Opinion individuelle de M. le juge Bhandari

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148-20140331-JUD-01-10-EN
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OPINION INDIVIDUELLE DE M. LE JUGE BHANDARI

[Traduction]

Paragraphe 30 du règlement annexé à la convention internationale pour la

réglementation de la chasse à la baleine — Devoir incombant aux Etats parties à
la convention de coopérer avec la commission baleinière internatio▯nale et son
comité scientifique découlant logiquement des dispositions du para▯graphe 30 et des
lignes directrices qui le complètent — Nécessité d’interpréter le devoir de
coopération dans un sens large et téléologique — Respect, par le Japon, de la lettre
du paragraphe 30 et des lignes directrices n’équivalant pas au respect de l’e▯sprit de
celles-ci — Violation du paragraphe 30 du règlement qui en découle — Nature
commerciale du programme de chasse à la baleine mené au titre de J▯ARPA II —
Nature commerciale de JARPA II découlant logiquement du fait que celui-ci ne
peut être considéré comme un programme mené en vue de recherches scientifiques

au sens du paragraphe 1 de l’article VIII de la convention — Conclusion relative à
la nature commerciale de JARPA II solidement étayée — Regret que la Cour n’ait
pas qualifié JARPA II de programme de chasse à la baleine à des fins commerciales.

Introduction

1. Je souscris de manière générale aux conclusions auxquelles a abéouti
la majorité, raison pour laquelle, à une exception près, j’ai voté en faveur
de tous les points du dispositif. Toutefois, pour des motifs que je vaisé ici
développer, je ne puis faire mienne la conclusion de la majorité séelon

laquelle le Japon s’est conformé aux dispositions du paragraphe 30 du
règlement de la convention internationale pour la réglementation dée la
chasse à la baleine (dénommée ci-après la « convention»).
2. En outre, si je conviens avec la majorité que JARPA II n’est pas un

programme mené en vue de recherches scientifiques au sens du para -
graphe 1 de l’article VIII de la convention, je considère même, à l’examen
du dossier, qu’il relève d’une entreprise commerciale. Pour lesé raisons que
je voudrais ici préciser, il aurait, selon moi, été bon que la éCour en prenne

acte formellement.

I. Le paragraphe 30 du règlement annexé àé la convention

3. L’article III de la convention institue une commission baleinière
internationale (dénommée ci-après la « CBI» ou « commission») chargée,
entre autres choses, du suivi et de la réglementation des recherches ésur les

stocks de baleines et des activités de l’industrie baleinière (éarticles IV à VI
de la convention). Depuis 1950, la commission est assistée dans l’exécu -
tion de ce mandat très général par un comité scientifique (éarrêt, par. 47).

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4. En vertu du paragraphe 30 du règlement annexé à la convention, le
comité scientifique est essentiellement chargé d’examiner et deé commenter

les permis spéciaux délivrés conformément au paragraphe 1 de l’ar -
ticle VIII de la convention. Le paragraphe 30 se lit comme suit :

«Il appartient à tout gouvernement contractant de fournir au
secrétaire de la commission baleinière internationale ses propositéions
de permis scientifiques avant leur délivrance et dans un délai suffiésant
pour permettre au comité scientifique de les examiner et de formuler é
un avis à ce sujet. Les propositions de permis doivent préciser :

a) les objectifs de la recherche ;
b) le nombre, le sexe, la taille et la population des animaux à capture;ré
c) les possibilités de participation aux recherches de scientifiques proé-

venant d’autres pays ; et
d) les effets potentiels de cette chasse sur la conservation de la popu -
lation concernée.
Les propositions de permis font l’objet d’un examen et de com -

mentaires du comité scientifique lors des réunions annuelles dans éla
mesure du possible … Les résultats préliminaires de toute recherche
issue des permis sont présentés lors de la réunion annuelle suiévante
du comité scientifique. »

5. D’après le paragraphe 1 de l’article premier, le règlement fait partie
intégrante de la convention. Le paragraphe 30, qui a force obligatoire, est
donc la principale disposition juridique régissant le respect de la pérocédure

applicable à l’examen des permis spéciaux. Toutefois, ce régéime quelque
peu sommaire a été considérablement étoffé dans un docuément communé -
ment appelé l’«annexe P», qui renferme une série de «lignes directrices» de
nature procédurale endossées par la commission (arrêt, par.47) en applica-
tion du pouvoir que lui confère l’article VI de la convention de formuler des

recommandations «à propos de questions ayant trait soit aux baleines et à
la chasse à la baleine, soit aux objectifs et aux buts de» cet instrument. Bien
qu’elle n’ait, techniquement, que valeur d’incitation, l’annéexe P, en tant
qu’elle a été adoptée par consensus, fournit d’importanteés indications sur
les protocoles à suivre s’agissant pour un Etat partie à la conévention de

soumettre, et pour le comité scientifique d’examiner, les propositéions de
permis scientifiques relevant du paragraphe 1 de l’article VIII.
6. La majorité a estimé que JARPA II satisfaisait aux conditions qu’im-
pose le paragraphe 30 en matière de calendrier, dès lors que « le Japon a
soumis le plan de recherche de JARPA II à l’examen du comité scientifique

avant de délivrer le premier permis au titre de ce programme», et parce que
les Parties ne contestent pas que les permis délivrés par la suiteé dans le cadre
de JARPA II sur la base de ce plan de recherche initial ont été portés
«immédiatement à la connaissance de la commission» (ibid., par. 238). En
ce qui concerne les conditions substantielles imposées par le paragraéphe 30

(alinéasa) à d)), la majorité estime que les informations requises ont été
« fourni[es] » (ibid., par. 239) dans le plan de recherche.

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7. Je regrette de devoir me désolidariser de la majorité sur ce pointé.
Tout au plus pourrais-je conclure d’après les informations fournies par le

Japon, sur lesquelles s’est fondée la majorité, que les disposiétions du para -
graphe 30 ont été formellement respectées. Toutefois, compte tenu de
l’élargissement considérable de ce régime en vertu de l’annexe P, j’estime
que, sur le fond, le respect de ces dispositions couvre implicitement le
devoir du Japon de coopérer avec la commission et le comité scientéifique

en fournissant des informations rendant compte de l’évolution de
JARPA II. Au demeurant, les deux Parties et l’Etat intervenant ont
reconnu que le paragraphe 30 et l’annexe P prévoyaient un tel devoir, que
la Cour, dans l’arrêt, a de surcroît érigé en principe d’éinterprétation
incontournable (par. 240). Compte tenu du consensus général sur ce
point, je ne puis faire mienne la conclusion de la majorité selon laqéuelle le

respect de pure forme, par le Japon, de la seule lettre du paragraphe 30
satisferait à un devoir de coopérer qui, manifestement, doit êtére interprété
dans un sens plus vaste, en fonction de son objet.
8. L’analyse du chapeau de cette disposition et d’au moins trois de
ses quatre alinéas de nature substantielle montre bien en quoi le Japon

ne se conforme nullement au devoir de coopération que lui impose le
paragraphe 30. J’examinerai à tour de rôle chacun des manquements
constatés.

1. Le chapeau du paragraphe 30 du règlement

9. Le chapeau du paragraphe 30 dispose qu’«[i]l appartient au gouver -
nement contractant de fournir au secrétaire de la commission baleinièére
internationale ses propositions de permis scientifiques avant leur dééli -
vrance et dans un délai suffisant pour permettre au comité scientifique d▯e les
examiner et de formuler un avis à ce sujet » (les italiques sont de moi).

Certes, les Parties n’ont pas contesté que le Japon ait soumis le éplan de
recherche de JARPA II en mars 2005 et que ce plan ait été examiné par le
comité scientifique avant le lancement du programme en novembre 2005,
ni que les permis spéciaux délivrés chaque année dans le cadre de JARPA II
aient été immédiatement portés à la connaissance du comitéé scientifique
tout au long du déroulement de ce programme (arrêt, par. 109 et 238).

Toutefois, il convient de rappeler que soixante-trois membres du comitéé
scientifique ont décidé de ne pas participer à l’examen du pélan de recherche
de JARPA II en 2005, arguant que le comité ne pouvait examiner le nou -
veau projet sans avoir, au préalable, mené à bien l’évaluéation finale
de JARPA (ibid., par. 241). Or, alors que JARPA II a été lancé par le

Japon au mois de novembre 2005, ce n’est qu’en décembre 2006 que le
comité a réalisé cette évaluation finale (ibid., par. 105).
10. A mes yeux, le Japon aurait démontré un réel esprit de coopéération
en acceptant de participer à un dialogue digne de ce nom avec le comiété
sur les réalisations scientifiques de JARPA, dans l’idée de reviser au

besoin JARPA II avant son lancement. Or, ressort-il du dossier, il s’est au
contraire précipité — je ne vois pas d’autre terme — pour renouveler ce

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8 CIJ1062.indb 565 18/05/15 09:29 chasse à la baleine déansl’antarctique (op. indé. bhandari) 441

qui n’était de fait qu’une réplique de son précédent pérogramme de chasse
«scientifique» — à cela près que, cette fois, son mandat était illimité
— bien avant que toute évaluation critique de ce programme n’eût pu
avoir lieu. Pour ces raisons, j’estime que le devoir de coopération que pré-

voit implicitement le chapeau du paragraphe 30 a été violé par le Japon.

2. Alinéas a) et b) du paragraphe 30 du règlement

11. A l’examen du dossier, j’ai acquis la ferme conviction, en ne fouré -

nissant pas en temps voulu des informations exactes sur les objectifs deé la
recherche qu’il prétendait réaliser (alinéa a)), non plus que d’éléments
quantitatifs et qualitatifs sur les baleines qu’il s’agissait de tuer en vertu
de permis délivrés dans le cadre de JARPA II (alinéa b)), que le Japon

avait manqué à son devoir de coopérer avec la CBI et son comitéé scienti -
fique conformément au paragraphe 30. A cet égard, il convient de rappe -
ler que le plan de recherche de JARPA II, en vertu duquel le Japon n’a
cessé, depuis sa promulgation en 2005, de délivrer des permis spéciaux
tout le temps qu’a duré la procédure en l’espèce, n’a éjamais été modifié

(arrêt, par. 209). De même le contenu descriptif des permis délivrés
chaque année par le Japon au titre de ce programme est-il resté inchangé
(ibid.), et ce, en dépit d’un nombre de prises effectives, depuis le laénce -
ment de JARPA II, très en deçà des objectifs initialement annoncés.

12. Le plan de recherche de JARPA II, dans le cadre d’un programme 1
notamment censé assurer un « suivi de l’écosystème de l’Antarctique » et
établir une « modélisation de la concurrence entre espèces de baleines » ,
prévoyait en effet des prises annuelles chiffrées à 850 pour les petits ror -

quals (plus ou moins 10 %), 50 pour les rorquals communs et 50 pour les
baleines à bosse. Or, de fait, pas une seule baleine à bosse n’a été mise à
mort pendant la totalité du déroulement du programme (arrêt, par. 201).
Quant aux rorquals communs, il n’en a, en tout et pour tout, été prélevé
que 18 spécimens au cours des sept premières saisons du programme,

après quoi les prises ont varié de zéro à trois par an (ibid.). En outre, si
le Japon a prélevé, dans le cadre de JARPA II, 853 petits rorquals au
cours de la première saison pélagique 2005-2006, conformément aux
objectifs annoncés, ces chiffres ont récemment accusé une baiésse brutale.

A l’heure de la clôture de la procédure en l’affaire, le néombre moyen de
petits rorquals tués chaque année dans le cadre de JARPA II aura oscillé
autour de 450 (soit à peine la moitié des objectifs de capture éétablis au
titre du plan de recherche initial, resté inchangé), chiffre quéi a encore

chuté au cours des dernières années du programme (170 petits rorquals
ayant été tués au cours de la saison 2010-2011 et 103 au cours de la sai -
son 2012-2013) (ibid., par. 202).
13. Selon moi, les objectifs ambitieux annoncés dans le cadre de
JARPA II n’ayant, à plusieurs reprises, pas été atteints, il y avaéit lieu de ne

1 Mémoire de l’Australie, vol. III, annexe 105, p. 160.
2 Ibid., p. 161.

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pas se contenter d’une simple répétition mécanique, d’uneé année sur
l’autre, des projections en matière de prises contenues dans le pléan de
recherche initial de 2005, devenues entre-temps clairement obsolètes. Je
considère donc que le devoir de coopération qu’impliquent les aélinéas a)

et b) du paragraphe 30 et l’annexe P imposait à tout le moins au Japon de
soumettre un plan de recherche de JARPA II et/ou des permis spéciaux
annuels revisés présentant un semblant de rapport avec la réaliété de la mise
en œuvre du programme. En ne présentant de revision ni de l’un éni des

autres, le Japon a donc commis une violation substantielle de ce devoir.é

3. Alinéa c) du paragraphe 30 du règlement

14. L’alinéa c) du paragraphe 30 du règlement indique que les propositions

de permis scientifiques délivrés au titre du paragraphe 1 de l’article VIII de la
convention doivent préciser les possibilités de participation aux érecherches de
scientifiques d’autres pays qu’offre le programme en question. La majorité
reconnaît que, dans la présente instance, le Japon n’a fourni aéucune preuve
de coopération avec des scientifiques d’autres pays dans le cadre éde JARPA II

(arrêt, par. 222), mais se garde pour autant de conclure que le Japon a manqué
aux obligations que lui impose le paragraphe 30. Elle se contente de lui adres -
ser cette admonestation: «[I]l était permis d’escompter que le Japon fournirait
davantage d’exemples de coopération entre ce programme et d’autéres orga -

nismes de recherche … internationaux» . (Ibid.)
15. A la différence de mes collègues de la majorité, j’estime éque cette
absence flagrante d’évaluation par des scientifiques d’autres pays met
sérieusement à mal la conclusion selon laquelle le Japon a honoréé le

devoir de coopération lui incombant en vertu de l’alinéa c) du para -
graphe 30 du règlement. A cet égard, je fais mien l’avis exprimé paér le
témoin-expert de l’Australie, le professeur Mangel, d’après lequel « un
avis scientifique peut être faux, mais un scientifique rigoureux réépondra
aux critiques valides, et c’est ainsi que la science progresse » 3. J’estime en

outre que cette observation de l’Australie résume bien la situatioén:

«[E]n matière de recherche scientifique, l’examen par les pairs
conduit … à un processus continu de revision et de modification des
recherches en tant que de besoin. Or rien n’indique que le Japon ait
adopté une telle démarche. Ce dernier a lancé le programme JARPA II
sans réel examen par les pairs, et continue à le mettre en œuvrée sans

rectification notable, en dépit des vives critiques constamment éméises
par des membres de la communauté scientifique, qui affirment que ses
objectifs et ses méthodes sont inappropriés et probablement vouéés à
l’échec. Il n’est donc pas étonnant que, tout comme son préédécesseur,

le programme JARPA II ait produit extrêmement pe4 de résultats
ayant fait l’objet d’un examen par les pairs.»

3Mémoire de l’Australie, vol. 1, par. 5.83, et note 687.
4Ibid., par. 5.83 ; les italiques sont de moi.

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16. A mon humble avis, la majorité aurait dû conclure que l’absenceé de
réelle collaboration avec des scientifiques d’autres nations dans éle cadre

de JARPA II constitue un manquement à l’obligation générale de coopéé-
rer prévue à l’alinéa c) du paragraphe 30, telle qu’interprétée en fonction
de son objet.

4. Conclusion relative à la violation, par le Japon,
du paragraphe 30 du règlement

17. Pour résumer, je considère qu’il découle des éléments ésuivants que
le Japon n’a pas respecté le devoir lui incombant en vertu du paraé -
graphe 30 et de l’annexe P de coopérer avec la commission et le comité
scientifique :

i) JARPA II a été lancé avant que JARPA n’eût fait l’objet d’une éva -
luation.
ii) En dépit du fait que la quantité et la nature des données recueéillies

tout au long du déroulement de JARPA II diffèrent à d’importants
égards de ce qui avait été initialement prévu et décrit déans le plan de
recherche, le Japon n’a jamais soumis de plan revisé, ni modifiéé ses
permis spéciaux pour refléter lesdits changements.
iii) Alors que le plan de recherche de JARPA II était notamment censé

permettre d’aboutir à une « modélisation de l’écosystème de l’Antarc -
tique» et à une étude de la concurrence entre espèces, aucune baléeine
à bosse n’a été prélevée pendant tout le temps qu’aé duré ce programme,
et un nombre infime de rorquals communs a été mis à mort. Dans le
cadre de JARPA II, seuls ont donc été prélevés en quantités significa -

tives les petits rorquals ; or, le Japon n’a jamais expliqué de manière
convaincante comment son étude de l’écosystème de l’Antaréctique
couvrant diverses espèces pouvait se justifier dans ces circonstancesé,
pas davantage qu’il n’a adapté les objectifs de son programme péour
tenir compte de l’évaluation de ce contexte.
iv) Le Japon n’a fourni aucun exemple de coopération scientifique inter -

nationale réalisée dans le cadre de JARPA II.
18. Comme l’affirme la majorité, le paragraphe 30 du règlement de la

convention impose un devoir de coopération à tous les Etats soumetétant
des permis au comité scientifique afin que celui-ci puisse s’assurer de leur
conformité aux dispositions du paragraphe 1 de l’article VIII. Or, pour
les raisons que j’ai mentionnées ci-dessus, je ne puis faire mienne la
conclusion de la majorité selon laquelle, en respectant la lettre du para -

graphe 30, le Japon aurait dûment respecté l’esprit de celui-ci. Le devoir
de coopération étant, à mes yeux, une obligation de vaste portéée, devant
être compris dans une optique téléologique, qui implique un diaélogue per -
manent avec le comité scientifique, j’estime que le Japon a manquéé d’ho-
norer le devoir de coopérer que lui imposaient le chapeau et les alinééas a)

à c) du paragraphe 30, tel que précisé par les lignes directrices promul -
guées à l’annexe P.

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19. Je me vois donc dans l’obligation de me dissocier de la conclusion
à laquelle la majorité a abouti au point 6 du paragraphe 247 de l’arrêt.

II. JARPA II en tant que programmeé de chasse
à la baleine de naturée commerciale

20. Si je suis en désaccord sur le point que je viens d’exposer, je soéus -
cris à toutes les autres conclusions de la majorité telles qu’éénoncées dans
le dispositif. Plus précisément, je suis d’accord pour affirmeér qu’il ressort
du dossier que JARPA II n’est pas un programme mené en vue de
recherches scientifiques au sens du paragraphe 1 de l’article VIII de la
convention et que, en conséquence, le recours, dans ce cadre, à deés

méthodes létales emporte violation des obligations juridiques inteérnatio -
nales que le Japon tient des paragraphes 7 b) (création du « sanctuaire de
l’océan Austral »), 10 d) (« moratoire sur les usines flottantes ») et 10 e)
(«moratoire sur la chasse commerciale ») du règlement annexé à la
convention.

21. Néanmoins, selon moi, il ressort amplement du dossier non seule -
ment que JARPA II n’est pas un programme mené en vue de recherches
scientifiques, mais qu’il s’agit même en réalité d’un éprogramme de chasse
à visées commerciales. Si je ne puis ici développer l’ensemble des motifs
qui me conduisent à cette conclusion, je voudrais insister sur quatreé grands

points que j’ai pris en ligne de compte : a) la nécessité logique de qualifier
JARPA II de programme mené à des fins commerciales dès lors qu’il éne
peut être considéré comme un programme mené en vue de recheréches
scientifiques ; b) le contexte historique dans lequel JARPA et JARPA II
ont vu le jour et ont été mis en œuvre ; c) le caractère illimité dans le
temps de JARPA II ; d) les éléments de preuve ne laissant aucun doute

sur le fait que le nombre de petits rorquals prélevés dans le cadrée de
JARPA II est déterminé par le marché, et les efforts déployésé par le Gou -
vernement japonais pour stimuler le marché national de viande de petits
rorquals sous le couvert de ce programme.

1. La convention ne prévoit que trois catégories de chasse, qui s’excluent
mutuellement

22. A titre liminaire, je considère que la convention, dûment interpré -
tée, ne permet d’envisager que trois types de finalités motivant la pratique
de la chasse, lesquelles s’excluent les unes les autres : i) recherche scienti-

fique; ii) considérations commerciales; iii) subsistance aborigène. Or, il est
admis qu’il n’est pas question, en l’espèce, de chasse aboriégène de subsis -
tance. De ce que la Cour conclut que JARPA II n’est pas un programme
mené en vue de recherches scientifiques, il découle donc nécesséairement
qu’il s’agit d’un programme de chasse à des fins commercialeés.

23. L’approche déductive que j’ai adoptée ci-dessus n’est que le pre -
mier des éléments étayant ma conclusion sur la nature commerciale de

222

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JARPA II. Comme je vais à présent l’expliquer, ma conviction est encoére
renforcée par les nombreuses inférences qui peuvent être induitées du dos-

sier présenté en l’espèce. Aux fins de la présente opinioén, j’estime pouvoir
me contenter à cet égard de revenir sur trois des aspects les plusé détermi -
nants, mais en aucun cas ils n’ont été les seuls à nourrir méa réflexion.

2. Contexte historique dans le cadre duquel se sont inscrits JARPA
et JARPA II

24. Je commencerai par me pencher sur le contexte historique dans le

cadre duquel le premier programme JARPA a été adopté et mis en œuvre.
Ce faisant, j’ai parfaitement conscience que ce n’est pas la licééité de ce
programme en soi qui est à l’examen devant la Cour. Cela dit, je péense

que l’on peut inférer des nombreux éléments de preuve verséés au dossier
que JARPA II constitue essentiellement et à toutes fins une extension
de facto de JARPA. Compte tenu notamment de ce lien de filiation entre
les deux programmes, ainsi que de leurs nombreux points communs, il

me semble opportun d’analyser dans sa globalité l’ensemble du réégime
de « chasse scientifique » pratiqué par le Japon au cours des dernières
décennies.
25. Il ressort du dossier que, au fil des années, le Gouvernement du

Japon a maintes fois manifesté son opposition acharnée à l’aédoption et au
maintien d’un moratoire complet sur la chasse commerciale. Pour com -
mencer, je rappellerai que le Japon était l’un des pays (sur un téotal de sept

seulement) qui vota, sans succès, contre l’instauration du moratoéire, à la 5
trente-quatrième réunion annuelle de la CBI, du 23 juillet 1982 . Il fut
également l’un de ceux — sur quatre pays seulement cette fois — qui
devait par la suite formuler une objection formelle à la modification du
6
règlement instituant le moratoire. Il le fit le 4 novembre 1982 , de sorte
que le moratoire ne lui était pas applicable au moment où il prit éplein
effet, en 1986 7. J’ajouterai que la Cour a reçu de nombreux éléments de

preuve, sous forme de statistiques ou de déclarations politiques de réepré -
sentants du Gouvernement japonais, tendant résolument à indiquer qéue
l’opposition du Japon à l’instauration du moratoire était motivée par la
conviction qu’il lui fallait activement protéger les liens essentiéels de

natures socio-économique, culturelle et historique entre la sociétéé japo -
naise et une industrie baleinière dont l’ancrage dans le tissu social remon -
tait à des siècles .
26. Cette position transparaissait dans la notification formelle que fit le é

Japon de son objection au moratoire, dans laquelle il soulignait expresséé -
ment «le rôle important des produits baleiniers et de l’industrie baleinéière

5 Mémoire de l’Australie, vol. I, par. 2.57, et note 82 ; par. 3.6. Lors de la réunion, l’on

dén6mbra vingt-cinq votes en faveur du moratoire, sept contre et cinq abstentions.
Ibid., par. 2.60, et notes 84-87 ; par. 3.8. Outre le Japon, les pays qui émirent des
obj7ctions étaient le Pérou, la Norvège et l’Union des réépubliques socialistes soviétiques.
8 Ibid., par. 2.57-2.60.
Ibid., par. 3.5-3.8.

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s’agissant de l’alimentation traditionnelle japonaise et des condiétions
socio-économiques de certaines communautés locales au Japon » . On la 9
trouve développée dans la déclaration suivante que le Premier méinistre

japonais fit devant l’organe législatif national du Japon quelquesé mois
seulement avant la formulation de cette objection :

«Au Japon, l’industrie baleinière est une tradition ancestrale, et la
viande de baleine occupe une place importante dans le régime alimen -
taire japonais… [N]ous avons récemment pu voir le mouvement
d’opposition à la chasse à la baleine que mènent certaines oérganisa -

tions de protection de l’environnement et d’autres groupes pren[drée]
de plus en plus d’ampleur au niveau international… [Les pays hos -
tiles à la chasse] tentent de faire jouer leur nombre afin de mener la
CBI sur la voie de l’interdiction de la chasse à la baleine. Cetteé situa -

tion est vraiment regrettable… Le Gouvernement japonais entend
encore redoubler d’efforts afin d’assurer à l’avenir la protection et la
croissance de l’industrie baleinière. » 10

Ce thème réapparaît dans cette autre déclaration devant la Diète faite,
quelques jours seulement après l’adoption du moratoire sur la chasse

commerciale, par le ministre japonais de l’agriculture, des forêtsé et des
pêches :

«Pour le Premier ministre, c’est justement en raison de la gravité é
des problèmes qui se posent à l’industrie baleinière au Japo▯n et du
nombre de personnes dépendant essentiellement de cette industrie pour▯
leur subsistance que nous devons poursuivre nos efforts pour créer un▯

cadre propice à la poursuite de nos activités de chasse à la baleine. Le
Premier ministre … a estimé que nous devions nous employer davan -
tage à chercher une solution… Pour ma part aussi, étant donné que la
chasse à la baleine est le seul secteur de l’industrie de la pêéche dans

lequel certaines personnes peuvent trouver un emploi …, j’entends
redoubler d’efforts pour trouver une solution au problème de l’industrie
baleinière et répondre aux attentes qui ont été placées e▯n moi. » 11

Un an après l’adoption du moratoire, cette position demeurait inchéangée.
Voici ce que dit devant la Diète le directeur général de l’aégence japonaise
des pêcheries :

«[L]’année dernière, lors de sa réunion annuelle, la CBI a décidé

d’instaurer une interdiction totale de la chasse à la baleine àé des fins
commerciales, assortie d’une période de grâce de trois ans. Le Japon
a formulé une objection contre cette décision… Notre position gééné -
rale est que ce moratoire ne repose sur aucun fondement scienti -

fique… En outre, si cette décision devait sonner le glas de l’industrie

9 Mémoire de l’Australie, vol. II, annexe 53, p. 186.
10 Ibid., vol. III, annexe 88, p. 69 et 70 ; les italiques sont de moi.
11 Ibid., annexe 89, p. 74 ; les italiques sont de moi.

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baleinière au Japon, considérant le nombre de personnes directemen▯t

employées par l’industrie baleinière et celles qui travaillent ▯dans les
secteurs connexes, nous continuerions de dénoncer le caractère irr▯a -
tionnel des motifs ayant présidé à l’adoption du moratoire… [L]e
Gouvernement ne ménagera aucun effort pour obtenir le soutien des

pays concernés, afin d’assurer le maintien de nos activités de chasse à
la baleine sous une forme ou sous une autre. » 12

27. Cette farouche résolution du Gouvernement japonais « à ne ména-
ger aucun effort » trouve son expression dans un rapport du groupe

d’étude sur les questions relatives à la chasse à la baleine publié par le
ministère japonais de l’agriculture, des forêts et des pêcheés en 1984, qui
concluait que «[l]a poursuite de la chasse à la baleine dev[ait], à juste titre, é
être acceptée » 1. Lors de débats devant la Diète qui eurent lieu au

moment de la publication de ce rapport, plusieurs hauts responsables
japonais déclarèrent se rallier à la recommandation qui s’y étrouvait for -
mulée, visant à poursuivre, autant que faire se pouvait, le prograémme de

chasse à la baleine du Japon. Ainsi, le responsable du départementé des
pêcheries maritimes de l’agence japonaise des pêcheries fit la déclaration
suivante :

«L’agence des pêcheries considère que ce rapport nous a fourni dée
précieuses recommandations en termes de solutions futures susceptibleés

d’être mises en œuvre dans le cadre de cet environnement internéational
particulièrement difficile. Nous avons l’intention d’utiliser ce rapport
comme document de référence et de faire tout notre possible … pour

garantir la poursuite de nos activités de chasse à la baleine sous▯ une
forme ou sous une autre, tant dans l’Antarctique que dans les zones
côtières. »14

Le même jour, le responsable du département des pêcheries maritéimes de
l’agence japonaise des pêcheries s’adressa de nouveau aux législateurs en

ces termes : « Nous avons l’intention … de faire tout notre possible …
pour garantir la poursuite de nos activités de chasse à la baleineé sous une
forme ou sous une autre. » 15Le lendemain, le directeur général de l’agence
expliqua que,

«une fois le moratoire instauré, la voie permettant de garantir la pour -

suite de la chasse serait, dans l’océan Austral, de la présenter comme
une activité axée sur la recherche scientifique, et, en ce qui concerne la
chasse côtière, de la présenter comme une pratique absolument essen -

tielle pour répondre aux besoins de subsistance de communauté16ré▯gio -
nales d’un point de vue social, économique et culturel » .

12 Mémoire de l’Australie, vol. III, annexe 90, p. 77 ; les italiques sont de moi.
13 Ibid., annexe 98, p. 111.
14 Ibid., annexe 91, p. 82 ; les italiques sont de moi.
15
16 Ibid., p. 83 ; les italiques sont de moi.
Ibid., annexe 92, p. 88 ; les italiques sont de moi.

225

8 CIJ1062.indb 579 18/05/15 09:29 chasse à la baleine déansl’antarctique (op. indé. bhandari) 448

Afin de ne laisser aucun doute quant à la communauté des intentions de
l’administration japonaise, ajoutons que cette position fut encore rééaffir-

mée par le ministre japonais de l’agriculture, des forêts et deés pêches, qui
prit la parole pour s’engager personnellement en ce sens, dans les teérmes
suivants : «J’ai l’intention de faire tout ce qui est en mon pouvoir pour

garantir la poursuite 17 nos activités de chasse à la baleine sous▯ une forme
ou sous une autre. »
28. Pour finir, il me faut souligner que les citations qui précèdent née
sont que des exemples parmi les nombreux autres dont fourmille le dos -

sier, témoignant de l’hostilité politique du Japon envers le moératoire sur
la chasse commerciale et de sa détermination à le contourner en coénsé -
quence pour assurer la poursuite des activités de son industrie baleiénière
«sous une forme ou sous une autre ».

29. L’examen de faits ultérieurs ne fait que renforcer cette conclusioén.
Si, le 1er juillet 1986, le Gouvernement japonais a fini par accepter le
retrait progressif de son objection au moratoire avant le 1 eravril 1988 18,

nombreux sont les éléments de preuve permettant d’établir quée le Japon
n’a pris cette décision qu’à contrecœur, en raison de la épression inter-
nationale constante dont il faisait, en particulier, l’objet de la part des
Etats-Unis 19, partenaire commercial privilégié, et qui revêtait notam -

ment la forme de très lourdes sanctions économiques. A l’heure édu lance-
ment, à point nommé, du premier programme JARPA après la saison de
chasse 1986-1987, au moment même où le moratoire entrait en vigueur
pour le Japon (arrêt, par. 100), le secrétaire général de l’association japo -
er
naise de chasse à la baleine tint dans un entretien accordé le 1 juin 1986,
et versé au dossier, des propos peu équivoques :

«La décision du Japon de renoncer à la chasse à la baleine est
intervenue après la décision, prise à la réunion annuelle deé la CBI
tenue en 1982, de recourir au moratoire sur la chasse à la baleine

commerciale, et les pressions qui ont ensuite été exercées par éles
Etats-Unis… Mais la chasse à la baleine pratiquée par le Japon est
une industrie qui a une longue histoire et une longue tradition, et la

viande de baleine fait partie intégrante de notre régime alimentai▯re.
Quand je pense aux 50 000 personnes qui sont affectées, à tous ceux
qui travaillent dans le secteur baleinier et à leurs familles, il est tout à
fait naturel, en tant qu’acteur de cette industrie, que je cherche des
20
solutions pour qu’elle puisse se maintenir. »

De même, dans un entretien réalisé en 1997, l’ancien directeur général de
l’agence japonaise des pêcheries, qui était chargé de négociations interna -
tionales déterminantes concernant la mise en œuvre de la chasse scéienti -
fique, fit remarquer que « [l]a mise en œuvre d’opérations de chasse à la

17
18Mémoire de l’Australie, vol. III, annexe 92, p. 89 ; les italiques sont de moi.
19Ibid., vol. I, par. 2.63.
20Ibid., par. 3.9-3.12 ; vol. III, annexe 89, p. 73 ;annexe 95, p. 99-100.
Ibid., annexe 125, p. 306 ; les italiques sont de moi.

226

8 CIJ1062.indb 581 18/05/15 09:29 chasse à la baleine déansl’antarctique (op. indé. bhandari) 449

baleine à des fins scientifiques était considérée comme le s▯eul moyen de per -
pétuer [les] traditions [en matière de chasse à la baleine], avant d’ajouter

que,

«quelles que [fussent] les raisons pour lesquelles la chasse à la baleéine
[qui avait été] pratiquée [par le passé] par le Japon méréit[ait] d’être
critiquée, les [baleiniers] ne p[ouvaient] en être tenus responsabéles. Je
v[oulais] préserver, d’une manière ou d’une autre, les emplo▯is de ce

secteur, auquel certains ont consacré leur vie, dans le cadre d’op▯éra -
tions de chasse scientifique. » 21

Plus récemment, s’adressant à une sous-commission de la chambre des
représentants, le directeur général de l’agence japonaise deés pêcheries rap -
portait que « la chair de petit rorqual était appréciée pour sa saveur et son▯

arôme, notamment lorsqu’elle [était] consommée en sashimi et▯ sous d’autres
formes similaires », et que «le programme de chasse à la baleine en vue de
recherches scientifiques mené dans l’océan Austral était né▯cessaire pour
22
assurer la stabilité de l’offre de chair de petit rorqual » .
30. Lorsque l’on examine ces multiples déclarations intervenues alors,é
ou depuis, à la lumière des autres éléments de preuve verséés au dossier, et
de l’analyse détaillée à l’issue de laquelle la Cour éétablit les manquements

interdisant de considérer JARPA II comme un programme dûment conçu
et mis en œuvre en vue de recherches scientifiques, ainsi que des staétis -
tiques montrant que la majorité des baleines tuées au titre d’uén permis
spécial par le Japon l’ont été depuis l’instauration du méoratoire, et jusqu’à
23
la saison de chasse 2010-2011 , la conclusion selon laquelle JARPA II est
un programme de chasse commerciale s’impose sans l’ombre d’un déoute.

3. Caractère illimité dans le temps de JARPA II

31. La majorité ne fait qu’une brève mention de l’absence de limite
dans le temps de JARPA II, assortie de ce commentaire : « dans le cas

d’un programme poursuivant un objectif de recherche scientifique, un é
«calendrier comprenant des objectifs intermédiaires », tel que prévu à
l’annexe P, aurait été plus approprié » (arrêt, par. 216). De même que
pour l’absence de contrôle international par des pairs évoquéée dans le

cadre de l’examen du paragraphe 30 auquel je me suis livré, j’estime que,
dans son analyse de la nature de JARPA II, la Cour aurait dû s’exprimer
en des termes plus fermes sur l’impossibilité de considérer un éprogramme
illimité dans le temps comme réellement établi à des fins de recherche

scientifique. Sur ce point, et compte tenu de l’intention — amplement
démontrée — qui était celle du Japon de poursuivre des activités de chassée

21 Mémoire de l’Australie, vol. II, annexe 75, p. 346-347 (citations omises) ; les italiques

son22de moi.
CR 2013/11, p. 18, par. 60 (Crawford) (28 juin 2013), renvoyant au dosoier de plai -
doiries de l’Australie, premier tour de plaidories, 26-28 juin 2013, vol. II, onglet n 108 ; les
ita23ques sont de moi.
Mémoire de l’Australie, vol. I, par. 2.69, et note 99 ; fig. 1, p. 37.

227

8 CIJ1062.indb 583 18/05/15 09:29 chasse à la baleine déansl’antarctique (op. indé. bhandari) 450

«sous une forme ou sous une autre » nonobstant le moratoire, je pense
que l’Australie était parfaitement fondée à déduire de l’éabsence de limite
dans le temps de JARPA II que « la conception de ce programme
répond[ait] à la volonté de perpétuer, par quelque moyen que ce soit, la

chasse à la baleine jusqu’à la levée du moratoire sur la chaésse commer -
ciale» et que « toute possibilité d’évaluer comme il se d[evait] si les objec -
tifs de la recherche [avaient] été atteints » s’en est trouvée exclue (arrêt,
par. 215).

32. Non seulement ce raisonnement me paraît convaincant, mais encore
le Japon n’a selon moi offert aucune réponse probante aux légéitimes cri -
tiques de l’Australie, se contentant d’affirmer que JARPA II était dépourvu
de «date d’achèvement précise car son objectif principal —le suivi de l’éco -
système de l’Antarctique — exige[ait] la conduite d’activités continues», et

de formuler la vague promesse qu’«un examen [aurait] lieu et [que], si néces -
saire, des corrections [seraient] apportées au programme» (ibid., par. 214).
Le Japon a du reste admis ouvertement que l’un des principaux objectiéfs de
JARPA II était de fournir les «meilleurs avis scientifiques» en vue de l’éven -

tuelle levée du moratoire (ibid., par. 96).
33. Dès lors, je vois dans l’absence de limite dans le temps de JARPA II
un élément de preuve supplémentaire tendant à établir qu’éil s’agit là d’un
programme de chasse à la baleine de nature commerciale.

4. Preuves que JARPA II obéit aux « forces du marché »

34. La Cour dispose d’éléments de preuve détaillés qui non seéulement
établissent un lien de corrélation direct entre la baisse du nombrée de

prises de petits rorquals au cours des dernières années du programéme
JARPA II et le déclin concomitant de demande de chair de baleine sur le
marché japonais, mais encore montrent que le Gouvernement japonais, àé
la fois directement et par l’intermédiaire d’agences para-étatiques censées
— à l’instar de l’institut de recherche sur les cétacés — poursuivre des

objectifs scientifiques, a activement promu la consommation de chair de é
baleine auprès de la population japonaise 24. Un article paru dans la
presse japonaise en 2006, en particulier, rend parfaitement compte de la
situation qui prévalait quand JARPA II était encore en gestation :

«A l’heure où l’on se préoccupe des excédents de viande deé baleine
faisant suite à l’essor de la chasse à la baleine scientifique,é un nouveau
er
distributeur … a vu le jour le 1 mai, avec l’aide de l’agence japonaise
des pêcheries et d’autres organisations. Cette société a pour objet de
développer de nouveaux circuits de distribution pour la viande de
baleine, qui a pratiquement disparu des assiettes depuis vingt-cinq ans

et le début de l’interdiction de la chasse commerciale… Si la généra -

24Mémoire de l’Australie, vol. I, par. 6.18-6.23 ;vol. III,annexe 135,p. 336 ;annexe 136,
p. 338-341 ; annexe 137, p. 343-344 ; annexe 139, p. 352 ; annexe 141, p. 356 ; annexe 143,
p. 364-369 ;annexe 145, p. 373-374; annexe 147,p. 380 ;annexe 148, p. 382-384; annexe 152,
p. 396-398.

228

8 CIJ1062.indb 585 18/05/15 09:29 chasse à la baleine déansl’antarctique (op. indé. bhandari) 451

tion des baby-boomers et les personnes âgées continuent d’apprécier
la viande de baleine, ce n’est pas le cas des jeunes générationés… Le

but est d’encourager l’utilisation de chair de baleine mélangéée à
d’autres produits, et de vanter les qualités nutritionnelles de ceétte
viande très protéinée à faible teneur en graisse… Alors que la chasse
à la baleine n’a pas bonne presse et que les jeunes boudent la viaénde

de baleine, la question essentielle est de savoir s’il sera possible, dans
une période si peu propice, de protéger la culture traditionnelle japo -
naise en matière de chasse à la baleine et de consommation de chai▯r de
baleine… La plus grande partie du budget de la chasse à la baleine

scientifique provient de la vente de viande de baleine — avec25’aimable
autorisation de l’institut de recherche sur les cétacés. »

Dans un autre article paru la même année, nous apprenons ceci :

«L’académie des sciences de la mer de Shimonoseki … est devenue
l’un des principaux actionnaires de Kyodo Senpaku …, seule société
japonaise menant des activités de chasse scientifique …, [et] utilisera
les données [recueillies] au sujet des baleines … [pour] apporter de
26
nouvelles justifications à la reprise de la chasse commerciale. »

Dans un autre encore, on peut lire :
«Un goût oublié fait un retour inattendu dans les restaurants, et

pourrait réapparaître au menu des cantines scolaires. Le nombre
d’entreprises alimentaires et de restaurants qui utilisent la chair d▯e
baleine est en hausse. Mais, si la viande de baleine est écoulée dans le

secteur alimentaire, les stocks sont aussi en hausse. Les acteurs de
l’industrie baleinière s’efforcent d’en augmenter la consomm▯ation. Les
recettes provenant de la vente de viande de baleine sont essentielles au▯
financement de la chasse pratiquée à des fins de recherche. Celle-ci

pourrait péricliter si la consommation de chair de baleine n’aug -
mente pas, et c’est la raison pour laquelle, aux yeux des spécialistes du
secteur, il y a péril en la demeure… L’institut de recherche su▯r les céta -
cés et d’autres organisations qui lui sont liées entendent mult▯iplier les

circuits de vente… A cela s’ajoute le fait que le Japon s’efforce d’obte -
nir la reprise de la chasse commerciale devant la commission baleiniè▯re
internationale. Lors de la réunion annuelle de celle-ci, qui s’est tenue
en juin dernier, le Japon et d’autres nations favorables à la chasése à

la baleine ont, dans leur déclaration conjointe, estimé que l’interdic -
tion temporaire de la chasse commerciale « n’était plus nécessaire». » 27

Selon moi, les éléments versés au dossier (dont les citations éci-dessus ne
sont que quelques exemples) tendent clairement à établir non seuléement
que le nombre de prélèvements létaux effectués dans le cadére de JARPA II

25 Mémoire de l’Australie, vol. III, annexe 130, p. 321-322 ; les italiques sont de moi.
26 Ibid., annexe 131, p. 325 ; les italiques sont de moi.
27 Ibid., vol. III, annexe 133, p. 329-331 ; les italiques sont de moi.

229

8 CIJ1062.indb 587 18/05/15 09:29 chasse à la baleine déansl’antarctique (op. indé. bhandari) 452

était déterminé par le marché, mais même que l’on s’éest servi plus large -

ment de ce programme pour stimuler la vente et la consommation de
viande de petit rorqual dans la population japonaise. Ces éléments, carac -
téristiques d’une entreprise commerciale, viennent encore confirmeér la
nature commerciale de JARPA II.

5. Conclusion quant à la nature commerciale de JARPA II

35. En bref, l’analyse que j’ai développée ci-dessus quant à la nature
commerciale de JARPA II peut être synthétisée de la manière suivante :

i) D’une juste interprétation de la convention, il ressort qu’un péro -
gramme qui n’est pas mené à des fins de recherche scientifique é(ou de
subsistance aborigène) l’est nécessairement à des fins comméerciales.
ii) L’analyse de l’histoire de JARPA et de JARPA II révèle la vigoureuse

opposition que le Gouvernement japonais n’a cessé de manifester à
l’égard du moratoire sur la chasse commerciale proposé par la CéBI,
ainsi que les efforts nourris qu’il a déployés en parallèle pour préserver
«sous une forme ou sous une autre » cette chasse en tant que
sacro-sainte composante de la société japonaise.

iii) L’absence de limite dans le temps de JARPA II tend à indiquer que
celui-ci constituait une mesure provisoire visant à préserver quelque
vestige de l’industrie baleinière japonaise dans l’attente de léa réalisa-
tion de l’objectif ultime, à savoir la levée du moratoire sur la chasse
commerciale.

iv) La corrélation entre les prélèvements létaux effectués dans le cadre
de JARPA II et la demande de viande de petit rorqual, ainsi que l’uti -
lisation d’agences gouvernementales « scientifiques» opérant sous les
auspices de JARPA II pour encourager activement la consommation
de viande de baleine auprès de la population japonaise sont de par

leur nature même des signes clairement révélateurs d’une entéreprise
commerciale.

36. Pour toutes ces raisons, j’ai acquis la conviction que JARPA II
était non pas un programme mené en vue de recherches scientifiquesé,
mais un programme de chasse commerciale.

(Signé) Dalveer Bhandari.

230

8 CIJ1062.indb 589 18/05/15 09:29

Bilingual Content

438

SEPARATE OPINION OF JUDGE BHANDARI

Paragraph 30 of the Schedule to the International Convention for the Regulation

of Whaling — Duty of States parties to the Convention to co-operate with the
International Whaling Commission and its Scientific Committee is implied▯ by
paragraph 30 and its accompanying Guidelines — Duty of co-operation is to be
given a broad and purposive construction — Japan’s formal compliance with
paragraph 30 and the Guidelines does not amount to substantive compliance —
Japan has consequently breached paragraph 30 of the Schedule — Characterization
of JARPA II as a commercial whaling programme — JARPA II’s failure to
qualify as a programme for purposes of scientific research under Article▯ VIII,
paragraph 1, of the Convention necessarily renders it a commercial whaling
programme — Evidentiary record strongly supports the conclusion that JARPA II

is a commercial enterprise — The Court ought to have made an affirmative
pronouncement that JARPA II is a commercial whaling programme.

Introduction

1. I generally agree with conclusions reached by the majority, and thus
have voted in favour of all but one of the operative clauses contained in
the dispositif of the present Judgment. However, for reasons I shall
expand upon presently, I cannot agree with the majority’s conclusion éthat

Japan has complied with paragraph 30 of the Schedule to the Interna -
tional Convention for the Regulation of Whaling (“ICRW” or “Coénven-
tion”).
2. Moreover, while I concur with the majority that JARPA II is not a

programme for purposes of scientific research in accordance with Arti -
cle VIII, paragraph 1, of the ICRW, I feel that the evidentiary record in
these proceedings plainly demonstrates that JARPA II is a commercial
enterprise. As I shall endeavour to explain hereunder, in my view it wouéld

have been appropriate for the Court to make a formal finding to that effect.

I. Paragraph 30 of the Schedule to thée ICRW

3. Article III of the Convention establishes the International Whaling
Commission (“IWC” or “Commission”), which is responsible féor, inter alia,
monitoring and regulating the study of whale stocks and the activities oéf

the whaling industry (Articles IV-VI of the Convention). Since 1950, the
Commission has been assisted in the execution of this broad mandate by a
body known as the Scientific Committee (Judgment, para. 47).

216

8 CIJ1062.indb 560 18/05/15 09:29 438

OPINION INDIVIDUELLE DE M. LE JUGE BHANDARI

[Traduction]

Paragraphe 30 du règlement annexé à la convention internationale pour la

réglementation de la chasse à la baleine — Devoir incombant aux Etats parties à
la convention de coopérer avec la commission baleinière internatio▯nale et son
comité scientifique découlant logiquement des dispositions du para▯graphe 30 et des
lignes directrices qui le complètent — Nécessité d’interpréter le devoir de
coopération dans un sens large et téléologique — Respect, par le Japon, de la lettre
du paragraphe 30 et des lignes directrices n’équivalant pas au respect de l’e▯sprit de
celles-ci — Violation du paragraphe 30 du règlement qui en découle — Nature
commerciale du programme de chasse à la baleine mené au titre de J▯ARPA II —
Nature commerciale de JARPA II découlant logiquement du fait que celui-ci ne
peut être considéré comme un programme mené en vue de recherches scientifiques

au sens du paragraphe 1 de l’article VIII de la convention — Conclusion relative à
la nature commerciale de JARPA II solidement étayée — Regret que la Cour n’ait
pas qualifié JARPA II de programme de chasse à la baleine à des fins commerciales.

Introduction

1. Je souscris de manière générale aux conclusions auxquelles a abéouti
la majorité, raison pour laquelle, à une exception près, j’ai voté en faveur
de tous les points du dispositif. Toutefois, pour des motifs que je vaisé ici
développer, je ne puis faire mienne la conclusion de la majorité séelon

laquelle le Japon s’est conformé aux dispositions du paragraphe 30 du
règlement de la convention internationale pour la réglementation dée la
chasse à la baleine (dénommée ci-après la « convention»).
2. En outre, si je conviens avec la majorité que JARPA II n’est pas un

programme mené en vue de recherches scientifiques au sens du para -
graphe 1 de l’article VIII de la convention, je considère même, à l’examen
du dossier, qu’il relève d’une entreprise commerciale. Pour lesé raisons que
je voudrais ici préciser, il aurait, selon moi, été bon que la éCour en prenne

acte formellement.

I. Le paragraphe 30 du règlement annexé àé la convention

3. L’article III de la convention institue une commission baleinière
internationale (dénommée ci-après la « CBI» ou « commission») chargée,
entre autres choses, du suivi et de la réglementation des recherches ésur les

stocks de baleines et des activités de l’industrie baleinière (éarticles IV à VI
de la convention). Depuis 1950, la commission est assistée dans l’exécu -
tion de ce mandat très général par un comité scientifique (éarrêt, par. 47).

216

8 CIJ1062.indb 561 18/05/15 09:29 439 whaling in the antarcétic (sep. op. bhandari)

4. Under paragraph 30 of the Schedule to the Convention, a principal
responsibility of the Scientific Committee is to review and comment uponé

special permits issued pursuant to Article VIII, paragraph 1, of the
ICRW. Paragraph 30 reads as follows :

“A Contracting Government shall provide the Secretary to the
International Whaling Commission with proposed scientific permits
before they are issued and in sufficient time to allow the Scientific
Committee to review and comment on them. The proposed permits
should specify :

(a) objectives of the research ;
(b) number, sex, size and stock of the animals to be taken ;
(c) opportunities for participation in the research by scientists of

other nations; and
(d) possible effect on conservation of stock.

Proposed permits shall be reviewed and commented on by the Sci -

entific Committee at Annual Meetings when possible . . . Preliminary
results of any research resulting from the permits should be made
available at the next Annual Meeting of the Scientific Committee.”

5. According to Article I, paragraph 1, of the ICRW, the Schedule
forms an integral part of the Convention. For this reason, paragraph 30,
being binding authority, is the primary legal provision governing proce -

dural compliance with the special permit review process. However, this
somewhat terse régime has been significantly expanded upon by what is
commonly referred to as “Annex P”, a set of procedural “Guidelines”
endorsed by the Commission (Judgment, para. 47) through its power to
issue recommendations “which relate to whales or whaling and to the

objectives and purposes of this Convention” under Article VI of the Con -
vention. Although technically hortatory in nature, because Annex P was
adopted by consensus, it provides weighty guidance as to the protocols téo
be followed in submitting and reviewing prospective scientific permits
issued by a State party to the Convention under Article VIII, paragraph1.

6. The majority has found that JARPA II is in compliance with the
timing requirements of paragraph 30 because “Japan submitted the
JARPA II Research Plan for review by the Scientific Committee in

advance of granting the first permit for the programme”, and because éthe
Parties do not dispute that subsequent permits issued under JARPA II on
the basis of that original Research Plan have been reported “at once to
the Commission” (ibid., para. 238). As to the substantive components of
paragraph 30 (i.e., subparas. (a)-(d)), the majority finds that these have

been “set[ ] forth”(ibid., para. 239) in the Research Plan.

217

8 CIJ1062.indb 562 18/05/15 09:29 chasse à la baleine déansl’antarctique (op. indé. bhandari) 439

4. En vertu du paragraphe 30 du règlement annexé à la convention, le
comité scientifique est essentiellement chargé d’examiner et deé commenter

les permis spéciaux délivrés conformément au paragraphe 1 de l’ar -
ticle VIII de la convention. Le paragraphe 30 se lit comme suit :

«Il appartient à tout gouvernement contractant de fournir au
secrétaire de la commission baleinière internationale ses propositéions
de permis scientifiques avant leur délivrance et dans un délai suffiésant
pour permettre au comité scientifique de les examiner et de formuler é
un avis à ce sujet. Les propositions de permis doivent préciser :

a) les objectifs de la recherche ;
b) le nombre, le sexe, la taille et la population des animaux à capture;ré
c) les possibilités de participation aux recherches de scientifiques proé-

venant d’autres pays ; et
d) les effets potentiels de cette chasse sur la conservation de la popu -
lation concernée.
Les propositions de permis font l’objet d’un examen et de com -

mentaires du comité scientifique lors des réunions annuelles dans éla
mesure du possible … Les résultats préliminaires de toute recherche
issue des permis sont présentés lors de la réunion annuelle suiévante
du comité scientifique. »

5. D’après le paragraphe 1 de l’article premier, le règlement fait partie
intégrante de la convention. Le paragraphe 30, qui a force obligatoire, est
donc la principale disposition juridique régissant le respect de la pérocédure

applicable à l’examen des permis spéciaux. Toutefois, ce régéime quelque
peu sommaire a été considérablement étoffé dans un docuément communé -
ment appelé l’«annexe P», qui renferme une série de «lignes directrices» de
nature procédurale endossées par la commission (arrêt, par.47) en applica-
tion du pouvoir que lui confère l’article VI de la convention de formuler des

recommandations «à propos de questions ayant trait soit aux baleines et à
la chasse à la baleine, soit aux objectifs et aux buts de» cet instrument. Bien
qu’elle n’ait, techniquement, que valeur d’incitation, l’annéexe P, en tant
qu’elle a été adoptée par consensus, fournit d’importanteés indications sur
les protocoles à suivre s’agissant pour un Etat partie à la conévention de

soumettre, et pour le comité scientifique d’examiner, les propositéions de
permis scientifiques relevant du paragraphe 1 de l’article VIII.
6. La majorité a estimé que JARPA II satisfaisait aux conditions qu’im-
pose le paragraphe 30 en matière de calendrier, dès lors que « le Japon a
soumis le plan de recherche de JARPA II à l’examen du comité scientifique

avant de délivrer le premier permis au titre de ce programme», et parce que
les Parties ne contestent pas que les permis délivrés par la suiteé dans le cadre
de JARPA II sur la base de ce plan de recherche initial ont été portés
«immédiatement à la connaissance de la commission» (ibid., par. 238). En
ce qui concerne les conditions substantielles imposées par le paragraéphe 30

(alinéasa) à d)), la majorité estime que les informations requises ont été
« fourni[es] » (ibid., par. 239) dans le plan de recherche.

217

8 CIJ1062.indb 563 18/05/15 09:29 440 whaling in the antarcétic (sep. op. bhandari)

7. I regret that I must respectfully dissent from the view of the majority é
on this point. I can accept that the information provided by Japan, and

relied upon by the majority, may at the most constitute formal compli -
ance with paragraph 30. However, in view of the significant expansion of
this régime by Annex P, I believe that substantive compliance with para -
graph 30 encompasses an implicit duty to co-operate with the Commis -
sion and the Scientific Committee by providing information that is

reflective of the evolving character of JARPA II. Indeed, a duty to
co-operate emanating from paragraph 30 and Annex P was recognized by
both Parties and the intervening State, and was endorsed as an imperativée
interpretative principle by the Court in the present Judgment (para. 240).
Given the broad consensus of opinion on this point, I cannot share the
majority’s conclusion that Japan’s perfunctory compliance with theé strict

letter of paragraph 30 is consonant with the apparent broad and purpo -
sive scope of this duty to co-operate.

8. As I shall explain in the ensuing analysis, I take the position that
Japan’s failure to abide by its duty to co-operate under paragraph 30 is

evident from an analysis of the chapeau of that provision and at least
three out of its four substantive subparagraphs. I shall address each ofé
these shortcomings in turn.

1. The Chapeau of Paragraph 30 of the Schedule

9. The chapeau of paragraph 30 requires that “[a] Contracting Govern -
ment shall provide the Secretary to the International Whaling Commis -
sion with proposed scientific permits before they are issued and in sufficient
time to allow the Scientific Committee to review and comment on them”
(emphasis added). It is true that the Parties do not contest the fact éthat

Japan submitted the JARPA II Research Plan in March 2005, that it was
reviewed by the Scientific Committee prior to the launch of JARPA II in
November 2005, and that the annual issuance of special permits under
JARPA II was promptly reported to the Scientific Committee during the
life of the programme (Judgment, paras. 109 and 238). However, it is to
be recalled that 63 Scientific Committee participants declined to take péart

in the 2005 review of the JARPA II Research Plan, citing the need for the
Committee to complete its final review of the original JARPA programme
before the new proposal could be assessed (ibid., para. 241). Indeed,
although Japan launched JARPA II in November 2005, it was not until
December 2006 that a final review of JARPA by the Committee was con -

ducted (ibid., para. 105).

10. I believe a truly co-operative approach on the part of Japan would
have entailed a proper dialogue with the Committee concerning the scien -
tific output of JARPA with the aim of possibly revising JARPA II prior

to its launch. Instead, the relevant history evinces what I can only desécribe
as a rush to renew what effectively amounted to a replication of its périor

218

8 CIJ1062.indb 564 18/05/15 09:29 chasse à la baleine déansl’antarctique (op. indé. bhandari) 440

7. Je regrette de devoir me désolidariser de la majorité sur ce pointé.
Tout au plus pourrais-je conclure d’après les informations fournies par le

Japon, sur lesquelles s’est fondée la majorité, que les disposiétions du para -
graphe 30 ont été formellement respectées. Toutefois, compte tenu de
l’élargissement considérable de ce régime en vertu de l’annexe P, j’estime
que, sur le fond, le respect de ces dispositions couvre implicitement le
devoir du Japon de coopérer avec la commission et le comité scientéifique

en fournissant des informations rendant compte de l’évolution de
JARPA II. Au demeurant, les deux Parties et l’Etat intervenant ont
reconnu que le paragraphe 30 et l’annexe P prévoyaient un tel devoir, que
la Cour, dans l’arrêt, a de surcroît érigé en principe d’éinterprétation
incontournable (par. 240). Compte tenu du consensus général sur ce
point, je ne puis faire mienne la conclusion de la majorité selon laqéuelle le

respect de pure forme, par le Japon, de la seule lettre du paragraphe 30
satisferait à un devoir de coopérer qui, manifestement, doit êtére interprété
dans un sens plus vaste, en fonction de son objet.
8. L’analyse du chapeau de cette disposition et d’au moins trois de
ses quatre alinéas de nature substantielle montre bien en quoi le Japon

ne se conforme nullement au devoir de coopération que lui impose le
paragraphe 30. J’examinerai à tour de rôle chacun des manquements
constatés.

1. Le chapeau du paragraphe 30 du règlement

9. Le chapeau du paragraphe 30 dispose qu’«[i]l appartient au gouver -
nement contractant de fournir au secrétaire de la commission baleinièére
internationale ses propositions de permis scientifiques avant leur dééli -
vrance et dans un délai suffisant pour permettre au comité scientifique d▯e les
examiner et de formuler un avis à ce sujet » (les italiques sont de moi).

Certes, les Parties n’ont pas contesté que le Japon ait soumis le éplan de
recherche de JARPA II en mars 2005 et que ce plan ait été examiné par le
comité scientifique avant le lancement du programme en novembre 2005,
ni que les permis spéciaux délivrés chaque année dans le cadre de JARPA II
aient été immédiatement portés à la connaissance du comitéé scientifique
tout au long du déroulement de ce programme (arrêt, par. 109 et 238).

Toutefois, il convient de rappeler que soixante-trois membres du comitéé
scientifique ont décidé de ne pas participer à l’examen du pélan de recherche
de JARPA II en 2005, arguant que le comité ne pouvait examiner le nou -
veau projet sans avoir, au préalable, mené à bien l’évaluéation finale
de JARPA (ibid., par. 241). Or, alors que JARPA II a été lancé par le

Japon au mois de novembre 2005, ce n’est qu’en décembre 2006 que le
comité a réalisé cette évaluation finale (ibid., par. 105).
10. A mes yeux, le Japon aurait démontré un réel esprit de coopéération
en acceptant de participer à un dialogue digne de ce nom avec le comiété
sur les réalisations scientifiques de JARPA, dans l’idée de reviser au

besoin JARPA II avant son lancement. Or, ressort-il du dossier, il s’est au
contraire précipité — je ne vois pas d’autre terme — pour renouveler ce

218

8 CIJ1062.indb 565 18/05/15 09:29 441 whaling in the antarcétic (sep. op. bhandari)

“scientific” whaling programme — only this time with an indefinite man -
date — well before any critical review of said programme could take
place. For these reasons, I find that the duty to co-operate implicit in the
chapeau of paragraph 30 has been violated by Japan.

2. Paragraphs 30 (a) and (b) of the Schedule

11. My review of the evidentiary record leads me to the firm conclu -

sion that Japan has failed in its duty to co-operate with the IWC and its
Scientific Committee in accordance with paragraph 30, by not providing
timely and accurate information pertaining to the objectives of its osteén -
sible research (subpara. (a)), as well as the quantitative and qualitative

dimensions of the whales to be killed pursuant to JARPA II permits (sub -
para. (b)). To that end, it is to be recalled that the JARPA II Research
Plan, promulgated in 2005 and under which Japan has been issuing its
special permits until the close of proceedings in this case, has never béeen
altered (Judgment, para. 209). Similarly, the permits issued annually by

Japan under this programme have remained identical in their descriptive é
contents (ibid.). This despite the fact that since the inception of JARPA II,
the programme has seen a marked decline in the actual output of the
programme vis-à-vis its originally stated goals.

12. Indeed, the JARPA II Research Plan, in its stated pursuit of a pro -
gramme that would, inter alia, engage in “[m]onitoring of the Antarctic
ecosystem” 1and construct a “[m]odelling competition among whale
species” 2, mandates a perennial take of 850 minke whales (plus or minus

ten per cent), 50 fin whales and 50 humpback whales. However, in reality,
during the entire lifespan of the programme JARPA II has taken zero
humpback whales (Judgment, para. 201). As to fin whales, JARPA II
took a paltry combined total of 18 during the first seven seasons of the
programme, and a mere zero to three were captured annually in subse -

quent years (ibid.). Moreover, while Japan caught 853 minke whales dur-
ing the inaugural 2005-2006 pelagic season under JARPA II in accordance
with the stated objectives of the programme, these numbers have dropped é
precipitously in recent years. At the time of the close of proceedings ién

this case, the evidentiary record revealed that an average of approxi -
mately 450 minke whales (or barely half the target established under the
original and unchanged Research Plan) had been killed each year under
JARPA II, with those numbers plummeting in the latter years of the pro -

gramme (to wit, 170 minke whales were killed in the 2010-2011 season
and 103 minke whales were killed in the 2012-2013 season) (ibid.,
para. 202).
13. In my opinion, the manifest and repetitive failure of JARPA II to
achieve its ambitiously stated original objectives warrants more than a é

1Memorial of Australia, Vol. III, Ann. 105, p. 160.
2Ibid., p. 161.

219

8 CIJ1062.indb 566 18/05/15 09:29 chasse à la baleine déansl’antarctique (op. indé. bhandari) 441

qui n’était de fait qu’une réplique de son précédent pérogramme de chasse
«scientifique» — à cela près que, cette fois, son mandat était illimité
— bien avant que toute évaluation critique de ce programme n’eût pu
avoir lieu. Pour ces raisons, j’estime que le devoir de coopération que pré-

voit implicitement le chapeau du paragraphe 30 a été violé par le Japon.

2. Alinéas a) et b) du paragraphe 30 du règlement

11. A l’examen du dossier, j’ai acquis la ferme conviction, en ne fouré -

nissant pas en temps voulu des informations exactes sur les objectifs deé la
recherche qu’il prétendait réaliser (alinéa a)), non plus que d’éléments
quantitatifs et qualitatifs sur les baleines qu’il s’agissait de tuer en vertu
de permis délivrés dans le cadre de JARPA II (alinéa b)), que le Japon

avait manqué à son devoir de coopérer avec la CBI et son comitéé scienti -
fique conformément au paragraphe 30. A cet égard, il convient de rappe -
ler que le plan de recherche de JARPA II, en vertu duquel le Japon n’a
cessé, depuis sa promulgation en 2005, de délivrer des permis spéciaux
tout le temps qu’a duré la procédure en l’espèce, n’a éjamais été modifié

(arrêt, par. 209). De même le contenu descriptif des permis délivrés
chaque année par le Japon au titre de ce programme est-il resté inchangé
(ibid.), et ce, en dépit d’un nombre de prises effectives, depuis le laénce -
ment de JARPA II, très en deçà des objectifs initialement annoncés.

12. Le plan de recherche de JARPA II, dans le cadre d’un programme 1
notamment censé assurer un « suivi de l’écosystème de l’Antarctique » et
établir une « modélisation de la concurrence entre espèces de baleines » ,
prévoyait en effet des prises annuelles chiffrées à 850 pour les petits ror -

quals (plus ou moins 10 %), 50 pour les rorquals communs et 50 pour les
baleines à bosse. Or, de fait, pas une seule baleine à bosse n’a été mise à
mort pendant la totalité du déroulement du programme (arrêt, par. 201).
Quant aux rorquals communs, il n’en a, en tout et pour tout, été prélevé
que 18 spécimens au cours des sept premières saisons du programme,

après quoi les prises ont varié de zéro à trois par an (ibid.). En outre, si
le Japon a prélevé, dans le cadre de JARPA II, 853 petits rorquals au
cours de la première saison pélagique 2005-2006, conformément aux
objectifs annoncés, ces chiffres ont récemment accusé une baiésse brutale.

A l’heure de la clôture de la procédure en l’affaire, le néombre moyen de
petits rorquals tués chaque année dans le cadre de JARPA II aura oscillé
autour de 450 (soit à peine la moitié des objectifs de capture éétablis au
titre du plan de recherche initial, resté inchangé), chiffre quéi a encore

chuté au cours des dernières années du programme (170 petits rorquals
ayant été tués au cours de la saison 2010-2011 et 103 au cours de la sai -
son 2012-2013) (ibid., par. 202).
13. Selon moi, les objectifs ambitieux annoncés dans le cadre de
JARPA II n’ayant, à plusieurs reprises, pas été atteints, il y avaéit lieu de ne

1 Mémoire de l’Australie, vol. III, annexe 105, p. 160.
2 Ibid., p. 161.

219

8 CIJ1062.indb 567 18/05/15 09:29 442 whaling in the antarcétic (sep. op. bhandari)

rote annual recitation of what are now clearly outmoded catch projec -
tions as contained in the original 2005 Research Plan. Consequently, I
find that the duty to co-operate implied in paragraphs 30 (a)-(b) and

Annex P requires, at the very least, the submission by Japan of a revised
JARPA II Research Plan and/or revised annual special permits bearing
some semblance with the reality of the programme’s performance. Conseé -
quently, Japan’s failure to do either constitutes a material breach oéf this

duty.

3. Paragraph 30 (c) of the Schedule

14. Paragraph 30 (c) of the Schedule states that proposed scientific
permits to be issued pursuant to Article VIII, paragraph 1, of the Con -
vention shall state what opportunities for participation by scientists oéf
other nations have been provided for in the research programme. The

majority acknowledges that in the course of these proceedings, Japan hasé
adduced no evidence of any co-operation with scientists of other nations
under JARPA II (Judgment, para. 222), yet stops short of any finding
that Japan has failed to comply with paragraph 30. Rather, the majority

admonishes Japan that “some further evidence of co-operation between
JARPA II and other . . . international research institutions could have
been expected” (ibid.).
15. Contrary to the view of the majority, I believe that the conspicuous

dearth of peer review by scientists of other nations seriously undermineés
any conclusion that Japan has complied with its duty to co-operate under
paragraph 30 (c) of the Schedule. In this regard, I endorse the opinion of
the witness-expert for Australia, Professor Mangel, who testified that

“scientific opinion can be wrong, but reliabl3 science responds to valid
criticism, which is how science advances” . I further find that the follow -
ing submission by Australia captures the situation succinctly :

“Peer review in scientific research . . . leads to a continuous process
of revision and amendment of the research as necessary. There is no

indication of Japan adopting any such approach. Japan commenced
JARPA II without proper peer review, and continues it without sub -
stantial adjustment, despite serious and sustained criticism from
members of the scientific community that its objectives and methods

are flawed and likely to fail. It is thus unsurprising that JARPA II
has produced a paucity of peer reviewed results, as did its predecessor é
JARPA.” 4

3Memorial of Australia, Vol. 1, para. 5.83 and note 687.
4Ibid., para. 5.83; emphasis added.

220

8 CIJ1062.indb 568 18/05/15 09:29 chasse à la baleine déansl’antarctique (op. indé. bhandari) 442

pas se contenter d’une simple répétition mécanique, d’uneé année sur
l’autre, des projections en matière de prises contenues dans le pléan de
recherche initial de 2005, devenues entre-temps clairement obsolètes. Je
considère donc que le devoir de coopération qu’impliquent les aélinéas a)

et b) du paragraphe 30 et l’annexe P imposait à tout le moins au Japon de
soumettre un plan de recherche de JARPA II et/ou des permis spéciaux
annuels revisés présentant un semblant de rapport avec la réaliété de la mise
en œuvre du programme. En ne présentant de revision ni de l’un éni des

autres, le Japon a donc commis une violation substantielle de ce devoir.é

3. Alinéa c) du paragraphe 30 du règlement

14. L’alinéa c) du paragraphe 30 du règlement indique que les propositions

de permis scientifiques délivrés au titre du paragraphe 1 de l’article VIII de la
convention doivent préciser les possibilités de participation aux érecherches de
scientifiques d’autres pays qu’offre le programme en question. La majorité
reconnaît que, dans la présente instance, le Japon n’a fourni aéucune preuve
de coopération avec des scientifiques d’autres pays dans le cadre éde JARPA II

(arrêt, par. 222), mais se garde pour autant de conclure que le Japon a manqué
aux obligations que lui impose le paragraphe 30. Elle se contente de lui adres -
ser cette admonestation: «[I]l était permis d’escompter que le Japon fournirait
davantage d’exemples de coopération entre ce programme et d’autéres orga -

nismes de recherche … internationaux» . (Ibid.)
15. A la différence de mes collègues de la majorité, j’estime éque cette
absence flagrante d’évaluation par des scientifiques d’autres pays met
sérieusement à mal la conclusion selon laquelle le Japon a honoréé le

devoir de coopération lui incombant en vertu de l’alinéa c) du para -
graphe 30 du règlement. A cet égard, je fais mien l’avis exprimé paér le
témoin-expert de l’Australie, le professeur Mangel, d’après lequel « un
avis scientifique peut être faux, mais un scientifique rigoureux réépondra
aux critiques valides, et c’est ainsi que la science progresse » 3. J’estime en

outre que cette observation de l’Australie résume bien la situatioén:

«[E]n matière de recherche scientifique, l’examen par les pairs
conduit … à un processus continu de revision et de modification des
recherches en tant que de besoin. Or rien n’indique que le Japon ait
adopté une telle démarche. Ce dernier a lancé le programme JARPA II
sans réel examen par les pairs, et continue à le mettre en œuvrée sans

rectification notable, en dépit des vives critiques constamment éméises
par des membres de la communauté scientifique, qui affirment que ses
objectifs et ses méthodes sont inappropriés et probablement vouéés à
l’échec. Il n’est donc pas étonnant que, tout comme son préédécesseur,

le programme JARPA II ait produit extrêmement pe4 de résultats
ayant fait l’objet d’un examen par les pairs.»

3Mémoire de l’Australie, vol. 1, par. 5.83, et note 687.
4Ibid., par. 5.83 ; les italiques sont de moi.

220

8 CIJ1062.indb 569 18/05/15 09:29 443 whaling in the antarcétic (sep. op. bhandari)

16. In my respectful view, the majority ought to have concluded that
JARPA II’s failure to collaborate in any meaningful way with the scien -

tists of other nations fails to satisfy the broad and purposive duty to é
co-operate that arises under paragraph 30 (c).

4. Conclusion regarding Japan’s Violation of Paragraph 30
of the Schedule

17. In sum, I consider that the following factors clearly establish that
Japan has not complied with its duty to co-operate with the Commission
and the Scientific Committee pursuant to paragraph 30 and Annex P :

(i) JARPA II was launched before a review of JARPA had taken place.

(ii) Despite the fact that the quantity and quality of data gathered over

the lifespan of JARPA II differs in significant respects from the origi -
nal design of the programme as envisaged in the Research Plan,
Japan has never submitted a revised plan nor altered its special per -
mits in observance of these changes.
(iii) Whereas the JARPA II Research Plan was designed, inter alia, to

conduct a “modelling of the Antarctic ecosystem” in conjunction
with a multi-species competition programme, not a single humpback
whale was taken during the duration of the programme and a negli -
gible amount of fin whales were captured. This leaves minke whales
as the only remaining species actually taken in meaningful quantities

under the programme, and Japan has neither satisfactorily explained
how its multi-species Antarctic ecosystem research can be salvaged
under such circumstances, nor has it adapted the objectives of the
programme to reflect changing circumstances.

(iv) Japan has not provided any evidence of international scientific

co-operation under JARPA II.
18. As the majority affirms, paragraph 30 of the Schedule to the Con -

vention implies a duty of co-operation for all States parties when submit -
ting permits to the Scientific Committee to be reviewed for compliance
with Article VIII, paragraph 1, of the Convention. However, for the rea -
sons I have outlined above, I cannot share the majority’s conclusion éthat
Japan’s formal compliance with paragraph 30 constitutes satisfactory

substantive compliance with that provision. Given my view that the duty é
to co-operate is a broad and purposive obligation that entails an ongoing
dialogue with the Scientific Committee, I conclude that Japan has failedé
to comply with this duty in respect of the chapeau and subpara -
graphs (a)-(c) of paragraph 30, as elucidated by the Guidelines promul -

gated in Annex P.

221

8 CIJ1062.indb 570 18/05/15 09:29 chasse à la baleine déansl’antarctique (op. indé. bhandari) 443

16. A mon humble avis, la majorité aurait dû conclure que l’absenceé de
réelle collaboration avec des scientifiques d’autres nations dans éle cadre

de JARPA II constitue un manquement à l’obligation générale de coopéé-
rer prévue à l’alinéa c) du paragraphe 30, telle qu’interprétée en fonction
de son objet.

4. Conclusion relative à la violation, par le Japon,
du paragraphe 30 du règlement

17. Pour résumer, je considère qu’il découle des éléments ésuivants que
le Japon n’a pas respecté le devoir lui incombant en vertu du paraé -
graphe 30 et de l’annexe P de coopérer avec la commission et le comité
scientifique :

i) JARPA II a été lancé avant que JARPA n’eût fait l’objet d’une éva -
luation.
ii) En dépit du fait que la quantité et la nature des données recueéillies

tout au long du déroulement de JARPA II diffèrent à d’importants
égards de ce qui avait été initialement prévu et décrit déans le plan de
recherche, le Japon n’a jamais soumis de plan revisé, ni modifiéé ses
permis spéciaux pour refléter lesdits changements.
iii) Alors que le plan de recherche de JARPA II était notamment censé

permettre d’aboutir à une « modélisation de l’écosystème de l’Antarc -
tique» et à une étude de la concurrence entre espèces, aucune baléeine
à bosse n’a été prélevée pendant tout le temps qu’aé duré ce programme,
et un nombre infime de rorquals communs a été mis à mort. Dans le
cadre de JARPA II, seuls ont donc été prélevés en quantités significa -

tives les petits rorquals ; or, le Japon n’a jamais expliqué de manière
convaincante comment son étude de l’écosystème de l’Antaréctique
couvrant diverses espèces pouvait se justifier dans ces circonstancesé,
pas davantage qu’il n’a adapté les objectifs de son programme péour
tenir compte de l’évaluation de ce contexte.
iv) Le Japon n’a fourni aucun exemple de coopération scientifique inter -

nationale réalisée dans le cadre de JARPA II.
18. Comme l’affirme la majorité, le paragraphe 30 du règlement de la

convention impose un devoir de coopération à tous les Etats soumetétant
des permis au comité scientifique afin que celui-ci puisse s’assurer de leur
conformité aux dispositions du paragraphe 1 de l’article VIII. Or, pour
les raisons que j’ai mentionnées ci-dessus, je ne puis faire mienne la
conclusion de la majorité selon laquelle, en respectant la lettre du para -

graphe 30, le Japon aurait dûment respecté l’esprit de celui-ci. Le devoir
de coopération étant, à mes yeux, une obligation de vaste portéée, devant
être compris dans une optique téléologique, qui implique un diaélogue per -
manent avec le comité scientifique, j’estime que le Japon a manquéé d’ho-
norer le devoir de coopérer que lui imposaient le chapeau et les alinééas a)

à c) du paragraphe 30, tel que précisé par les lignes directrices promul -
guées à l’annexe P.

221

8 CIJ1062.indb 571 18/05/15 09:29 444 whaling in the antarcétic (sep. op. bhandari)

19. Consequently, I respectfully dissent in respect of the conclusion
reached by the majority in paragraph 247 (6) of the present Judgment.

II. JARPA II as a Commercial
Whaling Programme

20. Apart from the dissent I have expressed immediately above, I join
the majority with respect to all remaining subparagraphs of the dispositif.
Specifically, I concur that the evidence on record establishes that
JARPA II is not a programme for purposes of scientific research within
the meaning of Article VIII, paragraph 1, of the ICRW, and therefore the
lethal methods employed under said programme violate Japan’s interna -

tional legal obligations pursuant to paragraphs 7 (b) (the establishment
of the “Southern Ocean Sanctuary”), 10 (d) (the “factory ship morato -
rium”), and 10 (e) (the “moratorium on commercial whaling”) of the
Schedule to the Convention.

21. In my estimation there is ample evidence on the record to support
the conclusion that JARPA II is not a programme for purposes of scien -
tific research, but in fact, a commercial whaling programme. While an
exhaustive account of the rationales underpinning my conclusion is not
feasible for present purposes, I wish to seize upon the following four

salient considerations : (a) the inevitable logical conclusion that
JARPA II’s failure to qualify as a programme for purposes of scientific
research requires its classification as one for commercial purposes; (b) the
historical context in which JARPA and JARPA II came into existence
and continued to operate ; (c) the indefinite duration of JARPA II ; and
(d) compelling evidence that the lethal take of minke whales under

JARPA II is responsive to market forces, as well as efforts by the Govern -
ment of Japan to stimulate the domestic market for minke whale meat
under the broader auspices of that programme.

1. ICRW only Allows for Three Mutually Exclusive Categories
of Whaling

22. As a preliminary matter, I find that a proper reading of the Con -
vention envisages only three exhaustive and mutually exclusive purposes
for whaling : (i) scientific research ; (ii) commercial enterprise ; and

(iii) aboriginal subsistence. It is uncontested that aboriginal subsistence
whaling is not a live issue in this case. It therefore stands to reason that a
finding by this Court that JARPA II is not a programme for purposes of
scientific research necessarily leads to the corollary that it is a comméercial
whaling programme.

23. The deductive approach I have adopted above is but the first pillar
upholding my conclusion that JARPA II is a commercial whaling pro -

222

8 CIJ1062.indb 572 18/05/15 09:29 chasse à la baleine déansl’antarctique (op. indé. bhandari) 444

19. Je me vois donc dans l’obligation de me dissocier de la conclusion
à laquelle la majorité a abouti au point 6 du paragraphe 247 de l’arrêt.

II. JARPA II en tant que programmeé de chasse
à la baleine de naturée commerciale

20. Si je suis en désaccord sur le point que je viens d’exposer, je soéus -
cris à toutes les autres conclusions de la majorité telles qu’éénoncées dans
le dispositif. Plus précisément, je suis d’accord pour affirmeér qu’il ressort
du dossier que JARPA II n’est pas un programme mené en vue de
recherches scientifiques au sens du paragraphe 1 de l’article VIII de la
convention et que, en conséquence, le recours, dans ce cadre, à deés

méthodes létales emporte violation des obligations juridiques inteérnatio -
nales que le Japon tient des paragraphes 7 b) (création du « sanctuaire de
l’océan Austral »), 10 d) (« moratoire sur les usines flottantes ») et 10 e)
(«moratoire sur la chasse commerciale ») du règlement annexé à la
convention.

21. Néanmoins, selon moi, il ressort amplement du dossier non seule -
ment que JARPA II n’est pas un programme mené en vue de recherches
scientifiques, mais qu’il s’agit même en réalité d’un éprogramme de chasse
à visées commerciales. Si je ne puis ici développer l’ensemble des motifs
qui me conduisent à cette conclusion, je voudrais insister sur quatreé grands

points que j’ai pris en ligne de compte : a) la nécessité logique de qualifier
JARPA II de programme mené à des fins commerciales dès lors qu’il éne
peut être considéré comme un programme mené en vue de recheréches
scientifiques ; b) le contexte historique dans lequel JARPA et JARPA II
ont vu le jour et ont été mis en œuvre ; c) le caractère illimité dans le
temps de JARPA II ; d) les éléments de preuve ne laissant aucun doute

sur le fait que le nombre de petits rorquals prélevés dans le cadrée de
JARPA II est déterminé par le marché, et les efforts déployésé par le Gou -
vernement japonais pour stimuler le marché national de viande de petits
rorquals sous le couvert de ce programme.

1. La convention ne prévoit que trois catégories de chasse, qui s’excluent
mutuellement

22. A titre liminaire, je considère que la convention, dûment interpré -
tée, ne permet d’envisager que trois types de finalités motivant la pratique
de la chasse, lesquelles s’excluent les unes les autres : i) recherche scienti-

fique; ii) considérations commerciales; iii) subsistance aborigène. Or, il est
admis qu’il n’est pas question, en l’espèce, de chasse aboriégène de subsis -
tance. De ce que la Cour conclut que JARPA II n’est pas un programme
mené en vue de recherches scientifiques, il découle donc nécesséairement
qu’il s’agit d’un programme de chasse à des fins commercialeés.

23. L’approche déductive que j’ai adoptée ci-dessus n’est que le pre -
mier des éléments étayant ma conclusion sur la nature commerciale de

222

8 CIJ1062.indb 573 18/05/15 09:29 445 whaling in the antarcétic (sep. op. bhandari)

gramme. As I shall now explain, this conclusion is further buttressed by

numerous inductive inferences available from the evidence adduced duringé
these proceedings. For present purposes, I find it sufficient to focus éon
three of the most prominent types of evidence, though by no means do I
consider the foregoing to constitute an exhaustive treatment of the subjéect.

2. Historical Context Surrounding JARPA
and JARPA II

24. I begin by considering the historical context surrounding the adop -
tion and operation of the original JARPA programme. In so doing, I am
fully cognizant that the legality of this programme per se is not under

consideration by the Court. That being said, I believe the evidentiary
record abundantly sustains the inference that JARPA II is essentially a
de facto extension of JARPA, for all intents and purposes. Given,
inter alia, the uninterrupted lineage between JARPA and JARPA II as

well as their numerous commonalities, I believe a more holistic appraisal
of the entire “scientific whaling” scheme practised by Japan over éthe past
several decades is appropriate.

25. The record demonstrates that the Government of Japan has a long
history of strenuous objection to the adoption and continuation of a

complete moratorium on commercial whaling. To begin, I would recall
that Japan was one of only seven countries to unsuccessfully vote againsét
the imposition of the moratorium when it was adopted at the IWC’s
Thirty-Fourth Annual Meeting on 23 July 1982 5. It was also one of only

four countries to subsequently lodge a formal objection to the amend -
ment when it did so on 4 November 1982 6, thus exempting itself from
the application of the moratorium by the time it went into full effecté in
7
1986 . I would further recall that the Court received considerable evi -
dence, by way of statistics and political declarations made by representéa-
tives of the Japanese Government, which strongly indicate that Japan’és
resistance to the imposition of the moratorium was motivated by a per -

ceived need to aggressively protect critical socio-economic, cultural and
historical links between the fabric of Japanese society and a deeply-rooted
commercial whaling industry dating back centuries .

26. This position was encapsulated when Japan’s formal notification of
its objection to the moratorium expressly underscored “the important é

role played by the whale products and the whaling industry in the Japa -

5 Memorial of Australia, Vol. I, para. 2.57 and note ; para. 3.6. At the meeting,
25 countries voted in favour of the moratorium, seven against, and five absétained.
6 Ibid., para. 2.60 and notes 84-87 ; para. 3.8. In addition to Japan, those countries
lodging objections were Peru, Norway and the Union of Soviet Socialist Réepublics.
7
8 Ibid., paras. 2.57-2.60.
Ibid., paras. 3.5-3.8.

223

8 CIJ1062.indb 574 18/05/15 09:29 chasse à la baleine déansl’antarctique (op. indé. bhandari) 445

JARPA II. Comme je vais à présent l’expliquer, ma conviction est encoére
renforcée par les nombreuses inférences qui peuvent être induitées du dos-

sier présenté en l’espèce. Aux fins de la présente opinioén, j’estime pouvoir
me contenter à cet égard de revenir sur trois des aspects les plusé détermi -
nants, mais en aucun cas ils n’ont été les seuls à nourrir méa réflexion.

2. Contexte historique dans le cadre duquel se sont inscrits JARPA
et JARPA II

24. Je commencerai par me pencher sur le contexte historique dans le

cadre duquel le premier programme JARPA a été adopté et mis en œuvre.
Ce faisant, j’ai parfaitement conscience que ce n’est pas la licééité de ce
programme en soi qui est à l’examen devant la Cour. Cela dit, je péense

que l’on peut inférer des nombreux éléments de preuve verséés au dossier
que JARPA II constitue essentiellement et à toutes fins une extension
de facto de JARPA. Compte tenu notamment de ce lien de filiation entre
les deux programmes, ainsi que de leurs nombreux points communs, il

me semble opportun d’analyser dans sa globalité l’ensemble du réégime
de « chasse scientifique » pratiqué par le Japon au cours des dernières
décennies.
25. Il ressort du dossier que, au fil des années, le Gouvernement du

Japon a maintes fois manifesté son opposition acharnée à l’aédoption et au
maintien d’un moratoire complet sur la chasse commerciale. Pour com -
mencer, je rappellerai que le Japon était l’un des pays (sur un téotal de sept

seulement) qui vota, sans succès, contre l’instauration du moratoéire, à la 5
trente-quatrième réunion annuelle de la CBI, du 23 juillet 1982 . Il fut
également l’un de ceux — sur quatre pays seulement cette fois — qui
devait par la suite formuler une objection formelle à la modification du
6
règlement instituant le moratoire. Il le fit le 4 novembre 1982 , de sorte
que le moratoire ne lui était pas applicable au moment où il prit éplein
effet, en 1986 7. J’ajouterai que la Cour a reçu de nombreux éléments de

preuve, sous forme de statistiques ou de déclarations politiques de réepré -
sentants du Gouvernement japonais, tendant résolument à indiquer qéue
l’opposition du Japon à l’instauration du moratoire était motivée par la
conviction qu’il lui fallait activement protéger les liens essentiéels de

natures socio-économique, culturelle et historique entre la sociétéé japo -
naise et une industrie baleinière dont l’ancrage dans le tissu social remon -
tait à des siècles .
26. Cette position transparaissait dans la notification formelle que fit le é

Japon de son objection au moratoire, dans laquelle il soulignait expresséé -
ment «le rôle important des produits baleiniers et de l’industrie baleinéière

5 Mémoire de l’Australie, vol. I, par. 2.57, et note 82 ; par. 3.6. Lors de la réunion, l’on

dén6mbra vingt-cinq votes en faveur du moratoire, sept contre et cinq abstentions.
Ibid., par. 2.60, et notes 84-87 ; par. 3.8. Outre le Japon, les pays qui émirent des
obj7ctions étaient le Pérou, la Norvège et l’Union des réépubliques socialistes soviétiques.
8 Ibid., par. 2.57-2.60.
Ibid., par. 3.5-3.8.

223

8 CIJ1062.indb 575 18/05/15 09:29 446 whaling in the antarcétic (sep. op. bhandari)

nese traditional diet and in the socio-economy of certain local communi -
ties in Japan” . A more expansive expression of this impetus can be

found in a statement made by the Japanese Prime Minister when speak -
ing before the national legislative body of Japan just a few months prioér
to the lodging of the objection. On that occasion, he explained how

“Japan’s whaling industry has an extremely long history and it also
occupies an important place in the Japanese diet . . . [L]ately we have
seen . . . the anti-whaling movement driven by environmental protec -

tion organizations and other groups grow larger and larger world -
wide . . . [T]hey are . . . trying to use their numbers to lead the IWC
in the direction of a ban on whaling. The situation is truly regretta -
ble . . . The Government intends to place even greater efforts than it has

to date into the protection and growth of the whaling industry into the ▯
future.” 10

This theme was prevalent again when, speaking just days after the adop -

tion of the commercial moratorium, Japan’s Minister for Agriculture, é
Forestry and Fisheries reported to his national legislature how

“[i]t is the Prime Minister’s view that precisely since the problems fac-
ing whaling in Japan are so extremely significant, and as there are so

many people who are reliant primarily on this industry for their liveli -
hood, we must actively continue to build an environment where whaling
can be practiced . . . [The Prime Minister] was of the view that we
ought to push harder ahead with a response on whaling . . . And so, for

my part too, since there are people who are unable to get jobs else -
where in the fishing industry other than in whaling . . . I intend to
redouble efforts in actively dealing with the whaling problem and to live
up to the expectations which have been placed upon me.” 11

A year after the adoption of the moratorium, this position remained resoé -
lute. As Japan’s Director-General of its Fisheries Agency recounted to
the legislature :

“at last year’s IWC, a decision was taken to invoke a total ban oné
commercial whaling with a grace period of three years. Japan has filed

an objection to this decision . . . Our basic position is that this mor -
atorium has no basis in science . . . What’s more, should it come to
pass that Japan’s whaling industry would be finished by this, being m▯ind -
ful of the people who work directly in whaling and the large number of

9Memorial of Australia, Vol. II, Ann. 53, p. 186.
10Ibid., Vol. III, Ann. 88, pp. 69-70 ; emphasis added.
11Ibid., Ann. 89, p. 74 ; emphasis added.

224

8 CIJ1062.indb 576 18/05/15 09:29 chasse à la baleine déansl’antarctique (op. indé. bhandari) 446

s’agissant de l’alimentation traditionnelle japonaise et des condiétions
socio-économiques de certaines communautés locales au Japon » . On la 9
trouve développée dans la déclaration suivante que le Premier méinistre

japonais fit devant l’organe législatif national du Japon quelquesé mois
seulement avant la formulation de cette objection :

«Au Japon, l’industrie baleinière est une tradition ancestrale, et la
viande de baleine occupe une place importante dans le régime alimen -
taire japonais… [N]ous avons récemment pu voir le mouvement
d’opposition à la chasse à la baleine que mènent certaines oérganisa -

tions de protection de l’environnement et d’autres groupes pren[drée]
de plus en plus d’ampleur au niveau international… [Les pays hos -
tiles à la chasse] tentent de faire jouer leur nombre afin de mener la
CBI sur la voie de l’interdiction de la chasse à la baleine. Cetteé situa -

tion est vraiment regrettable… Le Gouvernement japonais entend
encore redoubler d’efforts afin d’assurer à l’avenir la protection et la
croissance de l’industrie baleinière. » 10

Ce thème réapparaît dans cette autre déclaration devant la Diète faite,
quelques jours seulement après l’adoption du moratoire sur la chasse

commerciale, par le ministre japonais de l’agriculture, des forêtsé et des
pêches :

«Pour le Premier ministre, c’est justement en raison de la gravité é
des problèmes qui se posent à l’industrie baleinière au Japo▯n et du
nombre de personnes dépendant essentiellement de cette industrie pour▯
leur subsistance que nous devons poursuivre nos efforts pour créer un▯

cadre propice à la poursuite de nos activités de chasse à la baleine. Le
Premier ministre … a estimé que nous devions nous employer davan -
tage à chercher une solution… Pour ma part aussi, étant donné que la
chasse à la baleine est le seul secteur de l’industrie de la pêéche dans

lequel certaines personnes peuvent trouver un emploi …, j’entends
redoubler d’efforts pour trouver une solution au problème de l’industrie
baleinière et répondre aux attentes qui ont été placées e▯n moi. » 11

Un an après l’adoption du moratoire, cette position demeurait inchéangée.
Voici ce que dit devant la Diète le directeur général de l’aégence japonaise
des pêcheries :

«[L]’année dernière, lors de sa réunion annuelle, la CBI a décidé

d’instaurer une interdiction totale de la chasse à la baleine àé des fins
commerciales, assortie d’une période de grâce de trois ans. Le Japon
a formulé une objection contre cette décision… Notre position gééné -
rale est que ce moratoire ne repose sur aucun fondement scienti -

fique… En outre, si cette décision devait sonner le glas de l’industrie

9 Mémoire de l’Australie, vol. II, annexe 53, p. 186.
10 Ibid., vol. III, annexe 88, p. 69 et 70 ; les italiques sont de moi.
11 Ibid., annexe 89, p. 74 ; les italiques sont de moi.

224

8 CIJ1062.indb 577 18/05/15 09:29 447 whaling in the antarcétic (sep. op. bhandari)

people who work in related industries . . . the Government will make the
utmost efforts to obtain the understanding of the countries concerned
to ensure that our whaling can continue in some form or another.” 12

27. The staunch commitment of the Government of Japan to these

“utmost efforts” is encapsulated by a Whaling Issues Study Groupé Report
published by the Japanese Ministry of Agriculture, Forestry and Fisherieés
in 1984, which recommended that “[t]he continuation of whaling ought
13
rightly to be accepted” . During legislative hearings held at the time of
the Report’s release, numerous high-ranking Japanese officials affirmed
their commitment to its recommendation to continue Japan’s whaling

programme to the greatest extent possible. For instance, the Head of theé
Ocean Fisheries Department of the Fisheries Agency proclaimed that

“[t]he Fisheries Agency’s view is that this report has given us vaéluable
recommendations for future solutions in this extremely challenging

environment. Our intention is to use the report as a reference and . . .
to make our utmost efforts to ensure that our whaling will be able to
continue both in the Antarctic and coastal whaling, in some form or
14
another.”

In remarks made that same day, the Head of the Marine Fisheries Depart-

ment of the Fisheries Agency reassured legislators that “we intend toé
make our utmost efforts to ensure the continuation of whaling in some
form or another” 15. The next day, the Director-General of the Fisheries
Agency explained how

“after the moratorium commences, the path to ensure the continuation
of whaling would be, for Southern Ocean whaling, to position it as a
research whaling activity which has a scientific nature, and, for coastal

whaling, to position it as whaling which is absolutely essential to
the livelihood of regional communities from the perspectives of their
societies, economies and cultures” 1.

12 Memorial of Australia, Vol. III, Ann. 90, p. 77 ; emphasis added.
13 Ibid., Ann. 98, p. 111.
14 Ibid., Ann. 91, p. 82 ; emphasis added.
15 Ibid., p. 83; emphasis added.
16 Ibid., Ann. 92, p. 88 ; emphasis added.

225

8 CIJ1062.indb 578 18/05/15 09:29 chasse à la baleine déansl’antarctique (op. indé. bhandari) 447

baleinière au Japon, considérant le nombre de personnes directemen▯t

employées par l’industrie baleinière et celles qui travaillent ▯dans les
secteurs connexes, nous continuerions de dénoncer le caractère irr▯a -
tionnel des motifs ayant présidé à l’adoption du moratoire… [L]e
Gouvernement ne ménagera aucun effort pour obtenir le soutien des

pays concernés, afin d’assurer le maintien de nos activités de chasse à
la baleine sous une forme ou sous une autre. » 12

27. Cette farouche résolution du Gouvernement japonais « à ne ména-
ger aucun effort » trouve son expression dans un rapport du groupe

d’étude sur les questions relatives à la chasse à la baleine publié par le
ministère japonais de l’agriculture, des forêts et des pêcheés en 1984, qui
concluait que «[l]a poursuite de la chasse à la baleine dev[ait], à juste titre, é
être acceptée » 1. Lors de débats devant la Diète qui eurent lieu au

moment de la publication de ce rapport, plusieurs hauts responsables
japonais déclarèrent se rallier à la recommandation qui s’y étrouvait for -
mulée, visant à poursuivre, autant que faire se pouvait, le prograémme de

chasse à la baleine du Japon. Ainsi, le responsable du départementé des
pêcheries maritimes de l’agence japonaise des pêcheries fit la déclaration
suivante :

«L’agence des pêcheries considère que ce rapport nous a fourni dée
précieuses recommandations en termes de solutions futures susceptibleés

d’être mises en œuvre dans le cadre de cet environnement internéational
particulièrement difficile. Nous avons l’intention d’utiliser ce rapport
comme document de référence et de faire tout notre possible … pour

garantir la poursuite de nos activités de chasse à la baleine sous▯ une
forme ou sous une autre, tant dans l’Antarctique que dans les zones
côtières. »14

Le même jour, le responsable du département des pêcheries maritéimes de
l’agence japonaise des pêcheries s’adressa de nouveau aux législateurs en

ces termes : « Nous avons l’intention … de faire tout notre possible …
pour garantir la poursuite de nos activités de chasse à la baleineé sous une
forme ou sous une autre. » 15Le lendemain, le directeur général de l’agence
expliqua que,

«une fois le moratoire instauré, la voie permettant de garantir la pour -

suite de la chasse serait, dans l’océan Austral, de la présenter comme
une activité axée sur la recherche scientifique, et, en ce qui concerne la
chasse côtière, de la présenter comme une pratique absolument essen -

tielle pour répondre aux besoins de subsistance de communauté16ré▯gio -
nales d’un point de vue social, économique et culturel » .

12 Mémoire de l’Australie, vol. III, annexe 90, p. 77 ; les italiques sont de moi.
13 Ibid., annexe 98, p. 111.
14 Ibid., annexe 91, p. 82 ; les italiques sont de moi.
15
16 Ibid., p. 83 ; les italiques sont de moi.
Ibid., annexe 92, p. 88 ; les italiques sont de moi.

225

8 CIJ1062.indb 579 18/05/15 09:29 448 whaling in the antarcétic (sep. op. bhandari)

Lest there be any doubt about the consistency of the Government of
Japan’s intentions, this view was again reinforced when the Japanese é

Minister for Agriculture, Forestry and Fisheries took the floor and peér -
sonally vowed that : “I intend to do my utmost to ensure that Japanese
whaling continues in some form or another.” 17

28. Finally, I must underscore that the foregoing examples are merely
illustrative of considerable other evidence contained in the record of these

proceedings demonstrating Japan’s political hostility toward the comméer -
cial whaling moratorium and its resultant resolve to work around the
moratorium to ensure the continuation of the Japanese whaling industry
“in some form or another”.

29. A review of subsequent events only further strengthens this conclu -
sion. While the Government of Japan did eventually accede on 1 July 1986
to a gradual elimination of its objection to the moratorium by
18
1 April 1988 , a sizable body of evidence indicates that Japan took this
step very reluctantly and in the face of persistent international pressure,
by way of, inter alia, highly punitive economic sanctions, emanating in
particular from the United States 19, a prized trading partner. Against the

backdrop of the rather serendipitous launch of the original JARPA pro -
gramme following the 1986-1987 whaling season, just as the moratorium
was entering into force for Japan (Judgment, para. 100), the record
reveals that in an interview given on 1 June 1986, the Secretary-General

of the Japan Whaling Association made the following trenchant remarks :

“Japan’s decision to withdraw from whaling came after the resolu-
tion of the 1982 IWC annual meeting to invoke the moratorium on
commercial whaling, followed by pressure from the United States . . .

However, Japanese whaling is an industry with a long history and tra -
dition and it has a firm place in our diet. When I think of the liveliho▯ods
of the 50,000 people affected, those who work in whaling-related

industries and their families, as someone involved in the industry it is
only natural that I would want to find some way of enabling the indus -
try to stay alive.” 20

Similarly, in an interview conducted in 1997, the former Director-General
of the Japan Fisheries Agency, who was responsible for pivotal interna -
tional negotiations involving the implementation of scientific whaling, é
reflected as to how “[t]he implementation of scientific whaling was viewed

17
18 Memorial of Australia, Vol. III, Ann. 92, p. 89 ; emphasis added.
19 Ibid., Vol. I, para. 2.63.
20 Ibid., paras. 3.9-3.12; Vol. III, Ann. 89, p. 73 ; Ann. 95, pp. 99-100.
Ibid., Ann. 125, p. 306 ; emphasis added.

226

8 CIJ1062.indb 580 18/05/15 09:29 chasse à la baleine déansl’antarctique (op. indé. bhandari) 448

Afin de ne laisser aucun doute quant à la communauté des intentions de
l’administration japonaise, ajoutons que cette position fut encore rééaffir-

mée par le ministre japonais de l’agriculture, des forêts et deés pêches, qui
prit la parole pour s’engager personnellement en ce sens, dans les teérmes
suivants : «J’ai l’intention de faire tout ce qui est en mon pouvoir pour

garantir la poursuite 17 nos activités de chasse à la baleine sous▯ une forme
ou sous une autre. »
28. Pour finir, il me faut souligner que les citations qui précèdent née
sont que des exemples parmi les nombreux autres dont fourmille le dos -

sier, témoignant de l’hostilité politique du Japon envers le moératoire sur
la chasse commerciale et de sa détermination à le contourner en coénsé -
quence pour assurer la poursuite des activités de son industrie baleiénière
«sous une forme ou sous une autre ».

29. L’examen de faits ultérieurs ne fait que renforcer cette conclusioén.
Si, le 1er juillet 1986, le Gouvernement japonais a fini par accepter le
retrait progressif de son objection au moratoire avant le 1 eravril 1988 18,

nombreux sont les éléments de preuve permettant d’établir quée le Japon
n’a pris cette décision qu’à contrecœur, en raison de la épression inter-
nationale constante dont il faisait, en particulier, l’objet de la part des
Etats-Unis 19, partenaire commercial privilégié, et qui revêtait notam -

ment la forme de très lourdes sanctions économiques. A l’heure édu lance-
ment, à point nommé, du premier programme JARPA après la saison de
chasse 1986-1987, au moment même où le moratoire entrait en vigueur
pour le Japon (arrêt, par. 100), le secrétaire général de l’association japo -
er
naise de chasse à la baleine tint dans un entretien accordé le 1 juin 1986,
et versé au dossier, des propos peu équivoques :

«La décision du Japon de renoncer à la chasse à la baleine est
intervenue après la décision, prise à la réunion annuelle deé la CBI
tenue en 1982, de recourir au moratoire sur la chasse à la baleine

commerciale, et les pressions qui ont ensuite été exercées par éles
Etats-Unis… Mais la chasse à la baleine pratiquée par le Japon est
une industrie qui a une longue histoire et une longue tradition, et la

viande de baleine fait partie intégrante de notre régime alimentai▯re.
Quand je pense aux 50 000 personnes qui sont affectées, à tous ceux
qui travaillent dans le secteur baleinier et à leurs familles, il est tout à
fait naturel, en tant qu’acteur de cette industrie, que je cherche des
20
solutions pour qu’elle puisse se maintenir. »

De même, dans un entretien réalisé en 1997, l’ancien directeur général de
l’agence japonaise des pêcheries, qui était chargé de négociations interna -
tionales déterminantes concernant la mise en œuvre de la chasse scéienti -
fique, fit remarquer que « [l]a mise en œuvre d’opérations de chasse à la

17
18Mémoire de l’Australie, vol. III, annexe 92, p. 89 ; les italiques sont de moi.
19Ibid., vol. I, par. 2.63.
20Ibid., par. 3.9-3.12 ; vol. III, annexe 89, p. 73 ;annexe 95, p. 99-100.
Ibid., annexe 125, p. 306 ; les italiques sont de moi.

226

8 CIJ1062.indb 581 18/05/15 09:29 449 whaling in the antarcétic (sep. op. bhandari)

as the only method available to carry on with the traditions of whaling”▯,
before explaining that

“[w]hatever the issues for which Japan’s past whaling deserves criéti -
cism the [whalers] are not to blame. I want[ed] to somehow retain the
work and workplaces, where these men have spent their whole lives, in
the form of scientific whaling.” 21

More recently, speaking before a sub-committee of the Japanese national é
legislature in October 2012, the Director-General of the Japan Fisheries
Agency recalled how “[m]inke whale meat is prized because it is said to

have a very good flavour and aroma when eaten as sashimi and the like”▯,
and that “the scientific whaling program in the Southern Ocean was neces -
sary to achieve a stable supply of minke whale meat” 22.

30. When these multiple contemporaneous and retrospective state -
ments are considered against the remainder of the evidentiary record in é
these proceedings, including the detailed analysis in the Judgment demoné -

strating JARPA II’s shortcomings as a properly designed and imple -
mented programme for purposes of scientific research, as well as statistéics
showing that Japan has killed the vast majority of whales under special é
permit since the inception of the moratorium through the 2010-2011
23
whaling season , in my view the conclusion that JARPA II is a commer -
cial whaling programme becomes inescapable.

3. Indefinite Duration of JARPA II

31. The majority makes passing reference to the indefinite duration of
JARPA II, noting the open-ended time frame of the programme and

opining that “with regard to a programme for purposes of scientific
research, as Annex P indicates, a ‘time frame with intermediary targets’
would have been more appropriate” (Judgment, para. 216). In keeping
with my observations made above regarding the dearth of international

peer review made in the context of my analysis of paragraph 30, I believe
that in assessing the character of JARPA II, a stronger statement as to
the incongruity between a programme of indefinite duration and one that
is genuinely established for purposes of scientific research would have é

been appropriate. To this end, recalling Japan’s well-chronicled intention
to carry on a whaling programme “in some form or another” in spiteé of

21Memorial of Australia, Vol. II, Ann. 75, pp. 346-347 (internal quotations omitted) ;

emp22sis added.
CR 2013/11, p. 18 (Crawford), para. 60 (28 June 2013), referring to judges’ folder
of Australia, First round of oral arguments, 26-28 June 2013, Vol. II, tab 108; emphasis
add23.
Memorial of Australia, Vol. I, para. 2.69 and note 99 ; Fig. 1 at p. 37.

227

8 CIJ1062.indb 582 18/05/15 09:29 chasse à la baleine déansl’antarctique (op. indé. bhandari) 449

baleine à des fins scientifiques était considérée comme le s▯eul moyen de per -
pétuer [les] traditions [en matière de chasse à la baleine], avant d’ajouter

que,

«quelles que [fussent] les raisons pour lesquelles la chasse à la baleéine
[qui avait été] pratiquée [par le passé] par le Japon méréit[ait] d’être
critiquée, les [baleiniers] ne p[ouvaient] en être tenus responsabéles. Je
v[oulais] préserver, d’une manière ou d’une autre, les emplo▯is de ce

secteur, auquel certains ont consacré leur vie, dans le cadre d’op▯éra -
tions de chasse scientifique. » 21

Plus récemment, s’adressant à une sous-commission de la chambre des
représentants, le directeur général de l’agence japonaise deés pêcheries rap -
portait que « la chair de petit rorqual était appréciée pour sa saveur et son▯

arôme, notamment lorsqu’elle [était] consommée en sashimi et▯ sous d’autres
formes similaires », et que «le programme de chasse à la baleine en vue de
recherches scientifiques mené dans l’océan Austral était né▯cessaire pour
22
assurer la stabilité de l’offre de chair de petit rorqual » .
30. Lorsque l’on examine ces multiples déclarations intervenues alors,é
ou depuis, à la lumière des autres éléments de preuve verséés au dossier, et
de l’analyse détaillée à l’issue de laquelle la Cour éétablit les manquements

interdisant de considérer JARPA II comme un programme dûment conçu
et mis en œuvre en vue de recherches scientifiques, ainsi que des staétis -
tiques montrant que la majorité des baleines tuées au titre d’uén permis
spécial par le Japon l’ont été depuis l’instauration du méoratoire, et jusqu’à
23
la saison de chasse 2010-2011 , la conclusion selon laquelle JARPA II est
un programme de chasse commerciale s’impose sans l’ombre d’un déoute.

3. Caractère illimité dans le temps de JARPA II

31. La majorité ne fait qu’une brève mention de l’absence de limite
dans le temps de JARPA II, assortie de ce commentaire : « dans le cas

d’un programme poursuivant un objectif de recherche scientifique, un é
«calendrier comprenant des objectifs intermédiaires », tel que prévu à
l’annexe P, aurait été plus approprié » (arrêt, par. 216). De même que
pour l’absence de contrôle international par des pairs évoquéée dans le

cadre de l’examen du paragraphe 30 auquel je me suis livré, j’estime que,
dans son analyse de la nature de JARPA II, la Cour aurait dû s’exprimer
en des termes plus fermes sur l’impossibilité de considérer un éprogramme
illimité dans le temps comme réellement établi à des fins de recherche

scientifique. Sur ce point, et compte tenu de l’intention — amplement
démontrée — qui était celle du Japon de poursuivre des activités de chassée

21 Mémoire de l’Australie, vol. II, annexe 75, p. 346-347 (citations omises) ; les italiques

son22de moi.
CR 2013/11, p. 18, par. 60 (Crawford) (28 juin 2013), renvoyant au dosoier de plai -
doiries de l’Australie, premier tour de plaidories, 26-28 juin 2013, vol. II, onglet n 108 ; les
ita23ques sont de moi.
Mémoire de l’Australie, vol. I, par. 2.69, et note 99 ; fig. 1, p. 37.

227

8 CIJ1062.indb 583 18/05/15 09:29 450 whaling in the antarcétic (sep. op. bhandari)

the moratorium, I find great merit in Australia’s contention that an éindef -
inite programme suggests it is “geared towards the perpetuation of whal -
ing by any means until the commercial whaling moratorium is lifted”,

and that “the open-ended nature of JARPA II precludes a meaningful
assessment of whether it has achieved its research objectives” (Judgément,
para. 215).

32. Not only do I find such reasoning persuasive, but aside from posit -
ing that JARPA II “has no specified termination date because its primary
objective (i.e., monitoring the Antarctic ecosystem) requires a continéuing

programme of research”, and providing a vague promise that “a reviéew
will be held and revisions made to the programme if required” (ibid.,
para. 214), I see no convincing answer to these valid critiques raised by
Australia. Indeed, Japan openly concedes that a primary objective of

JARPA II is to provide “scientific advice” in order to further the aim oéf
eventually lifting the moratorium (ibid., para. 96).

33. Consequently, I believe the indefinite nature of JARPA II is a use -

ful piece of supplementary evidence that militates in favour of its charéac-
terization as a commercial whaling programme.

4. Evidence that JARPA II Is Driven by Market Forces

34. The Court received detailed evidence that the dwindling lethal take
of minke whales in the latter years of JARPA II was not only directly
correlated with a concomitant decline in demand for whale meat on the
Japanese market, but that the Government of Japan, both directly and

through parastatal agencies ostensibly mandated to advance scientific
objectives — such as the Institute of Cetacean Research — actively pro -
moted the consumption of whale meat amongst the Japanese popula -
tion . One particularly illustrative news report from the Japanese press

in 2006 captures a compelling overview of the prevailing situation when é
JARPA II was in its infancy :

“Amid concerns about the surplus of whale meat resulting from the
expansion in scientific whaling, a new whale meat wholesaler com -
pany . . . was established on 1 May with assistance from the Japan

Fisheries Agency and other organizations. Its charter is to develop new
sales channels for whale meat, which has almost disappeared from din -
ing room tables during the 25 years since the commencement of the ban
on commercial whaling . . . While middle-aged and older people retain

24Memorial of Australia, Vol. I, paras. 6.18-6.23; Vol. III, Ann. 135, p. 336; Ann. 136,
pp. 338-341 ; Ann. 137, pp. 343-34; Ann. 139, p. 352; Ann. 141, p. 356; Ann. 143,
pp. 364-369 ; Ann. 145, pp. 373-374 ; Ann. 147, p. 380 ; Ann. 148, pp. 382-384 ; Ann. 152,
pp. 396-398.

228

8 CIJ1062.indb 584 18/05/15 09:29 chasse à la baleine déansl’antarctique (op. indé. bhandari) 450

«sous une forme ou sous une autre » nonobstant le moratoire, je pense
que l’Australie était parfaitement fondée à déduire de l’éabsence de limite
dans le temps de JARPA II que « la conception de ce programme
répond[ait] à la volonté de perpétuer, par quelque moyen que ce soit, la

chasse à la baleine jusqu’à la levée du moratoire sur la chaésse commer -
ciale» et que « toute possibilité d’évaluer comme il se d[evait] si les objec -
tifs de la recherche [avaient] été atteints » s’en est trouvée exclue (arrêt,
par. 215).

32. Non seulement ce raisonnement me paraît convaincant, mais encore
le Japon n’a selon moi offert aucune réponse probante aux légéitimes cri -
tiques de l’Australie, se contentant d’affirmer que JARPA II était dépourvu
de «date d’achèvement précise car son objectif principal —le suivi de l’éco -
système de l’Antarctique — exige[ait] la conduite d’activités continues», et

de formuler la vague promesse qu’«un examen [aurait] lieu et [que], si néces -
saire, des corrections [seraient] apportées au programme» (ibid., par. 214).
Le Japon a du reste admis ouvertement que l’un des principaux objectiéfs de
JARPA II était de fournir les «meilleurs avis scientifiques» en vue de l’éven -

tuelle levée du moratoire (ibid., par. 96).
33. Dès lors, je vois dans l’absence de limite dans le temps de JARPA II
un élément de preuve supplémentaire tendant à établir qu’éil s’agit là d’un
programme de chasse à la baleine de nature commerciale.

4. Preuves que JARPA II obéit aux « forces du marché »

34. La Cour dispose d’éléments de preuve détaillés qui non seéulement
établissent un lien de corrélation direct entre la baisse du nombrée de

prises de petits rorquals au cours des dernières années du programéme
JARPA II et le déclin concomitant de demande de chair de baleine sur le
marché japonais, mais encore montrent que le Gouvernement japonais, àé
la fois directement et par l’intermédiaire d’agences para-étatiques censées
— à l’instar de l’institut de recherche sur les cétacés — poursuivre des

objectifs scientifiques, a activement promu la consommation de chair de é
baleine auprès de la population japonaise 24. Un article paru dans la
presse japonaise en 2006, en particulier, rend parfaitement compte de la
situation qui prévalait quand JARPA II était encore en gestation :

«A l’heure où l’on se préoccupe des excédents de viande deé baleine
faisant suite à l’essor de la chasse à la baleine scientifique,é un nouveau
er
distributeur … a vu le jour le 1 mai, avec l’aide de l’agence japonaise
des pêcheries et d’autres organisations. Cette société a pour objet de
développer de nouveaux circuits de distribution pour la viande de
baleine, qui a pratiquement disparu des assiettes depuis vingt-cinq ans

et le début de l’interdiction de la chasse commerciale… Si la généra -

24Mémoire de l’Australie, vol. I, par. 6.18-6.23 ;vol. III,annexe 135,p. 336 ;annexe 136,
p. 338-341 ; annexe 137, p. 343-344 ; annexe 139, p. 352 ; annexe 141, p. 356 ; annexe 143,
p. 364-369 ;annexe 145, p. 373-374; annexe 147,p. 380 ;annexe 148, p. 382-384; annexe 152,
p. 396-398.

228

8 CIJ1062.indb 585 18/05/15 09:29 451 whaling in the antarcétic (sep. op. bhandari)

a fondness for whale meat, it is far less familiar to the younger gen -
eration . . . The aim is to encourage its use mixed with other meats

and extol its nutritional superiority as a high-protein low-fat meat. . .
With the negative image of whaling and the drift away from whale
meat among young people, the key question is whether during such
adverse times it will be possible to protect Japan’s traditional culture

of eating whale meat and carrying out whaling . . . The majority of the
budget for scientific whaling is earned from sales of whale meat — cour -
tesy of the Institute of Cetacean Research.” 25

In another report published that same year, we are told that the

“Shimonoseki Marine Sciences Academy . . . has become a major
shareholder in Kyodo Senpaku . . . Japan’s only scientific whaling
enterprise . . . [and] will use the data [gathered] on whales . . . [to]
lend further support towards the resumption of commercial whaling.” 26

And yet another report from later that year informs us that
“[a]n unexpected excess sees a forgotten taste gain ‘regular’ status on

pub menus and targeted at school lunches. The number of food com -
panies and eateries using whale meat is on the rise. But while whale
meat for culinary purposes is being placed on the market, whale meat
-
inventories have also been expanding. The people involved with whal
ing are trying hard to expand consumption. Whale meat sales are a very
important financial source for research whaling. Future research whal -
ing is likely to be obstructed unless whale meat consumption increases, é

and this is why industry insiders see it as an emergency issue . . . The
Institute of Cetacean Research and other related organizations are aim -
ing to expand sales channels [of] whale meat . . . There is also the fact
that Japan is seeking the resumption of commercial whaling at the Inter -

national Whaling Commission. At the Annual Meeting, which was
held in June this year, the joint declaration put forward by Japan and
other pro-whaling nations . . . included the statement that the tempo -
rary ban on commercial whaling was ‘no longer necessary’.” 27

In my opinion, the evidence on record (of which the above quotations
constitute only an illustration) plainly supports the conclusion that téhe
output of JARPA II was not only responsive to market forces, but in fact

25 Memorial of Australia, Vol. III, Ann. 130, pp. 321-322 ; emphasis added.
26 Ibid., Ann. 131, p. 325 ; emphasis added.
27 Ibid., Vol. III, Ann. 133, pp. 329-331 ; emphasis added.

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8 CIJ1062.indb 586 18/05/15 09:29 chasse à la baleine déansl’antarctique (op. indé. bhandari) 451

tion des baby-boomers et les personnes âgées continuent d’apprécier
la viande de baleine, ce n’est pas le cas des jeunes générationés… Le

but est d’encourager l’utilisation de chair de baleine mélangéée à
d’autres produits, et de vanter les qualités nutritionnelles de ceétte
viande très protéinée à faible teneur en graisse… Alors que la chasse
à la baleine n’a pas bonne presse et que les jeunes boudent la viaénde

de baleine, la question essentielle est de savoir s’il sera possible, dans
une période si peu propice, de protéger la culture traditionnelle japo -
naise en matière de chasse à la baleine et de consommation de chai▯r de
baleine… La plus grande partie du budget de la chasse à la baleine

scientifique provient de la vente de viande de baleine — avec25’aimable
autorisation de l’institut de recherche sur les cétacés. »

Dans un autre article paru la même année, nous apprenons ceci :

«L’académie des sciences de la mer de Shimonoseki … est devenue
l’un des principaux actionnaires de Kyodo Senpaku …, seule société
japonaise menant des activités de chasse scientifique …, [et] utilisera
les données [recueillies] au sujet des baleines … [pour] apporter de
26
nouvelles justifications à la reprise de la chasse commerciale. »

Dans un autre encore, on peut lire :
«Un goût oublié fait un retour inattendu dans les restaurants, et

pourrait réapparaître au menu des cantines scolaires. Le nombre
d’entreprises alimentaires et de restaurants qui utilisent la chair d▯e
baleine est en hausse. Mais, si la viande de baleine est écoulée dans le

secteur alimentaire, les stocks sont aussi en hausse. Les acteurs de
l’industrie baleinière s’efforcent d’en augmenter la consomm▯ation. Les
recettes provenant de la vente de viande de baleine sont essentielles au▯
financement de la chasse pratiquée à des fins de recherche. Celle-ci

pourrait péricliter si la consommation de chair de baleine n’aug -
mente pas, et c’est la raison pour laquelle, aux yeux des spécialistes du
secteur, il y a péril en la demeure… L’institut de recherche su▯r les céta -
cés et d’autres organisations qui lui sont liées entendent mult▯iplier les

circuits de vente… A cela s’ajoute le fait que le Japon s’efforce d’obte -
nir la reprise de la chasse commerciale devant la commission baleiniè▯re
internationale. Lors de la réunion annuelle de celle-ci, qui s’est tenue
en juin dernier, le Japon et d’autres nations favorables à la chasése à

la baleine ont, dans leur déclaration conjointe, estimé que l’interdic -
tion temporaire de la chasse commerciale « n’était plus nécessaire». » 27

Selon moi, les éléments versés au dossier (dont les citations éci-dessus ne
sont que quelques exemples) tendent clairement à établir non seuléement
que le nombre de prélèvements létaux effectués dans le cadére de JARPA II

25 Mémoire de l’Australie, vol. III, annexe 130, p. 321-322 ; les italiques sont de moi.
26 Ibid., annexe 131, p. 325 ; les italiques sont de moi.
27 Ibid., vol. III, annexe 133, p. 329-331 ; les italiques sont de moi.

229

8 CIJ1062.indb 587 18/05/15 09:29 452 whaling in the antarcétic (sep. op. bhandari)

the broader auspices of the programme were used as a tool to stimulate

the commercial consumption of minke whale meat amongst the Japanese
population. These explicitly commercial attributes only further entrenché
the conclusion that JARPA II is a commercial whaling programme.

5. Conclusion regarding JARPA II as a Commercial Whaling Programme

35. In sum, the analysis above regarding the commercial nature of
JARPA II may be distilled into the following propositions :

(i) A correct reading of the ICRW requires that a programme that is not
for purposes of scientific research (or aboriginal subsistence) must
necessarily be one for commercial purposes.
(ii) The history of JARPA and JARPA II demonstrates a strenuous and

persistent opposition to the IWC’s moratorium on commercial whal -
ing by the Government of Japan, and a correlative sustained effort on é
its part to protect whaling as a sacrosanct component of Japanese
society “in some form or another”.

(iii) The indefinite duration of JARPA II is suggestive of its role as an
interim measure to promote some vestige of Japan’s whaling industry
until the ultimate objective of lifting the moratorium on commercial
whaling can be achieved.

(iv) The correlation between JARPA II output and market demand for
minke whale meat, as well as the use of ostensibly scientific govern -
ment agencies operating under the banner of JARPA II, to actively
promote whale meat consumption amongst the Japanese populace
are by their very nature quintessential hallmarks of commercial enter -

prise.

36. For these reasons, I am clearly of the opinion that JARPA II is not
a programme for purposes of scientific research, but a commercial whal -
ing programme.

(Signed) Dalveer Bhandari.

230

8 CIJ1062.indb 588 18/05/15 09:29 chasse à la baleine déansl’antarctique (op. indé. bhandari) 452

était déterminé par le marché, mais même que l’on s’éest servi plus large -

ment de ce programme pour stimuler la vente et la consommation de
viande de petit rorqual dans la population japonaise. Ces éléments, carac -
téristiques d’une entreprise commerciale, viennent encore confirmeér la
nature commerciale de JARPA II.

5. Conclusion quant à la nature commerciale de JARPA II

35. En bref, l’analyse que j’ai développée ci-dessus quant à la nature
commerciale de JARPA II peut être synthétisée de la manière suivante :

i) D’une juste interprétation de la convention, il ressort qu’un péro -
gramme qui n’est pas mené à des fins de recherche scientifique é(ou de
subsistance aborigène) l’est nécessairement à des fins comméerciales.
ii) L’analyse de l’histoire de JARPA et de JARPA II révèle la vigoureuse

opposition que le Gouvernement japonais n’a cessé de manifester à
l’égard du moratoire sur la chasse commerciale proposé par la CéBI,
ainsi que les efforts nourris qu’il a déployés en parallèle pour préserver
«sous une forme ou sous une autre » cette chasse en tant que
sacro-sainte composante de la société japonaise.

iii) L’absence de limite dans le temps de JARPA II tend à indiquer que
celui-ci constituait une mesure provisoire visant à préserver quelque
vestige de l’industrie baleinière japonaise dans l’attente de léa réalisa-
tion de l’objectif ultime, à savoir la levée du moratoire sur la chasse
commerciale.

iv) La corrélation entre les prélèvements létaux effectués dans le cadre
de JARPA II et la demande de viande de petit rorqual, ainsi que l’uti -
lisation d’agences gouvernementales « scientifiques» opérant sous les
auspices de JARPA II pour encourager activement la consommation
de viande de baleine auprès de la population japonaise sont de par

leur nature même des signes clairement révélateurs d’une entéreprise
commerciale.

36. Pour toutes ces raisons, j’ai acquis la conviction que JARPA II
était non pas un programme mené en vue de recherches scientifiquesé,
mais un programme de chasse commerciale.

(Signé) Dalveer Bhandari.

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8 CIJ1062.indb 589 18/05/15 09:29

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Opinion individuelle de M. le juge Bhandari

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