INTERNATIONAL COURT OF JUSTICE
APPLICATION
INSTITUTING PROCEEDINGS
filed in the Registry of the Court
on 12 August 2008
APPLICATION OF THE INTERNATIONAL
CONVENTION ON THE ELIMINATION
OF ALL FORMS
OF RACIAL DISCRIMINATION
(GEORGIA v. RUSSIAN FEDERATION)
COUR INTERNATIONALE DE JUSTICE
REQUE |TE
INTRODUCTIVE D’INSTANCE
enregistrée au Greffe de la Cour
le 12 août 2008
APPLICATION DE LA CONVENTION
INTERNATIONALE SUR L’E uLIMINATION
DE TOUTES LES FORMES
DE DISCRIMINATION RACIALE
(GuORGIE uDuRATION DE RUSSIE) 2
2008
General List
No. 140
APPLICATION INSTITUTING PROCEEDINGS
TABLE OF CONTENTS
Page
I. Introduction . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 4
II. Jurisdiction of the Court . . . . . . . . . . . . . . . . . . 12
III. The facts . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 12
A. The Republic of Georgia: from the USSR to the CIS . . . . 12
B. The first phase of Russia’s intervention in South Ossetia:
1990-1992 . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 14
C. The first phase of Russia’s intervention in Abkhazia: 1991 to
1994 . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 18
D. The second phase of Russia’s intervention in South Ossetia and
Abkhazia: 1994 to 2008 . . . . . . . . . . . . . . . . . 28
E. The third phase of Russia’s intervention in South Ossetia and
Abkhazia: August 2008 . . . . . . . . . . . . . . . . . 34
IV. The claims of the Republic of Georgia . . . . . . . . . . . . 42
V. The relief sought . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 44
VI. Judge ad hoc ....................4.. 8
VII. Reservation of rights . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 48
VIII. Appointment of Agents . . . . . . . . . . . . . . . . . . 48 3
2008
Rôle général
no 140
REQUÊTE INTRODUCTIVE D’INSTANCE
[Traduction]
TABLE DES MATIÈRES
Pages
I. Introduction . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 5
II. Compétence de la Cour. . . . . . . . . . . . . . . . . . . 13
III. Les faits . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 13
A. La République de Géorgie: de l’URSS à la CEI . . . . . . 13
B. La première phase de l’intervention russe en Ossétie du Sud:
1990-1992 . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 15
C. La première phase de l’intervention russe en Abkhazie: 1991-
1994 . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 19
D. La deuxième phase de l’intervention russe en Ossétie du Sud et
en Abkhazie: de 1994 à 2008 . . . . . . . . . . . . . . 29
E. La troisième phase de l’intervention russe en Ossétie du Sud et
en Abkhazie: août 2008 . . . . . . . . . . . . . . . . . 35
IV. Griefs de la République de Géorgie . . . . . . . . . . . . . 43
V. Décision sollicitée . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 45
VI. Juge ad hoc ...................4... 9
VII. Réserve de droit . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 49
VIII. Agents . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 49 4
I. NTRODUCTION
1. The Republic of Georgia brings this Application against the Russian Fed-
eration under the 1965 International Convention on the Elimination of All
Forms of Racial Discrimination (“CERD”) to establish the international
responsibility of the Russian Federation for its actions on and around the ter-
ritory of Georgia in breach of CERD. By this Application, the Republic of
Georgia also seeks to ensure that the individual rights under CERD of all per-
sons on the territory of Georgia are fully respected and protected. Article 22 of
CERD confers jurisdiction on the International Court of Justice to resolve dis-
putes between the State parties.
2. The Russian Federation, acting through its organs, agents, persons and
entities exercising elements of governmental authority, and through South
Ossetian and Abkhaz separatist forces under its direction and control, has
practised, sponsored and supported racial discrimination through attacks
against, and mass-expulsion of, ethnic Georgians, as well as other ethnic
groups, in the South Ossetia and Abkhazia regions of the Republic of Georgia.
These actions have resulted in significant changes in the ethnic composition of
South Ossetia and Abkhazia. The Russian Federation seeks to consolidate
these changes by preventing the return to South Ossetia and Abkhazia of for-
cibly displaced ethnic Georgians citizens and by undermining Georgia’s cap-
acity to exercise jurisdiction in this part of its territory. The changed demographic
situation in South Ossetia and Abkhazia is intended to provide the foundation
for the unlawful assertion of independence from Georgia by the de facto South
Ossetian and Abkhaz separatist authorities, as supported by the Russian Fed-
eration most egregiously in its 8 August 2008 invasion of Georgia.
3. By its accession to CERD, the Russian Federation has undertaken inter
alia:
— “to pursue by all appropriate means and without delay a policy of elimi-
nating racial discrimination in all its forms” (Art. 2),
— to “prevent, prohibit and eradicate all practices” of racial segregation
(Art. 3),
— to eradicate all incitement to, or acts of, discrimination based on superiority
on grounds of ethnicity (Art. 4),
— to “prohibit and to eliminate racial discrimination in all its forms” and
guarantee the enjoyment of fundamental human rights (Art. 5), and
— to provide “effective protection and remedies” against acts of racial dis-
crimination (Art. 6).
4. Racial discrimination is defined in Article 1 of CERD as:
“Any distinction, exclusion, restriction or preference based on race, col-
our, descent, or national or ethnic origin which has the purpose or effect of
nullifying or impairing the recognition, enjoyment or exercise, on an equal
footing, of human rights and fundamental freedoms in the political, eco-
nomic, social, cultural or any other field of public life”.
5. The Russian Federation has violated its obligations under CERD during
three distinct phases of its interventions in South Ossetia and Abkhazia. 5
I. INTRODUCTION
1. En vertu de la convention internationale sur l’élimination de toutes les
formes de discrimination raciale («CIEDR») de 1965, la République de Géor-
gie introduit par la présente requête une instance contre la Fédération de Rus-
sie en vue d’établir la responsabilité internationale de celle-ci à raison de ses
actes commis sur le territoire de la Géorgie et dans les environs en violation de
la CIEDR. Par la présente requête, la République de Géorgie demande égale-
ment que les droits individuels que toutes les personnes se trouvant sur le ter-
ritoire géorgien tiennent de la convention soient pleinement respectés et proté-
gés. L’article 22 de la CIEDR confère compétence à la Cour internationale de
Justice pour régler les différends entre les Etats parties.
2. La Fédération de Russie, par l’intermédiaire de ses organes et agents ainsi
que d’autres personnes et entités exerçant une autorité gouvernementale, et par
l’intermédiaire des forces séparatistes d’Ossétie du Sud et d’Abkhazie agissant
sous sa direction et son contrôle, a pratiqué, encouragé et appuyé la discrimi-
nation raciale dans les régions géorgiennes d’Ossétie du Sud et d’Abkhazie en
lançant des attaques contre des personnes de souche géorgienne et d’autres
groupes ethniques et en se livrant à des expulsions massives de ces populations.
Ces actes ont considérablement modifié la composition ethnique de l’Ossétie du
Sud et de l’Abkhazie. La Fédération de Russie cherche à consolider ces change-
ments en empêchant le retour en Ossétie du Sud et en Abkhazie des citoyens de
souche géorgienne déplacés par la force et en entravant l’exercice par la Géor-
gie de sa juridiction sur cette partie de son territoire. Cette modification de la
composition démographique de l’Ossétie du Sud et de l’Abkhazie est destinée à
asseoir les bases d’une affirmation illicite d’indépendance de la Géorgie par les
autorités séparatistes de facto sud-ossètes et abkhazes, massivement soutenues
par la Fédération de Russie lors de son invasion de la Géorgie du 8 août 2008.
3. Par son adhésion à la CIEDR, la Fédération de Russie s’est notamment
engagée:
— «à poursuivre par tous les moyens appropriés et sans retard une politique
tendant à éliminer toute forme de discrimination raciale» (art. 2);
— «à prévenir, à interdire et à éliminer ... toutes les pratiques» de ségrégation
raciale (art. 3);
— à éliminer toute incitation à la discrimination ou tous actes de discrimination
fondés sur la supériorité d’une origine ethnique (art. 4);
— «à interdire et à éliminer la discrimination raciale sous toutes ses formes» et à
garantir la jouissance des droits fondamentaux de l’homme (art. 5);
— à assurer «une protection et une voie de recours effectives» contre les actes
de discrimination raciale (art. 6).
4. L’article premier de la CIEDR définit la discrimination raciale de la
manière suivante:
«toute distinction, exclusion, restriction ou préférence fondée sur la race,
la couleur, l’ascendance ou l’origine nationale ou ethnique, qui a pour but
ou pour effet de détruire ou de compromettre la reconnaissance, la jouis-
sance ou l’exercice, dans des conditions d’égalité, des droits de l’homme et
des libertés fondamentales dans les domaines politique, économique, social
et culturel ou dans tout autre domaine de la vie publique».
5. La Fédération de Russie a violé les obligations que lui impose la CIEDR
au cours de trois phases distinctes de ses interventions en Ossétie du Sud et en
Abkhazie. 6
6. In the first phase between 1990 and 1994, the Russian Federation pro-
vided essential support to South Ossetian and Abkhaz separatists in their
attacks against, and mass-expulsion of, virtually the entire ethnic Georgian
population of South Ossetia and Abkhazia. This resulted in the killing of thou-
sands of civilians and the forced displacement of over 300,000 people. Support
from the Russian Federation included the provision of weapons and supplies
and the recruitment of mercenaries to support separatist forces in both regions,
and, in the case of Abkhazia, the deployment of Russian armed forces directly
to assist military operations conducted by the separatists. The United Nations
(“UN”) and the Organization for Security and Co-operation in Europe
(“OSCE”) have repeatedly characterized the attac1s on civilian populations in
Abkhazia as an instance of “ethnic cleansing” .
7. The Russian Federation’s sponsorship and support of the South Ossetian
and Abkhaz separatists in their campaigns to change the ethnic composition of
South Ossetia and Abkhazia through the forced transfer of ethnic Georgians
from their homes and communities is manifestly inconsistent with the obliga-
tions it has assumed under CERD.
8. The second phase of the Russian Federation’s intervention commenced in
South Ossetia with the 24 June 1992 Agreement on the Principles of the Settle-
ment of the Georgian-Ossetian Conflict signed by Georgia, the South Ossetian
separatist forces, and the Russian Federation (the “Sochi Agreement”). In
Abkhazia, the second phase of Russian intervention began with the 14 May 1994
Moscow Agreement on a Ceasefire and Separation of Forces signed by Geor-
gia, the Abkhaz separatist forces and the Russian Federation (the “Moscow
Agreement”).
9. These Agreements formalized the Russian Federation’s dual status as a
party to those conflicts and as an ostensible peacekeeper and facilitator of
negotiations. By implementing racially discriminatory policies in South Ossetia
and Abkhazia under cover of its peacekeeping mandate, the Russian Federa-
tion has sought to consolidate the forced displacement of the ethnic Georgian
and other populations that resulted from “ethnic cleansing” from 1991 to 1994.
In particular, the Russian Federation has supported the South Ossetian and
Abkhaz separatists’ quest for independence from Georgia. Achieving this goal
necessarily implies the expulsion of ethnic Georgians and other populations
from their homes, and denial of their right to return to their homes and to live
in peace within the sovereign territory of Georgia.
10. In furtherance of this policy, the Russian Federation has consistently
frustrated the return of internally displaced persons (IDPs) since the conflicts of
1991-1994. As a consequence, demographic changes forced upon the popula-
tion by the South Ossetian and Abkhaz separatists with Russian support are
more likely to become permanent. In recognition of this situation, on
29 May 2008, the United Nations General Assembly expressed its deep concern
at the “demographic changes resulting from the conflict in Abkhazia, Georgia,
1 United Nations General Assembly resolution, 29 May 2008, A/RES/62/249; OSCE,
Budapest Document 1994, “Towards a Genuine Partnership in a New Era”, 21 Decem-
ber 1994. 7
6. Pendant la première phase, entre 1990 et 1994, la Fédération de Russie a
apporté un appui vital aux séparatistes d’Ossétie du Sud et d’Abkhazie dans le
cadre d’attaques et d’expulsions massives visant la quasi-totalité de la popula-
tion de souche géorgienne de ces deux régions. Des milliers de civils ont ainsi
été tués et plus de 300 000 personnes déplacées par la force. L’appui prêté
par la Fédération de Russie a notamment consisté à assurer la fourniture
d’armes et de matériel et le recrutement de mercenaires pour soutenir les forces
séparatistes dans les deux régions, et, dans le cas de l’Abkhazie, à déployer ses
propres forces armées pour assister directement les séparatistes dans leurs opé-
rations militaires. L’Organisation des Nations Unies et l’Organisation pour la
sécurité et la coopération en Europe ont à plusieurs reprises présenté les atta-
ques lancées contre les populations civiles d’Abkhazie comme un cas de «net-
toyage ethnique» 1.
7. L’aide et le soutien apportés par la Fédération de Russie aux sépara-
tistes d’Ossétie du Sud et d’Abkhazie dans leurs campagnes visant à modifier la
composition ethnique de ces deux régions par l’expulsion des personnes de
souche géorgienne de leurs domiciles et de leurs communautés constituent
une violation flagrante des obligations qui lui incombent aux termes de la
CIEDR.
8. La deuxième phase de l’intervention de la Fédération de Russie en Ossétie
du Sud remonte à l’accord du 24 juin 1992 sur les principes du règlement du
conflit entre la Géorgie et l’Ossétie du Sud (ci-après l’«accord de Sotchi») signé
par la Géorgie, les forces séparatistes sud-ossètes et la Fédération de Russie. En
Abkhazie, cette deuxième phase a commencé avec l’accord de cessez-le-feu et de
séparation des forces (ci-après l’«accord de Moscou») signé le 14 mai 1994 à
Moscou par la Géorgie, les forces séparatistes abkhazes et la Fédération de
Russie.
9. Ces accords ont formalisé le double statut de la Fédération de Russie
en tant que partie à ces conflits, d’une part, et soi-disant garant du maintien
de la paix et facilitateur des négociations, de l’autre. En mettant en Œuvre
des politiques de discrimination raciale en Ossétie du Sud et en Abkhazie
sous le couvert de sa mission de maintien de la paix, la Fédération de
Russie s’est employée à pérenniser le déplacement forcé de diverses popu-
lations, notamment de souche géorgienne, auquel avait abouti le
«nettoyage ethnique» pratiqué entre 1991 et 1994. Elle a en particulier
soutenu les revendications indépendantistes des séparatistes d’Ossétie
du Sud et d’Abkhazie à l’égard de la Géorgie; or, la réalisation de cet
objectif suppose nécessairement l’expulsion de leurs foyers des personnes
de souche géorgienne et d’autres populations, et le déni de leur droit de
retourner dans leurs foyers et de vivre en paix sur le territoire souverain de
la Géorgie.
10. Dans le cadre de cette politique, la Fédération de Russie, depuis les
conflits de 1991-1994, a systématiquement fait obstacle au retour des personnes
déplacées, et de ce fait les changements démographiques imposés à la popula-
tion par les séparatistes sud-ossètes et abkhazes avec le soutien de la Russie ris-
quent davantage de devenir permanents. Consciente de cette situation, l’Assem-
blée générale des Nations Unies s’est, le 29 mai 2008, déclarée profondément
troublée par «les changements démographiques résultant du conflit en Abkha-
1 Résolution adoptée par l’Assemblée générale des Nations Unies le 29 mai 2008,
A/RES/62/249; OSCE, document de Budapest, 1994, «Vers un authentique partenariat
dans une ère nouvelle», 21 décembre 1994. 8
and regretting any attempt to alter the pre-conflict demographic composition
of Abkhazia, Georgia” 2.
11. CERD recognizes a right of return. CERD General Recommendation
XXII (1996, Article 5 and Refugees and Displaced Persons) emphasizes that
“refugees and displaced persons have the right freely to return to their homes of
origin under conditions of safety” (para. 2 (a)) and that
“refugees and displaced persons have, after their return to their homes of
origin, the right to have restored to them property of which they were
deprived in the course of the conflict and to be compensated appropriately
for any such property that cannot be restored to them” (para. 2 (c)).
As a result of actions for which the Russian Federation is internationally
responsible, ethnic Georgians and other IDPs are precluded from returning to
their homes in South Ossetia and Abkhazia. According to the Committee on
the Elimination of Racial Discrimination:
“[T]he situations in South Ossetia and Abkhazia have resulted in dis-
crimination against people of different ethnic origins, including a large
number of internally displaced persons and refugees. On repeated occa-
sions, attention has been drawn to the obstruction by the Abkhaz authori-
ties of the voluntary return of displaced populations, and several recom-
mendations have been issued by the Security Council to facilitate the free
movement of refugees and internally displaced persons.” 3
12. In furtherance of its policy to support South Ossetian and Abkhaz sepa-
ratists, the Russian Federation has taken other actions that violate CERD. By
way of example, the Russian Federation has conferred its citizenship upon
almost the entire non-ethnic Georgian population of South Ossetia and Abk-
hazia and now seeks to justify its discriminatory military intervention on the
side of the South Ossetian and Abkhaz separatists by reference to the presence
of Russian citizens in those regions. Ethnic Georgians remaining in the Gali
District of Abkhazia, for instance, who have refused to renounce their Geor-
gian citizenship in favour of Russian citizenship, have faced active intimidation
and harassment by soldiers associated with armed forces of the Russian Fed-
eration. In South Ossetia, those ethnic Georgians who remain have faced simi-
lar circumstances.
13. The de facto separatist authorities of South Ossetia and Abkhazia enjoy
unprecedented and far-reaching support from the Russian Federation in the
implementation of discriminatory policies against the ethnic Georgian popula-
tion. On 6 March 2008, for example, the Russian Government announced its
withdrawal from a 1996 decision of the Executive Committee of the CIS [Com-
monwealth of Independent States] that prohibited the transfer of military hard-
ware and assistance to Abkhazia. The Russian President, in commenting upon
this step, promised assistance to the Abkhaz separatists that was “not declara-
tive, but practical”.
2
United Nations General Assembly resolution, 29 May 2008, A/RES/62/249.
3
Concluding Observations of the Committee on the Elimination of Racial Discrimina-
tion: Georgia, 27 April 2001, CERD/C/304/Add.120, at para. 4. 9
zie (Géorgie), et [a] déplor[é] toute tentative visant à modifier la composition de
la population telle qu’elle existait avant le conflit en Abkhazie (Géorgie)» 2.
11. La CIEDR reconnaît le droit au retour. La recommandation géné-
rale XXII du Comité pour l’élimination de la discrimination raciale (1996, Ar-
ticle 5 et réfugiés et personnes déplacées) souligne que «les réfugiés et personnes
déplacées ... ont le droit de retourner librement dans leurs foyers d’origine en
toute sécurité» (alinéa a) du paragraphe 2) et que
«les réfugiés et personnes déplacées ... ont, une fois de retour dans leurs
foyers d’origine, le droit de se voir restituer les biens dont ils ont été
dépouillés au cours du conflit et d’être dûment indemnisés pour ceux qui
ne peuvent leur être restitués» (alinéa c) du paragraphe 2).
A la suite d’actes engageant la responsabilité internationale de la Fédération
de Russie, des personnes déplacées, d’origine notamment géorgienne, se trou-
vent dans l’incapacité de regagner leurs foyers en Ossétie du Sud et en Abkha-
zie. Selon le Comité pour l’élimination de la discrimination raciale,
«les situations en Ossétie du Sud et en Abkhazie ont entraîné une dis-
crimination à l’encontre de personnes d’origines ethniques différentes, no-
tamment d’un grand nombre de personnes déplacées à l’intérieur de leur
propre pays et de réfugiés. A maintes reprises, l’attention a été appelée
sur le fait que les autorités abkhazes font obstruction au retour librement
consenti des populations déplacées, et plusieurs recommandations ont été
formulées par le Conseil de sécurité en vue de faciliter la libre circulation
des réfugiés et des personnes déplacées à l’intérieur de leur propre pays.» 3
12. Dans le cadre de sa politique de soutien aux séparatistes sud-ossètes et
abkhazes, la Fédération de Russie a pris d’autres mesures contraires à la
CIEDR. Ainsi a-t-elle accordé la nationalité russe à la quasi-totalité des habi-
tants de souche non géorgienne d’Ossétie du Sud et d’Abkhazie et cherche-t-elle
à présent à justifier une intervention militaire à caractère discriminatoire à
l’appui des séparatistes sud-ossètes et abkhazes en invoquant la présence de res-
sortissants russes dans ces régions. Les personnes de souche géorgienne demeu-
rant, par exemple, dans le district de Gali (Abkhazie) et qui ont refusé de
renoncer à leur nationalité géorgienne en faveur de la nationalité russe ont été
victimes d’actes d’intimidation et de harcèlement de la part de soldats liés aux
forces armées de la Fédération de Russie. Celles qui sont demeurées en Ossétie
du Sud ont été en butte à des mesures analogues.
13. Les autorités séparatistes contrôlant de facto l’Ossétie du Sud et l’Abkha-
zie bénéficient, dans la mise en Œuvre de mesures discriminatoires à l’encontre
de la population de souche géorgienne, d’un soutien massif et sans précédent de
la Fédération de Russie. Le 6 mars 2008, le Gouvernement russe a ainsi
annoncé qu’il se dissociait de la décision de 1996 du comité exécutif de la CEI
[Communauté des Etats indépendants] interdisant le transfert de matériel et
d’assistance militaires en Abkhazie. Commentant cette mesure, le président
russe a promis aux séparatistes abkhazes une assistance constituée «non pas de
déclarations, mais d’actes».
2
Résolution adoptée par l’Assemblée générale des Nations Unies le 29 mai 2008,
A/3ES/62/249.
Conclusions du Comité pour l’élimination de la discrimination raciale: Géorgie,
27 avril 2001, CERD/C/304/Add.120, par. 4. 10
14. CERD General Recommendation XXI (1996, Right to Self-Determina-
tion) recognizes the relationship between CERD and the right to self-determi-
nation of peoples, namely the right to pursue freely economic, social and cul-
tural development without outside interference, in connection with Article 5 (c)
of CERD. It also recognizes that
“all peoples have the right to determine freely their political status and
their place in the international community based upon the principle of
equal rights . . . and by the prohibition to subject peoples to alien subjuga-
tion, domination and exploitation” (para. 4).
CERD Recommendation XXI further recognizes, in accordance with Article 2,
the importance of preserving the identity of ethnic persons and groups, and it
emphasizes the importance of not “authorizing or encouraging any action
which would dismember or impair, totally or in part, the territorial integrity or
political unity of sovereign and independent States” (para. 6). The Committee
has expressed the view that “international law has not recognized a general
right of peoples unilaterally to declare secession from a State”, and that “a
fragmentation of States may be detrimental to the protection of human rights,
as well as to the preservation of peace and security” (ibid.). The Russian Fed-
eration’s support of separatist elements within the Ossetian and Abkhaz ethnic
minorities and their de facto authorities has the effect of denying the right of
self-determination to the ethnic Georgians remaining in South Ossetia and
Abkhazia and those seeking to return to their homes in South Ossetia and Abk-
hazia since the ceasefires of 1992 and 1994, respectively.
15. By recognizing and supporting South Ossetia’s and Abkhazia’s separa-
tist authorities, the Russian Federation is also preventing Georgia from imple-
menting its obligations under CERD, by assuming control over its territory.
The Committee on the Elimination of Racial Discrimination has acknowledged
that “[d]ue to the lack of governmental authority” in South Ossetia and Abk-
hazia, Georgia has “difficulty in exercising its jurisdiction with regard to the
protecti4n of human rights and the implement of the Convention” in those
regions .
16. The third phase of the Russian Federation’s intervention in South Osse-
tia and Abkhazia began on 8 August 2008, when Russian forces invaded Geor-
gian territory. Following the international recognition of Kosovo in February
2008 and discussion of Georgia’s possible membership in NATO at the 4 April
2008 Bucharest Summit, the Russian Federation launched renewed and inten-
sified efforts to legitimize the de facto South Ossetian and Abkhaz separatist
authorities and to establish these provinces as independent territories in plain
violation of the Russian Federation’s obligations under CERD. These efforts
culminated on 8 August as Russian ground forces, warships and airplanes
launched a full-scale invasion of Georgia in support of ethnic separatists in
South Ossetia and Abkhazia.
4 Concluding Observations of the Committee on the Elimination of Racial Discrimina-
tion: Georgia, 27 March 2007, CERD/C/GEO/CO/3, at paras. 4-5. 11
14. La recommandation générale XXI (1996, Droit à l’autodétermination)
du Comité pour l’élimination de la discrimination raciale reconnaît la connexité
entre la CIEDR et le droit à l’autodétermination des peuples, notamment le
droit de ceux-ci à poursuivre librement leur développement économique, social
et culturel sans ingérence extérieure (voir paragraphe c) de l’article 5 de la
Convention). Elle reconnaît également que
«tous les peuples ont le droit de déterminer librement leur statut poli-
tique et leur place dans la communauté internationale sur la base du
principe de l’égalité des droits et ... [de] l’interdiction de la soumission
des peuples à la sujétion, la domination et l’exploitation étrangères»
(par. 4).
La recommandation XXI du Comité pour l’élimination de la discrimination
raciale reconnaît, en outre, l’importance de préserver l’identité des groupes
ethniques et de leurs membres, et insiste sur celle de ne pas «autoris[er] ou
encourag[er] une action quelconque de nature à porter atteinte, en tout ou
en partie, à l’intégrité territoriale ou à l’unité politique d’Etats souverains
et indépendants» (par. 6). Le Comité a exprimé l’avis que «le droit
international ne reconnaît pas de droit général des peuples de déclarer
unilatéralement faire sécession par rapport à un Etat» et que «toute fragmen-
tation d’Etats risque de nuire à la protection des droits de l’homme, ainsi
qu’à la préservation de la paix et de la sécurité» (ibid.). Le soutien apporté
par la Fédération de Russie aux éléments séparatistes issus des minorités
ethniques ossète et abkhaze et aux autorités contrôlant de facto l’Ossétie
du Sud et l’Abkhazie prive de leur droit à l’autodétermination les personnes
de souche géorgienne demeurées en Ossétie du Sud et en Abkhazie ainsi
que celles qui s’efforcent de retourner dans leurs foyers en Ossétie du Sud et
en Abkhazie depuis les cessez-le-feu intervenus respectivement en 1992 et
en 1994.
15. En reconnaissant et en soutenant les autorités séparatistes d’Ossétie du
Sud et d’Abkhazie, la Fédération de Russie empêche également la Géorgie de
s’acquitter des obligations qui lui incombent aux termes de la CIEDR en exer-
çant son autorité sur son territoire. Le Comité pour l’élimination de la discri-
mination raciale a reconnu que, «[f]aute d’autorité gouvernementale suffi-
sante» en Ossétie du Sud et en Abkhazie, il est difficile à la Géorgie «d’exercer,
dans ces régions, sa compétence en matièr4 de protection des droits de l’homme
et de mise en Œuvre de la Convention» .
16. La troisième phase de l’intervention russe en Ossétie du Sud et en
Abkhazie a débuté le 8 août 2008, avec l’invasion du territoire géorgien par les
forces russes. A la suite de la reconnaissance internationale du Kosovo en
février 2008 et de discussions sur l’éventuelle adhésion de la Géorgie à l’OTAN
lors du sommet de Bucarest qui s’est tenu le 4 avril 2008, la Fédération de
Russie avait relancé et intensifié ses efforts tendant à légitimer les autorités
séparatistes contrôlant de facto l’Ossétie du Sud et l’Abkhazie et à faire de
ces provinces des territoires indépendants, en violation flagrante des obliga-
tions qu’elle tient de la CIEDR. Ces efforts ont culminé le 8 août, lorsque les
forces terrestres, navales et aériennes russes, prêtant main-forte aux sépara-
tistes d’Ossétie du Sud et d’Abkhazie, se sont lancées dans une véritable
invasion de la Géorgie.
4 Conclusions du Comité pour l’élimination de la discrimination raciale: Géorgie,
27 mars 2007, CERD/C/GEO/CO/3, par. 4-5. 12
II. URISDICTION OF THE C OURT
17. Article 36, paragraph 1, of the Statute of the Court provides that: “The
jurisdiction of the Court comprises . . . all matters specially provided for . . . in
treaties and conventions in force.”
18. As Member States of the United Nations, the Republic of Georgia and
the Russian Federation are parties to the Statute of the Court. Georgia and
the Russian Federation are also parties to CERD. The USSR deposited its
instrument of ratification on 6 March 1969, and from that time on the
obligations of CERD attached to the entire territory of the former Soviet
Union, including the territory of Georgia. The Russian Federation continued
the treaty obligations of the former USSR from the date of its dissolution
in 1991. Without prejudice to any question of automatic succession of
human rights treaties, Georgia deposited an instrument of accession to
CERD on 2 July 1999. Neither Party has entered any reservation to Article 22,
which provides:
“Any dispute between two or more States Parties with respect to the
interpretation or application of this Convention, which is not settled by
negotiation or by the procedures expressly provided for in this Conven-
tion, shall, at the request of any of the parties to the dispute, be referred to
the International Court of Justice for decision, unless the disputants agree
to another mode of settlement.”
19. Upon the filing of the present Application, any matters in dispute
between Georgia and the Russian Federation concerning the interpretation or
application of CERD are subject to the compulsory jurisdiction of the Court.
20. Georgia also reserves its right to invoke Article IX of the Convention on
the Prevention and Punishment of the Crime of Genocide as an additional basis
for the jurisdiction of the Court. Article IX provides:
“Disputes between the Contracting Parties relating to the interpretation,
application or fulfilment of the present Convention, including those relat-
ing to the responsibility of a State for genocide or for any of the other acts
enumerated in article III, shall be submitted to the International Court of
Justice at the request of any of the parties to the dispute.”
21. Georgia and the Russian Federation are parties to the Genocide Conven-
tion, from 11 October 1993 and 3 May 1954 respectively. Neither has entered a
reservation to Article IX of the Genocide Convention.
III. THE F ACTS
A. The Republic of Georgia: From the USSR to the CIS
22. Following the dissolution of Tsarist Russia in 1917, the Democratic
Republic of Georgia became an independent State from 1918 until its occupa-
tion by the Red Army in 1921. In 1922 it was forcibly incorporated into the
Soviet Union as the nominally sovereign Georgian Soviet Socialist Republic
(hereinafter “Georgia” or “Georgian SSR”).
23. From 1988 onwards, during the perestroika reforms implemented by the
then Secretary-General of the Soviet Communist Party, Mikhail S. Gorbachev, 13
II. C OMPÉTENCE DE LA C OUR
17. Le paragraphe 1 de l’article 36 du Statut de la Cour dispose que «[l]a
compétence de la Cour s’étend à ... tous les cas spécialement prévus ... dans les
traités et conventions en vigueur».
18. En tant qu’Etats Membres de l’Organisation des Nations Unies, la
République de Géorgie et la Fédération de Russie sont parties au Statut de la
Cour. Elles sont également parties à la CIEDR. L’URSS a déposé son instru-
ment de ratification le 6 mars 1969, date à partir de laquelle les obligations pré-
vues par la Convention se sont imposées à l’ensemble du territoire de
l’Union soviétique, et notamment au territoire géorgien. La Fédération de Rus-
sie a succédé aux obligations conventionnelles contractées par l’ex-URSS, et ce,
à compter de la date de la dissolution de celle-ci, en 1991. Sans préjudice des
questions de succession automatique aux traités relatifs aux droits de l’homme,
la Géorgie a déposé un instrument d’adhésion à la CIEDR le 2 juillet 1999.
Aucune des parties n’a émis de réserve à l’article 22 de cette convention, qui
prévoit que
«[t]out différend entre deux ou plusieurs Etats parties touchant l’interpré-
tation ou l’application de la présente convention qui n’aura pas été réglé
par voie de négociation ou au moyen des procédures expressément prévues
par ladite convention sera porté, à la requête de toute partie au différend,
devant la Cour internationale de Justice pour qu’elle statue à son sujet, à
moins que les parties au différend ne conviennent d’un autre mode de
règlement».
19. A la date du dépôt de la présente requête, tout différend entre la Géorgie
et la Fédération de Russie touchant l’interprétation ou l’application de la
CIEDR relève de la juridiction obligatoire de la Cour.
20. La Géorgie se réserve également le droit d’invoquer l’article IX de la
convention pour la prévention et la répression du crime de génocide en tant que
base supplémentaire de compétence. Cet article prévoit que
«[l]es différends entre les parties contractantes relatifs à l’interprétation,
l’application ou l’exécution de la présente convention, y compris ceux rela-
tifs à la responsabilité d’un Etat en matière de génocide ou de l’un quel-
conque des autres actes énumérés à l’article III, seront soumis à la Cour
internationale de Justice, à la requête d’une partie au différend».
21. La Géorgie et la Fédération de Russie sont parties à la convention sur le
génocide, la première depuis le 11 octobre 1993, la seconde depuis le 3 mai 1954.
Ni l’une ni l’autre n’a émis de réserve à l’article IX de cette convention.
III. LES FAITS
A. La République de Géorgie: de l’URSS à la CEI
22. A la suite de l’effondrement du régime tsariste, en 1917, la République
démocratique de Géorgie constitua un Etat indépendant de 1918 jusqu’à son
occupation par l’armée rouge, en 1921. En 1922, elle fut incorporée de force
dans l’Union soviétique en tant que république théoriquement autonome, deve-
nant la République socialiste soviétique de Géorgie (ci-après, la «Géorgie» ou
la «RSS de Géorgie»).
23. A partir de 1988, lors des réformes de la perestroïka mises en Œuvre
par le secrétaire général du parti communiste soviétique de l’époque, 14
a movement emerged for the resumption of Georgia’s sovereignty. The Soviet
Communist Party was determined to defeat this movement. On 9 April 1989,
the Soviet armed forces were ordered to attack a peaceful pro-independence
demonstration in front of the Georgian Parliament in Tbilisi, killing and injur-
ing many civilians.
24. Under the 1922 Constitution of the Georgian SSR, South Ossetia enjoyed
the status of an autonomous “oblast”, or District. On 20 September 1990, the
Regional Public Council of the South Ossetian Autonomous District adopted a
declaration on the “Sovereignty of South Ossetia” that unilaterally declared its
secession from Georgia.
25. Under the 1922 Georgian SSR Constitution, the Autonomous Republic
of Abkhazia had the status of a federated entity. On 25 August 1990, the
Supreme Council of the Autonomous Republic of Abkhazia adopted a Decla-
ration “On the State Sovereignty of the Abkhaz Republic”. It called upon the
Soviet authorities in Moscow to grant the region independence from Georgia
while remaining in the Soviet Union.
26. On 31 March 1991, a referendum was held on the restoration of Geor-
gia’s Declaration of Independence of 1918. Fully 99% of the citizens of Georgia
voted in favour of independence among 90.5% of eligible voters. Georgia sub-
sequently declared independence on 9 April 1991 and was admitted as a Mem-
ber State of the United Nations on 6 July 1992, within the boundaries it had
when it was a Soviet Republic. The internationally recognized sovereign ter-
ritory of Georgia included the entire region of South Ossetia and the entire
region of Abkhazia.
27. The USSR was dissolved on 8 December 1991. Two days later, on
10 December 1991, the Commonwealth of Independent States (CIS) was estab-
lished. Georgia initially opted not to become a member of the CIS. By Decem-
ber 1993, however, Georgia was left with no option but to reverse this decision.
In the intervening period, Abkhaz separatists had murdered and forcibly
expelled the majority ethnic Georgian population in Abkhazia and South Osse-
tian separatists had forcibly displaced significant numbers of ethnic Georgians
and undermined Georgian sovereignty over the region. In both cases, the sepa-
ratist cause received substantial support from the Russian Federation including
its armed forces. Georgia was devastated and dismembered by war. In exchange
for an end to further ethnic conflict and violent discriminatory acts that it had
instigated and supported, the Russian Federation demanded Georgian mem-
bership in the CIS as a pre-condition for deployment of all-Russian CIS peace-
keeping forces. The Russian Federation thereafter asserted its role as a “neu-
tral” intermediary between Georgia and the South Ossetian and Abkhaz
separatists despite its partial role in the armed conflict.
B. The First Phase of Russia’s Intervention in South Ossetia: 1990-1992
28. In the last official census of the Tskhinvali region — commonly referred
to as South Ossetia — conducted in 1989 before the outbreak of hostilities, the
South Ossetian Autonomous District had a population of just under 100,000
people, with 66% ethnic Ossetians and 29% ethnic Georgians. South Ossetia
has always had one of the highest rates of intermarriage in the former Soviet
Union, with more than 50% of families of mixed Georgian-Ossetian descent. 15
Mikhaïl S. Gorbatchev, un mouvement se manifesta en faveur du rétablisse-
ment de la souveraineté de la Géorgie. Le parti communiste soviétique était
résolu à faire échec à ce mouvement. Le 9 avril 1989, les forces armées sovié-
tiques reçurent l’ordre d’attaquer une manifestation pacifique en faveur de
l’indépendance qui se tenait devant le Parlement géorgien à Tbilissi, faisant de
nombreux morts et blessés parmi la population civile.
24. Aux termes de la Constitution de la RSS de Géorgie de 1922, l’Ossétie du
Sud jouissait du statut d’«oblast», ou district, autonome. Le 20 septembre 1990,
le soviet régional du district autonome d’Ossétie du Sud adopta une déclaration
relative à la «souveraineté de l’Ossétie du Sud», par laquelle le district déclarait
unilatéralement faire sécession de la Géorgie.
25. Suivant la Constitution de la RSS de Géorgie de 1922, la République
autonome d’Abkhazie avait le statut d’entité fédérée. Le 25 août 1990, le soviet
suprême de la République autonome d’Abkhazie adopta une déclaration «sur
la souveraineté d’Etat de la République d’Abkhazie». La république demandait
aux autorités soviétiques de Moscou de la rendre indépendante de la Géorgie
tout en la maintenant dans l’Union soviétique.
26. Le 31 mars 1991 eut lieu un référendum portant sur la remise en vigueur
de la déclaration d’indépendance de la Géorgie, datant de 1918. Le taux de par-
ticipation des électeurs géorgiens fut de 90,5 %, l’indépendance recueillant 99 %
des suffrages. La Géorgie devait ensuite déclarer son indépendance le
9 avril 1991, puis être admise comme Etat Membre au sein de l’Organisation
des Nations Unies le 6 juillet 1992, avec les frontières qui étaient les siennes à
l’époque soviétique. Le territoire souverain de la Géorgie reconnu par la
communauté internationale comprenait l’ensemble de l’Ossétie du Sud et de
l’Abkhazie.
27. L’URSS fut dissoute le 8 décembre 1991. La Communauté des Etats
indépendants (CEI) fut créée deux jours après, le 10 décembre 1991. La Géor-
gie choisit dans un premier temps de ne pas en devenir membre. Toutefois, en
décembre 1993, elle ne put faire autrement que de revenir sur sa décision.
Entre-temps, les séparatistes abkhazes avaient assassiné ou expulsé la popula-
tion de souche géorgienne majoritaire en Abkhazie tandis que les séparatistes
d’Ossétie du Sud avaient déplacé de force un nombre important de personnes
de souche géorgienne et affaibli la souveraineté géorgienne sur la région. Dans
les deux cas, la cause séparatiste reçut un soutien important de la Fédération de
Russie, y compris de ses forces armées. La Géorgie fut dévastée et démembrée
par la guerre. En échange d’un terme mis au conflit ethnique et aux violents
actes de discrimination dont elle avait été l’instigatrice et qu’elle avait soutenus,
la Fédération de Russie demanda à la Géorgie d’adhérer à la CEI comme
condition préalable au déploiement de forces de maintien de la paix de la CEI
composées uniquement de Russes. La Fédération de Russie affirma à partir de
ce moment son rôle d’intermédiaire «neutre» entre la Géorgie et les séparatistes
d’Ossétie du Sud et d’Abkhazie, alors même qu’elle avait été partie prenante au
conflit armé.
B. La première phase de l’intervention russe en Ossétie du Sud: 1990-1992
28. Lors du dernier recensement officiel de la région de Tskhinvali — com-
munément appelée Ossétie du Sud — réalisé en 1989, soit avant le déclenche-
ment des hostilités, la population du district autonome d’Ossétie du Sud s’éle-
vait à un peu moins de 100 000 personnes, 66 % étant d’origine ossète et 29 %
de souche géorgienne. L’Ossétie du Sud a toujours eu l’un des taux les plus éle-
vés de mariages mixtes de l’ex-Union soviétique, plus de 50 % des familles étant 16
Historically, Ossetians and Georgians lived together in peace. Despite Russian
support for the ethnic separatists, Ossetians still participate in and are repre-
sented in the multi-ethnic Georgian State.
29. On 10 November 1989, the Regional Public Council of the South Osse-
tian Autonomous District formally requested the Georgian Supreme Soviet to
upgrade the status of the District to “Autonomous Republic”. After the Geor-
gian Supreme Soviet refused, on 28 November 1990, the Regional Public Coun-
cil of the South Ossetian Autonomous District re-named the District the
“Soviet Republic of South Ossetia”, and scheduled elections for a new Supreme
Council to be held on 9 December 1990. Although 71% of the local population
voted in the election, it was boycotted by the entire ethnic Georgian population
of South Ossetia.
30. On 11 December 1990, the Georgian Supreme Soviet declared the
9 December elections illegitimate (a view echoed by the international commu-
nity), annulled the results, and abolished the Autonomous District of South
Ossetia and its Regional Public Council.
31. Following these events, violent conflict broke out. Soviet Russian troops
were despatched to “maintain order” in the region. The Georgian Supreme
Soviet objected to Moscow’s involvement with internal Georgian affairs, and
demanded that the Soviet Russian troops be withdrawn. Moscow ignored
Georgia’s statements and on 7 January 1991, President Gorbachev issued a
decree ordering all armed units except troops of the USSR to withdraw from
South Ossetia. The Georgian Supreme Soviet rejected this decree, calling it
“gross interference in Georgia’s internal affairs and encroachment on its terri-
5
torial integrity” . Throughout 1991, coinciding with Georgia’s Declaration of
Independence on 9 April, over 1,000 people were killed in the fighting in South
Ossetia. During this time, some 23,000 ethnic Georgians were forced to flee
South Ossetia and settle in other parts of Georgia 6.
32. On 24 June 1992, hostilities formally came to an end following the
Agreement on the Principles of the Settlement of the Georgian-Ossetian Con-
flict (the “Sochi Agreement”). Under the Sochi Agreement, the Joint Peace-
keeping Forces group (“JPKF”) was created to monitor the ceasefire in South
Ossetia. The JPKF was dominated by ostensibly neutral Russian peacekeepers
that, consistent with the policy of the Russian Federation, supported the South
Ossetian ethnic separatists in their quest for independence from Georgia up to
and including Russia’s invasion of Georgia in August 2008. As observed by an
authoritative report, Russian CIS peacekeeping forces “provided inadequate
protection of Georgians in South Ossetia” 7.
5
See Izvestiia, “Georgian Supreme Soviet Rejects Decree”, 10 January 1991 (cited by
Human Rights Watch, “Bloodshed in the Caucasus: Violations of Humanitarian Law
and Human Rights in the Georgia-South Ossetia Conflict”, March 1992, available at
ht6p://www.hrw.org/reports/pdfs/g/georgia/georgia.923/georgia923full.pdf).
Human Rights Watch, “Russia: The Ingush/Ossetian Conflict in the Prigorodnyi
Region”, May 1996, available at http://hrw.org/reports/1996/Russia.html.
7 Human Rights Watch, “Bloodshed in the Caucasus: Violations of Humanitarian Law
and Human Rights in the Georgia-South Ossetia Conflict”, March 1992, available at
http://www.hrw.org/reports/pdfs/g/georgia/georgia.923/georgia923full.pdf. 17
issues d’unions entre Géorgiens et Ossètes. Traditionnellement, Ossètes et
Géorgiens vivaient ensemble en paix. Malgré le soutien russe aux séparatistes,
les Ossètes font toujours intégralement partie de l’Etat multiethnique de Géor-
gie et y sont encore représentés.
29. Le 10 novembre 1989, le soviet régional du district autonome d’Ossétie
du Sud demanda officiellement au soviet suprême de Géorgie de modifier le sta-
tut du district et de lui accorder celui de «République autonome». Après le
refus de celui-ci, le 28 novembre 1990, le soviet régional rebaptisa le district
«République soviétique d’Ossétie du Sud» et fixa la date des élections en vue de
la constitution d’un nouveau soviet suprême au 9 décembre 1990. Même si
71 % de la population locale prit part au vote, la totalité de la population de
souche géorgienne en Ossétie du Sud boycotta le scrutin.
30. Le 11 décembre 1990, le soviet suprême de Géorgie déclara les élections
du 9 décembre illégitimes (point de vue repris par la communauté internatio-
nale), annula les résultats et abolit le district autonome d’Ossétie du Sud ainsi
que son soviet régional.
31. A la suite de ces événements, un violent conflit éclata. Des soldats sovié-
tiques russes furent envoyés dans la région afin de «maintenir l’ordre». Le so-
viet suprême de Géorgie s’opposa à l’intervention de Moscou dans les affaires
internes de la Géorgie et demanda le retrait des soldats en question. Moscou
ignora les déclarations de la Géorgie et, le 7 janvier 1991, le président Gorba-
tchev publia un décret ordonnant à toutes les unités armées, à l’exception des
soldats de l’URSS, de se retirer de l’Ossétie du Sud. Le soviet suprême de Géor-
gie rejeta ce décret, le qualifiant d’«ingérence grave dans les affaires internes de
5
la Géorgie et d’atteinte à son intégrité territoriale» . Au cours de l’année 1991,
coïncidant avec la déclaration d’indépendance de la Géorgie le 9 avril, plus de
1000 personnes furent tuées durant les combats qui se déroulèrent en Ossétie du
Sud. Pendant cette période, quelque 23000 personnes de souche géorgienne
furent contraintes de fuir l’Ossétie du Sud et de s’installer dans d’autres régions
de Géorgie 6.
32. Le 24 juin 1992, les hostilités prirent officiellement fin à la suite de
l’accord sur les principes du règlement du conflit entre Géorgiens et Ossètes
(l’«accord de Sotchi»). Aux termes de cet accord fut créée une force commune
de maintien de la paix (la «FCMP») chargée de surveiller le cessez-le-feu en
Ossétie du Sud. La FCMP était essentiellement composée de soldats russes pré-
tendument neutres qui, conformément à la politique de la Fédération de Rus-
sie, soutenaient en fait les séparatistes sud-ossètes recherchant l’indépendance à
l’égard de la Géorgie, situation qui a abouti à l’invasion de la Géorgie par la
Russie en août 2008. Ainsi que l’indique un rapport faisant autorité, les forces
de maintien de la paix russes de la CEI «ont fourni une protection inappropriée
aux Géorgiens en Ossétie du Sud» 7.
5
Voir Izvestiia, «Georgian Supreme Soviet Rejects Decree», 10 janvier 1991 (cité
par Human Rights Watch, «Bloodshed in the Caucasus: Violations of Humanitarian
Law and Human Rights in the Georgia-South Ossetia Conflict», mars 1992, peut être
co6sulté sur: http://www.hrw.org/reports/pdfs/g/georgia/georgia.923/georgia923full.pdf).
Human Rights Watch, «Russia: The Ingush/Ossetian Conflict in the Prigorodnyi
Region», mai 1996, peut être consulté sur: http://www.hrw.org/reports/1996/Russia.
html.
7 Human Rights Watch, «Bloodshed in the Caucasus: Violations of Humanitarian
Law and Human Rights in the Georgia-South Ossetia Conflict», mars 1992, peut être
consulté sur: http://www.hrw.org/reports/pdfs/g/georgia/georgia.923/georgia923full.pdf. 18
C. The First Phase of Russia’s Intervention in Abkhazia: 1991 to 1994
33. Following the dissolution of the Soviet Union in December 1991, Abk-
haz separatists under the leadership of Vladislav Ardzinba sought to secede
from the Republic of Georgia, including by the use of force. The ethnic com-
position of Abkhazia was an impediment to their objective. According to the
1989 Soviet Census, at that time the Abkhaz population was approximately
525,100 and consisted of the following ethnic groups: 45.7% Georgians, 17.8%
Abkhazians, 14.6% Armenians, 14.2% Russians, 2.8% Greeks, 2.2% Ukrain-
ians, and 0.1% Byelorussians, Jews and others. The majority of the Abkhaz
regional population, and the overwhelming majority of the population of
4.5 million, supported Georgian State institutions in Abkhazia. To solve this
demographic “problem”, the separatists established parallel institutions domi-
nated by the Abkhaz minority, and prepared for the forceful elimination of eth-
nic Georgians and other groups loyal to the newly established Georgian State.
This quest to change the demographic composition of Abkhazia was contin-
gent upon active Russian support for its success. As there were fewer than
100,000 Abkhaz in the region, the Abkhaz separatists could not succeed in
expelling the 240,000-strong Georgian majority and eliminating the Georgian
State’s authority in Abkhazia without such external assistance.
34. Amidst increasing ethnic tensions and lawlessness, the self-proclaimed
Abkhaz Supreme Soviet declared its sovereignty on 23 July 1992. Abkhaz sepa-
ratists had procured the support of the Russian forces stationed in military
bases located on the territory of Georgia (in particular in the Gudauta District
close to the Russian border), to execute an offensive against the other ethnic
populations living in Abkhazia. The provision of weapons and essential sup-
plies to the Abkhaz separatists by the Russian military transformed the conflict
in Abkhazia. From a series of isolated clashes between ethnic groups, the fight-
ing escalated into a full-scale armed conflict. According to an authoritative
1995 report:
“Abkhaz forces prior to the outbreak of hostilities had relatively few
weapons except for small arms, and especially few, if any, heavy weapons,
such as heavy artillery, that later came to play a prominent role in the
fighting . . . there is little doubt that whatever weapons there were came
from Russian or Soviet sources.” 8
35. By the time the State Council of the Republic of Georgia deployed its
Republican Guards in Abkhazia to restore law and order, the stage was set for
civil war. Despite considerable resistance by the majority ethnic Georgian
population, Abkhaz separatist forces heavily armed by Russian forces, and
with the direct support of Russian armed forces in hostilities on their side, suc-
ceeded in defeating Georgian forces in Abkhazia. Georgian cities, towns and
villages were bombarded both by the Russian air force and by Russian naval
battleships from sea. Many of those fighting alongside the Abkhaz separatists
were mercenaries recruited with the support of Russia. Although human rights
8 Human Rights Watch Arms Project, Human Rights Watch/Helsinki, “Georgia/
Abkhazia: Violations of the Laws of War and Russia’s Role in the Conflict”, March 1995,
Vol. 7, No. 7, pp. 18-37. 19
C. La première phase de l’intervention russe en Abkhazie: 1991-1994
33. A la suite de la dissolution de l’Union soviétique en décembre 1991, les
séparatistes abkhazes dirigés par Vladislav Ardzinba cherchèrent à faire séces-
sion de la République de Géorgie, notamment en recourant à la force. La com-
position ethnique de l’Abkhazie constituait un obstacle à leur objectif. Suivant
le recensement soviétique de 1989, la population d’Abkhazie s’élevait alors à
quelque 525 100 personnes et se composait des groupes ethniques suivants:
45,7 % de Géorgiens, 17,8 % d’Abkhazes, 14,6 % d’Arméniens, 14,2 % de Rus-
ses, 2,8 % de Grecs, 2,2 % d’Ukrainiens et 0,1 % de Biélorusses, Juifs et autres.
La majorité de la population de la région d’Abkhazie ainsi que l’écrasante
majorité des 4,5 millions de personnes constituant la population de Géorgie
soutenaient les institutions de l’Etat géorgien en Abkhazie. Pour résoudre
ce «problème» démographique, les séparatistes mirent en place des institu-
tions parallèles dans lesquelles la minorité abkhaze dominait et se préparèrent
à éliminer par la force les personnes de souche géorgienne ainsi que d’autres
groupes loyaux à l’égard du nouvel Etat géorgien. La modification de la
composition démographique de l’Abkhazie dépendait du soutien actif de la
Russie. Etant donné que les Abkhazes étaient moins de 100 000 dans la région,
les séparatistes abkhazes ne pouvaient, sans une telle assistance extérieure,
parvenir à expulser la majorité géorgienne forte de 240 000 personnes ni à
réduire à néant l’autorité de l’Etat géorgien en Abkhazie.
34. Dans un climat de tensions ethniques et d’anarchie croissantes, le soviet
suprême autoproclamé d’Abkhazie déclara sa souveraineté le 23 juillet 1992.
Les séparatistes abkhazes avaient obtenu le soutien des forces russes station-
nées sur des bases militaires situées en territoire géorgien (en particulier dans le
district de Gudauta, près de la frontière russe) pour procéder à une offensive
contre les autres groupes ethniques vivant en Abkhazie. Le ravitaillement en
armes et en matériel des séparatistes abkhazes par l’armée russe transforma le
conflit en Abkhazie. D’une série d’affrontements isolés entre groupes ethniques,
les combats se muèrent en un conflit armé généralisé. Un rapport de 1995
faisant autorité indiquait:
«Avant le déclenchement des hostilités, les forces abkhazes possédaient
relativement peu d’armes à l’exception d’armes légères; elles n’avaient, en
particulier, que peu, ou pas, d’armes lourdes, telles que l’artillerie lourde,
laquelle en vint à jouer un rôle important dans les combats ... il y a peu de
doute que, quelles que soient les armes que [les forces abkhaze8] possé-
daient, elles provenaient de sources russes ou soviétiques.»
35. Lorsque le Conseil national de la République de Géorgie déploya ses
gardes républicains en Abkhazie pour rétablir l’ordre, les éléments d’une guerre
civile étaient réunis. Malgré une forte résistance de la part de la population de
souche géorgienne, majoritaire, les forces séparatistes abkhazes, lourdement
armées par les forces russes et bénéficiant du soutien direct de l’armée russe
pendant les combats, réussirent à vaincre les forces géorgiennes en Abkhazie.
Les villes et les villages géorgiens furent bombardés à la fois par l’armée de l’air
et par des navires de guerre russes. Nombre de ceux qui combattaient aux côtés
des séparatistes abkhazes étaient des mercenaires recrutés avec le soutien de
8
Human Rights Watch Arms Project, Human Rights Watch/Helsinki, «Georgia/
Abkhaziao Violations of the Laws of War and Russia’s Role in the Conflict», mars 1995,
vol. 7, n7, p. 18-37. 20
abuses were committed by all parties, the turning point in the conflict and the
beginning of large-scale attacks on ethnic Georgians came towards the end of
1992. In September 1992, heavily armed Abkhaz insurgents, acting in concert
with Russian troops and mercenaries, began an assault in the Gagra District of
north-western Abkhazia, close to the Russian border. A ceasefire agreement
was brokered by the Russian Federation on 3 September 1992 and Georgian
forces withdrew from the city of Gagra in accordance with its terms. After the
Russian Federation facilitated the withdrawal of Georgian forces, Abkhaz
insurgents, together with Cossacks and Chechen mercenaries under Shamyl
Basaev attacked Gagra on 1 October and captured it the following day. It is
estimated that nearly 20,000 Georgian civilians fled Gagra prior to the arrival
of Abkhaz insurgents. Of those who remained, few survived a violent campaign
by the Abkhaz separatists and their allies to eliminate the ethnic Georgian
population. The pre-war population of Gagra was 28% ethnic Georgian and
9.1% Abkhaz. By 1997 the demographics of the population had been trans-
formed, so that only 3% were ethnic Georgian and 36.28% were Abkhaz.
36. As the armed conflict moved to the south-east towards the strategically
important Abkhaz capital city of Sukhumi, there was an escalation of the vio-
lence due to the increased involvement of Russian armed forces in the hostili-
ties. From 5 January 1993, Abkhaz and Russian armed forces jointly besieged
and tried unsuccessfully to retake Sukhumi from the Georgian Republican
Guards. The forces had considerable difficulty in capturing the city, which had
an ethnically mixed civilian population of nearly 120,000, of which 41.5% were
ethnic Georgian and only 2.5% Abkhazian. On 20 February 1993, the Russian
Defence Ministry despatched a Su-25 fighter-bomber to attack Sukhumi. An
American journalist, Thomas Goltz, who witnessed the attack, stated that the
airplane dropped a 500-pound bomb that “pulverized a two-story residence
and [tore] off the back halves of four surrounding houses . . .” 9. Afterwards,
the airplane returned and its
“wing cannon and machine guns raked a street about 200 meters away
from the bombing site, catching people outdoors who had emerged from
the relative safety of their homes to help neighbours buried under the rub-
ble...” 10.
After initially denying the air raid and then blaming it on the Georgians, the
then Russian Defence Minister Pavel Grachev admitted the Russian attack but
claimed that it “had taken place in revenge for Georgian shelling of areas close
to Eshera, a Russian defence research centre and military base not far north of
the Gumista River” 1. In another incident on 19 March, Georgian forces
downed a Russian Su-27 fighter-bomber. A United Nations Military Observer
invited noted that
9 T. Goltz, “Letter from Eurasia: The Hidden Russian Hand”, Foreign Policy, Fall
1993.
10 Ibid.
11 Ibid. 21
la Russie. Même si toutes les parties commirent des violations des droits de
l’homme, c’est à la fin de 1992 qu’il faut faire remonter le tournant du conflit et
le début des attaques à grande échelle visant des habitants de souche géor-
gienne. En septembre 1992, les insurgés abkhazes lourdement armés, agissant
de concert avec les soldats russes et les mercenaires, donnèrent l’assaut au dis-
trict de Gagra, dans la partie nord-ouest de l’Abkhazie, près de la frontière
russe. Un accord de cessez-le-feu fut négocié sous l’égide de la Fédération
de Russie le 3 septembre 1992 et, conformément aux termes de cet accord, les
forces géorgiennes se retirèrent de la ville de Gagra. Après que la Fédération
de Russie eut facilité le retrait des forces géorgiennes, les insurgés abkhazes,
accompagnés de Cosaques et de mercenaires tchéterènes sous le commandement
de Chamil Bassaïev, attaquèrent Gagra le 1 octobre et s’en emparèrent le jour
suivant. Le nombre de civils de souche géorgienne ayant fui Gagra avant l’arri-
vée des insurgés abkhazes est estimé à près de 20 000. Parmi ceux qui restèrent,
peu survécurent à une violente campagne des séparatistes abkhazes et de leurs
alliés visant à éliminer la population de souche géorgienne. Avant la guerre, la
composition ethnique de la population de Gagra était la suivante: 28 % de
Géorgiens et 9,1 % d’Abkhazes. En 1997, les données démographiques concer-
nant la population avaient changé, de telle manière que seuls 3 % étaient de
souche géorgienne et 36,28 % étaient d’origine abkhaze.
36. Lorsque le conflit armé se déplaça en direction du sud-est, vers la capi-
tale abkhaze Soukhoumi, particulièrement importante d’un point de vue stra-
tégique, le rôle croissant des forces armées russes dans les hostilités donna lieu
à une escalade de la violence. A partir du 5 janvier 1993, les forces armées ab-
khazes et russes assiégèrent ensemble Soukhoumi et tentèrent, sans succès, de la
reprendre aux gardes républicains géorgiens. Les soldats eurent de grandes dif-
ficultés à s’emparer de la ville, dont la population de près de 120 000 personnes
était composée de plusieurs ethnies, dont 41,5 % de Géorgiens et seulement
2,5 % d’Abkhazes. Le 20 février 1993, le ministre de la défense russe envoya un
chasseur-bombardier Su-25 chargé d’attaquer Soukhoumi. Un journaliste amé-
ricain, Thomas Goltz, qui fut témoin de l’attaque, indiqua que l’avion lâcha une
bombe d’environ 250 kilos qui «pulvérisa une résidence de deux étages et [arra-
9
cha] l’arrière de quatre maisons environnantes...» . Par la suite, l’avion revint
et ses
«canons placés sous l’aile et ses mitrailleuses ratissèrent une rue située à
environ 200 mètres du lieu du bombardement, surprenant, à l’extérieur,
des personnes qui étaient sorties de la sécurité relative de leurs domiciles
pour aider des voisins ensevelis sous les décombres...» 10.
Après avoir tout d’abord nié le raid aérien, puis l’avoir mis sur le compte des
Géorgiens, le ministre de la défense russe de l’époque, Pavel Gratchev, recon-
nut que la Russie était à l’origine de l’attaque, mais prétendit qu’«elle avait eu
lieu en représailles du bombardement géorgien de zones proches d’Eshera, un
centre de recherche de la défense russe et une base militaire situé légèrement
11
au nord de la Goumista» . Lors d’un autre incident, le 19 mars, les forces
géorgiennes abattirent un chasseur-bombardier russe Su-27. Un observateur
militaire des Nations Unies invité nota que
9 T. Goltz, «Letter from Eurasia: The Hidden Russian Hand», Foreign Policy, automne
1993.
10 Ibid.
11 Ibid. 22
“both the downed aircraft and the dead pilot confirmed that it was the
advanced aircraft the Georgians claimed it was and that the pilot’s papers
12
identified him as a major in the Russian air force” .
37. In contrast with the hostilities during 1992, an authoritative independent
report noted that:
“The role of Russian actors in the conflict became considerably more
pronounced during the first six months of 1993. This was precisely at a
time when human rights abuses and violations of the laws of war attrib-
utable to heavy weapons obtained from Russian sources were becoming
more serious. The Russian military took a direct role in hostilities on sev-
eral occasions, and appears to have provided logistical support and sup-
plies to the Abkhaz.” 13
38. Russian participation in hostilities was not limited to aerial bombard-
ment. The same report concluded that:
“The air attacks over Sukhumi were the most verifiable case of Russian
forces aiding the Abkhaz. But there were other instances in which the evi-
dence is persuasive that Russian forces were involved in logistics and sup-
ply at this point in the conflict. It is very likely, for example, that Russian
forces supplied extensive military assistance to the Abkhaz fighters during
sea-borne landings in attempts to retake Sukhumi . . . [Furthermore] at
least some heavy weapons, transport and fuel were supplied by Russian
14
forces.”
39. On 27 July 1993, after several months of stalemate between the Parties
and the exhaustion of the civilian population, the Russian Federation mediated
a cease-fire agreement pursuant to which Georgian forces withdrew their heavy
weapons from Sukhumi. On 16 September, after the Georgian defences were
largely removed, Abkhaz insurgents, Cossacks, and Northern Caucasus mer-
cenaries, in concert with Russian armed forces, unilaterally broke the ceasefire
and restarted the artillery and aerial bombardment against the civilian popula-
tion.
40. This new offensive against the civilian population provoked the mass
flight of the entire ethnic Georgian population, as well as ethnic Greek and
Jewish civilian population of Sukhumi and surrounding areas. An independent
report observed that:
“The Abkhaz attacks triggered a mass flight of Georgian civilian that
international relief organizations roughly estimated at 230,000 to 250,000
people. Some 50,000 of those fleeing came from Sukhumi. Those who fled
along the main highway . . . had to contend with continuing fighting . . . A
second road out of Sukhumi led across the mountains behind Sukhumi,
the 10,000 foot passes of the Caucasus, through the Kodori valley to the
12 T. Goltz, “Letter from Eurasia: The Hidden Russian Hand”, Foreign Policy, Fall
1993.
13 Human Rights Watch Arms Project, Human Rights Watch/Helsinki, “Georgia/
Abkhazia: Violations of the Laws of War and Russia’s Role in the Conflict”, March 1995,
Vol. 7, No. 7, p. 37.
14 Ibid.,p.38. 23
«tant l’avion abattu que le pilote décédé permettent de confirmer qu’il
s’agissait bien d’un avion de pointe, comme le prétendaient les Géorgiens,
et que les papiers du 12lote l’identifiaient comme étant chef d’escadron
dans l’armée russe» .
37. Contrairement à ce qui s’était passé pendant les hostilités de 1992, un
rapport indépendant faisant autorité indiquait:
«Le rôle d’intervenants russes dans le conflit est devenu de plus en plus
marqué au cours des six premiers mois de 1993. C’est précisément à cette
époque que les violations des droits de l’homme et des lois de la guerre
attribuables à des armes lourdes obtenues de sources russes se sont aggra-
vées. L’armée russe joua, à plusieurs reprises, un rôle direct dans les hos-
tilités et semble avoir fourni un soutien logistique aux Abkhazes et les
avoir approvisionnés.» 13
38. Le rôle joué par les Russes dans les hostilités ne s’est pas limité au bom-
bardement aérien. Le même rapport concluait:
«Les attaques aériennes sur Soukhoumi constituent l’événement le plus
facilement vérifiable indiquant que les forces russes aidaient les Abkhazes.
Mais il y eut d’autres exemples pour lesquels il existait des éléments de
preuve convaincants que, à ce stade du conflit, les forces russes jouaient un
rôle dans la logistique et l’approvisionnement [des Abkhazes]. Il est très
probable, par exemple, que les forces russes ont fourni une aide militaire
importante aux combattants abkhazes pendant les opérations de débar-
quement au cours des tentatives menées pour reprendre Soukhoumi... [En
outre,] au moins quelques armes lourdes, des moyens14e transport et du
carburant furent fournis par les forces russes.»
39. Le 27 juillet 1993, après plusieurs mois d’impasse entre les parties et vu
l’épuisement de la population civile, la Fédération russe obtint par médiation
un accord de cessez-le-feu aux termes duquel les forces géorgiennes retirèrent
leurs armes lourdes de Soukhoumi. Le 16 septembre, après que les défenses
géorgiennes eurent été largement écartées, les insurgés abkhazes, les Cosaques
et les mercenaires du Caucase septentrional, de concert avec les forces armées
russes, rompirent unilatéralement le cessez-le-feu et reprirent le pilonnage d’artil-
lerie et le bombardement aérien de la population civile.
40. Cette nouvelle offensive contre la population civile provoqua la fuite
massive de l’ensemble de la population de souche géorgienne, ainsi que de la
population d’origine grecque et de la population juive de Soukhoumi et des
zones environnantes. Selon un rapport indépendant:
«Les attaques abkhazes ont déclenché une fuite massive parmi la popu-
lation civile de souche géorgienne, qui comptait approximativement, selon
les estimations des organisations humanitaires internationales, entre
230 000 et 250 000 personnes. Quelque 50 000 d’entre elles provenaient de
Soukhoumi. Celles qui fuyaient le long de l’autoroute principale ... devaient
affronter des combats incessants... Une seconde route qui sortait de
12 T. Goltz, «Letter from Eurasia: The Hidden Russian Hand», Foreign Policy,
automne 1993.
13 Human Rights Watch Arms Project, Human Rights Watch/Helsinki, «Georgia/
Abkhazia: Violations of the Laws of War and Russia’s Role in the Conflict», mars 1995,
vol. 7, n°7, p. 37.
14 Ibid., p. 38. 24
peaks of Svanetia and the Russian border beyond. This route described by
one journalist as a ‘caravan of trauma’ spelled tragedy for thousands . . .
Journalists described scenes of ‘refugees who had been stranded for weeks,
lashed by rain and snow, sleeping fifty to a house or camping out in rickety
Soviet-era cars. A blizzard in early October claimed many; their bodies
remained by the sides of trails in the mountain passes . . .”15
41. After the fall of Sukhumi, Abkhaz separatist leader Vladislav Ardzinba
expressed his gratitude to the Russian “volunteers” who had supported the
military operations.
42. Upon the conclusion of the joint Abkhaz-Russian offensive in Sukhumi
District, virtually the entire ethnic Georgian population had been displaced.
Whereas before the conflict 44.1% of the population of the District was ethnic
Georgian and only 5.1% was Abkhaz, 1997 statistics indicated that the ethnic
composition had changed to 5% ethnic Georgian and 59.9% Abkhaz.
43. To the south-east of Sukhumi, a campaign of attacks on ethnic Geor-
gians continued unabated in Ochamchire, which fell to Abkhaz forces dur-
ing September 1993. Before the violence in Ochamchire District, its ethnic com-
position was 46.2% ethnic Georgian and 36.7% Abkhaz. It was later 3% ethnic
Georgian and 56.84% Abkhaz.
44. The attacks on ethnic Georgians continued beyond Ochamchire to the
remote Gali District on the border of the Abkhaz region with the rest of Geor-
gia. More than 90% of the population in Gali was ethnic Georgian, and less
than 1% was Abkhaz. On approach of the Abkhaz insurgents and mercenaries
on 29 September 1993, much of the population fled in fear that the same atroci-
ties committed elsewhere would be visited upon them. Since Gali is a remote
region without an Abkhaz population, the Abkhaz forces eventually withdrew
from the District because they could not control the territory. The ethnic Geor-
gians returned soon after, to scenes of death and devastation. This population,
representing the only remaining Georgian presence in Abkhazia after the hos-
tilities (together with a small population of ethnic Svans in the Kodori Gorge),
would face new attacks in 1998, and continues to be persecuted until the
present.
45. The attacks on ethnic Georgians came to a close towards the end of 1993
when almost all ethnic Georgians except those in Gali District had been
removed from Abkhazia.
46. A summary of the events is set out in the 1994 United States State
Department Report on Human Rights Practices:
“The [Abkhaz] separatist forces committed widespread atrocities against
15Human Rights Watch Arms Project, Human Rights Watch/Helsinki, “Georgia/
Abkhazia: Violations of the Laws of War and Russia’s Role in the Conflict”, March 1995,
Vol. 7, No. 7, p. 43. 25
Soukhoumi passait à travers les montagnes derrière la ville, par les cols de
3000 mètres d’altitude du Caucase, poursuivait à travers la vallée de
Kodori jusqu’aux sommets de Svanetia et, au-delà, la frontière russe. Cette
route, décrite par un journaliste comme une «caravane des traumatisés»,
fut, pour des milliers de personnes, synonyme de tragédie. Des journalistes
ont décrit des scènes de «réfugiés immobilisés pendant des semaines, fouet-
tés par la pluie et la neige, dormant à cinquante dans une maison ou cam-
pant dehors, dans des voitures bringuebalantes de l’ère soviétique. Le bliz-
zard qui souffla début octobre fit de nombreuses victimes; leurs corps
restèrent au bord des chemins, dans les cols de montagne...»» 15
41. Après la chute de Soukhoumi, le chef séparatiste abkhaze, Vladislav
Ardzinba, exprima sa gratitude aux «volontaires» russes qui avaient soutenu
les opérations militaires.
42. Lorsque l’offensive menée conjointement par les Abkhazes et les Russes
dans le district de Soukhoumi s’est achevée, la quasi-totalité de la population
de souche géorgienne avait été déplacée. Tandis qu’avant le conflit 44,1 % de la
population du district était de souche géorgienne et seulement 5,1 % abkhaze,
les statistiques de 1997 indiquaient que la composition ethnique avait changé et
que la population comptait 5 % de personnes de souche géorgienne et 59,9 %
d’Abkhazes.
43. Une campagne d’attaques visant les personnes de souche géorgienne
continuait sans relâche au sud-est de Soukhoumi, à Otchamtchira, qui tomba
aux mains des forces abkhazes au cours de septembre 1993. Avant les violences
commises dans le district d’Otchamtchira, celui-ci se composait à 46,2 % de
personnes de souche géorgienne et à 36,7 % d’Abkhazes. Par la suite, la com-
position ethnique était la suivante: 3 % de Géorgiens et 56,84 % d’Abkhazes.
44. Les attaques menées contre les personnes de souche géorgienne se pour-
suivirent au-delà d’Otchamtchira jusqu’au district éloigné de Gali, à la frontière
entre l’Abkhazie et le reste de la Géorgie. Plus de 90 % de la population de Gali
était de souche géorgienne, et moins de 1 % abkhaze. A l’approche des insurgés
abkhazes et des mercenaires, le 29 septembre 1993, une bonne partie de la
population s’enfuit de peur de subir les mêmes atrocités que celles qui avaient
été perpétrées ailleurs. Gali étant une région éloignée sans population abkhaze,
les forces abkhazes se retirèrent finalement du district car elles n’étaient pas en
mesure de contrôler le territoire. Les personnes de souche géorgienne revinrent
peu après et trouvèrent des scènes de mort et de dévastation. Cette population,
qui représente la seule présence géorgienne restant en Abkhazie après le déclen-
chement des hostilités (sans compter une faible population de Svanes dans les
gorges de Kodori), allait affronter de nouvelles attaques en 1998 et continue
d’être persécutée encore aujourd’hui.
45. Les attaques visant les personnes de souche géorgienne prirent fin dans
les derniers mois de 1993, lorsque la quasi-totalité d’entre elles, à l’exception de
celles se trouvant dans le district de Gali, eurent été délogées d’Abkhazie.
46. On trouve un résumé des événements dans le rapport sur les pratiques
en matière de droits de l’homme du département d’Etat des Etats-Unis
d’Amérique:
«Les forces séparatistes [abkhazes] ont commis de nombreuses atrocités
15Human Rights Watch Arms Project, Human Rights Watch/Helsinki, «Georgia/
Abkhazia: Violations of the Laws of War and Russia’s Role in the Conflict», mars 1995,
vol. 7, n° 7, p. 43. 26
the Georgian civilian population, killing many women, children, and eld-
erly, capturing some as hostages and torturing others . . . they also killed
large numbers of Georgian civilians who remained behind in Abkhaz-
seized territory . . .
The separatists launched a reign of terror against the majority Georgian
population, although other nationalities also suffered . . . Those fleeing
Abkhazia made highly credible claims of atrocities, including the killing of
civilians without regard for age or sex. Corpses recovered from Abkhaz-
16
held territory showed signs of extensive torture.”
47. The Russian Federation played an important role in ensuring the victory
of Abkhaz forces. An independent report in 1995 observed that:
“The conflict in Abkhazia was heightened by the involvement of Russia,
mostly on the Abkhaz side, especially during the war’s initial stages.
Whereas Russia has endorsed the territorial integrity of the Republic of
Georgia, Russian arms found their way into Abkhaz hands, Russian
planes bombed civilian targets in Georgian-controlled territory, [and] Rus-
sian military vessels, manned by supporters of the Abkhaz side, were made
available to shell Georgian-held Sukhumi . . .” 17
48. Upon conclusion of the cease-fire agreement on 24 May 1994, Georgia
had to contend with more than a quarter of a million refugees from Abkhazia.
More than 5,000 of its civilian citizens had been murdered, and a similar
number were missing and presumed dead.
49. From 1993 onwards, the United Nations Security Council condemned
the situation, referring to reports of attacks on ethnic Georgians from Abk-
hazia and calling for their unconditional return. Security Council resolution
876 of 19 October 1993 expressed deep concern at reports of “ethnic cleansing”
and affirmed “the right of refugees and displaced persons to return to their
homes” (para. 5).
50. The OSCE 1994 Budapest Document expressed “deep concern over ‘eth-
nic cleansing’, the massive expulsion of people, predominantly Georgian, from
their living areas and the deaths of large numbers of innocent civilians” 18. The
OSCE 1996 Lisbon Document affirms its “utmost support for the sovereignty
and te19itorial integrity of Georgia within its internationally recognized bor-
ders” , and, moreover:
“[c]ondemn[s] the ‘ethnic cleansing’ resulting in mass destruction and
forcible expulsion of predominantly Georgian population in Abkhazia.
16 United States Department of State, Georgia Human Rights Practices 1993, 31 Janu-
ary 1994.
17 Human Rights Watch Arms Project, Human Rights Watch/Helsinki, “Georgia/
Abkhazia: Violations of the Laws of War and Russia’s Role in the Conflict”, March 1995,
Vol. 7, No. 7, p. 7.
18 OSCE, Budapest Summit 1994, Budapest Document, “Towards a Genuine Partner-
sh19 in a New Era”, 21 December 1994.
OSCE, Lisbon Summit 1996, Lisbon Document, 3 December 1996, para. 20. 27
à l’encontre de la population civile géorgienne, tuant nombre de femmes,
d’enfants et de personnes âgées, en prenant certains en otages tandis qu’elles
en torturaient d’autres ... elles ont également tué un grand nombre de per-
sonnes de souche géorgienne parmi la population civile qui est restée en
arrière, sur le territoire abkhaze dont elles se sont emparées...
Les séparatistes commencèrent à faire régner la terreur contre la popula-
tion à majorité géorgienne, même si d’autres ethnies ont également souf-
fert... Ceux qui fuyaient l’Abkhazie rapportaient, de manière tout à fait
crédible, que des atrocités, telles que des assassinats, étaient commises
parmi la population civile sans égard pour l’âge ou le sexe des victimes.
Des corps retrouvés sur le territoire contrôlé par les Abkhazes montraient
des signes de nombreuses tortures.» 16
47. La Fédération de Russie a joué un rôle important en assurant la victoire
des forces abkhazes. Un rapport indépendant de 1995 indique:
«Le conflit en Abkhazie a été exacerbé par l’intervention, essentielle-
ment du côté abkhaze, de la Russie, en particulier au cours des premiers
stades de la guerre. Tandis que la Russie se prononçait en faveur de l’inté-
grité territoriale de la République de Géorgie, les armes russes parvenaient
entre les mains des Abkhazes, les avions russes bombardaient des cibles
civiles sur le territoire contrôlé par la Géorgie [et] les navires militaires
russes, avec, à bord, des partisans du camp abkhaze, étaient mis à dispo-
sition pour bombarder Soukhoumi tenue par les Géorgiens...» 17
48. A la conclusion de l’accord de cessez-le-feu du 24 mai 1994, la Géorgie
devait faire face à plus de 250 000 réfugiés venus d’Abkhazie. Plus de 5000 per-
sonnes avaient été tuées parmi sa population civile et à peu près autant étaient
portées disparues et présumées décédées.
49. A partir de 1993, le Conseil de sécurité des Nations Unies a condamné
la situation, se référant à des informations faisant état d’attaques contre des
personnes de souche géorgienne en Abkhazie et appelant à leur retour sans
condition. Dans sa résolution 876 du 19 octobre 1993, le Conseil de sécurité se
déclara profondément préoccupé par les informations faisant état de cas de
«nettoyage ethnique», affirma «le droit des réfugiés et des personnes déplacées
de retourner dans leurs foyers et demand[a] aux parties de faciliter ce retour»
(par. 5).
50. Le document de Budapest de l’OSCE de 1994 exprimait une «profond[e]
préoccup[ation] [devant] la «purification ethnique», l’expulsion massive de
populations, essentiellement de souche géorgienne, des zones où elles vivent
ainsi que [devant] le massacre de nombreux civils innocents.»Dans son document
de Lisbonne de 1996, l’OSCE affirme son «profond attachement à la souverai-
neté et à l’intégrité territoriale de la Géorgie, à l’intérieur de ses frontières inter-
nationalement reconnues» 19 et, en outre:
«condamn[e] la «purification ethnique» qui a entraîné une extermination
massive et l’expulsion forcée de la population essentiellement géorgienne en
16 Département d’Etat des Etats-Unis d’Amérique, Georgia Human Rights Practices,
1993, 31 janvier 1994.
17 Human Rights Watch Arms Project, Human Rights Watch/Helsinki, «Georgia/
Abkhazia: Violations of the Laws of War and Russia’s Role in the Conflict», mars 1995,
vol. 7, n 7, p. 7.
18 OSCE, sommet de Budapest 1994, document de Budapest, «Vers un authentique
pa19enariat dans une ère nouvelle», 21 décembre 1994.
OSCE, sommet de Lisbonne 1996, document de Lisbonne, 3 décembre 1996, par. 20. 28
Destructive acts of separatists, including obstruction of the return of refu-
gees and displaced persons and the decision to hold elections in Abkhazia
. . . undermine the positive efforts undertaken to promote political settle-
ment of these conflicts.” 20
51. The OSCE 1999 Istanbul Document reiterated its
“strong condemnation . . . of the ‘ethnic cleansing’ resulting in mass
destruction and forcible expulsion of predominantly Georgian population
in Abkhazia, Georgia, and of the violent acts in May 1998 in the Gali
region” 21.
D. The Second Phase of Russia’s Intervention in South Ossetia and
Abkhazia: 1994 to 2008
52. Having sustained heavy losses and the forcible expulsion of approxi-
mately 300,000 of its citizens from Abkhazia and South Ossetia in the years
after the dissolution of the USSR, Georgia was left with no practical option but
to accept Russian demands that it become a member of CIS as a pre-condition
for an end to the conflict. On 24 June 1992, Georgia and the South Ossetian
insurgents signed the Sochi Agreement. On 1 December 1993, Georgia and the
Abkhaz insurgents signed a Memorandum of Understanding in Geneva. On
9 December 1993, Georgia became an official member of the CIS. This was fol-
lowed by a cessation of hostilities with Abkhaz forces. On 14 May 1994 the
Abkhaz separatists and the Georgian Government signed the Moscow Agree-
ment on a Ceasefire and Separation of Forces. This Agreement was endorsed
by the Decision of the Heads of State of the CIS on 22 August 1994, which
provided that the mandate of Russian CIS peacekeepers was “to facilitate the
safe and dignified return of persons displaced from the conflict zone to the
22
places of their former permanent residence” .
53. Instead of exerting influence over the Abkhaz and South Ossetian sepa-
ratists to allow for the return of IDPs, however, the Russian Federation has
pursued a policy of creeping annexation of both regions. The Russian Federa-
tion has unilaterally conferred citizenship on over 90% of the population in
South Ossetia and approximately 100,000 people in Abkhazia, with the limited
exception of ethnic Georgians in the Gali District of Abkhazia, who have
refused to accept Russian citizenship and have been subjected to increasing
pressure and threats to renounce their Georgian citizenship. The Russian Fed-
eration has long argued that it has the right to use force to protect its “citizens”
on Georgian territory; indeed, the Russian Government reiterated this claim as
justification for its 8 August 2008 invasion of Georgia (discussed below),
stating that “the Russian Federation will not leave its citizens and peacekeepers in
South Ossetia to the mercy of fate and will take all necessary measures to pro-
tect them” 2.
20
OSCE, Lisbon Summit 1996, Lisbon Document, 3 December 1996, para. 20.
21 OSCE, Istanbul Summit 1999, Istanbul Summit Declaration, para. 13.
22 Decision on the Use of Collective Force for Maintaining Peace in the Georgia-
Abkhaz Zone of Conflict, 22 August 1994.
23 Russian Ministry of Foreign Affairs, “Statement by Vladimir Voronkov, Acting
Permanent Representative of the Russian Federation, at the Special Meeting of the
OSCE Permanent Council”, 8 August 2008, available at http://www.mid.ru/brp
_4.nsf/e78a48070fl28a7b43256999005bcbb3/f9bfcf8d8635d232c32574a2005b82f4?
OpenDocument. 29
Abkhazie. Des actes de destruction commis par des séparatistes, entra-
vant notamment le retour des réfugiés et des personnes déplacées, et la
décision de tenir des élections en Abkhazie ... sapent les efforts constructifs
entrepris pour favoriser un règlement politique de ces conflits.» 20
51. Dans son document d’Istanbul de 1999, l’OSCE a réitéré
«la condamnation énergique ... du «nettoyage ethnique» qui s’est traduit
en Abkhazie (Géorgie) par l’extermination massive et l’expulsion forcée de
la population essentiellement géorgienne, et condamn[é] avec force les
actes de violence survenus en mai 1998 dans la région de Gali» 21.
D. La deuxième phase de l’intervention russe en Ossétie du Sud
et en Abkhazie: de 1994 à 2008
52. Ayant essuyé de lourdes pertes et vu expulser par la force environ
300 000 de ses citoyens d’Abkhazie et d’Ossétie du Sud dans les années suivant
la dissolution de l’URSS, la Géorgie n’avait concrètement pas d’autre choix
que de se plier aux exigences de la Russie, qui faisait de son entrée dans la CEI
un préalable à la fin du conflit. Le 24 juin 1992, la Géorgie signa l’accord de
er
Sotchi avec les insurgés sud-ossètes et, le 1décembre 1993, ella signa à Genève un
protocole d’accord avec les insurgés abkhazes. Le 9 décembre 1993, elle devint
officiellement membre de la CEI, à la suite de quoi les hostilités avec les forces
abkhazes prirent fin. Le 14 mai 1994, les séparatistes abkhazes et le Gouverne-
ment géorgien signèrent l’accord de Moscou, portant cessez-le-feu et séparation
des forces. Cet accord fut entériné par les chefs d’Etat de la CEI dans leur déci-
sion du 22 août 1994, qui indiquait que la mission du contingent russe de main-
tien de la paix de la CEI consistait à «faciliter le retour vers leurs foyers, dans
la sécurité et dans la dignité, des personnes déplacées de la zone de conflit» 2.
53. Toutefois, au lieu d’user de son influence sur les séparatistes abkhazes et
sud-ossètes pour permettre le retour des personnes déplacées, la Fédération de
Russie a mené une politique d’annexion larvée des deux régions. Ainsi a-t-elle
unilatéralement conféré la nationalité russe à plus de 90 % de la population
d’Ossétie du Sud et à quelque 100 000 habitants d’Abkhazie, les seuls à faire
exception étant les Géorgiens du district abkhaze de Gali, qui ont refusé la
nationalité russe et ont été soumis à des pressions et menaces croissantes visant
à les faire renoncer à leur nationalité géorgienne. La Fédération de Russie sou-
tient depuis longtemps avoir le droit d’employer la force pour protéger ses
«citoyens» situés sur le territoire géorgien; d’ailleurs, le Gouvernement russe a
de nouveau invoqué cet argument pour justifier son invasion de la Géorgie le
8 août 2008 (dont il est question plus loin), en déclarant que «la Fédération de
Russie n’abandonnera[it] pas à leur sort ses citoyens et soldats de maintien de
la paix présents en O23étie du Sud et prendra[it] toutes les mesures nécessaires
pour les protéger» .
20
21 OSCE, sommet de Lisbonne 1996, document de Lisbonne, 3 décembre 1996, par. 20.
22 OSCE, sommet d’Istanbul 1999, déclaration du sommet d’Istanbul, par. 17.
Décision du 22 août 1994 concernant l’emploi de la force collective pour maintenir la
pa23 dans la zone du conflit abkhazo-géorgien.
Ministère russe des affaires étrangères, «Statement by Vladimir Voronkov, Acting
Permanent Representative of the Russian Federation, at the Special Meeting of the
OSCE Permanent Council», 8 août 2008, disponible (en anglais) à l’adresse suivante:
http://www.ln.mid.ru/brp_4.nsf/e78a48070f128a7b43256999005bcbb3/f9bfcf8…
32574a2005b82f4?OpenDocument. 30
54. Furthermore, with the encouragement of the Russian Federation, Rus-
sian citizens have invested heavily in South Ossetia and Abkhazia during the
past 15 years, including the purchase of properties belonging to Georgian IDPs
around Sukhumi (in Abkhazia) and elsewhere. Likewise, Russian companies
have made a series of high profile and unauthorized investments in the South
Ossetian economy, including several lead and zinc mines in the province.
55. The Russian Federation has also systematically attempted to undermine
Georgia’s territorial sovereignty by taking steps to recognize the independence
of the “Republic of South Ossetia” and providing political support to the sepa-
ratist government of South Ossetia. These attempts date back to at least
6 March 1993, when the High Council of North Ossetia, a political subdivision
of the Russian Federation, recognized the independence of the “Republic of
South Ossetia”. Likewise, on 22 March 1993, the Supreme Council of the Rus-
sian Federation itself put the question of recognition of the “Republic of South
Ossetia” on its formal agenda.
56. Notwithstanding mounting Russian support for the separatists, the secu-
rity situation in South Ossetia was relatively stable during the 12 years between
1992 and 2004. In 2004, however, the Georgian Government was compelled to
launch a nationwide effort to combat the increasing threat of organized crime,
which revolved around contraband smuggling and drug trafficking networks
operating out of Ergneti Market in Tskhinvali. In June 2004, the Georgian
Government shut down Ergneti Market, revenue from which was a key source
of funding and supplies for the separatist authorities.
57. South Ossetian separatist forces retaliated with force. On 11 June 2004,
separatist leader Eduard Kokoity declared that “South Ossetia is cutting off all
24
relations with Tbilisi” . Shortly thereafter, South Ossetian forces operating
with Russian assistance closed highways, detained Georgian troops and fired
mortars at Georgian villages in July and August 2004, killing dozens. On 7 July
2004, Georgian peacekeepers intercepted a Russian convoy carrying military
equipment, including some 300 missiles 25. The following day, around 50 Geor-
gian peacekeepers were disarmed and detained for several days by South Osse-
tian forces.
58. On 11 July 2004, Georgian president Saakashvili said the “crisis in South
Ossetia is not a problem between Georgians and Ossetians. This is a problem
between Georgia and Russia.” 26 Highlighting the Russian provision of
armoured personnel carriers, tanks, fuel and other military equipment to the
South Ossetian separatists, the Georgian Government appealed to the interna-
tional community, in particular the OSCE, to increase its role and presence
inside the zone of conflict.
24 Interfax, 11 June 2004.
25 Article, “Georgia Seizes Russian Arms Convoy in South Ossetia”, Civil Georgia,
7 July 2004.
26 Article, “Saakashvili: Russia to Blame for South Ossetia Crisis”, Eurasia Insight,
12 July 2004. 31
54. En outre, encouragés par la Fédération de Russie, les citoyens russes ont
massivement investi en Ossétie du Sud et en Abkhazie ces quinze dernières
années, par exemple en achetant des biens appartenant à des personnes dépla-
cées géorgiennes autour de Soukhoumi (en Abkhazie) et ailleurs. De même, des
entreprises russes ont fait sans autorisation dans l’économie sud-ossète une
série d’investissements qui ont défrayé la chronique, notamment dans plusieurs
mines de plomb et de zinc de la province.
55. La Fédération de Russie a aussi tenté systématiquement de porter atteinte
à l’intégrité territoriale de la Géorgie en prenant des dispositions pour recon-
naître l’indépendance de la «République d’Ossétie du Sud» et en soute-
nant politiquement le gouvernement séparatiste de la province. Ces tentatives
remontent au moins au 6 mars 1993, date à laquelle le haut conseil d’Ossétie
du Nord, une subdivision politique de la Fédération de Russie, a reconnu l’indé-
pendance de la «République d’Ossétie du Sud». Pareillement, le 22 mars 1993,
le conseil suprême de la Fédération de Russie inscrivit lui-même à son ordre du
jour officiel la question de la reconnaissance de la «République d’Ossétie
du Sud».
56. Nonobstant le soutien croissant apporté aux séparatistes par la Russie,
la situation en Ossétie du Sud est demeurée relativement stable en ce qui
concerne la sécurité publique durant les douze années écoulées entre 1992 et
2004. En 2004, toutefois, le Gouvernement géorgien fut contraint de lancer une
campagne nationale de lutte contre le crime organisé, menace grandissante qui
était à mettre au compte de réseaux de contrebande et de trafic de stupéfiants
gravitant autour du marché d’Ergneti à Tskhinvali. En juin 2004, le Gouver-
nement géorgien ferma le marché d’Ergneti, dont les recettes constituaient
une source vitale de financement et d’approvisionnement pour les autorités
séparatistes.
57. Les forces séparatistes d’Ossétie du Sud ripostèrent brutalement. Le
11 juin 2004, le dirigeant séparatiste Edouard Kokoïty déclara que «l’Ossétie
du Sud coup[ait] toute relation avec Tbilissi» 24. Peu après, en juillet et en
août 2004, des forces sud-ossètes agissant avec l’assistance de la Russie fer-
mèrent les autoroutes, placèrent des soldats géorgiens en détention et tirèrent
au mortier sur des villages géorgiens, tuant des dizaines de personnes. Le
7 juillet 2004, des soldats de maintien de la paix géorgiens interceptèrent un25
convoi russe transportant du matériel militaire, dont quelque 300 missiles .Le
lendemain, une cinquantaine de soldats de la paix géorgiens furent désarmés
par des membres des forces sud-ossètes qui les détinrent pendant plusieurs
jours.
58. Le 11 juillet 2004, le président géorgien Saakashvili déclara que la «crise
en Ossétie du Sud n’[était] pas un problème entre Géorgiens et Ossètes. C’est un
26
problème entre la Géorgie et la Russie.» Soulignant que la Russie fournissait
des véhicules blindés de transport de troupes, des chars, du carburant et
d’autres formes de matériel militaire aux séparatistes d’Ossétie du Sud, le
Gouvernement géorgien en appela à la communauté internationale, en par-
ticulier à l’OSCE, pour qu’elle accroisse son rôle et sa présence dans la zone
de conflit.
24 Interfax, 11 juin 2004.
25 Article du 7 juillet 2004 intitulé «Georgia Seizes Russian Arms Convoy in South
Ossetia», Civil Georgia.
26 Article du 12 juillet 2004 intitulé «Saakashvili: Russia to Blame for South Ossetia
Crisis», Eurasia Insight. 32
59. Notably, several senior South Ossetian military officials operating during
this time period were former high-ranking Russian officers. Anatoly Ivanovich
Sisoev, chief military adviser to Eduard Kokoity in 2004, is a Russian citizen
and a former employee of the Intelligence Service of the Russian Ministry of
Defence. During the escalation of the conflict in the summer of 2004, he was
the official primarily responsible for the receipt and allocation of volunteer
fighters, many from the Russian Federation, who joined the irregular South
Ossetian forces. Anatoly Konstantinovich Barankevich, the South Ossetian
minister of defence from summer 2004 to December 2006 is a Russian citizen
and, during the time he served in South Ossetia, was a colonel on active duty in
the Russian Army. Officially, he was away from Russia on “business leave”.
Starting on 11 December 2006, he served as secretary of the security council of
South Ossetia.
60. Russian military men make up not only the military leadership of South
Ossetia, but also its police forces. In 2004, ex-Russian general Vasil Alekseevich
Platov served as Eduard Kokoity’s adviser on the interior. This position is now
held by Russian general Aleksander Andreevich Shaposhnikov, JPKF Deputy
Commander. From January 2006 to January 2007, it was held by Aleksander
Aleksandrovic Klimenko, a colonel in the Russian Army.
61. Similarly, since January 2006, the border security office of the State secu-
rity committee of South Ossetia has been entirely controlled by the active
officers of the State border security unit of the Russian federal security service. The
office is run by Russian lieutenant-general Valery Alekseevic Chugunov; the
head of the headquarters is Russian colonel Oleg Genadievich Chebotariov;
and first deputy head of the headquarters is Russian vice-colonel Genady
Nikolaevich Emelianenko.
62. South Ossetian military forces have received extensive training in Rus-
sian territory, including at least 18 joint exercises at Russia’s 58th Army Base,
located in North Ossetia, during 2005-2006. Kokoity himself travelled to Mos-
cow for military consultations at least monthly during the period of heaviest
fighting in the summer months of 2004.
63. On 12 November 2006, the South Ossetian separatists held a presidential
election in which ethnic Ossetians voted overwhelmingly for Eduard Kokoity.
In a parallel election held on the same day in South Ossetian villages not con-
trolled by the separatists, Dmitry Sanakoyev won the presidency with more
than 80% of the vote. A former South Ossetian secessionist and prime minister
from July to December 2001, when he was sacked by Kokoity, Sanakoyev led
the “Salvation Union of South Ossetia” with a platform for multi-ethnic co-
operation and economic development in the region. Sanakoyev constituted his
government in December 2006 and was appointed Head of the Provisional
Administration of South Ossetia by Georgian president Saakashvili on 10 May
2007. The following day, Sanakoyev addressed the Georgian Parliament in
Ossetic, stating,
“There is a political will in Georgia to find a realistic solution to this
conflict by mutual compromise. This will is reflected in the recent eco-
nomic reconstruction of our region, which raised hopes for final and
peaceful resolution of the conflict. Now there is a belief that Georgians 33
59. Il convient de noter que plusieurs hauts responsables militaires sud-
ossètes qui étaient en service au cours de cette période étaient d’anciens hauts gra-
dés de l’armée russe. Ainsi Anatoli Ivanovitch Sissoïev, le conseiller militaire
principal d’Edouard Kokoïty en 2004, était-il citoyen russe et ancien fonction-
naire du service de renseignements du ministère russe de la défense. Lors
de l’escalade du conflit, pendant l’été 2004, il était le principal responsable
de l’accueil et de l’affectation des combattants volontaires, souvent issus de
la Fédération de Russie, qui venaient grossir les rangs des forces irrégu-
lières d’Ossétie du Sud. Anatoli Konstantinovitch Barankevitch, ministre de la
défense sud-ossète entre l’été 2004 et l’hiver 2006, est citoyen russe et, pendant
son service en Ossétie du Sud, était colonel d’active dans l’armée russe. Offi-
ciellement, il avait pris congé de la Russie «pour affaires». Le 11 décembre
2006, il entra en fonctions en qualité de secrétaire du conseil de sécurité de
l’Ossétie du Sud.
60. Les militaires russes ne sont pas uniquement aux commandes de l’armée
en Ossétie du Sud, ils se retrouvent aussi dans les forces de police de la pro-
vince. En 2004, l’ex-général russe Vassil Alekseïevitch Platov était le conseiller
d’Edouard Kokoïty en matière d’affaires intérieures. Ce poste est actuellement
occupé par le général russe Aleksandr Andreïevitch Chapochnikov, le com-
mandant en second de la force conjointe de maintien de la paix (JPKF). De jan-
vier 2006 à janvier 2007, il était occupé par Aleksandr Aleksandrovitch Kli-
menko, colonel de l’armée russe.
61. De même, depuis janvier 2006, les officiers d’active de l’unité qui, au sein
du service de sécurité fédéral russe, est affectée à la sécurité de la frontière
d’Etat ont une parfaite mainmise sur le bureau pour la sécurité frontalière de la
province, qui relève du comité pour la sécurité d’Etat d’Ossétie du Sud. Ce
bureau est dirigé par le lieutenant-général russe Valery Alekseïevitch Tchou-
gounov; le chef d’état-major est le colonel russe Oleg Guennadevitch Tche-
botariov, et son premier adjoint est le lieutenant-colonel russe Guennadi
Nikolaïevitch Emelianenko.
62. Les forces militaires d’Ossétie du Sud ont suivi un entraînement poussé
en territoire russe, notamment en participant à au moins dix-huit exercices
conjoints qui ont eu lieu à la 58ebase de l’armée russe, en Ossétie du Nord, en
2005 et 2006. Kokoïty lui-même s’est rendu à Moscou pour des consultations
militaires au moins une fois par mois pendant la période où les combats bat-
taient leur plein, au cours de l’été 2004.
63. Le 12 novembre 2006, les séparatistes sud-ossètes tinrent une élection
présidentielle lors de laquelle les Ossètes plébiscitèrent Edouard Kokoïty. Dans
le cadre d’une élection parallèle organisée le même jour dans des villages
d’Ossétie du Sud qui n’étaient pas aux mains des séparatistes, Dimitri Sanakoïev
remporta la présidence avec plus de 80 % des suffrages. Ancien sécessionniste
sud-ossète et premier ministre de juillet à décembre 2001, époque où Kokoïty le
congédia, Sanakoïev conduisait le mouvement dénommé «Union pour le salut
de l’Ossétie du Sud» avec un programme de coopération multiethnique et de
développement économique de la région. Sanakoïev forma son gouvernement
en décembre 2006 et, le 10 mai 2007, fut nommé chef de l’administration
provisoire d’Ossétie du Sud par M. Saakashvili, le président géorgien. Le jour
suivant, Sanakoïev, s’adressant au Parlement géorgien en ossète, déclara:
«Il existe en Géorgie une volonté politique de trouver une solution réa-
liste à ce conflit au moyen d’un compromis. Cette volonté est illustrée par
la reconstruction économique récente de notre région, qui est porteuse
d’espoir quant à un règlement définitif et pacifique du conflit. Il est désor- 34
and Ossetians will live side by side in fraternity. This belief encouraged me
and my friends to become leaders of the newly formed social-political
movement that aims to establish peace and democracy in the region.” 27
Sanakoyev’s vision of a multi-ethnic South Ossetia has led to clashes with
Kokoity and generated threats against him from Ossetian separatists. Just over
a month ago, on 3 July 2008, he survived an attack on his convoy, when a vehi-
28
cle carrying his security personnel was struck by a remote-controlled mine .
64. Similarly, in July 2006, Georgian forces re-established control of the
region surrounding the Kodori Gorge in Upper Abkhazia. On 27 September
2006, despite strong Abkhaz separatist and Russian protests, an independent,
multi-ethnic government was inaugurated there, allowing the local Georgian
population to take part in elections for the first time since the area was overrun
by separatists 13 years earlier 29.
E. The Third Phase of Russia’s Intervention in South Ossetia and
Abkhazia: August 2008
65. The international recognition of Kosovo in February 2008, combined
with Georgia’s expression of its intention to seek NATO membership at the
4 April 2008 Bucharest Summit, catalysed renewed and intensified efforts by
the Russian Federation to give legitimacy to the de facto South Ossetian and
Abkhaz separatist authorities and to consolidate moves to establish these prov-
inces as independent, ethnically homogeneous territories in plain violation of
the Russian Federation’s obligations under CERD.
66. Beginning in or around February 2008, Russia has pursued provocative
and hostile measures against Georgia that significantly escalated tensions in
South Ossetia and Abkhazia, and opened the door to further conflict. In par-
ticular, following more than 15 years of supporting ethnic separatists, the Rus-
sian Federation moved to unilaterally recognize both South Ossetia and Abk-
hazia as independent States. At a Press Conference on 14 February 2008,
Russia’s then-President Vladimir Putin explained that if Kosovo was recog-
nized as an independent State, there would be reason for the international com-
30
munity to grant South Ossetia and Abkhazia the same status . True to Presi-
dent Putin’s word, a series of measures taken by Russian State organs called for
formally recognizing the separatist authorities in de facto control of both
regions following Kosovo’s declaration of independence on 17 February.
27 Transcript, “Speech of the Head of Provisional Administration of South Ossetia
Dimitri Sanakoev in the Parliament of Georgia”, 11 May 2007, available at
http://www.civil.ge/eng/article.php?id=15101.
28 Article, “Three Injured in Attack on Georgian Convoy in S. Ossetia”, Civil Georgia,
3 July 2008, available at http://www.civil.ge/eng/article.php?id=l8674.
29 Article, “Tbilisi Turns Kodori into ‘Temporary Administrative Center’ of Abk-
hazia”, Civil Georgia, 27 September 2006, available at http://www.civil.ge/eng/article.
php?id=l3654.
30
http://www.kremlin.ru/text/appears/2008/02/160108.shtml. 35
mais permis de croire que Géorgiens et Ossètes vivront côte à côte de
manière fraternelle. C’est cette conviction qui nous a encouragés, mes amis
et moi-même, à prendre la tête du mouvement sociopolitique nouvellement
formé en vue d’établir la paix et la démocratie dans la région.» 27
Source de frictions avec Kokoïty, cette vision de Sanakoïev d’une Ossétie du
Sud multiethnique lui a valu des menaces de la part de séparatistes ossètes. Ne
serait-ce qu’il y a un peu plus d’un mois, le 3 juillet 2008, Sanakoïev a réchappé
d’une attaque contre son convoi, lorsqu’un véhicule transportant le personnel
28
chargé de sa sécurité a heurté une mine actionnée à distance .
64. De même, en juillet 2006, les forces géorgiennes rétablirent leur contrôle
dans la région des gorges de Kodori, en Haute Abkhazie. Le 27 septembre
2006, en dépit des vives protestations des séparatistes abkhazes et des Russes,
un gouvernement indépendant et multiethnique y fut formé, ce qui permit à la
population géorgienne locale de participer à des élections pour la première fois
29
depuis que les séparatistes s’étaient emparés du secteur, treize ans plus tôt .
E. La troisième phase de l’intervention russe en Ossétie du Sud
et en Abkhazie: août 2008
65. La reconnaissance internationale du Kosovo en février 2008, conjuguée à
l’intention déclarée par la Géorgie de demander son adhésion à l’OTAN à
l’occasion du sommet de Bucarest du 4 avril 2008, a poussé la Fédération de
Russie à redoubler d’efforts en vue de conférer une légitimité aux autorités
séparatistes contrôlant de facto l’Ossétie du Sud et l’Abkhazie, et de consolider
les manŒuvres entreprises pour faire de ces provinces des territoires indépen-
dants et ethniquement homogènes, en violation flagrante des obligations que lui
impose la convention internationale pour l’élimination de toutes les formes de
discrimination raciale.
66. Ainsi, à partir de février 2008 environ, la Russie s’est livrée à des actes de
provocation et d’hostilité contre la Géorgie qui ont considérablement attisé les
tensions en Ossétie du Sud et en Abkhazie et ouvert la voie à un nouveau
conflit. En particulier, après avoir prêté main-forte pendant plus de quinze ans
aux séparatistes, la Fédération de Russie s’est engagée sur la voie de la recon-
naissance unilatérale de l’Ossétie du Sud et de l’Abkhazie en tant qu’Etats indé-
pendants. Lors d’une conférence de presse tenue le 14 février 2008, Vladimir
Poutine, alors président de la Russie, a expliqué que, si le Kosovo était reconnu
en tant qu’Etat indépendant, il y aurait lieu pour la communauté internationale
d’accorder le même statut à l’Ossétie du Sud et à l’Abkhazie 30. Suivant l’inti-
mation du président Poutine, les organes de l’Etat russe ont, à la suite de la
déclaration d’indépendance faite par le Kosovo le 17 février, appelé par une
série de mesures à la reconnaissance formelle des autorités séparatistes qui
contrôlaient de facto les deux régions.
27 Transcription, «Speech of the Head of Provisional Administration of South Ossetia
Dimitri Sanakoyev in the Parliament of Georgia», 11 mai 2007, disponible (en anglais) à
l’adresse suivante: http://www.civil.ge/eng/article.php?id=15101.
28 Article du 3 juillet 2008 intitulé «Three Injured in Attack on Georgian Convoy in
S. Ossetia», Civil Georgia, disponible (en anglais) à l’adresse suivante: http://www.civil.
ge29ng/article.php?id=18674.
Article du 27 septembre 2006 intitulé «Tbilisi Turns Kodori into «Temporary
Administrative Center» of Abkhazia», Civil Georgia, disponible (en anglais) à l’adresse
su30ante: http://www.civil.ge/eng/article.php?id=13654.
http://www.kremlin.ru/text/appears/2008/02/160108.shtml. 36
67. On 6 March 2008, the Russian Ministry of Foreign Affairs announced
its withdrawal from a 1996 CIS decision, which, inter alia, prohibited the trans-
fer of military hardware and assistance to Abkhazia. Shortly thereafter, on
21 March 2008, the Russian State Duma adopted a resolution calling on the
Government to consider “the expediency of recognizing the independence” of
South Ossetia and Abkhazia and calling for greater support to “Russian citi-
zens” in both regions 3. In an address to the Duma on 2 April, the Russian
Foreign Minister said that he would carefully consider its recommendations
and promised to provide support to the people of South Ossetia and Abkhazia,
“most of which are citizens of Russia” 3.
68. The next day, on 3 April 2008, Russian President Vladimir Putin wrote a
letter to the separatist leaders of Abkhazia and South Ossetia referring to them
as “President” and promising them Russian support. The letter also indicated
that any policies implemented by Georgia “to exert pressure on Abkhazia and
South Ossetia” will be “unsuccessful and counter-productive”. More signifi-
cantly, President Putin emphasized that support of the separatists will be “not
declarative, but practical” referring to the Russian Federation’s withdrawal
from the CIS decision on restriction of military assistance as a practical step in
this direction.
69. On 16 April 2008, President Putin issued a Decree authorizing Russian
State agencies to “interact with the de facto governmental bodies of Abkhazia
and South Ossetia, including establishment of co-operation in trade-economic,
social, and scientific-technical fields”. The Decree also envisages further interaction
with the separatist authorities “in favour of the social-economic development
of these republics, protection of the rights of the population living there,
including the Russian citizens”. In addition, the Foreign Ministry declared that
documents issued by the de facto separatist authorities of Abkhazia and South
Ossetia were to be henceforth recognized in Russia, as will legal entities regis-
tered by these de facto entities. In commenting on these new measures, the Rus-
sian Foreign Ministry reasoned that they are justified because “Georgia does
not exercise jurisdiction over these territories in a full sense, control is exercised
by de facto governmental bodies”.
70. During this period, the international community also expressed serious
concern for the protection of the rights under CERD of Gali’s remaining Geor-
gian citizens. During her visit to Abkhazia on 27 February 2008, the United
Nations High Commissioner for Human Rights, Louise Arbour, expressed
concern at the denial of education in the “mother tongue”, referring to the situ-
ation of ethnic Geo33ians in Gali who are forced to follow the Russian cur-
riculum at school . From late April 2008 onwards, Abkhaz authorities have
increasingly pressured these people to obtain Russian citizenship and passports,
and threatened them with punitive taxes or expulsions if they refuse to comply.
There have been increasing reports of intimidation by Russian soldiers not
belonging to the CIS peacekeeping forces that have looted and invaded the
31 http://duma.consultant.ru/doc.asp?ID=44805.
32 http://www.mid.ru/Brp_4.nsf/arh/7C41DAEEDA986E1EC32574250026F72F?Open
Document.
33 United Nations Press Release, 28 February 2008, “Georgia makes progress but
human rights concerns remain, says Louise Arbour”. 37
67. Le 6 mars 2008, le ministère russe des affaires étrangères a annoncé qu’il
se dissociait d’une décision de la CEI de 1996, laquelle, entre autres, interdisait
la fourniture de matériel et d’assistance militaires à l’Abkhazie. Peu après, le
21 mars 2008, la Douma russe adoptait une résolution exhortant le gouverne-
ment à considérer «l’opportunité de reconnaître l’indépendance» de l’Ossétie
du Sud et de l’Abkhazie et appelant à soutenir davantage les «citoyens russes»
des deux régions 31. Dans une allocution faite devant elle le 2 avril, le chef de la
diplomatie russe déclara à la Douma qu’il examinerait attentivement ses recom-
mandations et promit de soutenir les peuples d’Ossétie du Sud et d’Abkhazie,
«composés pour l’essentiel de citoyens russes» 3.
68. Le lendemain, le 3 avril 2008, le président russe Vladimir Poutine adres-
sait une lettre aux dirigeants séparatistes d’Abkhazie et d’Ossétie du Sud en leur
donnant le titre de «président» et en leur promettant le soutien russe. Dans sa
lettre, il indiquait aussi que toute politique mise en Œuvre par la Géorgie «pour
faire pression sur l’Abkhazie et l’Ossétie du Sud» serait «infructueuse
et contre-productive». Mieux: le président Poutine soulignait que le soutien
aux séparatistes serait constitué «non pas de déclarations, mais d’actes», dési-
gnant comme une mesure concrète en ce sens le fait pour la Fédération de
Russie de s’être dissociée de la décision de la CEI sur la restriction de l’assis-
tance militaire.
69. Le 16 avril 2008, le président Poutine a pris un décret autorisant les or-
ganes de l’Etat russe à «agir de concert avec les instances gouvernementales
contrôlant de facto l’Abkhazie et l’Ossétie du Sud, notamment en établissant
une coopération dans les domaines du commerce et de l’économie ainsi que sur
les plans social, scientifique et technique». Le décret prévoit aussi une collabo-
ration accrue avec les autorités séparatistes «en faveur du développement
socio-économique de ces républiques et de la protection des droits de leurs
populations, y compris les citoyens russes». En outre, le ministère russe des
affaires étrangères a déclaré que les documents émanant des autorités sépara-
tistes contrôlant de facto l’Abkhazie et l’Ossétie du Sud devraient désormais
être reconnus en Russie, ainsi que toutes les entités juridiques agréées par elles.
Commentant ces nouvelles mesures, le ministère des affaires étrangères a expli-
qué qu’elles étaient justifiées car, «la Géorgie n’exerçant pas sur ces territoires
sa juridiction au sens plein du terme, l’autorité y est exercée par des organes
gouvernementaux de facto».
70. Pendant cette période, la communauté internationale a également exprimé
de graves inquiétudes quant au respect des droits garantis par la CIEDR aux
citoyens géorgiens demeurés à Gali. Lors de sa visite en Abkhazie le
27 février 2008, Louise Arbour, haut commissaire des Nations Unies aux droits
de l’homme, s’est déclarée préoccupée par le déni d’enseignement dans leur
«langue maternelle»; elle faisait référence à la situation des33éorgiens de Gali,
qui étaient forcés de suivre le programme russe à l’école . A partir de la fin
d’avril 2008, les autorités abkhazes ont exercé sur ces habitants des pressions
croissantes pour leur faire acquérir la nationalité et un passeport russes, sous
peine de taxes ou d’expulsion s’ils refusaient d’obtempérer. Des récits de plus en
plus nombreux font état de cas d’intimidation de la part de soldats russes
31 http://duma.consultant.ru/doc.asp?ID=44805.
32 http://www.mid.ru/Brp_4.nsf/arh/7C41DAEEDA986E1EC32574250026F72F?Open
Document.
33 Nations Unies, communiqué de presse du 28 février 2008 intitulé «Georgia makes
progress but human rights concerns remain, says Louise Arbour». 38
homes of ethnic Georgians in Gali District, some of whom have decided to
leave Abkhazia fearing for their safety.
71. On 29 May 2008, the United Nations General Assembly adopted resolu-
tion 62/249, expressing deep concern at “the demographic changes resulting
from the conflict in Abkhazia, Georgia, and regretting any attempt to alter the
pre-conflict demographic composition in Abkhazia, Georgia” (preambular
paragraph 6). The resolution:
“Recognizes the right of return of all refugees and internally displaced
persons and their descendants, regardless of ethnicity, to Abkhazia, Geor-
gia;
Emphasizes the importance of preserving the property rights of refugees
and internally displaced persons from Abkhazia, Georgia, including vic-
tims of reported ‘ethnic cleansing’, and calls upon all Member States to
deter persons under their jurisdiction from obtaining property within the
territory of Abkhazia, Georgia, in violation of the rights of returnees; and
Underlines the urgent need for the rapid development of a timetable to
ensure the prompt voluntary return of all refugees and internally displaced
persons to their homes in Abkhazia, Georgia.”
72. In addition to the Russian measures designed to strengthen the legiti-
macy of the de facto institutions of the separatists during this time, the Russian
Federation also increased its military activities in both regions as a prelude to
its invasion of Georgia in August 2008. The catalyst for Russia’s adoption of a
more aggressive position towards Georgia was the NATO Summit in Bucharest
on 2-4 April 2008, during which Georgia’s possible membership in NATO was
discussed. On 8 April 2008, in an interview with the Ekho Moskvy radio sta-
tion, Russian Foreign Minister Sergey Lavrov warned that Moscow “will do
everything not to allow Georgia’s . . . accession to NATO” . On 11 April 2008,
in an interview with RIA Novosti news agency, General Yuri Baluevsky, the
Chief-of-Staff of the Russian armed forces, indicated that in the event Georgia
joined NAT35 “Russia will undertake measures to defend its interest at its state
borders” .
73. These hostile statements were followed by a significant escalation of
Russia’s military presence, initially in Abkhazia. During May and June of
2008, Russia unilaterally deployed combat troops and heavy artillery in Abk-
hazia. Eyewitnesses and news reports state that the newly deployed troops did
not wear either the blue helmet or the special uniform of the Commonwealth of
Independent States’ (CIS) peacekeepers as required under existing agreements.
In a particularly alarming incident, on 18 May 2008, a convoy of 42 armoured
personnel carriers and military trucks with Russian peacekeepers crossed the
cease-fire line separating separatist-controlled territory from Georgian-con-
trolled territory, entered the homes of local ethnic Georgian residents and looted
their property.
34
35 http://www.echo.msk.ru/programs/beseda/506017-echo/.
http://www.civil.ge/eng/article.php?id= 17561. 39
n’appartenant pas aux forces de maintien de la paix de la CEI et qui pillent et
envahissent les habitations de Géorgiens du district de Gali, dont certains, crai-
gnant pour leur sécurité, ont décidé de quitter l’Abkhazie.
71. Le 29 mai 2008, l’Assemblée générale des Nations Unies a adopté la
résolution 62/249, par laquelle elle se déclarait profondément troublée par
«les changements démographiques résultant du conflit en Abkhazie (Géorgie),
et déplora[i]t toute tentative visant à modifier la composition de la population
telle qu’elle existait avant le conflit en Abkhazie (Géorgie)» (paragraphe 6 du
préambule). Dans sa résolution, elle:
«Reconnaît le droit qu’ont tous les réfugiés et personnes déplacées et
leurs descendants, indépendamment de leur appartenance ethnique, de
retourner en Abkhazie (Géorgie);
Souligne qu’il importe de préserver les droits patrimoniaux des réfugiés
et des personnes déplacées d’Abkhazie (Géorgie), notamment les victimes
d’actes de nettoyage ethnique dont il a été fait état, et appelle tous les Etats
Membres à dissuader toutes les personnes qui relèvent de leur juridiction
d’acquérir des biens sur le territoire de l’Abkhazie (Géorgie) au mépris des
droits des rapatriés;
Fait valoir la nécessité d’élaborer rapidement un calendrier assurant le
prompt retour dans leurs foyers des réfugiés et des personnes déplacées
d’Abkhazie (Géorgie) dans leurs foyers.»
72. En sus des mesures qu’elle a prises pendant cette période pour renforcer
la légitimité des institutions de facto des autorités séparatistes, la Fédération de
Russie a multiplié ses activités militaires dans les deux régions en prélude à son
invasion de la Géorgie, au mois d’août 2008. Le catalyseur qui a conduit la
Russie à adopter une position plus agressive à l’égard de la Géorgie est le som-
met de l’OTAN tenu à Bucarest du 2 au 4 avril 2008, dans le cadre duquel
la possibilité d’une adhésion de la Géorgie à l’OTAN a été examinée. Le
8 avril 2008, dans un entretien accordé à la station de radio Ekho Moskvy, Ser-
gueï Lavrov, le ministre russe des affaires étrangères, a averti que Moscou
«fera[it] tout pour empêcher l’admission de la Géorgie à l’OTAN» 34.e
11 avril 2008, lors d’un entretien avec l’agence de presse RIA Novosti, le géné-
ral Iouri Balouïevski, chef d’état-major de l’armée russe, a indiqué que, si la
Géorgie intégrait l’OTAN, «la Russie prendra[it] des mesures pour défendre ses
intérêts au niveau de ses frontières» 3.
73. Ces déclarations hostiles ont été suivies par un renforcement considé-
rable de la présence militaire russe, tout d’abord en Abkhazie. Au cours des
mois de mai et juin 2008, la Russie a déployé de manière unilatérale des troupes
de combat et de l’artillerie lourde en Abkhazie. Des témoins et les médias ont
rapporté que les nouvelles troupes déployées ne portaient ni le casque bleu ni
l’uniforme spécial des forces de maintien de la paix de la CEI, contrairement
aux prescriptions des accords en vigueur. Lors d’un incident particulièrement
alarmant, le 18 mai 2008, un convoi de 42 véhicules blindés de transport de
troupes et camions militaires bondés de soldats de la paix russes a traversé la
ligne de cessez-le-feu séparant le territoire tenu par les séparatistes du territoire
sous contrôle géorgien; ces troupes sont entrées dans les demeures des habi-
tants de souche géorgienne du secteur et ont pillé leurs biens.
34 http://www.echo.msk.ru/programs/beseda/506017-echo/.
35 http://www.civil.ge/eng/article.php?id=17561. 40
74. Russia’s military build-up was accompanied by a campaign of discrimi-
nation against ethnic Georgians and others who might be opposed to the exten-
sion of Russian influence in South Ossetia and Abkhazia. On 30 April 2008, the
Chairman of the Organization for Security and Co-operation in Europe stated:
“The latest events, including the decision of the Russian Federation to
establish official ties with Georgia’s breakaway regions . . . and the recent
military build-up have considerably increased tension in the region.” 36
On 5 June 2008, the European Parliament adopted a resolution in which it
“[ulrges the Russian Federation to withdraw its additional troops in Abkhazia
immediately” and takes the view that “the present peacekeeping format must
be revised since the Russian troops have lost their role of neutral and impartial
peacekeepers”. The resolution “[e]xpresses its deep concern at the escalation of
the situation in Abkhazia” and its “deep disapproval at Russia’s announcement
that it would establish 37ficial ties with institutions within the separatist authori-
ties of . . . Abkhazia” .
75. In view of these developments, ethnic Georgian internally displaced per-
sons (IDPs) increasingly became convinced that they would never be able to
return to their homes either in Abkhazia or South Ossetia because of Russia’s
efforts to create a fait accompli by recognizing the de facto regimes imposed by
the ethnic separatists.
76. In contrast to Russian attempts to nurture the creation of ethnically
homogeneous States that are politically, economically, socially and militarily
beholden to it, Georgia has consistently strived for the integration of multi-
ethnic Abkhaz and South Ossetian societies into a democratic Georgian State.
Consistent with the right to self-determination as recognized by CERD Rec-
ommendation XXI (1996), Georgia has consistently offered both regions
“unlimited autonomy”. It has also steadfastly pressed for the right of all IDPs
(regardless of ethnicity) to return to their homes.
77. In response to the persistent shelling of ethnic Georgian villages in South
Ossetia by separatist forces, Georgian military forces launched a limited opera-
tion into territory held by ethnic separatists on 7 August 2008 for purposes of
putting a stop to the attacks. Seizing the opportunity to realize its goal of an
ethnically homogeneous and compliant South Ossetia, Russia responded with a
full-scale invasion of Georgian territory on 8 August 2008.
78. Beginning in the morning hours of 8 August, several thousand Russian
troops invaded Georgia in a well-planned air and land attack throughout Geor-
gian territory. Russian forces occupied more than half of Georgia and attacked
civilians and civilian objects resulting in significant casualties and destruction.
For instance, Russian military planes attacked residential areas in the town of
Gori, located just south of South Ossetia, killing at least 150 civilians. Russian
planes also bombed the main national airport in Tbilisi, as well as roads,
bridges and other critical infrastructure throughout the country. In response to
the escalating hostilities, Georgia proposed a ceasefire and the separation of the
36
Press Release, “OSCE Chairman urges de-escalation of situation in Georgia”.
37
European Parliament resolution of 5 June 2008 on the situation in Georgia. 41
74. Le renforcement du dispositif militaire russe s’est accompagné d’une cam-
pagne de discrimination à l’encontre des personnes de souche géorgienne et de
toute autre personne susceptible de s’opposer à l’expansion de l’influence russe
en Ossétie du Sud et en Abkhazie. Le 30 avril 2008, le président de l’Organisa-
tion pour la sécurité et la coopération en Europe a fait la déclaration suivante:
«Les derniers événements, notamment la décision de la Fédération de
Russie d’établir des liens officiels avec les régions sécessionnistes de Géor-
gie ... et le renforcement récent de l’appareil militaire ont considérablement
attisé les tensions dans la région.» 36
Le 5 juin 2008, le Parlement européen a adopté une résolution par laquelle il
«invite instamment la Fédération de Russie à retirer immédiatement les troupes
supplémentaires qu’elle a acheminées en Abkhazie» et considère que «les
modalités actuelles de maintien de la paix doivent être revisées, étant donné que
les troupes russes ont perdu leur rôle de force de maintien de la paix neutre et
impartiale». Dans cette résolution, il «exprime sa vive préoccupation face à
l’escalade de la situation en Abkhazie» et sa «profonde désapprobation vis-à-
vis de l’annonce de la Russie indiquant qu’elle compte établir des37iens officiels
avec les institutions des autorités séparatistes ... d’Abkhazie» .
75. Vu le tour des événements, les personnes déplacées de souche géorgienne
ont progressivement acquis la certitude qu’elles ne pourraient jamais regagner
leurs foyers, que ce soit en Abkhazie ou en Ossétie du Sud, par suite des efforts
de la Russie pour créer un fait accompli en reconnaissant les régimes de facto
imposés par les tenants du séparatisme ethnique.
76. A rebours des tentatives faites par la Russie pour fomenter la création
d’Etats ethniquement homogènes qui soient tributaires d’elle sur les plans poli-
tique, économique, social et militaire, la Géorgie a toujours lutté pour intégrer les
communautés abkhaze et sud-ossète dans un Etat géorgien démocratique et multi-
ethnique. Conformément au droit à l’autodétermination reconnu par le Comité
pour l’élimination de la discrimination raciale dans sa résolution XXI (1996), la
Géorgie a toujours offert aux deux régions une «autonomie illimitée». Elle n’a
en outre cessé d’insister pour que soit respecté le droit de toutes les personnes
déplacées (quelle que soit leur origine ethnique) de retourner dans leurs foyers.
77. En réaction aux bombardements persistants par les forces séparatistes
de villages abritant des personnes de souche géorgienne en Ossétie du Sud, les
forces militaires géorgiennes ont lancé le 7 août 2008 une opération d’am-
pleur limitée dans un territoire tenu par les séparatistes afin de mettre un terme
à ces attaques. Saisissant cette occasion de réaliser son objectif, à savoir ins-
taurer une Ossétie du Sud ethniquement homogène et soumise, la Russie a
riposté le 8 août 2008 par une invasion à grande échelle du territoire géorgien.
78. Dès l’aube du 8 août, plusieurs milliers de soldats russes ont envahi la
Géorgie en lançant une offensive terrestre et aérienne bien planifiée dans
l’ensemble du territoire géorgien. Les forces russes ont occupé plus de la moitié
de la Géorgie et ont attaqué des civils et des biens de caractère civil, faisant de
nombreuses victimes et d’importants dégâts. Par exemple, des avions militaires
russes ont attaqué des zones résidentielles de la localité de Gori, située juste au
sud de l’Ossétie du Sud, tuant au moins 150 civils. Des avions russes ont éga-
lement bombardé le principal aéroport national à Tbilissi, ainsi que des routes,
des ponts et d’autres infrastructures vitales dans tout le pays. En réponse à
36
Communiqué de presse intitulé «OSCE Chairman urges de-escalation of situation in
Ge37gia».
Résolution du Parlement européen du 5 juin 2008 sur la situation en Géorgie. 42
warring parties. Russia refused, choosing instead to press its military advan-
tage. Statements by Russian officials left no doubt as to Russia’s intentions. In
the midst of Russia’s relentless military assaults, Prime Minister Vladimir Putin
was quoted in the Russian press as stating that “[t]he breakaway region of
South Ossetia is unlikely to reintegrate with the rest of Georgia”.
79. As the war in South Ossetia unfolded, the situation in Abkhazia quickly
began to deteriorate as well with attacks against Georgian villages in the
Kodori Valley. On 9 August, Russian planes bombed Georgia’s Black Sea port
of Poti located just south of Abkhazia. The next day, Russian supply ships
began docking at Abkhazia’s main port of Ochamchire. When night fell, Rus-
sian airborne troops landed military transport aircraft. In addition, 9,000 Rus-
sian ground troops and 350 armoured vehicles entered Abkhazia the same
evening.
80. In light of the grossly disproportionate scale of Russia’s military actions,
the true purpose of its conduct is clear: to secure both South Ossetia and Abk-
hazia as ethnically homogeneous client States free from Georgian political,
social or cultural influence, and to prevent the return of ethnic Georgians and
others who would resist Russia’s de facto annexation of the territories.
IV. THE CLAIMS OF THE R EPUBLIC OFG EORGIA
81. The Government of the Republic of Georgia claims, in its own right and
as parens patriae of its citizens, that the Russian Federation, through its State
organs, State agents, and other persons and entities exercising governmental
authority, and through the South Ossetian and Abkhaz separatist forces and
other agents acting on the instructions of, and under the direction and control
of the Russian Federation, is responsible for serious violations of its fundamen-
tal obligations under CERD, including Articles 2, 3, 4, 5 and 6. Violations of
CERD include, but are not limited to:
(a) widespread and systematic discrimination against South Ossetia’s and
Abkhazia’s ethnic Georgian population and other groups during the con-
flicts of 1991-1994, 1998, 2004 and 2008, reflected in acts including mur-
der, unlawful attacks against civilians and civilian objects, torture, rape,
deportation and forcible transfer, imprisonment and hostage-taking,
enforced disappearance, wanton destruction and unlawful appropriation
of property not justified by military necessity, and plunder;
(b) widespread and systematic denial on discriminatory grounds of the right
of South Ossetia’s and Abkhazia’s ethnic Georgian and other refugees and
IDPs to return to their homes;
(c) widespread and systematic unlawful appropriation and sale of homes and
other property belonging to South Ossetia’s and Abkhazia’s ethnic Geor-
gians and other groups forcibly displaced during the conflicts of 1991-
1994, 1998, 2004 and 2008 and denied the right to return to the South
Ossetian and Abkhaz regions; 43
l’escalade des hostilités, la Géorgie a proposé un cessez-le-feu et la séparation
des parties belligérantes. La Russie a refusé, préférant tirer parti de son avan-
tage militaire. Les déclarations des dirigeants russes ne laissent aucun doute sur
les intentions de la Russie. Au beau milieu des attaques militaires implacables
de la Russie, le premier ministre Vladimir Poutine a été cité dans la presse russe
comme ayant déclaré qu’«il [était] peu probable que la région sécessionniste
d’Ossétie du Sud réintègre le reste de la Géorgie».
79. Alors que la guerre s’étendait en Ossétie du Sud, la situation en Abkha-
zie a rapidement commencé à se détériorer elle aussi, avec des attaques lancées
contre des villages géorgiens de la vallée de Kodori. Le 9 août, des avions russes
ont bombardé Poti, port géorgien de la mer Noire situé immédiatement au sud
de l’Abkhazie. Le lendemain, des navires de ravitaillement russes ont com-
mencé à arriver à Otchamtchira, le principal port d’Abkhazie. A la tombée de
la nuit, des soldats russes aéroportés ont débarqué d’un avion de transport
militaire. Le même soir, 9000 soldats de l’armée de terre russe et 350 véhicules
blindés sont également entrés en Abkhazie.
80. Vu l’ampleur totalement disproportionnée des actions militaires de la
Russie, le véritable objectif de celle-ci est clair: il s’agit de faire de l’Ossétie du
Sud et de l’Abkhazie des Etats satellites ethniquement homogènes qui échap-
pent à l’influence politique, sociale et culturelle de la Géorgie, ainsi que d’empê-
cher le retour des personnes de souche géorgienne et des autres personnes
susceptibles de résister à l’annexion de facto de ces territoires par la Russie.
IV. G RIEFS DE LAR ÉPUBLIQUE DE G ÉORGIE
81. Le Gouvernement de la République de Géorgie prétend, en son nom pro-
pre et en sa qualité de parens patriae de ses citoyens, que la Fédération de Rus-
sie, par l’intermédiaire de ses organes et agents et d’autres personnes et entités
exerçant une autorité gouvernementale, ainsi que par l’intermédiaire des forces
séparatistes sud-ossètes et abkhazes et d’autres agents opérant sur ses instruc-
tions et sous sa direction et son contrôle, s’est rendue responsable de violations
graves des obligations fondamentales que lui impose la convention sur l’élimina-
tion de toutes les formes de discrimination raciale, notamment en ses articles 2,
3, 4, 5 et 6. Ces violations de la convention internationale sur l’élimination de
toutes les formes de discrimination raciale sont notamment les suivantes:
a) une discrimination systématique et généralisée à l’encontre des populations
de souche géorgienne et d’autres groupes d’Ossétie du Sud et d’Abkhazie
au cours des conflits de 1991-1994, 1998, 2004 et 2008, notamment sous la
forme de meurtres, actes d’agression illicites contre des civils et des biens de
caractère civil, actes de torture, viols, déportations et déplacements forcés,
emprisonnements et prises d’otages, disparitions forcées, destructions arbi-
traires et appropriations illicites de biens non justifiées par des nécessités
militaires, et pillages;
b) le déni systématique et généralisé, sur des bases discriminatoires, opposé
aux réfugiés et aux personnes déplacées, notamment de souche géor-
gienne, de leur droit de retourner dans leurs foyers en Ossétie du Sud et
en Abkhazie;
c) l’appropriation et la vente illicites, systématiques et généralisées d’habita-
tions et d’autres biens appartenant aux personnes de souche géorgienne et
d’autres groupes déplacées de force durant les conflits de 1991-1994, 1998,
2004 et 2008, et le déni de leur droit de retourner en Ossétie du Sud et en
Abkhazie; 44
(d) the continuing discriminatory treatment of ethnic Georgians in South
Ossetia and in the Gali District of Abkhazia, including but not limited to
pillage, hostage-taking, beatings and intimidation, denial of the freedom
of movement, denial of their right to education in their mother tongue,
pressure to obtain Russian citizenship and/or Russian passports, and
threats of punitive taxes and expulsions for maintaining Georgian citizen-
ship;
(e) the sponsoring, defending, and supporting of ethnic discrimination by the
de facto South Ossetian and Abkhaz separatist authorities and the recog-
nition as lawful of a situation created by a serious breach of Russia’s obli-
gations under CERD and of its obligations erga omnes, namely recogni-
tion in whole or in part of the South Ossetian and Abkhaz separatist
entities amounting to recognition of a situation created by “ethnic cleans-
ing” constituting the crime against humanity of persecution and system-
atic discrimination on ethnic grounds;
(f) preventing the Republic of Georgia from exercising jurisdiction over its
territory in the regions of South Ossetia [and] Abkhazia in order to imple-
ment its obligations under CERD; and
(g) the launching of a war of aggression against Georgia with the aims of (i)
securing ethnically homogeneous allies in South Ossetia and Abkhazia
free from Georgian political, social and cultural influence; (ii) perma-
nently denying the right of displaced ethnic Georgians to return to their
homes in South Ossetia and Abkhazia; and (iii) permanently denying all
the people of Georgia their right to self-determination in accordance with
CERD.
V. T HE R ELIEFSOUGHT
82. The Republic of Georgia, on it own behalf and as parens patriae for its
citizens, respectfully requests the Court to adjudge and declare that the Russian
Federation, through its State organs, State agents, and other persons and enti-
ties exercising governmental authority, and through the South Ossetian and
Abkhaz separatist forces and other agents acting on the instructions of or
under the direction and control of the Russian Federation, has violated its obli-
gations under CERD by:
(a) engaging in acts and practices of “racial discrimination against persons,
groups of persons or institutions” and failing “to ensure that all public
authorities and public institutions, national and local, shall act in con-
formity with this obligation” contrary to Article 2 (l) (a) of CERD;
(b) “sponsoring, defending and supporting racial discrimination” contrary to
Article 2 (l) (b) of CERD;
(c) failing to “prohibit and bring to an end, by all appropriate means, includ-
ing legislation as required by circumstances, racial discrimination” con-
trary to Article 2 (l) (d) of CERD; 45
d) la discrimination permanente à l’encontre des personnes de souche géor-
gienne en Ossétie du Sud et dans le district de Gali en Abkhazie, notam-
ment sous la forme de pillages, prises d’otages, brutalités et actes d’intimi-
dation, privation de la liberté d’aller et venir, déni du droit à l’éducation
dans leur langue maternelle, pressions visant à les contraindre à accepter la
citoyenneté ou un passeport russes, menaces d’impôts punitifs et expulsion
de ceux conservant la nationalité géorgienne;
e) la promotion, la défense et le soutien de la discrimination ethnique prati-
quée par les autorités séparatistes de facto d’Ossétie du Sud et d’Abkhazie
et la reconnaissance comme licite d’une situation créée par un manquement
grave de la Russie aux obligations que lui impose la convention internatio-
nale sur l’élimination de toutes les formes de discrimination raciale et à ses
obligations erga omnes, à savoir la reconnaissance totale ou partielle des
entités séparatistes abkhaze et sud-ossète, assimilable à la reconnaissance
d’une situation créée par un «nettoyage ethnique» constitutif du crime
contre l’humanité de persécution et de discrimination systématique fondées
sur l’origine ethnique;
f) le fait d’empêcher la République de Géorgie d’exercer sa juridiction territo-
riale dans les régions d’Ossétie du Sud et d’Abkhazie pour y exécuter les
obligations que lui impose la convention internationale sur l’élimination de
toutes les formes de discrimination raciale;
g) le déclenchement d’une guerre d’agression contre la Géorgie avec pour
objectifs: i) de s’assurer, en Ossétie du Sud et en Abkhazie, des alliés eth-
niquement homogènes et échappant à toute influence politique, sociale et
culturelle géorgienne; ii) de priver de manière permanente les personnes de
souche géorgienne déplacées du droit de retourner dans leurs foyers en
Ossétie du Sud et en Abkhazie; iii) de priver de manière permanente
l’ensemble du peuple de Géorgie du droit à l’autodétermination que lui
garantit la convention internationale sur l’élimination de toutes les formes
de discrimination raciale.
V. D ÉCISION SOLLICITÉE
82. La République de Géorgie, en son nom propre et en qualité de parens
patriae de ses citoyens, prie respectueusement la Cour de dire et juger que la
Fédération de Russie, par l’intermédiaire de ses organes et agents et d’autres
personnes et entités exerçant une autorité gouvernementale, ainsi que par
l’intermédiaire des forces séparatistes sud-ossètes et abkhazes et d’autres agents
opérant sur ses instructions ou sous sa direction et son contrôle, a violé les obli-
gations que lui impose la convention internationale sur l’élimination de toutes
les formes de discrimination raciale:
a) en se livrant à des actes et pratiques de «discrimination raciale contre des
personnes, groupes de personnes ou institutions» et en ne faisant pas «en
sorte que toutes les autorités publiques et institutions publiques, nationales
et locales, se conforment à cette obligation», en violation de l’alinéa a) du
paragraphe 1 de l’article 2 de la Convention;
b) en «encourageant, défendant ou appuyant la discrimination raciale», en vio-
lation de l’alinéa b) du paragraphe 1 de l’article 2 de la Convention;
c) en n’«interdisant pas, par tous les moyens appropriés, y compris, si les cir-
constances l’exigent, des mesures législatives, ... la discrimination raciale ...
et en n’y mettant pas fin», en violation de l’alinéa d) du paragraphe 1 de
l’article 2 de la Convention; 46
(d) failing to condemn “racial segregation” and failing to “eradicate all prac-
tices of this nature” in South Ossetia and Abkhazia, contrary to Article 3
of CERD;
(e) failing to “condemn all propaganda and all organizations . . . which
attempt to justify or promote racial hatred and discrimination in any
form” and failing “to adopt immediate and positive measures designed to
eradicate all incitement to, or acts of, such discrimination”, contrary to
Article 4 of CERD;
(f) undermining the enjoyment of the enumerated fundamental human rights
in Article 5 by the ethnic Georgian, Greek and Jewish populations in
South Ossetia and Abkhazia, contrary to Article 5 of CERD;
(g) failing to provide “effective protection and remedies” against acts of racial
discrimination, contrary to Article 6 of CERD.
83. The Republic of Georgia, on it own behalf and as parens patriae for
its citizens, respectfully requests the Court to order the Russian Federation
to take all steps necessary to comply with its obligations under CERD,
including:
(a) immediately ceasing all military activities on the territory of the Republic
of Georgia, including South Ossetia and Abkhazia, and immediate with-
drawing of all Russian military personnel from the same;
(b) taking all necessary and appropriate measures to ensure the prompt and
effective return of IDPs to South Ossetia and Abkhazia in conditions of
safety and security;
(c) refraining from the unlawful appropriation of homes and property belong-
ing to IDPs;
(d) taking all necessary measures to ensure that the remaining ethnic Geor-
gian populations of South Ossetia and the Gali District are not subject to
discriminatory treatment including but not limited to protecting them
against pressures to assume Russian citizenship, and respect for their right
to receive education in their mother tongue;
(e) paying full compensation for its role in supporting and failing to bring
to an end the consequences of the ethnic cleansing that occurred in the
1991-1994 conflicts, and its subsequent refusal to allow the return of
IDPs;
(f) not to recognize in any manner whatsoever the de facto South Ossetian
and Abkhaz separatist authorities and the fait accompli created by ethnic
cleansing;
(g) not to take any measures that would discriminate against persons, whether
legal or natural, having Georgian nationality or ethnicity within its juris-
diction or control;
(h) allow Georgia to fulfil its obligations under CERD by withdrawing its
forces from South Ossetia and Abkhazia and allowing Georgia to restore
its authority and jurisdiction over those regions; and
(i) to pay full compensation to Georgia for all injuries resulting from its
internationally wrongful acts. 47
d) en ne condamnant pas la «ségrégation raciale» et en n’«éliminant pas ...
toutes les pratiques de cette nature» en Ossétie du Sud et en Abkhazie, en
violation de l’article 3 de la Convention;
e) en ne «condamnant pas toute propagande et toutes organisations ... qui
prétendent justifier ou encourager toute forme de haine et de discrimination
raciales» et en n’«adoptant pas immédiatement des mesures positives des-
tinées à éliminer toute incitation à une telle discrimination», en violation de
l’article 4 de la Convention;
f) en portant atteinte à la jouissance, par les populations de souches géor-
gienne, grecque et juive d’Ossétie du Sud et d’Abkhazie, des droits de
l’homme fondamentaux énumérés à l’article 5 de la Convention, en violation
de cet article 5;
g) en n’assurant pas «une protection et une voie de recours effectives»
contre les actes de discrimination raciale, en violation de l’article 6 de la
Convention.
83. La République de Géorgie, en son nom propre et en qualité de parens
patriae de ses citoyens, prie respectueusement la Cour d’ordonner à la Fédé-
ration de Russie de prendre toutes les mesures nécessaires pour s’acquitter des
obligations que lui impose la convention internationale sur l’élimination de
toutes les formes de discrimination raciale, notamment:
a) de cesser immédiatement toutes ses activités militaires sur le territoire de la
République de Géorgie, y compris en Ossétie du Sud et en Abkhazie, et d’en
retirer immédiatement tout son personnel militaire;
b) de prendre toutes les mesures nécessaires et appropriées pour assurer le
retour rapide, effectif et en toute sécurité en Ossétie du Sud et en Abkhazie
des personnes déplacées;
c) de s’abstenir de toute appropriation illicite d’habitations et de biens appar-
tenant à des personnes déplacées;
d) de prendre toutes les mesures nécessaires pour que les populations géor-
giennes de souche restées en Ossétie du Sud et dans le district de Gali ne
soient pas victimes de discrimination et, notamment, pour qu’elles soient
protégées des pressions visant à leur faire prendre la nationalité russe et
que leur droit à recevoir une éducation dans leur langue maternelle soit
respecté;
e) de réparer intégralement le préjudice qu’elle a causé en appuyant le net-
toyage ethnique pratiqué lors des conflits de 1991-1994 et en ne mettant pas
fin à ses conséquences, et en refusant ultérieurement d’autoriser le retour
des personnes déplacées;
f) de ne pas reconnaître, de quelque façon que ce soit, les autorités séparatistes
de facto sud-ossètes et abkhazes, ni le fait accompli créé par le nettoyage
ethnique;
g) de ne prendre aucune mesure discriminatoire contre les personnes, phy-
siques ou morales, de nationalité ou de souche géorgiennes se trouvant sous
sa juridiction ou son autorité;
h) de permettre à la Géorgie d’exécuter les obligations que lui impose la
convention internationale sur l’élimination de toutes les formes de discrimi-
nation raciale en retirant ses forces d’Ossétie du Sud et d’Abkhazie, et de
permettre à la Géorgie de rétablir son autorité et sa juridiction sur ces
régions;
i) d’indemniser intégralement la Géorgie pour tous les préjudices découlant de
ses faits internationalement illicites. 48
VI. JUDGE A DH OC
84. In accordance with the provisions of Article 31 (2), of the Statute and
Article 35, paragraph 1, of the Rules, the Republic of Georgia declares its
intention to exercise its right to choose a judge ad hoc.
VII. R ESERVATION OFR IGHTS
85. The Republic of Georgia reserves the right to modify and extend the
terms of this Application, as well as the grounds invoked.
VIII. A PPOINTMENT OF AGENTS
86. The Republic of Georgia has designated as its Agents Ms Tina Burjal-
iani, First Deputy-Minister of Justice, and Ms Maia Panjikidze, Ambassador
of Georgia to the Kingdom of the Netherlands. As Deputy Agent, the Republic
of Georgia designates Mr. Payam Akhavan, Professor of International Law,
McGill University, Montreal, Canada.
87. Pursuant to Article 40, paragraph 1, of the Rules of Court, all commu-
nications relating to this case should be sent to:
Ms Tina Burjaliani,
First Deputy-Minister of Justice of the Republic of Georgia,
30 Rustaveli Avenue,
Tbilisi, 0146,
Republic of Georgia.
Electronic mail: [email protected]
Telephone: + 995 (32) 75 82 05.
Telefax: + 995 (32) 75 82 24.
I have the honour to reassure the Court of my highest esteem and considera-
tion.
The Hague, 12 August 2008.
(Signed) Maia P ANJIKIDZ,
Ambassador of Georgia
to the Kingdom of the Netherlands. 49
VI. J UGE AD HOC
84. Conformément au paragraphe 2 de l’article 31 du Statut de la Cour et
au paragraphe 1 de l’article 35 de son Règlement, la République de Géorgie
indique qu’elle a l’intention de désigner un juge ad hoc.
VII. RÉSERVE DE DROIT
85. La République de Géorgie se réserve le droit de modifier et de compléter
la présente requête ainsi que l’exposé de ses moyens.
VIII. A GENTS
86. La République de Géorgie a désigné comme agents aux fins de la pré-
sente instance M me Tina Burjaliani, premier vice-ministre de la justice, et
M me Maia Panjikidze, ambassadeur de Géorgie auprès du Royaume des Pays-
Bas. La République de Géorgie a désigné comme agent adjoint M. Payam Akha-
van, professeur de droit international à l’Université McGill, à Montréal
(Canada).
87. Conformément aux dispositions du paragraphe 1 de l’article 40 du
Règlement de la Cour, toutes les communications relatives à la présente affaire
doivent être adressées à l’adresse suivante:
me
M Tina Burjaliani
Premier vice-ministre de la justice de la République de Géorgie,
30, avenue Rustaveli,
Tbilissi, 0146,
République de Géorgie.
Courrier électronique: [email protected]
Téléphone: + 995 (31) 75 82 05.
Télécopie: + 995 (32) 75 82 24.
Je prie la Cour d’agréer l’expression de ma très haute considération.
La Haye, le 12 août 2008.
L’ambassadeur de Géorgie
auprès du Royaume des Pays-Bas,
(Signé) Maia P ANJIKIDZE.PRINTED IN THE NETHERLANDS
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