Résumés des arrêts, avis conDocument non officielces de la Cour
internationale de Justice
DEMANDE DERÉFORMATION DUJUGEMENT N" 273
DU TRIBUNALADMINISTRATIID FESNATIONS UNIES
Avis consultatifdu 20 juillet 1982
Dans son avis consultatifconcernant la demande de Exposédes faits (paragraphes 1 à 15de l'avis consul-
réformation du jugement no273 du Tribunal adminis- 1.atif)
tratif des Nations Unies, la Cour a décidé que dansle
jugement no273 le Tribunal administratif des Nations Après avoir les étapesde la procédurequi
Unies n'a pas commisd'erreur de droit concernant les déroulée devant elle(par. 1hg), cour résumeles
dispositions de la Charte des Nations Unies et n'a pas de l'espèce(par. 10à 15)dont les principaux sont
outrepassé sajuridiction ou sa compétence. les suivants:
M.Mortished, denationalitéirlandaise,entre en 1949
Laquestionposée àlaCourpar leComitédes deman- au service de l*organisation de l'aviation civile inter-
des de réformationdejugements du Tribunal adminis- nal,ionale(0~~1). est muté à l ~ ~ ~ ~ ~ i ~esi~ ~-
tratif étaitla suivant: tions Uniesà New Yorken 1958,puis en 1967 àGenève.
"Dans son jugement no273 concernant l'affaire Il prend saretraite le30avril 1980ayant atteint l'âgede
Mortished c. le Secrétairegénérad le l'Organisation 60 ans.
des Nations Unies,le Tribunal administratif des Na- prime dite ri^^ de rapatriement*'est payable
tions Uniespouvait-illégitimementdéterminerquela dalis certains cas aux fonctionnaires au moment de la
résolution341165de l'Assembléegénéraleen date du cessation de service en vertu de 9.4 du statut
17décembre1979,qui subordonnele paiement de la du personnel de 1 3 0 ~ ~et de lyannexeIV àce statut.
pime de rapatriement à la présentation de pièces Les conditions de paiement de cette prime sont fixées
attestant la réinstallation du fonctionnaire dans un le secrétaire généraldans la disposition 109.5du
paysautre quecelui de sondernier lieud'affectation, ~~~l~~~~~du personnel.
ne pouvait prendre immédiatement effet ?" Peu de tempsavant le départ à la retraite de M. Mor-
La Cour ayant interprétéla question comme l'in- tished, l'Assembléegénéraleadopta successivement
vitantà décidersi, surles points mentionnésdanscette dellx résolutions traitant notamment de la prime de
question, le Tribunal administratif "a commis une rapatriement. par sa résolution331119du 19décembre
erreur de droit concernant les dispositions de la 1978,1'~~~~~bl~ g~néraledécidace qui suit :
Charte" ou "outrepassé sa juridiction ou sa compé-
tence", la Cour s'est prononcéecomme suit : "Le paiement de la prime de rapatriement aux
1. Par 9 voix contre 6, la Cour décide de donner fonctionnaires qui peuvent y prétendre sera subor-
suite àla requête pour avis consultatif. donnée àlaprésentation, par lesintéressés,depièces
attestant leurchangement effectifderésidence, selon
2 A. Par 10voix contre 5, la Cour décideque dans les modalitésqui seront établies par la C~mmiSSi~n
lejugement no273leTribunaladministratif des Nations [de la fonction publique internationale]."
Unies n'a pas commisd'erreur de droit concernant les Mettant en vigueur à compter du lerjuillet 1979les
dispositions de la Charte des Nations Unies. modalitésprévuespar la Commission pour le paiement
2 B. Par 12voixcontre3, laCourdécidequedans le de laprime de rapatriement - paiement qui,jusque-là,
jugement no273 le Tribunal administratifdes Nations sans présentation de justificati-
Unies n'a pas outrepassé sa juridiction ou sa corn- ves -, le Secrétairegénéralmodifia la . disposition
pétence. 109.5du règlementpour subordonnerlepaiement de la
prime de rapatriement àdes pièces attestant que l'an-
cienfonctionnaire "change de résidence en s'installant
* * * dans un pays autre que celuide sondernier lieud'affec-
tation" (alinéa6)Néanmoinsl'alinéa f decette disposi-
tiori était ainsilibel:é
La Cour était composéecomme suit :M. Elias, pré- "f) Nonobstant l'alinéad ci-dessus, les fonction-
sident; M. Sette-Camara, vice-président:MM. Lachs, naires ayant pris leurs fonctions avant le lcrjuillet
Morozov, Nagendra Singh, Ruda, Mosler, Oda, Ago, 1979 conservent ie droit au montant de la prime
El-Khani, Schwebel, sir Robert Jennings, MM. de La- qui correspond aux années et aux mois de service
charrière, Mbaye, Bedjaoui, juges. ouvrant droità ladite prime déjà accomplis à cette
MM,Nagendra singh, ~~d~~ , ~~l~~et Odaontjoint date, sans avoià produire, en ce qui concerne cette
à l'avis consulttif des opinions individuelles. période de service, une pièce attestant leur chan-
MM. Lachs, Morozov, El-Khani et Schwebel ont gement de résidence."
jointà l'avis consultatif des opinions dissidentes. M.Mortishedayant accumulébienavant le juillet
1979le nombre maximum d'années deserviceouvrant
Les juges intéressés définissent et expliquent dans droità laprime (12ans), l'alinf l'aurait complètement
ces opinions la position qu'ils prennent sur divers exemptéde l'obligation de faire la preuve de sa réins-
points traités dans l'avis de la Cour. tailiition.
154 Le 17décembre1979,l'Assembléegénérale:adoptlaa demande reposait sur des bases sérieuses au double
résolution341165par laquelleelleprenait entreautres la motif que le Tribunal administratif aurait commis une
décisionsuivante : erreur de droitconcernantlesdispositions de la Charte
d'esNations Unies et que le Tribunal aurait outrepassé
"Avec effet au lerjanvier 1980,les fonctionnaires sajuridiction ou sa compétence.
n',ontdroit à aucun montant au titre de la prime de
rapatriement à moins qu'ils ne présentent despièces Compétencepour donnerunavis (paragraphes 16 à21)
attestant qu'ilsseéinstallentdans un pays autre que La Cour recherched'abord sielleacompétencepour
celui de leur dernier lieu d'affectation." donnersuite àlarequêtepour avis consultatif présentée
A la suite de cela, le: Secrétaire génér;ilpublia par le Comité.Elle rappelle qu'il s'agit de la seconde
une instruction administrative abrogeant la disposi- requêtequi lui est adressée en vertu de l'article 11,
tion 109.5,f, à partir du 1"janvier 1980,instruction paragraphes 1et 2, du statut du Tribunal administratif
suivied'une revision du rkgiement du personnel com- (la première l'ayant étéen l'affaire concernant la De-
portant la suppression de cet alinéaf. mande de réformationdujugement n"158du Tribunal
Lors de sondépart à laretraite, leSecrétariatrefusaà administratif des Nations Unies) mais que c'est la
M. naortished le versement de laprimede rapatriement première requête dece genre qui fasse suite à l'exa-
en l'absence de preuve de réinstallationet hl. Morti- nien par le Comitéd'une demande émanantd'un Etat
shed.saisit le Tribunal administratif des Nations Unies hlembre - la précédente procédure ayantétéprovo-
le 1Coictobre 1980. quée par la demanded'un fonctionnaire.Lorsqu'elle a
accepté de donner un avis en 1973dans l'affaire pré-
Le Tribunal administratif,dans son jugement no273 citée,la Cour a reconnu le devoir qui lui incomberait
du 15 mai 1981,estima notamment que le Secrétaire d'examiner lescaractéristiquesqu'aurait une demande
génkralavait "méconnu le droit acquis du requérant d'avis provoquée par l'initiative d'un Etat Membre et
résultant pour lui du réginietransitoire énoncé dans la iridiquéque la Cour devrait alors avoiràl'esprit, outre
disposition 109.5,f, en vigueur du 1"juillet iiu 31 dé- les considérationsvalables àl'égardde la procédurede
cembre 1979". Il conclut que M. Mortishedétant " en riSformationen général,les considérations addition-
droiitde recevoir cette prime dans les conditions qui nelles correspondant aux spécificitésde la situation
avaient étédéfiniesparladisposition 109.5,f, bien que crééepar l'interposition d'un Etat Membre dans le
celle:-ciaitcessé d'être evigueur àladate à laquelle le processus de réformation. La Cour considère que les
requéranta terminéses services à1'Organis;itiondes spécificitésde la procédure ayant conduit à l'actuelle
Nations Unies", ilétait doncen droitd'obtenir répara- requêtene constituent pas un motif pour modifier sa
tion dupréjudice"subi. ..dufaitdelaméconnaissance position antérieure.
de l'article 12.1du Statut du personnelet de1iidisposi- t'ouvoir discrétionnaireet opportunitépour laCourde
tion 112.2,a, du Règlemenitdu personnel" dolitletexte donner un avis (paragraphes 22 à 45)
est le suivant :
"Article 12.1- Les tiispositionsduprésent Statut La Cour examine si, bien qu'elle se considère com-
peuvent êtrecomplétéesou amendées par 1'Assem- pétente,certainsaspectsde laprocédurenedoivent pas
bléegénérale, sansprejudice des droits acquis des 1"inciterà refuser de rendre l'avis consultatif, compte
fonctionnaires." tenu des exigences de son caractère judiciaire et des
principes régissantune bonne administrationde la jus-
"Disposition 112.2 t:ice,auxquels elle doit rester fidèledans l'exercice de
"AMENDEMENTS. .. AU RBGLEMENT DU PER- sa fonction consultative aussi bien que contentieuse.
SONNEL La Courréfutetout d'abord diversesobjectionscon-
"a) Le Secrétaire geinéralpeut apporter au pré- cernant le point savoir :
sent règlementlesamendementscompatiblesavec le
St.atutdu personnel." Membre constitue une interventiond'un tiers par rap-
Le préjudiceétait kvaluépar le Tribunal au montant port au procès initial;
de laprime de rapatriemerit dont le versement avait été - Sil'effetdécisoirede l'avis rendu par laCourirait
refusé à M. Mortished. à.l'encontre de l'exercice par laCour de sa compétence
c:onsultative;
- Si un refus de la Cour de donner l'avis remettrait
e:nquestion le statut du jugement no273 du Tribunal
L,esEtats-Unis d'Amériquen'acceptèrent pas leju- axlministratif;
gement du Tribunal et saisirent alors le Comitédes
dem.andes de réformation de jugements du Tribunal - Si la demande de réformationémanantd'un Etat
adm.inistratifdes Nations Unies (ci-aprèsdériommé le Membre serait en contradiction avec certains articles
Coniitt), afin qu'ilprie la Cour de donner un avis con- clela Charte et empièteraitsurlespouvoirsconférésau
sultatif. La requête des Etats-Unis était faite en se Secrétairegénéralpar d'autres articles.
fondant sur l'article 11, paragraphe 1, du statut du En ce qui concerne la procédure qui s'est déroulée
Tribunal qui ouvre aux Etats Membres, au Secrétaire devantelle, la Courattribue une grandeimportance au
génkralou àlapersonne quia été l'objetd'unjugement point de savoir si se trouve assurée une égalité effec-
du Tribunal administratif le droit de contester cejuge- tive entre lesparties en dépit d'une inégaliapparente
ment. Si le Comitt estime que la demande repose sur ou théorique, résultantde l'Article 66 du Statut qui
des bases sérieuses, il y fait droit et saisit la Cour. Enéserve auxEtats et aux organisationsinternationales
l'occurence, aprèsavoir e:xaminéla demande au cours lafacultéde présenter desexposésécritsou oraux. Elle
de deux séancesauxquelles le conseil de M. nlortished constate à cet égard que les vues du fonctionnaireen
n'a ]pasétéautorisé àassister, le Comitédécidaque la cause lui ont ététransmises par l'intermédiaire duSe-crétaire généra l lequel n'a pas eu àen contrôler le La Cour rappelle la nature de lademande soumise au
contenu - et qu'elle a renoncé à la phase orale par Tribunal administratif, ce qu'il a décidéet les motifs
souci d'assurer une égalitéeffective. ]Ence qui con- qu'iladonnésde sadécision.Ellefaitobserverque loin
cerne la phase de la procédurede réformation qui fait dedire que larésolution341165(voirplushaut p. 155)ne
intervenir le Comité,la Cour note que ce Comité n'est pouvait prendre immédiatementeffet, le Tribunal a dit
qu'un organe de la partie qui a succombé devant le que.,précisément parce quele Secrétairegénéralavait
Tribunal, c'est-à-dire l'organisation des Nations donnéeffet immédiat à la résolutionen adoptant un
Unies. Celle-cipossèdedoncledroitdefairedéciderdu nouveau texte de Règlementoù ne figurait plus la dis-
sort qu'elle réserveàla demande de réformationéma- position109.5,f. le requérant avait subi un préjudice
nant de l'autre partie, le fonctionnaire, par la volonté - préjudicedont ildevaitobtenirréparationet quia été
d'un organe politique.C'est là une inégalitéfondamen- évalué aumontantde laprime refusée.Le Tribunal n'a
talequiconduit laCour à examineravec soinlecompor- pascherché à mettreendoute lavaliditédelarésolution
tement concret du Comité lorsqu'ila étésaisi de la 341165et deladisposition réglementairesusviséemais il
demande émanant des Etats-Unis. a tire les conséquences qui d'aprèslui s'imposaient du
fait quel'adoption deces mesures avait porté atteinàe
Evoquant la question de la composition du Tribunal ce que le Tribunal a estimé avoirétéun droit acquis,
administratif dans l'affaire dont elle est saisie,la Courprotégéà ce titre par l'arti12.1 du Statut du person-
s'interroge sur les raisonspour lesquelles,alorsqueles nel (voir plus haut p155).Si la question posée par le
trois membresréguliersétaientprésentssurlesiège,ila Coniitésuscite cette réponse, il semble qu'une autre
paru opportun de laisser siégerle suppléant,lequel a question se dissimule en quelque sorte derrière lesi-
d'ailleursjoint une opinion dissidente aujugement. Sa gnes du texte soumis à la Cour et qui est celle-c:le
participation paraît appeler des éclaircissements mais Tribunaln'a-t-il pasempêchéquedesdécisiond sel'As-
laCourconstate qu'ellen'est pas priéed'examiner sile sembléegénéraleprennentpleinement effet et commis
Tribunal a commis dans laprocédureune erreur essen- par làune erreur de droitconcernant lesdispositions de
tielle qui a provoqué un mal-jugé.La question ne lui la Charte ou outrepassé sajuridiction ou sa compé-
paraît donc pas appeler un examen plus approfondi. tence ?Telle paraît être,de I'avis de la Cour, la ques-
S'agissant des débatsdu Comité,la Cour fait encore tion qui esà la base de l'objection contre lejugement
observer qu'ils ont étémarquéspar d'importantes irré- du Tribunal et qu'il entrait dans les intentions du Co-
gularitéstémoignantdu défautde rigueur avec lequel mitéde soulever.
ont étémenésses travaux. Ces irrégularitésontcon-
cerné : Le Tribunaladministratifdes Nations Uniesa-t-ilcom-
- Sa composition à la vingtièmesession, mis idneerreurde droitconcernant lesdispositions de
la Charte ? (paragraphes 57 à 76)
- La demande soumise au Comité par les Etats- Pour répondre àcela, laCourexaminetoutd'abord le
Unis, rôle qu'elledoitjouer quand elleest appeléerendre un
avis consultatif lorsque le motif de contestation est
- Le déroulement des séances. 1'"eireur de droit concernant les dispositions de la
En dépitde ces irrégularitésetdu fait que le Comité Charte". Qu'elle n'ait pas pour mission de refaire le
n'a pas montré le souci d'égalitéqui eût convenu à procès qui s'est déroulé devantle Tribunal ni de sub-
un organisme chargé de fonctions quasijudiciaires, la stituer son opinionà celle du Tribunal sur le fond de
Cour croit devoir donner suite à la requêtepour avis l'&aire tranchée par celui-ci,cela résultede ce que la
consultatif.Certesles irrégularitésqui ont marquél'af- question sur laquelle la Cour est consultéediffèrede
faire pourraient êtreconsidéréescomme des "raisons cellesur laquelleleTribunal aétéappeléà statuer. Mais
décisives" permettant à la Cour de déclinerla requête il existe d'autres raisons. L'une d'elles est qu'il serait
mais la stabilitéet l'efficacitédes organisationsinter- forcémentdifficilede se servir de lajuridiction consul-
nationalessontd'une importance sifondamentalepour tativede laCour pourjuger une affairecontentieuse car
l'ordre mondialque la Cour ne saurait manquer d'aider iln'est pas sûrque lesexigences de l'égalitédesparties
un organe subsidiaire de l'AssembléegénéraledeN s a- seraient satisfaites si la Cour devait statuer comme
tions Unies àasseoir son fonctionnementsurdesbases juridiction d'appel et non dans le cadre consultatif. De
fermes et sûres. En outre, un tel refus laisserait sans mêmel'interposition du Comité, organe essentielle-
réponseune trèsgrave allégation dirigéecontre le Tri- ment politique, entre l'instance devant le Tribunal et
bunal administratif selon laquelle le Tribunalaurait en l'instance devant la Cour apparaîtrait inacceptable si
réalitédéfiél'autoritéde l'Assemblée générale. l'avis consultatifdevait êtreassimiàéune décisionen
appel. La difficultéest encore plusgrande si,commeen
Portéede la question posée àla Cour (paragraphes 46 l'espèce, le Comitérefuse d'admettreà ses débatsune
à 56) partieà l'instance devant le Tribunal alors que 1'Etat
demandeur est àmêmede faire valoir ses arguments.
LaCouren vient àlaquestion mêmesur laquelleillui En outre le fait que l'artic11 du statut du Tribunal
est demandéde donner un avis consultatif (voir plus administratif ouvre la procédure de réformation aux
haut p. 154)et recherche si, compte tenu de sa rédac- Etats Membres - non parties à l'instance judi-
tion,c'est une questionàlaquelleellepuisseà bon droit ciaire-, donc àdes tiers, n'est explicable que si l'on
répondre. Considérantqu'elle est mal rédigée etne admet que I'avisconsultatifdoit traiter d'une question
parait pas cadrer avec lesintentionsréelles du Comité, différente de celle dont le Tribunal s'est occupé.
laCourinterprète cette questionà lalumièredesdébats
quise sontdéroulésauseinduComitécommel'invitant Dèslors que l'on ne pouvait demander à la Cour de
à décider si,sur lespointsmentionnésdans cette ques- reconsidéreraufond I'affaireMortished c. leSecrétaire
tion, le Tribunaladministratif a "commis une erreur de généi-(1 de I'Orga~risationdes ~V(~tionUs nies. la pre-
droit concernant les dispositions de la Charte" ou mièrequestionpourlaCourest depréciserl'étenduede
"outrepassé sajuridiction ou sa compétence". l'enquêteàentreprendre pour êtreà mêmede décidersileTribunal a commisune erreur de droitconcernant les pertinentes, il est manifeste qu'il n'a pas commis une
disr)ositionsde la Charte. Il est évidentaue la Cour ne erreur de droitconcernant lesdis~ositionsdelaCharte.
sairait décidersiunjugenient interprétait leStatut etle Le Tribunal administratif des Nations Unies a-t-il
Règlementdu personnelcomporte une telle erreur sans outrepassé sajuridiction ou sa compétence ? (para-
sereporter à cejugement. Dans cette limitelaCour doit graphes 77 et 78)
donc examiner la décisiondu Tribunal au fond. Mais S'agissantdu deuxiBmemotifdecontestation, tiréde
elle n'a pasà se pencher sur le point de savoir ce que ceque leTribunalauraitoutrepassé sajuridiction ou sa
serait labonneinterprétationdu Statut et du Règlement compétence,ilsemblequ'il n'ait pasété avancécomme
du personnel au-delà de ce qui est strictemi:nt néces- entièrementdistinct deceluidel'erreur dedroitconcer-
sairepour déterminer sil'interprétationdu Tribunal est nant les dispositions de la Charte mais plutôt comme
contraire à ce que prescxivent les dispositions de la iineautrefaçon deprétendrequeleTribunalavait voulu
Charte. Il serait d'ailleurs erronéde supposerque, cha- exercer un contrôle judiciaire sur une résolution de
que fois qu'une interprétation du Statut ou du Règle- ].'Assembléegénérale, question déjà examinéeQ . uoi
ment du personneldonnéepar leTribunal serait contes- qu'il en soit, il est certain que la compétencedu Tri-
tée,il deviendrait possible de demander à 1;iCour un Iwnal, en vertu de l'article 2 de son statut, s'étendnon
avis consultatif. :seulementaux clausesdu contrat d'engagement et aux
L.aCourprocède àun examendes textes applicables
en matièrede prime de rapatriement. Les relations de conditions d'emploi de M. Mortished mais aussi à la
l'oirganisation avec son personnel sont régiesavant portée des dispositions du Statut et du Règlement du
tout par le Statut du personnel établipar l'Assemblée personnelen vigueur à la datede l'inobservation invo-
générale conformément Cl'Article 101,paragraphe 1, quée. Il n'est pas possible de soutenir que le Tribu-
delaCharte. Ce Statut es:tàsontourprécisée:tappliqué ina- qui s'est efforcéd'interpréteret d'appliquer les
au moyen du Règlement du personnel, rédigépar le 1:onditionsd'emploi de M. Mortished ainsi que les dis-
Secrétaire général qui pour cela dispose nécessaire- ]positionsapplicables du Statut du personnel, du Rè-
ment d'un certainpouvoirdiscrétionnaire. C1:rtesl'As- glementdu personneletdesrésolutionsde l'Assemblée
senibléeelle-mêmea le pouvoir de promulguer des ;générale- s'est en un point quelconqueaventuré au-
règlesdétailléescomme dans l'annexe IV LIStatut du delà des limites de sa compétencetelle qu'elle est cir-
personnel où l'on trouve le barème de la prime de lronscrite par l'article 2 de son Statut. La question de
rapatriementmais,danslesrésolutions 331119et 341165 :savoirsisadécisionest correcte ou nonest sansrapport
(voir plus haut p. 154et 155),l'Assembléegé:néraln e'a ;avecla question de la compétence.
pas fait cela :elle a posé un principe en laissant au
Secrétairegénérallesoindeluidonnereffet. :[1 n'estpas
contestable qu'en s'acquittant de cette tâche le Secré-
taire généraal représentéet engagél'organisation dans On trouvera ci-après le texte complet du dispositif.
ses relations avec le personnel.
Dispositif de l'avis consultatif
Saisi de la requête dl: M. Mortished, le Tribunal
administratifdevaittenir compte de tout 1'en.semblede La Cour*,
dis:positions statutaires ou réglementaires applicables 1. Par 9 voix contre 6,
au cas de M. Mortished (voir plus haut p. 1.54et 155).
IdeTribunal ainvoquéenoutrel'article 12.1du Statut Décidededonnersuite à larequêtepouravis consul-
du personnel où l'Assembléegénéraleavait a~ffirmé"le tatif;
pfilncipefondamental duilespectdesdroits acquis" et la POUR : M. Elias, président;M. Sette-Camara, vice-
disposition 112.2,a du rkglement du personiiel n'auto- président; MM. Nagendra Singh, Mosler, Ago,
risantque lesamendementscompatibles avec leStatut Schwebel,sirRobertJennings, MM. de Lacharrière et
du personnel (voir plus :hautp. 155).Il a donc estimé Mbaye, juges;
qui: M. Mortished avait effectivement un d:ioitacquis
au sens de l'article 12.1 duStatut et que M. Mortished CONTRE : MM. Lachs, Morozov, Ruda, Oda, El-
avait par suite subi un préjudicedu fait qu'il avaitété Khani et Bedjaoui,juges.
privéde ce droitpar lejeu de la résolution341165et des 2. Concernantlaquestion telle qu'elleest formulée
tex.tesy donnant effet. Dans son jugement le Tribunal au paragraphe 48 ci-dessus, est d'avis :
ne laisse nulle part entendre qu'il puisse y avoir con- A. Par 10voix contre 5,
tradiction entre l'article 12.1du Statut du personnelet
la disposition pertinente de la résolution341165. Quedans lejugement no273leTribunal administratif
des Nations Unies n'a pas commis d'erreur de droit
Les opinions peuvent diverger quant à ce qui cons- concernant les dispositions de la Charte des Nations
titue un droitacquiset leGouvernement des :Etats-Unis Unies;
conteste, dans son expo!jéécrit, queM. Mortished eût POUR : M. Elias, président;M. Sette-Camara, vice-
aucundroit en vertu de l'alinéaf de ladisposition 109.5 président;MM. Nagendra Singh, Ruda, Mosler, Oda,
du rBglement.Maisentrer dans l'examende cette ques- Ago, sir Robert Jennings, MM. de Lacharrière et
tion reviendrait précisénientà refaire le procèset telle Mbaye, juges;
n'est pas la tâche de laCour. Le Tribunalpour sapart a
co:ncluque M. Mortisheclavait undroit acqui:~.Ildevait CONTRE :MM. Lachs, Morozov, El-Khani, Schwe-
interpréter et faire jouer deux séries de dispositions bel et Bedjaoui, juges.
l'une et l'autre applicables la situation de l'intéressé. -
Le Tribunal n'ayant fait qu'essayer d'appliquer à son vice-préside;tM.Lachs, Morozov,NagendraSingh,Ruda,Mos-,
Ca:<les dispositions du Statut et du Règlementétablies ler, Oda.Ago, El-Khani,Schwebel,sir RobertJennings,MM.de
soils l'autorité del'Assembléegénéralequ"i1a jugées Lacharrière, baye, Bedjaoui,es. B. Par 12voix contre 3, gements du Tribunal administratif n'ont montréde fa-
Quedans lejugement no273le Tribunaladministratif çoriconvaincanteaucun motif raisonnable pour lequel
des Nations Unies n'a pas outrepassésajuridiction ou le Jugement du Tribunal administratif aurait pu être
sa compétence; coritesté;il semble en outre que la demanded'avis ait
étérédigée àpartir d'une prémisse tout à fait fausse.
POUR :M. Elias, président;M. Sette-Camara, vice- M. Oda considèrede plus que si en 1979le Règlement
président; MM.Lachs, NagendraSingh,Ruda,Mosler, du personnelavait étéreviséde manière plusprudente
Oda, Ago, sir Robert Jennings, MM. de Lacharrière, et plus aviséepour répondreauxvŒuxdes Etats Mem-
Mbaye et Bedjaoui, juges. bres des Nations Unies, on aurait pu éviterla situation
CONTRE : MM. Morozov, El-Khani et Schwebel, confuse qui s'est produite; le système de la prime de
juges. rapatriement se présenterait aujourd'hui d'une façon
totrllementdifférenteet le Tribunaladministratif aurait
Aperçu des opinionsjointes peu.t-êtrerendu un jugement différenten l'espèce.
à l'avis conslrltatif Opinions dissidentes
Opinions individuelles M. Lachs expose, dans son opinion dissidente, que
bien qu'il n'ait constaté l'existence d'aucune raison
Tout en étant essentiellement d'accord sur le dis- décisive de refuser de rendre l'avis consultatif. les
positif de la Cour en l'espèce,. Nagendra Singhfait irrégularitésde procédure commises au stade du Co-
observer dans son opinion individuelle que la Cour mit6 des demandes de réformation l'ont amenénon
aurait dû appliquer les principes d'iriterprétation et sans hésitationà voter contre le point 1du dispositif.
d'application des lois et règlements à la résolution fourniune bonne occasiond'examiner l'affaire aufond.a
341165de l'Assembléegénéraleet conclurequecelle-ci Selon lui, la Cour aurait dû approfondir la question de
ne pouvait s'appliquer rétroactivement au cas de la nature de la prime de rapatriement et des intentions
M. Mortished puisqu'il avait droit àl'intégralitéde la de l'Assembléegénérale.Au lieu de cela, elle a estimé
prime de rapatriement bien avant le Icrjanvier 1980, queses pouvoirs deréformationneluipermettaient pas
date à partir de laquelle seulement la résolution de de inettre en cause la constatation du Tribunal selon
l'Assemblée généraleentrae itn vigueur. LaCouraurait laquelle M. Mortished possédait un droit acquis qui
donc pu arriver à cette conclusion sans avoirà entrer avait CtCméconnu par ladisposition réglementaire ré-
dans laquestion des droits acquisde M. Mortisheddès sultant delarésolution341165de l'Assemblée générale.
lors que cette résolution visait de façon claire et sans Le préjudice censément attribuable à une décisionde
équivoqueuniquement l'avenir et qu'on ne pouvait la l'Assembléegénérale et l'importance insuffisanteattri-
solliciter pour qu'elle s'applique à des cas passés buéeauxeffets de résolutionsdel'Assembléegénérale
comme celui de M. Mortished. Quoi qu'il en soit, la en matièredeStatut du personnel n'en ont pas moins
résolution341165jouerait certainement dans tous les posi:laquestionessentielledesdroitsacquis etpermis à
quérirau-delàdu Icrjanvier1980,lerésultatétantquelac- laCour del'examiner. M. Lachsestimeque leTribunal
prime seraitdans detelscassubordonnée àlapreuve de a eu tort de considérer que la disposition 109.5, dis-
laréinstallationpourtoute lapériodede service, qu'elle position abrogée, inspiréecommeellel'étaitpar la ma-
ait étéaccomplie avant ou après le lerjanvier 1980. nièredont laCommission de lafonction publique inter-
nationale interprétaitsamissionet incompatibleavec la
nature de la prime de rapatriement, avait pu être à
l'origined'un droitacquisquelconque.Enrevanche,en
ce qui concerne le point 2 B de l'avis, il estime que le
M. Ruda a voté pour les paragraphes 2 A et 2 B du Tribunal a agi dans les limites de sa compétence.
dispositif de l'avis consultatif où se trouvent les dé-
cisions de la Cour sur le fond; comme en revanche ila M. Lachs conclut en développant les observations
votécontre le paragraphe 1 portant sur la question qu'il!a présentéesen 1973en ce qui concerne l'amé-
préliminairede savoir si la Cour devait ou non donner lioration de la procédure de réformation et I'établis-
suiteà larequête,ila crudevoirexpliquerlesraisons de sementd'un tribunaladministratifinternational unique.
son vote par une opinion individuelle.
Bienque M. Moslerpartage l'opinionformuléepar la M. Morozov considèreque, fauted'êtreguidépar les
Cour dansle dispositif del'avis consultatifet souscrive résolutionsde l'Assembléegénéraleet par son propre
dans une large mesure aux motifs avancés àl'appui de statut, tel que l'Assemblée générale l'a adopté, ainsi
cette opinion, ilcroitdevoirsoulever uncertain nombre que par les dispositions de la Charte qui, en dernière
de questions qui appellent à son sens un complément nal, celui-ci dans son jugement no273ne pouvait Iégi-
d'explications ou une argumentationdifférente. timement déterminerquela résolution341165du 17dé-
cembre 1979ne pouvait prendre immédiatement effet.
En réalitélejugement ne visait pas le défendeur - le
SecrCtairegénéral - mais larésolution341165de l'As-
Selon M. Oda qui a voté contrelepoint 1du disposi- sembléegénérale, dans sa lettre et dans son esprit.
tif,laCourn'aurait pas dû répondreà lademanded'avis M.Morozov pense que, en agissantcontrairement aux
consultatif en raison des irrégularités fondamentales dispositions de son statut, le Tribunal a outrepassésa
qui ont eu lieu, et notamment du fait que les délibéra- compétenceet a en fait écartéla résolution341165de
tions du Comitédes demandes de réformationde ju- l'Assembléegénérale. Sous prétexted'interpi~ételres résolutionsadoptées Il a voté contrele point 2, paragraphes A et B, pour
en 1978et 1979par 1'Asse:mblég eénéralel,e 'Tribunala Gtreconséquentet parce qu'il croit que la Cour aurait
commis une erreur de droit au sujetdesdispositions de I~Os'arrêterau premier point.
la Charte et a outrepas:;é sa juridiction oii sa com-
pétence.
M. Morozov ne sauraitappuyer l'avisconsultatif qui
énoncequeleTribunal n'apas commisd'erreur dedroit
concernant les dispostions de la Charte des Nations M.Schwebel s'est dissociédeI'avisdelaCour essen-
Unies et il ne peut donc considérer I'avis comme un .tiellementpour deux motifs. Se faisant une idéeplus
textecorrespondant àsaconception de l'administration large que la Cour de la compétence de celle-ci pour
de lajustice internationale. réexaminerau fond unjugement du Tribunal adminis-
.tratifdes Nations Unies, il soutienten particulierque,
.quanduneobjectionfondéesurl'erreur dedroitrelative
.auxdispositions de la Charte des Nations Unies est
A4. El-Khani a votécontre le point 1du diijpositifde soulevée à l'égardd'un jugement, la Cour doit statuer
l'avis consultatif parce qu'il considèr: commejuridiction d'appel et se prononcer sur lejuge-
O.)Que la Cour, dont :lerôle primordial est de con- mentaufonddans lamesure où celaest nécessairepour
nattre des affaires entre les Etats, ne devrait pas être répondre à la question qui lui est posée.
amlenée à donner des avi:squi aboutissent firialemenà Pour ce qui est du fond de la décisionrendue en
lad!étournerde sajuridic1:ionprincipale eàhiréduire à l'espèce,M. Schwebel conclut que le Tribunal a com-
êtreune Courd'appel desjugements du Tribunal admi- misune erreur de droit sur despoints de droittouchant
nistratifdesNations Unie:sopposantdesfonctionnaires aux dispositions de la Charte et qu'il a outrepassé sa
au Secrétaire général; et juridiction surtout en ce que son jugement a écartéle
b) Que les erreurs gra.vesdont la requêtee :st enta- pouvoir que l'Assembléegénérale possède sanséqui-
chee constituentdes "raisons décisives" devantinciter voque de fixeren vertu de l'Article 101,paragraphe 1,
la Cour à considérer la requête pour avisconsultatif de la Charte les conditionsd'emploi du Secrétariatde
comme irrecevable. l'ONU.
Résumé de l'avis consultatif du 20 juillet 1982