Questions d'interprétation et d'application de la convention de Montréal de 1971 résultant de l'incident aérien de Lockerbie (Jamahiriya arabe libyenne c. Royaume-Uni)
VUE D'ENSEMBLE DE L'AFFAIRE
Le 3 mars 1992, la Jamahiriya arabe libyenne a déposé au Greffe de la Cour deux requêtes distinctes introduisant deux instances, contre le Gouvernement des Etats-Unis d’Amérique et contre le Gouvernement du Royaume-Uni, au sujet d’un différend concernant l’interprétation et l’application de la convention pour la répression d’actes illicites dirigés contre la sécurité de l’aviation civile signée à Montréal le 23 septembre 1971, différend qui trouvait son origine dans des actes ayant abouti à l’incident aérien survenu au-dessus de Lockerbie, en Ecosse, le 21 décembre 1988. Dans ses requêtes, la Libye se référait aux accusations contre deux ressortissants libyens, portées respectivement par un Grand Jury des Etats-Unis d’Amérique et par le Lord Advocate d’Ecosse, d’avoir fait placer une bombe à bord du vol 103 de la Pan Am. L’explosion de cette bombe avait provoqué la destruction de l’appareil et la mort de tous ceux qui se trouvaient à bord. La Libye faisait remarquer que les actes allégués constituaient une infraction pénale aux fins de l’article premier de la convention de Montréal, qui, faisait-elle valoir, était la seule convention pertinente en vigueur entre les Parties ; elle soutenait qu’elle avait satisfait pleinement à toutes ses obligations au regard de cet instrument, dont l’article 5 prescrit à l’Etat de prendre les mesures nécessaires pour établir sa compétence à l’égard des auteurs présumés d’infractions se trouvant sur son territoire, dans le cas où ils ne sont pas extradés ; qu’il n’existait aucun traité d’extradition en vigueur entre la Libye et les autres Parties ; et que la Libye était tenue, conformément à l’article 7 de la convention, de soumettre l’affaire à ses autorités compétentes pour l’exercice de l’action pénale. La Libye soutenait que les Etats-Unis d’Amérique et le Royaume-Uni violaient la convention de Montréal en rejetant les efforts déployés par la Libye pour régler la question dans le cadre du droit international, y compris la convention de Montréal, en faisant pression sur la Libye pour qu’elle remette les deux ressortissants libyens aux fins de jugement.
Le 3 mars 1992, la Libye a présenté deux demandes distinctes à la Cour, la priant d’indiquer immédiatement certaines mesures conservatoires, à savoir : a) enjoindre aux Etats-Unis et au Royaume-Uni de ne pas prendre contre la Libye de mesures calculées pour exercer sur elle une coercition ou la forcer à livrer les individus accusés à quelque juridiction que ce soit hors de la Libye ; et b) faire en sorte qu’aucune mesure ne soit prise qui puisse porter préjudice de quelque manière aux droits de la Libye en ce qui concerne les instances introduites par les requêtes de la Libye.
Le 14 avril 1992, la Cour a donné lecture de deux ordonnances sur les demandes en indication de mesures conservatoires présentées par la Libye, dans lesquelles elle a dit que les circonstances de l’espèce n’étaient pas de nature à exiger l’exercice de son pouvoir d’indiquer de telles mesures. Dans le délai fixé pour le dépôt de son contre-mémoire, chacun des Etats défendeurs a soulevé des exceptions préliminaires : les Etats-Unis d’Amérique ont déposé, pour leur part, certaines exceptions préliminaires par lesquelles ils ont prié la Cour de dire et juger qu’elle n’a pas compétence et ne saurait connaître de l’affaire ; le Royaume-Uni a déposé, pour sa part, certaines exceptions préliminaires à la compétence de la Cour et à la recevabilité des demandes libyennes. En vertu des dispositions de l’article 79 du Règlement, la procédure sur le fond a été suspendue dans les deux affaires. Par des ordonnances en date du 22 septembre 1995, la Cour a ensuite fixé la date d’expiration du délai dans lequel la Jamahiriya arabe libyenne pourrait présenter, dans chaque affaire, un exposé écrit contenant ses observations et conclusions sur les exceptions préliminaires soulevées, ce qu’elle a fait dans le délai prescrit.
Le 27 février 1998, la Cour a rendu deux arrêts sur les exceptions préliminaires soulevées par le Royaume-Uni et les Etats-Unis d’Amérique. La Cour a tout d’abord rejeté l’exception d’incompétence tirée respectivement par le Royaume-Uni et les Etats-Unis d’Amérique de l’absence alléguée de différend entre les Parties concernant l’interprétation ou l’application de la convention de Montréal. Elle a déclaré qu’elle avait compétence, sur la base du paragraphe 1 de l’article 14 de ladite convention, pour connaître des différends qui opposaient la Libye aux Etats défendeurs en ce qui concerne l’interprétation ou l’application des dispositions de cette convention. La Cour a ensuite rejeté l’exception d’irrecevabilité tirée des résolutions 748 (1992) et 883 (1993) du Conseil de sécurité. Enfin, elle a considéré que l’exception soulevée par chacun des Etats défendeurs au motif que lesdites résolutions auraient privé les demandes de la Libye de tout objet n’avait pas, dans les circonstances de l’espèce, un caractère exclusivement préliminaire.
En juin 1999, la Cour a autorisé la Libye à présenter une réplique, et le Royaume-Uni et les Etats-Unis d’Amérique à déposer une duplique. Ces pièces de procédure ont été déposées par les Parties dans les délais impartis par la Cour et son président.
Par deux lettres datées du 9 septembre 2003, les Gouvernements de la Libye et du Royaume-Uni, d’une part, et de la Libye et des Etats-Unis d’Amérique, d’autre part, ont conjointement notifié à la Cour qu’ils étaient « convenus de se désister [des] instance[s] … et de renoncer à toute action » dans les affaires. Comme suite à ces notifications, le président de la Cour a pris, le 10 septembre 2003, une ordonnance dans chacune des affaires prenant acte du désistement, par accord des Parties, de l’instance, ainsi que de toute action en l’affaire, et prescrivant que l’affaire soit rayée du rôle de la Cour.
Cette vue d’ensemble de l’affaire est donnée uniquement à titre d’information et n’engage en aucune façon la Cour.