Public sitting held on Tuesday 29 September 2009, at 10 a.m., at the Peace Palace, Vice-President Tomka, Acting President, presiding, in the case concerning Pulp Mills on the River Uruguay (Argentina

Document Number
135-20090929-ORA-01-00-BI
Document Type
Number (Press Release, Order, etc)
2009/21
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Non-Corrigé
Uncorrected

CR 2009/21

Cour internationale International Court
de Justice of Justice

LAAYE THHEGUE

ANNÉE 2009

Audience publique

tenue le mardi 29 septembre 2009, à 10 heures, au Palais de la Paix,

sous la présidence de M. Tomka, vice-président,

faisant fonction de président

en l’affaire relative à des Usines de pâte à papier sur le fleuve Uruguay
(Argentine c. Uruguay)

________________

COMPTE RENDU

________________

YEAR 2009

Public sitting

held on Tuesday 29 September 2009, at 10 a.m., at the Peace Palace,

Vice-President Tomka, Acting President, presiding,

in the case concerning Pulp Mills on the River Uruguay
(Argentina v. Uruguay)

____________________

VERBATIM RECORD
____________________ - 2 -

Présents : M. Tomka, vice-président, faisant fonction de président en l’affaire
KoMroMa.

Al-Khasawneh
Simma
Abraham
Keith

Sepúlveda-Amor
Bennouna
Skotnikov
Crinçade

Yusuf
Grejugesood,
BeTroresz.
juiesesa, ad hoc

Cgoefferr,

⎯⎯⎯⎯⎯⎯ - 3 -

Present: Vice-President Tomka, Acting President
Judges Koroma

Al-Khasawneh
Simma
Abraham
Keith

Sepúlveda-Amor
Bennouna
Skotnikov
Cançado Trindade

Yusuf
Greenwood
Judges ad hoc TorresBernárdez
Vinuesa

Registrar Couvreur

⎯⎯⎯⎯⎯⎯ - 4 -

Le Gouvernement de la République argentine est représenté par :

S. Exc. Mme Susana Ruiz Cerutti, ambassadeur, conseiller juridique du ministère des relations
extérieures, du commerce international et du culte,

comme agent ;

S. Exc. M. Horacio A. Basabe, ambassadeur, directeur général de l’Institut du service extérieur de
la nation, ancien conseiller juridique du ministère des relations extérieures, du commerce
international et du culte, membre de la Cour permanente d’arbitrage,

S. Exc. M. Santos Goñi Marenco, ambassadeur de la République argentine auprès du Royaume des
Pays-Bas,

comme coagents ;

M.AlainPellet, professeur à l’Université Paris Ouest, Nanterre-La Défense, membre et ancien
président de la Commission du droit internatio nal, membre associé de l’Institut de droit
international,

M. Philippe Sands QC, professeur de droit internatio nal au University College de Londres, avocat,
Matrix Chambers, Londres,

M. Marcelo Kohen, professeur de droit internationa l à l’Institut de hautes études internationales et
du développement, Genève, membre associé de l’Institut de droit international,

Mme Laurence Boisson de Chazournes, professeur de droit international à l’Université de Genève,

M. Alan Béraud, ministre à l’ambassade de la République argentine auprès de l’Union européenne,
ancien conseiller juridique du ministère des affaires étrangères, du commerce international et du
culte,

M.DanielMüller, chercheur au Centre de droit in ternational de Nanterre (CEDIN), Université de
Paris Ouest, Nanterre-La Défense,

comme conseils et avocats ;

M. Homero Bibiloni, secrétaire d’Etat à l’environnement et au développement durable,

comme autorité gouvernementale ;

M. Esteban Lyons, directeur national du contrôle environnemental du secrétariat à l’environnement
et au développement durable,

M.HowardWheater, docteur en hydrologie de l’ Université de Bristol, professeur d’hydrologie à
l’Imperial College, directeur de l’Imperial College Environment Forum,

M. Juan Carlos Colombo, docteur en océanographie de l’Université de Québec, professeur à la

faculté des sciences et au musée de l’Université de La Plata, directeur du Laboratoire de chimie
environnementale et de biogéochimie de l’Université de La Plata,

M.NeilMcIntyre, docteur en ingénierie envir onnementale, maître de conférences à l’Imperial

College, Londres, - 5 -

The Government of the Republicof Argentina is represented by:

H.E. Ms Susana Ruiz Cerutti, Ambassador, Legal Adviser to the Ministry of Foreign Affairs,
International Trade and Worship,

as Agent;

H.E. Mr. Horacio A. Basabe, Ambassador, Director of the Argentine Institute for Foreign Service,
former Legal Adviser to the Ministry of Fore ign Affairs, International Trade and Worship,
Member of the Permanent Court of Arbitration,

H.E. Mr. Santos Goñi Marenco, Ambassador of the Argentine Republic to the Kingdom of the
Netherlands,

as Co-Agents;

Mr.AlainPellet, Professor at the University of Paris Ouest, Nanterre-La Défense, member and
former Chairman of the International Law Co mmission, associate member of the Institut de
droit international,

Mr. Philippe Sands QC, Professor of International Law at the University College London, Barrister
at Matrix Chambers, London,

Mr.MarceloKohen, Professor of International Law at the Graduate Institute of International and
Development Studies, Geneva, associate member of the Institut de droit international,

Ms Laurence Boisson de Chazournes, Professor of International Law at the University of Geneva,

Mr.AlanBéraud, Minister at the Embassy of the Argentine Republic to the European Union,
former Legal Adviser to the Ministry of Foreign Affairs, International Trade and Worship,

Mr. Daniel Müller, Researcher at the Centre de droit international de Nanterre (CEDIN), University

of Paris Ouest, Nanterre-La Défense,

as Counsel and Advocates;

Mr. Homero Bibiloni, Federal Secretary of Environment and Sustainable Development,

as Governmental Authority;

Mr.EstebanLyons, National Director of Environm ental Control, Secretariat of Environment and
Sustainable Development,

Mr. Howard Wheater, PhD in Hydrology at Bristol University, Professor of Hydrology at Imperial

College and Director of the Imperial College Environment Forum,

Mr. Juan Carlos Colombo, PhD in Oceanography at the University of Québec, Professor at the
Faculty of Sciences and Museum of the National University of La Plata, Director of the

Laboratory of Environmental Ch emistry and Biogeochemistry at the National University of
La Plata,

Mr.NeilMcIntyre, PhD in Environmental Engineering, Senior Lecturer in Hydrology at Imperial

College London, - 6 -

Mme Inés Camilloni, docteur en sciences atmosphériques, professeur de sciences atmosphériques à
la faculté des sciences de l’Université de Buenos Aires, maître de recherche au conseil national

de recherche (CONICET),

M.GabrielRaggio, docteur en sciences techni ques de l’Ecole polytechnique fédérale de
Zürich (ETHZ) (Suisse), consultant indépendant,

comme conseils et experts scientifiques ;

M.HolgerMartinsen, ministre au bureau du conseiller juridique du ministère des affaires

étrangères, du commerce international et du culte,

M. Mario Oyarzábal, conseiller d’ambassade, bureau du conseiller juridique du ministère des
affaires étrangères, du commerce international et du culte,

M.FernandoMarani, secrétaire d’ambassade, amb assade de la République argentine au Royaume
des Pays-Bas,

M.GabrielHerrera, secrétaire d’ambassade, bureau du conseiller juridique du ministère des

affaires étrangères, du commerce international et du culte,

MmeCynthiaMulville, secrétaire d’ambassade, bureau du conseiller juridique du ministère des
affaires étrangères, du commerce international et du culte,

Mme Kate Cook, avocat, Matrix Chambers, Londres, spécialisée en droit de l’environnement et en
droit du développement,

Mme Mara Tignino, docteur en droit, chercheur à l’Université de Genève,

M.MagnusJeskoLanger, assistant d’enseignement et de recherche, Institut de hautes études
internationales et du développement, Genève,

comme conseillers juridiques.

Le Gouvernement de l’Uruguay est représenté par :

S. Exc. M. Carlos Gianelli, ambassadeur de la République orientale de l’Uruguay auprès des

Etats-Unis d’Amérique,

comme agent ;

S. Exc. M. Carlos Mora Medero, ambassadeur de la République orientale de l’Uruguay auprès du

Royaume des Pays-Bas,

comme coagent ;

M.AlanBoyle, professeur de droit international à l’Université d’Edimbourg, membre du barreau
d’Angleterre,

M. Luigi Condorelli, professeur à la faculté de droit de l’Université de Florence,

M.LawrenceH.Martin, cabinet Foley Hoag LLP, membre du barreau de la Cour suprême des
Etats-Unis d’Amérique, du barreau du district de Columbia et du barreau du Commonwealth du
Massachusetts, - 7 -

MsInésCamilloni, PhD in Atmospheric Sciences, Professor of Atmospheric Sciences at the
Faculty of Sciences of the University of Bue nos Aires, Senior Researcher at the National

Research Council (CONICET),

Mr.GabrielRaggio, Doctor in Technical Scienc es of the Swiss Federal Institute of Technology
Zurich (ETHZ) (Switzerland), Independent Consultant,

as Scientific Advisers and Experts;

Mr.HolgerMartinsen, Minister at the Office of the Legal Adviser, Ministry of Foreign Affairs,

International Trade and Worship,

Mr.MarioOyarzábal, Embassy Counsellor, Office of the Legal Adviser, Ministry of Foreign
Affairs, International Trade and Worship,

Mr. Fernando Marani, Embassy Secretary, Embassy of the Argentine Republic in the Kingdom of
the Netherlands,

Mr. Gabriel Herrera, Embassy Secretary, Office of the Legal Adviser, Ministry of Foreign Affairs,

International Trade and Worship,

Ms Cynthia Mulville, Embassy Secretary, Office of the Legal Adviser, Ministry of Foreign Affairs,
International Trade and Worship,

MsKateCook, Barrister at Matrix Chambers, London, specializing in environmental law and law
relating to development,

Ms Mara Tignino, PhD in Law, Researcher at the University of Geneva,

Mr.MagnusJesko Langer, teaching and research assistant, Graduate Institute of International and
Development Studies, Geneva,

as Legal Advisers.

The Government of Uruguay is represented by:

H.E. Mr. Carlos Gianelli, Ambassador of the Eastern Republic of Uruguay to the United States of

America,

as Agent;

H.E. Mr. Carlos Mora Medero, Ambassador of the Eastern Republic of Uruguay to the Kingdom of

the Netherlands,

as Co-Agent;

Mr.AlanBoyle, Professor of International Law at the University of Edinburgh, Member of the
English Bar,

Mr. Luigi Condorelli, Professor at the Faculty of Law, University of Florence,

Mr. Lawrence H. Martin, Foley Hoag LLP, Member of the Bars of the United States Supreme
Court, the District of Columbia and the Commonwealth of Massachusetts, - 8 -

M. Stephen C. McCaffrey, professeur à la McGeorge School of Law de l’Université du Pacifique,
Californie, ancien président de la Commission du droit international et rapporteur spécial aux

fins des travaux de la Commission relatifs aux cours d’eau internationaux,

M. Alberto Pérez Pérez, professeur à la faculté de droit de l’Université de la République,
Montevideo,

M.PaulS.Reichler, cabinet Foley Hoag LLP, membre du barreau de la Cour suprême des

Etats-Unis d’Amérique et du barreau du district de Columbia,

comme conseils et avocats ;

M. Marcelo Cousillas, conseiller juridique à la direction nationale de l’environnement, ministère du
logement, de l’aménagement du territoire et de l’environnement de la République orientale de

l’Uruguay,

M. César Rodriguez Zavalla, chef de cabinet au ministère des affaires étrangères de la République
orientale de l’Uruguay,

M.CarlosMata, directeur adjoint des affaires juri diques au ministère des affaires étrangères de la

République orientale de l’Uruguay,

M. Marcelo Gerona, conseiller à l’ambassade de la République orientale de l’Uruguay au Royaume
des Pays-Bas,

M. Eduardo Jiménez de Aréchaga, avocat, admis au barreau de la République orientale de
l’Uruguay et membre du barreau de New York,

MA. damKahn, cabinet Foley Hoag LLP, membre du barreau du Commonwealth du
Massachusetts,

M.AndrewLoewenstein, cabinet Foley Hoag LLP, membre du barreau du Commonwealth du
Massachusetts,

MmeAnaliaGonzalez, LLM, cabinet Foley Hoag LLP, admise au barreau de la République
orientale de l’Uruguay,

Mme Clara E. Brillembourg, cabinet Foley Hoag LLP, membre des barreaux des districts de
Columbia et de New York,

MmeCicelyParseghian, cabinet Foley Hoag LLP, membre du barreau du Commonwealth du
Massachusetts,

M. Pierre Harcourt, doctorant à l’Université d’Edimbourg,

M. Paolo Palchetti, professeur associé à la faculté de droit de l’Université de Macerata,

Mme Maria E. Milanes-Murcia, MA, LLM, JSD Candidate à la McGeorge School of Law de
l’Université du Pacifique, doctorante à l’Université de Murcia, admise au barreau d’Espagne,

comme conseils adjoints ;

Mme Alicia Torres, directrice nationale de l’environneme nt au ministère du logement, de
l’aménagement du territoire etde l’environnement de la République orientale de l’Uruguay,

M.EugenioLorenzo, conseiller technique à la direction de l’envir onnement du ministère du

logement, de l’aménagement du territoir e et de l’environnement de la Ré publique orientale de
l’Uruguay, - 9 -

Mr.StephenC.McCaffrey, Professor at the McGeorge School of Law, University of the Pacific,
California, former Chairman of the Interna tional Law Commission and Special Rapporteur for

the Commission’s work on international watercourses,

Mr.AlbertoPérezPérez, Professor at the Faculty of Law of the University of the Republic,
Montevideo,

Mr.PaulS.Reichler, Foley Hoag LLP, Member of the Bars of the United States Supreme Court

and the District of Columbia,

as Counsel and Advocates;

Mr. Marcelo Cousillas, Legal Counsel at the Nationa l Directorate for the Environment, Ministry of
Housing, Territorial Planning and Environment of the Eastern Republic of Uruguay,

Mr.CésarRodriguezZavalla, Chief of Cabinet, Ministry of Foreign Affairs of the Eastern
Republic of Uruguay,

Mr.CarlosMata, Deputy Director of Legal Affair s, Ministry of Foreign Affairs of the Eastern
Republic of Uruguay,

Mr.MarceloGerona, Counsellor of the Embassy of the Eastern Republic of Uruguay in the
Kingdom of the Netherlands,

Mr. Eduardo Jiménez de Aréchaga, Attorney at law, admitted to the Bar of the Eastern Republic of

Uruguay and Member of the Bar of New York,

Mr. Adam Kahn, Foley Hoag LLP, Member of the Bar of the Commonwealth of Massachusetts,

Mr.AndrewLoewenstein, Foley Hoag LLP, Member of the Bar of the Commonwealth of
Massachusetts,

MsAnaliaGonzalez, LLM, Foley Hoag LLP, adm itted to the Bar of the Eastern Republic of
Uruguay,

MsClaraE. Brillembourg, Foley Hoag LLP, Member of the Bars of the District of Columbia and
New York,

MsCicelyParseghian, Foley Hoag LLP, Me mber of the Bar of the Commonwealth of
Massachusetts,

Mr. Pierre Harcourt, PhD Candidate, University of Edinburgh,

Mr. Paolo Palchetti, Associate Professor at the School of Law, University of Macerata,

Ms Maria E. Milanes-Murcia, M.A., LLM; JSD Candidate, McGeorge School of Law, University
of the Pacific; PhD Candidate, University of Murcia; admitted to the Bar of Spain,

as Assistant Counsel;

Ms Alicia Torres, National Director for the Environment at the Ministry of Housing, Territorial

Planning and Environment of the Eastern Republic of Uruguay,

Mr.EugenioLorenzo, Technical Consultant for the National Directorate for the Environment,
Ministry of Housing, TerritorialPlanning and Environment ofthe Eastern Republic of Uruguay, - 10 -

M.CyroCroce, conseiller technique à la direction de l’environnement du ministère du logement, de

l’aménagement du territoire etde l’environnement de la République orientale de l’Uruguay,

Mme Raquel Piaggio, bureau de la gestion des eaux (O.S.E.), consultante technique à la direction de
l’environnement du ministère du logement, de l’aménagement du territoire et de l’environnement

de la République orientale de l’Uruguay,

M.CharlesA.Menzie, PhD., Principal Scientist et directeur d’EcoSciences Practice chez Exponent,
Inc., à Alexandria, Virginie,

st
M. Neil McCubbin, Eng., Bsc. (Eng), 1 Class Honours, Glasgow, Associate of the Royal College of
Science and Technology, Glasgow,

comme conseillers scientifiques et experts. - 11 -

Mr. Cyro Croce, Technical Consultant for the National Directorate for the Environment, Ministry of
Housing, Territorial Planning and Enviro nment of the Eastern Republic of Uruguay,

Ms Raquel Piaggio, Water Management Administration ⎯ O.S.E. ⎯ Technical Cons ultant for the
National Directorate for the Environment, Mini stry of Housing, Territorial Planning and
Environment of the Eastern Republic of Uruguay,

Mr. Charles A. Menzie, PhD., Principal Scientist and Director of the EcoSciences Practice at
Exponent, Inc., Alexandria, Virginia,

Mr. Neil McCubbin, Eng., BSc. (Eng), 1st Class Honours, Glasgow, Associate of the Royal College
of Science and Technology, Glasgow,

as Scientific Advisers and Experts. - 12 -

Le VICE-PRESIDENT, faisant fonction de pr ésident: Veuillez vous asseoir. L’audience

est ouverte et je donne la parole à M. le professeur Philippe Sands. You have the floor, Sir.

SANr.DS:

V. VIOLATIONS OF A RTICLES 36 AND 41SA: PROOF ,DAMAGE TO

THE ECOSYSTEM AND ENVIRONMENT

I. Introduction

1. Thank you, Mr. President. Mr.President, Members of the Court, you heard yesterday

from ProfessorWheater and ProfessorColombo on the compelling evidence of ecological change

and the harms caused to the environment of the River Uruguay by discharges emanating from

Botnia. You are now going to hear from me after a night swimming in the depths of raw data on

the legal consequences to be drawn from that ev idence, and the legal standards that we say

Uruguay is bound to follow under the Statute. And I am going to deal with this by reference to two

central issues. First, the issue of reverse flow: did those taking the decision on the Uruguayan side

to authorize the plant know about reverse flow and its magnitude and, if so, did they adequately

take it into account in taking their decisions? And second, the issue pollution: has the Botnia

plant caused harmful pollution or ecological change, by contributing, for example, to violations of

CARU or other standards, or indeed by referenc e to any other criteria? In this respect the

relationship between the Botnia plant and Febr uary’s unprecedented algal bloom has emerged as a

key factual issue that divides the Parties. nd in addressing these two issues I will also try to

respond to Judge Bennouna’s important question.

2. Now, before getting to these issues, may I make a small number of preliminary points.

3. First, we see no need to spend much more time on what Articles 1, 36 and 41 do or do not

mean. You have heard fully fro m both Parties on those issues. ProfessorBoyle’s interpretation

was unpersuasive, and he frequently departed from the actual text of the provisions in order to

support his rather narrow interpretations. You will recall, for example, that he described as “bold”

Argentina’s argument that Article 36 commits Urugua y to avoid “any ecological change”. That is

curious, because Argentina was merely using the very words of Article 36, which do indeed oblige

1
CR 2009/18, p. 22, para. 35. - 13 -

the parties to prevent “ any ecological change”, it does not say “significant ecological change” or

“harmful ecological change”, it says “any ecological change”. This is the language that the Parties

agreed to and it is the language that the Court must interpret and apply ⎯ “any” means “any”.

4. A second preliminary: it is now clear that the Parties are a bit like ships passing in the

night, they have got rather different approaches to this case’s centre of gravity. Much of Uruguay’s

argument is focused on the technological splendour of the plant, said to be one of the very finest on

this planet. Now that may or may not be true. But it misses the point. The key issue is not the

plant or its technology, it is the river: can this river accommodate this level of discharges at this

location? The differences between the Parties may be seen in their reliance on outside expertise:

they have offered you an expert on technological matters but they have offered you no one who has

any expertise on rivers. And you will have noticed too that not one person with scientific expertise

has addressed the Court on behalf of Uruguay. For a case of this kind, whether it is before this

Court or any other international tribunal, I am not aware of any other State that has taken such a

minimalist approach to litigating a case that has cer tain complex technical and scientific aspects.

By contrast, we have offered you expertise on the river. The bottom line for Argentina is that this

is a case not about technological fixes, it is a case about the character of the river: there is no pulp

mill, we say, that should be located at this precise location. You are not called upon to decide on

the merits or demerits of any particular technology that is used in this plant.

5. That is not to say however, that the issue of applicable legal standard s is not relevant. It

is, and that brings me to a third preliminary point: Uruguay has changed its case on the applicable

law. You will recall what Uruguay argued three years ago: in the provisional measures phase

Uruguay told you that it was imposing on Botnia “an obligation to meet standards set down by the

2
law of the European Community” . Botnia’s discharges, Mr. Reichler told you, and I quote again

“will meet the same strict requirements that are enforced in Europe” 3. You heard nothing more on

that subject last week from Uruguay. The claim has been abandoned, recognition by Uruguay that

Botnia is discharging effluents in a manner that plainly violates European Union water quality

standards and that it is or has discharged banned substances ⎯ including nonylphenols ⎯ that are

2
CR 2009/12, p. 49, para. 26 (Sands, referring to CR 2006/47, p. 27 (Boyle)).
3Ibid., p. 53. - 14 -

banned by the European Union. Seemingly counsel for Uruguay now recognizes that they just

went too far last time out. They have rolled back their case. Their lack of information as to what

the plant is discharging or has discharged has caused them to be more cautious, on some occasions.

But the European Union claim is not one that Urugua y is free to abandon: it has declared that it

would apply European Union standards and others ⎯ Argentina, the IFC, this Court ⎯ have relied

on that declaration, which was not made just in this courtroom. In your folder you have got various

examples of other commitments to apply European Union law. In November2007, for example,

when the Botnia plant started to operate, the President and Chief Executive Officer of Botnia,

Mr.ErkkiVaris, said that the plant “will operate complying with the most strict standards set by

the European Union” 4. That claim is demonstrably false. In July2009, when UPM took over

Botnia’s ownership of the plant, UPM issued a press release again stating “the mill operates in

compliance with the strictest standards set by the European Union” 5. That claim too is

demonstrably false. The undertaking was also given to the IFC which has relied on it, as the IFC

website makes clear. You will find on the website the following statement: “The plant will also

meet . . . European Union standards” 6. Now, you may well ask yourself why is counsel for

Argentina making such a song and dance about this poi nt? The answer is very simple: if Botnia,

Uruguay and the IFC invoke European Union sta ndards, then Argentina is entitled to invoke

European Union standards and this Court is entitle d to hold Uruguay to those very same European

Union standards, in addition to the standards of CARU and other applicable international norms.

Mr. President, back in 1974 this Court confirmed in the Nuclear Tests case that “declarations made

by way of unilateral acts, concer ning legal or factual situations, may have the effect of creating

legal obligations”, and that an undertaking that is given publicly and with an intent to be bound will

be binding ( Nuclear Tests (New Zealand v. France), Judgment, I.C.J. Reports 1974 , p.472,

para.46). Uruguay’s undertaking was made very publicly and very formally, in this very

courtroom. Counsel left no doubt as to Uruguay’s intention to be bound. Uruguay cannot now

4
RA, Anns., Vol. III, Ann. 51.
5Available at http://w3.upm-kymmene.com/upm/internet/cms/upmcms.nsf/prv/upm_and_Mets%…

sign_a_letter_of_intent_on_new_ownership_structure_of Botnia.
6See http://www.ifc.org/ifcext/lac.nsf/content/Uruguay_Pulpmills_FAQs. - 15 -

abandon an inconvenient undertaking, any more than it is free to abandon, without some cost at

least, its earlier pleadings on the issues of fact.

6. Now, this was not the only point on which Uruguay changed its argument last week. By

way of fourth preliminary point, it is now appa rent that Uruguay has completely changed its case

on the facts. It has changed its case on reverse flow, for example. I will come back to that. It has

changed its case on the impact of the pollutants. It now accepts, for example, that the Esteros de

Farrapos protected Ramsar wetland site can be affe cted by discharges from Botnia. “Regrettably”,

counsel for Uruguay told the Court last Monday, “this information was not available to me and I

7
therefore could not make it available to the Court in 2006” . Now, when counsel for Uruguay says

“this information”, what is he referring to? He cannot be referring to the location of the Ramsar

site. He cannot be referring to the fact that the site is connected to the river. He is referring to

reverse flow, a feature of the river on which he and every other counsel for Uruguay were, it seems,

blissfully unaware back in 2006.

II. Reverse flow

7. And this brings us to reverse flow. There is now no disagreement between the Parties that

this is a key issue, because it relates to the river’ s ability to disperse the effluent. And so, there are

two issues of fact for the Court to decide: first, did those authorizing the plant and its financing

know about reverse flow and stagnation and their magnitude ⎯ did they know about it? Secondly,

did they take into account the full extent of reve rse flow? Mr.Reichler dealt with these issues at

great length 8. The centrepiece of his submission last week was the claim that the evidence showed

that Uruguay, and I quote him: “presumed that the river flows in reverse substantially more

frequently than Argentina did, by 29 per cent of the time to 23 per cent of the time” 9. Now on this

occasion, of course, we are happy to play the num bers game with Uruguay, but I have to tell you

that this claim came somewhat out of the blue for Argentina. It reflect s a 180º turn in Uruguay’s

case. It is important. Let us go slowly through the relevant materials.

7
CR 2009/16, p. 37, para. 66 (Boyle).
8
CR 2009/16, pp. 41-46, paras. 8-22.
9Ibid., p. 46, para. 20. - 16 -

8. We can start with what Uruguay has previously said it knew. We have been through the

main volumes ⎯ each of the Counter-Memorial and the Rejoinder ⎯ and we have been unable to

find a single place in which Uruguay claims to have argued that it relied on a reverse flow rate of

29 per cent, or indeed any significant reverse flow at all. In fact, that figure of 29 per cent comes

from a document that is buried away in AnnexR11 of Uruguay’s Rejoinder 10 and never again

mentioned. The document was issued by DINAMA in response to concerns raised by Argentina

about phosphorus. It provides no explanation as to how the figure was arrived at. In fact, it seems

11
to have come from modelling prepared for Botnia’s environmental impact assessment , modelling

that, ProfessorWheater explained yesterday ( CR2009/20), was grossly inadequate, based on

insufficient data and the use of a two-dimensional model that was inappropriate for the reverse

flow problem. But, whatever its source ⎯ we have not been able to completely sort it out ⎯ the

crucial point is that it establishes ⎯ this is the crucial point ⎯ that, as at December 2005, when the

information was given to Argentina, the Uruguayan authorities ⎯ or at least some Uruguayan

authorities ⎯ had received information about a very high rate of flow reversal. That was, of

course, before the provisional measures phase. Mr. Reichler’s confirmation now is of very, very

great significance: it confirms prior knowledge a bout the magnitude of flow reversal. So, the

crucial question becomes: did they then rely on the 29 per cent figure?

9. It is abundantly clear that they did not. Let us start with what Uruguay has said in its

written pleadings in this case. They certainly do not indicate that decisions were taken on the basis

of that conservative, severe flow reversal rate that Mr.Reichler would now have you believe

informed decision making. In the Counter-Memoria l, for example, we found no discussion of that

figure or its implications for the assessment of Botnia’s impacts. We see ⎯ and Professor Reichler

took you to this yesterday ⎯ references to “rare flow reversals”, at paragraph 4.122; low flow, as

being an “unusual ‘worst case’” scenario and “a rare, short-term event”; or, paragraph 5.64, flow

reversals are being “expected to occur only a few ti mes per year or less”. Then, at paragraph 6.76,

Uruguay states that Argentina’s evidence “overstate s the reversal frequency”. Now look, I could

just go on and on and on but I am not going to. The Rejoinder does exactly the same thing. The

10
RU, Vol. II, Ann. R11, p. 2, para. 5.
1Ann. VIII to Additional Report No. 5 of Botnia’s EIA, CMU, Ann. 164. - 17 -

Rejoinder rubbishes Professor Rabinowich’s work on reverse flow and states that “it is undisputed

that most flow reversals are much less extreme and shorter in time” than those alleged by

Argentina’s experts 12. Until last Monday ⎯ until last Monday ⎯ Uruguay’s entire case was that

Argentina’s evidence on flow reversal was just plain wrong and that all the effluents would be

discharged quickly and efficiently downstream. And now it has changed its position and it accepts

that our evidence on flow reversal is correct. The Court will have noticed that Uruguay did not

challenge the accuracy of the flow reversal char ts that Argentina provided on 30 June 2009. And

obviously it cannot do so. The charts are based on actual data, on actual measurements. Uruguay

has no measurements of its own on which to re ly and that may be why we get into various

procedural difficulties. It does not know or unders tand the raw data. All it has for Fray Bentos is

the one day of monitoring that occurred on 16 December 2003, that I referred to in the first round 13.

Uruguay has no data. Since Uruguay accepts now that our data is correct, there is no longer a

dispute between the Parties on this key factual issue and that makes your task as a court much

easier.

10. The consequence of the concession, which we are happy to take, is that Mr. Reichler and

his team now find themselves in very great difficulty. They are in the unhappy position of having

to make an impossible choice. Mr.Reichler could have stuck to his previous argument that

Uruguay was wrong on reverse flow but, of course, he would have known that he would lose that

argument and, with it, the main plank of his entire case: Argentina would then easily be able to

show that Uruguay’s authorizations, and the actions of the IFC, were based on manifestly

erroneous assumptions about the ability of the river to disperse the effluent. So he chose the only

other route available to him: he discarded the entirety of pleadings of his Party and he accepted

that Argentina was right on reverse flow. What he now has to do is persuade the Court that,

contrary to his previous assertions, all Uruguay’s decisions, as well as those of the IFC, were taken

on the basis of assumption that reverse flow was of an even greater magnitude than Argentina says

is the case. This has taken Uruguay to the edge of a precipice and to the point of disaster. If

Mr.Reichler is unable to persuade you that those decisions were taken on the basis of the true

12
RU, para. 6.20.
1CR 2009/14 p. 61, para 12. - 18 -

magnitude of reverse flow, then he and Uruguay are in this situation: it will have been established

that Uruguay knew about reverse flow all along and that then ⎯ wilfully it seems ⎯ they ignored

its magnitude and effect, and its consequences for the project. That, Mr. President, would be a very

serious matter. But that, it seems, on the evidence, is what has happened.

11. Mr.Reichler would have you believe that the important decisions began only in

14
January 2006 . That was no accidental slip on his part. He needs to push back the date of

authorization to support his other arguments, that somehow Argentina had previously agreed to a

project ⎯ which, of course, it never did ⎯ and to fatten the file of environmental assessments on

which he would like to be able to argue that the decisions were based. In fact the act of

authorization occurred on 14February2005, wh en Uruguay’s Ministry of Housing, Land Use

Planning and Environmental Affairs granted Botn ia its AAP, following which work on the site

began 1. In many respects that was the most important of all the decisions, because it approved the

location of the plant, and it allowed the finance to start flowing into Uruguay. If accurate

information on flow reversal was crucial at any pa rticular moment, then it was before the site was

selected. So, were reverse flow assumptions of 29percent or 23percent relied on for that

decision? They were not. The February 2005 decision ⎯ the AAP ⎯ was based on two

documents: Botnia’s environmental impact as sessment of 31March2004, together with some

16
additional reports , and DINAMA’s assessment of 11February2005. Botnia’s EIA does not

discuss the implications of an elevated level of flow reversal 1. DINAMA’s assessment merely

picks up the conclusions of the 2004EIA. It refers to low flow which, it says, has an “annual

frequency of occurrence less than 10 per cent”. The DINAMA assessment of February 2005, it is

true, does mention reverse flow but only in passing, as having been observed as a “short term”

occurrence “lasting less than one day”. It is not raised as a serious issue by DINAMA, no

consequences are drawn from its observations, and there is no reference to any figure relating to the

18
magnitude . In no further assessment thereafter did Uruguay’s authorities give effect to the

1CR 2009/16, p. 43, para. 5.
15
Resolution 63/2005, AM, Anns., Vol VII, Ann. 10; MA, para. 2.54.
16
MA Anns., Vol. V, Ann. 7, pp. 373-390; and CMU, Vol. VII, Anns. 161-164 and 167.
1CMU, Vol. VII, Ann. 164.

1CMU, Vol. II, Ann. 20, p. 9, Secs. 4.1 and 3.2 respectively. - 19 -

consequences of a reverse flow at the level of 23percent or 29percent, or anything that came

close to that.

12. So much for the formal decision-making process. I say formal because in our submission

it is now plain that the decision to locate the plant at the site was taken much earlier, well before

any assessments were carried out, so that all that followed was merely an ex post facto justification

of an early political decision to locate the site at that place. Mr.Reichler says Uruguay only

proceeded to construction on the basis of that high reverse flow assumption. As we have seen, this

is totally inconsistent with the way Uruguay has pleaded its case, totally unsupported by any

evidence. The pleadings confirm that all the relevant decisions were taken on the basis of

assumptions that flow reverse occurred only rarely, if at all. Those assumptions are based on

erroneous models. Again, the key point is th is: Uruguay’s authorities proceeded to rely on

assumptions about flow reversal that were wrong ⎯ they wrongly assumed the capacity of the river

to disperse the effluents. The 29 per cent figure may later have been shared with Argentina, as part

of the GTAN process, but there is no evidence that it was ever relied on by any decision maker in

Uruguay. Uruguay has consistently relied on revers e flow as being “rare” and exceptional. Why

should this be? The only possible conclusion is that a 29percent flow reversal rate would have

been very unhelpful to the project’s prospects. In fact, it would have killed the project from the

outset. No reasonable State would authorize a project of this kind at a location where the river flow

is so unhelpful to the dispersal of pollutants. That is all the more so when the waters at that very

location are already known to be eutrophic, as DINAMA recognized. So the figure was buried

away and it only re-emerged last week, in the face of Uruguay’s very real difficulties with our data.

13. Now, this project needed IFC money, so the approval and review processes moved to

that international arena. And let us go briefl y through the same step-by-step process. The IFC

approval for the project came in November 2006, and it followed the preparation of a series of four

reports: a draft Cumulative Impact Study, then the first Hatfield Report, then a final Cumulative

Impact Study, and then the second Hatfield Report. The question is, did these reports alert the IFC

to a reverse flow rate of 29 per cent or 23 per cent? They did not. It is not a case of the IFC getting

it wrong so much as those it retained and then relied upon getting it wrong. - 20 -

14. The first document, the draft Cumulative Impact Study ⎯ published December 2005.

What does it say? It states that reverse flow of surface waters occurs only on “rare occasions” that

have only been “briefly recorded at Fray Bentos”, and it then adds that “these rare events of reverse

19
flow last only for a few hours” .

15. The draft CIS was reviewed by Mr.McC ubbin and his colleague in the first Hatfield

Report, published on 27 March 2006. Now that report raised concerns about the distribution of the

effluent plume. It recommended that effluent dispersal modelling should be proceeded with as

soon as possible, taking into account effluent te mperature and the various river flow patterns

including reverse flow and zero flow in order to define more precisely the mixing zone 2.

16. One assumes that Uruguay would be keenly in terested in this process. This would have

been the moment for Uruguay to jump in and say “Hang on a second, chaps, you’ve got the flow

reversal rate completely wrong.” Did they do that? No, they did not do that. Did they hand over

the information ⎯ that Mr.Reichler now says Uruguay had ⎯ that showed flow reversal rate at

29 per cent. No, Uruguay did not do that.

17. The final CIS was released on 12 October 2006. And it refers to new modelling that was

carried out, yet ⎯ amazingly ⎯ it reaches the very same conclusions as the original draft. Lo and

behold, the new modelling comes up with ⎯ exactly the same result. It concludes that “On rare

occasions the flow can reverse direction and travel upstream for short periods of time. These flow

21
reversals may occur a few times per year or less frequently...” Rare? A few times a year or

less? That does not sound quite like the 29 per cent that Mr. Reichler told you about last week, that

has now been embraced by Uruguay as the basis of all its decision making.

18. So, what happened next? The second Hatfield Report was completed on 14October

2006 ⎯ two days after the final CIS was released. Th e final CIS runs to 221pages, with nearly

800pages of technical annexes. Yet, despite the amazingly short period of time available,

Mr. McCubbin and his colleague somehow managed to complete and review the work in a timely

and helpful basis. On pollutant dispersion in the river, they found that the “revised plume

1MA Anns., Vol. V, Ann. 6, p. 24, para. 3.3.
20
MA Anna., Vol. V, Ann. 9
2CMU, Vol. VIII, Ann. 173, p. 3.4, para. 3.2.1. - 21 -

modelling is well done”, and that it provides “excelle nt plume configurations and dilution ratios at

22
important river flows” . Well, perhaps it was “well done”, bu t it seems to have got the results

completely and totally wrong, at least in the sense that it now directly contradicts Mr.Reichler’s

new-found acceptance of 29 per cent flow reversal. The Hatfield authors signed off on a CIS report

that found flow reversal to be “rare”, occurring only “a few times a year or less frequently”. Again,

did Uruguay rush to correct the error? It did not, and it did not do so for the obvious reasons that it

agreed with an assessment that was helpful to the project. What did the authors of the Hatfield

Report have to say about river flow in its conclusions? Nothing. An attentive reader of the entirety

of the final Hatfield Report will find just one line on river flow: “The Rio Uruguay is a very large

23
river.” Thatisit. “Averylargeriver.” And, on the basis of this in-d epth analysis, the IFC

approved the financing of the project a few weeks later, on 21 November 2006.

19. So, did Uruguay rely and take into account the 29 per cent figure? Uruguay did not. Did

the IFC rely on the 29 per cent figure? It did not. At every stage of the process the decisions were

based on the assumption that reverse flow was “rare”. “Information was not available to me”,

counsel for Uruguay confessed last week. Well, it seems that Uruguay withheld the 29percent

figure ⎯ even from him ⎯ back in 2006. And that is presumably why he did not appreciate how

far upstream Botnia’s discharges would go: he now accepts they can go upstream. And it seems

too that Mr.McCubbin did not have reverse flow at the forefront of his mind, or that the IFC did

not have accurate information on reverse flow at the forefront of that organization’s mind when it

approved the project. Yet, Mr.Reichler rec ognizes this is crucial information, because it

determines where the discharges will go. Much of them, as I said two weeks ago, go upstream.

That is what the data shows, that is what th e simulations show. And Uruguay now accepts this.

Maybe they do not accept it, maybe next week, or later this week they will try to persuade you that

somehow a 29percent flow has no impact at all on the dispersion of the pollutants from Botnia.

That frankly would not be a serious argument at this stage. Having accepted reverse flow at a

serious level, Uruguay is bound to accept its conseque nces. And with that it is not a great leap to

22
CMU, Vol. VIII, Ann. 178, Sec. A16, p. 3.
2Ibid. - 22 -

the conclusion that the plant should never have been located at this place. That is the reality at the

heart of this case, and the issue and the facts are dispositive.

III. Independent experts

20. Now, before moving on to the issue of pollution this may be a good moment to respond

to Judge Bennouna’s important questions. He aske d first what the Partie s understood by the term

“independent expert”, and second, and in the context of this case, whether an expert retained by

one of the Parties may be treated as an “independent expert”. We listened, of course, with great

interest to Mr.Reichler’s presentation on this subj ect, the gist of which was to say that anyone

retained by one of the Parties could not be said to be “independent” in the sense of

Judge Bennouna’s question. Now, I can understand why he would ta ke that approach, since it has

the very great merit of leaving this side of the r oom rather bare of independent expertise, whereas

his side of the room would have a raft of distant independent experts whom he says you should

blindly follow, despite the fact that they have written no reports for these proceedings, have not

considered any of Argentina’s evidence in this case, and have not been brought to address this

Court in any way. Would that it were so simple to follow Mr. Reichler’s approach.

21. We are not before an English court or a court in Washington, D.C. We are before the

International Court of Justice, so Judge Bennouna’s question falls to be answered by reference to

this Court’s rules and this Court’s practice, and we say that they point to a different, more nuanced

conclusion. The Court’s Statute and Rules do, of course, refer to experts, but not to “independent

24
experts” . There seems to be no difference between the Parties as to what is meant by an expert.

Professor Salmon’s Dictionnaire de droit international public defines an expert as including:

“Une personne choisie pour ses connaissances techniques et qui peut ê
tre
chargée dans un procès:

a) Par une partie ou par le tribunal d’éclai rer ce dernier sur certaines questions
litigieuses . . .

b) Par une partie25de faire partie de sa délégation et de participer aux
plaidoiries. . . ”

24
Statute of the Court, Arts. 43, 50, 51; Rules of the Court, Arts. 57, 58, 62, 63, 64, 65, 67, 68, 70 and 71.
25J. Salmon (ed)., Dictionnaire de droit international public, 2001, p. 483. - 23 -

So that seems like a pretty decent definition of ex pert. What about the concept of independence?

To our mind the issue of independence falls to be assessed principally by reference to two

considerations: first, the individual’s relationship to the party or parties and, second, his or her

relationship to the matters that are in dispute in a particular case. This is consistent with the

approach that is taken by the Dictionnaire, which defines a person’s “independence” as “le fait

pour une personne . . . de ne pas dépendre d’aucune au tre autorité que la sienne propre . . . ou tout

le moins, de ne pas dépendre de l’Etat sur le territoire duquel elles exercent leurs fonctions . . .” 26

Now, having regard to these considerations, we have got no difficulty at all in accepting that the

written reports prepared for these proceedings, fo r example, by Dr.Charles Menzie, should be

treated as those prepared by an independent expe rt, since (as far as we are aware) he has no

personal interest in the outcome of this dispute (having not, you understand it, been involved in the

IFC decision-making process) and he is not an employee of Uruguay’s Government. His views are

entitled to be accorded the consideration of those emanating from an independent expert, even if, as

we are advised, they are wrong and manifestly so (and I would say that we note with interest that

we can quite understand that Uruguay would not now have him address the Court, since he has

expressed, clearly and unambiguously, that extreme lo w flow is a “rare” occurrence, and this, of
27
course, is now contradicted by the real argument adopted by Uruguay) . But, in the same way

ProfessorColombo and ProfessorWheater are experts and they are independent: they are not

employees of Argentina’s Government, and they have no personal interest in the outcome of these

proceedings. They are, in fact, respected senio r academics, with international reputations to

protect. Having written reports that were submitte d in these proceedings, there is nothing at all

unusual in Dr. Menzie and Professor Colombo and Professor Wheater having been asked to join the

delegations of the States that respectively sought their expertise.

22. But others who serve on the delegations of either Party are not to be treated as

independent experts, not necessarily because they are not expert but because they are not

independent. An employee of the State cannot be treated as independent, not least because the

relationship with the State is such that the Stat e could be in a position to exercise influence on the

26
Ibid., p. 570.
2CMU, p. 443, para. 6.93. - 24 -

views that are expressed. This is not in any way to criticize our own Mr.Esteban Lyons, or

Uruguay’s Ms Alicia Torres, but simply to recognize the reality that they are permanent, full-time

employees of their respective Governments, they are part of government, they are part of the State

apparatus, they are not independent of it.

23. For different reasons, we say that Mr.McCubbin has to be treated differently from

Dr.Menzie or ProfessorColombo or Professor Wheater. Mr.McCubbin is not independent

because he has got an interest in the outcome of these proceedings: on 14 October 2006 he signed

the Hatfield Report, which was the basis for the IFC’s financing decision. It was he and one

colleague, Dr.William Dwernychuk, who approved the final CIS report, and they approved the

conclusion that reverse flow was a rare occurrence. So when he appears before you as counsel, he

is not doing what everyone else has done, namely, explaining the details of the written reports that

they have submitted to the Parties and that have been part of the record. Mr.McCubbin has not

written a report: he is defending his own decision as part of the IFC process, and he has a direct,

personal interest in this Court ruling in such a way as to uphold his views. And, for that reason, we

say he cannot be treated as independent. Indeed, we were pretty surprised that Uruguay would

wish to present him in any capacity other than as a witness for cross-examination. I can give you

an example: his situation is no different from one that many of us in this room have faced as

experts in international law who asked to provide as sistance to an international organization that is

involved in an issue that is in dispute between two States. That happens pretty often. We do not

later turn up on the delegation of one of those Stat es involved in the same dispute. We do not do it

because to do so would raise profound issues of judgment and of confidentiality, and they would be

bound to raise questions as to the individual’s i ndependence during the conduct of the earlier work

for the international organization. And, for that reason, we have very serious concerns about

Mr. McCubbin’s role in this matter, his relationship with Uruguay, and a situation which appears to

be one of revolving doors in which people go in an d out of different relationships with different

parties involved on that side of the room.

24. Now, it is entirely a matter for Urugua y to decide how it wishes to compose its

delegation. If Uruguay does not want to benefit from expertise on river hydrology, if it does not

want the Court to hear directly from anyone with expertise in rivers, including those from its own - 25 -

universities, that is entirely a matter for Uruguay. But let us be very clear, Mr. McCubbin does not

have that expertise. His training and professional experience is as an engineer. He is not an expert

on rivers or on hydrology or on modelling (and in fact it seems that Uruguay has no one with that

expertise on its delegation). We ask ourselves the question therefore, on what basis could he opine

to the IFC that this river could bear this level of pollution, or that the hydrographic models were, as

he put it, “excellent”? Is he an expert on modelling? Well, we have not been provided with a copy

of his curriculum vitae, but it seems that he is not. And there is no indication that Dr. Dwernychuk,

his co-author on the Hatfield Report, is an expert on modelling or river flow: he has got a doctorate

in biology and a masters in zoology. Yet the IFC relied on Messrs McCubbin and Dwernychuk to

determine that the river could bear this level of pollution, because reverse flow was “rare”. That

strikes us as a less th an ideal situation. And this is all the more so when you consider

Mr.McCubbin’s background, which appears to be so mewhat closely related to the pulp industry.

Now, let me be clear. This is not in any sense a criticism of him or of the pulp industry, which

provides a service from which we all benefit and rely: as Argentina has repeatedly said, it has no a

priori objection to pulp mills, it is just that we think this mill should not be at this location. No, our

growing concern is how someone so closely associ ated with the promotion of the industry could

have been selected to play such a key role in the IFC process. Now, on that point, Mr. President,

Members of the Court, you will recall that ProfessorWheater has referred to the Gunn pulp mill

project in Tasmania, the pulp mill that has generated huge public oppositi on and whose effluent

will not be discharged into the river but instead will be piped over a great distance to the coast, and

then a further 3km from the coast out to sea where it will be dumped. Well, Mr.McCubbin has

expressed views on that project. Indeed, in March 2005, shortly before he became involved in this

project, he was invited to Tasmania to talk about the environmental impacts of that project. Who

invited him? He was invited by APPITA, th e Australian Pulp and Paper Industry Technical

Association, whose members include at least one co mpany, Mezzo, that is involved in the plant at

Fray Bentos 28. It seems his role in Tasmania was to a ssuage the concerns of local citizens. You

can get a flavour of how he went about carrying out that task for this industry association, and the

28
http://www.appita.com.au/Sustaining%20Members#M. - 26 -

rigour of his approach on the riverine issues, from an interview he gave to the Australian

Broadcasting Corporation, the transcript of which is in your judges’ folder at tab 3. We leave you

to read it at your leisure. It is a most telling interview.

25. Mr.President, we would have had no difficulty at all with Mr.McCubbin ⎯ or anyone

else from EcoMetrix or Hatfield having a personal interest in the outcome of this ca
se ⎯ being

brought to the Court for examination and cross-examination, in accordance with Article57. That

would have been a perfectly proper procedure, and it would have allowed the views of those

persons to be tested. Uruguay coul d have gone down that route, it chose not to. In the absence of

such testing, we simply do not see how their work can be accorded any greater weight than that of

Dr.Menzie or ProfessorColombo or ProfessorWheate r, as Mr.Reichler submits. And there is a

related point, that Mr. Reichler did not touch on at all. The practise of this Court has long been to

allow States to include independent scientific or technical experts on their delegations and to permit

them to address the Court as counsel. The fact that they do so does not diminish the independent

quality of their analysis, or the analysis that is set out in any written report that may have been

written and submitted to the Court. A number of us in this room, Mr. President, well recall the case

involving Hungary and Slovakia. Both sides included on their delegations distinguished academics

who addressed the Court on their reports or on areas of expertise. There was never any suggestion

that their views lacked independence. The Court heard them, and the Court then determined how

persuasive were their analyses and opinions. Many other States have followed the same approach.

They have done so because a Court such as this , assembling different legal traditions and different

approaches to evidentiary and expe rt issues, necessarily has to adopt a certain flexibility in its

approach to the collection and use of evidence and e xpertise. This is all the more so with a Bench

that is so large in number, which makes it less well-suited to the conduct of examination and

cross-examination, and where it seems the time availa ble for oral hearings is limited. States have

to be sensitive to the realities and practicalitiesof international litigation, and one cannot assume

that any particular legal culture or tradition can simply be transposed from that national system to

this Court. The approach that Mr.Reichler ur ges upon you would require a significant change to

the Court’s established practise. It would mean that authors of reports submitted in the written

phase would have to be put forward for examination and cross-examination if their reports were to - 27 -

be given any weight. On technically complex cases such as this, that would mean months of

hearings. It is not immediately apparent to us that this is a route that the Court necessarily wants to

take.

26. For all these reasons, we invite you to reject Uruguay’s approach and confirm the

established practise of the Court. In response to JudgeBennouna’s question, individual experts

such as Dr.Menzie, ProfessorColombo and ProfessorWheater are to be treated as independent,

and their views to be accorded such weight and cr edibility as the Court assesses to be appropriate.

You have heard ProfessorColombo and ProfessorWh eater for yourselves, it is for you to assess

their credibility, and the substance of what they say.

IV. Preventing pollution and ecological change

27. I turn now to my next issue, pollution and ecological balance. Now, we welcome

Uruguay’s acceptance of the relevance of the precautionary principle, and confirmation that both

Parties accept that the applicable standard is that re ferred to in Principle 15 of the Rio Declaration.

The principle is applicable as a general rule of international law, and also by incorporation as a

treaty rule through Articles 1 and 41 (a) of the Statute, and we invite you to apply the principle.

28. ProfessorBoyle dealt with the issue of pollution on two occasions. Last Monday he

pinned his flag to the mast of CARU standards: Botnia, he said, is not causing “ any violation of

29
applicable CARU standards” . That is a pretty clear and unambiguous statement ⎯ assuming of

course that the word “any” has its usual meaning, as we understand it to be, and as is reflected in

Article36 of the Statute. Then on Wednesday he took his argument a step further: CARU

30
standards, he said, “serve to define what c onstitutes pollution for the purposes” of the Statute .

The consequence of this is ⎯ and I take his words ⎯ “it can be presumed that water which meets

[CARU standards] is not polluted and that effluent discharges that do not cause [these standards] to

be exceeded are not harmful to the aquatic environment” 31. Now, we do not accept that the

approach is right in those terms, since it would mean that something that was not listed by

29
CR 2009/16, p. 33, para. 50; emphasis added.
30
CR 2009/18, p. 13, para. 7.
31Ibid., pp. 13-14, para. 7. - 28 -

CARU ⎯ nonylphenols for example ⎯ would for that reason alone not ⎯ in its own name ⎯ be

treated as a pollutant. That argument cannot be right.

29. Nevertheless, the argument does have the great merit of simplicity. The trouble with

simplicity is that it is a two-way street, his argument works in reverse. ProfessorBoyle’s logic

necessarily means that discharges that do contribute to the violation of CARU standards, or cause

violations to become even greater, are to be treated per se as discharges that cause harmful

pollution to the aquatic environment and must be stopped. Of course Uruguay makes the argument

because it believes that CARU standards are being met. But are they? It seems that once again

counsel for Uruguay did not have all the information available to it.

30. Let us take ProfessorBoyle on his approach. Let us look at some examples of CARU

standards and, to avoid any controversy, let us take Uruguay’s own monitoring. But, let us not take

DINAMA’s monitoring, which is provided to EcoMetrix for assessment and commentary.

Professor Wheater told you in the first round how selective and misleading is the monitoring data

provided by DINAMA and EcoMetrix ⎯ without mentioning the value of an “independent

assessment” by EcoMetrix that is based on data provided by the Uruguayan Government.

31. No, let us take the monitoring provided by Uruguay’s very own Obras Sanitarias del

Estado ⎯ the OSE ⎯ the national State Water Works. In its new documents provided on

15July2009, Uruguay gave you some of OSE’s monitoring data, but it was outdated: they gave

you the figures from April2007 to November2008. Why did they not give you the figures from

November 2008 to 13 May 2009, the period that covered the algal bloom, even though those

figures were available in Spanish on OSE’s website 32? Curious also that, when they dumped a load

of new documents on us two weeks ago, they di d not include the updated OSE material. And you

are about to find out why. We are happy to provide you with the material, it is in the judges’

folder, in Spanish and in English translation.

32. [Plate on, showing location of sampling point ⎯ to do with Esteban.] Now, the first

point is, where do these figures come from? The OSE results come from the monitoring point

located at the drinking water supply intake pipe for Fray Bentos. You can see that on the screen

32
www.ose.com.uy/a_monitero_fray_bentos.html. - 29 -

now, in blue. And what you see next to it on the left in red is the waste water discharge point for

Fray Bentos. The point that is important here, is that it is located upstream of the Fray Bentos

waste water discharge pipe, but just 3km south of Botnia, 70metres offshore. [Plate off.] Now,

the latest OSE data shows the results of monitori ng in two tables. The first table deals with the

pre-operational period, hopefully set out, from 19 April2007 until 6November2007; the second

table deals with the post-operational peri od, from 13November2007 until 13May2009.

Professor Boyle says that CARU standards are not being violated by BOTNIA, these figures show

that they are and they also show that BOTNIA’s effluents are increasing significantly the levels of

violations. Let us just take two parameters in the time available.

33. The first parameter is dissolved oxygen. Now, dissolved oxygen is a measure of the

amount of oxygen that is dissolved into the river wate r. It is one of those parameters in which you

are looking for a high figure: the higher the figure, the more dissolved oxygen in the river, the

better its ecological status; the lower the figure the gr eater the level of harm to the river. I do not

need to tell you that dissolved oxygen in the river is vital for the life of the river; reduce the

oxygen levels and fish and plants die off and the river’s ecology changes. It is vitally important,

and it is connected to eutrophication. Let us start with the CARU standard. [Plate on.] CARU, as

you will see on the left-hand side, requires there to be at least 5.6milligrammes of dissolved

oxygen in every litre of the river’s water. In the pre-operational period, you can see that already

the average value was below that level ⎯ 4.9milligrammes, already some 12percent below

CARU standards. What happens during the operationa l period? We see that the average has fallen

to 3.8 milligrammes, now more than 30 per cent below CARU standards. And a drop is also shown

33
in ProfessorColombo’s measurements, at levels that also violate CARU standards . Botnia’s

chemical and biological discharges are taking oxyge n out of the water, they are causing the levels

of oxygen to drop. You will see also on the chart maximum values ⎯ that means the highest

recorded values during the period ⎯ and you will note, and we do with some concern, that those

highest recorded values have dropped in the pre- operational period of 8 milligrammes per litre, to

6.3 milligrammes per litre, that is ju st above CARU standards. That is a clear violation of CARU

3New Documents Submitted by Argentina, 30 June 2009, Chap.3, see Executive Summary, para.2, and

Sec. 3.2.3. - 30 -

standards. There is the evidence for you, and it is also a clear sign that ecological change is on the

way. [Plate off.]

34. The second parameter is phenolic substances. [Plate on.] This is a different example.

Here, there were no pre-existing violations, the Botnia plant has caused violations to occur. In the

first example, of course, the Botnia discharges ha ve caused the violations to become worse. As

you can see on the screen, the CARU standard for phe nolic substances is 1 microgramme per litre.

Now you can see what happened in the pre-opera tional phase. The concentrations of phenolic

substances were less than one, in other words they were so low that they could not be detected,

either as an average or even as a maximum value. What has happened since the plant went into

operation? First you have got the averages, 3microgrammes per litre. Now that is already three

times higher than CARU standards. And now look at a headline figure ⎯ maximum values:

20.7 microgrammes per litre. Phenolic substances have reached levels that are 20 times higher than

CARU standards, that is a 2,000 per cent exceedance. [Plate off.]

35. Now let us look to a third parameter, phosphorus. And this was a subject on which

ProfessorBoyle was notably skittish. He accepted that phosphorous levels were “too high” even

34
before the plant began to operate . In fact, as we have said, both Parties agree, the river’s waters

were eutrophic when Uruguay first authorized the plant on 14February2005 ⎯ that is why this

plant would never have been authorized in any European Union member State. ProfessorBoyle

was eager to tell you that there were no CARU standards on phosphorus, and he even suggested

35
that this was due to Argentina’s actions . Actually, I can correct him ⎯ it was Uruguay that

stopped the adoption by CARU of standards on phos phorus, and it did so rather recently. In 2005

36
Argentina proposed adding phosphorus standards to the CARU Digest . The following year

Uruguay blocked the proposal because it was included in another proposal that would have

committed CARU to take a holistic ecological approach to its activities ⎯ an attitude that Uruguay

34
CR 2009/16, p. 33, para. 52.
3CR 2009/18, p. 16, para 13.

3See CARU Minute 05/2005, Report No. 253 of the U ndercommission of Water Quality and Pollution
Prevention, p.1032, attaching as Annex C a report by the Argentine delegate Lucio Janiot recommending that
phosphorous standards be included in the Digest, pp. 1042-1045. - 31 -

did not wish to subscribe to 37. What ProfessorBoyle could not quite bring himself to say,

however, was that the levels of phosphorus were not only “too high” but that they violated

Uruguay’s standards, which they do. He told you that since the plant went into operation the levels

of phosphorus in the river have not increased. That is not true. We have provided the figures from

Professor Colombo’s monitoring that shows that le vels of soluble reactive phosphorus (SRP) have

increased, and that ProfessorWheater has explaine d why Mr.Reichler’s efforts to minimize this

data reveal an evident difficulty in dealing with more data on that side of the river. But we do not

need to rely on Professor Colombo’s figures, we can again rely on the OSC’s figures, on Uruguay’s

figures.

36. What do these show? [Plate on.] Well, let us begin with Uruguay’s limits. On the

left-hand side you can see Uruguyan Decree 253/79 sets maximum limits for phosphorus of

0.025milligrammes per litre. OSE figures show a pre-operational average of phosphorus in the

waters off the Botnia plant of 0.08 milligrammes per litre, already more than three times above

Uruguay’s limits. What happens after operations begin? The averages go up. Levels increased to

0.09 milligrammes per litre. And that is a 12 pe r cent increase on pre-operational levels, but more

to the point, the 0.01 increase is almost 50 per cent of the limit that is permitted by Uruguay’s own

law. So on what basis does Professor Boyle stand before you and tell you that there have been no

increases in phosphorous levels? The increases b ecome even more dramatic when you look at

maximum values. Pre-operation, the maximum values of phosphorus were 0.109 milligrammes per

litre, that is to say, four times above Uruguay’s maximum permitted limit. What happens after the

plant begins to operate? The maximum value in creases to 0.54 milligrammes per litre. That is

more than 20 times higher ⎯ 20 times higher ⎯ than Uruguay’s own limits. So I ask counsel for

Uruguay, how they can say, with a straight face, that there have been no increases ⎯ no

increases ⎯ when their client’s own figures say otherwise? How can they say ⎯ in relation to

dissolved oxygen and phenolic substances ⎯ that there are no violations of CARU standards?

How can they stand before you and say that, when there are abundant and increasing violations of

3See CARU Minute 07/2006, Report No. 264 of the U ndercommission of Water Quality and Pollution

Prevention, p. 02442. - 32 -

those standards? You can sort of already hear th e refrain of the anti-Edith Piaf song: “Oui, je

regrette beaucoup encore une fois, je n’avais pas l’information . . .” [Plate off.]

37. It has to be said that consistency is not a defining feature of Uruguay’s case. Nor is

clarity. In fact, it often seems that Uruguay and its counsel simply do not know what is coming out

of this plant. Their approach to the emblematic issue of nonylphenols illustrates the point. We all

heard ⎯ we all heard Mr. Reichler last week: he told the Court that Uruguay was “convinced” that

there “is” no use of nonylphenols ⎯ note that he did not say there “has never been” any use of

nonylphenols. And then he went on to say, if Botnia is using nonylphenols, Uruguay will put a

stop to it38. That was a very telling remark. He does not have a clue. They do not know what is

coming out of the pipe. This Court decides cas es on the basis of evidence, not on the basis of

conviction. The evidence is overwhelming ⎯ overwhelming ⎯ that Botnia has used nonylphenols

and may still be using nonylphenols. Separately, there have also been dramatic increases in

phenolic substances, three times above permitted CARU levels. Uruguay has never provided any

explanation as to how it gets the lipophilic s ubstances out of the eucalyptus wood chips. Two

weeks ago I invited them to provide a detailed acc ount of all the chemicals the plant uses in its

cleaning processes and has used since 2007. Have they given it to us? No! Have they given it to

you? No! On that, at least, there is a certain consistency, since Argentina has long been asking for

information of this kind and it has long not been available. In fact, in October 2005, in the course

of the GTAN process, Argentina requested inform ation relating to “the production process of the

Botnia project”. Uruguay responded as follows: “[ B]y virtue of the fact that the information

available to the Argentinian delegation is the same that is available to the Uruguayan delegation,

the request had to be forwarded to the company. No corresponding response has been received to

39
date.” In January2006 Uruguay admitted the info rmation requested by Argentina had been

requested from Botnia but said only that “[Botnia] had responded according to the progress of their

40
project” . No information, we are still waiting for it.

3CR 2009/17, p. 24, para 28.
39
CMU, Anns., Vol. V, Ann. 145, Sec. V.
4CMU, Anns., Vol. V, Ann. 154, p. 2. - 33 -

The Court will have detected ⎯ four years on ⎯ a persistent pattern: regretfully, the information

is not available to me, Botnia has it but the State does not. But reading statements of this kind one

might almost be drawn to the unhappy inference th at Uruguay has, in effect, just handed over the

management of this issue ⎯ and the management of the River Uruguay ⎯ to Botnia. So imagine

our surprise last week when we read an inte rview from a leading Uruguayan politician, a former

cabinet minister who is now the governing party’s leading candidate to succeed to the presidency.

What does he say? Let me quote: “The waters of the River Uruguay are the responsibility of the

Finns.” That is what Jose Mujica said two weeks ago: “The waters of the River Uruguay are the

responsibility of the Finns. They are not the r esponsibility of the Uruguayan efficiency or the

Argentinian efficiency.” And he went on: “The Finnish are not clumsy, they are very careful and

41
care [about the environment], much more than any of us.”

38. Mr.President, it seems that he was not speaking in jest. The Government of Uruguay

does not know how this plant operates and is unable to obtain the information from Botnia. That is

why the lawyers on that side of the room keep ge tting into such difficulty, as they do, for example,

on nonylphenols and on other matters.

39. Mr.President, it is plain that the Botnia plant is causing harmful pollution.

Professor Colombo has provided overwhelming eviden ce to show that the algal bloom was caused

by the Botnia plant. Uruguay had nothing to say ⎯ nothing ⎯ about the presence of eucalyptus

fibres and nonylphenols and coliforms associated with pulp mills in the algal blooms. Uruguay had

nothing to say about the presence of cells in nu mbers that vastly exceed CARU standards. And

Uruguay’s own account of the source of the algal ex plosion has been thoroughly dismantled: they

failed to take account of reverse flow issues; they do not understand the data; they knew nothing

about reverse flow, it turns out, and, if they did, they did not pass it on to their own counsel or to

the IFC; they have got the wind direction wrong; they have underestim ated the occurrence of

serious odour events; and now we learn that they cannot even interpret satellite data properly; they

find chlorophyll where there are sediments. These are pretty serious failings for any State; they do

suggest an inherent latent difficulty with scientific and technical matters.

4El País , 16Sep. 2009 (available at: http://www.elpais.com.uy/090916/ pnacio-442324/politica/argentina-

turismo-y-las-pasteras-son-incompatibles. - 34 -

40. Mr. President, you do not have to take the step of applying European Union law. I have

shown you the clearest evidence that the plant is using and is discharging harmful pollutants that

have resulted in violations or fu rther and greater violations of CA RU standards. That is the case

for dissolved oxygen, for phenolic substances, on o ccasion for algae too. It is also the case for

phosphorus, by reference to Uruguay’s standards. There are many other examples I could give.

On Professor Boyle’s approach this is all we have to show to persuade you on our Article 41 case,

and we have shown it plainly. There is no way around the evidence. Let us take Professor Boyle’s

words and let us invert them: “[I]t can be presu med that water that does not meet CARU standards

is polluted and effluent discharges that cause thes e standards to be exceeded or further exceeded

42
are harmful to the aquatic environment.” With these discharges, with these violations of CARU,

of Uruguay standards, of European Union standard s, and with the consequential algal bloom, the

diminishing levels of oxygen, also comes the ecological change that Article36 commits Uruguay

to avoid absolutely.

V. Conclusions

41. Mr.President, Members of the Court, that brings me to my conclusion. Uruguay has

made much of its entitlement to exercise its right of sovereignty. Those rights are not, however,

absolute. We can put it no better than did the arbitral tribunal in the Iron Rhine case, which ruled

that a State “may exercise its right of sovereignty... unless this would conflict with... treaty

rights”43. In the present case the treaty rights are t hose set forth in the 1975Statute, and they

include Argentina’s rights not to be subject to pollu tion in violation of Article 41, and the right to

hold Uruguay to its obligation to co-ordinate thr ough the Commission to avoid “any change in the

ecological balance”. As has been aptly written, the Court has rejected the argument that

“obligations assumed under a valid ly concluded treaty can no longer be observed because they

have proved inconvenient” ( Gabčíkovo-Nagymaros Project (Hungary/Slovakia), Judgment, I.C.J.

Reports 1997, separate opinion of JudgeKoroma, p.144). The procedural obligations which we

say have been violated are not an end in themse lves; they are a means to achieve, amongst other

42
CR 2009/18, pp. 13-14, para. 7.
4Arbitration regarding the Iron Rhine Railway, Belgium/Netherlands, Arbitral Award, The Hague, 24 May 2005,
Chap. V, para. 160. - 35 -

commitments, those set forth in these two Articl es, and, of course, to achieve “optimum and

rational utilization” of the river. If those obligations had been followed then the kinds of issues on

which Uruguay has got itself into such difficulty ⎯ the magnitude of reverse flow, the violation of

CARU standards ⎯ might well have been avoided. The fact that those obligations were not

followed can have no impact on the continued currency and effect of Articles 36 and 41.

42. Mr. President, we have all come to appreciate the singular importance of this case. At its

heart lies the well-being of an important river. The propensity of counsel for Uruguay to overstate

their case has now put them in considerable difficu lty. For five years Uruguay proceeded on the

basis that reverse flow was rare. Since last week they would have you believe they proceeded on a

different basis. The case they have pleaded says otherwise. “The only thing worse than being

talked about is not being talked about,” Oscar Wilde once said ⎯ and they never talked about a

29percent reverse flow figure. Uruguay simply did not take it into account. And that failure

means they have brought themselves into violati on of Articles36 and 41. It also means that

Botnia’s effluents have been taken upstream wh ere they are now accumulating: phosphorus and

phenolic substances ⎯ way beyond limits ⎯ , dissolved oxygen levels falling. A few months ago

Botnia’s polluting discharges caused a massive, unprecedented toxic algal bloom. The evidence

shows the plant is discharging ⎯ has discharged ⎯ banned nonylphenols. No doubt in our

view ⎯ no doubt at all ⎯ that Articles 36 and 41 have been violated and they are being violated on

a daily basis. If those provisions are to mean anything, then it is the responsibility of this Court to

stop the discharges, at this location at least. That is a historic responsibility, but it is one that

44
requires the Court to do no more than is required by Uruguay’s own law , namely to stop all the

discharges from this plant into this section of the river. The historic responsibility now falls to you,

Mr.President and Members of the Court: you can allow the discharges to continue, with all the

ensuing damage that we are told will now follow, or you can stop them.

4See DINAMA, Environmental Impact A ssessment Report for the Botnia Pl ant, 11 Feb. 2005, CMU, Vol. II,
Ann.20, para.8, Conclusions and Recomme ndations, p.33 states: “23. The operati on of the project shall not cause, in
any place of the coast located downstream the effluent, or in OSE’s raw water pump, values exceeding those established
in the following table in relation to parameters of water quality.” (Emphadded.) A level of 0. 5 µg/L is set for

phenolic substances, which is now greatly exceeded. The document goes on to state:
“In case the discharge of effluents of the project causes that the values of water quality parameters
exceed those values indicated in the previous chart, the proponent could only continue with the discharge
if he/she extracts from the receiving body an amouequivalent to the increase, above the permissible
maximum value of the parameter, which causes the discharge he/she is carrying out.” (Emphasis added.) - 36 -

43. Mr. President, Members of the Court, that concludes my submissions this morning. Just

before closing I would like to thank all members on the Argentine team for the really tremendous

assistance they have provided me over the course of the last three years, on scientific and technical

matters in particular, but also legal matters, a nd my excellent colleague Kate Cook for all of the

work she has done over the past three years. I thank you once again for your kind attention, and

invite you to call to the bar Professor Marcelo Kohen.

The VICE-PRESIDENT, Acting President: I thank ProfessorSands for his presentation, et

je passe la parole immédiatement à M. le professeur Kohen pour commencer sa plaidoirie.

M. KOHEN :

VI. LES TENTATIVES URUGUAYENNES DE CONTOURNER

LE STATUT DOIVENT ETRE REJETEES

1. Monsieur le président, Messieurs les jug es, suite à de nombreuses péripéties, l’Uruguay a

finalement choisi sa position à l’égard de l’article 7. Le défendeur a finalement dû accepter qu’il

n’a pas agi conformément à cet article. L’argument de la Partie défenderesse se borne maintenant à

invoquer l’existence de prétendus accords ayant un double but : contourner la procédure du statut et

construire les usines.

2. Il est regrettable de constater que, pour ju stifier cette argumentation, l’Uruguay s’est livré

⎯ quoi qu’il en dise ⎯ à un exercice en règle de démolition du rôle de la CARU dans le système

45
du statut du fleuve . Comme si cette dernière était une coquille vide qui se bornerait à recevoir et

transmettre des notes entre les parties.

e
M 3. Martin a prétendu que ⎯ je cite en traduisant ⎯ «la décision commune de contourner

la CARU n ’a pas été une violation du statut» 4. Partant aussi de cette fausse prémisse, le

professeurCondorelli a opéré un saut procédural spectaculaire, en se plaçant directement à

l’article 12 et prétendant que, par conséquent, il serait inutile «de rouvrir le dossier des obligations

45CR 2009/18, p. 39-48, par. 13-40 (McCaffrey) ; CR 2009/18, p. 49-55, par. 3-22 (Martin).

46Version originale : « the joint decision to bypass CARU was not a violation of the Statute », CR 2009/18, p. 49,
par. 2 (Martin). - 37 -

47
dont les Etats auraient dû s’acquitter envers la CARU» . C’est une manière à peine voilée de

reconnaître que l’Uruguay n’a pas respecté la procédure précédant l’article 12.

4. Ce matin, je vais vous démontrer que les arrangements dont la Partie défenderesse essaie

de se prévaloir n’ont pas du tout la portée qu’elle leur prête, qu’il n’y a jamais eu un accord pour

contourner la CARU et que l’Argentine n’a jama is accepté la construction des usines ENCE et

Botnia. Qui plus est, pour cette dernière usine, tout prétendu accord de la nature de celle voulue

par l’Uruguay serait même matériellement impossible. En définitive, l’Uruguay ne peut échapper

au constat de sa violation flagrante de l’article 7 et suivants du statut.

5. La semaine dernière, nous avons été témo ins des efforts considérables déployés par la

Partie adverse pour brouiller les faits. L’Uruguay a coupé à sa guise le texte de certains documents

dont il s’est servi, tout en ignorant d’autres d’une importance capitale. Je me propose au cours de

cette plaidoirie de rétablir la réalité, telle qu’elle découle du dossier de l’affaire. Chaque fois, je

vais «examiner le contenu réel [des documents] ai nsi que les circonstances dans lesquelles [ils ont

été adoptés]» ( Activités armées sur le territoire du Congo (nouvelle requête: 2002) (République

démocratique du Congo c. Rwanda), exceptions préliminaires, arrêt, C.I.J. Recueil 2006 , par.

49) 48. Monsieur le président, en suivant vos instruc tions, je m’abstiendrai de revenir sur les points

que nous avons développés lors du premier tour de plaidoiries et sur lesquels l’Uruguay est resté

éloquemment silencieux. Ils gardent bien entendu toute leur pertinence. Je me bornerai donc

exclusivement à réfuter les arguments développés par nos contradicteurs la semaine dernière.

6. La situation est simple. Je la résume. D’un côté, il y a un Etat qui décide de ne pas suivre

la procédure du statut et, d’un autre, un Etat qui exige que la CARU soit saisie afin de déclencher la

procédure que les deux Etats ont conventionnellement établie. La CARU, quant à elle, s’est dès le

début placée dans la position qui lui revient: elle a, tant pour l’usine d’ENCE que pour celle de

Botnia, officiellement demandé à l’Uruguay qu’il tr ansmette l’information avant la délivrance des

autorisations 49, mais l’Uruguay n’y a pas répondu. Au contraire, l’Uruguay a délivré les

47CR 2009/19, p. 14, par. 6 et p. 21-22, par. 20 (Condorelli).

48 Essais nucléaires (Australie c. Fr ance), arrêt, C.I.J. Recueil 1974, p. 269-270, pDifférend frontalier
(Burkina Faso/République du Mali), arrêt, C.I.J. Recueil 1986, p. 573-574, par. 39-40.

49ENCE: Note SET-10413_UR du 17 octobre 2002 (mémoire de l’Argentine (MA), livreIII, annexe12),
noteSET-10617-UR du 21avril2003 (MA, livreIII, annexe 16), noteSET-10706-UR du 15août2003 (MA, livreIII,
annexe 18). Botnia : note SET-11037-UR du 16 novembre 2004 (MA, livre III, annexe 36). - 38 -

autorisations sans suivre la procédure du statut. L’Argentine a, chaque fois, protesté contre ces

faits50. C’est ainsi que le différend est né, et c’est comme cela que le différend s’est aggravé à

chaque fois que l’Uruguay a décidé d’octroyer une nouvelle autorisation sans respecter l’article 7.

7. Les arrangements intervenus en2004 et en2005 avaient pour objet de faire sortir

l’Uruguay de l’unilatéralisme et de le faire revenir au respect du statut, et non pas de blanchir ses

violations. Je vais examiner ces arrangements l’un après l’autre.

A. L’arrangement du 2 mars 2004 visait à faire revenir

l’Uruguay à la CARU

8. Voyons tout d’abord l’arrangement du 2 mars 2004. Monsieur le président, contrairement

e
à ce que M Martin a dit mercredi, je ne vois, évid emment, aucun inconvénient à vous exposer son

contenu. Mais à la différence de M eMartin, je vais vous présenter ce texte dans sa totalité et je

n’oublierai pas d’examiner la première étape conve nue dans cet arrangement . Nous constaterons

que nos contradicteurs aiment brûler les étapes . Je vais me servir du seul texte faisant foi

relativement au contenu de cet arrangement, celui du procès-verbal de la réunion de la CARU du

51
15 mai 2004 .

9. [Projection n o 1.] Le voilà à l’écran, vous pouvez aussi le consulter à l’onglet n o6 de vos

e 52
dossiers. Les Parties ont-elles voulu écarter la CARU, comme l’a dit M Martin ? Pourquoi donc

le texte commun de l’arrangement du 2mars2004 n’apparaît qu’au procès-verbal de la réunion

extraordinaire de la CARU, qui marque la fin de sa paralysie? Cela prouve que l’arrangement

visait à réintroduire le projet d’ENCE au sein de la CARU, et non le contraire. Et pas uniquement

pour un plan de monitoring, comme le prétend l’Uruguay 53. Messieurs les juges, qu’indique cet

arrangement comme premier point? Regardez. Que l’Uruguay devra transmettre l’information

50 CARU, procès-verba1l 1/03, session extraordinaire du 17 octobre 2003 (MA, livre III, annexe 5) ;
note MREU 226/03 du 27 octobre 2003 (MA, livre II, annexe 20) ; CARU, session du 11 mars 2005, procès-verbal 3/05,

p. 7-11, point 3.4 (MA, livre III, annexe 31).
51CARU, procès-verbal1/04 (15mai2004), MA, livreIII, annexe24, p. 169-170. Dossier de plaidoiries,
29 septembre 2009, onglet n 6.

52CR 2009/18, p. 57-59, par. 30-36 (Martin).

53CR 2009/18, p. 59, par. 36 (Martin). - 39 -

concernant la cons truction de l’usine 54. [Fin de la projection n o 1; projection n o2.] Et que

trouve-t-on tout de suite dans le procès-verbal de la CARU après le descriptif de l’arrangement du

2 mars ? Une décision, qui vise précisément à appliquer l’arrangement ministériel, et qui impose à

l’Uruguay de transmettre cette in formation à la CARU à travers sa délégation. Cette information

devra ensuite être étudiée par la CARU avant a pprobation; la CARU fera des propositions, que

l’Uruguay devra examiner avec l’entreprise. Et une fois cette procédure achevée, la CARU sera à

nouveau saisie par l’Uruguay 55 !

10. Plutôt que contourner la CARU, comme l’Uruguay le prétend, on peut certainement

affirmer que l’arrangement du 2mars a, au contrair e, renforcé le rôle de la CARU. [Fin de la

projection n o 2 ; projection n 3.] En réalité, Monsieur le président, Messieurs les juges, la

procédure normale que suit la CARU et que vous voyez reflétée dans le tableau projeté à l’écran est

56
loin de circonscrire cette organisation binationale à la fonction d’une simple «boîte aux lettres»

[fin de la projection n o 3].

11. Voilà donc le véritable contenu de l’arra ngement du 2mars, à la lumière du seul texte

officiel et commun aux Parties. Une minute in terne préparée par un diplomate uruguayen et bien

sûr inconnue de l’Argentine, ou encore des déclarations attribuées par la presse à un diplomate

e 57
argentin sur lesquelles s’appuie M Martin , ne peuvent en aucun cas remplacer le texte du

procès-verbal de la CARU qui seul fait foi. Ils ne constituent rien par eux-mêmes. Par ailleurs, si

le conseil de l’Uruguay voulait vraiment savoir de quelle manière le coauteur argentin de

54“On 2 March 2004 the Foreign Ministers of Argentina and Uruguay arrived at an agreement with respect to the
proper course of action on the topic, namely, the Uruguayan Government shall provide the information related to the

construction of the pulp mill, and in relation to the operational phase of the pulp mill, CARU shall carry out the
monitoring of water quality in compliance with its Statut e.” (CARU, procès-verbal1/04 (15mai2004), MA, livreIII,
annexe 24, p. 170 ; [traduction du Greffe].)
55
“Both delegations reasserted that the Foreign Ministers of the Republic of Argentina and the Republic of
Uruguay agreed on 2 March 2004 that Uruguay shall communicate the information related to the construction of the pulp
mill including the Environmental Management Plan. In this sense, CARU shall receive the Environmental Management
Plans for the construction and operation of the pulp mill pr ovided by the company to the Uruguayan Government via the
Uruguayan delegation. Within the framework of its competency, CARU will consider those, taking into account the terms
included in the aforementioned Ministerial Resolution 342/2003, particularly those terms expressly established by the

Ministry of Housing, Land Use Planning and the Environment, such as actions which require additional implementation
and assessment by the company before approval of those, formulating its observations, comments and suggestions, which
shall be transmitted to Uruguay, to be dismissed or decide d with the company. Once said issues are considered, CARU
shall be again informed.” (CARU, procès-verbal 1/04 (15 mai 2004), MA, livre III, annexe 24, p. 170-171, [traduction du
Greffe].)

56MA, p. 55, fig. 2. Dossier de plaidoiries, 29 septembre 2009, onglet n 7.
57
CR 2009/18, p. 57, par. 30 (Martin). - 40 -

l’arrangement interprétait celui-ci, il aurait pu re garder l’intervention du ministre devant la

o
commission des affaires étrangères de la Chambre des députés le 14 avril 2004 [projection n 4] :

«En ce qui concerne M’Bopicuá [l’usine d’ENCE], l’accord auquel nous avons
souscrit avec l’Uruguay aura trois étap es. La première étape s’achève avec
l’approbation des travaux. Cette étape est du domaine d’une instance spécifique, la
commission du fleuve Uruguay (CARU), à ce stade, l’Argentine recevra l’ensemble
58
de l’information de la part de l’Uruguay.»

[Fin de la projection n 4.]

12. Il est vrai que l’arrangement évoque une deuxième phase opérationnelle et c’est

d’ailleurs la seule qui ait retenu l’attention du conseil de l’Uruguay. Mais mentionner la phase

opérationnelle ne signifie pas qu’elle a été approuvée par avance. Toute interprétation contraire

viderait la première phase de toute substance, à savoir que l’information fournie par l’Uruguay doit

être examinée par la CARU et l’Argentine. Et ceci vaut a fortiori pour la troisième phase, celle des

mesures de contrôle supplémentaires au cas où le projet serait approuvé. Or, Monsieur le président,

et ce «or» est un grand «mais», les Parties ne sont jamais arrivées à ces étapes, parce que l’Uruguay

n’a jamais transmis à la CARU l’information requise par la première phase et donc, celle-ci n’a

jamais pu entreprendre ce qui a été convenu lors de la réunion extraordinaire du 15 mai 2004.

13. Donc, il n’y a pas eu de nouvelle information, pas de possibilité pour la sous-commission

de procéder à des études, pas de possibilité pour la CARU de se prononcer, pas de possibilité

d’envoyer l’avis de la commission à l’Uruguay, pas de saisine ultérieure de la CARU par

l’Uruguay et pas de décision prise par la CARU ouvrant la voie à la suite de la procédure.

14. Nos contradicteurs ont persisté avec le peu d’arguments qu’ils ont pour tenter de justifier

leur comportement. Ils veulent nous faire croire qu’ envisager la possibilité de la construction et de

la mise en service d’une usine signifie automatiquement que cette construction et cette mise en

service aient été acceptées par avance. Mais tout cela, Monsieur le président, doit être le fruit

d’une étude, d’une évaluation et d’une décision ! Par définition, chaque étape est conditionnée par

la conclusion de l’étape préalable. Puisque l’Ur uguay n’a pas permis le franchissement de la

première étape, il ne peut alors prétendre placer l’Argentine dans la seconde étape.

58Procès-verbal de la réunion du minist re des affaires étrangères Rafael Bielsa avec la commission des affaires
étrangères de la Chambre des députés, Buenos Aires, 14 avril 2004. MA, livre VII, annexe 11 (ma traduction). Traduction en
anglais du Greffe : «With regard to M’Bopicuá, the agreemen t we have entered into with Uruguay will have three stages.
The first stage ends with the approval of the works. This stage involves a specific body, the Administrative Commission
of the River Uruguay (CARU), and here Argentina will receive all the information from Uruguay.» (MA, par. 2.30.) - 41 -

15. Clairement, il n’y a même pas eu l’ombre d’un accord pour contourner la CARU.

L’arrangement ne peut non plus être interprété comme une acceptation préalable de la part de

l’Argentine de la construction de l’usine, ce qui supposerait que l’Argentine ne se soucierait pas du

résultat de l’examen de l’information requise. Ceci serait contraire au but même de l’évaluation

d’un projet. Permettez-moi, Monsieur le prési dent, de faire une comparaison avec le monde

académique. Que notre règlement d’études prévoi e plusieurs étapes en vue de l’obtention d’un

diplôme ne signifie nullement que nous ayons d’ores et déjà accepté que tous nos étudiants

décrocheront leur diplôme, quoi qu’ils fassent. Ou bien que nous sachions par avance que leurs

examens seront brillants et que leurs travaux de recherche seront excellents.

16. Mais revenons au fleuve Uruguay, Monsieur le président, ou plutôt à son statut et à

l’arrangement du 2mars qui n’ét ait qu’une modalité de sa mise en Œuvre. Il fallait donc

transmettre l’information à la CARU et il fallait «l’approbation des travaux». Avec l’arrangement

du 2 mars, on en est toujours resté à l’article 7 du st atut. Et c’est l’Uruguay qui a décidé de ne pas

franchir la première étape. Tout au long de l’année2004, le ministre Bielsa a rappelé à son

homologue Opertti l’engagement que l’Uruguay avait pris: il l’a fait en juillet, lors d’un sommet

du MERCOSUR, en août, lors d’une réunion du groupe de Rio, et en novembre, lors du sommet

ibéro-américain de SanJosé de Costa Rica 59. L’Uruguay, en la personne de son ministre des

affaires étrangères d’alors, n’a pas tenu parole. Et je vous rappelle ⎯ et sur ce point il n’y a pas de

divergence entre les Parties ⎯ que durant toute l’année 2004 et le premier trimestre2005 ENCE

60
n’avait pas commencé la construction de son usine .

17. Il n’y a donc rien à reprocher au comportement argentin. Il n’existe pas non plus de

possibilité de déduire une quelconque acceptation argentine de quoi que ce soit. Il existait un

arrangement, la CARU attendait l’information uruguayenne, les travaux n’avaient pas commencé

et l’Uruguay n’a rien fait.

18. Le conseil de l’Uruguay s’est référé à la documentation que l’Uruguay a transmise à

61
l’Argentine en octobre et en novembre 2003 . Il aurait pu constater que , bien que la protestation

59
Affidavit de M. Rafael Bielsa o26 novembre 2007), réplique de l’Arge ntine (RA), livre II, annexe 42. Dossier
de plaidoiries, 29 septembre 2009, onglet n
60
CR 2006/47, p. 46, par. 13 (Reichler).
61CR 2009/18, p. 55-56, par. 25 (Martin). - 42 -

argentine ait invoqué l’article 7 du statut, l’Uruguay a justifié la transmission de cette information

uniquement au titre de «l’esprit de coopération et de cordialité entre bons voisins», ignorant

62 e
totalement l’application du statut . M Martin a prétendu que l’Uruguay ne pouvait pas

transmettre l’information relative à l’usine d’ ENCE à la CARU car celle-ci était à l’époque

«paralysée» 63. Mais cette paralysie résultait du refus uruguayen d’accepter la compétence de la

CARU à l’égard du projet d’ENCE! C’éta it la volonté de l’Uruguay et non une quelconque

incapacité. L’Uruguay avait évidemment tout loisir de transmettre l’information, mais ne l’a pas

voulu. Je vous donne un exemple probant à cet égard: ce fut l’Argentine, durant la période de

«paralysie», en février 2004, qui a transmis à la CARU l’information reçue sur le projet d’ENCE,

et qui a demandé sa remise à la sous-commission pertinente pour son étude 6. Le conseil du

défendeur pourra peut-être, jeudi ou vendredi, n ous expliquer pourquoi l’Uruguay n’a pas pu faire

de même.

e
M19. Martin a prétendu par la suite qu’un si mple rapport interne de deux conseillers

techniques argentins, mentionné dans une réponse du chef du cabinet des ministres datant de

février 2004 à une question posée par un législateur, pouvait équivaloir à l’absence d’objection au

65
projet, dans le sens de l’article9 du statut ! C’était très téméraire de sa part et le conseil

uruguayen en était conscient puisqu’il a utilisé le conditionnel. Voyons la réalité des faits.

20. Nous sommes en février 2004, ces consultants techniques, agissant à titre purement

individuel et n’engageant qu’eux-mêmes, ont fait un premier commentaire de l’information alors

disponible, qui comme nous le savons bien, n’était pas suffisante, car sinon, l’arrangement de

mars2004 n’aurait pas inclus l’exigence de l’e nvoi d’information supplémentaire. Mais si

l’Argentine s’était satisfaite de l’avis de ses cons ultants, pourquoi a-t-elle exactement à la même

époque demandé à la CARU de transmettre l’information à la sous-commission pertinente pour son

évaluation, afin de déterminer si le projet pouvait affecter la qualité des eaux, tout en mentionnant

62
MA, livre II, annexe 21 ; contre-mémoire de l’Uruguay (CMU), vol. III, annexe 55.
63CR 2009/18, p. 55, par. 24 (Martin).

64Note du président de la délégation argentine au président de la CARU du 23 février 2004. Reproduite dans:
CARU, procès-verbal 1/04 (15 mai 2004), MA, livre III, an nexe 24. Dossier de pl aidoiries, 29 septembre 2009,
onglet n 6.

65CR 2009/18, p. 56-57, par. 26-29 (Martin). - 43 -

explicitement l’article7 du statut 66? Non, Messieurs les juges, nous sommes très loin d’une

quelconque approbation par l’Argentine et les vaines tentatives de nos contradicteurs de vous

placer à un stade ultérieur de la procédure n’ont aucune valeur. Ceci est également valable pour

l’avis de l’un des délégués argentins, qui se prononce à nouveau sur la base de la seule information

67
disponible à ce moment-là .

21. Monsieur le président, le conseil urug uayen aurait pu lire avec plus d’attention le

procès-verbal de la CARU du 15 mai 2004. Il aurait trouvé par exemple que le président de la

délégation argentine a relu la note du 23 février 2004 dans laquelle il fait rése rve de l’article 7, et

insiste que la documentation n’est pas complè te et que la CARU doit remplir ses fonctions 68. Il

aurait pu constater que le délégué argentin, M. Rodr íguez, après avoir signalé l’effet préjudiciable

d’une telle usine pour Ñandubaysal et pour le fleuve en général, a rappelé que l’Argentine avait

69
protesté contre le non-respect du mécanisme de consultation prévu par l’article 7 du statut ; et que

le délégué argentin, M. Rojas, a souligné le caractè re fondamental de l’article 7 et suivants, tout en

affirmant la nécessité de prendre en compte «d’autres alternatives de développement qui pourraient

se voir affectées lors de la construction et de la mise en service ultérieure de Celulosas de

M’Bopicuá» 70 (ENCE).

o
22. Le conseil de la Partie adverse aurait également pu constater [projection n 5] que le

délégué uruguayen, M. Cardoso, tout en saluant le rapprochement de points de vue intervenu entre

les deux ministères a estimé, après avoir rappelé la divergence d’opinions des deux délégations sur

des questions techniques liées au projet, que cet arrangement «aidera à résoudre le différend»

71
(«facilitará el camino para superar la controversia») ⎯ si vous me permettez, Monsieur le

président, d’employer quelques mots de ma langue maternelle. [Fin de la projection n o 5.]

66Note du président de la délégation argentine au président de la CARU du 23 février 2004. Reproduite dans:
CARU, procès-verbal 1/04 (15 mai 2004), MA, livre III, annexe 24, p. 147-148.

67CR 2009/18, p. 56-57, par. 28 (Martin).

68CARU, procès-verbal 1/04 (15 mai 2004), MA, livre III, a nnexe 24, p. 147-148 et 153. Dossier de plaidoiries,
29 septembre 2009, onglet no 6.

69CARU, procès-verbal 1/04 (15 mai 2004), MA, livre III, annexe 24, p. 161-164. Dossier de plaidoiries,
29 septembre 2009, onglet no 6.

70Ibid, p. 164-165. Dossier de plaidoiries, 29 septembre 2009, onglet n 6.
71 o
Ibid, p. 167 ; les italiques sont de nous. Dossier de plaidoiries, 29 septembre 2009, onglet n 6. - 44 -

23. Tout cela est concluant, Monsieur le président : l’arrangement du 2 mars 2004 a mis fin

au différend relatif au fait de savoir si la CA RU était ou non le lieu d’évaluation du projet

d’ENCE, mais n’a pas mis fin au différ end concernant le projet lui-même.

Le VICE-PRESIDENT, faisant fonction de président: Monsieur le professeur, je crois que

c’est le moment opportun de vous interrompre afin que la Cour puisse prendre une pause. Et, je

crois que nous n’avons que dix minutes. The hearing is suspended for 10 minutes.

The Court adjourned from 11.30 a.m. to 11.40 a.m.

Le VICE-PRESIDENT, faisant fonction de président : Veuillez vous asseoir. L’audience est

reprise et la parole est à M. le professeur Kohen.

M. KOHEN : Merci, Monsieur le président.

B. Il est matériellement impossible que l’Argentine ait approuvé
le projet de construction de l’usine Botnia

24. Je passe maintenant au point qui me semble être celui sur lequel les avocats et conseils

de la Partie uruguayenne ont fait preuve de plus d’imagination: à savoir, les prétentions selon

lesquelles l’Uruguay «n’aurait pas violé l’article 7» en ce qui concerne Botnia et que l’Argentine

72
aurait accepté la construction de cette usine . Vous aurez remarqué la formule choisie par nos

contradicteurs. Ils n’affirment pas que «l’U ruguay a respecté ses obligations découlant de

l’article7», mais que «l’Uruguay n’a pas violé» cette disposition. Pour ce faire, les conseils

uruguayens ont invoqué deux choses: l’extension de l’arrangement du 2mars2004 à l’usine

Botnia et l’arrangement de mai 2005 créant le GTAN. Aucun des deux arrangements ne permet
73
d’arriver à une pareille conclusion .

25. Au fond, l’argument avancé par la Par tie défenderesse pour invoquer un prétendu accord

argentin à la construction de l’usine Botnia est de nature grammaticale. Il s’agit de l’emploi du

pluriel «usines» (avec un «s») dans un certain nombre de documents argentins ou dans l’appellation

72
CR 2009/18, p. 47-48, par. 38-40 (McCaffrey) ; CR 2009/18, p. 60-63, par. 40-49 (Martin).
73CR 2009/14, p. 14-17, par. 11-19 ; p. 19, par. 24 (Kohen). - 45 -

74
du PROCEL . En ce qui concerne ce dernier, nous nous sommes déjà référés lors du premier tour

pour démontrer qu’il ne peut pas être perçu comme une acceptation de l’installation des usines et je

75
vous y renvoie respectueusement .

26. Revenons au pluriel «usines» trouvé par l’Uruguay dans quelques documents. Monsieur

le président, s’il s’agit d’étendre l’arrangement du 2 mars 2004 à l’usine Botnia, l’exercice s’avère

inutile pour l’Uruguay: nous avons déjà vu la véritable port ée de cet arrangement, qui impose

l’obligation de soumettre tout projet industriel d’une telle ampleur à la procédure de consultation

préalable au sein de la CARU. Si l’Uruguay l’avait appliqué, il aurait dû soumettre le projet Botnia

à la CARU. Je dirai qu’en délivrant l’autorisation à Botnia le 14février2005, l’Uruguay a

malheureusement mis fin à cet arrangement, car il est à nouveau revenu à la situation préexistante

qui avait généré cet arrangement.

27. Mais supposons un instant, arguendo, que nos amis uruguayens interprètent correctement

l’arrangement du 2 mars 2004 et que celui-ci ait mis fin au différend concernant l’installation et la

mise en service de l’usine d’ENCE. Les documents utilisant le terme «usines» au pluriel sont tous

antérieurs à la date à laquelle l’Argentine a pr is connaissance de l’autorisation délivrée par le

76
Gouvernement uruguayen le 14février2005 . A ce moment-là, il ne pouvait pas y avoir de

différend concernant l’usine Botnia, tout simp lement parce que l’Urugua y n’avait pas encore

autorisé la construction de l’usine sans avoir préalab lement suivi la procédure du statut. Messieurs

les juges, comment peut-on mettre fin à un différend qui n’existe pas encore ?

28. Monsieur le président, il est purement et simplement impossibl e que l’Argentine ait

accepté la construction de l’usine Botnia comme le prétend l’Uruguay. Au fond, le défendeur vous

propose la thèse selon laquelle l’Argentine aurait accepté la construction de Botnia avant même de

recevoir toute l’information la concernant. Et ce n’ est pas tout! L’Argentine l’aurait fait avant

que l’Uruguay accepte lui-même une telle construction !

29. Tout à l’heure, je vous ai parlé de mes étudiants et de notre règlement d’études. J’avais

en effet à l’esprit nos étudiants déjà immatricul és. Permettez-moi, Monsieur le président, de

74
CR 2009/18, p. 60-61, par. 42-44 (Martin).
75
CR 2009/14, p. 17, par. 17 (Kohen) ; CR 2009/15, p. 41-43, par. 13-17 (Müller).
76Voir CARU, procès-verbal 08/04 (12 novembre 2004), MA, livre III, annexe 28 ; CMU, vol. IV, annexe 108. - 46 -

poursuivre la comparaison. Avec l’interprétation uruguayenne relative à l’usine Botnia, je devrais

maintenant faire attention avec nos étudiants poten tiels, car il arrive qu’ils me contactent avant

même de postuler à notre institut. Et s’ils suivent la thèse de l’Uruguay, je crains qu’ils ne viennent

demain nous demander leur diplôme ⎯ et ceci avant même d’envoyer leur dossier de candidature !

C. L’Uruguay a reconnu ne pas avoir respecté la procédure
du statut de 1975

30. Messieurs les juges, il devient évident à ce stade que les faits sont très différents des

prétentions uruguayennes. Dès que l’Argentine a pris connaissance par la presse des rumeurs

relatives à l’autorisation de construction de Botnia , elle a signalé auprès de la CARU qu’une telle

autorisation serait contraire à l’article 7 du statut 77. Une fois l’information confirmée, l’Argentine

78
a protesté aussi au sein de la CARU et a signalé la violation de cette obligation . A chaque fois,

l’Uruguay n’a pas réagi. Ou plutôt si. Une fois : pour confirmer exactement la thèse argentine.

31. En effet, ce qui s’est passé à la réunion de la CARU du 6 mai 2005 revêt une importance

fondamentale à l’égard de l’attit ude des Parties par rapport à Botn ia, mais aussi à l’égard de

l’ensemble de la procédure.

32. Pour cette raison, je vous prie d’accepter la longue citation suivante du président de la

délégation argentine : [projection 6].

«[I]l est inévitable de remarquer que le mécanisme de consultation préalable n’a

pas été respecté, et cela est grave. La CARU a envoyé des notes aux organismes
uruguayens compétents ⎯démarches pour lesquelles l’Argentine exprime ses

remerciements ⎯ en demandant de l’information complémentaire concernant le projet
M’Bopicuá, et elle a requis l’envoi de la même information concernant Botnia. Nous
regrettons qu’il n’y ait pas eu de réponse. Nous regrettons aussi que le système de

consultation prévu dans le statut du fle uve Uruguay ne fonctionne guère, et que la
CARU ne puisse donc pas compter sur ce mécanisme. L’intention de notre délégation
est d’insister à nouveau sur ce sujet qui affecte de manière sensible les différentes

communautés vivant sur la rive argentine du fleuve Uruguay, étant évident que la rive
uruguayenne souffrirait aussi de ces effets. Il est évident que la violation du statut
relativement au mécanisme de consultation préalable (art. 7 et suiv.) doit être prise au

sérieux. Il est évident que si cette situation se poursuit, il faudra déclencher les
procédures prévues dans le statut afin de régler les différends sur l’application des
normes stipulées dans ce traité. Je souhaite faire remarquer que nous nous réservons
nos droits sur ce point-là. Nous lançons un nouvel appel à la délégation uruguayenne

77CARU, procès-verbal 3/05 (11 mars 2005), MA, livre III, annexe 31. Dossier de plaidoiries, 29 septembre
o
2009, onglet n9.
78CARU, procès-verbal 5/05 (6 mai 2005), MA, livre III, annexe 32. Dossier de plaidoiries, 29 septembre 2009,
onglet n 10. - 47 -

pour qu’elle accomplisse la consultation préalable par rapport à Botnia SA, afin que la
CARU et en particulier la délégation arge ntine puissent analyser si les ouvrages
projetés peuvent avoir des effets e nvironnementaux nécessitant des mesures
79
correctives en conformité avec le statut du fleuve Uruguay.» [Fin de la
projection 6.]

33. Voilà qui est clair. Tout comme la répon se dépourvue de toute ambiguïté de la part du

président de la délégation uruguayenne [projection 7]: «les faits sont te ls que M.l’ambassadeur

[García Moritán, président de la délégation argen tine] les a présentés» («los hechos han sido así

como los ha relatado el Sr. Embajador» 80) [fin de la projection 7].

34. L’Uruguay a donc reconnu, par l’intermédiaire du président de sa délégation à

l’organisation binationale compétente, qu’il n’a pas transmis l’information à la CARU, ni suivi le

mécanisme de consultation préalable à l’autori sation de construction, malgré les demandes

formulées par celle-ci et ainsi que l’exige le statut de 1975.

D. Le GTAN n’a en rien blanchi le comportement illicite uruguayen

35. Je passe maintenant à la thèse avancée notamment par le professeurLuigiCondorelli

suivant laquelle la constitution du GTAN impliquerait le blanchiment du comportement illicite

uruguayen. L’idée est que les deux gouvernements au raient décidé de discuter de la question des

81
usines de pâte à papier à un niveau plus élevé que celui de la CARU .

36. Permettez-moi tout d’abord de placer la constitution du GTAN dans son contexte

chronologique. Au début mars 2005, le nouveau gouvernement du président Tabaré Vázquez a pris

ses fonctions en Uruguay. Comme je l’ai rappelé, l’ancien gouvernement a délivré l’autorisation à

79 Ibid. (ma traduction). Traduction du Greffe en anglais :

«However, we must mention that the prior cons ultation mechanism was not observed, and this is
serious. The CARU has sent Notes to the releva nt Uruguayan bodies, and the Argentine Delegation
expresses its appreciation for such steps and requests additional data on the installation of the M’Bopicuá
undertaking, and on Botnia. We regret not having re ceived an answer. We regret to see that the

consultation system provided for in the Statute of the River Uruguay is not being implemented and that
the CARU cannot benefit from such system. It is the intention of our Delegation to raise the issue once
again, as it significantly affects several comm unities on the Argentine coastline on the River Uruguay,
and it is obvious that the Uruguayan coastline will also suffer from such effects. It is obvious that breach
of the Statute as regards the prior consultation syste(Article 7 and following ones) is a very serious
matter. It is obvious that should such situation con tinue, the procedures provide d for in the Statute for
settling disputes concerning the application of rules provided for therein must be triggered. I wish to point
out that we make a reservation of rights in this regard. We once again request the Uruguayan Delegation
to comply with the prior consultation system as regards Botnia S.A. so that the CARU and the Argentine
Delegation in particular, can analyse whether the projected works involve envi ronmental effects that

require corrective measures in accordance with the Statute of the River Uruguay.»
80 Ibid., traduction du Greffe en anglais : «[t]he facts have occurred as Mr. Ambassador [Roberto García Moritán,
President of the Argentine Delegation] has explained».

81 CR 2009/18, p. 45, par. 31 (McCaffrey) ; CR 2009/19, p. 23, par. 23 (Condorelli). - 48 -

Botnia deuxsemaines avant son départ, sans info rmer l’Argentine d’une telle autorisation.

o
[Projection n 8.] A en croire le vice-président uruguayen sortant de l’époque, LuisHierro, le

candidatVázquez avait promis au président ar gentin durant toute l’année2004 que l’Uruguay

n’autoriserait pas la construction des usines de pâte à papier 82. [Fin de la projection n o 8.] Mais

c’est aussi à cette période de l’année 2005 qu’ont commencé les travaux de nivellement du terrain

pour ENCE et ceux de nivellement de terrain et de construction pour Botnia 83.

37. Le professeur Condorelli a invoqué un prétendu «blocage des travaux de la CARU» à ce

84
moment-là qui aurait justifié la création du GTAN . Messieurs les juges, il n’en est rien. Il a dû

se tromper avec la situation existant entre novemb re 2003 et mai 2004. Au premier semestre 2005

la CARU fonctionnait normalement. La preuve est la suivante: les réunions qui ont eu lieu en

mars et en mai2005 au cours desquelles l’Argentine a fait valoir devant la CARU le non-respect

par l’Uruguay de ses obligations découlant des articles 7 et suivants à l’égard de Botnia, réunions

que mon ami et contradicteur a allègrement ignorées.

e
38. Pour sa part, M Martin fait grand cas de la note que le ministreBielsa a remise à son

85
homologue Gargano le 5 mai 2005 . Il est regrettable que le conseil se soit uniquement fié à la

traduction uruguayenne de cette note, qui ne reproduit pas un passage fondamental 86. Il aurait pu,

soit consulter le texte original en espagnol, soit la traduction complète fournie par l’Argentine.

87
J’avais déjà cité cette note la semaine dernière et avait même projeté à l’écran la partie que nos

contradicteurs semblent ignorer. Avec votre indulgence, Monsieur le président, je la projetterai une

o
nouvelle fois [projection n 9] :

39. Comme vous voyez, cette note demande :

a) que l’on envisage la relocalisation des usines,

b) que l’on élargisse l’information fournie à leur égard, et

82
«Hierro Criticized Uruguay’s Foreign Policy», El Espectador, Montevideo, 2juin2009 (New Doouments
Submitted by Argentina, 30 June 2009, Press Articles). Dossier de plaidoiries, 29 septembre 2009, onglet n 11.
83
MA, par. 2.62 ; CMU, par. 1.39 et 3.116 ; RA, par. 2.28.
84 CR 2009/19, p. 13, par. 4 (Condorelli).

85 CR 2009/18, p. 61-62, par. 46 (Martin).

86 Duplique de l’Uruguay (DU), vol. II, annexe R15, dossier de plaidoiries, 29 septembre 2009, onglet n 12.
87
CR 2009/14, p. 19, par. 24 (Kohen). - 49 -

c) que l’on maintienne le statu quo durant cent quatre-vingt jours afin de produire des études

d’impact cumulé sur l’environnement 88. [Fin de la projection n 9.]

40. Messieurs les juges, je ne vois pas ce qui pourrait être demandé de plus à l’Argentine

pour faire valoir ses droits. Le 5mai, elle demande, au niveau ministériel, la suspension des

travaux pendant six mois ainsi que la satisfaction des deux autres conditions que vous venez de voir

à l’écran. Le 6mai elle fait valoir au sein même de la CARU le non-respect par l’Uruguay de

l’article7 et avertit que si l’Uruguay persiste dans le non-respect de la procédure, la voie prévue

par le statut pour le règlement des différends devra être mise en Œuvre ⎯ce qui d’ailleurs

constitue une référence à l’article60 et non à l’article12. Ceci est concluant et dépourvu

d’ambiguïté, Monsieur le président.

41. Je passe maintenant au communiqué de presse du 31mai relatif au GTAN. Comme le

professeurCondorelli l’a affirmé, la création de ce groupe technique a été décidée par les deux

89
présidents le 5 mai . Je viens de vous montrer que l’Argentine proteste le lendemain même devant

la CARU contre la violation de l’article 7 du fait de l’autorisation à Botnia. Preuve accablante que

la création du GTAN n’impliquait pas un contourneme nt de la CARU et ne supposait pas que, par

je ne sais pas quel miracle d’acrobatie diplomatique, les Parties se soient placées à l’article 12 du

statut, comme le conseil du défendeur le prétend ensuite 90.

42. Le même conseil a consacré de nombreuses minutes à éclaircir l’expression «les usines

qui sont en train d’être construites», expression que l’on trouve dans le communiqué de presse. Il

n’y a rien de quoi s’étonner: les travaux avai ent effectivement commencé. Je laisse mon cher

contradicteur LuigiCondorelli choisir la formule qu’il préfère en français car cela ne change

absolument rien. C’était un constat de fait. Un fait que l’Argentine a opportunément contesté.

91
Sans aucun fondement, le conseil urug uayen parle d’un «fait désormais acquis» , formule qui

dissimule mal la volonté constante de l’Uruguay d’imposer le fait accompli. C’est donc vrai que

les travaux de construction avaient déjà débuté en mai2005, Monsieur le président. J’ai montré

88
Note du ministre des affaires étrangères de la République argentine ministre des affair es étrangères de la
Républioue orientale de l’Uruguay (5ma i2005), MA, livreII, annexe22. Do ssier de plaidoiries , 29 septembre 2009,
onglet n 12.
89
CR 2009/19, p. 13, par. 4 (Condorelli).
90Ibid., p. 21-23, par. 20-23.

91CR 2009/19, p. 18, par. 13, voir aussi p. 19, par. 16 (Condorelli). - 50 -

comment l’Argentine n’a pas accepté ce fait et a demandé que l’on arrête les travaux. Et je

demanderai à l’autre Partie un peu de cohérence : après avoir invoqué que les usines étaient en train

d’être construites en mai2005, que l’Uruguay ne vienne plus nous dire que l’autorisation de

construction de l’usine Botnia n’a été délivrée qu’en janvier 2006 92!

43. En somme, l’effort uruguayen déployé la semaine dernière pour faire passer l’accord de

création du GTAN comme un blanchiment de sa condu ite illicite n’a rien donné ; sauf une preuve

supplémentaire que la tentative de l’Uruguay de montrer que l’autorisation délivrée

le 15 février 2005 ne valait pas autorisation de construction n’a aucun fondement.

Conclusions

44. J’arrive à ma conclusion. Au fond, Messieurs les juges, la stratégie de l’Uruguay pour

justifier son non-respect des obligations découlant du chapitreII du statut se réduit à des arguties

sémantiques dépourvues de fondement. Car, s’il étai t vrai que les Parties s’étaient mises d’accord

pour la construction des usines, pourquoi alors n’auraie nt-elles pas choisi la voie la plus simple et

la plus sûre qu’elles avaient facilement à leur di sposition, à savoir une décision de la CARU ? Si,

93
comme l’affirmait le professeurMcCaffey, la «CARU c’ est les Parties agissant conjointement»

ou l’«instrument des deux ministères des affaires étrangères» 94, pourquoi ces dernières ne s’en

seraient pas servi pour mettre véritablement fin au différend concernant les usines de pâte à

papier ?

45. Monsieur le président, la réalité s’impose tout naturellement. Le fait est que l’article7

n’a pas été respecté par l’Uruguay. Le fait est que les arrangements de mars 2004 et de mai 2005

n’ont aucunement eu pour objectif de contourner la CARU, ni de blanchir l’Uruguay de son

comportement illicite, ni de donner un consentement argentin à la construction de l’une ou l’autre

des usines de pâte à papier.

92DU, par. 2.121, 2.124, 3.109, et 3.112 ; 43 (Reichler) ; CR 2009/18, p. 24, par. 42 (Boyle) ; CR 2009/16, p. 16,
par.19 (Gianelli); CR 2009/16, p. 42- 43, par. 14 (Reichler); CR 2009/17, p. 31; CR 2009/19, p. 21, par.19
(Condorelli).

93CR 2009/18, p. 44, par. 27 (McCaffrey). Texte original : «CARU is the Parties ⎯ Argentina and Uruguay ⎯
acting jointly.»

94CR 2009/18, p. 45, par. 30 (McCaffrey). Texte original : «CARU is an instrument of the two Parties’ Foreign
Ministries.» - 51 -

46. Monsieur le président, que reste-t-il apr ès avoir démontré que les arrangements de 2004

et2005 n’avaient en aucune circonstance pour but de contourner la CARU, ni de propulser les

Parties à un stade ultérieur de la procédure prévue pa r le statut ? Ce qui reste, c’est simplement (et

tristement) que l’Uruguay a violé l’obligation de notifier la CARU conformément à l’article 7. Ce

faisant, l’Uruguay a empêché que toute la procédure du chapitreII du statut puisse suivre son

cours. Il a ainsi violé l’ensemble des prescriptions de cette procédure. Les efforts de l’Uruguay

pour prouver que l’on se situait à l’article 8, à l’article 9, à l’article 11 ou à l’article 12 n’ont pas de

sens, simplement parce que jamais les Parties ont atteint l’article7, pas plus qu’elles ont décidé

d’en écarter l’application.

47. Monsieur le président, Messieurs les juges, cela a été un très grand privilège et un

honneur de défendre les droits de mon pays et en même temps, un traité bilatéral modèle conclu

avec nos frères uruguayens. Je vous prie maintenant, Monsieur le président, de bien vouloir donner

la parole à mon collègue et ami Alain Pellet.

Le VICE-PRESIDENT, faisant fonction de président: Je vous remercie, Monsieur le

professeur. Je donne la parole à M. le professeur Alain Pellet.

M. PELLET :

VII. LA REPARATION ET BREF RESUME DE LA THESE A RGENTINE

1. Merci beaucoup. Monsieur le président , Messieurs les juges, il m’incombe, dans un

premier temps, de revenir sur la question de la réparation due à l’Argentine par l’Uruguay du fait

de ses nombreuses et graves violations du statut de1975. Puis, encore plus rapidement, je

résumerai notre argumentation juridique avant que l’agent de la République argentine fasse

quelques remarques conclusives préalablement à la lecture des conclusions finales.

I. La réparation

2. Monsieur le président, les propos tenus deva nt la Cour de céans ne sont jamais purement

académiques 95⎯ même lorsqu’ils le sont par des professeurs (une confrérie à laquelle je me flatte

95
CR 2009/19, p. 44, par. 1. - 52 -

d’appartenir…): ils engagent l’Etat au nom duque l ils sont proférés et c’ est avec l’attention de

l’avocat que j’ai écouté, jeudi dernier, ceux de mon collègue, et confrè re, et adversaire, et

néanmoins ami, LuigiCondorelli. Et plutôt que su ivre un plan «académique» «à la française», je

procéderai par remarques successives d’importance inégale.

3. Première remarque: Elle répond à l’une des considérations préliminaires sur lesquelles

s’est fondé mon contradicteur, selon lequel l’Argent ine oublierait «que le statut contient bien des

normes spécifiques portant sur les conséquen ces des faits illicites. Les articles42 et43

contemplent explicitement l’indemnisation en ta nt que remède approprié en cas de préjudices

causés par la pollution du fleuve en violation du statut» 9. «En violation du statut», ce sont les

quatre mots de trop, Monsieur le président : l’article 42 parle de «responsabilité» dans sa traduction

française («Cada parte será responsable…» selon l’or iginal espagnol) pour la simple raison que ni

le français, ni l’espagnol ne permettent de faire la distinction entre les notions rendues par les mots

anglais responsible d’une part, et liable d’autre part. Les traducteurs du statut en langue anglaise

ne s’y sont pas trompés qui ont rendu de manièr e exacte l’idée sous-jacente à cette disposition par

l’expression : «Each party shall be liable to the other…».

97
4. Comme Daniel Müller l’avait fort bien mont ré lors de notre premier tour de plaidoiries ,

les articles 42 et 43 ⎯ qui figurent pour mémoire sous l’onglet 13 du dossier des juges ⎯ n’ont pas

pour fonction de répondre à une situation comparable à celle qui nous occupe. Il ne s’agit pas de

procéder à l’indemnisation de dommages résultant de la violation du statut par l’une des Parties;

d’ailleurs :

⎯ c’est l’article 43 et non l’article 42 qui parle d’indemnisation ;

⎯ cette disposition (l’article 43 ; c’est sous l’onglet 13) concerne clairement non pas les relations

entre les deux Etats, mais les conséquences de s infractions commises par les utilisateurs et

relevant de la juridiction respective des Parties ;

96Ibid., p. 46, par. 6 (Condorelli).
97
CR 2009/15, p. 41-42, par. 14-16. - 53 -

98
⎯ quant à l’article42, il n’aurait aucun sens utile s’il devait être interprété comme le propose

99
l’Uruguay : «c’est un principe de droit internationa l, voire une conception générale du droit,

que toute violation d’un engagement co mporte l’obligation de réparer» ( Usine de Chorzów,

o o
fond, arrêt n 13, 1928, C.P.J.I. série A n 17, p. 29).et il eût été tout à fait vain de rappeler ceci

dans le statut ; par contre di re que chacune des Parties est liable envers l’autre des dommages

résultant de la pollution causée par ses activités ou par celles relevant de sa juridiction, cela

alors fait sens.

Vous ne sauriez donc, Messieurs les juges, suivre mon aimable contradicteur lorsqu’il tente de vous

convaincre que cette lex specialis, qu’il interprète erronément, devrait vous conduire à écarter le

principe fondamental du droit de la r esponsabilité internationale selon lequel la restitutio in

integrum est le remède de principe en cas de violation d’une obligation internationale 100.

5. Deuxième remarque: Aucune autre considération ne devrait du reste vous conduire,

Messieurs de la Cour, à écarter cette modalité de prin cipe de la réparation qu’ est la restitution. Et

sûrement pas l’affirmation de mon contradicteur selon laquelle il faudrait différencier les violations

des obligations procédurales d’une part et subs tantielles d’autre part imposées par le statut 101.

102
Comme nous l’avons dit et redit , comme Laurence Boisson de Chazournes et moi l’avons répété

hier, comme PhilippeSands l’a, lui aussi rappelé tout à l’heure, et comme la Cour elle-même l’a

103
souligné , ces différents types d’obligations sont liées. Non seulement en ne respectant pas les

dispositions procédurales du chapitre II, l’Uruguay a empêché une évaluation sereine et ex ante des

risques qu’ENCE et Botnia pourraient faire peser sur l’écosystème du fleuve, mais encore et

surtout (pour ce qui est de la réparation), en auto risant la construction puis la mise en service de

Botnia, il a violé à la fois les dispositions substantielles et les dispositions procédurales du statut.

L’usine a été construite en dépit des prescriptions du chapitreII et elle pollue; et elle va polluer

98Voir Détroit de Corfou (Royaume-Uni c. Albanie), fond, arrêt, C.I.J. Recueil 1949, p. 24 ; Différend territorial

(Jamahiriya arabe libyenne/Tchad), arrêt, C.I.J. Recueil 1994, p. 23. Voir aussi la sentence arbitrale du 17juillet 1986,
Filetage dans le golfe du Saint-Laurent, RSA, vol. XIX, p. 243, par. 30.
99
CR 2009/19, p. 53-54, par. 22 (Condorelli).
100Voir notamment. MA, par. 8.218.27 ; RA, par. 5.28-5.40 ; ou CR 2009/15, p. 45-46, par. 4-6 (Pellet).

101Voir CR 2009/19, p. 46-57, par. 7, ou p. 52, par. 20.

102RA, par. 1.19-1.45 et par. 5.40 ; CR 2009/12, p. 66, par. 9 (Boisson de Chazournes).
103
Usines de pâte à papier sur le fleuve Uruguay (Arg entine c. Uruguay), mesures conservatoires, ordonnance
du 13 juillet 2006, C.I.J. Recueil 2006, p. 133-134, par. 81. - 54 -

plus encore si elle reste en activité ⎯ alors que l’évaluation de ces ri sques conformément au statut

aurait inévitablement conduit à la cons truire ailleurs. On ne peut pas faire la différence entre les

deux catégories de dispositions violées aux fins de la réparation : la situation dommageable actuelle

est le résultat des violations et des unes et des autres.

104
6. Bien sûr, Monsieur le président, que la réparation doit prendre «une forme adéquate» et

«correspondre au préjudice subi» 105, mais c’est le préjudice global subi par l’Etat victime qui doit

être pris en considération: qu’il résulte d’un e violation unique ou, comme en l’espèce, de la

combinaison de plusieurs violations, que celles- ci soient de même nature ou différentes, peu

importe. Le principe demeure, la réparation doit être intégrale et la restitutio en est la modalité de

droit commun. Une modalité que seules deux raisons pourraient conduire à écarter ⎯ et sur cela

106
les Parties sont d’accord : une impossibilité matérielle (l’Uruguay ne l’invoque pas ⎯ à juste

titre) ou le fait que la restitutio in integrum serait «hors de toute proportion avec l’avantage qui

résulterait de la restitution plutôt que de l’indemnisation» 107.

7. Or, et c’est ma troisième remarque, contrairement à ce qu’a plaidé mon fougueux

108
contradicteur , la cessation des activités de l’usine, qu’elle se traduise par un démantèlement, une

relocalisation ou une réaffectation (ou une co mbinaison de tout ceci), n’aurait rien de

109 110
«radicalement inacceptable» , «de totalement disproportionné» , d’«outrancier» et

111
d’«exorbitant» . En premier lieu, il me paraît important de dissiper les impressions que les

images de l’usine qui ont été projetées par l’Argentine pourraient vous avoir laissées, Messieurs les

juges: oui, Botnia est une très grosse usine, mais, comme dans beaucoup d’établissements

industriels contemporains, les installations fixes ⎯les bâtiments, la cheminée centrale ⎯, pour

104
Voir CR 2009/19, p.46-47, par.7 (Condorelli citant notamment Usine de Chorzòw, compétence, arrêt n° 8,
1927, C.P.J.I. série A n° 9, p. 21).
105
Ibid. (Condorelli citant Avena et autres ressortissants mexicains (M exique c. Etats-Unis d’Amérique), arrêt,
C.I.J. Recueil 2004, p. 59, par. 119).
106
Voir notamment CR 2009/ 15, p. 45-46, par. 6 (Pellet) et CR 2009/19, p. 50, par. 16 (Condorelli).
107Articles de la Commission du droit international sur laresponsabilité de l’Etat pour fait internationalement

illicite, art. 35 b).
108CR 2009/19, p. 49-51, par. 10-18, et p. 54-56, par. 26-29 (Condorelli).

109Ibid., p. 49, par. 10.

110Ibid., p. 50, par. 15.
111
Ibid., p. 54, par. 26. - 55 -

impressionnantes qu’elles soient, sont, en définitive, sans doute moins coûteuses que le matériel

mobile ⎯ les machines, les produits, l’équipement informatique ⎯ qui peut, sans trop d’encombre,

être réutilisé ailleurs. Juste pour en donner un ex emple: la société autrichienneAndritz a conclu

avec Botnia un contrat d’environ 200millions d’ euros, près de 300millions de dollars, pour la

112
fourniture du matériel de traitement des fibres ; il s’agit là de biens mobiliers réutilisables dans

une autre usine construite ailleurs. Par aille urs, je maintiens que la non-disproportionnalité

grossière, qui constitue la seule limite de la préférence qui doit être donnée à la restitutio in

integrum sur tout autre mode de réparation, doit s’ap précier non pas à la date à laquelle la Cour se

prononcera, mais à celle à laquelle, dûment averti du risque qu’il prenait, l’Uruguay a pris la

responsabilité de passer outre l’opposition argentin e à la construction de Botnia, nonobstant

l’avertissement ferme que vous lui avez adre ssé dans votre ordonnance du 13juillet2006 113. Il

114
s’est engagé alors à se conformer à un ordre de démantèlement ou de cessation d’activité ⎯ et

cet engagement a probablement joué un rôle dans votre décision de ne pas faire droit aux mesures

conservatoires demandées par l’Argentine ; de bonne foi, l’Uruguay ne peut aujourd’hui se dédire

115
et soumettre la Cour (et le demandeur) au chantage du «dommage colossal» .

8. Au demeurant, la charge en résultant n’est pas «colossale»: l’usine peut être relocalisée

dans un emplacement moins préjudiciable pour le fleuve et pour l’Argentine; de nombreux

éléments de l’installation actuelle peuvent être réutilisés; les inconvénients sociaux pour la

population de Fray Bentos seront minimes et compensés par des grands avantages puisque, comme

je l’ai dit lors du premier tour sans être contredit 116, l’usine a des retombées sociales plus que

limitées dans la région ⎯ et elle les produira autant là où elle sera relocalisée. Elle peut l’être. Ce

n’est pas grossièrement dispropor tionnel; ce n’est pas déraisonnable et ce n’est pas inéquitable:

une telle relocalisation ne portera aucune a tteinte au développement durable de l’Uruguay ⎯ à

112Voir http://www.botnia.com/en/default.asp?path=204;1490;1491;1541;1544;917.
113
Usines de pâte à papier sur le fleuve Uruguay (Argentine c.Uruguay), mesures conservatoires, ordonnance
du 13 juillet 2006, C.I.J. Recueil 2006, p. 133, par. 78.
114
Voir ibid., p. 125, par. 47.
115Voir CR 2009/19, p. 47, par. 8 (Condorelli).

116CR 2009/15, par. 17 ; voir aussi CR 2009/13, p. 23, par. 32 (Kohen). - 56 -

laquelle celui-ci est légitimement attaché ⎯ et préservera le développement durable de l’Argentine

que le fonctionnement de l’usine là où elle est implantée, méprise … souverainement 117 !

9. Monsieur le président, ma quatrième et dern ière remarque au sujet de la réparation due à

l’Argentine porte conjointement sur la cessation du comportement illicite de l’Uruguay et sur les

garanties de non-répétition. Mais une précision d’abord: si je ne m’arrête pas sur nos autres

demandes ceci ne veut pas dire que nous y re nonçons, qu’il s’agisse de la satisfaction que

constituera la constatation par la Cour de l’illicéité du comportement de l’Uruguay en ce qui

concerne l’autorisation de l’usine ENCE ou qu’il s’agisse de l’indemnité qui doit être versée par

l’Uruguay en compensation des dommages subis par l’Argentine jusqu’au moment où Botnia aura

cessé de fonctionner.

10. Au bénéfice de cette remarque, qui n’im plique aucunement que nous renoncions à la

restitutio bien sûr, nous prenons bonne note, Monsieur le président, de ce que l’Uruguay, par la

bouche de son avocat (fût-il professeur…), M. Condorelli, reconnaît que, si la Cour constate qu’il a

commis des illicéités, «il lui incomberait alors indiscutablement de cesser ces conduites et de

118
revenir au respect des règles violées…» . Nous notons aussi qu’il admet que

«[l’] obligation de cessation pourrait fort bien comporter la nécessité pour l’Uruguay

d’adopter de nouvelles mesures visant, par ex emple, une meilleure prévention de la
pollution. L’Uruguay ne conteste nullement le pouvoir de votre Cour de prescrire le
cas échéant la mise en Œuvre de mesures d’un tel genre en tant qu’élément de la

cessation, si par impossible elle devait constater que la conduite du défendeur n’a pas
été en harmonie avec le statut.» 119

Et pourtant, ce demi-aveu et ces déclarations d’intention ne rassurent pas complètement la

République argentine. Ne fût-ce que parce que si elles sont tout à fait sincères, on voit mal

120
pourquoi le défendeur refuse d’accepter que le dispositif de l’arrêt «dise explicitement» qu’elle

doit cesser ses faits internationalement illicites.

11. Dans le même esprit, c’est justem ent parce que, comme le dit à nouveau le

professeurCondorelli, «l’Uruguay a déjà fait état d’innombrables fois de sa ferme intention de

117Cf. CR 2009/19, p. 51, par. 18.
118
Ibid., p. 45, par. 3.
119Ibid., p. 45, par. 4.

120Ibid., p. 45, par. 3. - 57 -

continuer à respecter ses obligations tant pro cédurales que substantielles découlant du statut» 121et

parce que ces assurances n’ont pas été suivies d’effet que, de l’avis de l’Argentine, les

circonstances justifient amplement que la Cour fasse droit à sa demande et ordonne à la Partie

uruguayenne de donner les garanties de non-répétition qui s’imposent, garanties dont le monitoring

du fleuve ne saurait être un succédané ⎯ne fût-ce que parce qu’il n’a évidemment pas lieu

122
d’être (sous la forme que suggère l’Uruguay) si Botnia cesse ses activités à son emplacement

actuel ⎯ comme la Cour, je l’ai dit, ne peut manquer de l’ordonner.

12. J’ajoute enfin, Monsieur le président , pour qu’aucune ambigu ïté ne subsiste, que

l’Argentine maintient 123sa ferme opposition à la demande urugua yenne d’une déclaration de la

Cour l’autorisant à continuer l’exploitation de l’usine Botnia: il s’agit d’une demande

reconventionnelle déguisée, irrecevable a ux termes de l’article80 du Règlement ⎯une sorte de

satisfaction à l’envers ⎯; et cette demande est, de toute façon sans aucun fondement puisque

l’Uruguay ne reproche à l’Argentine aucune violation du statut de 1975.

II. Bref résumé de la thèse de la République argentine

13. Il me reste, Monsieur le président, à récapituler brièvement les grandes lignes de

l’argumentation juridique de la République argentine. A l’issue de deux tours de plaidoiries, durant

lesquels celle-ci a pu s’exprimer amplement, cela vous semble peut-être abusif, Messieurs de la

Cour: vous nous avez écoutés avec attention ; vous avez noté ou «enregistré» ce qui vous

paraissait important ⎯ ou ce qui ne l’était pas à vos yeux ; et vous commencez sans doute à trouver

le temps un peu long. Je vous comprends… Et pou rtant je vous prie de bien vouloir m’accorder

encore quelques minutes d’attention car, comme il est naturel, c’est le défendeur qui va s’exprimer

le dernier; mais nous nous perm ettons d’émettre le vŒu que vous écoutiez ses savants et adroits

conseils en ayant très présents à l’esprit les aspec ts de nos positions qui nous semblent les plus

importants.

14. Je les présenterai, Monsieur le président, en rappelant, pour lever toute ambiguïté, ce que

notre thèse n’est pas, par contraste avec ce qu’elle est :

121Ibid., p. 58, par. 35.
122
Voir CR 2009/15, p. 37-43 (Müller).
123Voir ibid., p. 55-56, par. 26-28 (Pellet). - 58 -

⎯ premièrement, nous ne disons pas qu’aux termes du statut de 1975 la Partie, qui estime qu’un

ouvrage ou une utilisation des eaux du fleuve pourra it affecter le régime de celui-ci ou la

qualité de ses eaux ou lui causer à elle, Partie, un préjudice sensible, a un droit de veto ou de

blocage du projet ⎯mais nous affirmons qu’il ne peut être passé outre l’opposition de cette

Partie que par une décision de la Cour de céans sur le fondement de l’article 12 du statut et

qu’en autorisant le projet ENCE et la construction et la mise en service de l’usine Botnia,

l’Uruguay a commis une violation flagrante du système équilibré et raisonnable mis en place

par le statut; cette procédure eût-elle été r espectée, une partie au moins des problèmes qu’il

vous appartient de résoudre auraient pu (et dû) vo us être soumis bien plus tôt (ce qui aurait

d’ailleurs empêché que les autres se posent) ;

⎯ deuxièmement, nous ne prétendons pas qu’il n’appar tient pas à la Cour, dans le cadre de la

présente instance, de déterminer si l’usin e Botnia peut causer un préjudice sensible à

l’Argentine ou affecter le régime du fleuve ou la qualité de ses eaux ⎯mais nous avons la

ferme conviction que la compétence de la Cour va très au-delà de cette détermination et qu’il

serait absurde de s’en tenir à ceci dès lors que l’ usine a été construite et fonctionne au mépris

de nombreuses dispositions ⎯ pas seulement procédurales ⎯ du statut ;

⎯ troisièmement, nous n’alléguons pas que la CARU a un pouvoir de décision en la matière ni

qu’elle est autre chose qu’un instrument au service de ses membres (étant rappelé cependant

qu’ils sont deux et qu’aucun ne peut imposer sa volonté à l’autre) ⎯ mais nous estimons que,

conformément au texte et à l’esprit du statut , la commission doit déterminer sommairement les

risques engendrés par un projet et qu’elle c onstitue le cadre par l’intermédiaire duquel les

communications et les notifications entre les Par ties doivent intervenir et que c’est dans cette

instance (la CARU) que les questions qui divisent les Parties doivent être traitées ;

⎯ quatrièmement, nous ne considérons pas que l’ar ticle 12 n’a aucun rôle à jouer dans l’affaire

présente ⎯mais nous soutenons qu’il ne constitue pas le fondement de la juridiction de la

Cour, qui a été saisie sur la base de l’ar ticle 60, disposition qui vous donne compétence,

Messieurs les juges, pour examiner l’ensemb le des violations commises par l’Uruguay (y

compris d’avoir, par son comportement, empêché la Cour de jouer son rôle ex ante au titre de

l’article 12) ; - 59 -

⎯ cinquièmement, nous ne disons pas que le st atut de 1975 est un instrument sacro-saint et

immuable auquel il ne pourrait être dérogé par un accord des Parties ⎯ mais nous considérons

qu’une telle dérogation ne peut être le fait que d’un accord formel et dépourvu d’ambiguïté et

nous avons établi, en tout état de cause, qu’aucun accord en ce sens ⎯ non plus d’ailleurs

qu’aucun arrangement informel ⎯ a jamais été conclu pour écarter l’intervention de la CARU

ni, moins encore, pour autoriser la construction de l’usine ENCE, encore moins de Botnia;

celle-ci ne peut avoir fait l’objet d’un accord avant même qu’elle soit l’objet de discussions

entre les Parties ;

⎯ sixièmement, nous ne disons pas que l’Urug uay n’a pas le droit de promouvoir sur son

territoire l’industrie de la pâte à papier da ns le cadre de son dr oit à un développement

durable ⎯ mais nous considérons qu’il ne peut le faire en utilisant unilatéralement la ressource

partagée qu’est le fleuve Uruguay, au mépris du droit tout aussi certain de l’Argentine et de sa

population à son propre développement durable, et nous affirmons que seule la gestion du

fleuve Uruguay en vue de son utilisation rationnell e et optimale telle que l’organise le statut

réalise cet équilibre ;

⎯ septièmement, nous ne disons pas que l’usine Botn ia est, par elle-même et dans l’abstrait une

monstruosité écologique et nous reconnaissons qu’une usine de pâ te à papier produit

inévitablement des effets néfastes sur l’environnement ⎯ mais outre que, comme nous l’avons

montré, elle est loin, très loin de présenter toutes les vertus dont l’Uruguay la pare, nous

soutenons plus que jamais qu’il s’agit de la ma uvaise usine au mauvais endroit compte tenu de

la vulnérabilité de l’écosystème de ce cours d’eau international et des utilisations préalables

dont il était l’objet ⎯ ce qui veut dire aussi que nous ne contestons pas qu’elle puisse ⎯ cette

usine ⎯ légitimement (et licitement) être déloca lisée en un lieu où les énormes quantités

d’effluents qu’elle déverse seront dispersés de façon satisfaisante ;

⎯ huitièmement, nous ne nions pas que des études pr éalables ont été avalisées par l’organisation

(purement financière) qu’est la SFI ⎯ mais nous avons montré que celle-ci s’est fondée sur des

rapports qui sont loin d’être exemplaires sur le plan de l’indépendance de leurs auteurs

contrairement à ce que claironne l’Uruguay, et qui sont, en tout cas, biaisés du fait des erreurs

méthodologiques et de l’insuffisance des données sur lesquelles ils reposent et sur des études - 60 -

d’impact sur l’environnement ne répondant pas aux exigences du droit international

contemporain ;

⎯ neuvièmement, rassurez-vous, c’est mon dern ier point, nous ne prétendons pas qu’une

catastrophe écologique s’est déjà produite du fait de l’activité de Botnia, quoique des

dommages sérieux aient déjà été causés au fle uve et des préjudices sensibles à l’Argentine

⎯ mais nous avons démontré que l’usine a été ét ablie sans considération pour les principes de

prévention et de précaution, qu’elle constitue un danger né et actuel pour l’environnement et

qu’elle présente pour l’avenir des risques grav es pour l’équilibre de l’écosystème du fleuve;

comme nous l’avons établi ⎯ preuves actuelles à l’appui, et non sur la base de rapports rédigés

ex ante en fonction de données incomplètes ⎯ des pollutions importantes ont d’ores et déjà été

détectées et certaines limites posées par les st andards de la CARU et d’autres standards

applicables sont franchis, notamment en ce qui concerne la dissolution de l’oxygène ou la

présence de nonylphénols toxiques.

15. Monsieur le président, un prononcé de la Cour en faveur de la thèse que l’Uruguay vous

a présentée signifierait :

1) qu’unEtat ⎯ Un Etat ⎯ riverain d’un fleuve international peut l’utiliser et le polluer à bien

plaire dès lors que les activités en cause sont situées sur sa rive ou de son côté du thalweg ou du

chenal navigable, et ceci quand bien même ce cours d’eau ferait l’objet d’un traité le soumettant

à des règles précises et raisonnables de gestion commune ; cela voudrait dire aussi,

2) que la Cour mondiale serait prête à légitimer les proclamations unilatérales d’un droit souverain

à un développement qui ne serait ni durable (car souverainement indifférent à la protection de

l’environnement), ni respectueux de l’objet mê me du statut de 1975 qui organise l’exercice de

ce droit dans l’intérêt des deux Etats parties en promouvant «l’utilisation rationnelle et optimale

du fleuve» ; et,

3) cela signifierait aussi, en un mot, que pacta non sunt servanda puisqu’il suffirait à une partie de

déclarer que, «selon son opinion», elle est dans son bon droit quand bien même un traité lui

impose une concertation poussée et organisée avec son partenaire et, prévoit que, faute

d’accord, les parties doivent s’en remettre à la Cour, non pas ex post, mais ex ante, avant

d’avoir créé un fait que l’une d’elle présente comme irréversible. - 61 -

16. J’hésite, Monsieur le président, à lire à nouveau le dictum fameux de votre avis de 1996.

124
Mais la Partie uruguayenne n’a pas h ésité à se l’approprier très abusivement alors que toute son

attitude dément l’attachement qu’ elle proclame aux principes que vous avez si heureusement

exprimés. En le citant à nouv eau, je voudrais confirmer que ce dictum lumineux traduit très

exactement les principes dont l’Argentine s’est in spirée dans toute cette affaire : «l’environnement

n’est pas une abstraction, mais bien l’espace où vivent les être s humains et dont dépendent la

qualité de leur vie et leur santé, y compris pour les générations à venir» 125 (Licéité de la menace ou

de l’emploi d’armes nucléaires, avis consultatif, C.I.J. Recueil 1996 (I), p. 241-242, par. 29).

J’épargne la fin de la citation mais je voudrais dire que ces vérités ont, aujourd’hui, valeur de

principes généraux applicables même sans texte; il en va a fortiori de même lorsqu’elles sont

reflétées dans un texte conventionnel.

17. Bien qu’il ait été conclu il y a près de trente-cinq ans, le statut du fleuve Uruguay avait

largement anticipé cet aboutissement et organisé la protection de la ressource partagée que

constitue ce cours d’eau en posant les règles d’une gestion commune que la République orientale

de l’Uruguay a bafouées. C’est ce comportement illicite, aux graves réperc ussions tant concrètes

que sur le plan des principes, que la République argentine vous prie de bien vouloir sanctionner en

constatant la responsabilité de l’Etat défendeur et en en tirant les conséquences de droit sur le plan

de la réparation.

18. Monsieur le président, Messieurs les jug es, j’espère ne pas avoir trop abusé de votre

bienveillante attention. Je vous suis très reconna issant de me l’avoir prêtée et je vous prie,

Monsieur le président, de bien vouloir donner la parole à Mme l’ambassadeur Susana Ruiz Cerutti.

Le VICE-PRESIDENT, faisant fonction de président: Je vous remercie, Monsieur le

professeur. Je donne la parole à Mme l’ambassadeur Ruiz Cerutti, pour les remarques et

conclusions finales de la République argentine. Vous avez la parole, Madame.

124Voir CR 2009/17, p. 50, par. 10 (McCaffrey) et CR 2009/18, p. 20, par. 27 (Boyle).

125Voir aussi Projet Gab číkovo-Nagymaros (Hongrie/Slovaqu ie), arrêt, C.I.J.Recueil1997 , p.41 et 67-68,
par.53 et 112; Usines de pâte à papier sur le fl euve Uruguay (Argentine c.Uruguay) , mesures conservatoires,
ordonnance du 13 juillet 2006, C.I.J.Recueil2006, p.132, par.72; ou CPA, sentence arbitrale du 24mai2005, par.59
(disponible sur http://www.pca-cpa.org/upload/files/Iron_Rhine_Franch_award.pd(traduction non officielle)); voir
aussi RSA, vol. XVIII, p. 66-67. - 62 -

Mme RUIZ CERUTTI : Merci.

C ONCLUSIONS

1. Monsieur le président, Messieurs les juges, les conseils et avocats de l’Argentine vous ont

présenté notre cas et les arguments de fait et de dr oit qui le prouve et le professeur Pellet vient de

les résumer. Il me revient maintenant de faire quelques remarques conclusives et permettez-moi de

continuer dans la même veine que mon ami, le professeur Pellet.

2. Comme nous l’avons déjà expliqué, l’ Uruguay a cru pouvoir reformuler le cas que

l’Argentine a porté devant votre haute ju ridiction pour pouvoir répondre à son propre cas ⎯ très

différent du nôtre. Mais, Monsieur le président, c’est au demandeur de formuler son affaire, et au

défendeur d’y répondre.

3. Messieurs les juges, l’affaire que l’Argen tine a soumise à la Cour n’est pas celle relative

au développement durable de l’Uruguay. L’Argent ine n’a jamais remis en question le droit dont

jouit son voisin (au même titre que notre pays) à un développement économique durable. L’affaire

dont vous êtes saisis ne porte pas sur cette question.

4. Elle ne porte pas non plus sur l’activité industrielle menée sur la rive argentine, sur

laquelle se sont installées des petites et moyennes en treprises dont la taille et l’activité ne sont en

rien comparables à celles de Botnia. L’Urugua y n’a jamais prétendu que l’article27 du statut

s’applique à ces installations.

5. Il ne s’agit pas non plus d’une affaire contre une société privée, Botnia, ou contre

l’industrie de la pâte à papier tout entière. Notre affaire n’est pas non plus un concours d’ingénierie

industrielle pour savoir quelle est la meilleure usine de pâte à papier.

6. L’affaire devant la Cour n’est pas non plus dirigée contre la Société financière

internationale qui a choisi de financer le projet de l’usine Botnia. L’Argentine a, depuis le début de

la procédure au sein de la SFI, informé l’organisa tion de l’existence d’un différend concernant ce

projet et a fait connaître sa position. L’Argentine regrette beaucoup la décision que la SFI a prise

en novembre 2006 sur la base d’une documentation biai sée. Mais la SFI n’est pas une partie dans

cette affaire. Les informations et rapports étab lis pour les seuls besoins du financement de l’usine

Botnia, par ailleurs insuffisants et basés sur des informations recueillies et produites largement par - 63 -

l’entreprise elle-même, n’ont pas été conçus pour prouver la conformité de l’usine aux exigences

du statut de 1975. Ils ne bénéficient, dans notre a ffaire, d’aucune valeur probante particulière et ne

dispensent en aucune manière l’Uruguay du respect de ses obligations découlant du statut de 1975.

7. L’affaire que l’Argentine vous a soumise ne concerne pas non plus et ne met aucunement

en question les relations bilatérales entre nos deux pays, et je reviendrai un peu plus tard sur ce

point.

8. L’affaire que l’Argentine a portée devant votre Cour n’est pas tout ça.

*

9. Notre affaire concerne un traité ⎯le statut du fleuve Uruguay ⎯, ses violations et la

responsabilité qui en découle.

10. Notre affaire concerne le respect de cet instrument conventionnel particulier et spécifique

qui a pour but d’assurer une utilisation rationn elle et optimale du fleuve Uruguay et le

développement économique aux deux pays riverains tout en évitant toute pollution et toute

modification de l’équilibre écologique du fleuve et de son écosystème. Notre affaire porte sur

l’utilisation d’un mécanisme commun dont le but est de gérer conjointement le fleuve pour prévenir

et éviter tout problème de pollution. Notre affa ire porte sur les violations par l’Uruguay de ses

obligations de saisir la CARU et de notifier à son voisin à travers la CARU, un projet industriel

«suffisamment important pour affecter le régime du fleuve ou la qualité de ses eaux». Elle porte

sur la violation de l’obligation de transmettre l’in formation nécessaire et de consulter. Et cette

affaire porte sur la violation de l’obligation de prévenir toute pollution du fleuve et de son

écosystème. Il s’agit d’une affaire qui concerne l’ ensemble de l’instrument régissant le fleuve et

non pas seulement l’une de ses dispositions prise isolément.

11. L’affaire de l’Argentine n’est que cela, mais elle est tout cela.

*

12. Monsieur le président, Messieurs de la C our, vous avez vu jongler les avocats et conseils

de l’autre côté de la barre avec des dates, des notes diplomatiques, des procès-verbaux de la CARU - 64 -

qui, soi-disant, constitueraient un accord entre l’Argentine et l’Uruguay pour écarter les

dispositions procédurales du statut pour l’examen de s projets ENCE et Botnia. Il s’agit de simples

effets de manches habilement imaginés afin de te nter de cacher la décision unilatérale prise par

l’Uruguay d’écarter le régime d’information et de consultation préalables que nos deux pays ont

suivi ensemble pendant tant d’années.

13. Tant après l’autorisation unilatérale de la construction de l’usine ENCE en2003,

qu’après celle donnée à Botnia en2005, l’Argentin e a essayé, à plusieurs reprises, que l’Uruguay

se conforme au respect du statut et soumette les projets à la CARU pour qu’elle les étudie et les

analyse. Ces efforts sont restés vains.

14. A partir du mois de mars 2005, il est devenu évident que le nouveau Gouvernement

uruguayen, qui pendant la campagne électorale avait pris position contre les usines de pâte à papier,

allait continuer, de manière non équivoque, la politique de l’unilatéralisme de son prédécesseur.

15. A partir de ce moment, le Gouvernement argentin a entrepris des nouvelles tentatives

pour trouver un règlement au différend. A cette fi n, il demanda la relocalisation, la transmission

d’informations, la suspension des travaux et une évaluation complète de l’impact des deux usines

sur l’environnement du fleuve. Les présidents des deux pays se mirent d’accord pour créer un

groupe technique ⎯ le GTAN ⎯ pour essayer de trouver encore une fois une solution au différend,

et notamment à la question de la localisation des usines, comme les professeurs Pellet etKohen

l’ont déjà expliqué. L’Uruguay n’a jamais voulu di scuter ces questions qui, selon lui, relèvent de

sa seule souveraineté et qui n’étaient pas, à son avis toujours, soumis au respect du statut de 1975.

Ses réponses ont été négatives et ont provoqué l’échec du GTAN.

16. Malgré le constat que seule la saisine de la Cour pourrait apporter une solution au

différend conformément à l’article 60 du statut, l’Argentine continua à chercher un règlement

diplomatique de l’affaire. En mars 2006, un projet d’accord très prometteur et négocié au plus haut

niveau n’a pas pu être signé en raison du refus de Botnia de suspendre les travaux de construction.

Même après le dépôt de la requête introductive d’ instance et en plein déroulement de la procédure

devant votre Cour, une procédure de facilitation par S.M. le ro i d’Espagne et le Gouvernement

espagnol a été mise en place à l’initiative de l’Argentine; mais en novembre2007, l’Uruguay a

également provoqué la fin de ces négociations en autorisant la mise en service de l’usine de Botnia. - 65 -

17. Monsieur le président, l’Uruguay n’a cherché qu’une chose : la construction et la mise en

service des usines aussi rapidement que possible afin de tenter de mettre l’Argentine (puis la Cour)

devant un fait accompli.

18. Aujourd’hui, l’Uruguay accuse l’Argentine de ne pas vouloir coopérer au sein de la

CARU pour effectuer la surveillance de Botnia. Mais il ne peut pas choisir seulement ce qui lui

convient. On ne peut pas refuser tout rôle à la CARU en relation avec les projets des usines et, en

même temps, réclamer la coopération de la même CARU pour surveiller conjointement les

dommages écologiques que l’une de ses usines, Botnia, est en train de causer. Ce n’est pas

acceptable. L’Argentine se refuse à voir son rôle dans le cadre du statut se réduire à cela ⎯ à la

seule surveillance ex post.

19. Une telle politique de l’unilatéralisme est désastreuse pour un fleuve international

comme l’Uruguay. Nos adversaires semblent oublier qu’il s’agit justement d’une ressource

partagée soumise à un régime juridique spécifique. Ce n’est ni la Tamise, ni la Seine, ni le

Mississipi. Si l’interprétation biaisée du statut de 1975 défendue par l’Uruguay depuis 2003 étaient

la bonne, si chaque riverain avait le droit d’auto riser ou de construire unilatéralement n’importe

quel ouvrage soumis au statut nonobs tant le désaccord de l’autre, Monsieur le président, il ne

s’agirait pas de coopération et d’utilisation rationn elle et optimale: ce serait tout simplement

l’anarchie, la fin du statut du fleuve Uruguay.

*

20. Messieurs de la Cour, aujourd’hui, l’Argentine l’a démontré, nous sommes loin d’évaluer

un simple risque à l’environnement du fleuve. Nous avons démontré, par la voix du professeur

BoissondeChazournes que les études d’impact ét aient manifestement inad équates. Nous avons

prouvé que l’usine a causé d’ores et déjà un préjud ice sensible à son environnement, à la qualité de

ses eaux, à sa flore et à sa faune. Vous avez lu les rapports et entendu les propos des professeurs

Colombo et Wheater. Le professeur Sands vous a expliqué que l’Uruguay a choisi d’ignorer le

problème des courants inversés dans le fleuve Ur uguay. Nous avons démontré que l’usine Botnia - 66 -

viole les standards de la qualité des eaux établis au sein de la CARU. L’usine Botnia utilise et

rejette des substances toxiques pour l’environnement. Nos preuves le montrent clairement.

21. L’Argentine a fait beaucoup d’efforts pour mettre en place un système transparent de

surveillance du fleuve, des eaux et de l’air, de la flore et de la faune, aussi complet que possible.

Elle avait proposé un tel programme au sein même de la CARU dès août 2006. L’Uruguay n’a pas

voulu approuver un tel programme au sein de la commission à cause de son interprétation trop

restrictive du champ d’application du statut qui n’est pas limité aux seules eaux du fleuve. Le

rapport que les experts argentins ont établi et qui a été soumis à l’appréciation de la Cour le

30juindernier est basé sur une surveillance de l’air, de l’eau, des sédiments, de la flore et de la

faune, sur de très nombreux échantillons, et sur des milliers de données ⎯bref sur un travail

scientifique de haute qualité et conforme aux règles de l’art. Les experts argentins ne se sont pas

simplement fiés aux données et échantillons prélevés par d’autres ⎯et certainement pas par

Botnia ⎯ comme c’est le cas de beaucoup des rapports soi-disant «indépendants» sur lesquels se

fonde la Partie adverse.

22. Les résultats que l’Argentine a recueillis , malgré les difficultés qu’elle a dû surmonter,

ont d’ores et déjà démontré que l’us ine n’est pas cette «superb facility» 126 que l’Uruguay a dépeint

la semaine dernière. Les changements causés à l’environnement du fleuve sont réels, ils violent les

standards de la CARU et constituent un préjudice sen sible au fleuve et à l’Argentine contraire aux

dispositions du statut. Messieurs de la Cour, tous ces faits se sont passés alors que l’usine n’a

fonctionné que pendant un peu moins de deux ans. Imaginez-vous les dommages à venir dans

les dix, vingt ou dans les quarante ans de la vie utile de cette usine ? Et après… ?

23. Messieurs de la Cour, l’Argentine cherche la confirmation et la sauvegarde du

mécanisme commun qu’elle a établi avec son voisin par le statut du fleuve Uruguay, mais

également qui se trouve dans le traité sur le Rí o de la Plata. Ces deux fleuves constituent la

frontière naturelle entre nos deux pays et, en mê me temps, leur trait d’union. Consacrer la

politique de l’unilatéralisme donnerait un coup mortel à cette architecture normative édifiée

126
CR 2009/17, p. 45, par. 55 (McCubbin). - 67 -

soigneusement depuis plus de trente-cinq ans et qui est basée sur la coopération, l’information et la

consultation préalables.

24. Monsieur le président, Messieurs les Memb res de la Cour, l’amitié entre les deux pays

n’est pas en jeu. Les relations bilatérales, heureusement, se portent tout à fait bien : elles sont très

riches. Je vais donner seulement trois exemples : les relations commerciales sont excellentes:

l’Argentine est le deuxième fournisseur du marc hé uruguayen et la deuxième destination des

exportations de l’Uruguay. Dans le domaine du tourisme, en 2008, l’Uruguay a reçu deux millions

de touristes, dont 53% sont argentins. En janvier2009, ce chiffre était passé à73%. Dans le

domaine de l’énergie renouvelable ⎯ pour trouver un troisième exemple ⎯ les deux pays sont en

train de mettre sur pied, en Uruguay, un projet binational d’usine de regazéification d’une grande

envergure. Ce projet implique un investissement plus important que celui de Botnia.

25. C’est seulement au niveau local que le différend a créé des tensions. Il a divisé la

communauté riveraine que formaient auparavant les villes de Gualeguaychú en Argentine et de

Fray Bentos en Uruguay. Depuis sixans, les habitants de Gualeguaychú se sont vu imposer les

projets d’usine de pâtes à papier sans avoir été cons ultés. Ils souffrent déjà des conséquences de la

présence de l’usine Botnia ; ils ont peur et ils cr aignent pour leur santé à l’idée de quarante années

à supporter des odeurs nauséabondes, quaranteann ées de pluies acides, quaranteannées d’algues

127
toxiques. La réaction à laquelle la Partie uruguayenne a fait allusion la semaine dernière et que

l’Argentine n’a aucunement encouragée n’est que la conséquence de l’installation de l’usine sur la

rive gauche du fleuve Uruguay en face de la ville de Gualeguaychú et de Ñyandubaysal. Vous

n’êtes pas appelés à juger les habitants de cette ville; et il est clair que l’affaire qui vous est

soumise ne concerne aucunement la circulation r outière entre l’Argentine et l’Uruguay. Elle

concerne le statut de 1975 et le respect dû à ses dispositions.

26. A en croire certaines remarques que l’on a pu entendre dernièrement, saisir la Cour serait

une sorte d’acte inamical de la part de l’Argentine. Ce n’était pa s l’intention de l’Argentine et ce

n’était pas l’intention des deux Parties qui, dans un esprit de coopération, ont choisi la Cour comme

étant l’organe appelé à se prononcer en dernier re ssort sur leurs éventuels désaccords au sujet de

127
CR 2009/16, p. 16-18, par. 20-22 (Gianelli) ; CR 2009/19, p. 42-43, par. 24-25 (Reichler). - 68 -

l’application du traité du Río de la Plata et du statut du fleuve Uruguay. Ce choix montre que les

deux pays ont confiance dans le droit international dont votre Cour est l’organe. L’Argentine a

confirmé cette confiance en s oumettant le différend qui l’oppo se à l’Uruguay devant cette haute

juridiction.

27. Monsieur le président, Messieurs de la Cour, l’Argentine et l’Uruguay ont convenu

d’adopter le statut et se sont engagés à prévenir la pollution du fleuve et à éviter toute modification

de son équilibre écologique. Les deux Parties ont créé un mécanisme permettant de mettre en

Œuvre ces obligations et ont confié à la Cour le rôle de garantir leur respect. C’est cela, l’enjeu de

notre affaire. L’Argentine n’a p as d’objections de principe contre les usines de pâte à papier en

général. Nos objections concernent cette usine ⎯ Botnia ⎯ à cet emplacement ⎯

l’environnement sensible de la ressource partagée qu’est le fleuve Uruguay. C’est la mauvaise

usine au mauvais endroit.

*

28. Avant de donner lecture des conclusions de la République argentine, j’aimerais au nom

des agents et de toute l’équipe, vous remercier, Monsieur le président, Messieurs les juges, pour

l’attention, la patience et la courtoisie dont vous avez fait preuve au cours de ces trois semaines

d’audiences. Nos remerciements vont également au Greffe pour la précieuse assistance qu’il nous

a apportée dans le cadre de cette affaire et pour le bon déroulement des audiences. J’aimerais

également exprimer notre gratitude aux excelle nts interprètes, qui ont accompli un travail

remarquable. Ma reconnaissance va aussi au conseil et à tous les membres de l’équipe argentine et

à tous ceux qui ont appuyé leurs travaux.

29. Monsieur le président, Messieurs les juges, je vais maintenant lire les conclusions finales

de la République argentine conformément à l’article 60, paragraphe 2, du Règlement de la Cour.

Pour l’ensemble des raisons exposées dans son mémoire, dans sa réplique et lors de la

procédure orale, qu’elle maintient intégralement, la République argentine prie la Cour

internationale de Justice de bien vouloir :

1. constater qu’en autorisant - 69 -

⎯ la construction de l’usine ENCE,

⎯ la construction et la mise en service de l’usine Botnia et de ses installations connexes sur la rive

gauche du fleuve Uruguay,

la République orientale de l’Uruguay a violé les obligations lui incombant en vertu du statut du

fleuve Uruguay du 26 février 1975 et engagé sa responsabilité internationale ;

2. dire et juger qu’en conséquence, la République orientale de l’Uruguay doit :

i) reprendre une stricte application de ses ob ligations découlant du statut du fleuve Uruguay

de 1975 ;

ii) immédiatement cesser les faits internationa lement illicites par lesquels elle a engagé sa

responsabilité ;

iii) rétablir sur le terrain et au plan juridiquela situation qui existait avant la perpétration de

ces faits internationalement illicites ;

iv) verser à la République argentine une indemnité pour les dommages occasionnés par ces

faits internationalement illicites, qui ne seraient pas réparés par cette remise en état, dont le

montant sera déterminé par la Cour dans une phase ultérieure de la présente instance ;

v) donner des garanties adéquates qu’elle s’abs tiendra à l’avenir d’empêcher l’application du

statut du fleuve Uruguay de 1975 et, en particu lier, du mécanisme de consultation institué

par le chapitre II de ce traité.

30. Monsieur le président, Messieurs les jug es, ceci marque la fin de la présentation de

l’Argentine. Je vous remercie beaucoup.

Le VICE-PRESIDENT, faisant fonction de président : Je vous remercie infiniment, Madame

l’agent. La Cour prend acte des conclusions fina les dont vous venez de donner lecture au nom de

la République argentine. Avant de lever la séance, je veux donner la parole à M. le juge Bennouna

qui souhaite poser une question à l’une des Parties. Monsieur le juge, s’il vous plaît.

M. le juge BENNOUNA : Je vous remercie, Monsieur le président en exercice. Ma question

qui s’adresse à l’Uruguay est la suivante: Quel procédé et quel produit sont utilisés par l’usine

Botnia pour son nettoyage ? - 70 -

In English, this question to Uruguay is as follows: What process and what products are used

by Botnia plant for its cleaning?

Je vous remercie, Monsieur le président en exercice.

Le VICE-PRESIDENT, faisant fonction de prési dent: Je vous remercie Monsieur le juge.

Le texte de cette question sera communiqué par écrit aux Parties dès que possible. La République

orientale de l’Uruguay, à laquelle la question de M. le juge Bennouna est adressée, est priée de

fournir sa réponse par écrit dans un délai qui a ét é fixé au vendredi 9 octobre 2009 à 18 heures au

plus tard. En outre, toutes observations écrit es que la République argentine pourrait vouloir

présenter, conformément à l’article72 du Règlement, sur la réponse de l’autre Partie devront être

communiquées le lundi 19 octobre 2009 à 18 heures au plus tard.

Je rappellerai que la République orientale de l’Uruguay présentera son second tour de
er
plaidoiries le jeudi1 octobre, de 15heures à18heures, et le vendredi 2octobre de 10heures à

13 heures.

L’audience est levée.

L’audience est levée à 13 heures.

___________

Document Long Title

Public sitting held on Tuesday 29 September 2009, at 10 a.m., at the Peace Palace, Vice-President Tomka, Acting President, presiding, in the case concerning Pulp Mills on the River Uruguay (Argentina v. Uruguay)

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