Applicabilité de la section 22 de l'article VI de la convention sur les privilèges et immunités des Nations Unies
VUE D'ENSEMBLE DE L'AFFAIRE
Le 24 mai 1989, le Conseil économique et social des Nations Unies (ECOSOC) a adopté une résolution par laquelle il a demandé un avis consultatif à la Cour, à titre prioritaire, sur la question de l’applicabilité de la section 22 de l’article VI de la convention sur les privilèges et immunités des Nations Unies au cas de M. Dumitru Mazilu, rapporteur de la Sous-Commission de la lutte contre les mesures discriminatoires et de la protection des minorités, organe de la Commission des droits de l’homme. L’intéressé, ressortissant roumain, s’était vu confier, par une résolution de la Sous-Commission, la tâche d’établir un rapport sur les droits de l’homme et la jeunesse, tâche pour laquelle le Secrétaire général était prié de lui apporter toute l’aide dont il aurait besoin. M. Mazilu était absent lors de la session de la Sous-Commission (1987) pendant laquelle il devait présenter son rapport, la Roumanie ayant fait savoir qu’il avait été hospitalisé. Le mandat de M. Mazilu vint finalement à expiration le 31 décembre 1987, mais sans que l’intéressé soit dessaisi de la tâche de rapporteur qui lui avait été assignée. M. Mazilu a pu faire parvenir à l’Organisation des Nations Unies divers messages dans lesquels il se plaignait du fait que les autorités roumaines refusaient de lui délivrer une autorisation de voyage. Lesdites autorités ont par ailleurs fait savoir, suite à des contacts que le Secrétaire général adjoint aux droits de l’homme, à la demande de la Sous-Commission, avait pris avec elles, que toute intervention du Secrétariat ou toute forme d’enquête à Bucarest seraient considérées comme une ingérence dans les affaires intérieures de la Roumanie. Ces autorités ont ultérieurement fait connaître à l’Organisation leur position quant à l’applicabilité à M. Mazilu de la convention sur les privilèges et immunités des Nations Unies, en faisant valoir notamment que la convention n’assimilait pas les rapporteurs, dont les activités n’étaient qu’occasionnelles, aux experts en mission pour les Nations Unies ; qu’ils ne pourraient, même en cas d’assimilation partielle, que bénéficier d’immunités et privilèges fonctionnels ; que ceux-ci ne commenceraient à jouer qu’au moment où l’expert entreprendrait un voyage lié à l’accomplissement de sa mission ; et que, dans le pays dont il était ressortissant, l’expert ne jouissait de tels privilèges et immunités que pour ce qui se rapporte au contenu de l’activité afférente à sa mission.
La Cour a donné son avis le 15 décembre 1989. La Cour a tout d’abord rejeté un argument de la Roumanie selon lequel elle n’aurait pas compétence. Elle n’a par ailleurs pas trouvé de raisons décisives qui auraient pu la conduire à ne pas considérer comme opportun de donner un avis. Elle a procédé ensuite à une analyse minutieuse de la section 22 de l’article VI de la convention, qui concerne les « experts en missions pour l’Organisation des Nations Unies ». La Cour est notamment arrivée à la conclusion que la section 22 de la convention était applicable aux personnes (autres que les fonctionnaires de l’Organisation des Nations Unies) auxquelles une mission avait été confiée par l’Organisation et qui étaient de ce fait en droit de bénéficier des privilèges et immunités prévus par ce texte pour exercer leurs fonctions en toute indépendance ; que, pendant toute la durée de cette mission, les experts jouissaient de ces privilèges et immunités fonctionnels, qu’ils soient ou non en déplacement ; et que lesdits privilèges et immunités pouvaient être invoqués à l’encontre de l’Etat de la nationalité ou de la résidence, sauf réserve à la section 22 de la convention formulée valablement par cet Etat. Considérant ensuite le cas spécifique de M. Mazilu, elle a exprimé l’avis que l’intéressé continuait à avoir la qualité de rapporteur spécial, qu’il devait de ce fait être considéré comme expert en mission au sens de la section 22 de la convention et que cette section était dès lors applicable à son cas.
Cette vue d’ensemble de l’affaire est donnée uniquement à titre d’information et n’engage en aucune façon la Cour.