Jadhav (Inde c. Pakistan)

VUE D'ENSEMBLE DE L'AFFAIRE

Le 8 mai 2017, l’Inde a déposé une requête introductive d’instance contre le Pakistan au sujet d’un différend concernant les violations alléguées de la convention de Vienne sur les relations consulaires du 24 avril 1963 qui auraient été commises «dans le cadre de la détention et du procès d’un ressortissant indien, M. Kulbushan Sudhir Jadhav», condamné à mort par un tribunal militaire au Pakistan en avril 2017. L’Inde alléguait qu’elle n’avait pas été avertie sans retard de l’arrestation et de la détention de son national. Elle soutenait également que M. Jadhav n’avait pas été informé de ses droits aux termes de l’article 36 de la convention de Vienne sur les relations consulaires et que ses fonctionnaires consulaires n’avaient pas eu la possibilité de communiquer avec son ressortissant alors que celui-ci était incarcéré, en état de détention préventive ou toute autre forme de détention et n’avaient pu s’entretenir et correspondre avec lui et pourvoir à sa représentation en justice. Pour fonder la compétence de la Cour, l’Inde se référait dans sa requête au paragraphe 1 de l’article 36 du Statut de la Cour et à l’article premier du protocole de signature facultative à la convention de Vienne sur les relations consulaires concernant le règlement obligatoire des différends.

En même temps que sa requête, l’Inde a déposé une demande en indication de mesures conservatoires, dans laquelle elle priait la Cour de prescrire au Pakistan de prendre «toutes les mesures nécessaires pour que M. Kulbushan Sudhir Jadhav ne soit pas exécuté» et «qu’il ne soit pris aucune mesure qui puisse porter atteinte aux droits de la République de l’Inde ou de M. Kulbushan Sudhir Jadhav en ce qui concerne toute décision que la Cour pourrait prendre sur le fond de l’affaire».

Par une ordonnance en date du 18 mai 2017, la Cour a prescrit au Pakistan de «prendre toutes les mesures dont [il] dispos[ait]» pour que M. Jadhav ne soit pas exécuté tant qu’elle n’aurait pas rendu son arrêt définitif en l’affaire. Elle lui a également prescrit de porter à sa connaissance toutes les mesures qui seraient prises en application de cette ordonnance. Enfin, elle a décidé de demeurer saisie des questions qui faisaient l’objet de l’ordonnance, jusqu’à ce qu’elle rende sa décision définitive en l’affaire.

Les audiences publiques sur le fond de l’affaire ont été tenues du 18 au 21 février 2019. Dans son arrêt du 17 juillet 2019, la Cour a tout d’abord retracé l’historique du différend, puis conclu qu’elle avait compétence pour connaître des demandes de l’Inde fondées sur des violations alléguées de la convention de Vienne. Elle a ensuite examiné les trois exceptions d’irrecevabilité soulevées par le Pakistan, lesquelles étaient fondées sur les prétendus abus de procédure, abus de droit et comportement illicite de l’Inde. La Cour a conclu que la requête de l’Inde était recevable.

Statuant sur le fond, la Cour a examiné successivement les trois volets de l’argumentation du Pakistan. Estimant qu’aucun d’entre eux ne pouvait être retenu, elle a conclu que la convention de Vienne sur les relations consulaires était applicable en l’affaire «indépendamment des allégations selon lesquelles l’intéressé se serait livré à des activités d’espionnage».

La Cour s’est ensuite penchée sur la conclusion de l’Inde selon laquelle le Pakistan avait agi en violation des obligations que lui impose l’article 36 de la convention de Vienne en ne l’avertissant pas sans retard de la détention de M. Jadhav. Elle a noté que le Pakistan ne contestait pas l’affirmation de l’Inde selon laquelle M. Jadhav n’avait pas été informé de ses droits aux termes de l’alinéa b) du paragraphe 1 de l’article 36 dudit instrument et en a déduit que le Pakistan avait manqué à l’obligation que lui impose cette disposition.

S’agissant du manquement allégué du Pakistan à l’obligation qui lui incombait d’avertir l’Inde, sans retard, de l’arrestation et de la détention de M. Jadhav, conformément à l’alinéa b) du paragraphe 1 de l’article 36 de la convention de Vienne, la Cour a d’abord conclu que, le défendeur n’ayant pas informé M. Jadhav de ses droits, il était tenu d’avertir le poste consulaire de l’Inde de l’arrestation et de la détention de l’intéressé, cette obligation découlant des droits des fonctionnaires consulaires, prévus à l’alinéa c) du paragraphe 1 de l’article 36 de cet instrument, de se rendre auprès du ressortissant, «de s’entretenir et de correspondre avec lui et de pourvoir à sa représentation en justice». La Cour a ensuite constaté que le Pakistan avait notifié à l’Inde le 25 mars 2016 l’arrestation et la détention de M. Jadhav, soit quelques trois semaines après ladite arrestation, et conclu, compte tenu des circonstances particulières de l’affaire, qu’il avait ainsi manqué à l’obligation d’avertir «sans retard» les autorités consulaires, comme l’exige l’alinéa b) du paragraphe 1 de l’article 36 de la convention de Vienne.

La Cour a ensuite examiné la troisième conclusion de l’Inde concernant le manquement allégué du Pakistan à l’obligation de permettre aux autorités consulaires indiennes d’entrer en communication avec M. Jadhav, rappelant à cet égard que «le paragraphe 1 de l’article 36 du Statut de la Cour crée des droits individuels, qui, en vertu de l’article premier du protocole de signature facultative, peuvent être invoqués devant elle par l’Etat dont la personne détenue a la nationalité». Le défendeur n’ayant pas contesté qu’il n’avait permis à aucun fonctionnaire consulaire indien d’entrer en communication avec M. Jadhav, la Cour a estimé que le manquement allégué de l’Inde, qui n’aurait pas apporté son concours à l’enquête menée au Pakistan, ne justifiait pas le refus de ce dernier de permettre aux fonctionnaires consulaires indiens d’entrer en communication avec l’intéressé et que le choix de M. Jadhav d’être représenté par un officier défenseur ne rendait pas superflu le droit desdits fonctionnaires de pourvoir à sa représentation en justice. La Cour en a conclu que le Pakistan avait manqué aux obligations qui lui incombent au titre des alinéas a) et c) du paragraphe 1 de l’article 36 de la convention de Vienne en refusant aux fonctionnaires consulaires de l’Inde la possibilité d’entrer en communication avec M. Jadhav, contrairement au droit qui leur est reconnu de se rendre auprès de celui‑ci, de s’entretenir et de correspondre avec lui et de pourvoir à sa représentation en justice.

Quant à l’affirmation de l’Inde selon laquelle elle avait droit à la restitutio in integrum et à sa demande tendant à ce que la Cour annule la décision du tribunal militaire et prescrive au défendeur de ne pas donner effet au verdict de culpabilité ou à la peine, ainsi qu’à sa demande supplémentaire tendant à ce qu’elle prescrive au Pakistan de prendre des mesures pour annuler la décision du tribunal militaire, libérer M. Jadhav et faciliter son retour en Inde en toute sécurité, la Cour a conclu que ces conclusions de l’Inde ne pouvaient être retenues. Elle a néanmoins a ajouté que le Pakistan était tenu d’assurer, par les moyens de son choix, un réexamen et une révision effectifs du verdict de culpabilité rendu et de la peine prononcée contre M. Jadhav, de manière à ce que soit accordé tout le poids qui sied à l’effet de la violation des droits énoncés à l’article 36 de la convention de Vienne.


Cette vue d’ensemble de l’affaire est donnée uniquement à titre d’information et n’engage en aucune façon la Cour.

Introduction de l'instance


Procédure écrite

17 avril 2018
Disponible en:
Annexes
(Version anglaise seulement) Anglais
17 juillet 2018
Disponible en:
Annexes Volume 1
(Version anglaise seulement) Anglais
Annexes Volume 2
(Version anglaise seulement) Anglais

Procédure orale

Compte rendu 2017/5 (version bilingue)
Audience publique tenue le lundi 15 mai 2017, à 10 heures, au Palais de la Paix, sous la présidence de M. Abraham, président, en l'affaire Jadhav (Inde c. Pakistan)
Procédure/s:Mesures conservatoires
Disponible en:
Traduction
(version bilingue) Traduction
Compte rendu 2017/6 (version bilingue)
Audience publique tenue le lundi 15 mai 2017, à 15 heures, au Palais de la Paix, sous la présidence de M. Abraham, président, en l'affaire Jadhav (Inde c. Pakistan)
Procédure/s:Mesures conservatoires
Disponible en:
Traduction
(version bilingue) Traduction
Compte rendu 2019/1 (version bilingue)
Audience publique tenue le lundi 18 février 2019, à 10 heures, au Palais de la Paix, sous la présidence de M. Yusuf, président, en l’affaire Jadhav (Inde c. Pakistan)
Disponible en:
Compte rendu 2019/2 (version bilingue)
Audience publique tenue le mardi 19 février 2019, à 10 heures, au Palais de la Paix, sous la présidence de M. Yusuf, président, en l’affaire Jadhav (Inde c. Pakistan)
Disponible en:
Compte rendu 2019/3 (version bilingue)
Audience publique tenue le mercredi 20 février 2019, à 15 heures, au Palais de la Paix, sous la présidence de M. Yusuf, président, en l’affaire Jadhav (Inde c. Pakistan)
Disponible en:
Compte rendu 2019/4 (version bilingue)
Audience publique tenue le jeudi 21 février 2019, à 16 h 30, au Palais de la Paix, sous la présidence de M. Yusuf, président, en l’affaire Jadhav (Inde c. Pakistan)
Disponible en:

Ordonnances

Fixation de délais : mémoire et contre-mémoire
Disponible en:
Fixation de délais : réplique et duplique
Disponible en:

Arrêts


Résumés des arrêts et des ordonnances

Résumé de l'arrêt du 17 juillet 2019
Disponible en:

Communiqués de presse

9 mai 2017
La République de l'Inde introduit une instance contre la République islamique du Pakistan et prie la Cour d'indiquer des mesures conservatoires
Disponible en:
10 mai 2017
Instance introduite par la République de l'Inde contre la République islamique du Pakistan - Communication urgente adressée au Pakistan par le président en vertu du paragraphe 4 de l'article 74 du Règlement de la Cour
Disponible en:
10 mai 2017
Instance introduite par la République de l'Inde contre la République islamique du Pakistan - Demande en indication de mesures conservatoires - La Cour tiendra des audiences publiques le lundi 15 mai 2017
Disponible en:
15 mai 2017
Jadhav (Inde c. Pakistan) - Fin des audiences publiques sur la demande en indication de mesures conservatoires présentée par l'Inde - La Cour est prête à entamer son délibéré
Disponible en:
17 mai 2017
Jadhav (Inde c. Pakistan) - Demande en indication de mesures conservatoires - La Cour rendra son ordonnance demain, jeudi 18 mai 2017
Disponible en:
18 mai 2017
Jadhav (Inde c. Pakistan) - Mesures conservatoires - La Cour prescrit à la République islamique du Pakistan de prendre «toutes les mesures dont [elle] dispose» pour que M. Kulbhushan Sudhir Jadhav, ressortissant indien, ne soit pas exécuté tant qu'elle n'aura pas rendu sa décision définitive en l'affaire
Disponible en:
16 juin 2017
Affaire (Inde c. Pakistan) - Fixation des délais pour le dépôt des premières pièces de la procédure écrite
Disponible en:
19 janvier 2018
Affaire (Inde c. Pakistan) - La Cour autorise la présentation d’une réplique de l’Inde et d’une duplique du Pakistan et fixe les délais pour le dépôt de ces pièces de procédure écrite
Disponible en:
3 octobre 2018
Jadhav (Inde c. Pakistan) - La Cour tiendra des audiences publiques du lundi 18 au jeudi 21 février 2019
Disponible en:
21 février 2019
Affaire Jadhav (Inde c. Pakistan) - Fin des audiences publiques - La Cour est prête à entamer son délibéré
Disponible en:
4 juillet 2019
Affaire Jadhav (Inde c. Pakistan) - La Cour rendra son arrêt le mercredi 17 juillet 2019 à 15 heures
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17 juillet 2019
Affaire Jadhav (Inde c. Pakistan) - La Cour dit que la République islamique du Pakistan a, dans le cadre de la détention et du procès d’un ressortissant indien, M. Kulbhushan Sudhir Jadhav, agi en violation des obligations que lui impose l’article 36 de la convention de Vienne sur les relations consulaires
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