convention. Actually, this does not seem to
be disputed by the Respondent, who, albeit implicitly, displays the same view 75. The conclusion is
that the letter of 31 May 2005 only contains one pa ragraph which could be relevant for the current
75
CMF, para. 3.30. - 43 -
case. This is the paragraph stating that Article2 (c) of the Convention does not permit a positive
response to Djibouti’s request.
49. Indeed, contrary to the 6June letter, the current one does provide for a reference
indicating that Article 2 (c) would be at play. But, then, the letter stops right there. The reference
to Article2 (c) could only be considered as being the first step in demonstrating that this, indeed,
would be a case in which the exception prevails above the rule. Taking this first step implies that it
is, consequently, incumbent upon the Respondent to provide the justification of the exception it is
invoking. This duty falls square ly upon the shoulders of any re questing State, according to the
1
maxim actori probatio incumbit ; in the present case, this is even more so given the earlier
commitments provided by the Respondent’s representatives.
50. As Professor Condorelli explained earlie r the burden of proof rests upon the party
wishing to have recourse to one of the exceptions of Article2 (c)76. So, a mere reference to a
particular provision cannot be accepted as valid ju stification. The mere mention of Article 2 (c) is
at best to be considered as a very general sort of “notification”, which is definitely not the same as
“motivation” or “justification”. Besides that, the notification at hand leaves the addressee guessing
as to which specific part of this provision the sender would be referring. We know that
Article 2 (c) is about essential interests and we also know that it includes three distinct, potential,
refusal grounds: sovereignty, security, ordre public and, next to those, one general ground
referring to “other of its essential interests”. So, if the Respondent wishes to have recourse to one
of the exceptions covered by Article2 under (c) it needs to be specific and, most importantly, it
needs to demonstrate why the particular ground chosen, indeed, justifies the recourse to the
exception. The letter of 31May 2005 contains nothing of the kind and is basically nothing more
than an expanded version of the rubber-stamp response given in the 6June letter: “ refus
article 2 c) ⎯ 31 mai 2005”, this time without apologies.
51. So, here also, the conclusion must be that the refusal contained in the, non-existent, letter
of 31 May 2005 cannot be accepted as a valid dishonouring of the Article 1 obligation.
76
Prof. L. Condorelli, pleadings of 22 January 2008, p. 19, para. 68 (sic). - 44 -
Soit Transmis of 8 February 2005
52. Madam President, I just mentioned that the, alleged, letter of 31May 2005 contained a
reference to a decision of Judge Clément. However, the letter did not provide for any details of that
decision: the date was not provided, the form was not clarified, while the contents of the decision
were not revealed either, in spite of the fact that, apparently, in fact ⎯ or at least in substance ⎯
that decision would precisely embody the Respondent’s response to the Applicant’s request. Only
through its Counter-Memorial of 13July2007, has the Respondent provided this information. In
other words, for the Respondent it took the setting of a dispute before this Court to ⎯ more than
77
two years late ⎯ unveil what is now presented as the motivation for the refusal .
53. Clearly, this manner of proceeding amounts to totally ignoring what the 1986 Convention
aimed to establish between the two parties to this treaty. Professor Condorelli has already
elaborated on the conjunction between the Article 2 and Article 17 provisions 78. The present case
perfectly demonstrates that leaving aside this conjunction would lead to rather absurd
consequences, since a motivation for a refusal whic h is only offered two years after the refusal has
been communicated cannot be considered as part of that refusal, let alone that it could,
retroactively, heal the invalidity of that refusal . A motivation, indeed, serves as a means for the
addressee to, firstly, verify if the refusal is in c onformity with the terms of the Convention and to,
secondly, oppose the refusal if it deems it to be violating the terms of the Convention. At the same
time, such a motivation would assist both parties to discuss possible solu tions for the problem
which, apparently, the requested State encounter ed. If it were to be accepted that a proper
motivation of a refusal does not need to be provide d as an inherent part of the refusal itself, but
that, indeed, it may be submitted after an indefin ite period of time, this would entirely undermine
the very purpose as well as the structure of the Convention, since that would, then, allow for
non-motivated refusals to be as such and alone decisive.
54. The Respondent now suggests that the Applicant had been perfectly aware of this
decision of the judge all along, since the Applicant did refer to it in paragr aphs 146 and 147 of its
Memorial. However, the text of paragraph 146 of our Memorial shows that the Applicant was only
77
CMF, paras. 3.66-3.67.
7CR 2008/2, pp. 23-25, paras. 29-32. (Condorelli). - 45 -
aware of the existence of some intervention by the judge of instruction. It also shows that Djibouti
had no knowledge of the specifics of what ⎯ as we learned now through the Counter-Memorial ⎯
turned out to be a Soit Transmis. Djibouti did, indeed, make reference to “essential interests” being
the reason for the refusal, but from what follows in our Memorial it is clear that the Applicant was
not provided with any insight at all as to why and how the essential interests were seen to be
relevant.
55. Madam President, when discussing the reasons for which it did, after all, not transmit the
Borrel file to Djibouti, the Respondent relies heavily on the alleged exclusivity it would possess in
79
determining whether any of the exceptions of Article2 are at stake . ProfessorCondorelli has
spoken about this earlier today 80. Certainly, a margin of appreciation is left to the State party that
wishes to have recourse to one of the Article2 ex ceptions to the rule laid down in Article1.
Certainly, the words used in Article2 “considérées” in 2 (a) and “estime” in 2 (c) do reflect the
presence of a margin of appreciation. But, then, rather than explaining to what extent this margin
would create latitude for the Respondent, the Respondent takes several big steps at one time and
claims that providing reasons would be impossible given the Article 2 (c) label that it just had put
81
on its refusal . This seems to be a rather simplistic way of looking at the issue, while at the same
time this approach undermines the very idea of having a convention regulating mutual legal
assistance. The consequence of the Respondent’s view is that a State would be able, indeed, to
arbitrarily refuse any international letter rogatory as long as it puts one of the Article 2 labels on the
refusal. A refusal like that, then, may or may no t be in conformity with the Convention, but ⎯ in
the view of the Respondent ⎯ it would in any event be entirely untouchable.
56. This interpretation is not only quite unlik ely, but the Respondent shows through the very
same Counter-Memorial that, in fact, there is no need to claim this exclusivity as to the reasons of
recourse to the exception. Like the, alleged, letter of 31 May 2005 the Counter-Memorial provides
one sole reason for which Article 2 (c) would apply: the Soit Transmis of JudgeClément. The
79
CMF, paras. 3.38-3.41.
80
CR 2008/2, pp. 21-23, paras. 25-28 (Condorelli).
81CMF, paras. 3.45. - 46 -
Respondent now, i.e., only now, provides the Soit Transmis as an annex, which illustrates that it is,
in itself, perfectly possible to provide further reasons for the refusal.
57. The precise legal status of this Soit Transmis does not become clear from the language
used. The document is among the materials we ha nded over this morning. In the view of the
French Public Prosecutor, submitted on 12June2006, this Soit Transmis should be considered as
82
an advice, an advice rather than as a judgment or a decision . The Public Prosecutor submitted
this opinion to the cour d’appel de Paris , which thereafter decided that this Soit Transmis would
83
not have the status of an advice, but that it c onstitutes a decision of the independent judiciary .
The consequences of this judgment of the cour d’appel de Paris may seem peculiar, since it means
that it is left to any French judge of instruction to decide ⎯ within the context of explicitly
stipulated friendly relations between France and another State ⎯ whether the French Republic’s
helping the other State would be a threat to the French Republic’s essential interests. A decision
which is final, since according to the French na tional legislation no appeal against such a decision
is possible. But, however peculiar the Applicant may think that this is, actually this is the reality
with which also the Applicant ⎯ and, for that matter, the French executive authorities ⎯ have to
live.
58. I will now analyse the Soit Transmis as providing the reasons, i.e., the only reasons,
which would in the view of the Respondent ju stify its having recourse to the exception of
Article 2 (c) of the Convention. Actually, the judge of instruction considered two reasons:
⎯ Détournement de procédure;
⎯ Grounds provided in Article 2 (c) of the Convention.
Besides those two, the judge of instruction introduced an additional criterion which is, without any
further explanation, to be considered as entirely outside the boundaries of the 1986 Convention. At
the very end of the Soit Transmis the judge considered: “ Sans concourir en aucune façon à la
manifestation de la vérité , cette transmission compromettrait gr avement les intérêts fondamentaux
du pays et la sécurité de ses agents.” 84 However, Madam President, a request for mutual assistance
8CMF, Ann. XI, see Rappel de la procedure.
83
CMF, Ann. XI.
8CMF, Ann. XXI; emphasis added. - 47 -
is aimed at assisting the requesting State in discove ring the truth, not the requested State, so this
consideration cannot help the Respondent as a furthe r motivation of its decision not to provide the
legal assistance requested by Djibouti.
Détournement de procédure
59. The reasoning developed by the French judge of instruction, leading to the thesis of
détournement de procédure seems also to have taken the j udge far beyond the scope of the
1986 Convention.
60. In the first place, the judge seems to entirel y ignore the fact that the international letter
rogatory was sent by, was signed by, a Djibouti judg e of instruction, MadamLeïlaMohamedAli.
JudgeClément only seems to have formed an opi nion based on her perception of the reasons for
the Djibouti Procureur de la République to seek a reopening of the Djibouti Borrel file. This focus
on the, alleged, motives of the Djiboutian Procureur de la République clearly has prevented
Judge Clément to do what she, apparently according to French law, is supposed to do: consider the
very request submitted by her colleague. Madam Pr esident, it does not seem to be the proper thing
to do for a judge from the request ed State to question the integrity and the independence of the
requesting judge. For this reason alone the first reason given should be rejected and set aside as
entirely outside of the terms of the Convention.
61. Besides that, Judge Clément restricts her thoughts about the motives the Djibouti
Procureur may have had in seeking the reopening of the Borrel file to mere speculation, not
supported by any factual evidence.
62. Why the Djibouti Procureur de la République decided to request a reopening of the
Borrel file by a Djibouti judge of instruction is to be read in his initial request of 17 June 2004 8, to
which JudgeClément referred in the Soit Transmis: the ongoing reports in the French media that
the death of Judge Borrel was a murder case, while the same reports seemed to imply that Djibouti
citizens and high-ranking Djibouti officials were involved, brought the Djibouti Procureur de la
République to seek a reopening of the file. Nothing more, nothing less, nothing else; those are the
available facts.
85
MD, Ann. 16. - 48 -
63. In the few sentences leading to the détournement de procédure thesis, the judge seems to
entirely distort the substance of the international letter rogatory. However, this is what the request
of Judge Leïla Mohamed Ali said:
“Vu le Réquisitoire Introductif de Mons ieur le Procureur de la République en
date du 20octobre2004, tendant à ouvrir une information contre X du chef
d’assassinat sur la personne de Bernard Borrel et à décerner une commission rogatoire
internationale aux fins de demander la communication du dossier instruit à Paris au
Cabinet de Madame le Juge d’Instruction Sophie Clément;” 86
So, the Prosecutor wanted two things:
⎯ the opening of an investigation into the murder of Judge Borrel, and
⎯ the issuing of an international letter rogatory in order ⎯ in support of the reopened
investigation ⎯ to obtain the French Borrel file.
These are entirely legitimate things for a prosecu tor to initialize. However, this is what
JudgeClément made of this: “le Prosecutor de la République de Dji bouti ouvrait une nouvelle
information ‘au fins de demander la communication du dossier instruit à Paris’” 87. So, she
translated the international letter rogatory i ssued by an independent Djibouti judge into a
condensed operation of the Djibouti Prosecutor. The French judge plainly states that the Djibouti
Prosecutor open a new investigation in order to ob tain the French file. Then, the judge offers
support for these suggestions by the fact that the international letter rogatory does not contain any
other motivation for the new Djibouti investigation, nor any new facts since the earlier closure of
the Djibouti Borrel file.
64. First of all, there are no specific requirements as to the substance of an international letter
rogatory other than those listed in Article13 of the Convention. “Reason” and “objects” need to
be ⎯ only ⎯ indicated. In this case the reason is clearly given: the reopened investigation into the
possible murder of JudgeBorrel. The object is clearly given in the same context as well: the
French Borrel file. Again, it is not for the requ ested State to question the wisdom, sensibility or
prudence of the requesting State, let alone that it would be for the requested State to begin to
question the integrity of the requesting judge.
86
MD, Ann. 20, p. 131, see also p. 133, final paragraph.
8CMF, Ann. XXI, Soit Transmis, p. 2,. - 49 -
65. Only for these reasons the entire détournement de procédure approach should be
dismissed as lacking any basis, neither in fact, nor in law. Besides that, this must be repeated
again, the 1986 Convention does not contain any other exceptions to the rule of Article 1 than those
that are, exhaustively, listed in Article 2.
66. In fact the only thing that the reasoning leading to the détournement de procédure thesis
demonstrates is that the mere existence of the French charges against th e Djibouti Prosecutor has
been, for this judge of instruction, the exclusive reason to refuse the honouring of the international
letter rogatory. What other illustration do we need that, for the purposes of our case, these two
issues are closely interconnected?
Grounds provided in Article 2 (c) of the Convention
67. The second ground offered in the Soit Transmis reads as follows:
“il est également prévu par l’article2-c que l’Etat requis peut refuser l’entraide
judiciaire s’il estime que l’exécution de la demande est de nature à porter atteinte à sa
souveraineté, à sa sécurité, à son ordre public ou à d’autres de ses intérêts essentiels.
Tel est le cas concernant la transmission de notre procédure.” 88
Here, it is not specified which one of the grounds listed in Article2 (c) would be at stake. The
Soit Transmis, then, continues to provide a further explanation:
“Nous avons sollicité au cours de notre information à plusieurs reprises les
ministères de l’intérieur et de la défen se afin d’obtenir communication de documents
classés Secret Défense.
La Commission Consultative du Secret de la Défense Nationale a donné un avis
favorable à la déclassification de certaines pièces.
meinistèsesmenti onnés, suivant cet avis, nous ont transmis ces
documents.
Faire droit à la demande du juge djiboutien reviendrait à détourner les termes de
la loi française en permettant la communication de pièces qui ne sont accessibles
qu’au seul Juge français.
Communiquer notre dossier aurait pour conséquence de livrer indirectement des
documents des services de renseignement français à une autorité politique étrangère.”
From this part of the Soit Transmis it is not immediately clear what this is about. However,
through the Counter-Memorial the Respondent has provided some clarification. In paragraph 3.77,
88
CMF, Ann. XXI, Soit Transmis, p. 2, last paragraph. - 50 -
the Respondent further specifies the documents to wh ich the judge of instruction referred, as well
as to which advice of this Commission refe rence was being made. The advice dates
from 27 January 2005 and is submitted by the Respondent as Annex XXIII. It is also in the judges’
folder.
68. Before going into the question of the validity of the reasoning just quoted, we may first
want to have a look at this advice of the Commission consultative du secret de la défense
nationale 89. The Commission apparently ⎯ so says the advice ⎯ examined “l’ensemble des
documents classifies” and it concluded that part of that file may be declassified. The part to be
declassified is identified as Note No. 037, dated 25 January 2000; this Note counts two pages. So
says the Commission in its advice.
69. From this point onwards, we are left to speculate about the importance of all of this.
Many questions do arise. How large was the file examined by the Commission? How is it that
only two pages are declassified? Would this imply that they are not important or that they were
deemed to be indispensable for the Borrel investig ation? Would this imply that only two pages of
the file could have had any relevance to the Borrel case? Would the two pages out of the entire file
support the murder presumption rather than the su icide thesis? The answ ers to these questions,
obviously, we do not know. However, given the totality of the Soit Transmis and given the fact
that it seems to be entirely focused on the role of the Prosecutor of Djibouti, it is more than likely
that these pages are not related at all to the death of Judge Borrel.
70. In any event, we do need to note that the Respondent does not provide for a hint of
reasoning as to why these two pages are so extremely important that they would justify recourse to
one of the exceptions under Article 2 (c).
71. The only motive the Respondent puts forw ard in this respect is that transmitting
documents produced by the French intelligence services to a foreign authority will compromise
90
essential interests of the French Republic . Why is that so? Why is that so “de nature”, as the
Respondent says as the judge had said? Another way to look at this may be that it is more often
than not in the nature of intelligence serv ices to declare their products as classified “de nature”.
89
CMF, Ann. XXIII.
9CMF, para. 3.78. - 51 -
Therefore, declassifying two pages could very well mean that these two pages are not that sensitive
at all. This, indeed, is also speculative, but it only goes to show that the issue warrants more
reasoning, more motivation than just another rubber stamp–like approach.
72. It is the view of the Applicant that the motives provided by the Respondent with respect
to the two pages at stake do not come close to meeting the standards to be applied when
demonstrating that recourse to one of the exceptions listed in Article2 (c) is at stake. In other
words, the Soit Transmis together with the explanation submitted by the Respondent in
paragraphs3.77 and 3.78 of the Counter-Memorial do not justify the Respondent’s complete
change of position if compared to the commitm ent letter of 27 January 2005 nor the Respondent’s
refusal to honour its obligations vis-à-vis the international letter rogatory of 3 November 2004.
73. It is only in the alternative that Dji bouti proposes that the Respondent submits the two
pages concerned to the Court for a confidential assessment by the Court as to the validity of the
Respondent’s position with respect to these two pages. Obviously, the Applicant ⎯ for that
purpose ⎯ would waive its rights to have access to these two pages, which would only change,
also obviously, if the Court concludes that, indeed, there is no reason not to hand over the particular
document to the Applicant.
74. Next, Madam President, two more issues remain to be discussed:
⎯ The observation of Judge Clément with respect to, as she said, “détourner les termes de la loi
91
française . . .” ;
⎯ A partial transmission of the Borrel file.
The judge of instruction in the Soit Transmis also considers:
“Faire droit à la demande du juge djiboutien reviendrait à dé tourner les termes
de la loi française en permettant la co mmunication de pièces qui ne sont accessibles
qu’au seul Juge français.”
This consideration is not repeated, let alone str essed by the Respondent in the Counter-Memorial.
Besides that, the French law regulating the declassification of documents following a request of the
judiciary, which law was submitted by the Responden t as Annex XXIV, is entirely silent on this
issue. It is also rather unlikely that there woul d be a prohibition as advanced by the French judge.
91
CMF, Ann. XXI, Soit Transmis, bottom of page 2. - 52 -
From the paragraph I quoted earlier from the judgment of the cour d’appel de Paris, it appears that
92
this Court at least took care to explicitly not pronounce on this issue . The Applicant assumes ⎯
if this would be wrong, the Respondent will undoubtedly provide for a correction ⎯ that any
document added to the file through the procedure fo llowed with respect to these two pages, would
after having been declassified receive the same st atus as the rest of the file: accessible to the
parties directly involved in the investigation a nd open to transmission as part of providing mutual
assistance to a foreign authority. Therefore, also this consideration of the judge of instruction does
not come close to justifying recourse to Article 2 (c).
Partial transmission of the file
75. This brings us to the final issue which needs to be addressed. Why? Why is it that the
Respondent refuses to transmit an entire file counting 35binders based on two, allegedly,
especially sensitive pages?
76. Clearly, the 1986 Convention would allow for a partial refusal to transmit a requested
file. The two pages called upon by the Respondent to back up the refusal to transmit the entire file,
were added shortly after the advice of the Commission consultative dated 27 January 2005.
Already in the fall of 2004 the Borrel file count ed 35 binders. According to the Respondent these
two pages would have permeated the entire file, which for that reason could not any longer be
93
transmitted . This, is just an entirely unlikely and th erefore, unacceptable argument, especially if
presented without any further explanation whatsoever. Also here, the judgment of the cour d’appel
de Paris carefully and explicitly did not pronounce on this particular issue.
77. One could imagine that, after the two pages had been added to the file, new additions to
the file may occasionally refer back to the two pages. But stating that 35 binders, covering a period
of almost ten years of investigations, would in their entirety have referred forward to a Note
containing two pages ⎯ a Note which was dated 25 January 2000 ⎯ the contents of which were
not known until its declassification, is really pushing the Respondent’s position towards one of
being out of touch with reality.
92
CMF, Ann. XI, p. 7 of the Judgment.
9CMF, para. 3.78. - 53 -
78. Besides that, State practice within the European Union demonstrates that another
approach, a good practice approach, is entirely accepted. The European Union Member States
have issued statements of good practice in mutual legal assistance. I will just read sections of a few
of those statements, in order to provide the Court with the general, accepted approach 94. France
has taken the position that:
“Where the request for assistance cannot be executed in whole or in part as it
stands, [the requested State is] to advise the requesting authority of any amendment
necessary as a result of national legislation, providing it, where appropriate, with a
95
copy of the relevant legislative provisions likely to solve the problems encountered.”
Similarly, Italy has taken the following view:
“Where the assistance requested cannot be executed in whole or in part, or
where the relevant deadline cannot be met, the judge responsible for executing the
request will inform the requesting authority of the fact in good time, indicating
possible alternative solutions.” 96
Germany, Ireland, Portugal and Finland accept that:
“Where the assistance requested cannot be executed in whole or in part, the
requesting authorities will be given a written or oral report explaining the difficulty
and where possible offering to consider jointly with the requesting authority how the
difficulty might be overcome.” 97
79. In the view of the Applicant, this approach perfectly illustrates what a truly good faith
application of the 1986 Convention between France and Djibouti would entail. The good practices
just quoted, therefore, also demonstrate that and how the Respondent, in this particular aspect, has
failed to comply with its obligations flowing from the 1986 Convention.
Conclusions
80. Madam President, Members of the Court, it is time to summarize and draw several
conclusions. I will begin to underline that for a considerable period of time, the co-operation
between both the Applicant and the Respondent with respect to the Borrel case has been excellent
94
DG H, Good Practice in Mutual Legal Assistance in Criminal Matters, Statements by the Member States of the
EU, European Judicial Network, SN 1371/00, available at
http://consilium.europa.eu/uedocs/cmsUpload/declaration_EN.pdf .
95
Id., France, p. 28, under 1 (e).
96Id., Italy, p. 33, under (d).
97Id., Germany, p. 22, under 3, Ireland, p. 31, Portugal, p. 45, under (d), Finland, p. 47, under (d). - 54 -
and developed along the lines of as well as in th e spirit of the 1977 Friendship Treaty and of the
1986 Convention.
81. At first, during a considerable amount of years, the French Republic availed itself of the
benefits of the 1986 Convention. It did se nd the Djibouti authorities several consecutive
international letters rogatory related to the Borrel case, which were honoured by Djibouti without
exception. Indeed, Djibouti provided its assistan ce in the widest possible manner to which the
98
French authorities testified in various press statements .
82. When it came to Djibouti’s turn to requ est the Respondent’s assistance, the response to
its international letters rogatory at first developed like a mirror image of the quality of co-operation
that the Respondent had enjoyed first. This led to an unconditional commitment, made by the
Respondent through the appropriate channels, to tr ansmit the requested Borrel file before a certain
date. Shortly thereafter, this commitment was, again unconditionally, confirmed by representatives
of the Respondent at two separate occasions. There can be no doubt that the French executive
authorities knew what they were doing when they made their commitments and that they were,
indeed, about to transmit the entire file.
83. Then, time passed by an d slowly, but surely the commitm ent appeared to turn into a
broken commitment. This was indeed confirmed through this two-line letter of 6 June 2005.
84. Madam President, Members of the Court, on 27 January 2005 the Respondent, rightly so,
formally accepted that it was under a legal obligatio n to honour the Applicant’s international letter
rogatory of 3 November 2004. On this date, the Respondent informed the Applicant through the
appropriate channels that it would act accordingly. At that point the Respondent clearly implied
that it had decided not to avail itself of one of the exceptions of Article 2 of the 1986 Convention.
In other words, at that point the legal positi ons on both sides were defined in accordance with
Article1 of the 1986 Convention. From that point onwards, it was only a matter of actually,
practically and materially implementing the Article 1 obligation.
9Statement by the Deputy Spokesman of the Quai d’Orsay, Paris, 19 Apr. 2004; MD, Ann. 15, Statement of the
spokesman of the Ministry of Foreign Affairs, Paris, 29 Jan. 2005; MD, Ann. 22. - 55 -
85. The failure to do so, absent any unfeseen circumstances which could possibly have
provided for a justification, constitutes a clear viol ation by the Respondent of its main obligation,
under Article 1 of the 1986 Convention.
86. The refusal letter of 6 June 2005 cannot possibly lead to annulling the earlier
commitment constituting full complia nce with the Respondent’s obliga tions. This would only be
different, if the Applicant would have agreed with that annulment, which is, however, not the case.
87. For these reasons, Djibouti is asking the Court to judge and declare that the Respondent’s
non-compliance with its obligations under the 1986 Convention with respect to the transmission of
the Borrel file is unlawful and to decide ththe French Republic shall effectively transmit the
Borrel file to the Djiboutian authorities immediately after the Court has delivered its judgment.
88. In the alternative, the Applicant would ask the Court to judge and declare that the letter
of 6 June 2005 cannot be considered to constitute a lawful refusal under Article 2 (c) in conjunction
with Article 17 of the 1986 Convention and to deci de that the French Republic shall transmit the
Borrel file to the Djibouti authorities, effectively and immediately after the Court has delivered its
judgment.
89. Thank you, Madam President, Members of the Court, for your attention. Madam
President, we would appreciate your giving the floor to Professor Condorelli.
The PRESIDENT: Thank you, Maître van den Biesen. We now call Professor Condorelli.
Vous avez la parole.
CMO.NDORE :LLI Madame le président, Messieurs les juges, vu l’heure, j’entends
présenter une première partie de ma plaidoirie avan t l’interruption et poursuivre dans l’après-midi
⎯ si vous m’y autorisez, Madame le président. Merci beaucoup.
L A VIOLATION PAR LA F RANCE DE L ’OBLIGATION DE PRÉVENIR LES ATTEINTES À LA
PERSONNE ,LA LIBERTÉ ET LA DIGNITÉ D ’UNE PERSONNE JOUISSANT D ’UNE
PROTECTION INTERNATIONALE :LES CAS DU PROCUREUR GÉNÉRAL
DE LA RÉPUBLIQUE DE DJIBOUTI ET DU CHEF DE
LA SÉCURITÉ NATIONALE
1. Introduction
1. Je reprends la parole pour une dernièrefois dans ce premier tour de plaidoiries pour
illustrer à la Cour le bien-fondé de la dernre des demandes présentées par la République de - 56 -
Djibouti dans sa requête et complétées dans son mémoire : il s’agit pour moi de démontrer que la
France a violé et viole ses obligations internationales à l’égard de Djibouti en portant atteinte aux
immunités de hauts responsables djiboutiens jouissant d’une protection internationale.
2. Les agissements de la France, dont le demandeur demande à la Cour de dire et juger qu’ils
constituent des faits internationalement illicites engageant la responsabilité internationale du
défendeur, se rapportent à une information judiciaire pour subornation de témoin ouverte auprès du
tribunal de grande instance de Paris, suite à la plainte déposée en novembre 2002, avec constitution
de partie civile, par Mme Borrel. Cette procédure a été ensuite, par décision de la cour de cassation
99
du 5 mars 2003 , dépaysée auprès du tribunal de grande instance de Versailles, où elle est
actuellement en cours 100. Dans ce cadre, deux séries de convocations à témoin assisté ont été
adressées au procureur général de la République de Djibouti et au chef de la sécurité nationale de la
République de Djibouti, respectivement le 4nove mbre2004 et le 17juin2005 pour ce qui est du
procureur de la République, et le 3 novembre 2004 et le 17 juin 2005 en ce qui concerne le chef de
101
la sécurité nationale . Plus tard, à savoir le 20octobre 2006, des mandats d’arrêt européens ont
102
été décernés à l’encontre de ces deux personnalités , suite à l’arrêt de la cour d’appel de
Versailles du 27 septembre 2006 103.
3. Avant de présenter à la Cour les argument s fondant la demande de Djibouti que je viens
d’indiquer, je me bornerai à rappeler la démons tration que je me suis permis d’offrir hier
après-midi concernant l’étendue de la compétence reconnue à la Cour. En effet, celle-ci couvre
incontestablement les questions évoquées. Je voudrais rappeler, en particulier, qu’il est vrai que les
mandats d’arrêt cités sont postérieurs à la saisine de la Cour par Djibouti ; toutefois, cela ne saurait
aucunement exclure que votre Cour soit pleine ment compétente pour constater qu’ils ont été
décernés au mépris des engagements internationaux de la France envers Djibouti. Il s’agit, en effet,
de nouvelles violations représentant la suite et la conséquence des violations précédentes, qui ne se
99
CMF, annexe VII.
100
CMF, p. 6, par. 1.10 et suiv.
101Document n 11 soumis par la République de Djibouti à la Cour le 21 novembre 2007.
102CMF, annexe VIII.
103CMF, annexe VII. - 57 -
seraient pas produites si la France s’était scrupuleusement acquittée de ses obligations
internationales auxquelles la requête se réfère.
4. Au cours de la même plaidoirie j’avais également mis en évidence l’étroite connexion,
d’une part, entre le refus par les autorités françaises d’exécuter la commission rogatoire
internationale demandée par Djibouti concernant le dossier «Borrel» et, d’autre part, l’information
ouverte auprès du tribunal de Versailles pour subor nation de témoin. Comme vous l’avez entendu
encore une fois, le refus a été motivé par le juge d’instruction du tribunal de grande instance de
Paris en charge de l’affaire Borrel, dans son Soit Transmis du 8février2005, en se référant entre
autres à la présence dans le dossier de documents relatifs justement à la procédure pour subornation
de témoin à l’encontre du procureur de la Républ ique et du chef de la sécurité nationale de
Djibouti. Il n’est donc point besoin de revenir encore sur cette question.
5. Madame le président, il va de soi que, dans la mesure où un Etat est soumis à l’obligation
de garantir l’immunité de juridiction pénale et des mesures de contrainte à des personnes jouissant
d’une protection internationale, cet Etat n’a évide mment pas le droit d’émettre des mandats d’arrêt
visant ces personnes. Autrement d it, aucun besoin de démontrer ⎯ notamment après ce que votre
Cour a relevé au para graphe 70 de l’arrêt Yerodia de2002 ( Mandat d’arrêt du 11avril2000
(République démocratique du Congo c. Belgique), arrêt, C.I.J. Recueil 2002 , p. 29, par. 70) ⎯ que
l’émission de mandats d’arrêt per se viole les immunités en question, si immunité il y a. En
revanche, des éclaircissements préliminaires s’im posent concernant les convocations à témoin
assisté. Il n’est toutefois pas nécessaire de s’a ttarder à ce sujet dans des analyses fines du droit
pénal français. Il suffit d’utiliser les informations qu’offrent les écritures du défendeur.
6. Dans son contre-mémoire la Partie française explique, à la lumière des dispositions
pertinentes du code de procédure pénale, quelle est la signification juridique d’une convocation à
104
témoin assisté : celle-ci implique, en effet, qu’il existe des indices rendant vraisemblable que la
personne devant être entendue «ait pu participer, comme auteur ou complice, à la commission des
infractions dont le juge d’instruction est saisi», c’est ce que proclame l’article113-2, alinéa2, du
code. En d’autres termes, le témoin assisté est soupçonné d’être l’auteur ou le complice d’un crime
104
CMF, p. 49, par. 4.7. - 58 -
et sa convocation prélude à son incu lpation aux fins de répression péna le. De plus, la personne en
question, outre d’être engagée dans une procédure répressive, est sujette à la contrainte par la force
publique afin d’obtenir qu’elle comparaisse devant le juge. La Cour est priée de se référer à
l’annexe 11 de la liste des documents soumis au Greffe par le demandeur le 21 décembre 2007, où
figurent les convocations à témoin assisté que j’ai déjà citées. Vous pourrez y lire l’avertissement
explicite: «Si vous ne comparaissez pas ou si vous refusez de comparaître, vous pourrez y être
contraint par la force publique en application de l’article109 du Code de procédure pénale». En
somme, il est clair: une convocation à témoin assisté ne saurait être adressée à une personne
jouissant de l’immunité de juridiction pénale et des mesures de contrainte limitant sa liberté
personnelle.
Madame le président, avec votre permission, je souhaiterais interrompre ici pour pouvoir
vous présenter en entier le corps de ma plaidoirie dans l’après-midi. Puis-je faire comme cela ?
The PRESIDENT: Yes, that has to be a matter for your own assessment ⎯ bearing in mind
the time available to you this afternoon. If that is your wish?
M. CONDORELLI : S’il vous plaît. Merci.
The PRESIDENT: The Court will certainly adhe re to your request. So, jusqu’à ce moment,
je vous remercie, Monsieur le professeur. C’est par cette plaidoirie que prend fin l’audience de ce
matin. La séance est suspendue jusqu’à 15 heures cet après-midi.
L’audience est levée à 12 h 55.
___________
Audience publique tenue le mardi 22 janvier 2008, à 10 heures, au Palais de la Paix, sous la présidence de Mme Higgins, président, en l'affaire relative à Certaines questions concernant l'entraide judiciaire en matière pénale (Djibouti c. France)