Public sitting held on Monday 14 September 2009, at 10 a.m., at the Peace Palace, Vice-President Tomka, Acting President, presiding, in the case concerning Pulp Mills on the River Uruguay (Argentina v

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135-20090914-ORA-01-00-BI
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2009/12
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Uncorrected

CR 2009/12

Cour internationale International Court
de Justice of Justice

LAAYE THHEGUE

ANNÉE 2009

Audience publique

tenue le lundi 14 septembre 2009, à 10 heures, au Palais de la Paix,

sous la présidence de M. Tomka, vice-président,

faisant fonction de président

en l’affaire relative à des Usines de pâte à papier sur le fleuve Uruguay
(Argentine c. Uruguay)

________________

COMPTE RENDU

________________

YEAR 2009

Public sitting

held on Monday 14 September 2009, at 10 a.m., at the Peace Palace,

Vice-President Tomka, Acting President, presiding,

in the case concerning Pulp Mills on the River Uruguay
(Argentina v. Uruguay)

____________________

VERBATIM RECORD
____________________ - 2 -

Présents : M. Tomka, vice-président, faisant fonction de président en l’affaire
KoMroMa.

Al-Khasawneh
Simma
Abraham
Keith

Sepúlveda-Amor
Bennouna
Skotnikov
Crinçade

Yusuf
Grejugesood,
BeTroresz.
juiesesa, ad hoc

Mme de Saint Phalle, greffier adjoint

⎯⎯⎯⎯⎯⎯ - 3 -

Present: Vice-President Tomka, Acting President
KoromJaudges

Al-Khasawneh
Simma
Abraham
Keith

Sepúlveda-Amor
Bennouna
Skotnikov
Trindade Cançado

Yusuf
Greenwood
Judges ad hoc TorresBernárdez
Vinuesa

Deputy-Registrar de Saint Phalle

⎯⎯⎯⎯⎯⎯ - 4 -

Le Gouvernement de la République argentine est représenté par :

S. Exc. Mme Susana Ruiz Cerutti, ambassadeur, conseiller juridique du ministère des relations
extérieures, du commerce international et du culte,

comme agent ;

S. Exc. M. Horacio A. Basabe, ambassadeur, directeur général de l’Institut du service extérieur de
la nation, ancien conseiller juridique du ministère des relations extérieures, du commerce
international et du culte, membre de la Cour permanente d’arbitrage,

S. Exc. M. Santos Goñi Marenco, ambassadeur de la République argentine auprès du Royaume des
Pays-Bas,

comme coagents ;

M.AlainPellet, professeur à l’Université Paris Ouest, Nanterre-La Défense, membre et ancien
président de la Commission du droit internatio nal, membre associé de l’Institut de droit
international,

M. Philippe Sands QC, professeur de droit internatio nal au University College de Londres, avocat,
Matrix Chambers, Londres,

M. Marcelo Kohen, professeur de droit internationa l à l’Institut de hautes études internationales et
du développement, Genève, membre associé de l’Institut de droit international,

Mme Laurence Boisson de Chazournes, professeur de droit international à l’Université de Genève,

M. Alan Béraud, ministre à l’ambassade de la République argentine auprès de l’Union européenne,
ancien conseiller juridique du ministère des affaires étrangères, du commerce international et du
culte,

M.DanielMüller, chercheur au Centre de droit in ternational de Nanterre (CEDIN), Université de
Paris Ouest, Nanterre-La Défense,

comme conseils et avocats ;

M. Homero Bibiloni, secrétaire d’Etat à l’environnement et au développement durable,

comme autorité gouvernementale ;

M. Esteban Lyons, directeur national du contrôle environnemental du secrétariat à l’environnement
et au développement durable,

M.HowardWheater, docteur en hydrologie de l’ Université de Bristol, professeur d’hydrologie à
l’Imperial College, directeur de l’Imperial College Environment Forum,

M. Juan Carlos Colombo, docteur en océanographie de l’Université de Québec, professeur à la

faculté des sciences et au musée de l’Université de La Plata, directeur du Laboratoire de chimie
environnementale et de biogéochimie de l’Université de La Plata,

M.NeilMcIntyre, docteur en ingénierie envir onnementale, maître de conférences à l’Imperial

College, Londres, - 5 -

The Government of the Republicof Argentina is represented by:

H.E. Ms Susana Ruiz Cerutti, Ambassador, Legal Adviser to the Ministry of Foreign Affairs,
International Trade and Worship,

as Agent;

H.E. Mr. Horacio A. Basabe, Ambassador, Director of the Argentine Institute for Foreign Service,
former Legal Adviser to the Ministry of Fore ign Affairs, International Trade and Worship,
Member of the Permanent Court of Arbitration,

H.E. Mr. Santos Goñi Marenco, Ambassador of the Argentine Republic to the Kingdom of the
Netherlands,

as Co-Agents;

Mr.AlainPellet, Professor at the University of Paris Ouest, Nanterre-La Défense, member and
former Chairman of the International Law Co mmission, associate member of the Institut de
droit international,

Mr. Philippe Sands QC, Professor of International Law at the University College London, Barrister
at Matrix Chambers, London,

Mr.MarceloKohen, Professor of International Law at the Graduate Institute of International and
Development Studies, Geneva, associate member of the Institut de droit international,

Ms Laurence Boisson de Chazournes, Professor of International Law at the University of Geneva,

Mr.AlanBéraud, Minister at the Embassy of the Argentine Republic to the European Union,
former Legal Adviser to the Ministry of Foreign Affairs, International Trade and Worship,

Mr. Daniel Müller, Researcher at the Centre de droit international de Nanterre (CEDIN), University

of Paris Ouest, Nanterre-La Défense,

as Counsel and Advocates;

Mr. Homero Bibiloni, Federal Secretary of Environment and Sustainable Development,

as Governmental Authority;

Mr.EstebanLyons, National Director of Environm ental Control, Secretariat of Environment and
Sustainable Development,

Mr. Howard Wheater, PhD in Hydrology at Bristol University, Professor of Hydrology at Imperial

College and Director of the Imperial College Environment Forum,

Mr. Juan Carlos Colombo, PhD in Oceanography at the University of Québec, Professor at the
Faculty of Sciences and Museum of the National University of La Plata, Director of the

Laboratory of Environmental Ch emistry and Biogeochemistry at the National University of
La Plata,

Mr.NeilMcIntyre, PhD in Environmental Engineering, Senior Lecturer in Hydrology at Imperial

College London, - 6 -

Mme Inés Camilloni, docteur en sciences atmosphériques, professeur de sciences atmosphériques à
la faculté des sciences de l’Université de Buenos Aires, maître de recherche au conseil national

de recherche (CONICET),

M.GabrielRaggio, docteur en sciences techni ques de l’Ecole polytechnique fédérale de
Zürich (ETHZ) (Suisse), consultant indépendant,

comme conseils et experts scientifiques ;

M.HolgerMartinsen, ministre au bureau du conseiller juridique du ministère des affaires

étrangères, du commerce international et du culte,

M. Mario Oyarzábal, conseiller d’ambassade, bureau du conseiller juridique du ministère des
affaires étrangères, du commerce international et du culte,

M.FernandoMarani, secrétaire d’ambassade, amb assade de la République argentine au Royaume
des Pays-Bas,

M.GabrielHerrera, secrétaire d’ambassade, bureau du conseiller juridique du ministère des

affaires étrangères, du commerce international et du culte,

MmeCynthiaMulville, secrétaire d’ambassade, bureau du conseiller juridique du ministère des
affaires étrangères, du commerce international et du culte,

Mme Kate Cook, avocat, Matrix Chambers, Londres, spécialisée en droit de l’environnement et en
droit du développement,

Mme Mara Tignino, docteur en droit, chercheur à l’Université de Genève,

M.MagnusJeskoLanger, assistant d’enseignement et de recherche, Institut de hautes études
internationales et du développement, Genève,

comme conseillers juridiques.

Le Gouvernement de l’Uruguay est représenté par :

S. Exc. M. Carlos Gianelli, ambassadeur de la République orientale de l’Uruguay auprès des

Etats-Unis d’Amérique,

comme agent ;

S. Exc. M. Carlos Mora Medero, ambassadeur de la République orientale de l’Uruguay auprès du

Royaume des Pays-Bas,

comme coagent ;

M.AlanBoyle, professeur de droit international à l’Université d’Edimbourg, membre du barreau
d’Angleterre,

M. Luigi Condorelli, professeur à la faculté de droit de l’Université de Florence,

M.LawrenceH.Martin, cabinet Foley Hoag LLP, membre du barreau de la Cour suprême des
Etats-Unis d’Amérique, du barreau du district de Columbia et du barreau du Commonwealth du
Massachusetts, - 7 -

MsInésCamilloni, PhD in Atmospheric Sciences, Professor of Atmospheric Sciences at the
Faculty of Sciences of the University of Bue nos Aires, Senior Researcher at the National

Research Council (CONICET),

Mr.GabrielRaggio, Doctor in Technical Scienc es of the Swiss Federal Institute of Technology
Zurich (ETHZ) (Switzerland), Independent Consultant,

as Scientific Advisers and Experts;

Mr.HolgerMartinsen, Minister at the Office of the Legal Adviser, Ministry of Foreign Affairs,

International Trade and Worship,

Mr.MarioOyarzábal, Embassy Counsellor, Office of the Legal Adviser, Ministry of Foreign
Affairs, International Trade and Worship,

Mr. Fernando Marani, Embassy Secretary, Embassy of the Argentine Republic in the Kingdom of
the Netherlands,

Mr. Gabriel Herrera, Embassy Secretary, Office of the Legal Adviser, Ministry of Foreign Affairs,

International Trade and Worship,

Ms Cynthia Mulville, Embassy Secretary, Office of the Legal Adviser, Ministry of Foreign Affairs,
International Trade and Worship,

MsKateCook, Barrister at Matrix Chambers, London, specializing in environmental law and law
relating to development,

Ms Mara Tignino, PhD in Law, Researcher at the University of Geneva,

Mr.MagnusJesko Langer, teaching and research assist ant, Graduate Institute of International and
Development Studies, Geneva,

as Legal Advisers.

The Government of Uruguay is represented by:

H.E. Mr. Carlos Gianelli, Ambassador of the Eastern Republic of Uruguay to the United States of

America,

as Agent;

H.E. Mr. Carlos Mora Medero, Ambassador of the Eastern Republic of Uruguay to the Kingdom of

the Netherlands,

as Co-Agent;

Mr.AlanBoyle, Professor of International Law at the University of Edinburgh, Member of the
English Bar,

Mr. Luigi Condorelli, Professor at the Faculty of Law, University of Florence,

Mr. Lawrence H. Martin, Foley Hoag LLP, Member of the Bars of the United States Supreme
Court, the District of Columbia and the Commonwealth of Massachusetts, - 8 -

M. Stephen C. McCaffrey, professeur à la McGeorge School of Law de l’Université du Pacifique,
Californie, ancien président de la Commission du droit international et rapporteur spécial aux

fins des travaux de la Commission relatifs aux cours d’eau internationaux,

M.PaulS.Reichler, cabinet Foley Hoag LLP, membre du barreau de la Cour suprême des
Etats-Unis d’Amérique et du barreau du district de Columbia,

comme conseils et avocats ;

M. Marcelo Cousillas, conseiller juridique à la direction nationale de l’environnement, ministère du

logement, de l’aménagement du territoire et de l’environnement de la République orientale de
l’Uruguay,

M. César Rodriguez Zavalla, chef de cabinet au ministère des affaires étrangères de la République
orientale de l’Uruguay,

M.CarlosMata, directeur adjoint des affaires juri diques au ministère des affaires étrangères de la
République orientale de l’Uruguay,

M. Marcelo Gerona, conseiller à l’ambassade de la République orientale de l’Uruguay au Royaume
des Pays-Bas,

M. Alberto Pérez Pérez, professeur à l’Université de la République, Montevideo,

M. Eduardo Jiménez de Aréchaga, avocat, admis au barreau de la République orientale de
l’Uruguay et membre du barreau de New York,

MA. damKahn, cabinet Foley Hoag LLP, membre du barreau du Commonwealth du
Massachusetts,

MmeAnaliaGonzalez, LLM, cabinet Foley Hoag LLP, admise au barreau de la République

orientale de l’Uruguay,

Mme Clara E. Brillembourg, cabinet Foley Hoag LLP, membre des barreaux des districts de
Columbia et de New York,

MmeCicelyParseghian, cabinet Foley Hoag LLP, membre du barreau du Commonwealth du
Massachusetts,

M. Pierre Harcourt, doctorant à l’Université d’Edimbourg,

M. Paolo Palchetti, professeur associé à la faculté de droit de l’Université de Macerata,

comme conseils adjoints ;

Mme Alicia Torres, directrice nationale de l’environneme nt au ministère du logement, de
l’aménagement du territoire etde l’environnement de la République orientale de l’Uruguay,

M.EugenioLorenzo, conseiller technique à la direction de l’envir onnement du ministère du
logement, de l’aménagement du territoir e et de l’environnement de la Ré publique orientale de
l’Uruguay,

M.CyroCroce, conseiller technique à la direction de l’environnement du ministère du logement, de
l’aménagement du territoire etde l’environnement de la République orientale de l’Uruguay, - 9 -

Mr.StephenC.McCaffrey, Professor at the McGeorge School of Law, University of the Pacific,
California, former Chairman of the Interna tional Law Commission and Special Rapporteur for

the Commission’s work on international watercourses,

Mr.PaulS.Reichler, Foley Hoag LLP, Member of the Bars of the United States Supreme Court
and the District of Columbia,

as Counsel and Advocates;

Mr. Marcelo Cousillas, Legal Counsel at the Nationa l Directorate for the Environment, Ministry of

Housing, Territorial Planning and Environment of the Eastern Republic of Uruguay,

Mr.CésarRodriguezZavalla, Chief of Cabinet, Ministry of Foreign Affairs of the Eastern
Republic of Uruguay,

Mr.CarlosMata, Deputy Director of Legal Affair s, Ministry of Foreign Affairs of the Eastern
Republic of Uruguay,

Mr.MarceloGerona, Counsellor of the Embassy of the Eastern Republic of Uruguay in the

Kingdom of the Netherlands,

Mr. Alberto Pérez Pérez, Professor of the University of the Republic, Montevideo,

Mr. Eduardo Jiménez de Aréchaga, Attorney at law, admitted to the Bar of the Eastern Republic of
Uruguay and Member of the Bar of New York,

Mr. Adam Kahn, Foley Hoag LLP, Member of the Bar of the Commonwealth of Massachusetts,

MsAnaliaGonzalez, LLM, Foley Hoag LLP, adm itted to the Bar of the Eastern Republic of
Uruguay,

MsClaraE. Brillembourg, Foley Hoag LLP, Member of the Bars of the District of Columbia and

New York,

MsCicelyParseghian, Foley Hoag LLP, Me mber of the Bar of the Commonwealth of
Massachusetts,

Mr. Pierre Harcourt, PhD Candidate, University of Edinburgh,

Mr. Paolo Palchetti, Associate Professor at the School of Law, University of Macerata,

as Assistant Counsel;

Ms Alicia Torres, National Director for the Environment at the Ministry of Housing, Territorial

Planning and Environment of the Eastern Republic of Uruguay,

Mr.EugenioLorenzo, Technical Consultant for the National Directorate for the Environment,
Ministry of Housing, TerritorialPlanning and Environment ofthe Eastern Republic of Uruguay,

Mr. Cyro Croce, Technical Consultant for the National Directorate for the Environment, Ministry of
Housing, Territorial Planning and Environment of the Eastern Republic of Uruguay, - 10 -

Mme Raquel Piaggio, bureau de la gestion des eaux (O.S.E.), consultante technique à la direction de

l’environnement du ministère du logement, de l’aménagement du territoire et de l’environnement
de la République orientale de l’Uruguay,

M.CharlesA.Menzie, PhD., Principal Scientist et directeur d’EcoSciences Practice chez Exponent,

Inc., à Alexandria, Virginie,

M. Neil McCubbin, Eng., Bsc. (Eng), 1 Class Honours, Glasgow ; Associ ate of the Royal College of
Science and Technology, Glasgow,

comme conseillers scientifiques et experts. - 11 -

Ms Raquel Piaggio, Water Management Administration ⎯ O.S.E. ⎯ Technical Cons ultant for the
National Directorate for the Environment, Mini stry of Housing, Territorial Planning and

Environment of the Eastern Republic of Uruguay,

Mr. Charles A. Menzie, PhD., Principal Scientist and Director of the EcoSciences Practice at
Exponent, Inc., Alexandria, Virginia,

Mr. Neil McCubbin, Eng., BSc. (Eng), 1st Class Honours, Glasgow; Associate of the Royal College
of Science and Technology, Glasgow,

as Scientific Advisers and Experts. - 12 -

Le VICE-PRESIDENT, faisant fonction de président : Veuillez vous asseoir. L’audience est

ouverte.

La Cour se réunit aujourd’hui pour entendre les Parties en leurs plaidoiries dans l’affaire

relative à des Usines de pâte à papier sur le fleuve Uruguay (Argentine c.Uruguay). Je voudrais

indiquer tout d’abord, que le président pour des raisons impérieuses, ne peut pour l’instant être

présent sur le siège. En vertu de l’article 13 du Règlement de la Cour, il m’incombe donc, en ma

qualité de vice-président de la Cour, d’exercer la présidence en l’affaire tant que le président sera

empêché de siéger. Je voudrais également noter que, pour des raisons médicales, le juge Shi, qui a

participé aux précédentes étapes de l’affaire, ne sera pas en mesure de siéger en la présente phase.

Le jugeBuergenthal regrette de ne pouvoir, pour des raisons de santé, participer aux audiences

pour le moment. Le greffier m’a fait connaître que, pour des motifs familiaux graves, il ne sera

malheureusement pas, pour l’instant, en mesure d’occuper sa place sur le siège. Pendant son

absence, il sera remplacé par le greffier adjoint.

La Cour ne comptant sur le siège aucun juge de la nationalité des Parties, chacune d’elles

s’est prévalue de la faculté que lui confère le pa ragraphe 2 de l’article 31 du Statut de désigner un

juge ad hoc ; M.Raúl Vinuesa, désigné par l’Argentine, et M. Santiago Torres Bernárdez, choisi

par l’Uruguay, ont été tous deux installés le 8juin2006 comme juges ad hoc en l’affaire à

l’ouverture des audiences sur la demande en indication de mesures conservatoires soumise par la

République argentine.

Le greffier adjoint n’ayant pas encore fait la déclaration solennelle pr évue au paragraphe2

de l’article24 du Règlement, je lui demanderai maintenant d’y procéder. Madame le greffier

adjoint, je vous prie de faire la déclaration solennelle. The Court rises.

Le GREFFIER ADJOINT: «Je déclare solennelle ment que je remplirai en toute loyauté,

discrétion et conscience les devoirs qui m’incombent en ma qualité de greffier adjoint de la Cour

internationale de Justice et que j’observerai fidèlement toutes les prescriptions du Statut et du

Règlement de la Cour.» - 13 -

Le VICE-PRESIDENT, faisant fonction de prési dent : Je vous remercie, Madame. Veuillez

vous asseoir.

*

Je rappellerai à présent les principales étapes de la procédure en l’espèce.

Le 4mai2006, la République argentine a dé posé au Greffe de la Cour une requête

introduisant une instance contre la République orientale de l’Uruguay au sujet d’un différend relatif

à la violation, qu’aurait commise l’Uruguay, d’ob ligations découlant du statut du fleuve Uruguay,

traité signé par l’Argentine et l’Uruguay à Salto (U ruguay) le 26 février 1975 et entré en vigueur le

18 septembre 1976.

Dans sa requête, l’Argentine expose que cette violation résulte de «l’autorisation de

construction, [de] la cons truction et [de] l’éventuelle mise en service de deux usines de pâte à

papier sur le fleuve Uruguay», en invoquant plus particulièrement les «effets desdites activités sur

la qualité des eaux du fleuve Uruguay et sa zone d’influence». L’Argentine, se référant au

paragraphe1 de l’article36 du Statut, invoque, pour fonder la compétence de la Cour, le

paragraphe 1 de l’article 60 du statut de 1975.

Le 4 mai 2006, après le dépôt de sa requête, l’Argentine a en outre présenté une demande en

indication de mesures conservatoires sur la base de l’article41 du Statut de la Cour et de

l’article 73 de son Règlement.

Par ordonnance du 13 juillet 2006, la Cour, après avoir entendu les Parties, a conclu «que les

circonstances, telles qu’elles se présent[ai]ent [alo rs] à [elle], n[’étaient] pas de nature à exiger

l’exercice de son pouvoir d’indiquer des mesures conservatoires en vertu de l’article 41 du Statut».

Par une autre ordonnance du même jour, la Cour, compte tenu des vues des Parties, a fixé au

15 janvier 2007 et au 20 juillet 2007, respectivement, les dates d’expiration des délais pour le dépôt

du mémoire de l’Argentine et du contre-mémoire de l’Uruguay; ces pièces ont été dûment

déposées dans les délais ainsi prescrits.

Le 29novembre2006, l’Uruguay, se référant à l’affaire pendante devant la Cour et

invoquant l’article41 de son Statut et l’article 73 de son Règlement, a présenté à son tour une

demande en indication de mesures conservatoires. - 14 -

Par ordonnance du 23janvier2007, la Cour a dit «que les circonstances, telles qu’elles se

présent[ai]ent [alors] à [elle], n[’étaient] pas de nature à exiger l’exercice de son pouvoir d’indiquer

des mesures conservatoires en vertu de l’article 41 du Statut».

Par ordonnance du 14 septembre 2007, la Cour a autorisé la présentation d’une réplique par

l’Argentine et d’une duplique par l’Uruguay, et fixé respectivement au29janvier2008 et

au29juillet2008 les dates d’expiration des délais pour le dépôt de ces pièces. La réplique de

l’Argentine et la duplique de l’Uruguay ont été dûment déposées dans les délais ainsi prescrits.

Par lettres du 16juin2009 et du 17juin2009, l’Uruguay et l’Argentine ont respectivement

fait connaître à la Cour qu’ils étaient parvenus à un accord au sujet de documents nouveaux qu’ils

souhaitaient produire en application de l’article56 du Règlement. Par lettres du 23juin2009, le

greffier a informé les Parties que la Cour avait d écidé de les autoriser à procéder comme elles en

étaient convenues. Ces nouveaux documents ont été dûment déposés dans le délai convenu.

Le 15 juillet 2009, chacune des Parties a, ains i que convenu entre elles et qu’autorisé par la

Cour, présenté certaines observations sur les docum ents nouveaux déposés par la Partie adverse.

Chaque Partie a également déposé certains documents à l’appui desdites observations.

*

Conformément au paragraphe2 de l’article 53 de son Règlement, la Cour, après s’être

renseignée auprès des Parties, a décidé de rendre accessibles au public, à l’ouverture de la

procédure orale, des exemplaires des pièces de procédure et documents annexés. En outre,

conformément à la pratique de la Cour, l’ensem ble de ces documents, sa ns leurs annexes, sera

placé dès aujourd’hui sur le site Internet de la Cour.

*

Je constate la présence à l’audience des agen ts, conseils et avocats des deux Parties.

Conformément aux dispositions relatives à l’organisa tion de la procédure arrêtées par la Cour, les

audiences comprendront un premier et un second tours de plaidoiries.

* - 15 -

Le premier tour de plaidoiries débute aujourd’hui et se terminera le jeudi 24 septembre 2009.

Le second tour de plaidoiries s’ouvrira le lundi 28septembre2009 et s’achèvera le vendredi

2 octobre 2009.

*

L’Argentine, qui est l’Etat demandeur en l’ affaire, sera entendue la première. Je donne à

présent la parole à S. Exc. l’agent de l’Argentine. Vous avez la parole, Madame.

Mme RUIZ CERUTTI :

I. NTRODUCTION DE L ’AGENT

1. Monsieur le président, Messieurs les j uges, c’est un honneur de défendre à nouveau les

intérêts de la République argentine dans le même différend devant la Cour internationale de Justice.

Aujourd’hui encore, l’Arge ntine le fait avec des sentiments mê lés, comme je l’ai expliqué en

juin2006, lors de ma premiè re intervention devant la Cour 1. Nous sommes, d’une part, honorés

d’avoir la possibilité de défendre nos droits devant l’organe judiciaire principal des Nations Unies.

Nous ne sommes pas heureux, d’ autre part, de devoir le faire co ntre la République orientale de

l’Uruguay, un pays avec lequel l’Argentine a de s liens historiques, sociaux et culturels qui

dépassent les simples relations de bon voisinage entre Etats.

2. Nous saluons le coagent de la Partie ur uguayenne et sa délégation. C’est avec beaucoup

de regret que nous avons appris que l’ancien agen t de l’Uruguay, M. l’ambassadeur Gros Espiell,

ne sera pas parmi nous ces prochaines semaines pour des raisons de santé. Nous lui souhaitons un

bon et prompt rétablissement.

3. Il y a trois ans et quatre mois que la République argentine a dû saisir votre haute

juridiction d’un différend qui l’oppose à la République orientale de l’Uruguay concernant

«laviolation par l’Uruguay des obligations qui découlent du statut du fleuve Uruguay…au sujet

de l’autorisation de construction, la construction et l’éventuelle mise en service de deux usines de

2
pâte à papier sur le fleuve Uruguay» . Ce différend s’est malheureusement aggravé depuis ma

1
CR 2006/46, p. 15-16, par. 1 (Cerutti).
2Requête introductive d’instance de la République argentine, 4 mai 2006, par. 2. - 16 -

dernière apparition dans ce gr and hall de justice en2006. Aujourd’hui, je dois évoquer non

seulement l’autorisation de construction de ces deux usines, et le début de leur construction, mais la

mise en service de l’une d’elles intervenue il y a presque deux ans ⎯toujours en violation

flagrante des obligations que les deux Etats ont accep tées en ratifiant le statut du fleuve Uruguay.

L’Argentine exprime ses regrets et ses inquiétudes face à cette aggravation du différend.

4. L’Argentine se félicite de la décision de la société ENCE de ne pas construire, près de

Fray Bentos, l’une des deux usines dont nous avons au ssi parlé en 2006 et de délocaliser son projet

ailleurs. Cela ne change malheureusement rien à la nature du différend qui oppose l’Argentine à

l’Uruguay. Les violations du statut de1975 co mmises par l’Uruguay lors de l’autorisation du

projetENCE en2003 restent d’actualité et n’ont été aucunement effacées par la décision de

l’entreprise.

5. Monsieur le président, l’Argentine ne tent e pas de réclamer seulement réparation pour les

violations commises par l’Uruguay depuis2003. E lle a saisi la Cour en2006 afin de protéger,

mieux, de sauver, le statut du fleuve Uruguay de1975 dont le non-respect constitue l’objet du

différend. Vous trouverez le texte du statut dans vos dossiers sous l’onglet n o 1.

Le statut du fleuve Uruguay

6. Messieurs de la Cour, cet instrument conclu en 1975 est tout à fait précurseur en matière

de protection de l’environnement et ét ablit «un régime complet et novateur» ( Usines de pâte à

papier sur le fleuve Uruguay (Argentine c.Uruguay), mesures conservatoires , ordonnance du

13 juillet 2006, C.I.J. Recueil 2006 , p.133, par.81), pour la protection de la ressource commune

3
qu’est le fleuve Uruguay. Comme l’Argen tine l’a déjà expliqué dans son mémoire , dès1961 le

traité sur la frontière entre l’Argen tine et l’Uruguay avait prévu son adoption 4. Le statut du fleuve

Uruguay a été précédé par la première Conférence des NationsUnies sur l’environnement de

juin 1972 et l’adoption, en 1973, du traité re latif au Río de la Plata et à sa façade maritime 5, mais il

dépasse de loin les exigen ces de ce dernier. Bien que le tr aité de 1973 ait instauré un mécanisme

3
Mémoire de l’Argentine (MA), p. 68-72, par. 3.5-3.16.
4 Article7 du traité relatif à la frontisur l’Uruguay du 7avril1961 (NationsUnies, Recueil des traités ,

vol. 635, p. 98-109 ; MA, annexes, livre II, annexe 1).
5Nations Unies, Recueil des traités, vol. 1295, p. 319-330 ; MA, annexes, livre II, annexe 5. - 17 -

de notification, d’information, et de consultation préalables pour tout projet d’ouvrage affectant la

navigation et le régime du Río de la Plata, le stat ut du fleuve Uruguay, adopté deux ans plus tard, a

élargi considérablement le champ d’application de son mécanisme de notification, d’information et

de consultation préalables et l’a renforcé de manière significative. En vertu du statut de 1975, les

parties doivent également suivre ce mécanisme exigeant pour tout ouvrage susceptible de causer un

dommage à la qualité des eaux du fleuve et à ses z ones d’influence et pour toute utilisation de ses

eaux à des fins industrielles suffisamment important e pour affecter son régi me ou la qualité de ses

eaux.

7. Le statut de1975 est un instrument qui protège la ressource partagée qui constitue la

frontière entre nos deux pays frères et qui les relie en même temps. Dès les années1970, les

Parties ont recherché à assurer «l’utilisation rationnelle et optimale du fleuve Uruguay» 6. Dans ce

but, le statut concilie la protection du fleuve et l’utilisation de ses eaux même à des fins

industrielles en mettant en place une procédure bilatérale obligeant les deux Etats à se consulter et à

7
s’informer mutuellement et à prendre les décisions d’un commun accord . Je regrette de devoir

constater que l’Uruguay renie aujourd’hui ces obligations.

8. Mais l’Argentine et l’Uruguay ont également depuis 1975 entrepris de protéger bien plus

que l’eau. La protection du statut s’étend en e ffet à l’ensemble de l’éco système constitué par le

fleuve lui-même et ses zones d’influence. Comme la professeure Boisson de Chazournes vous

l’expliquera un peu plus tard, ceci va au-delà de l’eau en tant que telle, mais comprend également

les éléments naturels qui lui sont liés, tels l’air et les sols. Ainsi, Monsieur le président, toujours

pour la protection du fleuve, l’Argentine s’est enga gée par le statut à se soumettre au régime de

notification, d’information et de consultation préalables non seulement pour tout ouvrage important

construit sur le tronçon commun entre l’Argentin e et l’Uruguay, mais également, en vertu de

l’article 13 du statut, pour tout ouvrage construit dans sa juridiction en amont de ce tronçon.

9. Dans un esprit de coopération et d’amitié , les deux Parties ont accepté de limiter leurs

compétences souveraines au bénéfice de la prot ection du fleuve et de son écosystème et pour

l’établissement d’une véritable communauté d’intérêts et de droits. Elles se sont engagées à agir

6
Article premier du statut du fleuve Uruguay, MA, annexes, vol. II, annexe 2.
7Article 27 du statut du fleuve Uruguay, ibid. - 18 -

8
seulement à travers «les mécanismes communs» institués par le statut mais aussi à recourir, si

jamais un désaccord subsiste entre elles, à des procédures de rè glement de différends pour pouvoir

toujours arriver à une solution, en recourant en dernier ressort à votre Cour.

Le différend et ses aggravations successives

10. Cet accord exigeant mais équilibré, conclu en 1975 pour le bénéfice du fleuve Uruguay

et de son écosystème, a été mis en échec par la Partie uruguayenne depuis 2003. Je rappelle que,

contrairement aux assurances que le Président ur uguayen avait données à son homologue argentin

9
le 9octobre2003 lors d’une réunion à Anchorena (Uruguay) , les autorités uruguayennes ont

accordé ce même jour une autorisation à la société espagnole ENCE pour la construction d’une

première usine de pâte à papier dans les environs de la ville de Fray Bentos sur la rive uruguayenne

10
du fleuve . Cette autorisation est intervenue sans que la CARU ⎯ la commission administrative

du fleuve Uruguay ⎯ ait été saisie, sans que l’Argentine a it été notifiée par l’intermédiaire de la

CARU et sans que l’information nécessaire ait ét é transmise à la Partie argentine en violation

flagrante du système établi par les articles 7 à 12 et 27 du statut de 1975.

11. Malheureusement, ce n’est que le début d’un différend qui a été aggravé par l’Uruguay

depuis lors, malgré les efforts répétés et cons tants de l’Argentine pour trouver une solution

négociée. Ainsi, le14février2005, les autorités uruguayennes ont autorisé, de nouveau

unilatéralement, un deuxième projet d’usine de pâ te à papier proposé par la société finlandaise

Botnia, six kilomètres seulement en aval du projet ENCE 1. Cette deuxième usine qui est conçue

pour fonctionner durant quarante ans devait produire 1 million de tonnes de pâte à papier chaque

année. Cette autorisation a également été acco rdée sans que la CARU ait été saisie, sans que

l’Argentine ait été notifiée et sans que l’inform ation nécessaire ait été transmise en violation du

statut de 1975. Elle est intervenue nonobstant le fait que le différend c oncernant l’usine ENCE

n’était toujours pas réglé et malgré les criti ques exprimées par la DI NAMA, la direction de

8Article premier du statut du fleuve Uruguay, ibid.
9
MA, p. 34, par. 2.17 ; réplique de l’Argentine, p. 190-191, par. 2.78.
10MA, p. 29-45, par. 2.3-2.44.

11MA, p. 46-50, par. 2.45-2.57. - 19 -

l’environnement de l’Uruguay, à l’égard de l’étude d’impact insuffisante et lacunaire présentée par

l’entreprise Botnia .12

12. Face à cette nouvelle violation du statut , l’Argentine tenta à nouveau de trouver une

solution négociée du différend pour revenir au respect du statut de 1975. A cette fin, le Président

argentin, Néstor Kirchner, et son homologue uruguayen récemment installé, Tabaré Vázquez,

décidèrent, le 5 mai 2005, de créer un groupe de trav ail de haut niveau (GTAN) qui après six mois

de négociation n’a pas réussi à trouver un accord. Pendant que l’Argentine essayait de régler le

différend, l’Uruguay, quant à lui, a décidé de l’a ggraver en autorisant le 5 juillet 2005, toujours en

violation du statut, la construction d’un terminal portuaire à l’usag e exclusif de l’usine Botnia.

Avant même que le GTAN ait pu terminer ses travaux, Botnia s’est empressée de commencer la

construction de son usine et de son port.

13. Toutes les tentatives de l’Argentine pour régler le différend par des négociations et ses

demandes de suspension provisoire des travaux de construction restèrent infructueuses et, le

6avril2006, le Gouvernement uruguayen décida de «termin[er] les négocia tions directes avec le

13
pays voisin» . Le 4 mai 2006, l’Argentine introduisit une requête devant votre Cour pour assurer

la survie du statut bafoué à plusieurs reprises par la Partie uruguayenne et faire valoir ses droits.

14. Malgré la saisine de la Cour, l’Uruguay ne s’est aucunement abstenu d’aggraver le

différend. Il a accordé, le 24 août 2006, une auto risation de mise en service du terminal portuaire

14
construit par Botnia . Le 12 septembre 2006, il a autorisé le prélèvement et l’utilisation par Botnia

de 60 millions de mètres cubes d’eau du fleuve par an 15. Toutes ces autorisations, Messieurs de la

Cour, ont été délivrées sans que la CARU ou l’Ar gentine aient été consultées ou informées, sans

que les obligations du statut aient été respectées.

15. Lorsque, à l’initiative de l’Argentine, une procédure de facilitation par S.M. le Roi

d’Espagne et le Gouvernement espagnol a été mise en place, l’Uruguay n’a aucunement freiné la

construction de l’usine Botnia qui continuait à grande vitesse. Le 7novembre2007, pendant

12
MA, annexes, livre V, annexe 8.
13Présidence, République orientale de l’Uruguay, «Ur uguay demande une réunion du Mercosur ; il remettra une

lettre au tribunal de La Haye», 7 avril 2006, MA, annexes, livre VI, annexe 11.
14DINAMA, résolution R/DN/100/2006 du 24 août 2006, MA, annexes, livre VII, annexe 15.

15Résolution du ministère des transports et des trava ux publics du 12 septembre 2006, MA, annexes, livreVII,
annexe 16. - 20 -

qu’une réunion entre les Parties dans le cadre de la facilitation royale avait lieu, l’Uruguay a surpris

16
tout le monde en autorisant subitement la mise en service de l’usine provoquant ainsi, une

nouvelle fois, la fin des négociations. Depuis lors, Botnia fonctionne tant bien que mal (et plutôt

mal que bien), avec des interruptions fréquentes en raison de divers dysfonctionnements et son

activité cause des dommages à l’environnement et à la santé des populations riveraines du fleuve

Uruguay.

Les violations du statut du fleuve Uruguay

16. Monsieur le président, Messieurs de la C our, il ne s’agit pas, dans ces circonstances, de

simples violations ponctuelles d’un traité intern ational. L’Uruguay a agi depuis 2003, et agit

encore aujourd’hui, dans l’ignorance complète de l’ instrument qui le lie et il nie la communauté

d’intérêts et de droits établie par ce traité. Il agit comme si le statut ne le liait pas !

17. La Partie uruguayenne a fait preuve de beaucoup d’imagination et a invoqué plusieurs

argumentations successives pour tenter de justifier ses violations, non sans se contredire : tantôt les

obligations du statut existent, tantôt elles n’existent pas. Tantôt le statut s’applique aux usines de

pâte à papier, tantôt il ne s’y applique pas ⎯ ou juste un peu. Tantôt l’Uruguay a respecté les

obligations du statut, tantôt pas. Toutes ces pseudo-justifications ne peuvent cacher la vérité.

18. La vérité est en effet tout autre, Monsieur le président: depuis novembre2003,

l’Uruguay a ouvertement affiché son intention de ne pas respecter le statut du fleuve Uruguay.

M.Opertti, à l’époque ministre des affaires étrangères de l’Ur uguay, a avoué devant le sénat

uruguayen que saisir la CARU du projet d’usine de pâte à papier et se conformer ainsi aux

exigences du statut reviendrait à «une renonciati on à des compétences que le Gouvernement de la

République n’est pas disposé à effectuer» 1. La raison? Elle est fort simple. MmePetrocelli,

présidente de la délégation uruguayenne à la CARU, l’a donnée lorsqu’elle a expliqué que, toujours

devant le sénat uruguayen, selon elle, si l’Urugua y avait respecté ses obligations internationales et

18
saisi la CARU du projet, «[o]n n’aurait pas fait les ouvrages» . On ne peut guère le dire plus

16
RA, p. 9, par. 0.7.
17
MA, annexes, livre VII, annexe 4, p. 74. Pour la traduction française, v. RA, par. 1.73.
18Sénat de la République orientale de l’Uruguay, commission de l’environnement, séance du 12 décembre 2005.
Exposé des délégués uruguayens à la CARU, MA, annexes, livre VII, annexe 5. - 21 -

clairement. A aucun moment, l’Uruguay n’a pu, n’a su ou n’a voulu s’écarter de la voie unilatérale

choisie pour revenir dans le droit chemin du r espect des obligations du statut de1975 et pour

réengager la coopération avec l’Argentine sur cette base. Toutes ses propositions ont été faites

dans le seul but d’imposer à l’Argentine la consécration des faits illicites que sont l’autorisation, la

construction et la mise en service de la plus grande usine jamais implantée sur le fleuve Uruguay,

19
en violation flagrante du statut de1975 et à l’emplacement unilatéralement choisi . C’est ça, la

vérité.

19. Malgré les efforts et les demandes répétées de la part de l’Argentine, l’Uruguay n’a à ce

jour ni su ni voulu justifier le «choix» de l’empl acement de l’usine Botnia. L’emplacement a, en

réalité, été choisi par le seul investisseur ⎯ Botnia ⎯ et l’Uruguay s’est borné à accepter ce

«choix» contrairement à ses obligations conventionn elles. Cette question de la localisation de

l’usine Botnia, cruciale pour l’installation d’un co mplexe industriel de cette envergure, n’a jamais

été analysée convenablement 20 et l’Uruguay a toujours refusé de donner des explications sur le

choix de l’emplacement lors des négociations.

20. Et pour cause, Messieurs les juges : ce «choix» ⎯ si on peut oser le terme ⎯ est tombé

sur le pire endroit imaginable pour l’installation d’ une usine de pâte à papier par nature polluante,

dangereuse pour l’environnement et d’une capacité de production phénoménale ⎯ un million de

tonnes de pâte à papier par an. A ce jour , l’Argentine ne comprend toujours pas pourquoi

l’Uruguay a entériné le choix de cet emplacement ⎯ choix fait par l’investisseur pour des raisons

uniquement économiques. C’est la mauvaise usine au mauvais endroit. L’usine Botnia poursuit sa

production au moment où je vous parle dans une des régions les plus peuplées sur les rives du

fleuve Uruguay, utilisée pour la pêche, les loisirs et le tourisme. Dans les environs directs de

l’usine se trouvent par ailleurs des sites qui doivent être protégés conformément à la convention

Ramsar. Est-ce un emplacement approprié pour l’ installation d’une usine telle que Botnia?

Certainement pas! Pourtant, l’usine fonctionne et décharge, jour après jour, d’énormes quantités

de polluants dans l’eau et dans l’air à cet endroit.

19
PV CARU 08/07, p. 3207-3208, RA, annexes, livre II, annexe 19.
20MA, p. 225-226, par. 5.65-5.67. Voir aussi ibid., annexes, livre V, annexe 9, p. 18. - 22 -

21. Cette question du choix de l’emplacemen t de Botnia prouve que l’Uruguay a violé les

obligations procédurales et substantielles imposées par le statut de 1975. Il n’a pas fourni toutes les

informations nécessaires à la CARU et à l’Argentin e, à travers la commission, et n’a pas pris les

mesures nécessaires pour prévenir toute pollution du fleuve. Aujourd’hui, nous ne parlons pas d’un

simple risque de pollution ou d’un risque de pr éjudice sensible. Non, Messieurs de la Cour,

aujourd’hui nous savons que l’usine Botnia pollu e, qu’elle n’emploie p as la meilleure technologie

disponible, qu’elle ne serait certainement pas autoris ée en Europe, que le site choisi est totalement

inapproprié et que l’écosystème est incapable de supporter la pollution causée par cette usine.

[Projection n° 1 : photographie de l’usine Botnia.]

En effet, aujourd’hui nous avons la preuve que l’usine pollue le fleuve. Des dommages

importants ont malheureusement déjà été constatés par la population et par le monitoring argentin,

comme les rapports scientifiques soumis à la Cour le 30 juin dernier le montrent.

22. Dès sa mise en service, l’impact de l’usin e sur l’écosystème s’est fait sentir. Nombreux

21
ont été les épisodes de dysfonctionnements, et même d’explosions à l’intérieur de l’usine . Sur le

fleuve en face de l’usine, une floraison impor tante d’algues toxiques d’une envergure jamais

constatée à cet endroit est apparue et s’est déve loppée jusqu’à 25 kilomètres en amont de l’usine 22.

23
D’ores et déjà, on peut constater l’impact de l’usine sur la faune et la flore du fleuve et les

polluants commencent à s’accumuler dans les sédiments 24. Nos experts vous en diront plus cette

semaine.

23. A plusieurs reprises, et pas plus tard que la semaine dernière, l’usine a émis des odeurs

insupportables renouvelant l’inquiétude et la peur des habitants de la région qui craignent pour leur

santé.

[Fin de la projection n°1 et projection n° 2: manifestation des habitants de la région,

6 septembre 2009.]

21New Documents submitted by the Argentina, vol. II, Press Articles.
22
Ibid., vol. I, chap. 3 et 4 ; et ibid., vol. II, Press Articles.
23Ibid., vol. I, chap. 4 et 5.

24Ibid., vol. I, chap. 3. - 23 -

Il y a une semaine, des dizaines de milliers d’entre eux ont massivement manifesté contre l’usine 25.

Pour vous faire comprendre leurs sentiments et le urs réactions, nous avions envisagé de vous faire

sentir l’odeur que le sulfure d’hydrogène provoque dans la ville de Gualeguaychú et dans la station

balnéaire de Ñandubaysal. Nous y avons renon cé pour ne pas troubler le bon déroulement de

l’audience. Mais, Messieurs les juges, vous avez une certaine idée de cette odeur : cela sent l’Œuf

pourri. C’est cette odeur, très forte et nauséabonde , qui est produite par les quantités de sulfure

d’hydrogène émises par Botnia, qui détériore la qualité de vie et la santé des populations riveraines.

24. Aujourd’hui, la population de la rive arge ntine qui n’a pas été consultée par l’Uruguay

comme elle aurait dû l’être et qui n’a jamais appr ouvé la construction de cette gigantesque usine à

l’emplacement actuel souffre de sa présence.

[Fin de la projection n° 2 et projection n° 3 : photographie de l’usine Botnia.]

Elle se trouve confrontée au spectacle dantesque de l’usine sur l’autre côté du fleuve, à des

floraisons d’algues toxiques et à des odeurs écŒuran tes. Et c’est seulement la face perceptible de

la pollution qui est en train de causer, lentem ent mais sûrement, des dommages irréversibles à

l’écosystème du fleuve.

25. Les préjudices ⎯ déjà graves ⎯ qui ont d’ores et déjà été causés au fleuve et à ses zones

d’influence et que nous avons pu constater à ce j our, Monsieur le président , ne sont qu’un début.

Comme le professeurWheater l’expliquera, ces premiers dommages ne sont que les signes des

dommages et des bouleversements que l’usine va causer à terme à l’écosystème. Je vous rappelle

que cette usine est construite pour une durée d’opér ation de quarante ans. Si on peut croire aux

26
données fournies par Botnia elle-même , l’usine a versé, en seulement 20 mois d’activité, pas

moins de 44millions de mètres cubes d’effluents dans le fleu ve à un endroit où ce dernier se

comporte souvent comme un lac. Messieurs les juges, c’est comme si on jetait dans un lac les

effluents d’une ville de 350000 habitants ⎯et cela pendant quarante ans. Il ne s’agit pas

d’effluents d’une usine d’eau minérale, mais des dé chets d’une usine de pâte à papier comprenant,

par nature, des substances dangereuses pour l’e nvironnement. Les experts argentins ont même

25«Masiva marcha contra Botnia», Clarín, 7septembre2009; «Vecinos de Gualeguaychú marcharon contra

Botnia», El Cronista Comercial, 7 september 2009, «La hora de La Haya», Página 12, 7 septembre 2009 (disponible sur
http://www.mrecic.gov.ar/publicdocuments/).
26Botnia, Annual Report 2008, http://www.botnia.com/en/binary.asp?path=204,210,380,2822,2823. - 24 -

constaté la présence de substances hautement toxiqu es et largement interdites. Ils reviendront sur

ces questions plus en détail.

[Fin de la projection n° 3.]

26. Monsieur le président, Messieurs de la Cour, vous pensez peut-être que cette affaire est

très compliquée parce que les Parties ont soumis beaucoup de documents sc ientifiques. Mais ce

n’est pas parce qu’une affaire concerne l’enviro nnement et nécessite à ce titre l’expertise de

scientifiques qu’elle est nécessairement compliquée. Notre affaire ne l’est pas. L’Argentine a saisi

la Cour parce qu’elle considère que l’Uruguay n’a pas respecté ses obligations découlant du statut

de1975, et nous avons apporté la preuve des vi olations des obligations tant procédurales que

substantielles. Pendant les plaidoiries de cette semaine, nos conseils vont approfondir ces

questions.

27. Vous avez dit en 2006, et permettez-moi de citer la première ordonnance en indication de

mesures conservatoires :

«la construction des usines sur le site actue l ne peut être réputée constituer un fait
accompli car, ainsi que [la Cour] a déjà été amenée à le souligner, «s’il est établi que

la construction d’ouvrages comporte une atte inte à un droit, on ne peut ni ne doit
exclure à priori la possibilité d’une décision judiciaire ordonnant soit de cesser les
travaux soit de modifier ou démanteler les ouvrages»» ( Usines de pâte à papier sur le
fleuve Uruguay (Argentine c.Uruguay), mesures conservatoires, ordonnance du

13 juillet 2006, C.I.J. Recueil 2006, p.133, par. 78 (citant Passage par le Grand-Belt
(Finlande c.Danemark), mesures con servatoires, ordonnance du 29juillet1991,
C.I.J. Recueil 1991, p. 19, par. 31)).

La construction de l’usine Botnia porte gravement atteinte aux droits dont dispose l’Argentine en

vertu du statut de1975 et entraîne des conséquences lourdes. Ma is, comme l’un des conseils de

l’Uruguay l’a affirmé en 2006, «[i]f the Court, at the conclusion of the merits phase, were to order

27
the plants closed, or dismantled, Uruguay would have to live with that result» . La Cour en a pris

acte dans son ordonnance du 13 juillet 2006 :

«l’Uruguay a encore souligné que…la décision de poursuivre les travaux et de
prendre ainsi le risque de devoir démanteler les usines en cas de décision défavorable
de la Cour relevait de sa seule responsabilité» ( Usines de pâte à papier sur le fleuve

Uruguay (Argentine c U. ruguay), m esures conservatoires, ordonnance du
13 juillet 2006, C.I.J. Recueil 2006, p. 125, par. 47).

*

27
CR 2006/47, p. 50, par. 26 (Reichler). - 25 -

28. Monsieur le président, Messieurs les j uges, au cours de ces audiences, l’Argentine

établira de façon approfondie le bien-fondé de ces demandes. Permettez-moi, Monsieur le

président, de vous présenter brièvement l’équipe qu i aura la responsabilité de cette tâche. J’ai

l’honneur d’être accompagnée co mme coagents par LL.EE.Hor acioBasabe, ancien conseiller

juridique du ministère des affaires étrangères et membre de la Cour permanente d’arbitrage, et

SantosGoñiMarenco, ambassadeur de l’Argentin e aux Pays-Bas. Je suis également heureuse de

vous signaler la présence du secrétaire d’Etat à l’e nvironnement et au développement durable de la

République argentine, M. Homero Bibiloni. N ous bénéficions de l’assistance d’avocats renommés

et de l’appui d’experts juridiques et scientifiques.

29. Conformément à la pratique nous ne lirons pas les références des citations faites dans nos

plaidoiries. Nous serions reconnaissants à Mme le greffier adjoint de bien vouloir les rétablir dans

les comptes rendus des audiences.

30. Avant de démontrer, à partir de demain, plus en détail les violations procédurales et

substantielles du statut du fleuve Uruguay de1975, commises par la République orientale de

l’Uruguay, et les conséquences qui en découlent, le professeurPellet va, après cette présentation,

préciser l’objet du différend et la compétence de la Cour. Il sera suivi par le professeur Sands qui

fournira de plus amples expli cations concernant la vulnérabilité de l’environnement dans lequel

Botnia émet tous les jours des quantités cons idérables de polluants. Le professeurWheater

continuera la présentation d’aujourd’ hui en démontrant que les usines de pâte à papier en général,

et Botnia en particulier, sont des industries polluantes et dangereuses pour l’environnement d’un

fleuve. A la fin de cette matinée, le professeur Bo isson de Chazournes présentera le statut de 1975

et les règles internationales applicables dans le cadre du présent différend.

31. Monsieur le président, Messieurs de la C our, je vous remercie de votre attention et je

vous prie, Monsieur le préside nt, de bien vouloir donner la parole au professeurPellet pour

continuer la présentation de l’Argentine. Merci beaucoup.

Le VICE-PRESIDENT, faisant fonc tion de préside:nJte remercie

S. Exc. Mme l’ambassadeur SusanaRuiz Cerutti de sa déclarati on introductive d’agent de la - 26 -

République argentine. Je donne maintenant la paro le à M.le professeurAlainPellet, conseil et

avocat de la Partie demanderesse. Vous avez la parole, Monsieur le professeur.

M. PELLET : Merci beaucoup, Monsieur le président.

II. L’OBJET DU DIFFÉREND ET LA COMPÉTENCE DE LA C OUR

1. Monsieur le président, messieurs les jug es, c’est toujours un privilège de se présenter

devant vous et j’en suis toujours aussi conscient.

Monsieur le président, il peut paraître curieux, à ce stade, d’être obligé de revenir sur l’objet

du différend. C’est cependant nécessaire car l’Ur uguay persiste à le limiter à l’un de ses

aspects ⎯important certes, mais pas exclusif: «The single largest issue» [«La question la plus

importante»] they write in the Rejoinder, «still dividing the Parties is the question of whether or not

the Botnia plant is causing or will cause significant harm to the Uruguay River» 28.

2. Cette manière de présenter les choses est fort trompeuse et correspond à la tactique

constante de la Partie uruguayenne, qui tente d’imposer à l’Argentine ⎯ et à la Cour, sa politique

du fait accompli afin d’échapper le plus largement possible aux conséquences de ses violations.

D’ailleurs, la phrase qui suit immédiatement cette définition erronée de la portée du différend ne

laisse aucun doute sur l’objectif que poursuit l’Uruguay : « The grounds for dispute, however, have

all but disappeared in the time si nce Argentina submitted its Reply »29: l’usine Botnia est

construite; elle ne cause auc un dommage au fleuve Uruguay et elle n’en causera pas, donc il

n’existe pas de différend réel entre les Parties. En core est-ce là, de la part de nos adversaires et

amis, une façon «généreuse» de présenter les cho ses car, dans un autre passage de la duplique, ils

vont jusqu’à affirmer, avec encore plus d’aplomb, que « the Court need not be concerned about the

30
possibility that the plant might cause harm in the future » . C’est évidemment le contraire qui est

vrai, Monsieur le président: il est fondamental que la Cour apprécie les dommages et évalue les

risques que l’usine Botnia fait courir au fleuve et à ses zones d’influence. Il n’en reste pas moins

qu’il ne s’agit là que d’un élément du différend plus vaste dont l’Argentine a saisi la Cour.

28DU, p. 3, par. 1.2.
29
Ibid.
30DU, p. 397, par. 7.24. - 27 -

3. En réalité, l’objet du différend a été décrit ainsi par l’Etat demandeur dans sa requête :

«Le différend porte sur la violation pa r l’Uruguay des obligations qui découlent

du statut du fleuve Uruguay, traité signé par l’Argentine et l’Uruguay à Salto
(Uruguay) le 26février1975 et entré en vigueur le 18septembre1976 (ci-après le
«statut de1975»), au sujet de l’autorisa tion de construction, la construction et

l’éventuelle mise en service de deux usines de pâte à papier sur le fleuve Uruguay.
Ceci, tout en prenant particulièrement en compte les effets des dites activités sur la
qualité des eaux du fleuve Uruguay et sa zone d’influence.» 31

Conformément à la jurisprudence de la Cour, «c’ est la requête qui indique l’objet du différend»

(Administration du princevonPless (exception préliminaire), ordonnance du 4février1933 ,

C.P.J.I. série A/B n° 52, p. 11) 32.

4. C’est dire, Monsieur le président, que :

1. la présente affaire porte sur l’ensemble de s violations du statut du fleuve Uruguay de1975

attribuables à la Partie uruguayenne, violations qui incluent, sans s’y limiter, le non-respect du

chapitre II du statut, dont je précise qu’il se trouve à l’onglet 1 de vos dossiers, dont nous nous

servirons beaucoup ; et que

2 leslimitations ratione materiae, ratione loci et ratione temporis que la Partie uruguayenne tente

d’apporter à l’objet du différend soumis à la Cour ne sauraient abuser.

Je reviendrai brièvement sur chacune de ces deux propositions.

1. La présente affaire porte sur l’ensemble des violations par l’Uruguay
du statut de 1975

5. Comme le précise expressément la requête de l’Argentine, la compétence de la Cour est

33
fondée sur l’article60 du statut de1975 , l’article60. Aux term es de cette disposition ⎯ seule

base de compétence invoquée en l’espèce par l’Argentine, « [t]out différend concernant

l’interprétation ou l’application du traité et du statut qui ne pourrait être réglé par négociation

directe peut être soumis par l’une ou l’autre des Parties à la Cour internationale de Justice.»

« 6. Tout différend…», ceci inclut assurément la question de savoir si la construction et la

mise en service de l’usine Orion par la société Botnia, ⎯ usine que l’on désigne en général comme

31
Requête introductive d’instance, 4 mai 2006, par. 2.
32Voir aussi Certaines terres à phosphates à Nauru (Nauru c. Australie), exceptions préliminaires, arrêt,

C.I.J. Recueil 1992, p.267, par.69 et Certaines questions concernant l’entraide judiciaire en matière pénale (Djibouti
c. France), arrêt du 4 juin 2008, par. 67.
33Requête, par. 3. - 28 -

étant l’usineBotnia ⎯ affectent la navigation, le régime du fleuve ou la qualité de ses eaux.

Toutefois, à ce stade, la question n’est plus de sa voir si cette construction et cette mise en service

peuvent être autorisées ⎯ceci eût été le cas si la Cour avait été saisie sur le fondement de

l’article 12 du statut, au cas où la procédure envi sagée par les articles 7 à 11 aurait échoué et afin

de débloquer la situation; mais ce n’est pas ce qui s’est passé; c’est sur le fondement de

l’article60, et non de l’article12, que l’Argentin e a saisi la Cour; j’y reviendrai demain. Au

contraire, le refus de l’Uruguay de suivre cette procédure constitue précisément un premier

ensemble de faits internationalement illicites faisant l’objet de la requête argentine. Ces faits sont

mentionnés sous les lettres b) à d) du paragraphe24 de la requête, qui énumère les «moyens de

droit» invoqués par l’Etat demandeur ; ce sont les violations :

«b) [de] l’obligation d’informer préalabl ement la CARU et le Gouvernement de
l’Argentine au sujet de la construction de deux usines de pâte à papier sur la rive
gauche du fleuve Uruguay ;

c) [de] l’obligation de poursuivre les pro cédures prévues par le chapitreII du statut
de1975 en ce qui concerne la réalisation de «tous ouvrages suffisamment
importants pour affecter la navigation, le régime du fleuve ou la qualité des eaux» ;
[et de]

d) l’obligation de ne pas autoriser la construction des ouvrages projetés sans avoir
préalablement suivi la procédure prévue par le statut de 1975» 34

En tentant de placer l’Argentine et la Cour de céans devant le fait accompli, la Partie uruguayenne

a manqué à ses obligations en vertu du statut.

7. Mais ce sont là des violations ⎯ procédurales ⎯ distinctes de plusieurs autres même si

elles sont liées les unes aux autres, distinctes d’autres ⎯ qui sont, elles, substantielles, et qui sont

énumérées dans la requête et précisées dans les écr itures de l’Argentine ; il ne me paraît pas inutile

de les rappeler également. Il s’agit globalement a) de la violation de «l’obligation de prendre toute

mesure nécessaire à l’utilisation rationnelle et optimale du fleuve Uruguay», et, plus précisément,

des violations de :

«e) l’obligation de préserver le milieu aquatique et d’empêcher la pollution… ;

f) l’obligation de ne pas causer de dommag es environnementaux transfrontaliers sur
la rive opposée et les zones d’influence du fleuve ;

g) [de celle] de ne pas frustrer l’utilisation du fleuve à des fins licites ; et

34
Requête, p. 9, par. 24. - 29 -

h) [des] autres obligations découlant du droit international général, conventionnel et
coutumier, tant procédurales que de fond , nécessaires à l’application du statut
35
de 1975» .

8. Nous sommes loin, très loin, de la seule ques tion de savoir si la construction et la mise en

service de l’usineBotnia risquent de causer « un préjudice sensible à la navigation, au régime du

fleuve ou à la qualité de ses eaux» ⎯ question qui seule eût été susceptible d’être posée à la Cour

en vertu de l’article12 du statut, question qui c ontinue à se poser certes, mais dans le cadre,

différent et plus vaste, de l’article 60. Au surp lus, nous n’en sommes plus au seul stade du «risque

de causer» : les dommages sont d’ores et déjà avérés.

2. Les limitations ratione materiae, ratione loci et ratione temporis que la Partie uruguayenne
tente d’apporter à l’objet du différend

9. Monsieur le président, tous les moyens sont bons pour l’Uruguay afin de réduire à presque

rien l’objet du différend dont l’Argentine a saisi la Cour, tant ratione materiae, ratione loci et

ratione temporis que, j’allais dire, «ratione juris» si cela avait un sens généralement admis. Ce que

je veux dire par là, c’est que non contents de faire subir à l’objet du litige le traitement que les

Jivaros réservaient à la tête de leurs ennemis, nos amis de l’autre côté de la barre s’emploient à

minimiser l’ampleur des violations commises par l’Uruguay en définissant de manière abusivement

étroite les règles applicables ⎯ce qui est un moyen bien commode pour minorer le nombre et

l’importance des manquements commis par (ou attr ibuables à) l’Uruguay. Je ne m’y appesantis

pas: le professeur Laurence Boisson de Chazournes reviendra à la fin de la matinée sur la

définition et sur les contours exacts du droit applicable en la présente affaire.

10. De même, en s’efforçant de limiter l’obj et du différend à une violation procédurale,

qu’ils présentent ⎯d’ailleurs à tort ⎯ comme anodine et comme étant «couverte» par les

développements ultérieurs, nos contradicteurs défo rment considérablement l’enjeu du litige qui est

d’abord et avant tout de préserver l’intégralité du statut de 1975. Celui-ci vise, selon les termes de

l’articlepremier, à réaliser «l’utilisation rationnelle et optimale du fleuve Uruguay, dans le strict

respect des droits et obligations découlant des traités et autres engagements internationaux en

vigueur à l’égard de l’une ou l’autre des Parties» par le biais des mécanismes communs nécessaires

mis en place par le statut ⎯ à commencer par la commission administrative (la CARU). Tous les

35
Requête, p. 9-10, par. 24 ; les italiques sont de nous. - 30 -

actes et omissions visés par la requête et qui ne répondent pas à cette préoccupation constituent des

faits internationalement illicites, contraires au statut et entrant dès lors dans le cadre de votre

compétence.

11. Ratione loci, l’Uruguay voudrait limiter la compétence de la Cour «to the Uruguay River

itself… But the Court’s jurisdiction under Artic le60 does not extend to such concepts as air

pollution, noise pollution or «visual» pollution, since none of these three subjects is covered by the

statute» 3. C’est oublier que le statut impose aux Par ties des obligations de protection s’étendant

37
non seulement au fleuve, mais aussi à ses «zones d’influence» . Et l’article36, par exemple,

exclut sans aucun doute la conception étriquée de sa portée territoriale avancée par l’Uruguay :

«Les Parties coordonnent, par l’intermédiaire de la commission, les mesures

propres à éviter une modification de l’équilibre écologique et à contenir les fléaux et
autres facteurs nocifs sur le fleuve et dans ses zones d’influence».

Du reste, une «utilisation rationnelle et optimal e du fleuve» exclut évidemment toute activité

susceptible de modifier l’équilibre écologique et toute forme de pollution ⎯ fût-elle

«malodorante» ⎯ de l’air. Il s’agit de préserver l’écosystème du fleuve et de ses «zones

d’influence», ce qui recouvre divers éléments inte rdépendants, que l’on ne peut pas séparer et qui

rétroagissent les uns sur les autres. C’est la gestion intégrée des ressources du fleuve qui doit être

préservée, conformément aux directives de l’article 36 du statut de 1975.

12. Bien que l’Uruguay ne la remette pas ouvert ement en cause, il me faut également dire

quelques mots de la compétence de la Cour ratione temporis afin de cerner complètement l’objet

même du différend qui vous est soumis, Messieurs les juges.

13. La requête a été déposée au Greffe le 4mai2006. Depuis lors, comme l’a rappellé

l’agent de l’Argentine tout à l’heure, de nombreux développemen ts sont intervenus ⎯ parmi

lesquels on peut citer :

1.les approbations complémentaires par l’Uruguay de certaines opérations liées au

38
fonctionnement de l’usine Botnia (concernant notamment le traitement des eaux usées) ;

36
DU, p. 8, par. 1.12.
37
Cf. les articles 13 et 36. Voir mémoire de l’Argentine (MA), p. 77, par. 3.28 ; p. 80-84, par. 3.39-3.48 ; réplique
de l’Argentine (RA), p. 17, par. 0.17 ; p. 27, par. 1.8 ; p. 28, par. 1.14 ; p. 56-57, par. 1.57 ; p. 104, par. 1.113.
38Voir DU, p. 188, par. 3.112. - 31 -

2. l’approbation de la construction du terminal de fret de Nueva Palmira (dont l’Uruguay affirme à

tort qu’il a fait l’objet d’une au torisation antérieure à la requête 39 alors qu’en réalité la

procédure a été reprise ab initio) et sa mise en service en août 2007 ;

3. l’achèvement de la construction et la mise en service de l’usine Botnia (le 9 novembre 2007) et

les nombreux incidents de fonctionnement de celle-ci intervenus depuis lors ; et

4. la décision, prise en septembre 2006 par l’entrep rise, de relocaliser le projet ENCE, à un autre

emplacement probablement situé en dehors du champ d’application du statut de 1975.

14. Tous ces faits nouveaux présentent, à des titres divers, une grande importance aux fins de

la présente affaire :

⎯ tous contribuent à la compréhension de ce dossier qui s’étale dans le temps, et confirment la

volonté délibérée de l’Uruguay d’agir en dehors du cadre du statut de 1975 ;

⎯ les trois premiers (autorisations supplémentair es, terminal de Nueva Palmira et achèvement et

mise en service de Botnia) constituent, en eux-mêmes, des manque ments aux obligations

statutaires, mais ils sont si intimemen t liés aux faits décrits dans la requête ⎯ dont ils ne sont

pas détachables ⎯ qu’ils relèvent sans aucun doute pleine ment de la compétence de la Cour.

Loin de transformer l’affaire «en un autre di fférend dont le caractère ne serait pas le même»

(Société commerciale de Belgique, arrêt, 1939, C.P.J.I.série A/B n o 78, p.173) 40, ils en

constituent le prolongement et entrent pleinement dans les prévisions de la requête.

15. L’abandon de la construction de l’us ine ENCE à proximité de Fray Bentos par

l’entreprise appelle de brèves observations compléme ntaires. Assurément, l’Argentine a tout lieu

de s’en réjouir ⎯ mais cette initiative postérieure à la requê te ne l’a pas conduite à renoncer à ses

conclusions concernant cet aspect de l’affaire ⎯ pour plusieurs raisons :

⎯ en premier lieu, et c’est essentiel, en l’absence de toute reconnaissance de ses torts par la Partie

uruguayenne, les violations de la procédure du chapitreII du statut et de plusieurs règles

39
DU, p. 53-54, par. 2.43.
40
Voir aussi Activités militaires et paramilitair es au Nicaragua et contre celui-ci (Nicaragua c.Etats-Unis
d’Amérique), compétence et recevabilité, arrêt, C.I.J. Recueil 1984 , p. 427, par. 80, Compétence en matière de pêcheries
(Espagne c. Canada), compétence de la Cour, arrêt, C.I.J. Recueil 1998, p. 447, par. 29, Certaines terres à phosphates à
Nauru (Nauru c.Australie), exceptions pr éliminaires, arrêt, C.I.J.Recueil1992 , p. 266-2677, par. 67-70, Plates-formes
pétrolières (République islamique d ’Iran c.Etats-Unis d’Amérique), fond, arrêt, C.I. J. Recueil 2003, p. 213-214,
par. 117-118 ou Différend territorial et maritime entre le Nicaragua et le Honduras dans la mer des Caraïbes
(Nicaragua c. Honduras), arrêt, C.I.J. Recueil 2007, p. 695, par. 108. Voir aussi arrêt du 13 juillet 2009, Différend relatif
à des droits de navigation et des droits connexes (Costa Rica c. Nicaragua), par. 137. - 32 -

fondamentales du droit internati onal général applicables en l’espèce, qui se sont traduites par

l’autorisation de construire l’usine ⎯ je parle de l’usine ENCE; il appartient à la Cour d’en

constater la réalité, de constate r que ces violations demeurent et d’en ordonner la réparation

sous une forme appropriée ;

⎯ en deuxième lieu, le seul fait que l’Uruguay ait pu concevoir d’autoriser la construction de

deux énormes usines de pâte à papier sur cette portion particulièrement vulnérable du fleuve

laisse planer un doute ⎯et c’est une litote ⎯ sur l’attachement à la protection de

l’environnement dont cet Etat se prévaut ;

⎯ en outre et en troisième lieu, le contraste entre les violations par l’Uruguay du statut de 1975

lorsqu’il a autorisé la construction d’ENCE aux environs immédiats de Fray Bentos et son

attitude plus respectueuse (dans ses grandes lignes en tout cas) du traité du Rio de la Plata du

19 novembre 1973 fournissent également matière à réflexion.

En tout état de cause, la délocalisation d’ENCE n’atténue en rien les responsabilités de l’Uruguay

résultant de la construction et du fonctionnement de Botnia.

16. Monsieur le président, Messieurs les juges, l’enjeu de la présente affaire n’est pas limité

à déterminer si la construction de l’usine Botnia est susceptible de causer un préjudice sensible à la

navigation, au régime du fleuve ou à la qualité de ses eaux. Face à la tentative de l’Uruguay de

placer l’Argentine (et la Cour) devant le fait accomp li, votre mission est bien plus large et consiste

à constater les nombreuses violations du statut de 1975 attribuables à l’Uruguay et les préjudices

qui en résultent pour l’Argentine, et à en tirer les conséquences qui s’imposent au plan de la

responsabilité: la Cour, nous en sommes convaincu s, ne saurait donner une prime à l’illicéité en

tolérant le maintien de l’usine Botnia à son emplacement actuel.

17. Comme vous l’avez souligné dans votre ordonnance du 13 juillet 2006,

«la présente affaire met en évidence l’importa nce d’assurer la protection, sur le plan

de l’environnement, des ressources naturelles partagées tout en permettant un
développement économique durable ; qu’il conv ient notamment de garder à l’esprit la
dépendance des Parties vis-à-vis de la qua lité des eaux du fleuve Uruguay en tant que
celui-ci constitue pour elles une source de re venus et de développement économique ;

que, dans cette perspective, il doit être tenu compte de la nécessité de garantir la - 33 -

protection continue de l’environnement du fl euve ainsi que le droit au développement
41
économique des Etats riverains» .

18. C’est, en soi, un enjeu considérable qui, pa r lui-même, illustre le caractère exemplaire de

42
cette affaire. Mais en outre, comme l’ Argentine l’a souligné dans ses écritures , l’objet de la

requête est véritablement le «sauve tage» du statut du fleuve Uruguay, dont le comportement de la

Partie adverse compromet fortement la survie même. La Partie uruguayenne s’est dispensée de

suivre les procédures instituées par le chapitr eII. Plus généralement, elle a négligé

systématiquement de recourir aux «mécanismes communs» institués par le statut, «nécessaires à

l’utilisation rationnelle et optimale du fleuve Ur uguay, dans le strict respect des droits et

obligations découlant des traités et autres engagements internationaux en vigueur à l’égard de l’une

ou l’autre des Parties» 4. L’Uruguay a d’ores et déjà porté atteinte à l’environnement du fleuve et à

ses zones d’influence ⎯ et c’est une différence avec la manière dont se présentait l’affaire du

Projet Gabčíkovo-Nagymaros. Il fait subir au fleuve Uruguay d es dommages, nés et actuels par le

déversement de substances toxiques (autre différence avec l’affaire de 1997), et courir des dangers

encore plus graves pour l’avenir. Ce faisant, l’Uruguay fait fi d’un traité exemplaire qui, pour

avoir été conclu il y a trente-qua tre ans, n’en constitue pas moins ⎯n’en devrait pas moins

constituer ⎯ un instrument de gestion irremplaçable de la ressource naturelle partagée qu’est ce

fleuve international dans la double acception du terme (consécutive et frontalière). Et ceci

constitue d’ailleurs une autr e différence avec l’affaire Gabčíkovo-Nagymaros puisque le traité de

1977 entre la Hongrie et la Tchécoslovaquie autori sait expressément la construction des ouvrages

contestés, alors que le statut de 1975 les soumet au contraire à des conditions très strictes.

19. C’est de tout cela, Monsieur le présiden t, et pas seulement des problèmes techniques et

procéduraux ⎯ même s’ils ont, les uns et les autres leur importance ⎯, qu’il va être question dans

les prochains jours.

20. Je vous remercie de l’attention que vous av ez bien voulu prêter, Messieurs les juges, à la

présentation de ce cadre juridique général et je vous prie, Monsieur le président, de bien vouloir

41
Usines de pâte à papier sur le fleuve Uruguay (Argentine c. Uruguay), mesures conservatoires, ordonnance du
13 juillet 2006, C.I.J. Recueil 2006, p. 133, par. 80.
42
Voir note RA, p. 14, par. 0.13.
43Article 1. - 34 -

donner la parole au professeur Philippe Sands, qui va planter le décor géographique et écologique

du différend.

Le VICE-PRESIDENT, faisant fonction de président: Je vous remercie, Monsieur le

professeur, de votre plaidoirie. I now give the floor to Professor Philippe Sands QC. You have the

floor, Sir.

SMAr.DS:

III. THE SENSITIVITY OF THE RECEIVING ENVIRONMENT

Introduction

1. Mr.President, Members of the Court, it is an honour for me to appear before this Court

and to do so on behalf of Argentina. I will address now the character and sensitivity of the

receiving environment of the River Uruguay, into which the pollution from the Botnia plant is

being directly deposited. Argentina would like to be absolutely clear on one point: it has no

a priori objection to a pulp mill as such and would almost certainly not have objected if the plant

were located in a place where liquid effluents would be easily diluted and dispersed and air

emissions would not interfere with daily life on Argentine territory. Argentina objects to the siting

and operation of this plant at this location, since it is these waters and this environment that cannot

cope with this kind of pollution at these levels . Uruguay has failed to take account of the

requirements of the 1975 Statute which impose very specific obligations and it has failed to take

account of the special character of this river at this place, as well as the interests of the Argentine

population.

2. Understanding the receiving environment is of fundamental importance to this case, and it

is a prerequisite to the prevention of pollution as required by the Statute. You cannot meet your

obligation to protect the river’s environment if you do not know its characteristics, or its capacity to

receive certain pollutants in very high quantities. Uruguay did not address these issues properly

before implementing the project and it has still not done so. Rather, Uruguay began by taking a

decision to locate a plant here using the product of its long-ago planned eucalyptus forests ⎯ and

only then, afterwards, did it begin the process of considering the quality of the receiving - 35 -

environment . Uruguay inverted the required decision-making process. If it had first considered

the receiving environment and had done so properl y, it could not possibly have authorized the

location of the Botnia plant near Fray Bentos. And I am going to explain why. Key features of the

Uruguay river have been systematically disregarded or misrepresented or misunderstood by

Uruguay. Mr. President, we say this is a grave failure.

3. For this is a sensitive and unstable site that is unsuitable for the plant and which was

already, in 2005, at the limits of its environmen tal capacities. It is environmentally sensitive for

two reasons: first, the characteristics and the quality of the Uruguay river at that precise location;

and, second, because of the high levels of pollutant s that were already present in the river

including, in particular, very high nutrient loads.

4. Let us begin with a brief overview. You w ill see on the screen [plate 1] that the source of

the Uruguay river is in Brazil. It flows from north to south through Brazil for about 1,000km

before it reaches Argentina. From there it serv es as the boundary between Argentina and Brazil,

until it reaches Uruguay, and then it reaches the Rio de La Plata. On your screen you can now see

the general location of the area that is at the heart of this dispute, showing the town of Fray Bentos

on the Uruguayan side, on the right, and Gualeguaychu on the Argentinian side, on the left, and

then the location of the Botnia plant right near Fray Bentos. This area is located about 100km

from the mouth of the river. [Plate 1.]

5. [Plate2 on, showing the area in dispute ⎯satellite image as at figure1 of

Colombo Report, p. 8, June 2009.] Now on your scr een you will see in a little more detail the area

in question. Towards the right hand side is the place where the ENCE plant was due to be located

until that company wisely decided to remove it. Moving downstream you reach the international

bridge that crosses the river and links Argentin a and Uruguay, and then continuing downstream

you can see on the Uruguayan side the Botnia plant and the town of Fray Bentos. On the Argentine

side is the town of Gualeyguaychu, and the resort beach of Nandubaysal, located on Nandubaysal

Bay. Then in red you can see the main river cha nnel running through this section of the river and

4See Cumulative Impact Study: Uruguay Pulp Mills, September 2006 (Final CIS) , CMU, Anns. Vol.VIII,
Ann. 173, Sec. 2.1, p. 2.2, and Sec. 4.2, p. 4.27; also MA, para. 7.62 (on the issue of Uruguay’s failure to address effects
of tree plantations on water balance). See also Review of the IFC Final Cumulative Impacts Study for Botnia’s Uruguay

Pulp Mill, Howard Wheater and Neil McIntyre (4 Dec. 2006) MA, Anns., Vol. V, Ann. 5, p. 228. - 36 -

then in green, just at the bottom, right by the plant, the location of its discharge pipe. It is through

this pipe that is discharged on a continuous daily basis the liquid effluent that includes pollutants,

nutrients in huge quantities, 15 tons a year of phosph orus, 80 tons a year of nitrates. Eighty tons is

the weight of three unladen Boeing 737 planes, to give you a sense. [Plate 2 off.]

6. Against this geographic background, let us now consider the inherent characteristics of the

Uruguay river at this location. Having regard to the written pleadings and the issues that arise, we

invite the Court of focus on four key factors: first, the present and future flow of the river; second,

the quality of the water; third, the biodiversity in the area; and fourth, the particular atmospheric

conditions at that location.

1. River flow

7. Let me begin with the issue of river flow, which is perhaps the most significant factor in

this case. The ability of a body of receiving waters to cope with very large quantities of pollutants

depends on its ability to disperse those pollutants, an d dispersal, in turn, is largely determined by

the flow of the river, including its direction and its velocity, or speed. Discharging nutrients and

other pollutants into an ocean would obviously cause far less probl ems, because an ocean has the

capacity to disperse pollutants quickly and over very great distances. A river is different from the

sea, and all the more so where the river suffers regularly and persistently from low flow ⎯ as is the

case here ⎯ and, more remarkably, something known as reverse flow, where the flow of the

river ⎯ and I appreciate this is counter-intuitive ⎯ is upstream, not downstream, as well as a

peculiar characteristic of this river ⎯ that there is sometimes, for extended periods, no flow at all.

The River Uruguay at this location assumes the characteristics of a lake.

8. There is no dispute between the Parties that the rate and the direction of flow are key

factors in determining environmental impact. Uruguay has now finally accepted this 45. What is

clear is that Uruguay did not properly consider the issues of flow and these characteristics of the

River Uruguay before it proceeded to authorize the plant.

45
CMU, para. 6.90 (“effluent mixing and dispersion will be dictated by river flow”). - 37 -

9. Let us look firstly at low flow, one of the defining characteristics of the River Uruguay at

46
this location, which significantly diminishes its ability to dilute the effluent . If low flow is

underestimated, the likely impact of the plant’s di scharges will be wrong, obviously. You can find

the information on the rate of flow provided in our Reply 47. It now seems that neither Botnia nor

Uruguay, nor anyone on behalf of the proponents of this project, ever took actual measurements of

48
flow at or near the discharge site before they selected it . As a result, it turns out that Uruguay’s

calculations were unreliable and wrong ⎯ and majorly wrong. For example, Uruguay has relied

on an estimated low flow rate of 500m 3 a second ⎯ that is what is used in the final cumulative

49
impact study . Actual monitoring ⎯ not theory, not speculation ⎯ shows that the more accurate

3 50
rate is about 440m a second, that is 15 per cent less, during the summer months . Fifteen per cent

is not immaterial, as Uruguay claims 51: what it means is that the capacity of the river to wash away

the pollutants is reduced by 15per cent, or th ereabouts, during those summer months, and that

52
means that there will be an increase in the levels of concentration of the pollutants .

10. This is not the only problem, or indeed is it the most serious, although it is quite easy to

understand: as I just said, the River Uruguay is also subject to a curious phenomenon known as

reverse flow. Uruguay has grossly underestimated this feature, seeking to present reverse flow as a

rare occurrence ⎯ just a few times a year 53. So, again, Argentina has done something that

Uruguay has failed to do: it has taken actual measurements of flow using a sophisticated current

meter that was deployed in the river from 26 June 2008 to 27 May 2009. The data that that gave

rise to was provided to the Court in full on 30 June last in the new documents and it shows that

during the 283 days on which the meter was deploy ed some level of reverse flow occurred on 170

4See Professor Howard Wheater, Dr. Neil McIntyre, Technical Commentary on the Counter-Memorial of
Uruguay in the Case Concerning Pulp Mills on the River Uruguay ” (“the Second Wheater Report”), RA, Anns., Vol. III,

Ann. 44, Sec. 3.43.
4RA, paras. 3.42-3.45. See also the Second Wheater Report, RA, Anns., Vol. III, Ann. 44, Sec. 3.9.

4See the Second Wheater Report, RA, Anns., Vol. III, Ann. 44, Sec. 3.9.

4CMU, para. 5.58.
50
See Assessment of the Fluvial Environment of the Propos ed Botnia Pulp Mill on Fleuve Uruguay at Fray
Bentos Uruguay, Latinoconsult S.A (20 November 2006) (“the Lati noconsult Report”), MA, Anns., Vol.V Ann.3,
pp. 18-57.

5CMU, para. 6.85.
52
RA, Anns., Vol. III, Ann. 44, Second Wheater Report, Sec. 4.3, response to CMU, p. 91, para. 6.85.
53
CMU, para. 5.58 and note infra citing Annex D to the Final CIS. - 38 -

of those days. This is more even than we had anticipated of some 80 days that we referred to in our

pleadings. These measurements also show something else that is very curious: it shows that the

54
river sometimes flows in both directions at the same time . Now this may seem surprising to you,

as it did to me when it was first explained: what this means is that while the surface of the river

flows downstream, beneath the surface the waters are flowing upstream, carrying the pollutants that

are at the lower end of the river upstream. So ther e is then a circular process, with those pollutants

then being carried back downstream where they meet the new discharges from the plant. Now, you

would never know this from any of the envir onmental assessments on which Uruguay or the

International Finance Corporation relied 55. The documents ⎯ all of them ⎯ simply ignored this

issue.

11. The Argentine monitoring data provides de tailed evidence based on actual, continuous

monitoring: the current meter measures what actually happens at the point where it is deployed on

56
the Argentine side . It measures speed and it measures dir ection, and it does so at ten different

depths of the river and it did so for about a year, and the findings are very striking 5. Let us begin

by looking at the flow in winter, when there is a lot more water. [Plate 3 on ⎯ Fig. 6 from p. 7 of

Raggio Report.] On the screen you will see the monitoring results for July 2008 ⎯ winter in

Argentina ⎯ the first complete month of winter after monitoring started. Now, on the vertical

scale on the left you can see the depths of the ri ver, from 0 m to 6 m below the surface where the

measurements occurred; on the horizontal scale at the bottom, you see from left to right the dates,

from 2 July to 30 July 2008. So this image shows direction of water and velocity of water for each

day in that month. Note also the different colours, which I am going to explain: red indicates fast

downstream flow; yellow indicates low downstream flow; white indicates the times when the

54
See RA, Sec.3.8, and Anns.Vol. III, A nn.43, Jorge Rabinovich, Luis Tournier, Scientific report to the
Argentina Ministry of Foreign Affairs with replies to Uruguay’s Counter-Memorial concerning environmental aspects of
the Botnia Pulp Mill near Fray Bentos, Uruguay (“the Rabinovich Report”), Ann. 4.
55
This phenomenon is not discussed in the Final CIS; s ee Secs.3.2.1 and 4.6.1-4.6. 3, CMU, Anns., Vol.VIII,
Ann. 173. Nor is it referred to in the CMU, see for example pa ras. 4.43, 4.56, 4.76 and 5.71, which refer to reverse flow
without mentioning this phenomenon.
56
See New Documents Submitted by Argentina, Vol.1 Scie ntific and Technical Report, 30 June 2009, Chap.2,
Report by Gabriel Raggio, Hydrodynamics, Contaminant Transport and River Morphology in the River Reach near
Botnia, Sec. 3.1, pp. 5-14.
57
For example, from table 1, it can be noted that during the period 9 February to 30 March 2009 some 24 per cent
of the measured velocities were reverse flows and only 1 per cent of the reverse flows had a higher speed than 50 cm per
second. Further, this table shows that 19per cent of al measured speeds are less thanthan 10 cm per second, thus
indicating the existence of quasi-stagnant conditions; ibid., pp. 12-13. - 39 -

water is stagnant; light blue indicates slow upstream flow or reverse flow; and dark blue indicates

times of fast upstream flow ⎯ fast reverse flow. From this fi gure, important features of the river

emerge, for example, on many days you can see that the river flows faster as you get close to the

surface ⎯ it is red on top, yellow on the bottom. On 10 July, for example, to a depth of 2 m, the

flow is above 70 cm per second ⎯ it is in red ⎯ but then as you go down below 2 m to 6 m, the

velocity drops to just 30 or 40 cm per second ⎯ that is in yellow. Then compare that to 13 July: to

a depth of 2m below the surface there is no flow at all, the water is basically stagnant, it is not

moving. Now look at 20 July: at the surface there is a strong reverse flow of about 70cm per

second upstream ⎯ that is the dark blue area at the top of the 20 July date, and as you go deeper

into the water you see the reverse flow continues, bu t at a slower rate of 15/20 cm per second. So

what this shows is that on that day ⎯ 20 July 2008 ⎯ the pollution that was discharged from

Botnia did not go downstream, it went upstream. [Plate 3 off.]

12. Now, that was winter when there was a lot of water. What happens in the summer, when

there was less water? [Plate 4 on ⎯ Fig. 13 from p. 10 of Raggio Report.] On the screen you can

see the corresponding chart for the days betw een 10 and 28 February 2009, and you will note

immediately the colours are very different: there is a lot more reverse flow, there is a lot more in

blue, and there is a lot more in white, showing much greater stagnation; much less in red and much

less in yellow. If you look at 11 and 12 Februa ry, for example, you will see that for two whole

days the river flowed in reverse at all levels, or it stagnated. In other words, for two whole days the

discharges from Botnia went into a lake: a still body of water. There was no downstream

dispersal. [Plate 4 off.]

13. Now, you can go through all of these the charts yourselves. We have provided them for

a full year of monitoring, something that Uruguay really should have done before it authorized in

2007, but apparently did not do th en and apparently has not done since. This is clear and

compelling evidence and it shows significant levels of reverse flow on an average of 23 per cent of

58
days each month across the year, that is, seven days a month . What does Uruguay say? Well,

Uruguay continues to rely on the September 2006 Ecometrix Report. [Plate5 on ⎯ extract from

58
Ibid., p. 12. - 40 -

Ecometrix Report of September 2006.] On the screen you can see what that report says: “On rare

occasions the flow can even reverse direction and travel upstream for short periods of time. These

flow reversals may occur a few times a year or less [a few times a year or less].” Did Ecometrix

monitor the flow over an extended period, or look at subsurface flow? Apparently not. Did

Uruguay? Apparently not. This is a gross erro r on flow of the Uruguay river; it underestimates

the occurrence of reverse flow and it overestim ates the capacity of the river to disperse its

pollutants. Uruguay has simply got its facts wrong. The review process carried out by the

International Finance Corporation did not pick up the errors and did not clear up this problem.

[Plate 5 off.]

14. This defining feature of the Uruguay river has the potential to bring catastrophic

consequences and they are not, regrettably, theore tical. Mr.President, Members of the Court, by

now you will be aware of the events th at occurred in early February 2009 ⎯ although Uruguay

does not seem to want to talk about them ⎯ when low and reverse flows combined to create five

days of stagnant waters. Throughout this period, Botnia was in operation and as usual discharging

high levels of nutrients and othe r pollutants on a massive scale. They never went downstream;

they were not diluted, as Uruguay had expected. Th ey just stayed in the water off the plant, and

some of them were, in fact, taken upstream. The result was a massive, massive, and unprecedented

explosion of a toxic algal bloom that started in th e river right at the Botnia plant. The scum that

was created, to a depth of 4cm on the surface of the river, included nutrients and pollutants and

contaminants, it even included, as ProfessorColombo is going to show you, bits of chopped up

eucalyptus and other material that came out of the discharge pipe. This is uncontroverted evidence

before the Court and it shows, it proves that th e Botnia discharges caused the algal bloom in

combination with increased temperatures and revers e flow. Now, we are going to talk more about

this later in the week, suffice it to say, for now, that this pollution was highly toxic; it spread

upstream for a distance of more than 25 km, and it covered an area in excess of 2.75 million square

metres.

15. Its occurrence indicates, once again, that Uruguay was wrong on the facts as to the risks

posed by this plant. Here I can be more precise. In June 2006, in this room, at the time of the first

provisional measures hearing, we raised the issue of th e threat to upstream sites. In response, this - 41 -

is what counsel told the Court: “the flow will quickly disperse the plant’s low effluent discharges

and minimize any environmental impact” 59. With great respect, that is wrong. Now, we do not

criticize counsel in any way. No doubt he was mere ly relying on the information that he had been

given. But the effect of the discharges even r eached the Esteros de Farrapos wetlands site in

Uruguay that is protected under the 1975 Ramsar Convention. [Plate 6 on ⎯ map showing general

picture and Ramsar site.] The image on the screen shows that site 60. The limits of the Ramsar site

are shown within red lines on the right-hand side of the picture. The most southerly part of the

61
Ramsar site is located 16 kilometres upstream from Botnia . You can see it in more detail now as

the screen focuses in on the area. In the top right-hand corner of this satellite photo of

4 February 2009, are the faint red lines showing the southern limits ⎯ which we have inserted ⎯

of this protected Ramsar site. From the river at the plant, going upstream, if you look carefully to

the right going upstream, you will see on the satellite images some areas that are marked in light

blue in the water: those are the points where th e toxic pollution in the algal bloom reaches its

highest levels, where the contamination is greates t. You can see on that satellite photo that high

levels of contamination ⎯ the bits in the water in light blue or even white ⎯ occur within the

Ramsar site delimited by the red lines. In fact , the Ramsar site has been wholly ignored by

Uruguay’s environmental assessment, and this sate llite image proves, proves, that the site was

directly hit by the unprecedented toxic algal bloom that occurred in February, and we predicted that

it would be in this very courtroom three years ago. You will, some of you, recall our exchange on

that issue. This is what Professor Boyle told you on 9 June 2006: “Ester os de Farrapos cannot be

62
affected by whatever discharges there may be from . . . Botnia.” That was wrong. Three months

later, in September 2006, the final CIS Report said that there was “virtually no potential for mill

effluents to impact the island delta area”, a reference to the Ramsar site 6. That, too, was wrong,

and this image proves that. [Plate 6 off.]

59CR 2006/47, 8 June 2006, p. 19, para. 3.
60
http://www.ramsar.org/wn/w.n.uruguay_farrapos.htm.
61
See RU, para. 5.26.
62CR 2006/49, 9 June 2006, pp. 11-12 (Boyle).

63Final CIS, September 2006, Sec. 4.6.2.8, Water Receptor 8, Esteros de Farapos e Islas del Rio Uruguya, p. 4.55,
CMU, Anns., Vol. VIII, Ann. 173. - 42 -

Mr. President, I have noted the time and if you feel that there would be an appropriate

moment to stop, this might be an appropriate moment.

The VICE-PRESIDENT, Acting President: Thank you, Professor. I think that you can

complete this presentation about the river fl ow and before addressing water quality we may

suspend the meeting to take the usual coffee break.

Mr. SANDS: Thank you very much.

16. There is a related factor that compounds th e problems of reverse and low flows, and that

is the river’s geomorphology. Understanding geomorphology is important to assess the impact of

discharges from Botnia: geomorphology describes th e future shape and characteristics of the river

and it has an impact on how it is going to affect the accumulation, the movement and the dispersion

of pollutants, as well as their presence in sediments 64. Argentina and Uruguay are in fundamental

disagreement on this issue. Uruguay says “geomor phological changes ... are unlikely to affect

river flows or effluent plumes”, and it says that “changes in geomorphology will be slow relative to

the lifespan of the facility” 65. As with the flow and direction of the river, as with the extent of the

pollution, Uruguay has again got its facts wrong. Professor Wheater made this point in his expert

report 6. Uruguay’s contrary assertions were not suppor ted by any prior, independent assessment:

67
again, Uruguay simply did not bother to collect any actual or up-to-date bathymetric data . Once

again, all Uruguay did was make bald, unsupported assertions.

17. [Insert plate7 ⎯figure1A of Raggio Report showing islands in river in 1904.] The

rapidity of the changes to geomorphology are pr oven in the evidence subm itted with Argentina’s

new documents. On the screen, on the upper chart, you will see the situation as it was in 1904, in

the river immediately in front of the Botnia plant. On the lower chart, you can see the changes that

had occurred by 1971. And now on the new image you can see the additional changes by 1994 and

64
RA, Anns., Vol. III, Ann. 44, Second Wheater Report, Sec. 3.10.
65
CMU, para. 6.90, citing the Menzie Report, Vol. X, Ann. 213.
66RA, Anns., Vol. III, Ann. 44, Second Wheater Report, Sec. 4, response to CMU, para. 6.90.

67RA, Anns., Vol. III, Ann. 44, Second Wheater Report, Sec. 4, response to CMU, para. 6.89. - 43 -

you can see that even within the tenyears that fo llowed, by 2004, there were further changes,

shown in light green. [Plate 7 off.]

18. So, it is clear, there are significant chang es, and they are continuing changes that have

occurred over the past 30 years, and that these will necessarily affect the transportation of

pollutants that Uruguay plans to discharge for at leas t the next 40 years. And this is all the more

when you add to this factor the issue of reverse flow that just leaves th e sediments filled with

pollutants that have contaminated the area directly in front of the plant. It is really difficult for us

to see how Uruguay can assert that the changes are “slo w” or that they cannot affect the river flow

or the dispersal of effluents. Again, sorry to say, it seems that the authorization was based on a

wholly inadequate and erroneous understanding of this aspect of the receiving environment.

That concludes this part of the presentation.

The VICE-PRESIDENT, Acting President: Thank you, Professor Sands. The sitting is

suspended for 10 minutes.

The Court adjourned from 11.30 to 11.40 a.m.

The VICE-PRESIDENT, Acting President: Please be seated. Professor Sands, you can

continue with the argument.

Mr. SANDS: Thank you very much, Mr. President.

2. Water quality

19. Let me turn to the second issue on which we would very much hope you might focus,

and that is the quality of the receiving waters and their associated sediments. Here, there are really

two issues. Firstly, can the river’s waters cope with the volume of pollutants that are being

discharged from Botnia? And, secondly, do we actually know what the plant is discharging?

Relatedly, there are also of course the issues concerning the accumulation of sediments, and here

we have the first signs already, regrettably, of traces of long-term accumulations of toxins that

come directly from the plant, including dioxins and furans, and these are already showing up in fish

populations. - 44 -

20. As to the quality of the r eceiving waters, there seems to be no dispute that in 2005 the

waters were already polluted and subject to eutrophication. DINAMA, which is Uruguay’s

environmental agency, said as much in a 2005 re port. It found that standards of CARU and

Uruguayan water quality standards were being exceed ed, even before Botnia went into operation,

and DINAMA recommended that there should not be any more authorizations of waste disposals

that would increase any of the parameters of critical values 68. Uruguay has ignored that

recommendation ⎯ and instead what it has done is it has decided to discharge nutrients and other

pollutants on a massive scale ⎯ as I said, 15 tonnes a year of phosphorus, 80 tonnes a year of

nitrates. This vital factor ⎯ potential for greater eutrophication ⎯ was given no weight by Botnia,

or by Uruguay or by the International Finance Corporation in the process of the environmental

assessment 69.

21. Nutrients are vital for life. They include nitrogen and phosphorus, but they only become

a problem when they are present in high concentra tions; and too high concentrations lead to

overstimulation of algae and other plant growth ⎯ that is a feature known as eutrophication.

Eutrophication causes the production of large amount s of organic carbon and imbalances in the

system: the vegetation in the river is litera lly choked and phytoplankt on (sometimes known as

algal blooms) grows very rapidly. All of this disrupts the normal functioning of the ecosystem,

basically it takes oxygen out of the water and that kills fish and shellfish. The incident of

February 2009 is an example of what eutrophicatio n does and it also causes ser ious health risks to

humans because of the toxins that are produced by some of the algae.

70
22. Uruguay just ignored the risk of eutrophication . In its Rejoinder, it boldly asserted that

71
the river could “readily assimilate” the plant’s nutrient discharges . What was the basis for this

bold conclusion? Well, in its pleadings Uruguay recognized: “The most important characteristic

of the river that renders it relatively insensitive to nutrient or other dischar ge-related effects is the

magnitude of its flow.” And then Uruguay said: “T his flow is high . . . This natural feature of the

68
CMU, Vol.II, Ann.20, DINAMA Environmental Impact Assessment Report for the Botnia Plant
(11 Feb. 2005, p.20.
69
RA, Vol. III, Ann. 44, Second Wheater Report, Sec. 3.3 and Sec. 4, response to CMU, paras. 5.5 and 6.93.
70RA, Vol. III, Ann. 43, see Rabinovich report, Sec. 2.20.

71RU, para. 6.56. - 45 -

river provides an important benefit in this case as it results in a rapid and substantial dilution of the

effluent.”72 Well, the Court will now appreciate that Uruguay has fallen into serious error,

recognizing that discharges of nutrients are high but assuming ⎯ wrongly ⎯ that the issue can be

addressed by flow. Having underestimated the volume of the flow and its nature ⎯ in particular,

reverse flow ⎯ Uruguay has stumbled into a potential environmental disaster, and it cannot be said

it was not warned. The magnitude of the error becam e evident, graphically, in February this year:

continuously discharging into a stagnant river ⎯ the quality of a lake ⎯ the nutrients were not

dispersed downstream. Instead, what happened was th at their levels rose dramatically, and that is

what gave rise to the algal bloom that had never, ever before been seen on this part of the river ⎯ I

am going to repeat that, never before seen. Urugua y asserted: “The physical characteristics of the

73
river enable it to absorb the nutrients fr om the Botnia plant without adverse effect. ” Events this

year show that to be completely and disastr ously wrong. The expert relied upon by Uruguay ⎯

Dr. Menzie ⎯ has been shown to have got it wrong in asserting that the response of algae to the

introduction of nutrients was essentially linear, a nd that the level of risk rises directly and

proportionately to the level of discharges 74. That is not correct. A river reaches what

75
Malcolm Gladwell’s book famously called a “tipping point” . ProfessorWheater and

Dr.Macintyre describe this in one of their early reports. They said that “responses are complex,

76
non-linear and uncertain” . We invite you to read their report, which is at Annex 44 of our Reply.

In this very period the volume of nutrients di scharged from the plant in creased significantly, and

various measurements provided by Argentina now prove that they are directly related to the algal

blooms. The idea put by Uruguay on 15July 2009 in its response documents that this event

somehow began upstream as a result of the Salto Gr ande dam is directly contradicted by the

evidence we have put before the Court: Uruguay has introduced no evidence ⎯ no evidence ⎯ to

contradict our evidence or to permit a different conclusion. Again, bald assertions by Uruguay,

unsupported by any evidence.

7Ibid.
73
Ibid.
74
CMU, Vol. X, Ann. 213, Report of Dr. Charles A. Menzie (July 2007), Sec. 5.3, opinion 5.
7Malcom Gladwell, The Tipping Point: How Little Things Can Make a Big Difference (2000).

7RA, Anns. Vol. III, Ann. 44, Second Wheater Report, Sec. 3.3. - 46 -

23. Nutrients are not the only problem. In its new documents, Argentina submitted the

detailed results of more than a year of real, state-of-the-art monitoring. Professor Colombo’s report

shows serious concerns with a number of polluta nts: for example, AOX, absorbable organic

halogens; for example, changes in biochemi cal oxygen demand and rates of sedimentation and

increasing levels of dioxins and furans, now detected at an accumulation rate some 22 times higher

77
than pre-operational rates . This concurs, in fact, with Uruguay’s own data, although they do not

want to believe what they read, and they persist in claiming ⎯ with no evidence in support ⎯ that

78
none of this is connected to the plant .

24. Monitoring has also indicated the incr eased presence of at least one very serious

chemical pollutant on which Uruguay was, until 15Ju ly of this year, conspicuously silent. The

substance in question is nonylphenols ⎯ and you are going to hear a lot more about this. As

ProfessorColombo reports, this has been found in high and increasing concentrations in the area

immediately in front of the Botnia plant. High concentrations of nonylphenols were also found in

samples of the algal blooms that occurred in Febr uary2009. Such high concentrations have not

been found anywhere else on the river. The presence of nonylphenols at elevated levels at this

precise location is consistent with their use, at the Botnia plant, in significant quantities.

25. What are nonylphenols and why should we care about them? They are industrial

surfactants, that is to say, they ar e used as a cleaner within pulp plants or to cl ean the wood chips.

They are not part of the manufacturing process as such, and they are not “generated” by the

production process. They are industrial cleaners. They are highly toxic to fish, to aquatic

invertebrates and to phytoplankton; they affect plant growth and they have adverse impacts on the

reproduction and on mortality rates. They are also suspected endocrine disruptors. [Plate8 on.]

On your screen you can now see extracts from the Annex to ECDirective 2003/53. On the

left-hand side you will see the reference to nonylphenols, and on the right-hand side it says: “May

not be . . . used as a substance or constituent of pr eparations in concentrations equal or higher than

0.1per cent by mass for the following purposes... (6)manufacturing of pulp and paper.”

77
New Documents submitted by Argentina 30 June 2009, Vo l.1, Scientific and Technical Report, Executive
Summary, pp. 2-5, and see Chap. 3.
7Uruguay’s Submission of New Document s, 30 June 2009, Ann.S2, “Perform ance Report for the First Year of
Operation of the Botnia Plant and the Environmental Quality of the Area of Influence”, pp. 25-34, and pp. 38-54. - 47 -

Mr.President, this product is dange rous enough to have caused it to have been banned for use in

wood pulp production in all 27 European Union Member States, since 17 January 2005, before the

Botnia plant was authorized and well before it began to operate. [Plate 8 off.]

26. You may recall what Uruguay told the Court in June2006: counsel told the Court that

Botnia would meet European Union standards. “Members of the Court may wonder[said

Professor Boyle] why Uruguay would wish to impose on . . . Botnia an obligation to meet standards

set down by the law of the European Community.” The answer to that was simple: it was because

of Uruguay’s environmental record, the European Un ion’s extensive experience in regulating such

plants, and because of Botnia’s experience in Europe. These were “the highest operational

standards for such plants”, counsel told the C ourt, so that when Botn ia applies “for final

authorization to operate, it will be contingent on confirmation that the plants as designed and
79
constructed will meet European BAT standards” . Mr.Reichler reiterated the point: he told the

Court that the emissions from Botnia “will meet the same strict requirements that are enforced in

Europe” 80.

27. Mr.President, if, as the evidence suggest s, Uruguay has failed to stop the use of

nonylphenols as a cleaner at the plant, it would have been inaccurate when it told the Court that its

environmental protection authorities “are requiring the plants to meet the very strict emissions

standards of the European laws”. The evidence points strongly ⎯ I could go even higher ⎯ to

the fact that the Botnia plant is dischargi ng, or has discharged, significant quantities of

nonylphenols. Now, you are going to hear more about this on Wednesday. The fact that

Uruguay’s scientific reports do not indicate that there has been any monitoring of nonylphenols

gives rise, on our part, to very serious con cerns. We note that Uruguay has now, late on,

introduced an affidavit as evidence ⎯from the head of DINAMA ⎯ this is Torres, to establish

that nonylphenols are not “generated” by the plant or “used in the production process” 81. Now, in a

narrow way she may well be correct, but it is not the same thing as an affidavit that says no

nonylphenols have been used or are being used in the cleaning of the Botnia plant and the cleaning

79
CR 2006/47, p. 27 (Boyle).
80
Ibid., p. 53.
8Uruguay’s comments on new documents presented by Arge ntina, 15 July 2009, Ann.C24, Affidavit of
Ag. Eng. Alicia Torres, Director of the National Environmental Agency (DINAMA). - 48 -

of the wood chips and have not been discharged from the plant at any time since its operation.

Over the years I have come to appreciate very highly the care with which Mr.Reichler and his

team use their words and work with others. This affidavit is striking for its limited language.

3. Biodiversity

28. Mr. President, Members of the Court, let me turn to the third factor, namely the presence

of rare, threatened or protected species and hab itats in the area of the plant. Uruguay does now

accept that the river is “a significant ecological resource” 82. Nevertheless, it has understated or

83
ignored these resources of biological diversity in its assessment process , if it was even ever aware

of them at all, as the situation with the Ramsar site graphically demonstrates. International

experience shows that modern pulp mills are know n to cause adverse impacts on biodiversity, as

Professor Wheater will explain.

29. The threat posed by the plant to the biological diversity of the river has been very fully

addressed in the pleadings 84. The focus of Argentina’s concern is the sensitivity of fish and other

aquatic species and the accumulation of toxins and ot her endocrine disruptors. Argentina is deeply

concerned by the failure of Botnia’s environmen tal assessment and accumulative impact study to

adopt an ecosystem approach 85, despite the fact that DINAMA recommended such an approach . 86

30. The results of Argentina’s extensive mon itoring programme shows now that its concerns

were fully justified. I have mentioned the immediate impact of nonylphenols, detected in

increasing quantities in and around the plant’s wate rs, in water, in sediments, and in aquatic

87
species . This was not predicted by Uruguay and it has not been picked up in its monitoring. It

undermines the conclusion of one of the reports on which it relies, that the discharge area “is not an

88
environmentally sensitive site” . With respect, we say that is wrong.

82
RU, para. 6.59.
83
MA, paras. 7.46⎯7.61 and Anns. Vol. V, Ann. 3, Latinoconsult Report, Sec. 6 and Anns. D-H.
84See, in particular, MA, paras. 5.45-5.53 and 7.46-7. 61, 7.176-179, and the reports referenced; and RA,

paras. 3.33-3.41 and 3.204-212 and the reports cited.
85Anns. Vol III Ann. 44, Second Wheater Report, Sec. 4, response to CMU 6.99-100.

86CMU Ann. 20, Sec. 6.6.

87New Documents Submitted by Argentina, Vol.I, Chap.3, see in particular Executive Summary and Sec.3.5,
p. 39.
88
RU, para. 3.39. - 49 -

31. Argentina’s monitoring has picked up othe r indicators of serious concern that Uruguay

has simply missed. In creased concentrations of dioxins and furans have been found in

detritus-feeding Sabalo fish, at an order of magnit ude higher than levels that were found before the

Botnia plant operated . Of even greater significance is th e identification of unprecedented biota

disruptions, including, we have now noted, mo rphological abnormalities in a little creature known

as a zooplanktonic rotifer ⎯ on which you will hear more. This is caused, we are told by our

scientists, by the introduction of certain toxins.

32. In short, these are early signs, even in the first 18months of the operation of the plant,

that provide strong support for the validity of Argentina’s concerns. The fact that these harms have

been identified in areas that are just upstream ⎯ just upstream ⎯ of the Botnia plant ⎯ but not

present at much greater distances upstream of the Botnia plant ⎯ is consistent with the conclusion

that this new damage is being caused directly by pollution from this plant. And, it confirms, once

again, that Uruguay has misunderstood the flow of the river, or chosen to ignore inconvenient

truths about its nature.

4. Air pollution

33. The fourth and final factor that we i nvite you to focus on relates to atmospheric

conditions and the consequential effects on pollution. Uruguay’s assessment of the impact of

atmospheric conditions on the environmental effects of the plant was, to be generous, limited, to be

90
less generous, insufficient . Uruguay’s initial response was to say that the 1975 Statute did not

regulate atmospheric pollution at all: in fact, dur ing the provisional measures phase, counsel told

91
the Court that “the Statute . . . says nothing about air pollution” . Judging by its most recent filing

it seems to have abandoned or reversed that pos ition. Uruguay introduced seven scientific reports

in its new documents filed on 30 June 2009, four of them deal with air pollution. The argument

that the 1975 Statute had nothing to say about at mospheric conditions and air pollution was, in our

89
New Documents submitted by Argentina, 30 June 2009, Vol.I Scientific and Technical Report, Executive
Summary, pp. 2-5, and see Chap. 3, Executive Summary and Sec. 3.6.2.
90See, for example, the cursory treatment of the issue at CMU, para 5.76, and footnote 975 to para. 6.19. See also
RU at Chap.4 which barely mentions atmospheric issues in the context of the environmental impacts of the mill; see

para. 4.73 for brief reference to IFC review of monitoring and paras. 4.111 for very brief reference to air.
91CR 2006/47, p. 27. - 50 -

submission, patently absurd: the Botnia plan t emits large quantities of pollutants into the

atmosphere, much of this is then deposited in to the river. Moreover, it is the atmospheric

conditions, high levels of wind, that cause the reverse flow phenomenon on the river.

34. Uruguay has, in any event, been shown to be wrong about the impact of atmospheric

conditions. During the provisional measures, counsel for Uruguay told the Court that air quality

and noxious smells were “specifically assessed” and th at “on a worst case scenario... emissions

. . . would quickly be diluted and remain largely confined to the Uruguayan side of this very large

92
river” . Reassuring words. Well again, actual moni toring, actual monitoring shows that this is

wrong. Argentina has done something Uruguay neve r did: through the work of Dr.Camilloni,

Argentina has looked at wind direction over a period of ten years, and the results show that the

wind flows from Botnia to Argentina on average mo re than 72percent of the time. Uruguay’s

assessment of prevailing wind directions got the di rections wrong, and it overestimated dispersion

and underestimated the impacts on Argentina. These dispersions go for large distances over

Argentine territory 93 and they go over the river depositing pollutants directly into the river.

35. Moreover, the exceptional worst case scenar ios to which Professor Boyle referred in the

provisional measures phase are not exceptional at all. There were no bad odours ⎯ of hydrogen

sulphide (H2S), I can’t be quite as eloquent as my Agent, “rotten eggs” ⎯ before the plant

operated. No one had any experience of that now, as is well known around pulp mills, the smell of

rotten eggs is a regular feature of life in Gu aleguaychú and in surrounding areas on the Argentine

side. It frequently crosses the threshold of detectability on the Argentine side since July 2008 when

94
Argentina began detailed monitoring . Let us take August2008, for example, the detection

threshold, the point at which you can smell rotten eggs was exceeded for more than 20 per cent of

all hours ⎯ that means you get the smell of rotten eggs on one day in five ⎯ and there had been

especially significant incidents in January, in February, in March, in July and then just last week on

9Ibid., p. 23.
93
Ibid., p. 13.
9Ibid., p. 37. - 51 -

4 and 5 September . For present purposes we would simply say this: the assurances given by

Uruguay to the Court have been shown to be misplaced by the facts.

Conclusions

36. Mr. President, Members of the Court, let me draw together the threads, as these hearings

proceed over the next three weeks, we invite y ou to focus on these four factors. We say Uruguay

has misunderstood the flow of the river and miss ed the fact of the in stability of the river’s

geomorphology; it has not taken account of the eutrophic state of the river, and it has been

economical in telling us and the Court which po llutants precisely are being discharged. Uruguay

also failed to assess the impacts on biodiversity in any sort of proper way like the Ramsar site; and

it just got the wind direction plain wrong. Now each of these is a fundamental issue; it is their

combination which is so devastating to their cas e. In short, Uruguay has mischaracterized the

essential features of this river and these pollutants at this location. To paraphrase Oscar Wilde 9, to

fall into error on one environmental feature may be regarded as a misfortune; to fall into error on a

second one begins to look like carelessness; to fall into an error on to the third, begins to look like

the realm of gross or wilful negligence; by the fourth, we say, you have crossed the line into gross

environmental recklessness. Mr.President, Member s of the Court, whatever may be the reasons

for these failings, the evidence before you establishe s clearly, conclusively, that Uruguay did not

properly assess or appreciate the special sensitiv ities of this place at which it took an early,

ill-informed decision to authorize the construction and operation of the plant.

37. Mr.President, thank you, that concl udes my presentation. I invite you to call

Professor Wheater to the Bar.

The VICE-PRESIDENT, Acting President: Thank you, ProfessorSands, I now give the

floor to Professor Wheater. You have the floor, Sir.

95
Ibid, pp. 37-38.
96
“To lose one parent, Mr.Worthing, may be regarded as a misfortune; to lose both looks like carelessness”,
Oscar Wilde, The Importance of Being Earnest (1895). - 52 -

WMHr.EATER:

IV. THE ENVIRONMENT EFFECTS OF PULP
MILLS ⎯ THE CONTEXT FOR B OTNIA

Introductory statement

1. Mr. President, Members of the Court, it is an honour for me to appear before this Court on

this second occasion, more than a deca de since I first appeared in the Danube dispute. This case,

as we have heard, is rather different from the last, not least because this case involves effluent

discharges of chemical pollution into a very differe nt river environment and, regrettably, there is

already extensive evidence of adverse effects on the water quality. This morning, I will explain the

reasons why the Botnia mill was, even before c onstruction began, known to pose significant risk to

the environment and communities of the River Uruguay.

2. I will begin with the simple proposition th at modern pulp mills cause significant adverse

impacts. I shall then demonstrate that there are international standards and practices which can be

used to minimize the impacts. Instead of fo llowing these standards, the Botnia pulp mill emits

huge amounts of pollution at a location which is sensitive to pollution and does not allow adequate

dispersal, a central issue in this case.

Modern pulp mills are known to cause adverse impacts

3. The pollution caused by pulp mills all over the world is immense. For example, the

Finnish pulp and paper industry releases more than 60 million kilogrammes of organic carbon per

97
year, representing 90per cent of all measured industrial pollution in Finland . In Canada, the

paper industry emits more dioxins a nd furans than any other industry8. Pulp mills are therefore

9European Community pollution invntory website http://www.epereuropa.eu/eper/introduction.asp?i=
(accessed 16 Aug. 2009).

9Taking Stock 2001: North AmericanPollutant Releases and Transfers , Commission for Environmental
Cooperation of North America, June 2004. ISBN 2-922305-92-926.,
http://www.cec.org/files/PDF/POLLUTANTS/TS2001-Report_en.pdf (Accessed 16 Aug 2009). - 53 -

best known for the severe environmental damage they have caused internationally, and this is well

99 100
documented in the popular press and the scientific literature .

4. The scientific literature leaves no doubt ⎯ modern pulp mills cause adverse impacts. The

types of impact observed in the literature include : sediment and water quality deterioration, algal

blooms, damage to invertebrate species, accumula tion of toxins in fish flesh, impacts on fish

populations, toxic effects on bird life, and human health effects from both water and air pollution.

5. As fish are central to the health of th e ecosystem, they are an important indicator of

environmental damage. Swedish studies have obser ved the impacts of pulp mill effluents on fish

even at dilutions less than 1per cent, creati ng an imbalance between male and female fish

101
populations . In one mill, the populations were seen to recover towards normal after the pulp mill

was temporarily shut down, proving the link to the mill 102. Further examples of the adverse

impacts of pulp mills are provided in the scientific reports before the Court 10. These examples are

based on independent scientific studies; and le ad to the overwhelmingly consistent opinion

amongst impartial scientists, including scientists from Uruguay 104, that modern pulp mills cause

very serious adverse effects. This is why they are heavily regulated.

6. The most extensive experience of the effect s of pulp mills comes from Canada. In 1992,

Canada’s national environment agency launched a long-term programme of monitoring biological

effects in receiving waters of pulp mill efflue nts called Environmental Effects Monitoring, EEM

for short. Following this programme, in 2006 the leading Canadian experts concluded: “These

studies confirmed the previous Swedish work that had demonstrated that low concentrations of

99
Examples include: “Russian toxic waste spill ‘threatens millions’”,
www.endseurope.com/4631?referrer=search (accessed 16 Aug.2009); “Pulp Mill Reopens Despite Charges of Killing
Swans”, http://ipsnews.net/news.asp?idnews=29943 (accessed 16 Aug 2009); “Mauvaise odeur à Fray Bentos”, La
República 28/01/09. Countless similar examples exist.

100See 1st Wheater report, MA, Vol. 5, Ann. 5, p. 217; 2nd Wheater report, RA, Vol. 3, Ann. 44.
101
Orn S., Svenson A., Viktor T., Holbech H., Norrgren L., 2006, “Male-biased sex ratios and vitellogenin
induction in zebrafish exposed to effl uent water from a Swedish pulp mill”, Archives of Environment Contaminant
Toxicology, 51, 445–451.

102Larsson, D.G.J., Förlin, L., 2002, “Male-biased sex ratios of fish embryos near a pulp mill: temporary recovery
after a short-term shutdown”, Environmental Health Perspectives, 110 (8), 739.

1031st Wheater report, MA, Vol. 5, Ann. 5, p. 217; 2nd Wheater report, RA, Vol. 3, Ann. 44.
104
Altesor, A., Eguren, G., Ma zzeo, N., Panario, D. & Rodríguez, C.,2008, “La industria de la celulosa y sus
efectos: certezas e incertidumbres”, Ecologia Austral, Diciembre de 2008, pp. 291-303. - 54 -

105
bleached Kraft mill effluent affect fish growth, reproduction, and physiology.” The official

conclusions of the third cycle of the EEM stated “mills continue to have an impact on fish and their

106
habitat” .

Pulp mill impacts occur on time scales ranging from days to decades

7. In light of this international experience, it is not at all surprising that the adverse impacts

of the Botnia plant have already been detected, and these will be addressed in more detail by

Professor Colombo, with whom I have worked cl osely and whose conclusions I entirely share, on

107
Wednesday . To help the Court understand these impacts, it is necessary to introduce the issue of

timescales. This will allow the Court to understand why some impacts are problems already, while

others are only beginning to emerge; and why th e available evidence of short-term impacts is a

timely warning of long-term damage to come.

8. [Fig.1 on.] This figure shows the main timescales and some associated ecosystem

impacts. Relatively immediate effects include water quality deterioration, algal blooms, and effects

on invertebrate animals. These have already occurr ed in the waters off the Botnia plant. Should

the pollution be removed, the environment will rec over quickly from these impacts. However, as

mill discharges continue, there is progressive ac cumulation of pollutants within the physical

environment (e.g., sediments) and the natural ecosy stem. Within months of exposure to the pulp

mill emissions, health effects on fish are expected , while fish populations are expected to be

affected over periods of years and would take year s to recover. Visible effects on the higher food

chain ⎯ amphibians, birds and mammals ⎯ are generally expected to become significant over

years to decades, and damage may be irreversible. [Fig. 1 off.]

9. Impacts on human communities also devel op across timescales. The obvious sensory

effects, already prevalent near the Botnia plan t, can occur immediately, while tourism problems

10McMaster, M.E., Hewitt, L.M., Parrott, J.L., 2006, “Adecade of research on the environmental impacts of
pulp and paper mill effluents in Canada: field studies and mechanistic research”,Journal of Toxicology and

Environmental Health, Part B, 9, pp. 319–339.
10Environment Canada, National Assess ment of Pulp and Paper Environm ental Effects Monitoring Data:
A Report Synopsis, Minister of Public Works and Government Services Canada, 2003, p. 20.

10CR 2009/14. - 55 -

typically emerge after months, and cumulative hea lth problems due to air quality and food chain

toxicity develop over years to decades.

Available technologies for pulp mills

10. In order to understand why pulp mills pose such risks, some introduction to the processes

and waste products is required. Pulping is th e process of extracting and treating cellulose from

trees, producing a product ready to be turned into paper. There are alternative pulp mill

processes ⎯ the one used by the Botnia mill is known as the Kraft process. [Fig. 2 on.] The wood

is debarked and chipped, the wood chips are cooke d with chemicals to dissolve unwanted parts of

the wood. Further purification occurs and the pul p is bleached by addition of chlorine compounds

and then dried. These processes require large vol umes of water to be abstracted from the

environment, in this case the River Uruguay.

11. The chemicals present in the raw materials and those present in the additives used as part

of the pulping process and as cleaning agents lead to a complex cocktail of hundreds of

contaminants which are passed into the waste streams ⎯ I would note that neither Botnia nor

Uruguay has provided us or the Court with a list of all the additives used at Botnia’s mill.

[Fig.2off, fig.3on.] The liquid wastes are passed through a wastewater treatment plant and

released into receiving waters. Most of the gase ous wastes are collected and treated then released

to the atmosphere through stacks; some of the waste gases, however, are released without control

into the atmosphere ⎯ I will return to the issue of gas emissions later. [Fig. 3 off, fig. 4 on.] On

this figure, the treatment processes and emissions are indicated schematically for the Botnia plant.

12. One chemical in the liquid emissions whic h causes particular risks to the environment is

chlorine, because it and many of its compounds are highly toxic. These compounds include

dioxins and furans, and other persistent organic pollutants. Recognition of the risks associated with

chlorine has resulted in the introduction of elemen tal-chlorine-free, or ECF, technology to most

mills. However, the ECF method still produces significant quantities of chlorinated persistent

organic pollutants. Therefore, many modern mills use a process which eliminates production of

these toxins. This is called totally-chlorine-free, TC F, technology. However, the Botnia mill uses

ECF ⎯ the less clean option ⎯ with the result that levels of pe rsistent organic pollutants observed - 56 -

in the River Uruguay are up to 500 times as high as they were prior to the presence of the pulp

108
mill .

13. Other chemicals of special concern are the nutrients, in particular nitrogen and

phosphorus. Although genera lly good for life, nutrients become a problem when present in high

concentrations. Nutrients are a fundamental pr oblem for pulp mills because, not only are they

present in the raw materials, but more nutrients are added as part of the wastewater treatment

process. This can result in enormous quantities be ing discharged into the receiving water. This

causes ⎯ under certain environmental conditions ⎯ dramatic and toxic algal blooms, such as those

already observed at the Botnia site.

14. Emissions of persistent organic pollutants and nutrients can be adequately controlled if a

suitable wastewater treatment system is in place, which is not the case at Botnia’s mill. [Fig. 4 off.]

Let us consider the possible treatment stages. [Fig.5 (a) on.] Many mills, including Botnia, use

primary and secondary treatment stages. The prim ary stage removes most of the solid particles

from the wastewater; the secondary stage removes most of the easily degradable organic pollution.

But neither of these treatment stages is designed pr imarily to remove the types of pollutants of

concern here: persistent organic pollutants and nutrients. To do so to a high standard requires

tertiary treatment. [Fig. 5 (a) off, fig. 5 (b) on.]

15. However, well as its benefits, tertiary treatment has major potential disadvantages

including the additional cost, the need to dispo se of additional solid waste residues and a high

energy and hence carbon footprint. There is no simple solution. In my view, the pulp mill should

never have been built in this location in the fi rst place, for the reasons summarized by Professor

Sands, and we shall return to that issue shortly. [Fig. 5 (b) off.]

16. The atmospheric emissions of concern from a Kraft pulp mill include sulphur

compounds, chlorine compounds, and dioxins and fu rans. The Kraft process has a particular

109
problem with malodorous emissions because of the large amounts of sulphur which are used .

10New documents submitted by Uruguay, 30 June 2009, A nn.S2, Performance Report for the First Year of
Operation of the Botnia Plant and the Environmental Qual ity of the Area of Influence, pp.25-54; “La Calidad
del agua del Rio Uruguay”, DINAMA, Sept 201 07,, p.
www.mvotma.gub.uy/dinama/index.php?option=com_docman&task=doc_download&… (accessed

18 Aug. 2009).
10IPPC 2001. Integrated Pollution Prevention and Cont rol (IPPC) Reference Document on Best Available
Techniques in the Pulp and Paper Industry, European Commission, December 2001, p. 17. MA, Vol. 5, Ann. 15. - 57 -

The technology used by many mills, including the Fr ay Bentos mill, collects most of the gases and

incinerates them in the mill’s furnaces, following by cleaning and release through the stack. This

system has two important limitations. Firstly, duri ng interruptions to the operation of the mill’s

furnaces, there is no adequate contingency to prev ent release of pollutants to the atmosphere; and

secondly, some of the air pollution produced by the plant, such as gases from the wastewater

treatment plant, is emitted into the atmosphere without any control. These weaknesses mean that

air pollution incidents are inevitable. There have been frequent occurrences at the Botnia mill

110
already ; and this is why DINAMA allows Botnia to fail many of the air quality targets for a

given percentage of the time 11. The failure of Uruguay to achieve a satisfactory level of control of

atmospheric emissions will be addressed in more detail by Professor Colombo on Wednesday.

Pulp mills require suitable siting

17. Mr. President, Members of the Court, I now turn attention from pulp mill technology to

the siting of pulp mills.

18. As we have heard, a suitable site for a pulp mill will allow the effluents to disperse

quickly into a large volume of water or air. That is why so many mills are located next to the sea,

where dispersal may be much less of a problem. Many of the problems now being faced by

Argentina would be avoided if the plant were to discharge into the sea. [Fig.6 on.] The figure

before you illustrates how different types of river ca n affect the dispersion of effluents. The first

case shows good dispersion conditions: the river is turbulent because it is fast flowing with a rough

channel bed surface. This will lead to a rapid decrease of concentrations away from the discharge

point. The second case shows poor dispersion cond itions where the river is not so turbulent

because it is slow flowing or has a smooth channe l bed. Both these cases assume that flow is

always in one direction. The third case adds to the second and illustrates what happens if flow

direction alternates, which happens in rivers su ch as the lower River Uruguay which are relatively

flat, subject to tidal influences and also the e ffects of strong winds in the upstream direction,

110
CR 2009/14.
11Ecometrix, “Environmental Performance Review, 2008 Monitoring Year”, March 2009, p. 5.4 and p. 6.5. - 58 -

causing frequent lake behaviour and reverse flow. In this case mixing is very poor and pollutants

can progressively accumulate in the water body. [Fig. 6 off.]

19. It is a very basic requirement of an e nvironmental impact assessment to measure these

dispersion properties prior to selecting the site, and there are many examples of how this can be

112 113
done , including the work done by the Argentinian scientists . Uruguay’s impact assessment

failed to include this basic task and dismis sed the significance of flow reversals. As

Professor Colombo will explain, this basic error has resulted in major incidents of the accumulation

114
of pollution . These have been ignored by Uruguay and Botnia.

20. A suitable site also means that there should be no sensitive species or communities in the

pathway of the pollutant plumes until a very hi gh degree of dispersion has been achieved. Key

issues to consider in this context are the pr esence of endangered species, fishery resources,

presence of bathing waters, drinking water abst ractions, transboundary sensitivities, and the

locations of local populations relative to the m ill. The Fray Bentos site does not qualify as a

suitable location on any of these accounts.

21. Let us compare the Fray Bentos site with that of a comparable mill, Gunn’s Bell Bay mill

in Australia, which is in the final stages of pla nning. [Fig. 7 on.] Although the Bell Bay mill also

raises major environmental concerns, aspects of its siting are much, much better than Botnia. At

the Bell Bay mill, to avoid discharge of liquid efflue nts into the adjacent river, the effluent will be

pumped 23 km to the coast and then a further 3 km into deep water where environmental sensitivity

is considered low 11. In contrast, the Court may recall that Botnia pumps its effluent about 300 m

into the relatively shallow River Uruguay, where sensitivity is high. [Fig. 7 off.]

22. The principle of dispersion applies equally to air pollution. As I stated earlier, episodes

of air pollution from modern pulp mills are inev itable and, as Professor Colombo will show, have

frequently occurred at the Botnia mill. Let me make the relevance of this clear: because air

11Second Wheater Report, RA, Vol. 3, Ann. 44, Sec. 3.6.
113
New documents submitted by Argentina, 30 June 2009, Vol. 1, Scientific and Technical Report, Chap. 2.
11See ibid.

11www.gunnspulpmill.com.au/faqs.html (accessed 16 August 2009). - 59 -

pollution incidents are inevitable, it is absolutely essential that pulp mill site selection ensures

adequate dispersion and the absence of nearby down-wind communities.

23. In summary, basic safeguards against adver se impacts are to ensure adequate dispersion

of emissions and the avoidance of sensitive sites. The Court will be reminded of these principles,

and Uruguay’s failure to follow them in relatio n to the Botnia plant, in the pleading by

Madame Boisson de Chazournes on Wednesday.

The Botnia mill performs poorly compared to other mills and would not be permitted at a
comparable site in Europe

24. I now would like to turn the Court’s attenti on to the issue of best practice for pulp mills.

The international recognition of the adverse impa cts associated with pulp mills has led to the

development of best practice guidelines. Th e document commonly cited in the documentation

before the Court is the European IPPC Refere nce Document on Best Available Techniques, known

as the BREF document 11. The BREF document is an extensive document, but there are two basic

requirements most relevant to this case. Firstly, highly toxic chemicals, including the nonylphenol

group, should neither be used in the pulp production process nor in cleaning operations. Secondly,

the pollution emissions from pulp mills should be minimized by using the best available

technology.

25. The BREF document has been used by Uruguay to provide a benchmark for assessing

the Botnia mill. For example, Uruguay’s experts have used the BREF document to illustrate that

the Botnia mill performs efficiently compared to most mills in terms of how much pollution is

produced per unit of pulp production 117. However, this type of comparison is flawed because the

efficiency of the mill is not the relevant measur e when assessing impacts. The relevant measure is

the amount of pollution produced, which takes into account the size of the mill as well as its

efficiency. In other words, a big mill, irrespective of how efficient it is, may produce an

unacceptably large amount of pollution, having regard to where the polluting discharges are made.

Because the Botnia mill is huge and not especially efficient, it is exposed as being a bigger polluter

116
IPPC2001. Integrated Pollution Prevention and Control (IPPC) Reference Document on Best Available
Techniques in the Pulp and Paper Industry, European Commission, December 2001, 509 pp. MA, Vol. 5, Ann. 15.
11RU, Ann. R83, pp. A-10-A-13. - 60 -

that most benchmark mills. [Fig. 8 on.] For ex ample, this graph shows the amount of phosphorus

produced per year for the Fray Bentos pulp mill (shown in red) compared to a number of Finnish

mills 11. It can be seen that, far from being world leading, as Uruguay have repeatedly claimed,

these data confirm that Botnia’s Fray Bentos pulp mill ⎯ which has discharged for example more

than 13tonnes of phosphorus a year into the River Uruguay 119 ⎯ is a massive polluter: it emits

twice as much phosphorus as Botnia’s most polluting mill in Finland. Out of 18 Finnish mills only

one discharges more phosphorus than the Fray Bentos mill, and that Finnish mill does not

discharge into a river, but rather into the sea where it is capable of being more properly dispersed.

26. The European standards have become pa rticularly relevant because Uruguay approved

the mill on the basis that it would be accepted, even welcome, in Europe 120. This is wrong. In

Europe there are stringent directives which cont rol emissions to sensitive receiving waters. The

River Uruguay is well-known to be subject to eutro phication, so that no mill such as this would be

authorized on any comparable site in any EU Member State.

27. For example, the European Water Framewor k Directive has the general requirement that

“Member States shall implement the necessary measures to prevent deterioration of the status of all

bodies of surface water . . . Member States shall protect, enhance and restore all bodies of surface

121
water . . . ” The discharge of huge quantities of nu trients and toxins, such as those from the

Botnia mill, is clearly incompatible with the re quirement to “protect, enhance and restore”. The

principle that the sensitive environment of the Ri ver Uruguay should not be allowed to deteriorate

was fully recognized by DINAMA, Uruguay’s own body. And I quote: “It is also understood that

it is not appropriate to authorize any waste disposal that would increase any of the parameters that

present critical values, even in cases in which th e increases are considered insignificant by the

122
company.” The deterioration in water quality in the River Uruguay, which both Uruguay and

118
“Metsäteollisuuden ympäristötilastot vuodelta 2008”, METSÄTEOLLISUUS RY, Helsinki 2009.
11Monitoring results for the Fray Bentos M ill. http://www.metsabotnia.com/en/default

.asp?path=204;1490;2203;2229;2230 (accessed 13 September 2009).
12Ecometrix FCIS, p. 2.28.

12Council Directive 2000/60/EC Establishi ng a framework for Community action in the field of water policy.
Council of the European Community, Brussels. Art. 4, Item 1a.

12Uruguay Counter Memorial, Ann. 20, Sect. 6.1, p. 21. - 61 -

Argentina have observed since the start up of the mill 12, not only opposes the principles and

standards of European law, but also those of Uruguay’s own environment agency and the

1975 Statute.

28. Uruguay is entitled to make certain argum ents: it simply cannot, however, maintain a

credible argument that this mill would be welcome in Europe.

Concluding statements

29. Mr.President, Members of the Court, I summarize my presentation with the following

generic issues about the modern pulp industry.

30. There are appropriate sites to locate a pulp mill. The Fray Bentos site is not one of them.

Pulp mills have a legacy of environmental dest ruction and despite technological improvements in

the last 20 years continue to be amongst the top polluters in the world and to cause significant

adverse impacts on ecosystems and local communities. The presence of adverse impacts, even

from modern mills, is indisputable and it is well documented in the international scientific

literature.

31. Botnia’s Fray Bentos mill does not co mpare well with the best benchmark mills ⎯ the

amount of pollutants it discharges are comparativel y large and the discharge site is manifestly

unsuitable. It would certainly not be allowed at a comparable site in the European Community.

32. The two vital safeguards against adverse impacts are application of suitable technology

and selection of suitable sites for the mill and its effluents. The Botnia mill fails on both accounts:

it does not use suitable technologies, and it is not in a suitable site. It is hardly surprising that

adverse impacts are already being observed. They were predicted, and they will multiply if the

Court does not act.

33. Mr.President, Members of the Court, thank you for your attention. With your

permission, and I now invite my colleague, Madame Boisson de Chazournes, to take my place on

the floor.

12Uruguay’s Submission of New Documents 30June 2009, Ann.S7, “Orion Pulp Mill, Uruguay Independent
Performance Monitoring” T4.5, T4.6, T4.7; New documents submitted by Argentina, 30 June 2009, Vol. 1, Scientific and

Technical Report, Executive Summary. - 62 -

The VICE-PRESIDENT, Acting President: Thank you, Sir. Je donne la parole à Mme le

professeur Laurence Boisson de Chazournes. Je voudr ais vous indiquer, Madame le professeur, si

vous avez besoin de quelques minutes de plus pour finir votre présentation, vous pouvez les

prendre, aujourd’hui exceptionnellement vu le fait que la Cour avait besoin d’introduire l’affaire ce

matin. Vous avez la parole, Madame.

Mme BOISSON de CHAZOURNES : Merci, Monsieur le président.

V. PRÉSENTATION GÉNÉRALE DU STATUT DE 1975 ET DES AUTRES RÈGLES APPLICABLES
DU DROIT INTERNATIONAL

Monsieur le président, Messieurs les juges, c’est pour moi un privilège d’apparaître devant

vous et de défendre les intérêts et les droits de l’Argentine devant votre haute juridiction.

1. Le respect du statut du fleuve Uruguay, adopté en 1975, est au cŒur du présent différend

et l’Uruguay et l’Argentine le reconnaissent tous deux.

2. Mais s’il y a accord sur la pertinence du statut dans la présente affaire, il y a désaccord sur

la portée des obligations énoncées par celui-ci. L’ Uruguay veut restreindre, en les déformant, la

124
portée et le contenu du statut . Il veut en d’autres mots nier les traits particuliers de la

communauté d’intérêts et de droits qui existe en tre l’Argentine et l’Uruguay et qui conditionne au

plan international le comportement des deux Etats dans la région du fleuve Uruguay.

3. Pourtant, Messieurs les juges, le statut du fleuve Uruguay met bien en place «un régime

complet et novateur», ainsi que votre juridiction l’a souligné il y a troisans ( Usines de pâte à

papier sur le fleuve Uruguay (Argentine c. Uruguay), mesures conservatoires, ordonnance du

13 juillet 2006, C.I.J. Recueil 2006, p. 133, par. 81). Je présenterai ce régime en en soulignant les

aspects saillants. C’est dire, Monsieur le président, Messieurs les juges :

1. Tout d’abord, que le statut du fleuve Uruguay est le fruit d’efforts constants de l’Uruguay et de

l’Argentine dès les années 1960 pour protéger au mieux le fleuve Uruguay et son écosystème.

2. Qu’en second lieu, le statut a des traits novate urs et spécifiques que l’Uruguay veut maintenant

occulter.

124
Duplique de l’Uruguay (DU), par. 5.5. Voir aussi contre-mémoire de l’Uruguay (CMU), par. 4.69. - 63 -

3. Et qu’en dernier lieu, le statut de 1975 entr etient des liens étroits avec les principes et les

obligations découlant du droit international contemporain.

Je reviendrai brièvement sur ces trois points.

1. Le statut de 1975 est le fruit d’efforts co nstants de l’Argentine et de l’Uruguay pour
protéger le fleuve Uruguay et son écosystème

4. C’est dès 1960 que l’Argentine et l’Uruguay ont voulu protéger au plan juridique le fleuve

Uruguay. Le statut de 1975 est le parachèvemen t en même temps que la clef de voûte de la

communauté de droits progressivement mise en place dès cette époque, c’est-à-dire 1960.

5. En effet, ce souci de forger un régime juridique protecteur est présent dès1961 avec

125
l’adoption du traité relatif à la frontière sur l’Uruguay et notamment son article 7 . En 1971, avec

l’adoption de la déclaration argentino-uruguayenne sur les ressources en eau 126, les deux Etats se

sont engagés à ce que toutes les formes de pollutio n dans les fleuves internationaux partagés entre

les deux Etats soient évitées et à ce que les ressources biologiques soient protégées.

6. Monsieur le président, les instrument s qui ont précédé l’adoption du statut de1975

permettent d’interpréter les obliga tions découlant de celui-ci et d’en mieux saisir la teneur et la

spécificité. Soulignant l’importance de ce statut, le président Jiménez de Aréchaga avait remarqué

que cet instrument constituait «un grand progrès» af in d’assurer un régime juridique «uniforme» et

«prévisible» du fleuve Uruguay 12.

7. Je voudrais signaler que l’Uruguay a d’ailleurs été à l’origine de l’introduction dans le

statut de normes particulièrement exigeantes. Ains i l’article13 du statut va jusqu’à soumettre les

ouvrages projetés par l’une des deux Parties «en dehors de la partie définie comme étant le fleuve»

au mécanisme établi par les articles 7 à 12 du statut. Cette disposition, comme l’Uruguay l’a

lui-même souligné, lui offre «un avantage incontestable» 128. Cela s’est révélé dans le contexte du

projet du barrage Garabí prévu da ns le tronçon du fleuve Uruguay pa rtagé entre l’Argentine et le

125
Traité relatif à la frontière du 7 avril 1961. Mémoire de l’Argentine (MA), livre II, annexe 1, p. 4.
126
MA, annexes, livre II, annexe 11. Voir MA, par. 3.22-3.25 et réplique de l’Argentine (RA), par. 1.10-1.13.
127E. Jiménez de Aréchaga, cité dans MA, annexes, livre VII, annexe 1, p. 3.

128Note qui accompagne l’approbation du statut de 1975 par le Congrès uruguayen (4 mai 1976), MA, livreII,
annexe 3, p. 42. - 64 -

Brésil. Ce projet envisagé depuis les années1980 n’a pas été réalisé, l’Uruguay ayant manifesté

129
des préoccupations au sein de la commission administrative du fleuve Uruguay .

8. Messieurs les juges, l’instrument c onventionnel adopté en1975 par l’Argentine et

l’Uruguay allait bien au-delà des standards de l’époque. C’est toujours aujourd’hui un régime

exigeant à l’aune des standards contemporains. Curieusement l’Uruguay tente à présent de

transformer le contenu et les obligations qui découlent de ce statut.

2. Les traits novateurs du régime du fleuve Uruguay que l’Uruguay veut maintenant occulter

9. Messieurs les juges, le régime de coopé ration établi par le statut de1975 confère à

l’Argentine et à l’Uruguay des droits procéduraux et substantiels très spécifiques. La nécessité

d’une application intégrée de ces droits et obligati ons est nécessaire aux fins de la préservation du

régime de coopération établi par le st atut. L’idée d’un «régime complet» ( Usines de pâte à papier

sur le fleuve Uruguay (Argentine cU . ruguay ), mesures conservatoires, ordonnance du

13 juillet 2006, C.I.J. Recueil 2006, p.133, par.81), dont votre Cour a fait mention dans son

ordonnance de juillet2006, traduit bien l’inséparab ilité et l’indivisibilité de ces deux catégories

d’obligations. La communauté d’intérêts et de droits sur le fleuve Uruguay s’accompagne d’une

communauté d’obligations. Celle-ci exclut qu’une catégorie d’obligations soit écartée au profit

d’une autre catégorie d’obligations et cela afin de prévenir toute atteinte au régime de coopération

établi par le statut.

10. Le régime juridique que l’Uruguay veut maintenant déformer repose sur plusieurs

éléments. L’un de ceux-ci a trait aux règles pré vues dans le chapitreII intitulé «Navigation et

130
ouvrages» , lequel prévoit ⎯il l’a déjà été dit ⎯ un régime de coopération particulier et

exigeant. Un mécanisme institu tionnel commun aux pays riverains, la commission administrative

du fleuve Uruguay (aussi dénommée CARU), doit être saisi et informé des projets ou utilisations

des eaux suffisamment importants pour affecter la na vigation, le régime du fleuve ou la qualité des

eaux du fleuve Uruguay.

129 o o
CARU, procès-verbal n 06/08, 16 mai 2008 et note SEREE n 45/08 sur le projet Garabí (7 mai 2008),
nouvelle documentation soumise par l’Argentine, 30 juin 2009, vol. II.
130RA, par. 1.76-1.155. - 65 -

11. Dans le contexte de l’application du chapitre II, il doit être fait mention de l’article 27 du

statut ⎯ que vous trouverez si le souhaitez, à l’onglet n o 1 de vos dossiers. Selon l’article 27, une

utilisation des eaux du fleuve Uruguay «à des fins mé nagères, sanitaires, industrielles et agricoles»

qui se réalise «à l’intérieur de [la] juridiction» de l’Argentine ou de l’Uruguay, doit s’exercer sans

préjudice de la procédure prévue par le chap itreII du statut lorsque cette utilisation «est

suffisamment importante pour affecter le régime du fleuve ou la qualité de ses eaux». Les projets

ENCE et Botnia entraînaient tous deux une utilisation des eaux suffisamment importante pour

affecter la navigation, le régime du fleuve ou la qualité des eaux du fleuve Uruguay. Ils devaient

être soumis au respect des dispositions du chapitre II du statut.

12. L’Uruguay, ainsi que je l’ai déjà souli gné, veut interpréter les règles du statut et

notamment le rôle de la CARU à sa guise. Se lon l’Uruguay, la CARU n’aurait aucun pouvoir de

décision à l’égard de mesures projetées ou des utilisations des eaux du fleuveUruguay 131. Ce

comportement revient à dénaturer l’objet même du statut du fleuveUruguay. Comme l’indique

l’articlepremier, les parties ont adopté le st atut en vue «d’établir les mécanismes communs

nécessaires à l’utilisation rationnelle et optimale du fleuveUruguay». La commission

administrative du fleuve Uruguay est le mécanisme créé à cet effet. C’est le mécanisme commun

nécessaire. Et votre Cour a souligné que la CARU est chargée de la «bonne application des

dispositions du statut» et constitue, ainsi que vous l’avez dit, «un élément significatif» dans la

gestion des ressources fluviales partagées entre l’Argentine et l’Uruguay ( Usines de pâte à papier

sur le fleuve Uruguay (Argentine c.Uruguay) , mesures conservatoires, ordonnance du13juillet

2006, p. 133, par. 81). Le professeur Alain Pellet le précisera, l’Uruguay a privé, à maints égards,

la CARU de l’exercice de pouvoirs qui lui sont conf érés par le statut et a ainsi porté atteinte à

l’objet même du statut 13.

13. N’en déplaise à l’Uruguay qui tente d’occulter cette différence, le statut prévoit la mise

en place d’un régime de coopération beaucoup plus exigeant que celui prévu par la convention sur

133
le droit relatif aux utilisations d’un cours d’eau international à des fins autres que la navigation

131
DU, par. 2.16.
132
Voir DU, par. 2.3, 2.5, 2.30, 2.60, 3.5.
133DU, par. 2.54-2.64. - 66 -

adopté en 1997. Je rappelle que cette convention n’a été signée ni par l’Uruguay ni par l’Argentine

et qu’elle n’est pas entrée en vigueur. En outre, les normes et obligations de ces deux instruments

134
ne sont pas comparables . Le statut de1975 dans le cad re du présent différend est le droit

spécifique et spécial applicable dans les relations entre les deux Etats.

14. Le «mécanisme commun nécessaire» qu’ est la CARU doit garantir une utilisation

optimale et rationnelle des eaux du fleuve Uruguay. L’utilisation optimale et rationnelle de ce

fleuve se réalise également par le respect des obligations de protecti on de l’environnement

énoncées dans le statut de 1975 et dans le digest e sur les utilisations du fleuve Uruguay adopté par

la CARU. Le digeste sur les utilisations du fleuve Uruguay édicte notamment des standards relatifs

à la qualité des eaux et à la conservation et la préservation des ressources biologiques du fleuve. Il

prévoit également des règles sur les ouvrages et les utilisations des eaux du fleuve Uruguay qui

complètent celles du statut de 1975 135. Le digeste est l’expression de la volonté des parties et de

leur interprétation des dispositions du statut. Les mots de l’Uruguay à son égard ⎯ prononcés

en 1990 ⎯ sont parlants. Pour l’Uruguay, le digeste est la «corroboration encore une fois de la

volonté conjointe de nos deux pays d’avancer concrètement sur des thèmes d’intérêt commun» 136.

15. La portée des obligations de protection de l’environnement prévues par le statut

n’échappe pourtant pas, elle non plus, aux assauts de l’Uruguay. Ce dernier tente de réduire la

portée des obligations de protection de l’environne ment prévues par le statut. Il affirme par

exemple que l’article36 «fixe un objectif et n’interdit rien» 137 et que l’article41 a) n’établirait

138
qu’une obligation de due diligence . LeprofesseurSands montrera que ces assertions sont

erronées et reviendra sur la portée réelle desdites obligations.

16. Il a été dit, l’Uruguay prétend égalemen t exclure du présent différend la question de la

pollution de l’air, en alléguant que la question de l’impact de l’usine Botnia sur la qualité de l’air

n’est pas du ressort du statut 139. Cependant, les termes du statut de1975 imposent une lecture

134Voir RA, p. 86-91 (tableau comparatif entre le statut et la convention de 1997) et par. 4.15-4.23.
135
RA, par. 1.75.
136
Note diplomatique du ministère des a ffaires étrangères de la République orientale de l’Uruguay, relative à
l’adoption du thème E3 (27 novembre 1990), MA, annexes, livre II, annexe 14, p. 351.
137
DU, par. 5.11.
138DU, par. 5.14.

139DU, par. 4.111. - 67 -

holistique de la protection du fleuve Uruguay qui met en relation les différentes composantes de

l’environnement. Les articles35 à39 du stat ut, contenus dans le chapitreIX intitulé

«Conservation, utilisation et exploitation d’ autres ressources naturelles», et l’article41 a) contenu

dans le chapitreX, sur la «Pollution», fixent des obligations contraignantes tant pour l’Argentine

que pour l’Uruguay. L’article35 vise la protection du sol et des forêts et l’article36 mentionne

explicitement la protection de «l’équilibre écologi que» du fleuve et ses zones d’influence. En

outre, les articles37, 38 et39 traitent de la conservation et de la préservation des ressources

biologiques. Messieurs les juges, toutes ces dispositions doivent être lues à l’aune des

développements du droit international selon lesquels une gestion intégrée des ressources en eau, de

l’air, de la faune et de la flore et du milieu terrestre, doit être mise en Œuvre pour satisfaire à

l’exigence de protection des écosystèmes. La pollu tion de l’air a des effets sur la qualité des eaux

et les directions des vents sur les courants d’eau. La gestion du sol peut avoir des répercussions sur

la qualité des eaux et l’Uruguay admet d’ailleurs que l’érosion du sol peut causer une pollution des

140
eaux .

17. En outre, l’Argentine et l’Uruguay ont relié le statut de1975, grâce à des clauses de

renvoi 141, à des instruments internationaux, qui tous reconnaissent l’importance d’une gestion

intégrée des ressources et de la protection des écosy stèmes. Ainsi, par exemple, la convention sur

la biodiversité définit un écosystème comme un co mplexe dynamique, en soulignant l’interaction

142
entre les éléments naturels qui forment «une unité fonctionnelle» . Toutes les composantes d’un

écosystème sont interdépendantes et liées.

18. La DINAMA, l’institution uruguayenne en charge des questions d’environnement, elle

aussi prône le respect d’une approche écosystémique. La DINAMA a, dans son rapport sur l’étude

140Ministry of Livestock, Agricultu re and Fishing, «Campaign for Responsible Land Use» (16April2009),
annexe S1 de la documentation présentée par l’Uruguay le 30 juin 2009.
141
Voir les articles premier et 41 a) du statut.
142
Article 2 de la convention sur la biodiversité. La convention sur la biodiversité définit l’écosystème comme
«le complexe dynamique formé de communautés de plantes, d’animaux et de micro-organismes et de leur environnement
non vivant qui, par leur interaction, forment une unité fonctionnelle» («a dynamic comp lex of plant, animal and
micro-organism communities and their non-living environment inte racting as a functional unit»). Sur la pratique, voir:
Lignes directrices de la convention sur la bi odiversité, Approche par écosystème, 2004, p. 6,
http ://www.cbd.int/doc/publications/ea-text-fr.pdf. Voir aussi décision, conférence des parties, réunion, Nairobi,
15-26 mai 2000, décision V/6, sect. A, http ://www.cbd.int/decision/cop/?id=7148 - 68 -

d’impact environnemental (EIE) présentée par l’ entreprise Botnia, insist é sur l’exigence d’une

protection intégrée de l’air, de l’eau et de la terre 14.

19. Qui plus est, ⎯ et ceci met encore davantage en lumière les contradictions de l’Uruguay,

cela a déjà été dit ⎯ l’Uruguay a présenté dans la documentation qu’il a soumise à la Cour en

juin2009 quatre rapports sur la pollution de l’ai r et un seul rapport sur la pollution de l’eau…

Curieux comportement pour un Etat qui prét end que «toute demande relative à ces formes de

pollution non aquatiques n’entre pas dans les prévisions du statut et ne relève pas de la compétence

144
de la Cour» . J’ajoute que les interactions entre l’eau et l’air sont reconnues dans la pratique

internationale. C’est par exemple le cas de l’accord des Grands Lacs conclu entre les Etats-Unis et

145
le Canada .

3. Le statut de 1975 entretient des liens étroit s avec les principes et les obligations découlant
du droit international contemporain

20. Messieurs les juges, le troisième et dernier aspect saillant du régime du fleuve Uruguay

dont je ferai état a trait aux liens étroits du stat ut avec les principes et les obligations du droit

international contemporain. Je ferai tout d’abord référence au renvoi que le statut de1975 fait à

d’autres instruments internationaux 146. L’Argentine et l’Uruguay ont en effet relié le statut au

système juridique international par des clauses de renvoi qui figurent dans les articles premier

et 41 a) du statut. Ces dispositions font mention de conventions, d’instruments internationaux, de

directives et de recommandations d’organismes techniques internationaux qui lient les deux Etats

ou seulement l’un d’eux. Ces instruments sont applicables dans le présent différend et doivent être

pris en compte dans l’interprétation des dispositi ons du statut de 1975. Ces clauses de renvoi dont

je viens de faire mention révèlent une spécificité additionnelle du statut. Elles constituent un autre

élément de distinction du statut par rapport à d’autres traités rela tifs à des cours d’eau

internationaux qui n’en contiennent pas. L’Argentine relève que l’Uruguay est resté d’ailleurs bien

silencieux sur lesdites clauses, voulant sans doute passer sous silence ce particularisme juridique.

143
DINAMA, Environmental Impact Assessment Report fo r the Botnia Plant (11 February 2005), contre-
mémoire de l’Uruguay (CMU), vol. II, annexe 20, p. 24.
144
DU, par. 1.13.
145Voir le préambule et l’articlepremier g) de l’accord de 1978 entre les Etats-Unis et le Canada relatif à la
qualité de l’eau dans les Grands Lacs tel que modifié le 16 octobre 1983, http ://www.ijc.org/rel/agree/fquality.html.

146RA, par. 4.24-4.27. - 69 -

Pourtant une convention telle la convention Ramsar sur la protection des zones humides

d’importance internationale trouve application dans le présent différend qui oppose l’Argentine à

l’Uruguay. Le professeur Sands vient d’évoquer l es effets des substances contenues dans la tâche

d’algues qui s’est formée en février 2009 en face de l’usine Botnia et qui est arrivée jusqu’au site

d’Esteros de Farrapos protégé par la convention Ramsar.

21. En plus des conventions internationales auxquelles il est fait renvoi dans le statut, les

règles du statut doivent être lues à la lumière «d e toute règle pertinente de droit international

147
applicable dans les relations entre les Parties» et la sentence du Rhin de fer du 24 mai 2005 a

bien mis en relief la portée de cette règle d’interp rétation de la convention de Vienne sur le droit

148
des traités . Dans le contexte du présent différend, l’ Argentine et l’Uruguay reconnaissent tous

deux que l’article31.3 c) de la convention de Vienne doit gui der l’interprétation des obligations

149
découlant du statut de 1975 .

22. Les principes du droit international de l’ environnement jouent un rôle particulier à cet

effet. Ils permettent de donner une interpré tation contemporaine des obligations énoncées.

Messieurs les juges, dans votre décisi on du 13 juillet 2009 portant sur le Différend relatif à des

droits de navigation et des droits connexes , vous avez souligné le rôle joué par la protection de

l’environnement dans l’interprétation des obligatio ns découlant du traité, en l’espèce, conclu en

1858 15. Votre Cour a également souligné l’impor tance d’une interprétation évolutive dans

l’affaire Gabčíkovo-Nagymaros, lorsque la haute juridiction a affirm é que le traité de 1977 entre la

Hongrie et la Slovaquie n’était pas «un instrument figé» et était «susceptible de s’adapter à de

nouvelles normes de droit international» (Affaire relative au Projet Gab číkovo-Nagymaros

(Hongrie/Slovaquie), arrêt, C.I.J. Recueil 1997, p. 67-68, par. 112).

147
Article 31.3 c) de la convention de Vienne sur le droit des traités.
148 Arbitrage relatif à la ligne ferroviaire du Rhin de f(«Ijzeren Rijn») (Belgique/Pays-Bas), sentence du

24 mai 2005, par. 58.
149DU, par. 2.56.

150 Différend relatif à des droits denavigation et des droits connexes (Costa Rica c. Nicaragua) , arrêt du
13 juillet 2009, par. 89. - 70 -

23. Dans le contexte du présent différend, le principe du développement durable, dont votre

151
Cour a rappelé l’importance , doit être pris en considération en tenant compte de ses trois piliers,

économique, social et environnemental 152. N’en déplaise à l’Uruguay 153, l’équilibre entre

considérations économiques, envir onnementales et sociales doit être garanti de manière effective,

et ce notamment pour la mise en Œuvre des obligations prévues par le statut de 1975.

24. Or, la mise en service de l’usine Botn ia a causé des dommages à la qualité des eaux du

fleuve Uruguay et à son écosystème et a porté a tteinte à l’obligation d’utiliser de manière durable

les ressources du fleuve Uruguay. Cette obligation, affirmée dans la convention sur la biodiversité,

la convention Ramsar ou encore la convention sur les polluants organiques persistants, est pourtant

fondamentale pour la protection d’un milieu sens ible sur le plan écologique tel le fleuve

Uruguay 154.

25. L’obligation de prévention découlant du st atut de 1975 et du droit international général

fait aussi partie du régime institué par les deux Par ties sur le fleuve Uruguay. Votre Cour a déjà

rappelé l’importance de l’obligation de prévention en droit international 155. Le statut de 1975 lui

confère des contours particuliers et particulièrement fermes 156. Les dispositions procédurales et

substantielles du traité de 1975 relatives à la protection de la qualité des eaux et de l’écosystème du

fleuve Uruguay doivent toutes être prises en compte pour déterminer le cont enu de l’obligation de

157
prévention . En ne respectant pas ces dispositions, l’ Uruguay viole le principe de prévention tel

qu’envisagé dans cadre du statut de 1975.

26. S’agissant du principe de l’utilisation équitable et raisonnable du fleuve Uruguay,

celui-ci revêt des contours particulie rs dans le cadre du statut. L’in terprétation et l’application de

ce principe doivent notamment se réaliser en pr enant en compte les utilisations préalables et

légitimes du fleuve. L’Argentine et l’Uruguay ont montré leur attachement à ce régime de

151Affaire relative au Projet Gab číkovo-Nagymaros (Hongrie/Slovaquie), arrêt, C.I.J. Recueil 1997, p. 77,
par. 140.
152
Déclaration de Johannesburg sur le développement durable (2002), par. 5. RA, par. 4.32-4.40.
153
DU, par. 2.130.
154
RA, par. 4.33.
155Licéité de la menace ou de l’emploi d’armes nucléaires, avis consultatif, C.I.J. Recueil 1996, p. 242, par. 29.

156RA, par. 4.41-4.45.
157
Voir MA, par. 3.123-3.157 et RA, par. 4.45. - 71 -

protection en adoptant les dispositions du digeste qui établissent que les eaux doivent être destinées

à la conservation et au développement de la vie aquatique et qui prévoient même l’établissement de

158
différentes zones d’utilisation des eaux dans le fleuve Uruguay . En ne respectant pas le principe

de l’utilisation équitable et raisonnable, l’Uruguay viole le statut de 1975.

27. L’obligation de ne pas causer un domma ge trouve également application dans le

différend opposant l’Argentine à l’Uruguay. Cette ob ligation doit être interprétée à la lumière de

l’ensemble des dispositions du statut qui lui donnent des contours spécifiques. Son application

repose sur des constatations objectives fondées sur le respect des obligations découlant du statut et

non pas sur une interprétation et application unilatérales de l’Uruguay de ce qu’il considère comme

dommageable ou non dommageable.

28. Le principe de précaution trouve aussi a pplication. L’Uruguay dit accepter cela tout en

159
dénaturant le contenu du principe . A l’aune du principe de précau tion, les dispositions du statut

doivent être mises en Œuvre dans le cadre d’une approche tendant à empêcher tout risque de

détérioration grave de la qualité des eaux du fle uve Uruguay, de sa biodiversité ainsi que de son

régime. Même si les risques de dommages graves peuvent en certaines circonstances ne paraître

que potentiels, le principe de précaution exige «l ’adoption de mesures effectives visant à prévenir

160
la dégradation de l’environnement» .

29. Messieurs les juges, le prétendu haut niveau des technologies employées par l’usine

161
Botnia , dont se prévaut l’Uruguay, à supposer qu’il soit avéré, quod non, n’a pas empêché que

les activités de cette usine ont causé des dommages à l’environnement et à la santé humaine et

qu’elles en causent encore. L’Uruguay aurait dû ad opter une approche de précaution. Les risques

n’ont pas été maîtrisés. Les récents événements , comme l’émanation de fortes odeurs en janvier,

février, mars 2009 et plus récemment encore et les problèmes de santé causés par ces émanations,

la formation d’une tâche blanche d’algues cont enant des substances cont aminantes, fortement

contaminantes, dans le fleuve Uruguay le 4 février 2009 ainsi que l’explosion d’un tuyau de l’usine

158
Digeste, sect. E3, chap. 4, titre 2, sect. 1, art. 2, MA, annexes, livre II, annexe 12, p. 276-277. RA, par. 4.52.
159
DU, par. 5.56-5.67. CMU, par. 4.81.
160Principe 15 de la déclaration de Rio sur l’environnement et le développement de 1992.

161DU, par. 5.58. - 72 -

contenant du gaz le 27 février 2009 ont conf irmé les craintes de l’ Argentine relatives au

fonctionnement de l’usine et à la pollution qu’elle provoque 162.

30. S’ajoute aux principes de prévention et de précaution, l’obligation de l’Uruguay de

veiller à la réalisation d’une étude d’impact environnemental conforme aux règles de droit

international. La jurisprudence de votre Cour et la Commission du droit international dans son

projet d’articles sur la prévention des dommages transfrontières de 2001 ont relevé l’importance de

cette obligation 163. La tentative de l’Uruguay d’occulter la relation entre l’évaluation d’impact

164
environnemental et le statut doit être rejetée , et je reviendrai sur cela. Cette obligation trouve son

expression tant dans les dispositions du statut que dans les instruments auxquels il renvoie,

notamment la convention sur la biodiversité 16.

Conclusion

31. En conclusion, Messieurs les juges, je voudrais souligner que les dispositions du statut de

1975 doivent être interprétées à la lumière des princi pes qui viennent d’être évoqués, et appliquées

de pair avec les conventions et instruments qui lient l’Argentine et l’Uruguay. Le statut de 1975 et

les instruments auxquels il fait renvoi forment un ense mble solidaire de droits et obligations qui

permettent d’appréhender en leur entier les contours du droit applicable dans la présente affaire.

32. L’interprétation et l’application du st atut de 1975 sont au cŒur du différend entre

l’Argentine et l’Uruguay. L’intégrité du contenu du statut du fleuve Uruguay doit être préservée et

le particularisme de son régime pris en comp te. Les autorisations données par l’Uruguay aux

usines ENCE et Botnia ont mis en péril ce régime et votre Cour est appelée à remédier à ces graves

défaillances.

162
Radio 36, «Botnia: Fray Bentos residents in sad resigna tion at smells and pollution» (2 octobre 2008)La
República, «Something smells bad at FrayBenton» (28 janvier 2009); Guayubira, Press release, «Botnia: To smell or
not to smell, that is the question» (28 janvier 2009); La Diaria, «White algae, dark water. How natural are algal
blooms?» (11 février 2009); Universidad Nacional del Litoral , Institutional press release, «Slick in River Uruguay.
Connection between proliferation of algae and discharges from Botnia» (9 février 2009) ; El País, «Explosion at Botnia»
(28 février 2009); El País, «Explosion in gas pipe at Botnia causes alar m». Fray Bentos: Shock wave and smell reach

capital of Río Negro (28 février 2009); La Nación, «Río Negro is leading a normal life» (28 février 2009). Nouvelle
documentation présentée par l’Argentine, 30 juin 2009, vol. 2.
163Affaire relative au Projet Gab číkovo-Nagymaros (Hongrie/Slovaquie), arrêt, C.I.J. Recueil 1997, p. 77,

par. 140. Art. 7 du projet d’articles, Annuaire de la CDI, 2001, p. 401.
164DU, par. 5.76.

165Article 14 de la convention. - 73 -

33. Monsieur le président, Messieurs les j uges, je vous remercie de votre bienveillante

attention. Cette plaidoirie clôt la présentation de l’Argentine pour aujourd’hui.

Le VICE-PRESIDENT, faisant fonction de président: Je vous remercie, Madame le

professeur. L’audience est levée et la Cour se réunira de nouveau demain matin à 10 heures.

L’audience est levée à 13 h 5.

___________

Document Long Title

Public sitting held on Monday 14 September 2009, at 10 a.m., at the Peace Palace, Vice-President Tomka, Acting President, presiding, in the case concerning Pulp Mills on the River Uruguay (Argentina v. Uruguay)

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