COUR INTERNATIONALE DE JUSTICE
REQUE |TE
INTRODUCTIVE D’INSTANCE
enregistrée au Greffe de la Cour
le 9 décembre 2002
et inscrite au rôle général de la Cour
le 11 avril 2003
CERTAINES PROCE uDURES PEuNALES
ENGAGE uES EN FRANCE
(uPUBLIQUE DU CONGO c. FRANCE)
INTERNATIONAL COURT OF JUSTICE
APPLICATION
INSTITUTING PROCEEDINGS
filed in the Registry of the Court
on 9 December 2002
and entered in the Court’s General List
on 11 April 2003
CERTAIN CRIMINAL PROCEEDINGS
IN FRANCE
(REPUBLIC OF THE CONGO v. FRANCE) 2
2003
Rôle général
no129
I. REQUE |TE INTRODUCTIVE D’INSTANCE
POUR :LA RÉPUBLIQUE DU CONGO ,
qui désigne comme agent pour la présente procédure Son Excellence Monsieur
Jacques Obia, ambassadeur extraordinaire et plénipotentiaire de la République
du Congo auprès de l’Union européenne, de Sa Majesté le roi des Belges, de Sa
Majesté la reine des Pays-Bas et de Son Altesse Royale le grand-duc de Luxem-
bourg,
résidant 16, avenue Franklin-Roosevelt, 1050 Bruxelles
CONTRE : LA RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
I. M OYENS DE DROIT
1) Violation du principe selon lequel un Etat ne peut, au mépris du principe
de l’égalité souveraine entre tous les Membres de l’Organisation des Nations
Unies, proclamé par l’article 2, paragraphe 1, de la Charte des Nations Unies,
exercer son pouvoir sur le territoire d’un autre Etat,
en s’attribuant unilatéralement une compétence universelle en matière pénale
et en s’arrogeant le pouvoir de faire poursuivre et juger le ministre de l’intérieur
d’un Etat étranger à raison de prétendues infractions qu’il aurait commises à
l’occasion de l’exercice de ses attributions relatives au maintien de l’ordre
public dans son pays;
2) Violation de l’immunité pénale d’un chef d’Etat étranger — coutume
internationale reconnue par la jurisprudence de la Cour.
II. NATURE DE LA DEMANDE
Il est demandé à la Cour de dire que la République française devra faire
annuler les actes d’instruction et de poursuite accomplis par le procureur de la
République près le tribunal de grande instance de Paris, le procureur de la
République près le tribunal de grande instance de Meaux et les juges d’instruc-
tion de ces tribunaux,
lesquels magistrats, au vu d’une plainte par laquelle des associations se quali-
fiant d’humanitaires dénonçaient à la justice française de prétendus crimes
contre l’humanité et de prétendues tortures qui auraient été commis au Congo,
par des Congolais et dont les victimes auraient été congolaises, laquelle plainte
visait nommément S. Exc. Monsieur Denis Sassou Nguesso, président de la
République du Congo, et S. Exc. Monsieur Pierre Oba, ministre de l’intérieur
de la République du Congo, ainsi que d’autres personnes, dont le général Nor-
bert Dabira, inspecteur général des forces armées congolaises, ont
— le procureur de la République près le tribunal de grande instance de Paris:
transmis la plainte au procureur de la République près le tribunal de grande
instance de Meaux prétendument compétent territorialement, sans relever 3
2003
General List
No. 129
I. APPLICATION INSTITUTING PROCEEDINGS
[Translation]
FOR : THE REPUBLIC OF THE CONGO ,
which appoints as Agent for purposes of these proceedings His Excellency Mr.
Jacques Obia, Ambassador Extraordinary and Plenipotentiary of the Republic
of the Congo to the European Union, His Majesty the King of the Belgians,
Her Majesty the Queen of the Netherlands and His Royal Highness the Grand-
Duke of Luxembourg,
residing at 16, avenue Franklin-Roosevelt, 1050 Brussels
AGAINST : THE FRENCH REPUBLIC
I. LEGAL G ROUNDS
(1) Violation of the principle that a State may not, in breach of the principle
of sovereign equality among all Members of the United Nations, as laid down
in Article 2, paragraph 1, of the Charter of the United Nations, exercise its
authority on the territory of another State,
by unilaterally attributing to itself universal jurisdiction in criminal matters
and by arrogating to itself the power to prosecute and try the Minister of the
Interior of a foreign State for crimes allegedly committed in connection with
the exercise of his powers for the maintenance of public order in his country;
(2) Violation of the criminal immunity of a foreign Head of State — an
international customary rule recognized by the jurisprudence of the Court.
II. NATURE OF THE CLAIM
The Court is requested to declare that the French Republic shall cause to be
annulled the measures of investigation and prosecution taken by the Procureur
de la République of the Paris Tribunal de grande instance , the Procureur de la
République of the Meaux Tribunal de grande instance and the investigating
judges of those courts,
which judicial officers, on the basis of a complaint whereby associations describ-
ing themselves as “humanitarian” reported to the French judiciary alleged
crimes against humanity and instances of torture having been committed in the
Congo, by Congolese, against victims said to be of Congolese nationality,
which complaint named H.E. Mr. Denis Sassou Nguesso, President of the
Republic of the Congo, and H.E. Mr. Pierre Oba, Minister of the Interior of
the Republic of the Congo, together with other individuals, including General
Norbert Dabira, Inspector-General of the Congolese Armed Forces:
—a stte Procureur de la République of the Paris Tribunal de grande
instance: transmitted the complaint to the Procureur de la République of
the Meaux Tribunal de grande instance purportedly having territorial juris- 4
l’incompétence internationale des juridictions françaises, ni la violation de
l’immunité qui s’attachait aux fonctions du président de la République,
— le procureur de la République près le tribunal de grande instance de
Meaux: ordonné une enquête préliminaire sur les faits dénoncés, puis
requis l’ouverture d’une information contre X au mépris des mêmes prin-
cipes de droit international,
— le juge d’instruction de ce tribunal: informé sur ce réquisitoire alors qu’il
aurait dû se déclarer d’office incompétent internationalement et refuser
d’informer à l’égard du président de la République du Congo et, qui plus
est, décerné une commission rogatoire ordonnant aux officiers de police
judiciaire délégués d’entendre comme témoin S. Exc. Monsieur le président
Denis Sassou Nguesso.
III. EXPOSÉ DES FAITS
Le 5 décembre 2001, la Fédération internationale des ligues des droits de
l’homme (FIDH), l’Observatoire congolais des droits de l’homme (OCDH) et
la Ligue française pour la défense des droits de l’homme et du citoyen (la
Ligue) déposaient entre les mains du procureur de la République près le tribu-
nal de grande instance de Paris une plainte pour crimes contre l’humanité et
tortures prétendument commis au Congo sur des personnes de nationalité
congolaise, visant nommément S. Exc. Monsieur Denis Sassou Nguesso, prési-
dent de la République du Congo, S. Exc. le général Pierre Oba, ministre de
l’intérieur, de la sécurité publique et de l’administration du territoire, le général
Norbert Dabira, inspecteur général des forces armées congolaises, et le général
Blaise Adoua, commandant la garde présidentielle.
Au lieu de relever d’office l’incompétence internationale des juridictions fran-
çaises, ni l’atteinte ainsi portée à l’immunité d’un chef d’Etat étranger, le pro-
cureur de la République près le tribunal de grande instance de Paris transmet-
tait le 7 décembre 2001 cette plainte au procureur de la République près le
tribunal de grande instance de Meaux «qui (paraissait) compétent au regard
des articles 689-1 et 693 du code de procédure pénale» (sic).
Le procureur de la République près le tribunal de grande instance de Meaux
ordonnait une enquête préliminaire puis, sans s’interroger autrement sur la
conformité de ses actes au droit international, décernait, le 23 janvier 2002, un
réquisitoire à fin d’informer du chef des prétendus crimes dénoncés.
Le juge d’instruction, sans se poser non plus cette question, commençait à
informer. Il entendait le général Norbert Dabira (que les officiers de police judi-
ciaire avaient antérieurement placé en garde à vue) comme témoin assisté.
Il restait sourd à une lettre officielle du procureur de la République près
le tribunal de grande instance de Brazzaville, en date du 9 septembre 2002, qui
lui signalait qu’une information relative aux mêmes faits était suivie par le
juge d’instruction de ce tribunal à la suite d’un réquisitoire introductif du
29 août 2000.
Enfin, alors que S. Exc. Monsieur Denis Sassou Nguesso était en visite d’Etat
en France, il délivrait à des officiers de police judiciaire une commission roga-
toire leur ordonnant de l’entendre comme témoin. 5
diction, failing thereby to take account of the French courts’ lack of inter-
national jurisdiction or of the violation of the immunity attaching to the
office of President of the Republic,
— ast te Procureur de la République of the Meaux Tribunal de grande
instance: ordered a preliminary enquiry into the acts complained of and
then filed an application for the opening of a criminal investigation against
X, in violation of the same principles of international law,
— as to the investigating judge of that same tribunal: initiated an investigation
on the basis of that application when he ought, proprio motu, to have
declared himself to be without jurisdiction internationally, and to have
refused to conduct an investigation against the President of the Republic of
the Congo; and, moreover, issued a commission rogatoire (warrant) instruct-
ing police officers to take testimony from H.E. President Denis Sassou
Nguesso.
III. SATEMENT OF THE FACTS
On 5 December 2001, the International Federation of Human Rights Leagues
(Fédération internationale des ligues des droits de l’homme (FIDH)), the
Congolese Observatory of Human Rights (Observatoire congolais des droits
de l’homme (OCDH)) and the Ligue française pour la défense des droits de
l’homme et du citoyen (the League) filed with the Procureur de la République of
the Paris Tribunal de grande instance a complaint for crimes against humanity
and torture allegedly committed in the Congo against individuals having
Congolese nationality, expressly naming H.E. Mr. Denis Sassou Nguesso,
President of the Republic of the Congo, H.E. General Pierre Oba, Minister of
the Interior, Public Security and Territorial Administration, General Norbert
Dabira, Inspector-General of the Congolese Armed Forces, and General Blaise
Adoua, Commander of the Presidential Guard.
Instead of finding proprio motu that the French courts lacked international
jurisdiction and that the immunity of a foreign Head of State had accordingly
been violated, the Procureur de la République of the Paris Tribunal de grande
instance on 7 December 2001 transmitted that complaint to the Procureur de
la République of the Meaux Tribunal de grande instance , “which (appeared)
to have jurisdiction under Articles 689-1 and 693 of the Code of Criminal Pro-
cedure” (sic).
The Procureur de la République of the Meaux Tribunal de grande instance
ordered a preliminary enquiry and then on 23 January 2002, without further
considering the compliance of his actions with international law, issued an
application for a judicial investigation of the alleged offences.
Likewise failing to consider this issue, the investigating judge initiated an
investigation. He took testimony from General Norbert Dabira (who had
previously been taken into custody by police officers) as a témoin assisté
(legally represented witness).
He ignored an official letter from the Procureur de la République of the
Brazzaville Tribunal de grande instance , dated 9 September 2002, which
informed him that a judicial investigation concerning the same acts was being
conducted by the investigating judge of that court further to a réquisitoire
(prosecutor’s application for a judicial investigation) dated 29 August 2000.
Finally, when H.E. Mr. Denis Sassou Nguesso was on a State visit to France,
the investigating judge issued a commission rogatoire (warrant) to police
officers instructing them to take testimony from him. 6
IV. E XPOSÉ DES MOYENS SUR LESQUELS REPOSE LA DEMANDE
A. En ce qui concerne la violation du principe selon lequel un Etat ne peut exer-
cer son pouvoir sur le territoire d’un autre Etat et du principe de l’égalité
souveraine entre tous les Membres de l’Organisation des Nations Unies,
proclamé par l’article 2, paragraphe 1, de la Charte des Nations Unies,
en s’attribuant unilatéralement une compétence universelle en matière pénale
et en s’arrogeant le pouvoir de faire poursuivre et juger le ministre de l’inté-
rieur d’un Etat étranger à raison de prétendues infractions qu’il aurait com-
mises à l’occasion de l’exercice de ses attributions relatives au maintien de
l’ordre public dans son pays
1. Les juridictions pénales françaises sont incompétentes, en vertu du droit
international, pour connaître de prétendus crimes contre l’humanité qui, ainsi
qu’il est allégué en l’espèce par le ministère public à la suite des associations
plaignantes, auraient été commis à l’étranger, par des étrangers et dont les vic-
times auraient été étrangères.
L’opinion individuelle que Monsieur le président de la Cour a expromée à la
suite de l’arrêt rendu par la Cour le 14 février 2002 (rôle général n 121, Affaire
relative au mandat d’arrêt du 11 avril 2000 (République démocratique du Congo
c. Belgique)), quant à un moyen d’incompétence des juridictions belges que la
République démocratique du Congo avait cru devoir abandonner, démontre de
manière péremptoire qu’il n’existe aucune règle coutumière de droit internatio-
nal selon laquelle tous les crimes de droit international pourraient relever de la
compétence des juridictions nationales en vertu du principe de la compétence
universelle. Les seuls cas de compétence universelle qui existent résultent
d’instruments internationaux spécifiques, dont aucun ne concerne d’une ma-
nière générale les crimes contre l’humanité.
Monsieur le président Gilbert Guillaume montre que les juridictions natio-
nales restent incompétentes en pareil cas même si une loi de l’Etat en cause pré-
tend établir de son propre chef la compétence universelle (comme c’était le cas
de la loi belge). A plus forte raison l’incompétence est-elle certaine en l’absence
d’une loi semblable (comme c’est le cas de la République française).
Cette incompétence découle du principe selon lequel un Etat ne peut exercer
son pouvoir sur le territoire d’un autre Etat. Ce principe se lit dans l’arrêt rendu
par la Cour permanente de Justice internationale (C.P.J.I.), dans l’affaire du
Lotus (7 septembre 1927, documents de la Cour, série A, Recueil des arrêts et
ordonnances, 1927). La Cour a alors reconnu que la territorialité est un prin-
cipe du droit international (tout en jugeant que ce principe n’est pas absolu, en
ce sens qu’il ne peut empêcher un Etat de connaître pénalement de faits qui ont
été accomplis en dehors de son territoire s’ils ont produit des conséquences sur
celui-ci, comme, dans l’espèce considérée, à bord d’un navire battant pavillon
turc).
Cette règle jurisprudentielle est corroborée aujourd’hui par l’article 2, para-
graphe 1, de la Charte des Nations Unies , aux termes duquel: «L’Organisation
est fondée sur le principe de l’égalité souveraine de tous ses Membres.»
2. Il est vrai que les plaintes sur lesquelles le ministère public a requis
d’informer dénoncent, outre des crimes contre l’humanité, de prétendues tor-
tures, pour lesquelles l’article 689-2 du code de procédure pénale français admet
la compétence universelle des juridictions françaises si le prétendu coupable se
trouve en France.
Mais cet article ne saurait être invoqué en l’espèce, pour deux sortes de rai-
sons dont chacune se suffit à elle-même. 7
IV. S TATEMENT OF G ROUNDS ON W HICH THE CLAIM IS BASED
A. Concerning the violation of the principle that a State may not exercise its
authority on the territory of another State and of the principle of sovereign
equality among all Members of the United Nations, as laid down in
Article 2, paragraph 1, of the Charter of the United Nations,
by unilaterally attributing to itself universal jurisdiction in criminal matters
and by arrogating to itself the power to prosecute and try the Minister of the
Interior of a foreign State for crimes allegedly committed by him in connec-
tion with the exercise of his powers for the maintenance of public order in
his country
1. Under international law, French criminal courts lack jurisdiction to
address alleged crimes against humanity which, according to the proceedings
instituted in the present case by the Ministère public pursuant to the complaints
filed by certain associations, are stated to have been committed abroad, by
foreigners, against foreigners.
The separate opinion of the President of the Court appended to the Judg-
ment rendered by the Court on 14 February 2002 (General List No. 121, Arrest
Warrant of 11 April 2000 (Democratic Republic of the Congo v. Belgium)),
concerning an objection to the jurisdiction of Belgian courts which the Demo-
cratic Republic of the Congo had considered that it should not pursue, estab-
lishes in peremptory terms that there is no rule of customary international law
enabling offences under international law to be brought within the jurisdiction
of national courts by virtue of the principle of universal jurisdiction. The only
existing instances of universal jurisdiction stem from specific international
instruments, of which none relate generally to crimes against humanity.
The President of the Court, Judge Gilbert Guillaume, showed that domestic
courts cannot have jurisdiction in such cases even if legislation of the State in
question purports in its own right to establish universal jurisdiction (as was the
case for the Belgian statute). Such lack of jurisdiction applies a fortiori in the
absence of any domestic legislation to such effect (as is the case in France).
This lack of jurisdiction stems from the principle that a State may not exer-
cise its authority on the territory of another State. This principle is enshrined
in the Judgment of the Permanent Court of International Justice (P.C.I.J.) in
the “Lotus” case (7 September 1927, Judgment No. 9, 1927, P.C.I.J., Series A,
No. 10, p. 19). The Court recognized at that time that territoriality is a principle
of international law (while ruling that this is not an absolute principle in so far
as it cannot prevent a State from prosecuting offences committed outside its
territory if they had consequences on that territory, such as, in that case, on
board a ship flying the Turkish flag).
This rule of jurisprudence is now confirmed by Article 2, paragraph 1, of the
Charter of the United Nations , which states: “The Organization is based on the
principle of the sovereign equality of all its Members.”
2. It is true that the complaints which the prosecutor has referred for investi-
gation concern, in addition to crimes against humanity, alleged acts of tor-
ture, in respect of which Article 689-2 of the French Code of Criminal Pro-
cedure provides for the universal jurisdiction of French courts if the alleged
perpetrator is present in France.
However, that Article cannot be relied upon in the present case for two sets
of reasons, each being sufficient in itself. 8
D’une part, l’article 689-1 du code de procédure pénale français dispose:
«en application des conventions internationales visées aux articles suivants
[dont l’article 689-2, qui vise la convention de New York du 10 décembre
1984 contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou
dégradants], peut être poursuivie et jugée par les juridictions françaises, si
elle se trouve en France, toute personne qui s’est rendue coupable hors du
territoire de la République de l’une des infractions énumérées par ces
articles...».
Il s’agit donc ici d’un chef de compétence exceptionnel, qui, dérogeant au prin-
cipe de la souveraineté territoriale en matière pénale, ne tire sa conformité au
droit international que du traité qui le prévoit. Par suite, il ne peut être opposé
qu’aux Etats parties à ce traité pour des faits commis sur le territoire de l’un
d’eux, ainsi qu’à leurs ressortissants. Il est pour les autres Etats res inter alios
acta. Or, le Congo n’est pas partie à la convention de New York du 10 dé-
cembre 1984. Il est, dès lors, impossible d’opposer à cet Etat la règle de compé-
tence écrite à l’article 689-2 du code de procédure pénale français.
D’autre part, même si la convention en cause liait le Congo, les conditions de
la compétence française ne seraient pas réunies. En effet, l’article 5, para-
graphe 2, de la convention précitée dispose que
«tout Etat partie prend également les mesures nécessaires pour établir sa
compétence aux fins de connaître desdites infractions [les actes de torture
er
au sens de l’article 1 ] dans le cas où l’auteur présumé de celles-ci se trouve
sur tout territoire sous sa juridiction et où ledit Etat ne l’extrade pas,
conformément à l’article 8, vers l’un des Etats visés au paragraphe 1 du
présent article [c’est-à-dire l’Etat sur le territoire duquel les faits auraient
été commis, celui dont l’auteur présumé est ressortissant et celui dont la
victime est un ressortissant]».
Cette disposition implique le caractère subsidiaire de la compétence qu’elle pré-
voit par rapport à celles des Etats mentionnés au paragraphe 1, et, au premier
chef, de celle de l’Etat territorialement souverain. Il s’en déduit que, si l’un de
ces Etats a engagé une procédure à raison des faits litigieux, l’Etat visé au para-
graphe 2 est incompétent, quand bien même l’auteur présumé se trouverait sur
son territoire et n’aurait pas fait l’objet d’une demande d’extradition. Or, tel est
le cas en l’espèce puisque, comme le procureur de la République près le tribunal
de grande instance de Brazzaville l’a fait connaître au procureur de la Répu-
blique près le tribunal de grande instance de Meaux dans sa lettre précitée du
9 septembre 2002, une procédure a été engagée au Congo à raison des mêmes
faits.
3. Le principe précité selon lequel un Etat ne peut exercer son pouvoir sur le
territoire d’un autre Etat emporte, en l’espèce, une autre conséquence. Parmi
les personnes auxquelles les parties civiles et le ministère public imputent les
faits dénoncés se trouve, comme on l’a vu, S. Exc. le général Pierre Oba, mi-
nistre de l’intérieur de la République du Congo.
Il aurait commis les faits qui lui sont imputés à l’occasion de l’exercice de ses
fonctions de maintien de l’ordre public. Un Etat étranger qui prétend connaître
de tels faits s’immisce par là même dans l’exercice par le ministre en cause de la
souveraineté de son pays en ce qu’elle a d’essentiel.
Cette considération invite à reconnaître au ministre de l’intérieur, pour les
faits qui ressortissent à l’exercice de ses fonctions de maintien de l’ordre public, 9
First, Article 689-1 of the French Code of Criminal Procedure provides:
“pursuant to the international conventions referred to in the following
Articles [including Article 689-2 referring to the Convention against Tor-
ture and Other Cruel, Inhuman or Degrading Punishments or Treatment,
adopted in New York on 10 December 1984], any person who has com-
mitted, outside the territory of the Republic, any of the offences enumer-
ated in these Articles, may be prosecuted and tried by the French courts if
that person is present in France...”.
This, then, is clearly an exceptional head of jurisdiction, which derogates from
the principle of territorial sovereignty in criminal matters and derives its com-
pliance with international law solely from the relevant Convention. It can
therefore only be opposed to States parties to that Convention, in respect of
offences committed on the territory of one of those States or against their own
nationals. For third States it is res inter alios acta. But the Congo is not a sig-
natory to the New York Convention of 1984 and the jurisdictional provision
contained in Article 689-2 of the French Code of Criminal Procedure cannot
therefore be opposed to that State.
Secondly, even if the Convention in question was binding on the Congo, the
conditions for French jurisdiction would not be met. Article 5, paragraph 2, of
the above-mentioned Convention provides:
“Each State Party shall likewise take such measures as may be necessary
to establish its jurisdiction over such offences [acts of torture within the
meaning of Article 1] in cases where the alleged offender is present in any
territory under its jurisdiction and it does not extradite him pursuant to
article 8 to any of the States mentioned in paragraph 1 of this article [that
is to say, the State in which the offence was allegedly committed and that
of which the alleged offender or the victim is a national].”
That provision implies that the jurisdiction in question is subsidiary to that of
the States mentioned in paragraph 1 and, above all, to that of the State which
has territorial sovereignty. It follows that, if one of those States has commenced
proceedings in respect of the alleged offences, the State provided for in para-
graph 2 will lack jurisdiction, even if the alleged offender is present on its ter-
ritory and it has not received a request for his extradition. This is the situation
in the present case because, as the Procureur de la République of the Brazzaville
Tribunal de grande instance informed the Procureur de la République of the
Meaux Tribunal de grande instance , in his above-mentioned letter of 9 Septem-
ber 2002, prosecution has been commenced for the same offences in the Congo.
3. The above-mentioned principle that a State may not exercise its authority
on the territory of another State has a further consequence in the present case.
The alleged offenders, according to the claimants and the prosecutor, include,
as stated above, H.E. General Pierre Oba, Minister of the Interior of the
Republic of the Congo.
He is alleged to have committed the offences in question in connection with
the exercise of his duties of maintaining public order. A foreign State which
purports to have jurisdiction over such offences is thereby interfering in the
exercise by the Minister of his country’s sovereignty over fundamental matters.
It follows from this that a Minister of the Interior, in regard to acts com-
mitted in connection with the exercise of his duties of maintaining public order, 10
une immunité de la nature de celle dont bénéficie, pour d’autres raisons, le mi-
nistre des affaires étrangères, ainsi qu’il va être rappelé à présent.
B. En ce qui concerne la violation de l’immunité d’un chef d’Etat étranger,
reconnue par la jurisprudence de la Cour
Le droit international est violé en ce que les procureurs de la République sai-
sis de la plainte susvisée ont omis de relever immédiatement l’irrecevabilité en
vertu du principe de l’immunité absolue de juridiction pénale qui protège les
chefs d’Etat étrangers de l’action publique devant les juridictions françaises, et
en ce que le juge d’instruction du tribunal de grande instance de Meaux a omis
de refuser d’informer à l’égard du président de la République et, pis encore, a
ordonné son audition comme témoin.
1. En effet, le principe de l’immunité pénale des chefs d’Etat est consacré par
une coutume internationale, que reconnaît la jurisprudence de la Cour.
L’arrêt précité du 14 février 2002 (République démocratique du Congo c. Bel-
gique) énonce, en allant au-delà de la question limitée, qu’elle avait à résoudre,
de l’immunité de juridiction pénale et l’inviolabilité d’un ministre des affaires
étrangères en exercice:
«La Cour observera tout d’abord qu’il est clairement établi en droit
international que, de même que les agents diplomatiques et consulaires,
certaines personnes occupant un rang élevé dans l’Etat, telles que le chef de
l’Etat, le chef du gouvernement ou le ministre des affaires étrangères,
jouissent dans les autres Etats d’immunités de juridiction, tant civiles que
pénales...» (Par. 51.)
Pour mieux démontrer l’immunité du ministre des affaires étrangères, la
Cour invoque, d’ailleurs, un caractère commun à sa fonction et à celles d’un
chef d’Etat ou d’un chef de gouvernement:
«La Cour fait en outre observer qu’un ministre des affaires étrangères,
responsable de la conduite des relations de son Etat avec tous les autres
Etats, occupe une position qui fait qu’à l’instar du chef de l’Etat et du chef
du gouvernement il se voit reconnaître par le droit international la qualité
de représenter son Etat du seul fait de l’exercice de sa fonction.» (Par. 53.)
Puis elle en arrive à une conclusion qui, eu égard à ce dernier motif, vaut
également pour les chefs d’Etat:
«La Cour en conclut que les fonctions d’un ministre des affaires étran-
gères sont telles que, pour toute la durée de sa charge, il bénéficie d’une
immunité de juridiction pénale et d’une inviolabilité totales à l’étranger.
Cette immunité et cette inviolabilité protègent l’intéressé contre tout acte
d’autorité de la part d’un autre Etat qui ferait obstacle à l’exercice de ses
fonctions.» (Par. 54.)
Il convient d’ajouter que la Cour a considéré le principe de l’immunité pénale
des chefs d’Etat comme allant de soi. La question qui était débattue devant elle
était celle de savoir si, dans le cas d’un ministre des affaires étrangères en exer-
cice, ce principe recevait exception, en dehors de toutes stipulations des traités,
en matière d’infractions graves au droit humanitaire international (crimes
contre l’humanité, crimes de guerre).
Or, l’arrêt du 14 février 2002 écarte sur ce point l’argumentation du Royaume
de Belgique qui, sur la base d’une leçon, au demeurant manifestement erronée,
de décisions de hautes juridictions nationales (Chambre des lords, Cour de cas- 11
should enjoy an immunity similar to that accorded, for other reasons, to
Ministers for Foreign Affairs, as will be recalled in the following paragraphs.
B. Concerning the violation of the immunity of a foreign Head of State, as
recognized by the jurisprudence of the Court
International law has been violated in that the procureurs de la République
seised of the above-mentioned complaint failed to find at the outset that it was
inadmissible by virtue of the principle of absolute immunity from criminal
jurisdiction which protects foreign Heads of State from criminal proceedings
before French courts, and in that the investigating judge of the Meaux Tribunal
de grande instance failed to refuse to commence judicial proceedings against the
President of the Republic and even went so far as to order his examination as
witness.
1. The principle of criminal immunity of Heads of State is enshrined in inter-
national custom, which is recognized by the jurisprudence of the Court.
In the above-mentioned Judgment of 14 February 2002 (Democratic Repub-
lic of the Congo v. Belgium), the Court, going beyond the specific issue before
it, namely the immunity from criminal jurisdiction and inviolability of an
incumbent Minister for Foreign Affairs, stated:
“The Court would observe at the outset that in international law it is
firmly established that, as also diplomatic and consular agents, certain
holders of high-ranking office in a State, such as the Head of State, Head
of Government and Minister for Foreign Affairs, enjoy immunities from
jurisdiction in other States, both civil and criminal...” (Para. 51.)
In establishing the immunity of a Minister for Foreign Affairs, the Court
moreover considered that this office was comparable in such matters to those of
a Head of State or a Head of Government:
“The Court further observes that a Minister for Foreign Affairs, respon-
sible for the conduct of his or her State’s relations with all other States,
occupies a position such that, like the Head of State or the Head of Gov-
ernment, he or she is recognized under international law as representative
of the State solely by virtue of his or her office.” (Para. 53.)
The Court then arrived at a conclusion which, in view of the preceding state-
ment, must also be valid for Heads of State:
“The Court accordingly concludes that the functions of a Minister for
Foreign Affairs are such that, throughout the duration of his or her office,
he or she when abroad enjoys full immunity from criminal jurisdiction and
inviolability. That immunity and that inviolability protect the individual
concerned against any act of authority of another State which would
hinder him or her in the performance of his or her duties.” (Para. 54.)
It should be added that the Court accepted as self-evident the principle that
Heads of State enjoy criminal immunity. The issue before it was to establish
whether, in the case of an incumbent Minister for Foreign Affairs, there
could be any exception to that principle, apart from any treaty provisions, in
the case of serious violations of international humanitarian law (crimes against
humanity, war crimes).
On this point, the 14 February 2002 Judgment rejects the arguments of the
Kingdom of Belgium which, on the basis of a clearly erroneous argument
derived from decisions of high national courts (House of Lords, French Court 12
sation française), soutenait que l’immunité des chefs d’Etat étrangers, et à plus
forte raison des ministres des affaires étrangères, recevait exception en matière
de tels crimes.
La Cour déclare qu’après
«[avoir] examiné avec soin la pratique des Etats, y compris les législations
nationales et les quelques décisions rendues par de hautes juridictions
nationales, telle la Chambre des lords ou la Cour de cassation fran-
çaise[, e]lle n’est pas parvenue à déduire de cette pratique l’existence,
en droit international coutumier, d’une exception quelconque à la règle
consacrant l’immunité de juridiction pénale et l’inviolabilité des ministres
des affaires étrangères en exercice, lorsqu’ils sont soupçonnés d’avoir
commis des crimes de guerre ou des crimes contre l’humanité».
Elle ajoute qu’elle a
«par ailleurs examiné les règles afférentes à l’immunité ou à la responsa-
bilité pénale des personnes possédant une qualité officielle contenues dans
les instruments juridiques créant des juridictions pénales internationales et
applicables spécifiquement à celles-ci (voir statut du Tribunal militaire
international de Nuremberg, art. 7; statut du Tribunal militaire interna-
tional de Tokyo, art. 6; statut du Tribunal pénal international pour l’ex-
Yougoslavie, art. 7, par. 2; statut du Tribunal pénal international pour le
Rwanda, art. 6, par. 2; statut de la Cour pénale internationale, art. 27)»
et qu’elle
«a constaté que ces règles ne lui permettaient pas davantage de conclure à
l’existence, en droit international coutumier, d’une telle exception en ce qui
concerne les juridictions nationales» (par. 58).
Il résulte donc de cet arrêt que l’immunité pénale d’un chef d’Etat étranger
est absolue à l’égard de tous les autres Etats, quand bien même seraient allégués
contre lui des crimes contre l’humanité.
Au demeurant, la jurisprudence de la Cour de cassation française s’accorde à
celle de la Cour sur l’existence et la portée de la coutume internationale qui
consacre l’immunité pénale des chefs d’Etat étrangers.
o
Sa Chambre criminelle a rendu le 13 mars 2001 (B, n 64, p. 218) un arrêt
dans lequel elle déclare:
«Vu les principes généraux du droit international:
Attendu que la coutume internationale s’oppose à ce que les chefs d’Etat
en exercice puissent, en l’absence de dispositions internationales contraires
s’imposant aux parties concernées, faire l’objet de poursuites devant les
juridictions pénales d’un Etat étranger.»
Cet arrêt censure l’arrêt d’une chambre d’accusation qui, pour confirmer
l’ordonnance d’un juge d’instruction disant y avoir lieu à informer contre le
chef de l’Etat libyen, nonobstant des réquisitions contraires du ministère public,
avait retenu que,
«si l’immunité des chefs d’Etat étrangers a toujours été admise par la
société internationale, y compris la France, aucune immunité ne saurait
couvrir les faits de complicité de destruction d’un bien par l’effet d’une
substance explosive ayant entraîné la mort d’autrui, en relation avec une
entreprise terroriste». 13
of Cassation), had contended that an exception to the immunity rule for
foreign Heads of State, and a fortiori Ministers for Foreign Affairs, applied in
the case of such crimes.
The Court states that it
“has carefully examined State practice, including national legislation and
those few decisions of national higher courts, such as the House of Lords
or the French Court of Cassation. It has been unable to deduce from this
practice that there exists under customary international law any form of
exception to the rule according immunity from criminal jurisdiction and
inviolability to incumbent Ministers for Foreign Affairs, where they are
suspected of having committed war crimes or crimes against humanity.”
And further states that it has
“also examined the rules concerning the immunity or criminal responsibil-
ity of persons having an official capacity contained in the legal instruments
creating international criminal tribunals, and which are specifically appli-
cable to the latter (see Charter of the International Military Tribunal of
Nuremberg, Art. 7; Charter of the International Military Tribunal of
Tokyo, Art. 6; Statute of the International Criminal Tribunal for the
former Yugoslavia, Art. 7, para. 2; Statute of the International Criminal
Tribunal for Rwanda, Art. 6, para. 2; Statute of the International Crimi-
nal Court, Art. 27)”
and that it
“finds that these rules likewise do not enable it to conclude that any such
an exception exists in customary international law in regard to national
courts” (para. 58).
It accordingly follows from that Judgment that the criminal immunity of a
foreign Head of State is absolute in relation to all other States, even where he
is accused of crimes against humanity.
Moreover, the jurisprudence of the French Court of Cassation accords with
that of the Court in regard to the existence and scope of the rule of inter-
national customary law which provides for the criminal immunity of foreign
Heads of State.
On 13 March 2001 its Criminal Chamber rendered a judgment (B, No. 64,
p. 218), in which it stated:
“Having regard to the general principles of international law:
Whereas international custom prohibits the prosecution of incumbent
Heads of State, in the absence of any contrary international provision
binding on the parties, before the criminal courts of a foreign State.”
That judgment quashed the judgment of an Indictments Chamber, which, in
confirming the order of an investigating judge that there were grounds to
initiate an investigation against the Head of the Libyan State, notwithstanding
the contrary submissions of the Ministère public, had held that,
“whilst immunity for foreign Heads of State has always been recognized
by the international community, including France, no immunity can cover
the offences of aiding and abetting the destruction of property caused by
an explosive substance involving the death of a third party, in connection
with a terrorist undertaking”. 14
La Cour de cassation énonce
«qu’en prononçant ainsi, alors qu’en l’état du droit international le crime
dénoncé, quelle qu’en soit la gravité, ne relève pas des exceptions au prin-
cipe de l’immunité de juridiction des chefs d’Etat étrangers en exercice, la
chambre d’accusation a méconnu le principe»
de droit international qu’elle vise.
Les «exceptions au principe de l’immunité de juridiction des chefs d’Etat
étrangers en exercice» dont l’arrêt du 13 mars 2001 fait mention sont, à l’évi-
dence, celles que prévoient spécifiquement des conventions internationales.
C’est par une leçon divinatoire, constitutive d’une véritable dénaturation de cet
arrêt, que le Royaume de Belgique avait cru pouvoir prétendre, dans l’affaire
qui a donné lieu à l’arrêt précité de la Cour, que ces exceptions englobaient les
crimes de guerre et les crimes contre l’humanité, argument dont la Cour a fait
justice.
2. Il y a eu, en l’espèce, violation de l’immunité du président de la Répu-
blique du Congo, bien que S. Exc. Monsieur Denis Sassou Nguesso n’ait été
ni visé nommément par les réquisitoires susmentionnés, ni mis en examen, ni
convoqué comme témoin assisté.
En effet, si la Cour de cassation française dit que l’immunité d’un chef d’Etat
en exercice s’oppose à ce qu’il «puisse faire l’objet de poursuites devant les juri-
dictions pénales d’un Etat étranger», cette formule ne doit pas s’interpréter de
manière restrictive, comme ne visant que des actes de mise en mouvement de
l’action publique contre un tel chef d’Etat. Elle s’applique à tout acte de pour-
suite ou d’instruction le mettant en cause, ce qu’exprime la Cour internationale
de Justice en employant l’expression d’«inviolabilité totale» et en précisant que
l’intéressé est protégé «contre tout acte d’autorité de la part d’un autre Etat qui
ferait obstacle à l’exercice de ses fonctions».
L’immunité interdit donc à toute juridiction pénale française de convoquer
comme témoin un chef d’Etat étranger, car, dans la procédure pénale française,
une telle convocation est assortie d’une mesure de contrainte, puisque l’ar-
ticle 109 du code de procédure pénale dispose que, «si le témoin ne comparaît pas
ou refuse de comparaître, le juge d’instruction peut, sur les réquisitions du pro-
cureur de la République, l’y contraindre par la force publique», et que l’inexé-
cution de l’obligation de comparaître est punie par l’article 434-15-1 du code
pénal de 3750 euros d’amende, peine correctionnelle.
C’est la raison pour laquelle l’Assemblée plénière de la Coor de cassation
française a, par un arrêt solennel du 10 octobre 2001 (B, n 206, p. 660), décidé
qu’un juge d’instruction ne pouvait convoquer comme témoin le président de la
République française, en raison de l’immunité qui s’attache aux hautes fonc-
tions de celui-ci:
«Attendu que, rapproché de l’article 3 et du titre II de la Constitution,
l’article 68 doit être interprété en ce sens qu’étant élu directement par le
peuple pour assurer, notamment, le fonctionnement régulier des pouvoirs
publics ainsi que la continuité de l’Etat, le président de la République ne
peut, pendant la durée de son mandat, être entendu comme témoin assisté,
ni être mis en examen, cité ou renvoyé pour une infraction quelconque
devant une juridiction pénale de droit commun; qu’il n’est pas davantage
soumis à l’obligation de comparaître en tant que témoin prévue par l’ar-
ticle 101 du code de procédure pénale, dès lors que cette obligation est
assortie par l’article 109 dudit code d’une mesure de contrainte par la force 15
The Court of Cassation stated that,
“in so ruling, notwithstanding that under international law the offence
alleged, regardless of its gravity, does not come within the exceptions to
the principle of immunity from jurisdiction for incumbent foreign Heads
of State, the Indictments Chamber misconstrued the principle”
of international law cited by it.
The “exceptions to the principle of immunity from jurisdiction for incumbent
foreign Heads of State” referred to in the judgment of 13 March 2001 are,
clearly, those specifically provided for by international conventions. It was
through a process of alchemy, an outright distortion of the terms of that judg-
ment, that the Kingdom of Belgium believed itself entitled to claim, in the case
which gave rise to the International Court’s Judgment cited above, that such
exceptions included war crimes and crimes against humanity, a claim which
that Court duly dismissed.
2. In the present case the immunity of the President of the Republic of the
Congo has been violated, even though His Excellency Mr. Denis Sassou
Nguesso was neither expressly named in the aforementioned application, nor
mis en examen (placed under judicial examination), nor called as a témoin
assisté (legally represented witness).
Thus the statement by the French Court of Cassation that the immunity of
an incumbent Head of State precludes him from “being prosecuted before the
criminal courts of a foreign State” must not be interpreted in a restrictive man-
ner, as referring only to acts initiating public proceedings against such a Head
of State. It applies to any act of prosecution or investigation affecting him, as
the International Court of Justice made clear when it used the expression “total
inviolability”, stating further that the individual concerned is protected “against
any act of authority of another State which would hinder him or her in the
performance of his or her duties”.
Immunity thus prohibits any organ of French criminal jurisdiction from
summoning as a witness a foreign Head of State, for, under French penal pro-
cedure, a measure of coercion attaches to such a summons, since Article 109 of
the Code of Criminal Procedure provides that, “if the witness does not appear
or refuses to appear, the investigating judge may, at the request of the pro-
cureur de la République, constrain him to do so by force”, and that failure to
comply with the obligation to appear is punishable under Article 434-15-1 of
the Criminal Code by payment of a criminal penalty of 3,750 euros.
It was on this ground that the Plenary Assembly of the French Court of Cas-
sation decided, by a formal judgment of 10 October 2001 (B, No. 206, p. 660),
that an investigating judge could not summon as a witness the President of the
French Republic, because of the immunity attaching to his high office:
“Whereas, read in conjunction with Article 3 and Title II of the Constitu-
tion, Article 68 must be interpreted as meaning that, having been directly
elected by the people in order, inter alia, to ensure the proper functioning
of the public administration as well as the continuity of the State, the Presi-
dent of the Republic cannot, during his term of office, be heard as atémoin
assisté (legally represented witness), or be mis en examen (placed under
judicial examination), summoned to appear or committed for trial for any
offence before any organ of ordinary criminal jurisdiction; whereas neither
can he be obliged to appear as a witness pursuant to Article 101 of the
Code of Criminal Procedure, since, under Article 109 of the said Code, 16
publique et qu’elle est pénalement sanctionnée.»
Or, ce qui vaut, selon cet arrêt, pour le président de la République française
vaut, par une analogie invincible, pour les chefs d’Etat étrangers.
V. C OMPÉTENCE DE LA C OUR ET RECEVABILITÉ DE LA PRÉSENTE REQUÊTE
La République du Congo et la République française sont parties de plein
droit au statut de la Cour en leur qualité d’Etats Membres de l’Organisation
des Nations Unies.
La France figure parmi les douze Etats qui avaient accepté la juridiction obli-
gatoire de la Cour et qui ont cessé de l’accepter.
En conséquence, la République du Congo entend fonder la compétence de la
Cour, en application de l’article 38, paragraphe 5, du Règlement de la Cour,
sur le consentement que ne manquera pas de donner la République française.
La République du Congo rappelle à cet égard que le Traité de coopération
entre la République française et la République populaire du Congo signé à Braz-
zaville le 1rjanvier 1974, publié en exécution du décret n 82-140 du 3 février
1982 au Journal officiel de la République française le 10 février 1982 (p. 514),
stipule, dans son article 2:
«Dans le respect de la souveraineté, de l’indépendance et de l’intégrité
territoriale de l’autre, chacune des Hautes Parties contractantes s’engage à
régler ses différends avec l’autre par des voies pacifiques, conformément à
la Charte des Nations Unies.»
La question que la Cour est appelée à trancher est incontestablement de
nature juridique et non politique.
Quant à l’existence d’un différend sur cette question, elle est établie par le fait
que les autorités politiques françaises, bien que conscientes de la contrariété au
droit international de la procédure suivie dans cette affaire, ne se sont pas esti-
mées en mesure d’intervenir utilement pour mettre fin à celle-ci.
La République du Congo se réserve de développer plus avant les moyens de
sa requête dans un mémoire ampliatif qu’elle déposera ultérieurement.
D EMANDE D ’INDICATION D UNE MESURE CONSERVATOIRE
La République du Congo assortit sa requête d’une demande de mesure
conservatoire, en application de l’article 41, paragraphe 1, du Statut de la
Cour.
Cette demande tend à faire ordonner la suspension immédiate de la procé-
dure suivie par le juge d’instruction du tribunal de grande instance de Meaux.
Les deux conditions essentielles au prononcé d’une mesure conservatoire,
suivant la jurisprudence de la Cour, à savoir l’urgence et l’existence d’un pré-
judice irréparable, sont manifestement réunies en l’espèce.
En effet, l’information en cause trouble les relations internationales de la
République du Congo par la publicité que reçoivent, au mépris des dispositions
de la loi française sur le secret de l’instruction, les actes accomplis par le magis- 17
there attaches to that obligation a measure of publicly enforceable con-
straint and it is sanctioned by a criminal penalty.”
What holds good under that judgment for the President of the French Repub-
lic must inevitably apply also by analogy to foreign Heads of State.
V. JURISDICTION OF THE COURT AND A DMISSIBILITY OF THP RESENT
A PPLICATION
The Republic of the Congo and the French Republic are ipso facto parties to
the Statute of the Court by virtue of their status as Member States of the
United Nations.
France is one of the 12 States which had previously accepted the Court’s
compulsory jurisdiction and have ceased to do so.
The Republic of the Congo accordingly seeks to found the Court’s jurisdic-
tion, pursuant to Article 38, paragraph 5, of the Rules of Court, on the consent
of the French Republic, which will certainly be given.
In this regard the Republic of the Congo recalls that the Treaty of Co-opera-
tion between the French Republic and the People’s Republic of the Congo ,
signed at Brazzaville on 1 January 1974 and published pursuant to Decree
No. 82-140 of 3 February 1982 in the Official Journal of the French Republic of
10 February 1982 (p. 514), provides in Article 2:
“In respect for their mutual sovereignty, independence and territorial
integrity, each of the High Contracting Parties undertakes to settle its dis-
putes with the other by peaceful means, in accordance with the Charter of
the United Nations.”
The question which the Court is called upon to settle is undoubtedly of a
legal rather than a political nature.
As to the existence of a dispute on the question at issue, it is clear that this is
so, given that the French political authorities, although aware that the pro-
cedure followed in this case is contrary to international law, have considered
themselves unable to intervene effectively to bring it to an end.
The Republic of the Congo reserves the right to develop further the grounds
of its Application in a Memorial providing further particulars, to be filed by it
at a later date.
REQUEST FOR THE INDICATION OF A PROVISIONAL M EASURE
The Republic of the Congo appends to its Application a request for the indi-
cation of a provisional measure, pursuant to Article 41, paragraph 1, of the
Statute of the Court.
That request seeks an order for the immediate suspension of the proceedings
being conducted by the investigating judge of the Meaux Tribunal de grande
instance.
The two essential preconditions for the indication of a provisional measure,
according to the Court’s jurisprudence, namely urgency and irreparable harm,
are manifestly satisfied in the present case.
The proceedings in question are perturbing the international relations of the
Republic of the Congo as a result of the publicity accorded, in flagrant breach
of French law governing the secrecy of criminal investigations, to the actions of 18
trat instructeur, lesquels portent atteinte à l’honneur et à la considération du chef
de l’Etat, du ministre de l’intérieur et de l’inspecteur général de l’armée et, par
là, au crédit international du Congo. De plus, elle altère les relations tradi-
tionnelles d’amitié franco-congolaise. Si cette procédure délétère devait se pour-
suivre, le dommage deviendrait irréparable.
D ÉSIGNATION D UN JUGE AD HOC
La République du Congo désigne en qualité de juge ad hoc:
M. Jean-Yves de Cara, agrégé des facultés de droit (droit public), professeur
de droit international public à l’Université Jean Moulin (Lyon III), membre du
cabinet Littleton, Chambers, Temple, Londres, demeurant 66, rue de la Part-
Dieu, 69003 Lyon.
La Haye, le 9 décembre 2002.
(Signé) Jacques O BIA. 19
the investigating judge, which impugn the honour and reputation of the Head
of State, of the Minister of the Interior and of the Inspector-General of the
Armed Forces and, in consequence, the international standing of the Congo.
Furthermore, those proceedings are damaging to the traditional links of Franco-
Congolese friendship. If these injurious proceedings were to continue, that
damage would become irreparable.
C HOICE OF A JUDGE AD HOC
The Republic of the Congo chooses as judge ad hoc:
Mr. Jean-Yves de Cara, agrégé of the Law Faculty (Public Law), Professor
of Public International Law, Université Jean Moulin (Lyon III), member of
Littleton Chambers, Temple, London; resident at 66, rue de la Part-Dieu,
69003 Lyon.
The Hague, 9 December 2002.
(Signed) Jacques O BIA. 20
II. PLEINS POUVOIRS
P RÉSIDENCE DE LA R ÉPUBLIQUE DU C ONGO
PLEINS POUVOIRS
Au nom de la République du Congo,
Nous, Denis Sassou Nguesso, président de la République, donnons par les
présentes pleins pouvoirs à Monsieur Jacques Obia, ambassadeur extraordi-
naire et plénipotentiaire de la République du Congo en Belgique,
A l’effet de déposer, auprès de la Cour internationale de Justice, la requête de
la République du Congo contre la République française dans l’affaire qui les
oppose sur la compétence des juridictions de l’un ou de l’autre Etat à propos
d’une affaire pendante devant les juridictions de Brazzaville, premières saisies,
et devant le tribunal de grande instance de Meaux, saisi en second lieu.
Promettons d’accomplir et d’exécuter tout ce qu’il aura signé et stipulé en
notre nom sans permettre qu’il y soit contrevenu de quelque manière que ce
soit.
En f1i de quoi, nous avons fait apposer à ces présentes le sceau de la Répu-
blique .
Fait à Brazzaville, le 25 novembre 2002.
(Signé) Denis S ASSOU N GUESSO.
Le ministre des affaires étrangères, de la
coopération et de la francophonie,
(Signé) Rodolphe A DADA .
1 Non reproduit. [Note du Greffe.] 21
II. FULL POWERS
[Translation]
PRESIDENCY OF THE R EPUBLIC OF THE CONGO
FULL POWERS
On behalf of the Republic of the Congo,
We the undersigned, Denis Sassou Nguesso, President of the Republic,
hereby confer Full Powers on Mr. Jacques Obia, Ambassador Extraordinary
and Plenipotentiary of the Republic of the Congo in Belgium,
For the purpose of filing with the International Court of Justice the Applica-
tion of the Republic of the Congo against the French Republic in the dispute
between them as to which State’s courts have jurisdiction to entertain a case
pending before the courts of Brazzaville, the first to be seised, and before the
Meaux Tribunal de grande instance , which was seised subsequently,
We hereby undertake to accomplish and perform all instruments signed and
agreed to by him in my name, and promise that no breach whatsoever thereof
shall be permitted.
1
In witness whereof, we have affixed hereto the Seal of the Republic.
Done at Brazzaville, 25 November 2002.
(Signed) Denis S ASSOU N GUESSO.
(Signed) Rodolphe A DADA ,
Minister for Foreign Affairs, Co-operation and
Francophone Affairs.
1Not reproduced. [Note by the Registry.] 22
III. L’AMBASSADEUR DE FRANCE AUX PAYS-BAS
AU GREFFIER DE LA COUR INTERNATIONALE
DE JUSTICE
La Haye, le 10 avril 2003.
N 528/OI
Objet: Requête introduite par la République du Congo
Réf.: lettre n 113115 du 9 décembre 2002
Je vous prie de bien vouloir trouver ci-joint une lettre que vous adresse
M. Dominique de Villepin, ministre des affaires étrangères, au sujet de la
requête introduite par la République du Congo le 9 décembre 2002 contre la
République française.
(Signé) Anne G AZEAU -SECRET.
LE MINISTRE DES AFFAIRES ÉTRANGÈRES DE LA
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE AU GREFFIER DE LA COUR
INTERNATIONALE DE JUSTICE
Paris, le 8 avril 2003.
Par lettre no 113115, en date du 9 décembre 2002, vous avez porté à ma
connaissance la requête introduite par la République du Congo le 9 décembre
2002 contre la République française. Vous indiquez que le Congo entend fon-
der la compétence de la Cour dans cette affaire sur le consentement que pour-
rait donner la République française en application de l’article 38, paragraphe 5,
du Règlement de la Cour 1.
J’ai l’honneur de vous faire connaître que la République française accepte la
compétence de la Cour pour connaître de la requête en application de l’ar-
ticle 38, paragraphe 5, susmentionner Je tiens à préciser, par ailleurs, que l’ar-
ticle 2 du traité de coopération du 1 janvier 1974 entre la République française
et la République populaire du Congo, auquel se réfère cette dernière dans sa
requête introductive d’instance, ne constitue pas une base de compétence de la
Cour pour connaître de la présente affaire.
1 Le paragraphe 5 de l’article 38 du Règlement de la Cour prévoit que:
«5. Lorsque le demandeur entend fonder la compétence de la Cour sur un consen-
tement non encore donné ou manifesté par l’Etat contre lequel la requête est formée,
la requête est transmise à cet Etat. Toutefois elle n’est pas inscrite au rôle général de
la Cour et aucun acte de procédure n’est effectué tant que l’Etat contre lequel la
requête est formée n’a pas accepté la compétence de la Cour aux fins de l’affaire.»
[Note du Greffe.] 23
III. THE AMBASSADOR OF FRANCE TO THE NETHERLANDS
TO THE REGISTRAR OF THE INTERNATIONAL COURT
OF JUSTICE
[Translation]
The Hague, 10 April 2003.
No. 528/OI
Re: Application filed by the Republic of the Congo
Ref.: Letter No. 113115 of 9 December 2002
Please find attached a letter addressed to you by Mr. Dominique de Villepin,
Minister for Foreign Affairs, regarding the Application filed by the Republic of
the Congo on 9 December 2002 against the French Republic.
(Signed) Anne G AZEAU -SECRET .
THE MINISTER FOR FOREIGN AFFAIRS OF THE
FRENCH REPUBLIC TO THE REGISTRAR OF THE
INTERNATIONAL COURT OF JUSTICE
[Translation]
Paris, 8 April 2003.
By letter No. 113115 of 9 December 2002 you notified me of the Application
filed by the Republic of the Congo on 9 December 2002 against the French
Republic. You stated that the Congo seeks to found the jurisdiction of the
Court in this case on such consent as might be given by the French Republic
pursuant to Article 38, paragraph 5, of the Rules of Court .
I have the honour to inform you that the French Republic accepts the juris-
diction of the Court to entertain the Application pursuant to the above-
mentioned Article 38, paragraph 5. I wish further to make it clear that Article 2
of the Treaty of Co-operation of 1 January 1974 between the French Republic
and the People’s Republic of the Congo, to which the latter refers in its Appli-
cation, does not constitute a basis of jurisdiction for the Court in the present
case.
1
Article 38, paragraph 5, of the Rules of Court provides that:
“5. When the applicant State proposes to found the jurisdiction of the Court upon
a consent thereto yet to be given or manifested by the State against which such appli-
cation is made, the application shall be transmitted to that State. It shall not however
be entered in the General List, nor any action be taken in the proceedings, unless and
until the State against which such application is made consents to the Court’s juris-
diction for the purposes of the case.” [Note by the Registry.] 24
La présente acceptation de la compétence de la Cour ne vaut qu’aux fins de
l’affaire, au sens de l’article 38, paragraphe 5, précité, c’est-à-dire pour le dif-
férend qui fait l’objet de la requête et dans les strictes limites des demandes for-
mulées par la République du Congo.
J’ai enfin l’honneur de vous informer que, conformément à l’article 40 du
Règlement de la Cour, le Gouvernement français désigne M. Ronny Abraham,
directeur des affaires juridiques au ministère des affaires étrangères, comme
l’agent de la République française dans cette affaire. Pour les besoins de la pro-
cédure, l’agent de la République française élit domicile à l’ambassade de France
aux Pays-Bas.
(Signé) Dominique DE V ILLEPIN. 25
The present consent to the jurisdiction of the Court applies only for the pur-
poses of the case within the meaning of the above Article 38, paragraph 5, that
is to say, for the dispute which is the subject-matter of the Application and
strictly within the limits of the claims formulated by the Republic of the Congo.
Finally, I have the honour to inform you that, in accordance with Article 40
of the Rules of Court, the French Government appoints Mr. Ronny Abraham,
Director of Legal Affairs of the Ministry of Foreign Affairs, as Agent of the
French Republic in this case. The address for service of the Agent of the French
Republic for purposes of the case is the Embassy of France in the Netherlands.
(Signed) Dominique DE V ILLEPIN.PRINTED IN THE NETHERLANDS
Application instituting proceedings and Request for the indication of a Provisional Measure