Non corrigé Traduction
Uncorrected Translation
CR 2013/12 (traduction)
CR 2013/12 (translation)
Mardi 2 juillet 2013 à 15 heures
Tuesday 2 July 2013 at 3 p.m. - 2 -
14 Le PRESIDENT : Veuillez vous asseoir. L’audience est ouverte. La Cour entendra cet
après-midi le Japon, qui entame son premier tour de plaidoiries.
Je donne la parole à l’agent du Japon, M. Koji Tsuruoka, ministre adjoint des affaires
étrangères. Vous avez la parole, Monsieur.
M. TSURUOKA : Je vous remercie, Monsieur le président.
1. Monsieur le président, Mesdames et Messieurs de la Cour, jamais auparavant le Japon ne
s’était présenté devant la Cour, organe judiciaire principal de l’Organisation des Nations Unies. Je
suis très honoré d’être ainsi le premier agent à représenter le Japon devant ce noble organe.
J’aimerais, si vous me le permettez, introduire mon propos sur une note quelque peu personnelle.
Mon défunt père, Senjijn Tsuruoka, a consacré une bonne partie de sa vie au droit international, et a
notamment été membre pendant vingt ans de la commission du droit international. L’idée que je
puisse un jour paraître devant la Cour l’aurait certainement terrifié. Je dois admettre humblement
que je ne suis pas sûr de réunir toutes les qualifications attendues d’un agent, mais je vous promets
de faire de mon mieux.
2. Monsieur le président, l’ironie de l’histoire ne cesse de m’étonner. C’est en effet la chasse
à la baleine qui, après trois cents ans d’isolement, a forcé le Japon à s’ouvrir à nouveau au reste du
monde. Les grandes puissances maritimes qui, au XIX siècle, pratiquaient la chasse à la baleine à
très grande échelle, voulaient absolument que le Japon leur ouvre ses ports pour
l’approvisionnement de leurs navires baleiniers. Aujourd’hui, c’est à propos d’une affaire relative
à la chasse à la baleine que la Cour est invitée à décider si le Japon est un bon citoyen du monde,
respectueux du droit international, ou s’il a circonvenu le droit pour se soustraire à ses obligations
internationales.
3. Nous doutons fort que la Cour ait compétence pour connaître des demandes présentées par
l’Australie ; si, néanmoins, elle estime pouvoir statuer sur le fond de l’affaire, nous tenons à
souligner que celle-ci a pour objet la conformité au droit international des activités entreprises par
le Japon, et non pas leur appréciation selon des critères moraux ou la détermination de ce qui
constitue la vraie science et la fausse science. La question posée à la Cour porte sur l’interprétation - 3 -
de l’article VIII de la convention internationale pour la réglementation de la chasse à la baleine, «la
convention de 1946», article qui traite de la chasse à la baleine au titre de permis spéciaux.
4. Le Japon est très soucieux de respecter le droit international, et nous prenons très au
sérieux les allégations formulées par l’Australie. Lorsqu’un Etat souverain est accusé de violation
du droit international, l’accusation doit reposer sur des preuves juridiquement convaincantes. Or,
l’Australie, la semaine dernière, s’est montrée incapable de produire de telles preuves. Nous nous
attacherons à présenter très clairement notre argumentation afin de ne pas laisser place au moindre
doute sur le fait que le Japon observe scrupuleusement ses obligations internationales.
15 5. Monsieur le président, Mesdames et Messieurs de la Cour, le Japon a toujours vécu en
harmonie avec la nature durant sa longue histoire. Pays insulaire, le Japon sait trop combien sont
précieuses les richesses de la mer pour faire mauvais usage des ressources baleinières. C’est
précisément parce qu’il est pauvre en ressources et que sa survie a toujours dépendu de la
générosité de la nature que le Japon est si fermement attaché au principe de l’écoviabilité de
l’exploitation des ressources vivantes. Le Japon est profondément convaincu qu’il nous incombe à
tous de transmettre aux générations futures un environnement propre présentant une riche
biodiversité. Il considère que l’environnement compte parmi les questions d’importance mondiale
qui appellent de la part de la communauté internationale une coopération sans exclusive. Il est de
longue date partie à de nombreux traités visant la conservation de la faune et de la flore.
6. C’est dans cet esprit que le Japon, en 1951, a adhéré à la convention de 1946. Selon son
préambule, celle-ci a institué un régime destiné «à assurer la conservation appropriée des
peuplements baleiniers et [à donner ainsi] à l’industrie baleinière la possibilité de se développer
d’une manière méthodique», ce qui cadre tout à fait avec la manière dont le Japon entend
l’utilisation des ressources naturelles.
7. Nous avons vu les règles du droit international de l’environnement relatives à la gestion
des ressources vivantes se développer considérablement à la suite d’une réflexion approfondie sur
les effets de l’activité humaine sur les espèces vivantes en l’absence de moyens de gestion
rationnelle de la pêche et de la chasse. Le Japon s’est associé sans réserve à cette évolution,
notamment aux mesures prises pour conserver et gérer toutes les espèces vivantes. Il se félicite des
progrès tangibles accomplis dans la mise en œuvre de ces dispositifs multilatéraux de gestion. - 4 -
8. Nous convenons que la protection des animaux, y compris l’interdiction de les tuer
inutilement et les mesures de préservation de la biodiversité, est fondamentalement une bonne
cause. La convention de 1946 a été adoptée dans le but de corriger les pratiques de chasse à la
baleine en vigueur avant 1946, et de fonder la conservation et la gestion des ressources baleinières
sur des connaissances scientifiques.
9. Nous observons pleinement l’approche de précaution dans la conduite de nos travaux de
recherche scientifique, en veillant à ce qu’ils n’aient pas d’effets délétères sur les stocks étudiés.
L’expert de l’Australie a d’ailleurs confirmé la semaine dernière que la capture de
850 petits rorquals par an ne risque pas d’entraîner la réduction des stocks. L’écosystème de
l’Antarctique est très mal connu. Selon la convention de 1946, la gestion des ressources baleinières
doit reposer sur les avis scientifiques les plus autorisés. C’est précisément pour fournir au
comité scientifique les données scientifiques nécessaires que le Japon continue de pratiquer la
chasse à la baleine à des fins de recherche, et il est de fait que grâce à ces travaux et aux
16
contributions d’autres Etats, des progrès ont été accomplis, sous l’égide de la CBI, dans le sens de
la conservation et de la gestion scientifiquement fondées.
10. L’Australie a pratiqué la chasse commerciale à la baleine jusqu’en 1979 et s’est
conformée à la convention de 1946 pour le faire dans des conditions compatibles avec le
1
renouvellement des stocks . En 1979, toutefois, elle a radicalement changé de position, le premier
ministre d’alors, Malcom Fraser, annonçant que l’Australie allait interdire totalement la chasse à la
baleine et promettant d’engager les autres Etats à faire de même ; je le cite :
«Le gouvernement estime … que l’Australie devrait poursuivre une politique
d’opposition à [la chasse à la baleine] à la fois au niveau national et au niveau
international dans le cadre de la commission baleinière internationale et d’autres
2
instances.»
L’Australie a le droit souverain de choisir sa position. Cependant, elle ne peut ni imposer sa
volonté à d’autres Etats, ni transformer la CBI en un organe voué à la lutte contre la chasse à la
baleine. Depuis 1979, elle n’en a pas moins cherché opiniâtrement à transformer le régime institué
1 The IWC Summary Catch Database, Version 5.3.
2 Commonwealth d’Australie, débats parlementaires, chambre des représentants, 4 avril 1979, p. 1481-1482
(CMJ, annexe 163). - 5 -
par la convention de 1946 en un régime d’interdiction totale de la chasse et à modifier en ce sens le
mandat de la CBI. Pareille transformation nécessiterait que la convention soit entièrement réécrite,
ce que l’Australie n’a, jusqu’à présent, pas réussi à obtenir.
11. Pourquoi l’Australie a-t-elle adopté cette position ? Les cétacés seraient-ils tous des
animaux sacrés, appartiendraient-ils tous à des espèces en péril ? Je conçois fort bien que des
réactions émotionnelles puissent être à l’origine d’une telle position ; mais je ne vois pas comment
celle-ci peut ensuite être habillée d’un vernis juridique ou scientifique. Une convention
multilatérale a pour but essentiel d’amener des Etats dont les systèmes sociaux, économiques et
politiques comme les intérêts sont très différents à coopérer dans un cadre convenu à la défense de
causes qu’ils s’accordent à considérer comme d’importance planétaire. Pour ne pas devenir un
régime fermé, un régime multilatéral doit favoriser les relations harmonieuses entre les Etats, ce qui
implique qu’il privilégie un certain nombre de principes et d’objectifs fondamentaux admis par
tous. Toute tentative unilatérale de modification des règles convenues compromet gravement la
mise en œuvre d’une convention multilatérale.
12. Monsieur le président, tout au long des travaux consacrés par la CBI à la recherche d’un
accord sur les moyens d’améliorer les méthodes de gestion, l’Australie s’est opposée à toute
activité de chasse à la baleine et a fait obstacle au consensus. Lorsque les Etats parties hostiles à la
chasse à la baleine ont constitué les trois quarts de ses membres, la CBI, a adopté le moratoire de la
chasse commerciale, qui fait l’objet de l’alinéa e) du paragraphe 10 du règlement annexé à la
17 convention de 1946. Voyant que cette majorité des trois quarts ne pouvait se maintenir, l’Australie
a milité pour l’adoption de résolutions reflétant sa propre politique, résolutions dont l’adoption
n’exigeait que la majorité simple. Ces textes n’ont pas force obligatoire.
13. C’est parce qu’elle s’est rendu compte qu’elle ne pourrait obtenir la majorité nécessaire
pour que les Etats parties modifient la convention de 1946 dans le sens qu’elle souhaitait que
l’Australie s’est adressée à la Cour. Après de longues années d’âpres négociations, la commission
était enfin parvenue au point culminant du processus de définition de «l’avenir de la CBI»,
processus de normalisation entrepris en vue de lui épargner un déraillement fatal. A la suite de
l’augmentation, dans les années 1980, du nombre de ses membres hostiles à la chasse à la baleine,
la CBI s’est trouvée handicapée dans ses travaux par une polarisation peu propice à des débats - 6 -
constructifs. Seul un compromis aurait permis de mettre fin à cette situation. Or, l’intransigeance
de l’Australie a fait échec à un accord qui était sur le point d’intervenir. C’est principalement
l’Australie qui a bloqué le consensus sur des règles de gestion des ressources baleinières
acceptables par tous les membres de la commission. Le Japon trouve pour le moins paradoxal que
l’Australie, alors qu’elle se refuse à faire sincèrement des efforts pour pratiquer la coopération dans
la principale instance multilatérale spécialisée, vienne se plaindre à la Cour.
14. J’aborde maintenant un autre aspect de la présente affaire, qui tient à ce que les secteurs
couverts par les permis spéciaux de chasse à la baleine délivrés par le Japon se trouvent tous à
l’intérieur de la zone économique exclusive (ZEE) que l’Australie s’est attribuée unilatéralement
dans l’océan Antarctique. Comme le montrent amplement nombre des actes accomplis par elle,
l’Australie tente d’exercer sa juridiction dans cette zone. Le Japon n’admet pas la position adoptée
par l’Australie quant à sa ZEE dans l’Antarctique. En limitant la portée géographique de ses
demandes à la zone qu’elle revendique dans l’Antarctique et aux zones adjacentes, l’Australie
cherche-t-elle à légitimer la position qu’elle a adoptée unilatéralement quant à sa ZEE ? Et, en se
gardant d’interdire la chasse dans ce qu’elle tient être sa ZEE de l’Antarctique, veut-elle en même
temps s’épargner le risque bien réel que la légitimité de ses revendications dans l’Antarctique ne
soit mise en question ? Comme je l’ai dit, nous doutons fort que la Cour ait compétence pour
connaître des demandes présentées par l’Australie. Ce qui nous inspire ce doute, c’est la teneur de
la réserve dont l’Australie a assorti sa déclaration d’acceptation de la juridiction obligatoire de la
Cour.
15. Le Japon, pour sa part, a agi de bonne foi et obtenu des résultats scientifiques tangibles
qu’il a soumis au comité scientifique. Il a continué de collaborer à l’élaboration de nouvelles
méthodes de gestion et s’est astreint à suivre la voie de la coopération aux fins de la conservation et
de la gestion des peuplements baleiniers. Alors qu’il aurait pu, en tant qu’Etat souverain, dénoncer
18 la convention de 1946 et se retirer de la CBI afin de se soustraire au régime établi par la convention
et de reprendre la chasse commerciale, le Japon a choisi de collaborer dans le cadre existant avec
les autres membres de la commission.
16. Nous avons scrupuleusement respecté le moratoire de la chasse commerciale à la baleine,
bien qu’après avoir initialement été conçu comme temporaire, il ait été par la suite prorogé pour - 7 -
une durée pratiquement indéfinie. Ne pouvant pas aller jusqu’à prétendre que la chasse à des fins
scientifiques soit contraire au droit, l’Australie soutient que les activités qu’autorisent les permis
spéciaux délivrés par le Japon relèvent de la chasse commerciale. Or, après avoir accepté le
moratoire de la chasse commerciale, le Japon a modifié radicalement ses pratiques baleinières,
comme l’expliquera en détail notre conseil, qui sera à même de démontrer amplement que nos
activités de chasse ont un caractère non pas commercial, mais bien scientifique.
17. Monsieur le président, j’aborde maintenant la question fondamentale portée devant la
Cour. La question qui oppose le Japon à l’Australie est celle de savoir s’il est possible d’autoriser
l’exploitation écologiquement viable des ressources marines en fonction de critères à la fois
juridiques et scientifiques.
18. Pourquoi le Japon pratique-t-il la chasse à la baleine à des fins de recherche ? Est-ce,
comme le prétend l’Australie, pour rependre la chasse commerciale sous couvert de la science, au
mépris du moratoire ? Certainement pas. Le Japon a entrepris un vaste programme de recherche
scientifique parce qu’il entend reprendre un jour la chasse commerciale dans des conditions
d’écoviabilité scientifiquement établies.
19. Si la CBI a besoin d’apports scientifiques, c’est d’une part parce que, aux termes de
l’article V de la convention de 1946, la réglementation doit «se fonder sur des données
scientifiques» et, d’autre part, parce que la clause du règlement établissant le moratoire comporte la
stipulation suivante : «[l]a présente disposition sera régulièrement soumise à un examen fondé sur
les meilleurs avis scientifiques. Cela signifie que la levée du moratoire est subordonnée à la
présentation au comité scientifique de la CBI de données scientifiques établissant que des limites
de capture sans risque peuvent être recommandées en vue de la reprise de la chasse commerciale
dans des conditions d’écoviabilité. Le Japon n’est pas seul à soutenir cette position. Par exemple,
la Norvège a déclaré récemment ceci :
«[c]ontinuer de recueillir des données scientifiques peut aussi s’avérer utile dans le
contexte du moratoire de la chasse commerciale à la baleine …, vu que ce moratoire
est essentiellement une mesure temporaire de suspe3sion prise dans l’attente de
décisions sur les modalités futures de gestion» [traduction du Greffe].
3
Written question from Terje Asland (A) to the minister of Fisheries and Coastal Affairs, Answered :
20 June 2013 by the Minister of Fisheries and Coastal Affairs, Lisbeth Berg-Hansen;
http://www.regjeringen.no/en/dep/fkd/Whats-new/News/2013/scientific-res…. - 8 -
20. Pourquoi le Japon a-t-il lancé le programme JARPA juste après avoir accepté le
moratoire ? Parce que, selon lui, l’imposition du moratoire a été motivée par l’impossibilité de
gérer rationnellement la chasse commerciale, faute de connaissances suffisantes sur les stocks
baleiniers. Le Japon a jugé que pour remédier à cette lacune, il lui fallait lancer un programme de
recherche dès que possible.
19 21. Pourquoi JARPA II se déroule-t-il dans des eaux qui sont à peu près les mêmes que
celles où le Japon pratiquait précédemment la chasse commerciale ? La réponse est que
l’expérience, ainsi que les données scientifiques les plus récentes sur l’abondance des populations
baleinières montrent que ces eaux sont propices à la pratique de la chasse commerciale dans des
conditions d’écoviabilité, conditions qui doivent cependant être scientifiquement établies avant que
le Japon ne puisse reprendre la chasse commerciale.
22. Le Japon devrait-il avoir honte de vouloir reprendre la chasse commerciale à la baleine ?
Tant qu’elle est pratiquée dans des conditions d’écoviabilité et dans le respect des accords sur
l’emploi de méthodes humaines de mise à mort, la chasse à la baleine relève de l’exploitation
légitime des ressources biologiques marines, laquelle constitue précisément l’objet de la convention
de 1946.
23. Monsieur le président, Mesdames et Messieurs de la Cour, nous ne savons que trop que
certains pays sont opposés par principe à la chasse à la baleine. Il importe donc d’autant plus que
puissent être présentés au comité scientifique des éléments prouvant que la reprise de la chasse
commerciale est possible, afin que la commission puisse prendre ses décisions en se fondant sur la
science, comme l’exige la convention de 1946. S’il mettait un terme à ses activités de chasse à des
fins scientifiques, le Japon priverait le comité scientifique des données qui lui permettraient
d’établir que la reprise écoviable de la chasse commerciale est possible, en conséquence de quoi le
moratoire serait indéfiniment prolongé. Voilà pourquoi le Japon se conforme scrupuleusement aux
règles établies par la convention de 1946. S’il avait laissé planer un doute sur son respect de la
convention, il aurait compromis ses chances d’atteindre le but important entre tous qui est, pour lui,
la reprise de la chasse commerciale à la baleine dans des conditions d’écoviabilité.
24. L’Australie, elle, fonde son argumentation sur sa politique de tolérance zéro à l’égard de
la mise à mort de baleines. On le constate par exemple à la lecture d’une déclaration du - 9 -
commissaire australien, dans laquelle il a notamment dit ceci : «la position de l’Australie est que
4
nous sommes opposés à toute recherche impliquant la mise à mort de baleines» [traduction du
Greffe] (les italiques sont de nous). Le Japon, en revanche, s’en remet à la science. Il ne fonde pas
sa position sur l’opinion d’un scientifique parmi d’autres, mais sur des travaux qui satisfont aux
exigences de la convention de 1946 et de l’annexe P, laquelle a été adoptée par le comité
scientifique de la CBI. Le comité scientifique, qui comprend plus de 150 experts spécialisés dans
l’étude des baleines, apprécie la valeur des résultats scientifiques des travaux entrepris au titre des
permis spéciaux délivrés par le Japon, et il en fait usage.
20 25. Se refusant à se prévaloir de l’interprétation littérale du membre de phrase «[n]onobstant
toute disposition contraire de la présente convention» qui figure au début de l’article VIII de la
convention de 1946, le Japon ne prétend pas que l’application de cet article est laissée à son
«entière discrétion». Sa position est clairement motivée par sa volonté de suivre l’approche de
5
précaution la plus rigoureuse. Le Japon s’est pleinement conformé aux obligations procédurales .
Il est scientifiquement établi que l’exécution des programmes JARPA et JARPA II n’a pas eu et n’a
pas d’effet délétère sur les stocks des espèces étudiées. Toujours présent lors des négociations qui
se sont déroulées dans le cadre de la CBI, le Japon s’est associé à ce qui était convenu et s’y est
rigoureusement conformé. C’est en s’appuyant uniquement sur ces solides fondements que le
Japon souhaite reprendre la chasse commerciale à la baleine dans des conditions d’écoviabilité
établies sur la base des meilleurs avis scientifiques, comme le prévoit expressément la convention
de 1946.
26. Dans les plaidoiries qui suivront mon exposé, nous traiterons de la question de la
compétence aussi bien que du fond de l’affaire. Nos conseils expliqueront que les activités de
chasse entreprises en vue de recherches scientifiques au titre de permis spéciaux délivrés par le
Japon sont conformes au droit et qu’elles répondent aux exigences de la science, comme l’a
reconnu le comité scientifique de la CBI. Ce faisant, nous montrerons pourquoi les arguments
avancés la semaine dernière par l’Australie sont dénués de fondement et ne sauraient accréditer
l’accusation grave portée contre le Japon, celle d’avoir violé une convention internationale.
4
Compte rendu de la CBI, 1998, p. 131.
5 Article XVIII ; Règlement, par. 30 ; annexe P. - 10 -
27. Mr. President, Members of the Court, the law evolves. But it does so only by agreement
between States. The scope of what has — or has not —been agreed can be assessed only through
recourse to the well-established rules of treaty interpretation. Japan has respected the fundamental
principle of pacta sunt servanda by complying in good faith with what was agreed on, and we
appear before you today in the hope that your Judgment will help to promote the stability of
international relations. Needless to say, if the Court were to revolutionize the law of treaties, this
would have significant long-term consequences for international law. However, we are convinced
that the Court, the principal judicial organ of the United Nations, will ensure observance of the
fundamental principle of keeping one’s word in the terms that it has been given.
28. The Court’s role is to rule on the lawfulness of the acts of States, not on their morality or
ethical value. Some regard whales as sacred creatures, as cows are for Hindus. Religions and
21 cultures perceive animals in different ways. There are over seven billion people living in the
world, spread across five continents; the only way of allowing them to coexist peacefully is by
respecting their differences and not imposing the views of some upon others.
29. Having read and listened carefully to Australia’s arguments, I am convinced that that
country is unilaterally attempting to impose a ban on all forms of whaling on the basis of its own
values rather than on the basis of a legal argument relating to the scientific whaling authorized by
Japan. It is true that, within this context, Japan takes and kills whales. Should we be ashamed of
that? Some may well think so, but that does not mean that we are in breach of international law. If
we talk in terms of culture, Japan is proud of its history, which dates back a very long way, and its
tradition of being close to nature and of preserving the environment for future generations. We do
not criticize other cultures. Mr. President, I say this quite clearly: were it necessary to establish the
superiority of one culture over another, the world could not live in peace.
30. Returning to pacta sunt servanda. This is the foundation of the law which has enabled
nations to coexist for centuries, and it would be extremely unfortunate to disregard this sound
principle for the ill-considered reason that the acts of certain States seem morally reprehensible to
others. - 11 -
31. Mr. President, Members of the Court, I thank you for your attention and ask,
Mr. President, if you would be so kind as to give the floor to Professor Pellet. Thank you very
much.
The PRESIDENT: Thank you very much, Mr. Tsuruoka. I give the floor to Professor Pellet.
You have the floor, Sir.
22 Mr. PELLET:
The Court’s lack of jurisdiction
1. Mr. President, Members of the Court, the Agent of Australia was quite open about it: the
case which that country has submitted to you is part of its campaign for a general and permanent
ban on all commercial whaling . 6 Feigning to borrow New Zealand’s concept of “collective
8
regulation” , Australia substitutes its own unilateral vision, and echoes its activists’ slogan by
championing a “zero-tolerance” approach to all whale research that uses lethal methods. In order
to do so:
(1) It modifies the object and purpose of the 1946 Convention “for the regulation” not the
prohibition, Mr. President, the regulation “of whaling”, which Australia transforms into an
9
instrument purely for “conservation and recovery” that is its new wording, whereas the
objective of that instrument, which is clearly defined in the preamble, is to safeguard the natural
resources represented by whales and thus “make possible the orderly development of the
whaling industry”.
(2) Australia interprets Article VIII of the Convention in a way that is inconsistent with its
wording, its context, its travaux préparatoires and the practice to which it has given rise; in
particular, the conditions which it seeks to attach to the use of certain research methods render
them completely impracticable, even though they are expressly provided for in that key
6
CR 2013/7, p. 19, para. 4 (Campbell).
7See WON , paras. 6, 7, 14-32.
8CR 2013/7, p. 20, para. 7, p. 22, para. 12 (Campbell).
9
CR 2013/7, p. 29, para. 20 (Gleeson); p. 40, paras. 1-2, p. 41, paras. 6-7, p. 43, para. 13, p. 45, para. 20, p. 46,
para. 22, p. 49, paras. 33-34, p. 51, para. 35 (Boisson de Chazournes). - 12 -
provision. In so doing, Australia seeks to set at naught the scope of Article VIII, which
expressly allows a very wide margin of appreciation to the Contracting Governments, and this
despite the fact that no legally binding text limiting or, a fortiori, ruling out the use of such
23
methods has ever been adopted in the International Whaling Commission (IWC).
(3) It does all of this in the name of “Science”, which is presented as a revealed religion,
corresponding to an indisputable truth, with Australia in the role of zealous devotee. Yet it
seems to me that all scientific enquiry is distinguished by an awareness of the relativity of
approaches, modesty and the comparison of different points of view; here, that is far from
being the case, Mr. President: “We, Australia” or “I, Professor Mangel, know: there is only
one science and we alone hold the key to its truth.” “True science”, said Montaigne, “is an
ignorance which knows itself” ; Australia and its experts cannot be said to have a modest
attitude towards science.
(4) And yet, Mr. President, the reactions of the scientific community including in the IWC’s
Scientific Committee provide no form of support for the contempt in which Australia seems
to hold the JARPA II programme. It is true that it has been the subject of criticism
sometimes strong criticism in certain circles with links to States that are hostile to whaling
on principle; however, if we choose not to confine ourselves to a few quotations taken out of
context and emanating from those sources, the picture is much less gloomy than our Australian
friends wish to paint it. Views on the subject vary widely, which in itself is testimony to the
lack of any certainty in this area; it would seem to be difficult, to say the least, for an
international court, however eminent, to decide between these divergent views and give
precedence to “one” controversial scientific truth over another.
(5) Finally, it is certainly true that States have to act in good faith and not abuse their rights under
11
international law; however, besides the fact that “bad faith is not presumed” , where does the
abuse lie?
1Michel de Montaigne, Essais, 1580.
11
Lac Lanoux arbitration (Spain, France), Arbitral Award of 16 November 1957, UN, RIAA, Vol. XII, p. 305 [in
French only; in English in ILR, Vol. 24, p. 101, para. 9]. See also the Tacna Arica question (Chile/Peru), Arbitral Award
of 4 March 1925, UN, RIAA, Vol. II, pp. 929-930 and Mavrommatis Jerusalem Concessions, Judgment No. 5, 1925,
P.C.I.J. Series A, No. 5, p. 43; Certain German Interests in Polish Upper Silesia, Merits, Judgment No. 7, 1926, P.C.I.J.,
Series A, No. p. 30. - 13 -
In the fact that Japan, after accepting the moratorium, took measures, in the spirit of
Article VIII, paragraph 4, of the Convention, to compensate (in part) for the loss of scientific
24 data traditionally provided by commercial whaling? Or that under the moratorium itself, Japan
sought to obtain scientific information which gives the IWC the assurance that it can safely
review the moratorium? Most certainly not: JARPA and JARPA II are not ways of
12
circumventing the moratorium ; the strong increase in the use of lethal research methods is a
consequence of the moratorium and the resulting dearth of data .
Might the abuse lie simply in having recourse to these methods? Yet, as I have said, they are
expressly envisaged by Article VIII, and even Australia’s experts have had to concede that
there are no alternative methods which are both reasonably practicable and able to provide
13
equivalent information . As Mr. Gales also acknowledged, in reply to a question from
Judge Donoghue, this is, regrettably, the only means of determining the age of whales, which is
essential for evaluating their mortality and establishing an age distribution model 14 one of
15
the objectives of JARPA II ; that also explains the relatively high numbers of minke whales
which have been taken for this purpose, since statistics relating to a fairly large number of
animals are required to establish the model. It is certainly true (and only natural) that there are
differences of opinion between experts over problems of this kind, but what is much less
certain is that the Court might be able to settle those disputes.
Might the abuse lie in the fact that the products obtained from whaling activities are, in
accordance with directions issued by the Japanese Government, as far as possible, sold on the
open market in order to cover research costs? This is, however, consistent with the provisions
of Article VIII, paragraph 2, and widely observed, current good practice on research funding.
Or might there be abuse because Japan is said not to be respecting certain resolutions adopted
by the IWC often by narrow majorities? But these texts are not legally binding and, on the
25 other hand, Japan has always complied scrupulously with all its procedural obligations under
12
CR 2013/7, p. 25, para. 4, p. 27, para. 11, p. 30, para. 25; CR 2013/11, pp. 30-31, para. 21 (Gleeson).
1See CR 2013/9, p. 65 (Mangel).
1CR 2013/10, p. 31 (Gales).
15
See Government of Japan, “Plan for the Second Phase of the Japanese Whale Research Program under Special
Permit in the Antarctic (JARPA II) Monitoring of the Antarctic Ecosystem and Development of New Management
Objectives for Whale Resources”, SC/57/O1(2005), pp. 2, 6-7; CMJ, Ann. 150. - 14 -
both the Convention and paragraph 30 of the Schedule of regulations annexed thereto;
moreover, it has even gone well beyond those obligations by co-operating in good faith with
the organs of the Convention, whose views it has always given careful consideration the
same cannot necessarily be said of Australia which, for its part, has used those organs to try to
obtain an interpretation of the 1946 Convention that is contrary to its letter and spirit.
2. My colleagues and I will elaborate on these points and others later this afternoon
and over the next two days. However, we will only do so as a precaution or to use a common
phrase to supplement our legal argument, since we are firmly convinced that the Court does not
have jurisdiction to rule on the Application which Australia believed it could submit to it.
3. In fact, even though Japan did not exercise its right to raise preliminary objections, it
nevertheless objects to the Court’s jurisdiction. It is this objection to jurisdiction whose
16
admissibility Australia does not contest and which it claims to treat very seriously which it is
my task to present to you today.
4. Nevertheless, Mr. President, Japan finds itself in a rather unusual and, indeed, most
uncomfortable position. Australia did not deem it necessary to request a second round of written
pleadings, and the Court did not order one. As a result, until last Friday Australia was careful to
wait until the very last minute to plead this preliminary point . . . we were completely in the dark
about the Applicant’s position on what is, in our view, an essential aspect of the case.
5. The only information we had came in connection with a subsidiary point about the scope
of the Application which has some importance, it is true. Thus, during the procedural meetings
with the President of the Court, the Applicant’s Agent gave a formal undertaking not to extend the
scope of its claims, either ratione materiae (to other conventions), or ratione loci (to the North
Pacific in particular). In his letter to the Registrar of the Court, dated 22 May 2012,
Mr. William Campbell, Agent of Australia, wrote:
“I confirm, as I did at the meeting of the President of the Court with the Agents
of the Parties on 23 April 2012, that Australia’s claim in these proceedings concerns
Japan’s JARPA II programme in the Southern Ocean (see Australia’s Application
Instituting Proceedings, paragraph 2).”
1CR 2013/7, p. 38, para. 60 (Gleeson) and CR 2013/11, p. 41, para. 2 (Burmester). - 15 -
26 This last detail is significant because it establishes that Australia is not seising the Court of a
17
programme which is similar to JARPA II , but which is being deployed in a maritime area over
which Australia has no claim.
6. The issue placed before the Court, therefore, to the exclusion of any other issue, is
whether the JARPA II programme, which is being conducted in the Southern Ocean, is compatible
with the 1946 Convention. I would also recall that it is the Application, as interpreted by the
Parties, which fixes and limits the Court’s jurisdiction . The fact is, however, Mr. President, that
the Application, as so defined, does not fall within its jurisdiction, as established by the optional
declarations of acceptance of the compulsory jurisdiction of the ICJ pursuant to Article 36,
paragraph 2, of the Statute, made respectively by Australia and Japan. These declarations can be
found at tab 16 of the judges’ folder. Both contain a number of reservations.
7. In the present case, the claim that these declarations coincide is the only basis on which
19
Australia seeks to found the Court’s jurisdiction . No other basis is invoked. I note in particular
that the 1946 Convention, the violation of which is invoked by Australia to the exclusion of any
other treaty does not contain a dispute settlement clause.
8. In accordance with Article 36, paragraph 2, of the Statute, Japan’s declaration specifies
that it is made “in relation to any other State accepting the same obligation”. On the basis of the
principle of reciprocity, which the Court recalled, for example, in its Judgment of 11 June 1998 on
20
the preliminary objections in the Cameroon v. Nigeria case , and which it has implemented
1CR 2013/8, p. 57, para. 7 (Sands).
1See Article 40, paragraph 1, of the Statute and Article 38, paragraph 2, of the Rules of Court; see also
Prince von Pless Administration, Order of 4 February 1933, P.C.I.J. Series A/B, No. 52, p. 14; Certain Phosphate Lands
in Nauru (Nauru v. Australia), Preliminary Objections, Judgment, I.C.J. Reports 1992, p. 267, para. 69; Territorial and
Maritime Dispute between Nicaragua and Honduras in the Caribbean Sea (Nicaragua v. Honduras), Judgment,
I.C.J. Reports 2007 (II), p. 695, para. 108; Certain Questions of Mutual Assistance in Criminal Matters (Djibouti v.
France), Judgment, I.C.J. Reports 2008, pp. 205-206, paras. 66-70; Jurisdictional Immunities of the State (Germany v.
Italy: Greece intervening), Judgment of 3 February 2012, I.C.J., paras. 37-39.
1Application, para. 4; MA, para. 1.10; CR 2013/11, p. 41, para. 5 (Burmester).
2Land and Maritime Boundary between Cameroon and Nigeria (Cameroon v. Nigeria), Preliminary Objections,
Judgment, I.C.J. Reports 1998, pp. 298-299, para. 43. See also the case law cited and Phosphates in Morocco, Judgment,
1938, P.C.I.J. Series A/B, No. 74, p. 22; Legality of Use of Force (Yugoslavia v. Spain), Provisional Measures, Order of
2 June 1999, I.C.J. Reports 1999 (II), p. 23, para. 25 and Legality of Use of Force (Yugoslavia v. Belgium), Provisional
Measures, Order of 2 June 1999, I.C.J. Reports 1999 (I), p. 135, para. 30. - 16 -
27 several times, Japan may invoke Australia’s reservations or in any case one of them to
21
oppose the exercise of jurisdiction by the Court. The applicant State does not dispute this .
[Slide 1: The second Australian reservation]
9. With your permission, Mr. President, I shall read this reservation, which is included in
Australia’s declaration of 22 March 2002 and which precludes the Court from exercising
jurisdiction in the present case. I will read the original English version of the text, since the French
translation is curious in some respects. Indeed, the version in the United Nations Treaty Collection
is rather odd.
“This declaration does not apply to:
. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .
(b) any dispute concerning or relating to the delimitation of maritime zones, including
the territorial sea, the exclusive economic zone and the continental shelf, or arising
out of, concerning, or relating to the exploitation of any disputed area of or
adjacent to any such maritime zone pending its delimitation;
. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .”
10. Interpreted in accordance with Australia’s intentions, this reservation covers the
subject-matter of the Application and deprives the Court of jurisdiction over the case.
I. The scope of Australia’s reservation (b)
11. When it is required to interpret an optional declaration accepting compulsory
jurisdiction, the Court emphasizes the will of the declarant State as manifested by the terms of the
declaration. Thus, in the Fisheries Jurisdiction case, it held that:
“since a declaration under Article 36, paragraph 2, of the Statute, is a unilaterally
drafted instrument, the Court has not hesitated to place a certain emphasis on the
intention of the depositing State. Indeed, in the case concerning Anglo-Iranian Oil
Co., the Court found that the limiting words chosen in Iran’s declaration were ‘a
decisive confirmation of the intention of the Government of Iran at the time when it
accepted the compulsory jurisdiction of the Court’ (ibid., p. 107).
49. The Court will thus interpret the relevant words of a declaration including a
28 reservation contained therein in a natural and reasonable way, having due regard to
the intention of the State 22ncerned at the time when it accepted the compulsory
jurisdiction of the Court.”
21
See CR 2013/11, p. 41, para. 6 (Burmester).
2Fisheries Jurisdiction (Spain v. Canada), Jurisdiction of the Court, Judgment, I.C.J. Reports 1998, p. 454,
paras. 48-49 (emphasis added); see also, Aegean Sea Continental Shelf (Greece v. Turkey), Judgment, I.C.J. Reports
1978, p. 32, para. 77. - 17 -
My old friend Henry Burmester, whom I am happy to meet again here, even if we are not on the
same side of the Bar, acknowledges that these are the principles that should be applied in this
23
case .
12. In order to respond to the question whether or not this dispute falls within the jurisdiction
of the Court, therefore, it is necessary to look at the matter from the standpoint of Australia and
consider whether the latter could be successful in opposing settlement of the dispute by the Court in
the event that it was the respondent in a case of the same type as the one before you.
13. The terms of the second Australian reservation are very broad and it is obvious that they
were deliberately drafted in such a way as to cover any dispute relating to the maritime zones to
24
which they refer. Despite our opponents’ denials , Australia’s reservation (b) is not confined to
excluding disputes relating solely to the delimitation of maritime territory. It adds those “relating
to” such delimitation, and of particular relevance to this case those “arising out of” or else
“concerning, or relating to the exploitation of any disputed area of or adjacent to any such maritime
zone pending its delimitation”. I note in passing that, in its Judgment of 28 May 2013 in the
M/V “Louisa” case invoked by Mr. Burmester , the International Tribunal for the Law of the Sea
relied on “the use of the term ‘concerning’ in the declaration” of Saint Vincent and the Grenadines
under Article 287 of the Montego Bay Convention, in order to conclude that “the narrow
interpretation of [this] declaration . . . is not tenable” .
14. The formula adopted by Australia in reservation (b) is not unlike the one used by Canada
to qualify its acceptance of the Court’s compulsory jurisdiction, which was the subject of an
29 interpretation by the Court in the Fisheries Jurisdiction case. In its Judgment of 4 December 1998,
the Court began:
“by pointing out that, in excluding from its jurisdiction ‘disputes arising out of or
concerning’ the conservation and management measures in question and their
23
CR 2013/11, p. 43, para. 12 (Burmester).
24CR 2013/7, pp. 38-39, para. 62 (Gleeson) and CR 2013/11, p. 42, para. 10, and p. 44, paras. 18 and 21
(Burmester).
25CR 2013/11, pp. 49-50, para. 38.
26
International Tribunal for the Law of the Sea (ITLOS), Judgment of 28 May 2013, The M/V “Louisa” case
(Saint Vincent and the Grenadines v. Kingdom of Spain), para. 83. - 18 -
enforcement, the reservation does not reduce the criterion for exclusion to the
‘subject-matter’ of the dispute” .7
The same holds true in the present case: given the way in which the Australian reservation is
worded, the Court must have regard not only to the strictly formulated subject-matter of the
dispute. The broad wording of the reservation authorizes and even obliges it to go further. As the
Court noted in the same 1998 Judgment:
“The language used in the English version ‘disputes arising out of or
concerning’ brings out more clearly the broad and comprehensive character of the
formula employed. The words of the reservation exclude not only disputes whose
immediate ‘subject-matter’ is the measures in question and their enforcement, but also
those ‘concerning’ such measures and, more generally, those having their ‘origin’ in
those measures (‘arising out of’) that is to say, those disputes which, in the absence
of such measures, would not have come into being.” 28
15. However, if one compares the two declarations, that of Australia and that of Canada
which was applicable in the 1998 case, one finds that the former that of Australia is even
broader, since the expression “dispute . . . arising out of the exploitation” of one of the zones
concerned or “concerning [such] exploitation” is supplemented, in the case of Australia, by
disputes “relating to [such] exploitation”. “[T]he broad and comprehensive character of the
formula employed” is thus even more striking: the terms of the reservation exclude not only
disputes whose immediate “subject-matter” is the exploitation of a disputed area, but also, to
paraphrase the Court’s Judgment of 1998, not only those “concerning” such exploitation; not
only, more generally, all those having their “origin in” (“arising out of”) such exploitation; but
30 also those which, in one way or another, “would relate to” such exploitation. On this point, we
entirely agree with Mr. Burmester, even though, curiously, he seeks to have us say the contrary . 29
16. The cumulative presence of expressions such as “arising out of” or “concerning” also led
the Court, in the Fisheries Jurisdiction case, to observe that:
“Thus the scope of the Canadian reservation appears even broader than that of
the reservation which Greece attached to its accession to the General Act of 1928
27
Fisheries Jurisdiction (Spain v. Canada), Jurisdiction of the Court, Judgment, I.C.J. Reports 1998, p. 458,
para. 62.
2Fisheries Jurisdiction (Spain v. Canada), Jurisdiction of the Court, Judgment, I.C.J. Reports 1998, p. 458,
para. 62 (original emphasis). See also, Aegean Sea Continental Shelf (Greece v. Turkey), Judgment, I.C.J. Reports 1978,
p. 36, para. 86; Certain Property (Liechtenstein v. Germany), Preliminary Objections, Judgment, I.C.J. Reports 2005,
p. 25, para. 46.
2CR 2013/11, pp. 47-48, para. 32 (Burmester). - 19 -
(‘disputes relating to the territorial status of Greece’), which the Court was called upon
30,31
to interpret in the case concerning the Aegean Sea Continental Shelf ”
In the latter case, moreover, concerning the Aegean Sea, the term “relates to” is systematically
translated as “a trait à” in French . 32
17. Furthermore and here, on the contrary, I am no longer in agreement with my
opponent, the repetitive use of the conjunction “or” (used no fewer than four times in
reservation (b) alone) establishes Australia’s intention broadly to exclude the jurisdiction of the
Court: the five hypotheses referred to are not cumulative but indeed alternative, or, or, or, or. In
no sense does the reservation bear exclusively on disputes concerning the delimitation of one of the
zones mentioned therein and “relating to” such delimitation, any more than it bears exclusively on
a dispute “arising” out of its exploitation and concerning it, and relating to such exploitation
(which would moreover be rather absurd): only “or” is used; it is sufficient, therefore, for one of
these hypotheses to apply in order for the Court to have to decline jurisdiction. And as
Mr. Burmester 33realized in extremis in his presentation, the primary “or” is the second one, that
which separates the “delimitation” sequence from the “exploitation” sequence. Indeed, it would
make no sense to repeat twice in the original English text: “concerning or relating to” delimitation,
on the one hand, and exploitation, on the other, if one had to read the two “sets” of exclusion of the
Court’s jurisdiction as identical and relating only to delimitation.
34
31 18. I readily admit that there is no question of delimitation . But nothing in the text of
reservation (b) implies that it relates exclusively to a maritime delimitation dispute. On the
contrary, and several observations may be made in this regard:
(1) it is not without interest to note that the Australian declaration of 1954 contained a reservation
35
concerning the rights to the waters and maritime zones claimed by Australia ; that reservation
30
I.C.J. Reports 1978, p. 34, para. 81 and p. 36, para. 86.
31Fisheries Jurisdiction (Spain v. Canada), Jurisdiction of the Court, Judgment, I.C.J. Reports 1998, p. 458,
para. 62.
32Aegean Sea Continental Shelf, Jurisdiction (Greece v. Turkey), I.C.J. Reports 1978, p. 34, para. 81 and p. 36,
para. 86 in fine, and p. 37, para. 90. See also Article 102, para. 2, of the Rules of Court; Territorial Jurisdiction of the
International Commission of the River Oder, Judgment No. 16, 1929, P.C.I.J., Series A, No. 23, p. 16.
33CR 2013/11, p. 46, para. 28 (Burmester).
34
On the distinction, see for example: Continental Shelf Libyan Arab Jamahiriya/Malta), Judgment, I.C.J.
Reports 1985, p. 41, para. 50.
35United Nations, Treaty Series (UNTS), 6 Feb. 1954, Vol. 186, No. I-2484, pp. 82-83. - 20 -
was considerably less broad than the one contained in the current declaration: moreover, it was
36
withdrawn in 1975 . The Australian Government therefore acted quite deliberately in once
again modifying its declaration in 2002 and coupling it with an extremely broad reservation
concerning disputes relating to a maritime delimitation or (and I stress the word “or”,
Mr. President!) or to the exploitation of a disputed maritime zone or of an area adjacent to
any such zone pending its delimitation. I note in passing that Australia does not dispute in this
case the applicability of this broad reservation ratione loci 37 note taken.
(2) The sequence of the “ors” that I have just referred to is perfectly clear: it excludes the Court’s
jurisdiction, first in relation to the delimitation of disputed maritime areas, and second in
relation to their exploitation; and the expression “pending . . . delimitation” does nothing to
change this: it describes a point in time, a state of fact, but not in this instance the
subject-matter of the excluded dispute; the Court may rule neither on delimitation nor, as long
as delimitation has not taken place, on the exploitation of the disputed areas or adjacent areas. I
shall pause for the interpreters. I have been obliged to add a short passage in extremis, as only
this morning we received a highly interesting and important document. Moreover, that is
exactly the presentation that was given by the Attorney-General of Australia, in an official
document analysing, at the time of its adoption, the new Australian declaration, which
Mr. Burmester mentioned in paragraph 32 of his address. Hence, as I said, we received the text
at 11 o’clock this morning. I shall read out the text:
32 “The new declaration limits Australia’s acceptance of the compulsory
jurisdiction of the I.C.J. This means that an action cannot be commenced against
Australia in the following circumstances:
. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .
[and you have it on your screens]
(b) where disputes involve maritime boundary delimitation, or disputes concerning the
exploitation of an area in dispute, or adjacent to an area in dispute.” (Emphasis
added.)
It is crystal clear.
36
UNTS, 17 March 1975, Vol. 961, No. I-3809, p. 183.
3See CR 2013/11, pp. 41-51, passim (Burmester). - 21 -
(3) The contrary interpretation put forward by Australia leads to an utterly absurd result and
deprives the entire second part of the reservation of any meaning: it would signify that the
Court may not settle a dispute relating to delimitation but, once the dispute is resolved, it could
rule on exploitation . . . If such was the meaning of the second part of the sentence, it would
make it totally superfluous and Australia would have had to content itself with merely
excluding the Court’s jurisdiction in respect of delimitation “full stop”! In order for the
reference to exploitation to have a valid meaning, it has to be admitted that, pending
delimitation, the Court can rule neither on the delimitation of the areas concerned, nor on their
exploitation.
(4) The discussions within the Australian Parliament (which are reported in a document produced
by Japan Annex 167 to our Counter-Memorial) and which Mr. Burmester tried hard to gloss
over, confirm this interpretation and show that reservation (b) concerns not only the
delimitation of maritime zones, but more broadly disputes that have “a maritime aspect” . 38
That expression was used by Mr. Campbell during those hearings, in connection with the
Nuclear Tests case, concerning which I readily admit that it may be presented as what he called
“a semi-maritime matter”, although I must say that I have never been struck by its
“delimitation” aspect. Another example of cases having a maritime aspect, as provided by
Mr. Campbell in the discussion with parliamentarians, is that of East Timor, concerning which
Mr. Burmester very rightly remarked that it did not concern a maritime delimitation but that it
33 “put at risk existing resource exploitation by Australia”, because “American oil companies,
with interest in exploiting areas off Timor-Leste, were telling anyone who would listen that
they had legal advice that Timor-Leste could properly claim not just a share of the resources
within the former joint zone but also in areas which lay outside its boundaries, including areas
39
already being exploited by Australia” . That is exactly what we say, Mr. President: in drafting
its declaration, Australia sought to evade the Court’s jurisdiction in respect of the exploitation
of natural resources in disputed maritime areas or areas adjacent to those to which it has claims.
38See Parliamentary Debates, Joint Standing Committee on Treaties, 12 July 2002 (William Campbell), TR 49;
CMJ, Ann. 167, p. 217.
39CR 2013/11, p. 45, paras. 23-24 (Burmester). - 22 -
Why would it rely on that exclusion when the oil it craves is at stake and refuse the benefit of
that exclusion to Japan in connection with the exploitation of another natural resource?
(5) And to end the fable of the reservation relating exclusively to maritime delimitation, a word
about the analogy outlined by Mr. Burmester with the declaration issued by Australia at the
same time under Article 298, paragraph 1, of the United Nations Convention on the Law of the
Sea. My opponent suggests that this “reservation” (let him take responsibility for that word)
40
has the same scope as the one contained in the Australian optional declaration . It is
interesting to read that declaration and compare it with the text of reservation (b). You have
reservation (b) on the screen. I shall read in English the Australian declaration under
Article 298.
“The Government of Australia further declares, under paragraph 1 (a) of
article 298 of the United Nations Convention on the Law of the Sea . . ., that it does
not accept any of the procedures provided for in section 2 of Part XV (including the
procedures referred to in paragraphs (a) and (b) of this declaration) with respect of
disputes concerning the interpretation or application of articles 15, 74 and 83
relating relating, that is what is of interest 41 us to sea boundary delimitations as
well as those involving historic bays or titles.”
If there is a reservation, Mr. President, it does in fact, in this declaration, relate exclusively to
delimitation (of the territorial sea, the exclusive economic zone and the continental shelf), but there
is no question of exploitation of the natural resources of these zones; still less of the natural
34 resources of adjacent zones pending delimitation. And the reason is quite simple: it would have
been contrary to Article 309 of the Convention, which prohibits any reservation or exception not
expressly provided for in respect of dispute settlement: those that are not permitted by
Article 287, paragraph 1, a provision which concerns only dispute settlement in respect of the
delimitation of maritime zones. In that declaration, Australia could not add to the exclusion of
delimitation the exclusion of the exploitation of natural resources. On the other hand, it could do
so in its optional declaration under Article 36 and it did so: that exclusion is set out in
reservation (b).
4Ibid., pp. 43-44, para. 17.
41
Declarations of States Parties Relating to Settlement on Disputes in Accordance with Article 298 (Optional
Exceptions to the Applicability of Part XV, Section 2, of the Convention), available online:
http://www.itlos.org/fileadmin/itlos/documents/basic_texts/298_declarat…. - 23 -
19. Exploitation no great mystery attaches to this word. It encompasses all uses of the
resources of the sea and, moreover, the word “exploitation”, which appears in the English text of
Article 65 of the United Nations Convention on the Law of the Sea dealing with marine mammals,
is translated into French by “utilisation optimale”. And Article 120, which refers to Article 65,
shows that “the conservation and management of marine mammals” should be included in this
concept.
20. There is written testimony to the effect that the word “exploitation”:
“is a broad term which covers the utilization of animals for reasons such as pure
commercial gain, subsistence or in the interests of conservation or control. The means
by which it is carried out can be consumptive, either permanently removing animals
from the population by hunting or live-trapping or harvesting products from wild
individuals under management regimes.” 42
21. Clearly, Mr. President, the activities that Australia accuses Japan of conducting concern
the exploitation of the resources of a maritime zone. Ratione materiae, they are covered by
reservation (b) of Australia’s 2002 declaration; they are central to the dispute; they constitute its
very subject-matter.
22. So much, Mr. President, for the interpretation of the second Australian reservation; the
Court cannot accept jurisdiction if the Application relates to a dispute arising out of, concerning, or
35 relating to the exploitation of any disputed area of or adjacent to any such maritime zone pending
its delimitation. That is no doubt the case in these proceedings.
[End of slide 1]
II. Reservation (b) applies in the present case
23. Mr. President, it seems to me that, in a sense, it may be said that the present dispute
“arises out of . . . exploitation”, since it is concerned with the activities undertaken by Japan to
ensure the sustainable exploitation of a natural resource of a maritime zone. In any event, there is
no doubt that the dispute “concerns” and “relates to” exploitation.
42Victoria J. Taylor and Nigel Dunstone, “The exploitation, sustainable use and welfare of wild mammals”, in
V. J. Taylor and N. Dunstone (eds.), The Exploitation of Mammal Populations, Chapman & Hall, Bury St Edmunds,
Suffolk, 1996, p. 3-4; emphasis added. - 24 -
43 44
24. As Australia stated in its Application , as it repeated in its Memorial , as its Agent
reiterated during the consultation meeting of 23 April 2012 with the President of the Court and
45
confirmed in his letter of 22 May 2012, which I cited a few moments ago , and as counsel for
46
Australia again said last week , “Australia’s claim in these proceedings concerns Japan’s
JARPA II programme in the Southern Ocean” . The JARPA II programme in the Southern Ocean,
and therefore not the JARPN programme, which is, nevertheless, its twin, but which, for its part,
operates in the North Pacific, where Australia has no particular interests to safeguard . 48
Mr. President, this confirms that Australia, while giving assurances to its own public opinion, is not
acting altruistically to defend international law but rather to protect its maritime claims.
25. No matter how we look at it whether we interpret Japan’s own definition literally or
whether we refer to Australia’s claims, JARPA II, which, as the Applicant has consistently
36 admitted, is the sole subject of the dispute, is indisputably a programme which concerns and relates
to the exploitation of a marine resource.
26. Japan has always indicated that the aim of JARPA was to gather information that would
allow the resumption of the commercial whaling of certain species. The object of the programme
is to ascertain whether such whaling is sustainable. It concerns applied scientific research, linked
to the exploitation of the natural resources of the sea.
27. Thus, the establishment of the JARPA I programme was the result of Japan’s wish to
participate in the “review” of the zero catch limit provided for in paragraph 10 (e) of the Schedule
to the Convention, a review based upon “the best scientific advice”, which was designed to enable
the IWC to undertake a “comprehensive assessment of the effects” of the moratorium by 1990 at
the latest .9 The objectives of this first programme were also focused on improving the
50
management of whale stocks in the Southern Ocean in order to establish the possibility of their
43
Application, paras. 40-41.
44
MA, paras. 1.3-1.7.
4See para. 5 above.
4CR 2013/7, p.22, para.13 (Campbell).
47
See para. 5 above.
48
See ibid.
4See CMJ, paras. 4.1-4.2, 4.40.
5See CMJ, paras. 4.18, 4.25-4.37. - 25 -
exploitation. Objective 1 was aimed at providing an “estimation of the biological parameters
required for the stock management of the Southern Hemisphere minke whale” . For its part, 51
Objective 4 concerned the “elucidation of the stock structure of Southern Hemisphere minke
whales to improve stock management” . JARPA II, which was started in 2005, followed on from
JARPA I. Its objectives are closely related to the “Revised Management Procedure” (RMP), a
method which the IWC established with a view to calculating a reasonable level of catches , and 53
which Professor Hamamoto will present in greater detail tomorrow morning. The ambition of the
JARPA II programme is to “ultimately lead to the improvement of the whale stock management
54
procedures” . “Looking to the future, the IWC will need to consider a multi-species management
37 approach in the Antarctic Ocean, which has the world’s largest whale resources, for the
55
conservation and sustainable use of these resources.”
28. While it is true that the JARPA II programme is a scientific programme, it is still part of
a process whose purpose is the sustainable exploitation of certain whale stocks in the Southern
Ocean. With the ultimate objective of establishing whether and to what extent the conditions for a
resumption of whaling are met and what precautions must be taken in order to ensure the
sustainability of that activity through reasonable management of the stocks, JARPA II is clearly
“related to” the exploitation of marine resources. Indeed, it concerns exploitation very directly.
29. Mr. President, in order to demonstrate this, I have relied on what I would call “the truth
about JARPA II”. But for the purposes of this debate, I may as well refer to the erroneous
allegations made by Australia, which claims to see acts of commercial whaling in Japan’s
programme. It asserts that “the whales are killed for commercial exploitation of the whale meat
51
Government of Japan, “The Program for Research on the Southern Hemisphere Minke Whale and Preliminary
Research on the Marine Ecosystem in the Antarctic”, SC/48/SH3 (1996), p. 2; CMJ, Ann. 135.
52Government of Japan, “The 1996/97 Research Plan for the Japanese Whale Research Program under Special
Permit in the Antarctic”, SC/48/SH3 (1996), p. 2; CMJ, Ann. 146.
53CMJ, p. 130, para. 3.85.
54Government of Japan, “Plan for the Second Phase of the Japanese Whale Research Program under Special
Permit in the Antarctic (JARPA II) Monitoring of the Antarctic Ecosystem and Development of New Management
Objectives for Whale Resources”, SC/57/O1 (2005), pp. 8-9, 12; CMJ, Ann. 150.
55Government of Japan, “Plan for the Second Phase of the Japanese Whale Research Program under Special
Permit in the Antarctic (JARPA II) Monitoring of the Antarctic Ecosystem and Development of New Management
Objectives for Whale Resources”, SC/57/O1 (2005), p. 6; CMJ, Ann. 150. - 26 -
and to sustain the Japanese whaling industry” and that “the Convention contemplates three types
57
of whaling. The only one that fits JARPA II is commercial whaling” . Indeed, I note that by
arguing that “the conservation of whales, even for purposes of economic exploitation, requires a
58
collective, predictable and mandatory system of supervision” , Australia characterizes whaling
activities under the Convention régime as the exploitation (or at times the over-exploitation) of
59
stocks .
30. Mr. President, I in no way concede that JARPA II is a commercial whaling programme
60
in disguise . All I am saying is that, if it were, as Australia claims it is, it would clearly relate to
the exploitation of the resources of the maritime zones in which it operates. In other words,
38
whether we retain the accurate description given to it by Japan or the erroneous
description put forward by Australia, the result is the same: JARPA II, which is the very
subject-matter of the dispute submitted to the Court by Australia, is closely “related” to the
exploitation of the maritime zone where it operates and “concerns” that exploitation very directly.
31. In any event, Australia cannot be right on both jurisdiction and the merits. It cannot have
it both ways: either it is right on the merits JARPA II constitutes commercial hunting but in
that case the dispute is clearly excluded from your jurisdiction because it obviously relates to
exploitation; or it is right on jurisdiction with the case not concerning, stricto sensu, the
exploitation of whales but then it must be wrong on the merits.
61
32. It is therefore of little relevance that Japan has no delimitation dispute with Australia
falling within the narrow definition of “overlapping maritime claims” 62 used by counsel for the
Applicant on Friday. The two countries have a dispute over the exploitation of a maritime zone
that Australia regards as being within its exclusive economic zone, which Japan disputes, and
within the zone adjacent to the disputed zone.
56CR 2013/7, p. 26, para. 6 (Gleeson).
57
CR 2013/11, p. 15, para. 45 (Crawford).
58CR 2013/7, p.43, para. 11 (Boisson de Chazournes); see also, for example, ibid., p. 26, para. 6 (Gleeson).
59See also MA, Chap. 2, Sect. IV, passim. See also MA, para. 1.2 or para. 2.125 and Expert Opinion, p. 294,
para. 2.15, or p. 318, para. 6.12. Among the authors who adopt a similar approach, see Elle Hey, The Regime for the
Exploitation of Transboundary Marine Fisheries Resources, Martinus Nijhoff Publishers, Dordrecht, 1989, pp. 237-244.
60See CR 2013/11, p. 48, para. 33 (Burmester).
61
CR 2013/11, p. 48, para. 34 (Burmester).
62Ibid., p. 47, para. 30 (Burmester). - 27 -
33. In summary, Mr. President, Members of the Court, the dispute which Australia believed
it could submit to the Court is covered by reservation (b) of its own optional clause declaration
which Japan can rely on under the principle of reciprocity. Australia’s reservation covers disputes:
arising out of the exploitation of any disputed (maritime) area of or adjacent to any such
maritime zone pending its delimitation;
concerning such exploitation; or
relating thereto.
The dispute submitted to the Court regarding the JARPA II programme, the purpose of which is to
allow the sustainable exploitation of the whales in the Southern Ocean, can fall within each of these
categories. Members of the Court, in view of all these considerations, you can only refuse to
exercise jurisdiction and it would be extremely unfair if Australia were able to rely on its optional
39 clause declaration after ensuring protection for itself from applications that are comparable to the
one it has itself submitted in order to please its own public opinion.
34. A last word on New Zealand’s intervention: if the Court declares as we believe it
will that it has no jurisdiction to entertain the case that Australia has submitted to it, it goes
without saying that New Zealand’s Application to intervene will be without object. Indeed, we will
be in a situation comparable to that created by El Salvador’s Application to intervene in the
Military Activities case between Nicaragua and the United States, following which the Court
observed that:
“the Declaration of Intervention of the Republic of El Salvador . . . addresses itself
also in effect to matters, including the construction of conventions, which presuppose
that the Court has jurisdiction to entertain the dispute between Nicaragua and the
United States of America and that Nicaragua’s Application against the United States
of America in respect of that dispute is admissible” .63
Likewise, in the Nuclear Tests cases, following the adoption of its decisions finding that the claims
of Australia and New Zealand “no longer ha[d] any object”, the Court considered that “in
consequence there w[ould] no longer be any proceedings before the Court to which the Application
for permission to intervene [of Fiji] could relate”. And the Court found “that the Application of the
63Military and Paramilitary Activities in and against Nicaragua (Nicaragua v. United States of America),
Declaration of Intervention, Order of 4 October 1984, I.C.J. Reports 1984, p. 216, para. 2; emphasis added. See also:
Nuclear Tests (New Zealand v. France), Application for Permission to Intervene, Order of 12 July 1973, I.C.J. Reports
1973, p. 325, paras. 1-3; Nuclear Tests (New Zealand v. France), Application for Permission to Intervene, Order of
20 December 1974, I.C.J. Reports 1974, pp. 535-536. - 28 -
Government of Fiji for permission to intervene in the proceedings instituted by Australia [or New
64
Zealand] against France lapses, and that no further action is called for on the part of the Court” .
The same must apply to New Zealand’s Application to intervene in the case that concerns us.
Members of the Court, I thank you for your attention. I will be followed to the Bar by
Professor Payam Akhavan if you would be so good as to give him the floor, Mr. President or
do you perhaps consider that this is a suitable moment for our sacrosanct (and always welcome!)
coffee break, particularly after such a technical speech?
40 The PRESIDENT: Thank you, Mr. Pellet, I fear that nothing is sacrosanct any longer in
today’s world. Traditions must be respected all the same, but before taking the break I have a small
request for the Japanese delegation. You have cited a document which, as you stated, you received
at 11 o’clock this morning. If I remember correctly, this document is entitled “National Interest
Analyses”. The document is not in the case file or in this morning’s judges’ folder. Could you
provide the Registry with the text, accompanied by details of the sources? Thank you very much.
Mr. PELLET: I shall do so immediately
The PRESIDENT: And now we will take a 15-minute break.
La séance a été suspendue de 16 h 30 à 16 h 55.
Le PRESIDENT : Veuillez vous asseoir. L’audience reprend et je donne la parole à
M. Payam Akhavan. Vous avez la parole, Monsieur.
M. AKHAVAN :
L A SCIENCE ET LA POLITIQUE À LA CBI
Introduction
1. Monsieur le président, Mesdames et Messieurs de la Cour, c’est un grand honneur de
paraître devant vous aujourd’hui au nom du Japon.
64Nuclear Tests (Australia v. France), Application for Permission to Intervene, Order of 20 December 1974,
I.C.J. Reports 1974, pp. 530-531; Nuclear Tests (New Zealand v. France), Application for Permission to Intervene,
Order of 20 December 1974, I.C.J. Reports 1974, pp. 535-536. - 29 -
2. Je traiterai pour ma part du contexte factuel du présent différend. En particulier, je me
concentrerai sur la politique d’opposition à la chasse à la baleine pratiquée par l’Australie, sur
l’incidence qu’elle a eue sur les rapports entre la science et la politique au sein de la CBI ainsi que
sur ce que révèle ce contexte quant au bien-fondé de la présence instance.
3. Les allégations formulées par l’Australie sont graves et lourdes de conséquences. Le
Japon se voit accusé d’avoir trompé et défié la CBI pendant trente ans. Son programme de
recherche scientifique est décrié comme constituant une forme déguisée de chasse à des fins
commerciales violant l’article VIII de la convention. Or, avant d’engager la présente procédure,
l’Australie avait pourtant déclaré devant la CBI que, malgré son opposition de principe, elle
reconnaissait que «le programme du Japon était parfaitement licite au regard de l’article VIII de la
41
65
convention» . Alors, quel est l’objet de la présente instance ? Pourquoi l’Australie s’est-elle
adressée à la Cour ?
4. La meilleure réponse à cette question, c’est l’Australie qui nous la donne lorsqu’elle
insiste sur ce que la présente affaire ne concerne pas. Dans son allocution d’ouverture, son agent a
souligné que, si «l’Australie est fondamentalement hostile à toute forme de chasse commerciale»,
cela «est sans pertinence aux fins du règlement du présent différend» . Voilà une bien curieuse
remarque étant donné l’objet du différend. Pourquoi l’Australie soutiendrait-elle que son
opposition à la chasse commerciale n’est pas pertinente ? M. Campbell a affirmé avec insistance
que la présente affaire ne visait que l’«utilisation abusive et illicite de l’exception prévue à
l’article VIII» par le Japon. Mais a-t-on envisagé que la collecte de données scientifiques pouvait
avoir pour objet le rétablissement de la chasse commerciale durable ? Or il s’agit précisément là du
programme de recherche scientifique prévu par le moratoire de 1982. Si l’Australie est
«fondamentalement opposée» à la levée du moratoire, ne l’est-elle pas également en ce qui
concerne l’objet scientifique du programme JARPA II ?
5. Mais ce que l’agent a préféré taire dans son allocution va beaucoup plus loin. Quelques
instants après avoir fini son allocution d’ouverture, M. Campbell a déclaré aux journalistes, à la
65 Contre-mémoire du Japon (CMJ), par. 7, renvoyant au rapport du président sur les travaux de la
quarante-neuvième réunion annuelle de la CBI, Rapport annuel de la commission baleinière internationale, 1998, vol. 48,
p. 39 (annexe 57).
66CR 2013/7, p. 24, par. 18 (Campbell) (les italiques sont de nous). - 30 -
sortie de cette salle même : «il n’est pas nécessaire de mettre à mort ne serait-ce qu’une seule
67
baleine pour effectuer des recherches scientifiques» . Or, le lendemain, l’expert présenté par
l’Australie elle-même, M. Mangel, admettait que les «prises létales» pouvaient effectivement être
68
considérées comme «appropriées» dans le cadre de la recherche scientifique . Quelle est donc la
position australienne sur les circonstances pouvant justifier l’échantillonnage létal ? La réponse
s’infère des propos d’un autre M. Campbell, l’ancien ministre de l’environnement de l’Australie,
qui a affirmé catégoriquement que l’Australie s’opposait à «toutes formes», je dis bien «toutes
69
formes de chasse scientifique ou commerciale» , avant d’ajouter que, pour l’Australie,
l’article VIII n’était guère qu’une «faille» qu’il fallait combler . 70
42 6. Comme j’entends le démontrer, pour l’Australie, l’objectif scientifique de
l’échantillonnage létal est dans une large mesure sans pertinence. Il s’agirait d’un aspect purement
accessoire au regard de ce que l’agent a appelé une politique d’opposition à la chasse à la baleine
«farouchement défendue». Cette politique repose sur le postulat, bien ancré dans l’opinion
publique australienne, selon lequel, contrairement aux autres espèces inférieures du royaume
animal, les baleines seraient des mammifères uniques, sacrés et mythiques qui ne devraient être mis
à mort sous aucun prétexte. Depuis 1979, l’Australie a explicitement eu pour stratégie de se servir
de la CBI, à l’encontre des objectifs exprès de celle-ci, pour empêcher toute activité de chasse à la
baleine. Elle a imprégné la science de politique afin d’imposer les valeurs australiennes au Japon,
au mépris du droit international. N’ayant pas réussi à atteindre ses objectifs, elle se présente
maintenant devant la Cour, où elle avance des arguments qui contredisent manifestement ses
positions antérieures concernant la licéité du programme JARPA. Pour emprunter l’expression
utilisée par l’agent de l’Australie, cette dernière tente de dissimuler ses préférences politiques et
67
Associated Press, «Australia to World Court: Ban Japanese Whaling», 26eruin 2013, disponible à l’adresse :
http://bigstory.ap.org/article/australia-world-court-ban-japanese-whali… (consulté le 1 juillet 2013).
68
CR 2013/9, p. 61.
69Programme australien sur l’Antarctique, «Australia taking strong action to protect whales», communiqué de
presse, 16 février 2006, disponible à l’adresse : http://www.antarctica.gov.au/media/news/2006/australia-taking-strong-
action-to-protect-whales (consulté le 1 juillet 2013).
70Programme australien sur l’Antarctique, «Australia Appeals to Japan to Reconsider its «Scientific» Whale
Slaughter», communiqué de presse, 8 novembre 2005, disponible à l’adresse :
http://www.antarctica.gov.au/media/news/2005/australia-appeals-to-japan…
(consulté le 1 juillet 2013). - 31 -
71
culturelles «sous le couvert de la science» . Ayant réussi à enrayer, au moyen du moratoire, toute
activité de chasse à des fins commerciales au cours des trente dernières années, elle s’en prend
maintenant à la chasse scientifique. Elle cherche à appliquer la convention pour la réglementation
de la chasse à la baleine comme s’il s’agissait de la convention pour l’interdiction de la chasse à la
baleine.
7. Monsieur le président, Mesdames et Messieurs de la Cour, mon exposé sera divisé en cinq
parties. Pour commencer, je tenterai de situer brièvement la recherche effectuée par le Japon dans
le contexte mondial de la chasse à la baleine contemporaine. Deuxièmement, j’examinerai les
origines et les prémisses sur lesquelles repose la politique australienne d’opposition à la chasse à la
baleine. Troisièmement, je montrerai comment cette politique d’intransigeance et d’intolérance a
politisé les activités scientifiques au sein de la CBI, jusqu’à amener l’organisme au bord du
gouffre. Quatrièmement, j’aborderai la valeur probante, en l’espèce, des conclusions formulées par
le comité scientifique au sujet du programme JARPA. Je terminerai en faisant quelques
observations à propos des circonstances entourant la décision de l’Australie d’engager la présente
procédure, circonstances qui jettent la lumière sur l’objet véritable de l’instance.
II. La CBI et la chasse à la baleine en contexte mondial
8. S’agissant premièrement de la chasse à la baleine en contexte mondial, la CBI a été établie
en 1946 en raison de la surexploitation des cétacés, davantage pour leur huile qu’à titre d’aliment.
La convention internationale pour la réglementation de la chasse à la baleine a été adoptée, comme
le dit son préambule, afin d’«instituer un système de réglementation internationale de la chasse à la
baleine» . Ses objet et but fondamentaux demeurent la viabilité de la chasse à la baleine.
43 9. Dans les années 1970, la chasse à la baleine à des fins commerciales avait
considérablement perdu de son ampleur, par l’effet conjugué de la réglementation et de
l’effondrement de la demande d’huile de baleine, ce qui a fait dire au secrétariat de la CBI que,
grâce à «la saine gestion des activités de chasse à la baleine au milieu des années 1970», bon
71CR 2013/7, p. 24, par. 18 (Campbell).
72CMJ, annexe 6, préambule, convention internationale pour la réglementation de la chasse à la baleine, (entrée
en vigueur le 10 novembre 1948), RTNU, vol. 161, p. 72, modifiée par le protocole du 19 novembre 1956, RTNU,
vol. 338, p. 336. - 32 -
nombre d’espèces «sont maintenant en voie de repopulation». Il existe actuellement pas moins de
trois «systèmes scientifiques marqués par la plus haute prudence, en matière de «procédures de
gestion», élaborés par le comité scientifique de la CBI pour les besoins de la chasse à la baleine
73
commerciale et de subsistance, et destinés à prévenir la répétition des erreurs du passé» .
10. De nos jours, la plupart des espèces de cétacés ne sont plus en danger. Par exemple, la
CBI rapporte que «l’on constate chez la baleine à bosse une forte tendance à la repopulation ... avec
74 o
des augmentations annuelles de l’ordre de 10 %» . Le graphique figurant sous l’onglet n 19-1 du
dossier de plaidoiries montre la chute remarquable qu’a connue la chasse à la baleine à l’échelle
mondiale au début des années 1970, soit une décennie avant le moratoire de 1982. Nous ne
pouvons que nous féliciter de ce que l’époque de la surexploitation des ressources baleinières est
bien révolue.
11. Le petit rorqual de l’Antarctique est le plus petit et le plus abondant des «grands
cétacés». Selon la «meilleure estimation» la plus récente de la CBI, la population dans l’océan
75
Austral s’élèverait à 515 000 . Du point de vue de l’abondance, c’est la baleine à bosse qui vient
76
au second rang dans l’Antarctique, avec une population estimée par la CBI à 42 000 . Ainsi, le
nombre de petits rorquals de l’Antarctique est douze fois supérieur à celui des individus de la
population suivante dans l’ordre décroissant d’abondance.
12. Comme il est indiqué sous l’onglet 19-2, la CBI observe qu’«il y a actuellement plusieurs
centaines de milliers de petits rorquals de l’Antarctique, et cette espèce n’est donc manifestement
77
pas en danger» . «Manifestement pas en danger». On ne peut manquer d’être frappé par le
contraste de cette affirmation avec le discours sinistre et alarmiste que tient l’Australie dans ses
plaidoiries.
73Commission baleinière internationale, «A Brief Overview of the ‘Status’ of Whale Populations», disponible à
er
l’adresse : http://iwc.int/status#overview (consulté le 1 juillet 2013).
74 Commission baleinière internationale, «The Status of Whales», disponible à l’adresse :
er
http://archive.iwcoffice.org/conservation/status.htm (consulté le 1 juillet 2013).
75 Commission baleinière internationale, «Whale Population Estimates», disponible à l’adresse :
http://iwc.int/estimate (consulté le 1 juillet 2013).
76Ibid.
77Ibid. (les italiques sont de nous). - 33 -
13. Pour continuer à replacer les choses en perspective, il y a lieu de mentionner que
l’échantillon de petits rorquals de l’Antarctique prévu par le programme JARPA II correspond à
moins de 0,3 % — c’est-à-dire trois dixièmes de un pour cent — de la population en question.
Même l’expert de l’Australie, M. Mangel, a admis spontanément que ce qu’il a qualifié de
«captures très limitées de baleines» n’allait «d’aucune façon mettre en danger cette population» .8
44 14. La recherche effectuée par le Japon peut en outre être située dans le contexte plus large
de la chasse à la baleine mondiale. La CBI reconnaît trois catégories de chasse à la baleine : la
chasse à des fins commerciales, la chasse aborigène de subsistance et la chasse au titre d’un permis
spécial. La carte figurant, à titre d’illustration, sous l’onglet n 19-3 montre en bleu foncé la
Norvège et l’Islande, deux pays qui pratiquent la chasse à la baleine à des fins commerciales dans
l’Atlantique Nord.
15. Les Etats contractants membres de la CBI qui s’adonnent à la chasse aborigène de
subsistance sont indiqués en violet. Il s’agit du Danemark (pour le Groenland), de la Fédération de
Russie, de Saint-Vincent-et-les-Grenadines et des Etats-Unis d’Amérique.
16. Cette carte indique également en rouge les pays qui pratiquent la chasse à la baleine,
mais qui ne sont pas membres de la CBI. Il s’agit notamment du Canada, qui a cessé de faire partie
de la commission dans les années 1980, lors de l’adoption du moratoire, ainsi que de l’Indonésie.
Les activités de chasse à la baleine pratiquées par ces pays échappent à l’application de la
convention.
17. Enfin, la carte indique en vert le Japon, le seul pays qui affecte des ressources à la pêche
au titre de permis spéciaux. Le Japon a en outre retiré en 1986 son objection au moratoire de la
chasse à la baleine à des fins commerciales.
18. Le Japon s’est plié au moratoire, en dépit d’une tradition de chasse de subsistance deux
fois millénaire, et ce, bien que le bloc des Etats hostiles à la chasse à la baleine soit allé jusqu’à
condamner la chasse artisanale locale dans les eaux ressortissant au Japon. Les communautés
côtières ont souffert d’être ainsi privées de leurs traditions. Le ministre australien de
l’environnement a déjà déclaré à ce propos que «nombre de cultures et de traditions ... n’avaient
78CR 2013/9, p. 63 (Mangel). - 34 -
plus leur place dans le monde moderne» . Pourtant, les résolutions de la CBI et même les
déclarations des Nations Unies en matière de droits de l’homme reconnaissent un lien indéfectible
entre l’«exploitation traditionnelle des ressources», dans la mesure où elle est viable, et la survie
80
des cultures . Pour les croisés de la lutte contre la chasse à la baleine, mieux vaut sauver des
baleines qui ne sont manifestement pas menacées que des cultures et des communautés étrangères.
III. La politique australienne d’opposition à la chasse
et le moratoire de 1982
19. J’en viens à présent aux origines et aux caractéristiques de la politique australienne
d’opposition à la chasse et à l’adoption du moratoire en 1982. A ses débuts, en 1946, la CBI était
constituée d’une alliance de quinze Etats baleiniers. Le Japon a adhéré en 1951, à un moment où,
après les ravages occasionnés par la guerre, la viande de baleine permettait d’empêcher les gens de
45 mourir de faim. En dépit du but de la convention, et malgré l’amélioration des procédures de
gestion dans les années 1970, les pays opposés à la chasse ont, à partir des années 1980, pris le
pouvoir au sein de la CBI, déterminés à éliminer toute forme de chasse à la baleine, sans tenir
compte du fait que la viabilité de celle-ci avait été scientifiquement établie.
20. Le paragraphe 2) de l’article V de la convention précise que les quotas de capture
figurant dans le règlement annexé à la convention doivent «se fonder sur des données
scientifiques» . Le droit accordé aux Etats contractants par le paragraphe 1) de l’article VIII de
délivrer des permis de chasse spéciaux allait clairement de pair avec le caractère indispensable de
ces «données scientifiques» pour pratiquer la chasse commerciale de façon durable . 82
21. A cet égard, le comité scientifique joue un rôle central. Il a été créé pour fournir à la
commission un avis scientifique indépendant. Les représentants des Etats peuvent participer aux
délibérations du comité, mais ce dernier n’est pas, contrairement à la commission, un organe
politique. Il est formé de quelque 150 scientifiques, parmi les plus éminents au monde, spécialisés
dans les domaines de l’écologie, de la biologie marine, de la dynamique des populations, des
79 ECO, Saint-Kitts-et-Nevis, vol. LVIII, n 1 (16 juin 2006), p. 4, disponible à l’adresse :
http://www.earthisland.org/immp/ECO2006/2006EcoNo1.pdf (consulté le 1 juillet 2013).
80CBI, résolution 2000-1.
81
Article V, paragraphe 2), de la convention internationale pour la réglementation de la chasse à la baleine.
82Article VIII, paragraphe 1), de la convention internationale pour la réglementation de la chasse à la baleine. - 35 -
statistiques, de la génétique et de la modélisation, et dans d’autres disciplines connexes. Il s’agit
d’un organe expert indépendant.
22. Compte tenu de la politisation des questions scientifiques au sein de la commission, il
n’est pas étonnant que celle-ci et le comité scientifique puissent avoir des opinions divergentes. Un
bon exemple figure sous l’onglet 19-4 du dossier de plaidoiries : M. Sands a accordé une grande
importance à la résolution 2003-2 de la CBI, préconisant le «recours exclusif [à] des méthodes non
83
létales» pour la recherche scientifique . Or le comité scientifique a un point de vue contraire : bien
que des méthodes non létales aient été disponibles, «les questions logistiques et l’abondance des
populations de petits rorquals … ont … empêché qu’elles ne soient utilisées avec succès» . Le 84
contraste entre ces deux points de vue traduit l’antagonisme opposant science et politique.
23. Le Japon est le porte-drapeau des recherches sur les cétacés depuis la création, en 1941,
85
de la Fondation Nakabe pour les recherches baleinières . Il a joué un rôle crucial pendant la
décennie internationale de la recherche sur les cétacés (programme IDCR) et dans le programme de
recherche sur les baleines et l’écosystème de l’océan Austral (programme SOWER), considéré
86
46 comme le plus important programme de recherche sur les baleines dans l’océan Austral . Pendant
plus de trente ans, des missions de recherche ont été effectuées sous l’égide de la CBI, couvrant
216 000 milles, pour 43 000 baleines aperçues. Le comité scientifique a fait observer en 2009 que,
«sans les navires généreusement fournis par le Gouvernement japonais … ce programme n’aurait
87
jamais pu aboutir» .
24. Il est plus aisé de comprendre la volonté de l’Australie de politiser les questions
scientifiques au sein de la CBI si l’on se penche sur les origines de sa politique d’opposition à la
chasse. Dans les années 1970, le groupe de contestation Protect Jonah a mené une campagne très
médiatisée contre la dernière entreprise australienne de chasse à la baleine, Cheynes Beach. Lors
des élections fédérales de 1977, la chasse à la baleine est devenue un enjeu politique majeur et,
83CR 2013/9, p. 29, par. 50 (Sands).
84
SC/49/Rep. 1, Rapport annuel de la commission baleinière internationale, 1998, vol. 48, p. 386.
85 Institut de recherche sur les cétacés, «Overview and Purpose», disponible à l’adresse :
er
http ://www.icrwhale.org/abouticr.html (consulté le 1 juillet 2013).
86Elwen S. H., et al 2011. «Cetacean research in the southern African subregion : a review of previous studies
and current knowledge», African Journal of Marine Science 2011, 33(3) : p. 469-493.
87http ://iwc.int/sower (consulté le 1 juillet 2013). - 36 -
en 1978, le Gouvernement australien a chargé sir Sydney Frost de mener une enquête sur les
cétacés et la chasse à la baleine. Le rapport qui en est résulté a été présenté au Parlement en
février 1979 et les recommandations qu’il contenait ont été approuvées par le premier ministre de
l’époque, M. Malcolm Fraser, le 4 avril 1979. Ce rapport aura une influence capitale et durable sur
la politique de l’Australie à l’égard de la CBI.
25. Les conclusions du rapport Frost reposaient sur «l’opinion de la communauté sur la
88
chasse à la baleine» . Ce rapport faisait état de nombreux sondages d’opinion et pétitions, dont il
ressortait que «la communauté australienne condamne la mise à mort de baleines», et que la
89
poursuite de la chasse «susciterait l’indignation d’une grande partie de la population» .
26. Un argument «éthique» consistait à dire qu’il fallait éviter «à tout être vivant quel qu’il
90
soit, humain ou animal, de souffrir» . Pourtant, l’Etat australien était le principal exportateur de
bœuf, principalement à destination du Japon. Un argument plus parlant était que les baleines
étaient des animaux uniques en leur genre. Ainsi, le rapport Frost soulignait que les baleines
étaient différentes des autres animaux «tels que les bovins, les ovins et les porcins,
traditionnellement élevés pour l’abattoir» ou encore «des kangourous de différentes espèces» et des
chameaux sauvages, qui sont abattus par millions parce qu’ils constituent «un fléau pour les
agriculteurs» .1
47 27. En résumé, le rapport Frost reposait sur l’hypothèse que la chasse à la baleine n’avait pas
d’implication culturelle ou économique pour les Australiens. Contrairement aux autres animaux
sacrifiés à l’imposante industrie australienne de la viande, les baleines inspiraient aux Australiens
une affection particulière, voire sentimentale. Comme l’indique le rapport, «l’Australien moyen
92
conclurait qu’il est inadmissible de tuer des animaux aussi singuliers que les baleines» . Le
rapport allait même jusqu’à qualifier les baleines d’«animaux sacrés» . 93
88
Whales and Whaling, vol. 1 : Report of the Independent Inquiry conducted by The Hon. Sir Sydney Frost,
Service des publications du Gouvernement australien, Canberra, 1978 (rapport Frost), p. 183.
89Ibid., p. 193.
90Ibid.
91
Ibid., p. 186.
92
Ibid., p. 204.
93Ibid., p. 189. - 37 -
28. Il n’est donc guère surprenant que l’Australie soit catégoriquement opposée à
l’échantillonnage létal. Dans le rapport Frost, il était explicitement reconnu qu’une interdiction de
la chasse entraînerait une perte de données scientifiques. Il y était néanmoins conclu que «la
question de la perte de données de recherches … ne [pouvait] l’emporter sur les principes sur
lesquels se fonde la présente enquête» . L’opposition à l’échantillonnage létal reposait sur l’idée
que la baleine était un animal à part, et n’avait rien à voir avec l’intérêt scientifique.
29. A la lumière de ces éléments, le rapport Frost formulait la recommandation suivante :
«l’Australie devrait rester membre de la [CBI], puisque c’est là qu’elle peut le mieux défendre sa
politique d’opposition à la chasse» . En d’autres termes, l’Australie devait rester membre de la
CBI afin de pouvoir faire échec à l’objectif de cette dernière.
30. Les conclusions et recommandations figurant dans le rapport Frost ont été adoptées sans
réserve pour former la politique officielle du gouvernement. Le 4 avril 1979, dans sa déclaration à
la chambre des représentants de l’Australie, le premier ministre, M. Fraser, a déclaré que les
baleines étaient une espèce «particulière et intelligente» et que «[le gouvernement] compt[ait]
interdire toutes les activités de chasse à la baleine dans la zone de pêche australienne de 200 miles
96
qui dev[ait] être très prochainement créée, y compris dans … le territoire antarctique australien» .
Il a également souligné que «l’Australie dev[ait] poursuivre une politique d’opposition à [la chasse
à la baleine] à la fois au niveau national et au niveau international par le biais de la convention
97
internationale sur la chasse à la baleine» .
31. En juillet 1979, le commissaire de l’Australie à la CBI a annoncé un changement de
politique, afin de passer «d’une utilisation conservatrice des peuplements baleiniers
48 à … l’interdiction de [toute forme de] chasse». Se référant au rapport Frost, il a expliqué que cette
94Ibid., p. 205.
95Ibid.
96
Déclaration ministérielle sur les baleines et la chasse à la baleine, Australie, Chambre des représentants,
4 averl 1979, disponible à l’adresse : www.unimelb.edu.au/malcolmfraser/speeches/parliamentary/whaling.html (consulté
le 1 juillet 2013).
97Ibid. - 38 -
nouvelle politique reposait sur l’idée qu’«il existe une probabilité réelle que les baleines soient
98
dotées d’intelligence» .
32. Bien entendu, l’Australie ne pouvait contraindre les pays baleiniers à adopter une
nouvelle convention contre la chasse. Ainsi, la stratégie la plus efficace consistait à empêcher la
chasse à la baleine en prenant la CBI en otage, objectif qui pouvait être atteint en imposant une
interdiction permanente maquillée en moratoire temporaire. Le comité scientifique estimait que
l’on pouvait effectuer des captures au sein de certaines populations, de façon durable, dans le cadre
des procédures de gestion améliorées ; mais les pays opposés à la chasse ont fait pression pour
imposer un moratoire général. La procédure de modification du règlement pouvait être utilisée à
cette fin, celui-ci étant juridiquement contraignant, mais une majorité des trois-quarts des suffrages
exprimés était requise.
33. N’étant pas parvenue à obtenir suffisamment de voix en 1972 et 1974, certains pays et
organisations non gouvernementales opposés à la chasse ont entrepris de prendre le pouvoir au sein
de la CBI, par une augmentation brutale du nombre de ses membres. Greenpeace explique que, à
partir de 1979, «de plus en plus de pays n’ayant jamais pratiqué la chasse à la baleine ont rejoint la
CBI» et que «cette augmentation du nombre de ses membres a permis à la CBI d’adopter une série
de mesures de conservation» . Une universitaire relève que Greenpeace «est à l’origine d’au
moins six nouvelles adhésions de pays opposés à la chasse entre 1978 et 1982, à qui elle avait
offert de payer leurs cotisations annuelles [et] de veiller à la nomination des commissaires les
100
représentant, pour un coût annuel de plus de 150 000 dollars» .
34. L’illustration qui se trouve sous l’onglet n 19-5 montre cette prise de pouvoir
progressive par les pays opposés à la chasse. Le premier camembert représente la composition de
la CBI en 1970. Rappelons que les années 1970 ont été marquées par une baisse considérable de la
chasse commerciale et une réglementation accrue de la CBI. Les Etats favorables à une chasse
durable sont représentés en vert et les Etats opposés en rouge, avec le nombre de pays et le
98 Déclaration liminaire du commissaire australien à la trente-et-unième réunion annuelle de la CBI, Londres,
juillet 1979 (CMJ, annexe 164).
99
Greenpeace, «The International Whaling Commission considers reopening commercial whering», disponible à
l’adresse : http ://www.greenpeace.org/usa/en/campaigns/oceans/whale-defenders/iwc/ (consulté le 1 juillet 2013).
100Elizabeth de Sombre, «Distorting Global Governance : Membership, Voting, and the IWC», in Robert L.
Friedheim (dir.), Toward a sustainable whaling regime, 2001, p. 187. - 39 -
pourcentage correspondant. Le deuxième camembert représente la répartition des membres
en 1979, alors que les Etats hostiles à la chasse constituaient une faible majorité, mais ne
rassemblaient pas la majorité des trois-quarts requise pour modifier le règlement. Enfin, le
49 troisième camembert représente la composition en 1982, alors que le nombre d’Etats opposés à la
chasse avait plus que doublé, représentant la majorité des trois-quarts nécessaire pour imposer le
moratoire.
35. En 1980, compte tenu de cette prise de pouvoir imminente, le Canada a signalé qu’«un
moratoire visant toute forme de chasse commerciale et non motivé par des éléments scientifiques
contredi[sait] le but explicite de la convention et son article V » . Il s’est retiré de la commission
l’année suivante, invoquant «les changements intervenus dans la composition et la gestion de la
CBI» .102
36. En 1982, le moratoire de la chasse à la baleine a été adopté à la majorité requise plus une
voix, en tant qu’amendement à l’alinéa e) du paragraphe 10 du règlement. Il était ainsi libellé : «le
nombre maximum de captures de baleines à des fins commerciales dans toutes les populations
pendant la saison côtière 1986 et les saisons pélagiques 1985/1986 et suivantes est fixé à zéro» . 103
Il était aussi expressément indiqué, toutefois, que «[l]a[dite] disposition sera[it] régulièrement
soumise à un examen fondé sur les meilleurs avis scientifiques et [que], d’ici 1990 au plus tard, la
commission … envisagera[it] … de modifier cette disposition pour fixer d’autres limites de
capture» (les italiques sont de nous). Certains pays opposés à la chasse ont alors souligné qu’il ne
s’agissait pas d’une «interdiction totale» mais simplement d’«une interruption temporaire de
104
l’activité» . Mais l’Australie avait autre chose en tête.
37. Le Japon, la Norvège, le Pérou et l’Union soviétique ont exercé leur droit d’élever une
objection contre le moratoire au titre de l’alinéa a) du paragraphe 3) de la convention. Le Japon a
cependant retiré son objection, croyant sincèrement que le moratoire était une mesure temporaire
qui serait revisée avant 1990 «[sur la base des] meilleurs avis scientifiques». Il s’est plutôt attaché
101
Compte rendu de la trente-deuxième réunion annuelle de la CBI, p. 59-61.
102Communiqué du ministère des affaires étrangères, «Canada withdraws from the International Whaling
Convention and Commission», 26 juin 1981.
103Règlement annexé à la convention internationale pour la réglementation de la chasse à la baleine, par. 10,
alinéa e).
104
Compte-rendu de la trente-quatrième réunion annuelle de la CBI, p. 82. - 40 -
à contribuer à la recherche scientifique, conformément à l’alinéa e) du paragraphe 10 du Règlement
et aux travaux du comité scientifique. Il a décidé de collecter les données scientifiques permettant
d’évaluer les paramètres biologiques nécessaires à la gestion des stocks de petits rorquals de
l’Antarctique. Ainsi, la chasse scientifique pratiquée dans le cadre du règlement avait précisément
pour objectif de permettre la reprise durable de la chasse commerciale.
38. Pourtant, ce n’est pas ce qui s’est produit au cours des trente années qui ont suivi. La
question de la viabilité de la chasse à la baleine, fondée sur des éléments scientifiques (l’objectif
50 même de la convention), a été de plus en plus politisée. Pour l’Australie, aucun compromis n’était
possible. Le moratoire s’était transformé en interdiction permanente. Par extension,
l’échantillonnage létal destiné à contribuer à la viabilité de la chasse à la baleine devait également
cesser. Il fallait mettre en échec l’objectif de la chasse scientifique, ainsi que les moyens utilisés
pour y parvenir.
39. L’ancien commissaire des Etats-Unis à la CBI, M. William Aron, a fait observer que le
moratoire «représentait un changement majeur : au lieu d’essayer de forcer la CBI à respecter la
convention et à ne cautionner que la chasse durable, la majorité opposée à la chasse tentait
105
d’obliger la commission à passer outre» .
IV. La stratégie australienne de lutte, au sein de la CBI, contre la chasse à la baleine
en dépit des preuves scientifiques de viabilité
40. J’en viens à présent à la stratégie adoptée par l’Australie, après le moratoire, et qui
consiste à faire échec à la reprise de la chasse à la baleine, bien que la viabilité de celle-ci soit
scientifiquement établie. Comme je le démontrerai, cette stratégie marquée par l’intransigeance a
amené la CBI au bord de l’implosion.
41. Permettez-moi tout d’abord de répondre à l’allégation formulée par l’Australie dans son
mémoire, selon laquelle «[c]e n’est pas un hasard si le Japon s’est mis à délivrer des permis
spéciaux … au lendemain de l’entrée en vigueur du moratoire de la chasse à la baleine à des fins
106
commerciales … en mai 1987» . Le Japon convient avec l’Australie qu’il ne s’agissait pas d’une
coïncidence. Le programme JARPA était nécessaire précisément parce qu’il n’était plus possible
105
William Aron, William Burke et Milton Freeman, «Flouting the Convention», The Atlantic, mai 1999.
106MA, par. 1.4. - 41 -
de recueillir accessoirement des données scientifiques à l’occasion des opérations de chasse
commerciale. Le comité scientifique s’était opposé à l’instauration d’un moratoire général dans les
années 1970 au motif que cela «entraînerait … une diminution des activités de recherche, alors
107
même qu’il était fondamentalement nécessaire d’accroître sensiblement ces activités» . A la
place du moratoire, il avait préconisé «l’intensification des recherches sur les cétacés durant
dix ans» pour soutenir la chasse à la baleine durable. Même le rapport Frost signalait que
l’interdiction de la chasse commerciale entraînerait «la perte des données pour la recherche» . 108
42. La Cour se souviendra peut-être qu’en deux occasions l’Australie a utilisé ce graphique,
reproduit sous l’onglet n 19-6, pour étayer ses arguments. Mais il donne une représentation
o
tronquée des faits. Si on le compare à ce graphique, reproduit sous l’onglet n 19-7, qui indique le
51 nombre de prises avant le moratoire, on voit très distinctement l’évolution respective de la chasse
commerciale et de la chasse scientifique, ainsi que la différence d’échelle entre ces deux activités.
La théorie du complot avancée par l’Australie n’est absolument pas fondée.
43. Mais ce qui constitue une déformation vraiment remarquable des faits, c’est l’allégation
formulée par l’Australie au cours des présentes audiences, selon laquelle «le Japon n’aime pas la
RMP», tandis qu’elle-même y souscrit en tant que «procédure de gestion solide et bénéficiant d’un
109
large soutien» . L’Australie passe totalement sous silence la résistance qu’elle a, de longue date,
manifestée à l’encontre de l’adoption de la RMP. La mise en œuvre de la RMP reviendrait en effet
à lever le moratoire, ce à quoi elle est résolument opposée. A supposer qu’il ne s’agisse pas d’une
simple tactique de prétoire, le Japon se réjouit que l’Australie ait ainsi changé sa position.
44. Il a fallu une décennie pour mettre au point la RMP, de 1982 jusqu’à son adoption à
l’unanimité par le comité scientifique en 1992. Le président de la commission l’a par la suite
décrite comme «la méthode la plus avancée de conservation et de gestion des ressources
naturelles», concluant qu’elle autoriserait «la capture d’un certain nombre de petits rorquals» . 110
Pourtant, lorsqu’elle a été examinée par la CBI en 1992 et 1993, elle a été catégoriquement rejetée
107Rapport du président sur les travaux de la vingt-quatrième réunion annuelle de la CBI, 1972, p. 5-6.
108Rapport Frost, vol. 1, p. 205.
109
CR 2013/9, p. 22, par. 30 (Sands).
110Extrait des propositions présentées par le président pour progresser dans l’élaboration de la RMS : Préface aux
propositions du président : Pourquoi une RMS est nécessaire ?, disponible à l’adresse : http://iwc.int/cache/downloads/
tihtvmq9n6880gco0okssgsk/56-26%20Preface.pdf (consulté le 1 juillet 2013). - 42 -
par la majorité hostile à la chasse à la baleine, au sein de la commission, dont l’Australie faisait
partie.
45. Les pays pratiquant la chasse à la baleine qui avaient de bonne foi respecté le moratoire
se sont sentis trahis. En 1992, l’Islande s’est retirée de la CBI. Son ministre de la pêche a expliqué
que, alors que «la CBI a[vait] été établie pour assurer à la fois la conservation et l’exploitation des
ressources baleinières … elle s’[était], ces dernières années, orientée uniquement vers leur
conservation. Etant donné ce changement, l’Islande [était] en droit de partir» . L’Islande allait
réintégrer la CBI dix ans plus tard, mais en émettant une réserve au moratoire de la chasse
commerciale. De surcroît, ayant compris en 1992 que la majorité hostile à la chasse à la baleine ne
permettrait pas à la commission de gérer la chasse durable, l’Islande s’est associée à la Norvège, au
Groenland et aux îles Féroé pour créer une organisation régionale parallèle, la commission des
mammifères marins de l’Atlantique Nord, ou NAMMCO.
46. Les retombées ne se sont pas arrêtées là. Un an après le retrait de l’Islande, en 1993, le
président du comité scientifique, le Britannique Philip Hammond, a démissionné en signe de
protestation. Il a sans ménagement demandé «à quoi peut bien servir le comité scientifique si ses
112
52 recommandations unanimes sur un point crucial sont traitées avec un tel mépris ?» Sa démission
était le symbole de l’antagonisme opposant ouvertement science et politique à la CBI.
47. En 1994, les pays opposés à la chasse ont finalement infléchi leur position et permis à la
commission d’accepter la RMP, mais à des conditions qui rendaient illusoire ce semblant de
compromis. En 1992, l’Australie a été le co-auteur d’une résolution subordonnant à la prise de
113
«mesures supplémentaires» la mise en œuvre la RMP . Le plan de gestion révisé, ou RMS, ainsi
proposé imposait de lourdes obligations . La résolution exigeait que «l’algorithme des limites de
capture ne soit pas appliqué» tant qu’un accord ne serait pas réalisé sur tous les aspects du plan.
En 1997, l’Australie a subitement fait volte-face en annonçant qu’elle «préconisait désormais
l’arrêt complet de la chasse à la baleine, et [qu’]elle ne soutiendra[it] pas le RMS, pas plus qu’elle
111 «Iceland goes it alone on whaling», New Scientist, 15 février 1992 disponible à l’adresse :
http://www.newscientist.com/ article/mg13318081.300-iceland-goes-it-alone-on-whaling-.html, (consulté le
1 juillet 2013).
112CMJ, par. 3.82.
113
Résolution 1996-6 de la CBI.
114Résolution 1992-3 de la CBI. - 43 -
115
ne participera[it] aux discussions à ce sujet» . Entre l’adoption de la RMP, en 1994, et 2006, le
RMS a été examiné dans le cadre de pas moins de 52 réunions. Bien que l’Australie n’ait pour
l’essentiel pas participé à ces travaux scientifiques, elle s’est employée à les déprécier devant la
commission.
48. Bien entendu, le retrait de l’Australie des délibérations relatives au RMS en 1997 n’avait
rien d’une coïncidence. C’est en mai de cette année qu’un groupe de travail national sur la chasse à
la baleine créé par le gouvernement avait publié, à grand renfort de publicité, son rapport intitulé
«A Universal Metaphor : Australia’s Opposition to Commercial Whaling» . S’inscrivant dans le
prolongement du rapport Frost, ce document partait du postulat qu’«il n’est pas nécessaire de tuer
des baleines à des fins alimentaires» et que «la chasse à la baleine est intrinsèquement cruelle et
117
inhumaine» .
49. Le groupe de travail avait recommandé que «l’Australie … s’oppose à toute proposition
tendant à l’adoption du plan de gestion révisé (RMS) par résolution ou à son intégration ou à celle
118
de la procédure de gestion révisée (RMP) au règlement annexé à la convention» . Il appelait
également l’Australie à demander l’interdiction de «la chasse à la baleine (scientifique) au titre
119
d’un permis spécial» . Tout comme celles du rapport Frost de 1979, les recommandations
53 formulées dans le rapport publié en 1997 par le groupe de travail sont devenues la politique
officielle du Gouvernement australien. Il n’était donc pas surprenant que l’Australie s’emploie à
faire échec tant à la RMP qu’au RMS. Peut-être ce bref aperçu historique explique-t-il pourquoi le
Japon a été surpris d’entendre subitement l’Australie approuver la RMP dans le cadre des présentes
audiences. Si cela témoigne d’un véritable changement de politique, le Japon s’en félicite
assurément.
50. En 2004, dix ans après l’adoption de la RMP, et plus de vingt ans après l’adoption du
moratoire, le président de la CBI, le Danois Henrik Fischer, a enfin présenté à la commission une
115CMJ, annexe 57 ; rapport du président sur les travaux de la quarante-neuvième réunion annuelle de la CBI,
p. 36.
116 Canberra, Environment Australia, 1997, disponible à l’adresse :
http://155.187.3.82/coasts/publications/whaling/index.html (consulté le 1 juillet 2013).
117
Ibid., p. vii.
118
Ibid., p. xi.
119Ibid., p. x. - 44 -
«proposition» relative au RMS, précisant que son adoption était «essentielle à la crédibilité de la
CBI» . L’appel au compromis ainsi lancé est toutefois resté sans écho. S’étant totalement
désintéressée des délibérations relatives au RMS depuis 1997, l’Australie s’est soudainement
manifestée en 2004 pour déclarer sur un ton catégorique qu’elle «n’avalisera[it] pas un plan de
gestion révisé s’il en [était] adopté un» . Le ministre australien de l’environnement, le sénateur
Ian Campbell, a fait clairement savoir que même la défaite du RMS ne suffisait pas. En 2005, juste
avant le lancement du programme JARPA II, il a déclaré que l’Australie avait l’intention de
reboucher «la faille qui, dans la [convention de 1946], permet de tuer des baleines au nom de la
122
«science»» . Ainsi, tout en admettant que le Japon était en droit de continuer à pratiquer la chasse
scientifique, M. Campbell exprimait clairement la forte objection de l’Australie à «toute forme de
chasse à la baleine, scientifique ou commerciale» . 123
51. Dans le contexte de cette attaque portée à la recherche scientifique japonaise, la
présidente du comité scientifique, l’Américaine Judy Zeh, exaspérée, s’est ouvertement plainte de
ce qu’«elle était perturbée par la manière dont les délibérations du comité scientifique étaient
124
dénaturées» par certaines délégations à la CBI .
L’intransigeance de l’Australie et l’effondrement éventuel de la CBI
52. L’intransigeance de l’Australie et la politisation de l’activité scientifique ont conduit la
CBI au bord du gouffre. L’Australie a fait grand cas des résolutions de la CBI qui ont été adoptées
54 par la majorité hostile à la chasse à la baleine, mais a omis de mentionner celles qui ont été prises
lorsque, au gré des fluctuations politiques au sein de la CBI, le bloc des Etats opposés à la chasse à
120
Extrait des propositions présentées par le président pour progresser dans l’élaboration de la RMS : Préface aux
propositions du président : Pourquoi une RMS est nécessaire ?, disponible à l’adresse : http://iwc.int/cache/downloads/
tihtvmq9n6880gco0okssgsk/56-26%20Preface.pdf (consulté le 1 juillet 2013).
121
«Responses to the questionnaire related to the «call for comments/positions on key issues in relation to the
Chair’s proposals for a way forward on the RMS»», IWC/N04/RSWG4, p. 6.
122
Programme australien sur l’Antarctique, «Australia Appeals to Japan to Reconsider its «Scientific» Whale
Slaughter», communiqué de presse, 8 novembre 2005, disponible à l’adresse :
http://www.antarctica.gov.au/media/news/2005/australia-appeals-to-japan…
(consulté le 1 juillet 2013 ; les italiques sont de nous).
123
Programme australien sur l’Antarctique, «Australia taking strong action to protect whales», disponible à
l’adresse : http://www.antarctica.gov.au/media/news/2006/australia-taking-strong-ac… (consulté le
1 juillet 2013).
124
CMJ, annexe 60, rapport du président sur les travaux de la cinquante-deuxième réunion annuelle de la CBI,
p. 44. - 45 -
la baleine était minoritaire. Par exemple, la déclaration de Saint-Kitts-et-Nevis de 2006 125
annonçait sans beaucoup de ménagement que «la CBI [ne] p[ouvai]t échapper à l’effondrement»
qu’en adoptant la RMP. Elle appelait à la «normalisation des fonctions de la CBI», «au respect de
la diversité et des traditions culturelles des peuples côtiers» et à «la nécessité de politiques et de
réglementation fondées sur la science».
53. En 2007, il a été convenu de débattre de «l’avenir de la CBI» afin de parvenir à une
solution consensuelle. En 2009, un groupe de soutien a été établi à cette fin dans le cadre d’un
train de mesures visant à renforcer la confiance dans l’organisme. Son éminent président était alors
sir Goeffrey Palmer, commissaire auprès de la CBI et ancien premier ministre de la
Nouvelle-Zélande, et au nombre de ses membres figuraient notamment l’Australie, le Japon,
l’Allemagne, Antigua-et-Barbuda, le Brésil, le Cameroun, les Etats-Unis d’Amérique, l’Islande, le
Mexique, Saint-Kitts-et-Nevis et la Suède.
54. Le 20 février 2010, alors qu’une proposition était sur le point de faire consensus, le
premier ministre australien, M. Rudd, a averti le ministre japonais des affaires étrangères en visite
officielle, M. Okada, que, si la chasse à la baleine au titre de permis spéciaux se prolongeait,
l’Australie attaquerait le Japon devant la Cour. Compte tenu du moment choisi, on pouvait
difficilement ne pas en conclure que cette menace visait à détruire tout espoir de consensus au sein
de la CBI.
55. L’Australie a soumis sa requête introductive d’instance le 31 mai 2010, soit vingt jours
avant la réunion annuelle de 2010 de la CBI, qui s’est tenue à Agadir, au Maroc. Quelques jours
auparavant, le 11 mai 2010, le président chilien de la CBI, M. Cristian Maquieira, et son
vice-président, M. Anthony Liverpool d’Antigua-et-Barbuda, avaient présenté un «projet de
126
décision consensuelle destiné à améliorer la conservation des baleines» . Ils avaient également
publié un communiqué de presse 127 intitulé très explicitement : «Si vous vous préoccupez vraiment
125
CMJ, annexe 60, «St. Kitts and Nevis Declaration», résolution 2006-1, annexe C, rapport du président sur les
travaux de la cinquante-huitième réunion annuelle de la CBI, Rapport annuel de la commission baleinière internationale,
2006, p. 68.
126«Projet de décision consensuelle destiné à améliorer la conservation des baleines», disponible en anglais à
er
l’adresse : http://iwc.int/index.php?cID=752&cType=document (consulté le 1 juillet 2013).
127 Communiqué de presse revisé, président et vice-président de la CBI, «If you really care about whale
conservation give our proposal a fair reading», disponible à l’adresse :
http://iwc.int/index.php?cID=50&cType=document&download=1 (consulté le 1 juillet 2013). - 46 -
de la conservation des baleines, procédez à une lecture juste de notre projet». Dans un plaidoyer
désespéré, ils mettaient en garde contre «l’effondrement éventuel de la CBI» et rappelaient que le
«statu quo [conflictuel] n’[étai]t pas une solution pour une organisation multilatérale qui se veut
efficace».
56. Le projet de consensus était cependant mort-né. Presque immédiatement après que le
président de la CBI l’eut distribué, le nouveau ministre australien de l’environnement,
55 M. Peter Garrett, a déclaré que «l’heure était maintenant venue de refermer la porte sur le projet de
décision consensuelle» . Il a rejeté le compromis car il ne permettait pas de combler ce qu’il a
appelé la «faille» de l’article VIII, pour ensuite intimer au Japon de «cesser immédiatement» ses
activités de chasse scientifique . Devant l’échec des efforts qu’il avait déployés, le président
néo-zélandais du groupe de soutien, sir Geoffrey Palmer, «a rendu hommage» aux Etats-Unis
d’Amérique «pour leur initiative» et je cite «au Japon pour la grande détermination dont il a
fait preuve et son empressement à trouver un compromis» . 130 C’est dans ce contexte que
l’Australie s’est adressée en 2010 à la Cour, accusant le Japon de mauvaise foi.
57. Il convient à présent de dire un mot de la «réglementation collective», traitée tant dans
les pièces de l’Australie que dans celles de la Nouvelle-Zélande. Le Japon est bien évidemment
disposé à accepter les obligations qui découlent de la qualité de membre d’une organisation
multilatérale fondée sur un traité. La question importante est celle de savoir quelles sont ces
obligations. La CBI a le pouvoir de trancher certaines questions, de la même façon que les Etats
contractants sont autorisés, aux termes du paragraphe 3 de l’article V, à choisir d’échapper à l’effet
contraignant de ces décisions. Ce sont bien les Etats contractants qui examinent collectivement
quelles sont les mesures qui s’imposent pour la conservation et le développement rationnel de
l’industrie baleinière. Il ne s’agit pas pour autant d’un système dans lequel la majorité a le pouvoir
d’imposer sa volonté à la minorité, et ce d’autant moins si la majorité est résolue à battre en brèche
les objets et but fondamentaux du traité. C’est comme si une majorité hostile à la navigation
prenait le pouvoir de l’organisation maritime internationale et interdisait toute navigation en mer.
128
Peter Garrett, «Whales worth more alive than derd», http://www.theage.com.au/opinion/politics/whales-
worth--more-alive-than-dead-20100428-trc1.html (consulté le 1 juillet 2013).
129Ibid.
130
Rapport du président sur les travaux de la soixante-deuxième réunion annuelle de la CBI, p. 8. - 47 -
58. Monsieur le président, Mesdames et Messieurs de la Cour, la principale victime de la
politique australienne d’intransigeance et d’intolérance est la CBI. La tentative visant à imposer ce
que l’agent a décrit comme l’opposition «totale» de l’Australie à l’égard d’une chasse à la baleine à
des fins commerciales dont la viabilité est scientifiquement établie a indisposé les nations
baleinières et compromis la future réglementation. On en trouve un excellent exemple dans le
rejet, en 2012, par le groupe des opposants à la chasse à la baleine, de la demande du Danemark
visant à ajuster légèrement les limites de capture appliquées à la chasse de subsistance des
populations aborigènes du Groenland . Exaspérées, les populations inuit du Groenland ont
132
56 décidé de fixer leurs propres quotas au mépris de la CBI , ce qu’elles ont fait avec le soutien du
Danemark. Elles se sont adressées ailleurs, soit à une organisation s’intéressant à la chasse à la
baleine durable et fonctionnant efficacement, la commission des mammifères marins de
l’Atlantique Nord, ou NAMMCO, laquelle, comme je l’ai déjà expliqué, a été établie en 1992,
quand les nations hostiles à la chasse à la baleine ont saboté la RMP et l’Islande s’est retirée de la
CBI. Le rapport établi au Danemark en 2006 par un groupe de travail contient l’énoncé des raisons
pour lesquelles ces communautés baleinières ont constitué une organisation parallèle.
«La NAMMCO est une organisation complètement différente, dont l’attitude et
les débats tranchent avec ceux que nous avons pu connaître à la commission baleinière
internationale (CBI). Au sein de cette dernière, ceux qui chassent dans telle ou telle
région sont généralement considérés comme «l’ennemi», tandis que, à la NAMMCO,
ce sont toujours des partenaires de poids» . 133
59. On peut se demander si l’Australie «sauve les baleines» en conduisant la CBI au bord du
gouffre. Même l’ancien commissaire des Etats-Unis d’Amérique auprès de la CBI a parlé de
«l’intransigeance des nations hostiles à la chasse à la baleine», qui a perverti la CBI, la
transformant en ce qu’il a appelé «une tribune sans aucune autorité scientifique et servant à
l’étalage des prétentions écologiques». Il a averti que, dans un monde offrant des défis bien plus
131Rapport du président sur les travaux de la soixante-quatrième réunion annuelle de la CBI qui s’est tenue du 2
au 6 juillet 2012, p. 30.
132
Gouvernement du Groenland, «Greenland Quotas for Big Whales», disponiblerà l’adresse :
http://naalakkersuisut.gl/en/Naalakkersuisut/Press-Statements/2013/01/W… (consulté le 1 juillet 2013).
133Rapport de l’atelier de la NAMMCO chargé d’aborder le problème de la «perte après mise à mort» dans le
contexte de la chasse au phoque, au morse et à la baleine, North Atlantic House, Copenhague, Danemark,
14-16 novembre 2006, p. 12, disponible à l’adresse : http://www.nammco.no/webcronize/images/Nammco/818.pdf
er
(consulté le 1 juillet 2013). - 48 -
lourds, «l’exemple d’un organisme international de l’environnement qui se laisse politiser jusqu’à y
perdre toute autorité [étai]t inquiétant» .4
60. Il est inévitable que d’autres nations, assistant à la campagne menée contre le Japon par
l’Australie au sein de la CBI, en viennent à se demander si le traité qu’elles signent de bonne foi
aujourd’hui leur vaudra pareil traitement demain. A coup sûr, le nombre des nations favorables à la
chasse à la baleine qui envisageront de se retirer d’une organisation dont le disfonctionnement est
de plus en plus profond ne fera qu’augmenter. La meilleure façon pour l’Australie de sauver les
baleines est de sauver la CBI. Il ne s’agit pas de choisir entre la viabilité de la chasse à la baleine et
l’absence de chasse à la baleine, mais entre la viabilité de la chasse à la baleine et l’absence de
toute réglementation.
V. Le point de vue du comité scientifique sur la valeur scientifique
du programme JARPA
61. J’en viens à présent à la question fondamentale qui est soumise à la Cour : celle de savoir
si le Japon agit de mauvaise foi lorsqu’il affirme que le programme JARPA poursuit un objectif
scientifique. A cet égard, nous partageons l’avis de M. Sands sur le fait que, conformément à sa
57 jurisprudence, la Cour doit se fonder sur «des conclusions de fait formulées par des tierces parties,
des tierces parties indépendantes, des tierces parties qui n’[ont] aucun lien direct avec l’affaire» . 135
De même, nous sommes également d’avis que le comité scientifique est précisément une «tierce
partie indépendante». Après tout, son objectif premier est de fournir à la CBI des avis scientifiques
indépendants. Nous sommes toutefois en désaccord avec l’affirmation de M. Sands selon laquelle
le comité scientifique je cite «n’a jamais — je dis bien jamais — formulé le moindre avis
favorable sur la contribution de l’un ou l’autre de ces programmes à la conservation et la gestion
des baleines» .36
62. Monsieur le président, Mesdames et Messieurs de la Cour, l’anglais n’est pas ma langue
maternelle, mais il me semble que le mot «jamais» est assez catégorique. «Il ne faut jamais dire
jamais», a écrit Charles Dickens, en particulier lorsque l’affirmation en question est de toute
134
William Aron, William Burke, and Milton Freeman, «Flouting the Convention», The Atlantic, mai 1999.
135CR 2013/8, p. 62, par. 16 (Sands).
136CR 2013/8, p. 63, par. 19 (Sands). - 49 -
évidence erronée. M. Hamamoto abordera plus en détail les conclusions du comité scientifique. Je
me bornerai ici à présenter quelques exemples éloquents d’avis manifestement favorables quant à
la valeur scientifique du programme JARPA, qui sont présentés sous l’onglet 19-8.
63. Voici quelques-unes des conclusions de l’examen de mi-parcours mené en 1997 :
«[L]e programme JARPA … a permis d’améliorer considérablement la compréhension de la
137
structure des stocks» .
«[L]es données du programme JARPA … permettront d’obtenir une estimation des paramètres
138
biologiques avec un degré raisonnable de précision» .
«Les participants conviennent généralement que les données présentées sur la structure des
stocks, en particulier les nouvelles données génétiques, ont largement contribué à la réalisation
139
des objectifs du programme JARPA et de la gestion des populations.»
64. Voici quelques-unes des conclusions de l’examen mené en 2006 :
«[L’]ensemble des données recueillies dans le cadre du programme JARPA constitue une
ressource importante.» 140
«Les résultats des analyses réalisées dans le cadre du programme JARPA pourraient permettre
d’accroître le nombre de prises de petits rorquals autorisées dans l’hémisphère sud sans
augmenter le risque d’épuisement.» 141
58 «[D]es progrès considérables ont été effectués pour répondre à la question de la structure des
stocks.» 142
«[L’]ensemble de données recueillies dans le cadre du programme JARPA constitue une
ressource importante en vue des recherches sur certains aspects du rôle des baleines dans
l’écosystème marin.» 143
137 CMJ, par. 4.159 ; «Rapport du comité scientifique», Rapport annuel de la commission baleinière
internationale, 1998, vol. 48, p. 103.
138Ibid.
139
CMJ, par. 4.34 ; SC/49/Rep1, 3.5.
140
CMJ, par. 4.132 ; «Rapport du groupe de travail intersessions chargé d’examiner les données et les résultats
obtenus dans le cadre de la chasse au petit rorqual dans l’Antarctique au titre d’un permis spécial en vue de recherches
scientifiques», SC/59/O1, J. Cetacean Res. Manage, p 411-445, 5.5.
141
CMJ, par. 4.161 ; ibid., 8.1.
142CMJ, par. 4.53 ; ibid., 8.1.1.
143CMJ, par. 4.132 ; ibid., 5.5. - 50 -
65. On citera aussi :
«le programme [JARPA] a également conduit à plusieurs publications dans les revues de la
CBI et dans d’autres revues spécialisées à l’échelle internationale».
«[O]n dénombre 22 articles dans les rapports annuels de la commission baleinière
internationale et dans J. Cetacean Res Manage., et 58 articles dans des périodiques
anglophones».
«Au total, 182 documents scientifiques reposant sur les données du programme JARPA ont été
présentés lors des réunions du comité scientifique de la CBI» . 144
o
66. Et si cela ne suffisait pas, vous trouverez sous l’onglet n 19-9 une déclaration du
président du comité scientifique datant de 2008 :
«La contribution du Japon à la recherche sur les cétacés en Antarctique est considérable, et
145
même cruciale pour le comité scientifique» .
67. Devant tous ces éléments, on comprend difficilement comment M. Sands peut affirmer
ici qu’aucun organe indépendant «n’a jamais — je dis bien jamais — formulé le moindre avis
favorable» sur le programme JARPA. Les rapports du comité scientifique portent en effet un coup
fatal à l’argument de l’Australie selon lequel le programme JARPA «[n’a] produit aucun résultat
146
scientifique, ou très peu» .
68. Il convient en outre de noter que le programme JARPA II fera l’objet d’un examen par le
comité scientifique l’an prochain, en 2014, conformément à la procédure renforcée prévue à
l’annexe P et avalisée à l’unanimité par la CBI. Peut-être l’empressement de l’Australie à saisir la
Cour avait-il pour objectif d’éviter que le programme ne fasse une nouvelle fois l’objet d’une
évaluation favorable.
69. Le fait que même des membres radicalement opposés à la chasse à la baleine
reconnaissent la valeur scientifique de JARPA en dit long. Ainsi, le témoignage de l’ambassadeur
des Etats-Unis d’Amérique David Balton devant une commission parlementaire américaine le
59 6 mai 2010 en est un excellent exemple, et je le cite : «Le Japon procède effectivement à des
144
Ibid.
14Arne Bjørge, président du comité scientifique à l’époque de cette déclaration, 2008, cité in CMJ, par. 4.166.
146
MA, par. 5.132. - 51 -
recherches scientifiques sur les baleines qu’il capture, et dispose probablement de ce fait des
147
connaissances scientifiques les plus poussées concernant les baleines.»
70. Plutôt que de faire fond sur des avis scientifiques qui ne laissent place à aucune
ambiguïté, les plaidoiries de l’Australie ont pris l’allure d’un séminaire d’introduction à la
méthodologie scientifique. Nous avons eu droit à des réflexions sur des hypothèses concernant
d’autres hypothèses, à un ouvrage désuet de 1905 comparant la science à la maçonnerie, à une
lettre ouverte financée par une ONG, signée de militants écologistes et publiée dans le
New York Times, et aux dépositions de deux témoins-experts dont le crédit doit être mesuré par
rapport à celui des quelques 150 expert indépendants qui forment le comité scientifique.
71. Monsieur le président, Mesdames et Messieurs de la Cour, nous ne sommes pas ici pour
décider si le programme JARPA mérite le prix Nobel pour sa valeur scientifique. Nous sommes ici
uniquement pour déterminer s’il relève de l’exception prévue à l’article VIII. Nous affirmons
qu’aucune autre tierce partie indépendante n’est mieux placée que le comité scientifique pour
évaluer la valeur scientifique du programme JARPA. Nous prions donc la Cour, dans la logique de
la série d’affaires auxquelles M. Sands a fait référence Activités armées sur le territoire du
Congo, Usines de pâte à papier, et l’affaire relative à la Convention pour la prévention et la
répression du crime de génocide de se fonder résolument sur les conclusions factuelles du
comité scientifique, telles qu’elles ont été publiées dans ses rapports officiels. Nous estimons que
ces conclusions ne laissent aucun doute absolument aucun quant à la valeur scientifique du
programme de recherche mené par le Japon.
VI. La thèse défendue par l’Australie ne concerne ni la science ni la convention
internationale pour la réglementation de la chasse à la baleine
72. Monsieur le président, Mesdames et Messieurs de la Cour, la thèse défendue par
l’Australie est de la pure «science-fiction». L’on peine à comprendre pour quelles raisons
l’Australie soutiendrait devant la justice une thèse aussi manifestement indéfendable à l’encontre
du Japon, et qui peut aisément être réfutée par les rapports officiels du comité scientifique.
14U.S. Leadership in the International Whaling Commission and H.R. 2455, International Whale Conservation
and Protection Act of 2009. Subcommittee on International Organizations, Human Rights and Oversight Subcommittee
on Asia, the Pacific and the Global Environment du Committee Foreign Affairs, Chambre des représentants,
cent-onzième legislature, deuxième session, 6 mai 2010, n 111–95, p. 29. - 52 -
73. On ne manquera pas de relever que, à cet égard, M. Crawford a pris grand soin de
dissocier l’Australie des actions violentes menées par l’organisation Sea Shepherd. Il a expliqué
que «cela n’a[vait] aucune pertinence en la présente espèce» et que «[l]a véritable raison pour
laquelle le Gouvernement japonais a décidé de diminuer son objectif de captures est … la baisse
148
importante de la demande de viande de baleine sur le marché intérieur japonais» . Bien sûr, le
60 comité scientifique serait une nouvelle fois en désaccord avec cette affirmation. Dans son rapport
de 2013, il a reconnu que «les activités de recherche ont été interrompues à plusieurs reprises par
Sea Shepherd, qui a mené de violentes actions de sabotage contre des navires de recherche
japonais» . L’argument du soi-disant «modèle économique» peut lui aussi être aisément réfuté,
comme M. Iwasawa le démontrera dans son exposé. Le chef japonais d’un restaurant de Tokyo
expliquerait à M. Crawford que, selon le paragraphe 2 de l’article VIII de la convention, le Japon
est tenu de vendre la viande obtenue plutôt que de la jeter à la mer. Le touriste australien installé à
la table voisine ajouterait que son propre gouvernement a recours à un modèle d’autofinancement
identique dans le cadre des recherches scientifiques qu’il mène en matière de pêche. Ces
considérations mises à part, l’insistance avec laquelle on affirme que les activités de Sea Shepherd
ne sont pas pertinentes en l’espèce paraît suspecte.
74. Les actions violentes de Sea Shepherd ont été condamnées à plusieurs reprises par la CBI
et par l’organisation maritime internationale. Aux Etats-Unis, le Federal Bureau of Investigation
150
(FBI) les a qualifiées «d’écoterrorisme» . Le 25 février 2013, la Cour d’appel des Etats-Unis
pour le neuvième circuit a déclaré que les attaques menées par Sea Shepherd contre des navires de
recherche japonais étaient et je cite «l’incarnation même de la piraterie» en droit
151
international . Le fondateur de Sea Shepherd, le fameux Paul Watson, fait actuellement l’objet
d’une notice rouge d’Interpol pour nombre d’accusations criminelles dans différents pays . 152
148
CR 2013/11, p. 20, par. 68 (Crawford).
149Rapport du comité scientifique, 2013, par. 17.2.2 ; JARPA II, p. 79.
150 Federal Bureau of Investigation, «The Threat of Eco-Terrorism», disponible à l’adresse :
http://www.fbi.gov/news/testimony/the-threat-of-eco-terrorism (consulté le 1 juillet 2013).
151 Institute of Cetacean Research et al v Sea Shepherd Conservation Society, Opinion, Cour d’appel des
Etats-Unis pour le neuvième circuit, 25 février 2013, p. 6, disponible à l’adresse :
http://cdn.ca9.uscourts.gov/datastore/general/2013/02/25/1235266.pdf (consulté le 1 juillet 2013).
152«INTERPOL publie une notice rouge à l’encontre de Paul Watson à la demande du Japon», disponible à
l’adresse : http://www.interpol.int/fr/Internet/Centre-des-médias/Nouvelles-et-comm…
(consulté le 1 juillet 2013). - 53 -
75. Une consultation rapide du site Internet de Sea Shepherd démontre qu’il s’agit d’une
armée de mercenaires qui s’en prennent aux navires de recherche japonais en haute mer, en se
servant de l’Australie comme base. L’image qui vous est présentée, et qui est reproduite sous
o
l’onglet n 19-10, a pour titre «Operation Zero Tolerance» et il y est question d’une flotte de
quatre navires, de drones, d’hélicoptères et de nouvelles stratégies. Un peu plus bas, on peut lire
que, cette année, l’opération en question a été menée depuis le port australien de Williamstown, au
moyen de navires immatriculés en Australie et aux Pays-Bas. Cette photo spécimen, sous
l’onglet n 19-11, présente l’un de ces navires, baptisé du nom de la personnalité hollywoodienne
Bob Barker, en train d’attaquer des navires de recherche japonais en février de cette année dans les
eaux de l’Antarctique.
61 76. J’imagine donc que les membres de l’organisation Sea Shepherd seraient très déçus
d’entendre M. Crawford affirmer que la baisse du volume de captures enregistrée cette année par le
o
Japon n’a rien à voir avec leurs actions. Comme vous pouvez le voir sous l’onglet n 19-12, le
site Internet de l’organisation proclame triomphalement «[qu’il] s’agit de la pire saison de chasse à
la baleine que le Japon ait jamais connue. Félicitations à Sea Shepherd Australie pour avoir mené
153
avec une telle réussite cette campagne de protection des baleines dans l’Antarctique» . Un peu
plus bas, un bouton rouge invite les sympathisants à «faire un don». Minimiser l’importance du
rôle de Sea Shepherd, comme l’a fait M. Crawford, ne contribuera assurément en rien à la
campagne de collecte de fonds de l’organisation.
77. Il semble que l’influence de Sea Shepherd en Australie soit considérable. Dans une
déclaration en date du 22 mai 2012, l’ancien ministre australien de l’environnement, Ian Campbell,
a salué M. Watson, en fuite, comme étant «l’un des plus grands écologistes au monde». On
soulignera d’ailleurs, comme vous pouvez le voir sous l’onglet n 19-13, que M. Campbell a
reconnu sur le site Internet de Sea Shepherd : «J’étais fier de soutenir le capitaine Watson lorsque
15«Sea Shepherd Commentary on the Cruise Report of the Japanese Whale Research Program Under Special
Permit in the Antarctic Second Phase (JARPA II) in 2012/2013», disponible à l’adresse :
http://www.seashepherd.org.au/commentary-and-editorials/2013/06/13/sea-…-
er
japanese-whale-research-program-613 (consulté le 1 juillet 2013). - 54 -
154
j’étais membre du Gouvernement australien» . Le sénateur Campbell siège actuellement au
conseil consultatif de Sea Shepherd, aux côtés d’autres personnalités politiques australiennes
influentes. On croirait que l’Australie sous-traite à Sea Shepherd ses activités de maintien de
l’ordre maritime dans l’Antarctique.
78. Cela m’amène à l’intérêt direct et plus général que présente Sea Shepherd en l’espèce.
Dès le premier jour des audiences publiques qui nous occupent, un représentant de l’organisation
s’est adressé aux journalistes à l’extérieur de la grande salle de justice, affirmant fièrement que
l’ouverture des audiences «venait justifier la stratégie controversée du groupe» consistant à attaquer
les navires japonais . 155
79. En 2009, M. Watson avait, selon ses propres termes, fait «une offre» au Gouvernement
australien «en vue de poursuivre en justice les baleiniers japonais». Il avait déclaré publiquement
que «[s]i l’Australie ou la Nouvelle-Zélande … convenaient d’intenter une telle action en justice,
156
62 Sea Shepherd renoncerait à ses méthodes agressives» . Il avait également «exhorté des milliers
d’Australiens à voter pour [le premier ministre] Rudd» lors des élections fédérales d’août 2010
parce que celui-ci avait «promis de traduire le Japon en justice» . Et de fait, le 29 avril 2010, soit
un mois avant le dépôt de la requête devant la Cour, un sondage posait la question de savoir «si le
gouvernement Rudd avait suffisamment agi pour faire cesser la chasse à la baleine à des fins
commerciales». Quatre-vingt-sept pour cent des personnes interrogées ont répondu «non»,
158
convenant qu’il était «temps pour le gouvernement de saisir la justice internationale» .
154«Letter From the Former Minister of the Environment of Australia Senator Ian Campbell to the President and
Environment Minister of Costa Rica», disponible à l’adresse : http://www.seashepherd.org/news-and-
meder/2012/05/22/letter-from-the-former-minister-of-the-environment-of-australia-senator-ian-campbell-1383 (consulté
le 1 juillet 2013).
155
Mike Corder, «Japanese Whaling Ban Urged By Australia in Highest U.N. Court», disponible à l’adresse :
herp://www.huffingtonpost.com/2013/06/26/japanese-whaling-ban_n_3502842.html?u… (consulté le
1 juillet 2013).
156
«Sea Shepherd Urges Australia to Take Legal Action against Japanere Whalers», disponible à l’adresse :
http://www.seashepherd.it/news-and-media/news-090120-3.html (consulté le 1 juillet 2013).
157
Paul Watson, «The Sea Shepherd Dilemma Down Under», disponible à l’adresse :
herp://www.seashepherd.org/news-and-media/2009/10/06/the-sea-shepherd-dilemma-… (consulté le
1 juillet 2013).
158
Peter Garrett, «Whales worth more alive than dead», disponible à l’adresse :
http://www.theage.com.au/opinion/politics/whales-worth--more-alive-than… (consulté le
1 juillet 2013). - 55 -
80. Les raisons qui ont incité l’Australie à introduire la présente instance peuvent ou non être
pertinentes sur le plan juridique. Il n’en reste pas moins que, avant le début de la présente affaire,
de hauts représentants australiens avaient ouvertement reconnu que le Japon était en droit de
pratiquer la chasse scientifique sous le régime de l’article VIII. Interrogé sur une éventuelle action
en justice en 2006, le ministre de l’environnement du précédent gouvernement, le sénateur
Ian Campbell, s’est rallié au point de vue du commissaire de la Nouvelle-Zélande à la CBI,
sir Geoffrey Palmer et je cite ici le site Internet du programme antarctique australien, sous
o
l’onglet n 19-14 : «Nous nous intéressons depuis plusieurs mois aux arguments de droit que nous
pourrions invoquer à l’encontre du Japon … et aucun d’entre eux ne permet, à notre avis,
159
d’empêcher les Japonais d’exercer leurs activités.»
81. Le ministre Campbell et sir Geoffrey n’étaient assurément pas les seuls à penser ainsi.
L’année suivante, en août 2007, le ministre australien de la défense, M. Brendan Nelson, a déclaré
devant la chambre des représentants : «Bien que nous trouvions cela répréhensible, la chasse
scientifique est permise par la convention internationale pour la réglementation de la chasse à la
baleine» . C’est sans doute l’ancien commissaire de l’Australie à la CBI, Peter Bridgewater, qui
a le mieux exprimé cette position dans un éditorial rédigé en 2012, où il déclarait : «C’est peut-être
161
regrettable, mais les Japonais ont raison dans une large mesure» .
82. On peut dès lors se demander quelle nouvelle thèse a pu se faire jour d’un gouvernement
63
à l’autre pour justifier l’introduction d’une instance contre le Japon ? Comme je l’ai expliqué, la
présente instance ne porte pas sur la valeur scientifique du programme JARPA. Il s’agit d’une
croisade morale et passionnée contre la chasse à la baleine, qui, au nom de la «tolérance zéro»,
passe sous silence les violences extrémistes auxquelles se livre Sea Shepherd, la politisation de la
science, l’effondrement de la CBI et la formulation devant la Cour d’accusations gratuites de
mauvaise foi contre le Japon.
159
http://www.antarctica.gov.au/media/news/2006/australia-taking-strong-ac… (consulté le
1 juillet 2013).
160 o
Chambre australienne des représentants, question n 5013, 7 août 2007, p. 167.
16Peter Bridgewater, «Australia's anti-whaling lobby is missing the point», 2 mars 2012, disponible à l’adresse :
http://www.smh.com.au/opinion/australias-antiwhaling-lobby-is-missing-t…
(consulté le 1 juillet 2013). - 56 -
83. Monsieur le président, Mesdames et Messieurs de la Cour, la position de l’Australie
concernant l’échantillonnage létal est parfaitement claire. Son commissaire à la CBI a déclaré de
façon catégorique que l’Australie «s’oppose à toute recherche impliquant la mise à mort de
162
baleines» . A peine sorti de cette salle, l’agent de l’Australie a déclaré : «Il est inutile de tuer ne
serait-ce qu’une seule baleine à des fins de recherche scientifique» . Cette position est totalement
inconciliable avec les termes mêmes de l’article VIII de la convention.
84. Monsieur le président, Mesdames et Messieurs de la Cour, le temps des missions
civilisatrices et des croisades morales est révolu. Dans un monde où cohabitent diverses
civilisations et traditions, le droit international ne saurait servir à imposer les préférences culturelles
de certains au détriment de celles des autres. Peu importe que le programme JARPA II heurte
l’opinion publique australienne : il est clairement conforme aux droits conférés au Japon par
l’article VIII de la convention.
85. Voilà qui clôt mon exposé et les plaidoiries du Japon pour aujourd’hui. Je remercie la
Cour de sa patience et de son indulgence.
Le PRESIDENT : Je vous remercie, Monsieur Akhavan. Votre exposé ne met pas fin à
l’audience d’aujourd’hui. Deux membres de la Cour ont des questions à poser à l’Australie ou au
Japon. Je donne donc la parole au juge Greenwood. Monsieur le juge Greenwood, vous avez la
parole.
Juge GREENWOOD : Merci beaucoup Monsieur le président. Monsieur le président, ma
question s’adresse à l’Australie, mais également à la Nouvelle-Zélande.
64 «Quel est exactement le fondement juridique sur lequel repose l’affirmation
selon laquelle les recommandations figurant dans les résolutions de la CBI créeraient
une obligation juridique pour le Japon ? Et quelle est la teneur exacte de cette
obligation ?»
Monsieur le président, je ne m’attends bien évidemment pas à ce que l’Australie réponde
avant son second tour de plaidoiries, mais je pose cette question dès à présent afin de donner la
16Compte rendu de séance de la CBI, 1989, p. 131.
16Associated Press, «Australia to World Court: Ban Japanese Whaling», 26 juin 2013, disponible à l’adresse :
http://bigstory.ap.org/article/australia-world-court-ban-japanese-whali… (consulté le 1 juillet 2013). - 57 -
possibilité à la Nouvelle-Zélande de formuler des observations, et j’attends bien sûr avec intérêt
celles que le Japon pourrait souhaiter présenter lors de son second tour de plaidoiries.
Le PRESIDENT : Je vous remercie Monsieur le juge Greenwood. Je donne à présent la
parole à la juge Donoghue. Madame la juge Donoghue, vous avez la parole.
Juge DONOGHUE : Je vous remercie, Monsieur le président. J’ai deux questions liées
entre elles, qui s’adressent toutes deux au Japon. Ma première question est la suivante :
«Le recours à des méthodes non létales a-t-il-fait l’objet d’une analyse de
faisabilité de la part du Japon, avant que ne soit déterminée la taille des échantillons
prélevés chaque année dans le cadre de JARPA II ?»
Et ma seconde :
«Dans l’affirmative, quelle a été l’incidence de cette analyse sur la taille des
échantillons établie dans le cadre de ce programme ?»
Je vous remercie, Monsieur le président.
Le PRESIDENT : Je vous remercie. Le Japon est invité à répondre oralement à cette
question, dans la mesure du possible avant la fin de son premier tour de plaidoiries, et l’Australie
aura la possibilité de formuler ses observations sur la réponse du Japon au cours de son second tour
de plaidoiries. Si le Japon a besoin de davantage de temps pour préparer sa réponse et décide de
répondre à la question pendant son second tour de plaidoiries, la Cour avisera quant à la procédure
à suivre pour donner à l’Australie la possibilité de commenter la réponse du Japon.
La Cour n’étant saisie d’aucune autre question aujourd’hui, l’audience est levée. La Cour se
réunira de nouveau demain mercredi 3 juillet, à 10 heures, pour entendre la suite du premier tour de
plaidoiries du Japon. L’audience est levée.
L’audience est levée à 18 heures.
___________
Translation