Translation

Document Number
148-20130715-ORA-01-01-BI
Parent Document Number
148-20130715-ORA-01-00-BI
Bilingual Document File
Bilingual Content

Non corrigé Traduction

Uncorrected Translation

CR 2013/21 (traduction)

CR 2013/21 (translation)

Lundi 15 juillet 2013 à 10 heures

Monday 15 July 2013 at 10 a.m. - 2 -

14 Le PRESIDENT : Veuillez vous asseoir. Bonjour. L’audience est ouverte. La Cour se

réunit ce matin pour entendre le Japon, qui entamera la présentation de son second tour de

plaidoiries. Je vois que M. Payam Akhavan est prêt ; Monsieur, vous avez la parole. Je vous prie

de commencer.

M. AKHAVAN :

V UE D’ENSEMBLE DE L ’AFFAIRE

I. Introduction

1. Monsieur le président, Mesdames et Messieurs de la Cour, bonjour. C’est un grand

honneur pour moi que de présenter, au nom du Japon, la plaidoirie d’ouverture pour ce second tour

de plaidoiries.

2. Je commencerai nos plaidoiries d’aujourd’hui en vous présentant une «vue d’ensemble de

l’affaire» et en vous exposant les points d’accord et de désaccord entre les Parties sur les points de

droit et de fait les plus importants. J’aborderai ensuite brièvement le contexte factuel dans lequel la

Cour devrait, selon nous, examiner cette affaire et la trancher. A la suite de ma présentation,

M. Pellet traitera de «la compétence de la Cour et [de] la structure de la convention de 1946». Puis,

Mme Takashiba examinera «le respect scrupuleux, de la part du Japon, des obligations

procédurales et de coopération» visées au paragraphe 30. Après cela, MM. Boyle et Hamamoto

présenteront nos conclusions en ce qui concerne les raisons pour lesquelles «JARPA II est un

programme de recherche scientifique». Puis, M. Lowe abordera «le critère d’examen». M. Pellet

examinera ensuite «les remèdes demandés par l’Australie» et présentera les «conclusions

générales» de notre argumentation, avant que l’agent du Japon, M. Tsuruoka, n’expose, pour finir,

les «remarques et conclusions finales».

3. Monsieur le président, Mesdames et Messieurs de la Cour, vous avez maintenant entendu

le second tour de plaidoiries de l’Australie. Que peut-on conclure, à ce stade final, concernant

l’argumentation qu’elle a développée à l’encontre du Japon ? Permettez-moi tout d’abord

d’exposer brièvement l’évolution de l’argumentation de l’Australie depuis le dépôt de sa requête, le

31 mai 2010, jusqu’à ses conclusions finales de la semaine dernière. L’Australie a commencé par - 3 -

ce qui paraît être un procès global contre la chasse à la baleine que pratique le Japon au titre de

permis spéciaux. Elle a ensuite écarté le programme JARPN II qui s’applique dans le Pacifique

Nord, et limité son argumentation au seul JARPA II, qui coïncide avec le champ d’application

1
géographique de ses revendications maritimes en Antarctique . Elle a tout d’abord invoqué la

convention sur le commerce international des espèces de faune et de flore sauvages menacées

2
15 d’extinction et celle sur la diversité biologique . Elle ne s’appuie plus à présent que sur la

convention internationale pour la réglementation de la chasse à la baleine . L’Australie a tout

4
d’abord allégué que le Japon avait fait preuve de mauvaise foi et tente à présent de dissuader la

Cour de trancher l’affaire sur ce fondement . Elle a commencé par s’appuyer lourdement sur les

rapports du comité scientifique et avance à présent que la Cour devrait s’abstenir de se fonder sur

ces mêmes rapports. Par ailleurs, elle a presque abandonné toute mention de la déposition de son

témoin-expert, M. Gales. Voilà, exposé brièvement, l’historique de l’incroyable rétrécissement de

l’argumentation de l’Australie.

4. L’élément de preuve principal de l’Australie est à présent constitué par la déposition de

M. Mangel. L’utilisation qu’elle fait de la déposition de ce dernier au second tour de plaidoiries est

frappante. M. Sands s’est exprimé longuement pour souligner que M. Mangel est, je cite, «très

bien placé pour émettre un avis entièrement indépendant et concret sur ce qui constitue ou non de

7
la recherche scientifique» . En réalité, l’Australie invite la Cour à trancher la présente affaire sur la

base de la déposition de son expert sur ce qui constitue une «finalité scientifique» au sens de

l’article VIII de la convention. Il ne serait pas exagéré de dire que l’argumentation de l’Australie

ne tient à présent qu’à un fil.

5. Monsieur le président, Mesdames et Messieurs de la Cour. Ma présentation portera

principalement sur quatre points. Premièrement, j’examinerai les questions de droit et de fait sur

1
Requête de l’Australie, 31 mai 2010, par. 34 ; MA, par. 1.5.
2Requête de l’Australie, par. 39.

3CR 2013/20, p. 47, par. 3 (Campbell).
4
CR 2013/7, p. 37, par. 55 (Gleeson).
5
CR 2013/19, p. 67, par. 27 (Crawford).
6Voir, par exemple, CR 2013/8, p. 33, par. 27 (Crawford).

7CR 2013/19, p. 40, par. 41 (Sands). - 4 -

lesquelles l’Australie et le Japon s’entendent et celles sur lesquelles ils sont en désaccord.

Deuxièmement, à la lumière des éléments de preuve présentés à la Cour, j’aborderai l’incapacité de

l’Australie à démontrer ses allégations contre le Japon. Troisièmement, j’étudierai la démarche

qu’il convient d’adopter pour trancher la question fondamentale posée à la Cour, soit celle de

savoir si, en délivrant des permis spéciaux au titre de l’article VIII, le Japon a raisonnablement

conclu que JARPA II était un programme de recherche scientifique au sens de la convention

de 1946. Quatrième et dernièrement, je conclurai par quelques remarques générales concernant les

allégations de mauvaise foi que l’Australie a formulées à l’encontre du Japon en la présente

instance.

16 II. Les points d’accord et de désaccord

6. J’aborderai à présent les points d’accord et de désaccord en l’espèce. Premièrement, en ce

qui concerne la compétence, les Parties s’entendent sur le fait que la portée géographique du

programme JARPA II coïncide substantiellement avec la zone économique exclusive revendiquée
8
par l’Australie en Antarctique et la zone adjacente . Les Parties sont également d’accord sur le fait

qu’elles ne s’entendent pas sur la délimitation de cette zone maritime, que le Japon considère

comme relevant de la haute mer. Fait étonnant, M. Burmester a même avancé, au premier tour de

plaidoiries, et uniquement en ce qui concerne la compétence, que le présent différend ne concernait

pas «l’exploitation» commerciale des ressources, au sens de la réserve de l’Australie, car il se

rapportait à la chasse à la baleine à des fins scientifiques plutôt que commerciales . Il découle de

cet argument créatif que si le programme JARPA II implique «l’exploitation» commerciale des

baleines, comme l’affirme l’Australie, alors la Cour ne serait pas compétente pour trancher l’affaire

au fond. Au contraire, selon cette théorie, si le programme JARPA II se rapporte à la chasse à la

baleine à des fins scientifiques, alors l’Australie gagne sur la question de la compétence, mais perd

au fond. Or nous ne sommes pas non plus d’accord sur ce point : si, comme nous le considérons,

JARPA II est un programme scientifique, il «implique» tout de même l’exploitation de ces zones et

«concerne» encore celles-ci. Telle est la conclusion toujours incontestée à laquelle est parvenu

8 CR 2013/18, p. 26, par. 18 (Burmester).

9 CR 2013/11, p. 48, par. 34 (Burmester). - 5 -

10
M. Pellet au premier tour de plaidoiries . Le Japon relève que, ne s’étant guère intéressée à la

question de la compétence dans ces pièces écrites, l’Australie, au cours de la procédure orale, n’a

présenté que des arguments hésitants, contradictoires et peu convaincants. L’argumentation de

l’Australie tombe donc clairement sous le coup de sa propre réserve à la compétence de la Cour.

7. Sur le droit applicable, l’agent de l’Australie a avancé, au premier tour de plaidoiries, que

11
«tout l’objet» de la convention était la «conservation et [la] gestion» des stocks de baleines.

L’Australie fait valoir à présent que la conservation est un but exclusif . Elle reconnaît que toute

13
chasse aborigène de subsistance ne doit pas être interdite . Elle reconnaît également, malgré les

déclarations contraires qu’elle a faites à la CBI, que la chasse à la baleine à des fins scientifiques

peut être autorisée, mais uniquement dans des cas très limités . Toutefois, elle ne reconnaît pas

que la chasse à la baleine commerciale durable, à laquelle elle s’oppose totalement, fasse même

17 partie des objectifs de la convention . Selon les termes employés par Mme Boisson de Chazournes

«c’est un objet et un but exhaustifs : celui de la conservation et de la reconstitution des

peuplements baleiniers» . A cet égard, il existe un désaccord fondamental entre les Parties. Le

Japon maintient sa position selon laquelle l’objet et le but de la convention sont pour citer son

préambule à la fois «la conservation et l’accroissement des peuplements baleiniers» et, selon les

termes de l’article V, «l’utilisation optimum des ressources baleinières» . Nous soutenons que la

chasse à la baleine dont la viabilité a été scientifiquement établie constitue clairement l’un des buts,

si ce n’est le but fondamental de la convention de 1946.

8. Les Parties ne s’entendent pas non plus sur la portée de l’article VIII. L’Australie qualifie

cette disposition d’exception très limitée, d’exception soumise au système de réglementation

collective, d’exception destinée à la seule recherche scientifique aux fins de conservation, laquelle

10Voir CR 2013/7, p. 47-48, par. 24-33 (Pellet).

11CR 2013/7, p. 22, par. 12 (Campbell).

12CR 2013/18, p. 19, par. 16 (Dreyfus).
13
CR 2013/19, p. 54, par. 79 (Sands).
14
CR 2013/20, p. 44, par. 8 (Dreyfus).
15CR 2013/20, p. 41, par. 28 (Gleeson).

16CR 2013/7, p. 41, par. 7 (Boisson de Chazournes).
17
Préambule de la Convention internationale pour la réglementation de la chasse à la baleine (entrée en vigueur le
10 novembre 1948), Nations Unies, Recueil des Traités, vol. 161, p. 72, amendée par le protocole du 19 novembre 1956,
Nations Unies, Recueil des Traités, vol. 338, p. 366 CMJ, annexe 6. - 6 -

constitue, selon elle, le but exclusif de la convention . 18 En revanche, le Japon interprète

l’article VIII comme une dérogation à la convention, une dérogation qui autorise la chasse à la

baleine à des fins de recherches scientifiques, lesquelles visent à la fois la conservation et la gestion

des ressources baleinières. L’article VIII laisse à chaque Etat la liberté de décider par lui-même du

contenu de son programme de recherche scientifique, dans la mesure du raisonnable et sous réserve

des obligations de tenir compte de l’examen de ses propositions par le comité scientifique et des

avis formulés par celui-ci que lui impose la convention.

9. En ce qui concerne la vente de viande de baleine, l’Australie concède à présent que,

premièrement, le paragraphe 2 de l’article VIII impose aux Parties de traiter cette viande et,

deuxièmement, que cette vente, réalisée accessoirement à un programme de recherche scientifique,

n’est pas constitutive de la chasse à la baleine commerciale . Comme M. Crawford l’a expliqué en

réponse à la question posée par M. le juge Gaja, «tout programme de recherche scientifique

comporte un élément commercial» et «[l]a vente accessoire de sous-produits ne suffit pas à

20
invalider un programme de recherche scientifique digne de ce nom…» . Il s’ensuit inévitablement

que si JARPA II est un programme de recherche scientifique, le fait de disposer de la viande de

baleine en la vendant est légal et ne saurait être considéré comme relevant de la chasse

commerciale, sauf à démontrer de manière probante l’existence de la mauvaise foi. De même, la

18 vente accessoire de viande de baleine au titre de JARPA II ne modifie pas la finalité scientifique du

programme au sens de l’article VIII.

10. Les Parties s’entendent également sur le fait que la totalité de l’échantillonnage fixée

21
dans le cadre du programme JARPA II n’a pas été capturée . Au second tour de ses plaidoiries,

l’Australie n’a tenté, à aucun moment, de réfuter les conclusions énoncées par le Japon au premier

tour et selon lesquelles la véritable raison de cette capture réduite tenait dans les attaques menées

par Sea Shepherd, comme cela a été reconnu dans le rapport du comité scientifique datant de 2013 .

18
CR 2013/20, p. 29, par. 76 (Crawford).
19CR 2013/20, p. 26, par. 67 (Crawford).

20CR 2013/20, p. 27, par. 71 (Crawford).
21
CR 2013/18, p. 19, par. 17 (Dreyfus). - 7 -

11. Les Parties ne sont pas d’accord sur ce qu’il convient de déduire des déclarations faites

par des responsables japonais entre 1982 et 1987 concernant la poursuite de «la tradition de la

22
chasse» à la baleine. L’Australie soutient toujours qu’il s’agit d’éléments démontrant que, dès le
23
départ, le programme JARPA avait une finalité commerciale . Les conseils qui se présentent

devant la Cour doivent souvent souhaiter que tous les propos tenus par les Etats qu’ils représentent

aient pu être filtrés par des juristes avant même d’être prononcés, de manière à garantir qu’ils ne

contiennent aucun passage qui, sorti de son contexte, pourrait être déformé dans une quelconque

procédure juridique. C’est bien évidemment impossible. Au mieux, la Cour examinera le contexte

dans lequel ces déclarations ont été faites. Or l’affirmation de l’Australie ne tient absolument

aucun compte de ce contexte. Plus précisément, en 1982, l’alinéa e) du paragraphe 10 du

règlement annexé à la convention de 1946 prévoyait spécifiquement que le moratoire n’était pas

une interdiction permanente, et les responsables japonais pouvaient raisonnablement s’attendre à ce

qu’il soit réexaminé au plus tard en 1990, soit trois ans seulement après l’entrée en vigueur du

24
moratoire à l’égard du Japon, conformément aux termes explicites de cet alinéa . C’est seulement

dans ce contexte que les responsables japonais ont fait référence à la poursuite de la «tradition de

chasse» à la baleine, après avoir été amenés à croire qu’il ne s’agirait que d’une pause temporaire et

brève. En outre, le Japon n’a jamais caché le fait que le but des programmes JARPA et JARPA II

était la reprise de la chasse à la baleine commerciale dont la viabilité aurait été solidement établie

sur le plan scientifique.

III. La preuve de la finalité scientifique du programme
19
12. En ce qui concerne les éléments de preuve, et jusqu’à la conclusion du premier tour de

plaidoiries, les Parties s’accordaient à estimer que la Cour pouvait s’appuyer substantiellement sur

les conclusions factuelles du comité scientifique pour répondre à la question de savoir si le

programme JARPA II avait un intérêt scientifique. Ainsi, le mémoire de l’Australie ne contient pas

moins de cent références aux rapports du comité. Au cours de son premier tour de plaidoiries,

22
CR 2013/16, p. 24, par. 29 (Iwasawa).
23CR 2013/20, p. 21, par. 56 (Crawford).
24
Par. 10 e), règlement, convention internationale pour la réglementation de la chasse à la baleine; CMJ,
annexe 6. - 8 -

M. Burmester a fait observer que «[l]e comité scientifique présent[ait] une importance particulière

en l’espèce» , et M. Sands a souligné que ces rapports exprimaient les opinions d’une «tierce[]

partie[] indépendante[]» compétente . Il a conclu, au premier tour, qu’aucun avis positif sur les

27
programmes JARPA et JARPA II n’avait «jamais» été formulé dans ces rapports . Toutefois, au

second tour, M. Crawford a insisté pour que la Cour ne se fonde pas sur ces rapports, au motif que

le comité scientifique était «de plus en plus dysfonctionnel» et qu’il opérait en état de «confusion et

28
[de] dissensions» . De la même façon, M. Sands a souligné que le comité scientifique était

«incapable de fonctionner … [et] se trouv[ait] dans une impasse» . Il s’agit là d’une volte-face

tout à fait soudaine. Ces propos s’opposent totalement à tout ce qu’a dit l’Australie dans ses pièces

écrites et dans ses plaidoiries antérieures. La meilleure façon d’expliquer ce repli spectaculaire à

l’égard du plus important ensemble d’éléments de preuve qui ait été soumis à la Cour consiste à

examiner ces rapports, dont le contenu porte, selon nous, un coup fatal à l’argumentation factuelle

de l’Australie.

13. Premièrement, l’Australie n’est pas parvenue à réfuter le fait, qui ressort de manière

évidente des documents officiels de la CBI, que les données scientifiques obtenues de JARPA et

JARPA II ont contribué utilement aux travaux du comité scientifique depuis au moins 1990 . 30

Deuxièmement, l’Australie n’est pas parvenue à réfuter le fait que tant les propositions que les

résultats des recherches scientifiques menées par le Japon ont toujours été soumis pour examen au

comité scientifique, conformément aux procédures établies . Troisièmement, l’Australie n’est pas

20 parvenue à réfuter le fait que le programme JARPA a été modifié pour tenir compte des

25CR 2013/8, p. 15, par. 7 (Burmester).

26CR 2013/8, p. 61, par. 16 (Sands).
27
CR 2013/8, p. 63, par. 19 (Sands).
28
CR 2013/20, p. 30, par. 80 (Crawford).
29CR 2013/19, p. 31, par. 23 (Sands).

30 «Report of the Sub-Committee on Southern Hemisphere Minke Whales», annexe F, «Report of the Scientific
Committee», Rep. int. Whal. Commn, 1991, vol. 41, p. 113-131, annexe 86 ; rapport du comité scientifique, Rapport
annuel de la commission baleinière internationale, 1998, vol. 48, p. 103, annexe 94, «[l]e comité note que le programme

JARPA est à mi-chemin de son déroulement et a permis d’améliorer considérablement la compréhension de la structure
des stocks» ; rapport de la réunion portant sur l’examen du programme japonais de recherche scientifique sur les baleines
dans l’Antarctique au titre d’un permis spécial (JARPA) convoquée par le Gouvernement japonais, Tokyo,
18-20 janvier 2005, SC/57/O6 (2005), p. 25, annexe 102, «[l]es participants à la réunion prennent note du fait que les
objectifs de recherche au début du programme JARPA ont été conçus pour répondre à des besoins de gestion [des
baleines)]» ; CR 2013/15, p. 40, par. 34 (Takashiba) ; CR 2013/15, p. 50, par. 21 (Boyle).

31CR 2013/15, p. 32-34, par. 16-19 (Takashiba). - 9 -

32
recommandations du comité scientifique . Mme Takashiba a montré que les scientifiques japonais

avaient modifié et renforcé leurs méthodes de recherche pour répondre aux observations du

comité . Ainsi, le comité scientifique «a bien accueilli la présentation de ce rapport qui répondait

34
à une demande de l’année précédente» ; il a noté que les méthodes de collecte des données

35
avaient été renforcées «pour répondre aux observations [qu’il avait faites]» à cet égard et, même

la CBI, au sein de laquelle le bloc opposé à la chasse à la baleine commande souvent la majorité, «a

relevé que le programme avait été revisé pour tenter de prendre en compte les observations faites

36
par le comité scientifique» l’année précédente . La thèse de l’Australie consiste à dire que, au

titre de la procédure du paragraphe 30, cet examen devrait être effectué annuellement plutôt que

37
périodiquement, suivant la portée temporelle d’un programme de recherche scientifique . Cet

argument ne trouve cependant aucun fondement ni dans les termes du paragraphe 30 ni dans la

pratique y afférente. Même si l’argument de l’Australie selon lequel les examens devraient être

plus fréquents présentait un quelconque intérêt, quod non, il s’agirait au mieux d’un point

technique de procédure et non d’une preuve de mauvaise foi. Ainsi, en approfondissant cet

argument, l’Australie se raccroche véritablement à n’importe quoi.

14. L’Australie soutient encore que le comité scientifique n’a jamais formulé le moindre avis

positif concernant JARPA ou JARPA II . 38 Elle n’est toutefois pas parvenue à réfuter les

conclusions évidentes et sans ambiguïté des examens de JARPA réalisés en 1997 et en 2006. Au

cours de son second tour de plaidoiries, elle a avancé que les deux groupes chargés de l’évaluation

étaient dominés par des scientifiques japonais, mais n’a pas reconnu que le comité scientifique

avait adopté ces rapports. De fait, le rapport de 2008 du comité scientifique confirme qu’«un

nombre considérable de données ont été collectées par le programme JARPA grâce à des méthodes

tant létales que non létales» et «approuve» les «conclusions et recommandations» de l’évaluation . 39

32 CR 2013/15, p. 37, par. 28-29 (Takashiba).

33 Ibid.
34
Rapport annuel de la commission baleinière internationale, 1996, vol. 46, p. 78.
35
Rapport annuel de la commission baleinière internationale, 1993, vol. 43, p. 75.
36
Rapport annuel de la commission baleinière internationale,1992, vol. 42, p. 13.
37 CR 2013/20, p. 39, par. 19 (Gleeson).

38 CR 2013/8, p. 63, par. 19 (Sands).

39 J. Cetacean Res. Manage. 10 (Suppl.), 2008, p. 58. - 10 -

Si l’Australie cherche une trace de l’approbation de JARPA par le comité scientifique, elle n’a nul

besoin de poursuivre plus loin sa recherche.

21 15. Au second tour de plaidoiries, l’Australie a également avancé que ces deux évaluations

étaient en quelque sorte sans importance, au motif qu’elles portaient sur JARPA et non sur

JARPA II. Or l’Australie n’a pas cessé de lier ceux-ci comme deux phases interdépendantes d’un

même programme de recherche scientifique et n’a tenu aucun compte du fait que le comité

scientifique s’était appuyé sur les données de JARPA pour évaluer JARPA II en 2005. En réponse

à la question de M. le juge Greenwood, l’Australie n’est pas non plus parvenue à expliquer

pourquoi les vues des soixante-trois scientifiques qui ont boycotté l’évaluation de 2005 devaient

prévaloir sur celles des cent-vingt-deux autres scientifiques, ni en quoi ce désaccord présente la

moindre pertinence pour déterminer l’intérêt scientifique de JARPA II. De même, l’Australie n’est

pas parvenue à expliquer pourquoi la Cour ne devrait pas tenir compte des avis du comité

scientifique concernant la nécessité d’un échantillonnage létal pour la collecte des données relatives

à l’âge, à l’épaisseur de la graisse ou au contenu stomacal. L’Australie n’a présenté aucun élément

démontrant que, en 2005, le Japon avait tort de conclure que l’échantillonnage létal ne porterait pas

atteinte au stock de baleines. De fait, en ce qui concerne «les études portant sur la structure des

stocks», le groupe de travail chargé de l’évaluation finale de JARPA a reconnu, en 2006, «la

quantité tout à fait considérable de travail fourni», «les progrès réalisés et potentiels au regard de la

quantité de données collectées» et l’accord des scientifiques concernant la structure des stocks dans

la zone de recherche de JARPA «sur la base des analyses des données génétiques et
40
morphométriques présentées» . L’évaluation effectuée par le Japon de l’impact de JARPA II sur

les stocks de baleines n’est donc toujours pas réfutée. De fait, le propre expert de l’Australie,

M. Mangel, a confirmé devant la Cour que «ces captures très limitées de [petits rorquals] ne

41
mettr[aie]nt pas du tout en danger cette population» .

16. L’Australie n’est pas non plus parvenue à répondre aux avis positifs formulés par le

comité scientifique concernant JARPN II, un programme de recherche substantiellement similaire à

40Rapport du groupe de travail intersessions chargé d’examiner les données et les résultats obtenus dans le cadre
de la chasse au petit rorqual dans l’Antarctique au titre d’un permis spécial en vue de recherches scientifiques, Tokyo,
4-8 décembre 2006, J. Cetacean Res. Manage. 10 (Suppl.), 2008, p. 422 ; CMJ, annexe 113.

41CR 2013/9, p. 63 (Mangel). - 11 -

JARPA II, dans le cadre de l’examen qu’il a effectué en 2009 au titre de l’annexe P. Voici, par

exemple, les observations qui ont été faites : «[l]e groupe apprécie les effort considérables qui ont

été déployés et la qualité généralement élevée du programme d’échantillonnage, des données qui en

résultent et des informations issues des études menées dans le cadre de JARPN II sur les habitudes

alimentaires des baleines et leurs préférences en matière de proies», et encore : «[c]es efforts ont

produit des ensembles précieux de données qui offrent de grandes possibilités pour procéder à des

42
travaux analytiques concertés sur un large éventail de sujets…» . L’Australie n’est pas non plus

22 parvenue à répondre aux avis positifs formulés sur JARPA II par les membres du comité

scientifique en juin 2013, au cours de leur dernière réunion. Par exemple, le comité a relevé que

«la démarche adoptée et ses résultats [avaie]nt fourni des données d’entrée exploitables pour

l’analyse des prises par âge» . Ces éléments de preuve démontrant la finalité scientifique du

programme, qui sont tirés des propres documents officiels de la CBI, sont crédibles et sans

ambiguïté et n’ont pas été réfutés par l’Australie.

17. En bref, le meilleur argument de l’Australie consiste à dire qu’il existe un désaccord

scientifique sur certains aspects du programme JARPA II. Le Japon partage l’opinion de

l’Australie sur le fait qu’il existe un certain désaccord scientifique. Cependant, l’article VIII

n’impose pas le consensus scientifique. Il exige simplement une «finalité scientifique», laquelle ne

fait, à cet égard, aucun doute.

18. Monsieur le président, Mesdames et Messieurs de la Cour, par la présente instance,

l’Australie a tenté d’assimiler critique scientifique et absence d’intérêt scientifique. Mes collègues

de l’université diraient qu’il faut cinq chercheurs pour changer une ampoule : un pour la visser et

quatre pour critiquer la méthode. La critique scientifique est la vocation des scientifiques ; elle est

leur raison d’être. Même le propre expert du Japon, M. Walløe a critiqué certains aspects du

44
programme JARPA, confirmant son indépendance en tant qu’expert et scientifique éminent .

Cependant, la question qui vous est posée n’est pas celle de savoir si le Japon pouvait améliorer ses

42Report of the Expert Workshop to Review the Ongoing JARPN II Programme, J. Cetacean Res. Manage. 11
(Suppl. 2), 2010, p. 408, disponible à l’adresse suivante : http://iwc.int/index.php?cID=workshop-reports&year=2009.

43 Rapport du comité scientifique,2013, p. 39, disponible en anglais à l’adresse suivante :
http://iwc.int/index.php?cID=3318&cType=document&download=1.
44
CR 2013/14, p. 44 (Walløe). - 12 -

méthodes de recherche scientifique. La question qui se pose est plutôt de savoir si, comme

l’Australie l’a allégué, le programme n’avait absolument aucun intérêt scientifique et s’il s’agit

d’un moyen détourné de poursuivre la chasse à la baleine commerciale.

19. Quelle que soit la façon dont on aborde la question, les documents du comité scientifique

relatifs à JARPA II ne font rien de plus qu’établir l’existence d’un débat scientifique et d’un

désaccord dans ce domaine. Il y a débat et désaccord, mais ils sont d’ordre scientifique. Or il suffit

à la Cour de s’assurer que JARPA II a une «finalité scientifique». Les éléments de preuve

documentaires, éléments sur lesquels l’Australie s’est abondamment appuyée jusqu’à ce qu’elle les

abandonne brusquement au second tour de plaidoiries, contredisent fondamentalement sa thèse

selon laquelle JARPA II est dépourvu «d’intérêt scientifique». Les rapports du comité scientifique

portent tout simplement un coup fatal à la thèse de l’Australie.

20. L’usage extrêmement sélectif des rapports du comité scientifique que fait l’Australie

mérite une brève remarque finale. La Cour se rappellera que, au second tour de plaidoiries,

45
23 M. Sands a fait référence à plusieurs de ces rapports . Ceux-ci figurent dans le dossier de

plaidoiries. Ces documents ont été photocopiés en format portrait, comme on pouvait s’y attendre,

à une importante et mystérieuse exception près. Voici, par exemple, les documents photocopiés en

os
format portrait, reproduits sous les onglets n 29 et 30 de la présentation de M. Sands et que nous

avons insérés sous les onglets n 2 et 3 de votre dossier de plaidoiries d’aujourd’hui. Et voici le

o o
document suivant, présenté sous l’onglet n 31 de sa plaidoirie et reproduit sous l’onglet n 1-2 de

votre dossier de plaidoiries d’aujourd’hui. Il est photocopié de manière suspecte en format

paysage. Il s’agissait, comme vous vous souviendrez certainement, de la page 426 du rapport

de 2009 sur le programme JARPN II et M. Sands s’était plaint du fait que «la page 426 … a[vait]

échappé» au conseil du Japon. 46 Selon ses propos, cette page montrait que des solutions non létales

47
n’étaient pas «inutilisables ou non disponibles». Songeant au brillant plaidoyer de mon cher ami

et collègue, j’ai consulté ce document. La raison pour laquelle il vous avait été présenté en format

paysage est rapidement devenue évidente. La photocopie en format portrait de la page 426,

45CR 2013/19, p. 47, par. 60 (Sands).

46Ibid.
47
Ibid. - 13 -

o
reproduite sous l’onglet n 1-3 de votre dossier de plaidoiries d’aujourd’hui, montre pourquoi le bas

de la page 426, indiqué par la ligne rouge, a été accidentellement tronqué. Cette partie de

l’évaluation indique, et je cite : «Le groupe reconnait que, actuellement, certaines données,

essentiellement celles relatives au contenu stomacal, ne peuvent être obtenues que par

échantillonnage létal». 48

21. Monsieur le président, Mesdames et Messieurs de la Cour, on m’accuse de «créativité

dans le raisonnement juridique», mais, heureusement, je ne suis pas coupable de «créativité

s’agissant de la photocopie de documents». Nous vous recommandons avec insistance de traiter

avec une grande prudence le compte rendu que fait l’Australie du contenu et des conclusions des

rapports du comité scientifique.

22. Comme je l’ai mentionné précédemment, la thèse de l’Australie selon laquelle JARPA II

est dépourvu d’intérêt scientifique n’est à présent fondée que sur les critères énoncés par

M. Mangel dans sa déposition. Or, à la différence de l’annexe P, ces critères n’ont jamais été

reconnus ou appliqués ni par le comité scientifique ni par les Parties en l’espèce. Si aucun avis

positif n’a jamais été émis à l’égard de JARPA II au titre de l’annexe P, suivant les griefs formulés

par l’Australie, c’est parce que l’évaluation est prévue pour 2014. Il est absurde de proposer que,

dans l’attente de cette évaluation, les critères présentés par M. Mangel se substituent à l’annexe P

pour évaluer l’intérêt scientifique du programme JARPA II.

23. Or même la déposition de M. Mangel est peu probante. Par exemple, il partage l’opinion

de M. Walløe sur le fait que la taille des échantillons fixée dans le cadre du programme JARPA II

24 représente des «captures très limitées» de petits rorquals. 49 On peut rappeler que, suivant

M. Walløe, il était «évident que certains des objectifs du programme JARPA n’avaient pas été
50
atteints, en partie à cause de la taille trop restreinte de l’échantillon» . Il existait bien évidemment

des points de désaccord entre les deux experts concernant leur appréciation de l’intérêt scientifique

du programme JARPA II, mais cela montre, à la rigueur, que deux scientifiques tout aussi avisés

peuvent parvenir à des conclusions divergentes à partir de leurs méthodes et de leurs hypothèses

48
Report of the Expert Workshop to Review the Ongoing JARPN II, J. Cetacean Res. Manage., 11 (Suppl. 2),
2010, p. 405-449 (SC/61/Rep. 1), disponible à l’adresse suivante : http://iwc.int/workshops-reports#!year=2009, p. 426.
49CR 2013/9, p. 63 (Mangel).
50
CR 2013/14, p. 50 (Walløe). - 14 -

respectives. Si on laisse de côté ce point, les Parties sont formellement en désaccord sur le rôle des

experts en l’espèce. Ayant soudainement abandonné les rapports du comité scientifique,

l’Australie avance à présent que, s’agissant de savoir ce qui relève de la «science», l’affaire devrait

être tranchée, pour l’essentiel, sur la base de la déposition de M. Mangel. Le Japon est d’avis qu’il

appartient à la Cour de trancher cette question juridique ; il appartient à la Cour de déterminer si le

Japon a conclu de manière raisonnable que JARPA II était un programme conçu en vue de

recherches scientifiques au sens de l’article VIII. Savoir ce qui relève de la science en l’espèce

n’est pas une question théorique abstraite, ce n’est pas une question ouverte à la spéculation

métaphysique. Il s’agit d’une question juridique qu’il convient de trancher à partir des règles

applicables. Ces règles sont l’article VIII, le paragraphe 30 et l’annexe P. Tels sont clairement les

critères que les Parties sont convenues d’utiliser comme fondement pour déterminer l’intérêt

scientifique.

24. Il est remarquable à cet égard que l’Australie n’ait guère parlé des critères d’évaluation

au titre de l’article VIII de la convention. Le Japon soutient que les Etats contractants ont un large

pouvoir discrétionnaire pour délivrer des permis spéciaux pour la chasse à la baleine en vue de

recherches scientifiques au titre de cette disposition. La Cour ne devrait intervenir que lorsque

l’exercice de ce pouvoir discrétionnaire est manifestement déraisonnable, ce qui, selon nous, n’est à

l’évidence pas le cas. Les éléments de preuve soumis à la Cour ne laissent guère de doute sur le

fait que le programme JARPA II a une finalité scientifique au regard des évaluations faites par le

comité scientifique de la CBI et des critères objectifs énoncés à l’annexe P ; il ne saurait faire de

doute que, ces trente dernières années, le Japon a poursuivi ce programme de recherche de bonne

foi et raisonnablement en vue de recherches scientifiques.

25. En conclusion, l’Australie a, au mieux, simplement établi qu’il existait un débat et un

désaccord scientifiques sur certains aspects du programme JARPA II. Elle cherche, de manière peu

convaincante, à assimiler l’absence de consensus scientifique à l’absence de finalité scientifique.

Même les résolutions politisées de la CBI que l’Australie invoque n’indiquent pas que le

programme JARPA II viole l’article VIII de la convention. Au contraire, comme je l’ai indiqué

25 dans mes plaidoiries du premier tour, malgré leur vive opposition à JARPA II, les hauts

responsables australiens ont admis à plusieurs reprises que le Japon avait le droit d’établir un tel - 15 -

programme au titre de l’article VIII. L’Australie n’est manifestement pas parvenue à démontrer

que, dans l’exercice du large pouvoir discrétionnaire que lui accorde cette disposition, le Japon a

agi le moins du monde de manière déraisonnable et illicite. La thèse de l’Australie selon laquelle

JARPA II constitue un moyen détourné de poursuivre la chasse commerciale, sa thèse selon

laquelle le Japon a poursuivi un programme de pseudo-science frauduleuse, agissant de mauvaise

foi pendant près de trente ans, cette thèse doit être écartée. Elle est manifestement tout à fait

infondée.

IV. L’attachement du Japon à la CBI

26. Monsieur le président, Mesdames et Messieurs de la Cour, comme je l’ai dit dans notre

premier tour de plaidoiries, au fond, la thèse de l’Australie consiste à dire que le Japon a agi de

mauvaise foi. Pour citer les termes employés par son agent, le Japon a «dissimul[é]» ses activités

51
de chasse commerciale «sous le couvert de la science» .

27. La mauvaise foi, bien entendu, est l’euphémisme par lequel on désigne, en droit, la

tromperie intentionnelle. En d’autres termes, la thèse de l’Australie consiste à dire que le Japon a

menti, et ce, de façon systématique, qu’il en a fait une politique d’Etat, pendant presque trente ans,

devant le comité scientifique, devant la CBI et, à présent, devant la Cour. Inutile de dire qu’il

s’agit là d’une accusation grave, d’un affront à la dignité d’une nation. Ce n’est certainement pas

une accusation que l’on peut faire à la légère. Mon très cher ami et collègue, M. Crawford, a fort

justement fait observer dans son exposé la semaine dernière que, «[h]abituellement, les Etats

attachés aux mêmes principes ne s’accusent pas d’agir de mauvaise foi, et les conseils qui les

représentent devant les juridictions internationales sont tenus de ne pas le faire, à moins de disposer

de preuves concrètes» . 52

28. M. Crawford soutient à présent que la Cour ne devrait pas se prononcer sur l’affaire en se

fondant «entièrement [ou] principalement» sur ce qu’il appelle des «critères aussi fluctuants et

53
subjectifs que celui de la mauvaise foi» . Voici qui constitue, bien entendu, pour l’Australie, un

revirement théorique de dernière minute. «Le manque de bonne foi» est au cœur de son mémoire,

51CR 2013/7, p. 24, par. 18 (Campbell).

52CR 2013/19, p. 64, par. 20 (Crawford).
53
Ibid., p. 65, par. 22. - 16 -

et il constitue le thème central de son premier tour de plaidoiries. Le Japon convient naturellement

que l’Australie n’aurait pas dû lancer des accusations de mauvaise foi avec une telle légèreté,

notamment au mépris flagrant de ses propres éléments de preuve. En contradiction avec

l’avertissement qu’il adresse à la Cour, cependant, M. Crawford en vient, en la présente affaire, à la

conclusion qu’«une forte présomption de bonne foi conduit, dans les faits, à allouer [les] ressources

26 [du domaine public] aux Etats doués pour la dissimulation» . Qu’entend-il exactement par les

«Etats doués pour la dissimulation» ? Les propos qu’il a tenus au sujet de ce qu’il a appelé

l’«exemple édifiant» de l’affaire du Thon à nageoire bleue nous éclairent à ce sujet : il a déclaré

qu’alors même que le Japon était engagé dans la présente procédure, il avait «délibérément et

55
massivement dépassé son quota de thon» . Je ne vois pas vraiment quelle conclusion il demande à

la Cour de tirer de cette affaire qui n’a rien à voir avec la nôtre et qui remonte à plus d’une

décennie. Mais à supposer même qu’elle soit d’une manière ou d’une autre pertinente, il est tout

simplement faux de soutenir que le Japon a volontairement adopté une conduite trompeuse dans

cette affaire. La référence donnée par M. Crawford n’indique rien de la sorte. Une fois encore, le

Japon ne peut que regretter l’empressement avec lequel l’Australie porte des accusations de

mauvaise foi injustifiées, tout comme elle soutient que la Cour ne devrait pas fonder sa décision sur

la mauvaise foi.

29. Le Japon a été placé dans la position inconfortable d’avoir en permanence à se défendre

contre des accusations aussi dénuées de fondement portées contre lui devant cette Cour. Dans

l’exposé qu’il a présenté à l’ouverture du second tour de plaidoiries, l’honorable Mark Dreyfus,

Attorney-General de l’Australie, a jugé «insultante» la manière dont la Japon avait réagi à ces
56
graves accusations . Il a précisé que la présente affaire ne portait pas sur ce qu’il a appelé

l’«impérialisme culturel», qu’il s’agissait d’un «différend entre deux nations amies» et de la

mauvaise foi du Japon à l’égard de la réglementation collective établie par la CBI, que celui-ci ne

respectait pas .7

54
Ibid.
55CR 2013/19, p. 64-65, par. 20-21 (Crawford).

56CR 2013/18, p. 15, par. 5 (Dreyfus).
57
CR 2013/18, p. 16, par. 7 ; ibid., p. 14, par. 4. - 17 -

30. A cet égard, dans la mesure où c’est la réglementation collective qui est en jeu, le Japon

fait observer que, si l’Australie n’avait pas brutalement rejeté le projet de décision consensuelle de

la CBI en 2010, si elle n’avait pas introduit la présente instance seulement quelques jours avant

l’ouverture des négociations à la réunion annuelle de la CBI qui s’est tenue au Maroc en 2010, si

son ministre de l’environnement n’avait pas déclaré, sur le ton du défi, qu’«il était désormais temps

58
de barrer la route au projet de décision consensuelle» , en d’autres termes, si l’Australie avait

exprimé la moindre volonté de faire des concessions, le présent différend aurait aujourd’hui très

probablement trouvé une solution collective. La CBI aurait surmonté l’impasse face à laquelle elle

se trouve, elle aurait été sauvée de l’implosion.

31. Le Japon a relevé à cet égard les qualités de dirigeant de sir Geoffrey Palmer

l’éminent homme d’Etat néo-zélandais et commissaire de la CBI qui avait présidé le groupe

27 de soutien dans l’important processus de négociation relatif à l’«Avenir de la CBI». J’aimerais

rappeler que, après l’échec de négociations qui avaient au total duré trois ans, sir Geoffrey a rendu

un hommage remarquable au Japon, et je le cite, «pour son très profond attachement à la CBI et sa

volonté de faire des concessions» . 59 Son silence sur le rôle de l’Australie était tout aussi

remarquable.

32. C’est dans ce contexte que le Japon constate avec regret le rôle que la Nouvelle-Zélande

a joué dans la présente procédure. Il ne saurait passer inaperçu qu’à plusieurs reprises la

Nouvelle-Zélande a fait des déclarations sur les faits de l’espèce, notamment sur la «charge de la

preuve» incombant au Japon et sur la question de savoir si celui-ci avait correctement examiné

60
certains éléments de preuve scientifiques , déclarations qui venaient à l’appui des allégations de

mauvaise foi portées par l’Australie contre le Japon. Ces déclarations allaient clairement au-delà

des questions d’interprétation des traités qui délimitent la portée des interventions telle que définie

à l’article 63 du Statut de la Cour. Elles allaient également explicitement à l’encontre de l’opinion

58
Peter Garrett, «Whales worth more alive than dead», document disponible à l’adresse
http://www.theage.com.au/opinion/politics/whales-worth--more-alive-than… (site consulté le
1 juillet 2013).
59 e
Rapport du président sur les travaux de la 62 réunion annuelle de la CBI, p. 8.
60Voir, par exemple, CR 2013/17, p. 29, par. 47 (Finlayson) : examinant sur quelle partie il convenait de faire
peser la « charge de la preuve » ; CR 2013/17, p. 40, par. 18 (Ridings) : faisant des commentaires sur JARPA II et faisant
observer que le Japon avait « om[is] de prendre en compte » certaines considérations d’ordre scientifique. - 18 -

exprimée par le commissaire néo-zélandais à la CBI quant à la question de savoir si c’était le Japon

ou l’Australie qui avait réduit à néant toute possibilité d’apporter une solution consensuelle à la

réglementation collective de la chasse à la baleine.

33. A cet égard, le Japon renvoie la Cour au «communiqué de presse conjoint» de

l’honorable Kevin Rudd, alors ministre des affaires étrangères de l’Australie, et de

l’honorable Murray McCully, son homologue néo-zélandais, en date 15 décembre 2010, concernant

61
l’intervention de la Nouvelle-Zélande dans la présente affaire . Dans cette déclaration, qui est

publiée sur le site Internet officiel du Gouvernement, les deux ministres des affaires étrangères

confirment que «les deux pays sont convenus de collaborer en vue d’obtenir l’élimination de la

chasse à la baleine dans l’océan Austral en déployant des stratégies complémentaires» . La 62

déclaration suivante ne laisse aucun doute sur la stratégie dont il s’agit :

«L’Australie a indiqué qu’elle ne souhaitait pas que la Nouvelle-Zélande se

constitue partie à l’instance. En effet, étant donné qu’un juge néo-zélandais siège déjà
à la Cour internationale de Justice … la jonction des deux actions ferait perdre à
l’Australie le droit de désigner un juge ad hoc en l’affaire. La décision de la
Nouvelle-Zélande d’intervenir en l’affaire permettra que celle-ci suive son cours sans
délai.»63

34. C’est avec grand regret que le Japon doit soulever cette question, mais il est difficile de

ne pas conclure, au vu de cette déclaration et de la manière dont la procédure orale a par la suite été

28 menée, que les deux parties sont complices. Il est difficile de ne pas conclure qu’elles font cause

commune. Il s’agit là d’un fâcheux précédent pour l’intervention au titre de l’article 63. Cela a

manifestement nui au Japon dans la présente instance.

35. Ce qui est particulièrement décourageant pour le Japon c’est que, malgré les accusations

de mauvaise foi auxquelles il a dû répondre devant cette Cour, malgré l’insistance avec laquelle

l’Attorney-General de l’Australie soutient que c’est pour «défendre l’état de droit» que l’Australie

a introduit la présente instance, cette dernière semble n’avoir aucune intention de mettre fin à la

campagne qu’elle mène contre le Japon, et ce, quelle que soit la décision que prendra la Cour.

Dans un entretien avec Leigh Sales de l’Australian Broadcasting Corporation qui a été publié sur

61
«Communiqué de presse conjoint», 15 décembre 2010. Le document peut être consulté à l’adresse
http://foreignminister.gov.au/releases/2010/kr_mr_101215.html.
62Ibid.

63Ibid. - 19 -

le site Internet de l’Attorney-General et qui figure sous l’onglet n 5 de vos dossiers de plaidoiries,

la question suivante a été posée à ce dernier, immédiatement après qu’il eut présenté son exposé au

second tour de plaidoiries, le 10 juillet : «Si la CIJ se prononce en faveur du Japon, le

Gouvernement australien acceptera-t-il cette décision et tournera-t-il la page ?» 64 La réponse de

l’Attorney-General a été la suivante : «Eh bien, nous accepterons la décision, tout comme nous

attendrions du Japon qu’il le fasse, mais nous continuerons de collaborer avec d’autres pays au sein

de la commission baleinière internationale pour obtenir du Japon qu’il mette un terme à son

programme.» 65 Après quoi il a précisé «mais si la Cour internationale de Justice devait déclarer, à

l’encontre de notre thèse, que la convention pour la réglementation de la chasse à la baleine permet

effectivement au Japon de se comporter comme il le fait depuis de nombreuses années, nous

continuerions de débattre de la question avec les autres pays au sein de la commission

66
baleinière» .

36. Cette position va dans le sens des déclarations faites auparavant par l’Attorney-General

le 5 juillet, juste avant de se rendre à La Haye pour présenter son exposé. Un journaliste australien,

un certain Jon Faine, lui a posé la question suivante, et je cite ici d’après la transcription officielle

de l’entretien qui est publiée sur le site Internet de l’Attorney-General et qui figure sous l’onglet

o
n 6 de vos dossiers de plaidoiries :

[Le journaliste demande] : «si vous perdez, est-ce que cela mettra un terme, par exemple,

aux campagnes de Sea Sheperd auxquelles nous avons assisté dans l’océan Austral et à l’appel

qu’ils ont lancé à l’Australie de soutenir leur tactique ?»

[L’Attorney-General répond] : «Si nous n’obtenons pas gain de cause, nous respecterons,

bien entendu, la décision de la Cour, mais nous continuerons également de recourir à des moyens

diplomatiques pour faire valoir notre argument, nos arguments au sein de la Commission baleinière

29 internationale, et cela consistera à discuter avec le Japon de la nécessité pour lui de cesser d’agir

comme il le fait »

64Australian Broadcasting Corporation, «Attorney-General accuses Japan of «commercial whaling dressed up as
scienc»», 10 juillet 2013. Le document peut être consulté à l’adresse http://www.abc.net.au/7.30/content/
2013/s3800400.htm.

65Ibid.
66
Ibid. - 20 -

[Le journaliste demande encore] : «Mais si nous avons saisi la Cour et que nous avons perdu,

cela ne met-il pas un terme au débat ? Au fond, il ne nous reste plus qu’à nous accommoder de la

décision de la Cour.»

[L’Attorney-General répond] : «Au contraire … l’enjeu est la protection de l’environnement

67
de la planète…»

Un peu plus loin dans ce même entretien, l’Attorney-General a été interrogé à propos de Sea

Shepherd, et je cite une fois encore ce qui est retranscrit sur ce même site Internet :

[Le journaliste demande] : «Alors, quelle attitude adoptons-nous vis-à-vis de Sea Shepherd

si, effectivement, le Japon vient à l’emporter ? Que faisons-nous ? Allons-nous alors tenir compte

de l’appel du Japon à adopter une autre attitude vis-à-vis des actions menées par Sea Shepherd,

dont la Cour pourrait bien déclarer qu’elles ne relèvent pas du droit international ?»

[L’Attorney-General répond] : «Eh bien, les navires de Sea Shepherd ont, tout comme

d’autres, le droit d’utiliser les ports australiens … il est tout à fait juste que Sea Shepherd a le droit

68
d’amarrer ses navires dans les ports australiens.»

37. La Cour se souviendra que, dans l’exposé qu’il a présenté dans la présente procédure,

l’Attorney-General a confirmé que «[l]e fait que des bateaux de Sea Shepherd se rendent dans les

ports de l’Australie ou puissent être immatriculés dans ce pays ne prouve nullement que le

Gouvernement australien soutient cette organisation» . 69

38. Face à ces déclarations dépourvues de toute ambiguïté, le Japon ne peut s’empêcher de

conclure que, quelle que soit la décision de la Cour, l’Australie poursuivra sa campagne de

confrontation à la CBI et qu’elle continuera de tolérer les attaques menées par Sea Shepherd en

haute mer. Le Japon ne peut s’empêcher de conclure que, pour l’Australie, cette Cour n’est qu’un

instrument parmi d’autres pour atteindre l’objectif qu’elle poursuit sans relâche d’imposer, d’une

manière ou d’une autre, sa volonté au Japon. Rien n’arrêtera l’Australie. Voilà ce qu’elle entend

67 Attorney-General de l’Australie, transcription de l’entretien avec M. Jon Faine774 ABC Melbourne,
5 juillet 2013. Le document peut être consulté à l’adresse http://www.attorneygeneral.gov.au/transcripts/Pages/2013/
Third%20quarter/5-July-2013---Transcript-of-interview-with-Jon-Faine---774-ABC-Melbourne.aspx.

68Ibid.
69
CR 2013/18, p. 15, par. 6 (Dreyfus). - 21 -

par l’état de droit à l’échelle internationale : nous obtiendrons ce que nous voulons, quelle que soit

la décision de la Cour.

39. Il ne peut passer inaperçu que, dans le droit fil de ce qu’a déclaré l’Attorney-General,

l’ancien chef du parti des Verts australien, M. Bob Brown, qu’on appelle aujourd’hui le «directeur

de campagne» de Sea Shepherd et qui collabore avec l’ex-ministre australien de

l’environnement, M. Ian Campbell, qui, ainsi que je l’ai précisé au premier tour de plaidoiries, s’est

également rangé aux côtés de Sea Shepherd M. Brown a bien précisé, dans un entretien en date

du 10 juillet, que, et je le cite : «Nous nous préparons comme si l’issue du procès ne devait pas

empêcher que des opérations de chasse soient menées à l’avenir … Nous nous tenons prêts à

70
30 poursuivre le combat» . Cela ne laisse aucun doute sur le fait que, alors même que la Cour sera en

train de délibérer sur sa décision dans les mois à venir, les navires de recherche affectés au

programme JARPA II seront confrontés à une autre vague d’attaques violentes dans les eaux de

l’Antarctique.

40. Monsieur le président, Mesdames et Messieurs de la Cour, alors même que la présente

affaire était débattue devant vous, alors même que le Japon évoquait l’intransigeance de

l’Australie, sa politique de «tolérance zéro» et la politisation de la science, alors même que se

déroulaient ces plaidoiries, la CBI était malheureusement poussée un pas plus près du gouffre.

Vous vous souviendrez peut-être que M. Sands a fait grand cas du fait que, à la CBI, l’Australie

excluait la chasse aborigène de subsistance de son opposition par ailleurs totale à la chasse . Le 71

1 juillet, le commissaire danois auprès de la CBI, M. Gitte Hundahl, a communiqué la lettre

72
suivante aux autres commissaires et aux Etats parties à la convention de 1946 . Cette lettre figure

sous l’onglet n° 7 de vos dossiers de plaidoiries et a été distribuée par le secrétariat de la CBI le

3 juillet 2013. Dans la partie qui nous intéresse, il y est précisé que, les membres de la CBI n’étant

pas parvenus à s’entendre sur les limites de capture allouées à la chasse aborigène de subsistance au

Groenland pour l’année 2013 et les années suivantes, le Gouvernement du Groenland avait «décidé

70http://www.theaustralian.com.au/news/japan8217s-whaling-claims-8216untr…-
attorneygeneral-tells-un-court/story-e6frg6n6-1226676931653.

71CR 2013/19, p. 54, par. 79 (Sands).
72
http://iwc.int/cache/downloads/c0mqq34ohp4ck8ccko084ko0k/Letter%20from%…%
20Greenland%20asw.pdf. - 22 -

de mettre en œuvre unilatéralement et de façon temporaire les limites de capture proposées par le

e
Royaume du Danemark à la 64 réunion annuelle» de la CBI, qui s’était tenue en 2012 ; en d’autres

termes, les limites de capture qui avaient été rejetées par les pays opposés à la chasse, parmi

73
lesquels figurait l’Australie . La lettre se poursuit ainsi : «Cette décision a été prise pour permettre

la poursuite de la chasse au Groenland afin de répondre aux besoins de la population et éviter que

74
ne soient menées des activités de chasse en dehors de toute réglementation.» Il y est également

précisé que «[l]a proposition était conforme à l’avis formulé par le comité scientifique au moment

où elle a été soumise, à savoir que la chasse ne devait pas nuire aux populations baleinières. Le

Gouvernement du Groenland a indiqué qu’il continuerait de suivre l’avis du comité scientifique à

75
cet égard» .

31 41. Ce qui est particulièrement alarmant, c’est le fait que le Danemark a précisé que «[s]i une

solution conforme à la convention n’[était] pas trouvée, le Royaume du Danemark entend[ait]

notifier son retrait de la convention pour la réglementation de la chasse à la baleine avant le

er 76
1 janvier 2014» .

42. Monsieur le président, Mesdames et Messieurs de la Cour, le message est clair. Si le

détournement de la convention se poursuit, si la politisation de la science perdure, si les traditions

et les cultures de certaines populations sont sacrifiées pour apaiser les sentiments d’autres

populations et se plier au jugement de valeur discriminant de ces dernières, si le droit international

continue d’être foulé aux pieds, il ne restera bientôt plus aucun pays pratiquant la chasse à la CBI.

L’Australie et ses alliés pourront alors adopter toutes les résolutions qu’ils veulent, et interdire

triomphalement toute forme de chasse pour l’éternité au nom de la «réglementation collective»,

sans avoir besoin de négocier, ni de faire des concessions, ni d’écouter le comité scientifique. Mais

ils parviendront à leur objectif sans les pays qui pratiquent la chasse, car ceux-ci auront quitté la

CBI pour trouver ailleurs d’autres solutions viables à la réglementation de la chasse durable.

73 Rep. Int. Whal. Commn. 2012, p. 23, http://iwc.int/cache/downloads/3svqu6d4dlogg0owc8oswswk0/
AnnualReport2012.pdf.

74 http://iwc.int/cache/downloads/c0mqq34ohp4ck8ccko084ko0k/Letter%20from%…%
20Greenland%20asw.pdf.
75
Ibid.
76 http://iwc.int/cache/downloads/c0mqq34ohp4ck8ccko084ko0k/Letter%20from%…%
20Greenland%20asw.pdf. - 23 -

Bientôt deux organisations internationales concurrentes coexisteront, l’une cherchant à interdire

toute forme de chasse, l’autre à assurer une chasse viable fondée sur des données scientifiques.

Une commission favorable à la chasse et une commission opposée à celle-ci coexisteront, et les

pays pourront choisir à quelle organisation adhérer. En revanche, il n’existera plus d’enceinte

unique au sein de laquelle les questions d’intérêt collectif pourront être réglementées dans le cadre

d’une véritable coopération. Voilà exactement à quoi la politique «sans concessions» menée par

l’Australie finira par aboutir.

43. Monsieur le président, Mesdames et Messieurs de la Cour, cela m’amène à la suprême

ironie de cette affaire, le fait le plus évident qui réduit totalement à néant la théorie de la

conspiration que l’Australie a échafaudée à propos de JARPA II sa théorie selon laquelle il

s’agirait d’un programme de chasse commerciale déguisé en programme scientifique. Or ce fait est

si évident, si fondamental, qu’on peut facilement passer à côté, et nous invitons donc la Cour à

l’examiner avec attention. Ce n’est que parce que le Japon a choisi de ne pas se retirer de la CBI

que l’Australie a pu introduire la présente instance contre lui, qu’elle a pu l’accuser de mauvaise foi

et de se livrer à des activités de chasse commerciale sous le couvert de la science. Ce n’est que

parce que le Japon respecte toujours le moratoire de la chasse commerciale qu’elle a pu introduire

la présente instance. Serait-il difficile pour le Japon de se retirer tout simplement de la CBI,

comme l’a fait le Canada en 1981, comme l’a fait l’Islande en 1992, ou comme pourrait à présent le

faire le Danemark en 2014 ? Serait-il difficile pour lui de lever tout simplement l’obstacle

juridique à la mise en œuvre d’une chasse commerciale durable s’il menait effectivement la

32 politique de tromperie intentionnelle dont l’accuse l’Australie ? Pourquoi se donner autant de

peine à créer un programme frauduleux de recherche pseudo-scientifique pendant trente ans,

comme le prétend l’Australie ? Il est vrai que la confiance du Japon a sans cesse été trahie, puisque

le moratoire est devenu une interdiction permanente en dépit des assurances qui avaient été

données en sens contraire, puisque le RMS a fait suite à la RMP, et ce pour ne donner lieu qu’à des

débats sans fin. Il est vrai que la proposition de décision consensuelle a été sabotée à la dernière

minute par une politique consistant à ne faire «aucune concession» ; il est vrai que la politisation de

la science a, plus que jamais, amené la CBI au bord de l’implosion. Alors pourquoi, pourrait-on se

demander, pourquoi le Japon est-il demeuré à la CBI et s’est-il soumis au harcèlement, à - 24 -

l’intolérance, aux insultes, et même à la violence, pendant si longtemps ? Pourquoi comparait-il

aujourd’hui devant la Cour pour répondre à des accusations de mauvaise foi dépourvues de tout

fondement ?

44. La réponse est simple. Le Japon est demeuré à la CBI, malgré ce comportement

insultant, parce qu’il est véritablement attaché au multilatéralisme, parce qu’il est, contre vents et

marrées, attaché à la négociation, aux concessions, à la suprématie du droit international, et au

règlement pacifique des différends. Et l’Australie a saisi la Cour pour profiter de cet attachement ;

pour dresser, de façon injuste et déraisonnable, le portrait d’un Japon qui serait un Etat voyou à la

CBI ; pour porter des accusations de mauvaise foi contre un Etat qu’elle juge inoffensif et dont elle

pense qu’elle peut le maltraiter en toute impunité ; pour se draper dans le manteau du défenseur de

l’état de droit à l’échelle internationale, alors même que son Attorney-General a fait clairement

savoir que l’Australie continuerait de harceler le Japon et de s’opposer à lui si la Cour ne prenait

pas la décision que l’Australie entendait qu’elle prenne.

45. Monsieur le président, Mesdames et Messieurs de la Cour, voilà qui vient clore mon

exposé. Je remercie la Cour pour son aimable patience et son indulgence. Cela a été pour moi un

grand honneur et un privilège de me présenter devant vous au nom du Japon dans la présente

procédure. Je vous saurais gré de bien vouloir appeler maintenant à la barre M. Pellet.

Le PRESIDENT : Merci, Monsieur. I now call on Professor Pellet. Mr. Pellet, you have the

floor.

Mr. PELLET: Thank you, Mr. President.

THE JURISDICTION OF THE C OURT GENERAL REMARKS
ON THE 1946 CONVENTION

1. Mr. President, Members of the Court, Professor Akhavan has already put this case into

context, so it falls to me this morning to reply first to the objections weakly maintained by

Australia against Japan’s plea that the Court has no jurisdiction to hear this ca plea which

33 Japan, for its part, strongly maintains (I).I shall then quickly review the structure of the

1946 Convention (II) and the position within it of Article VIII. - 25 -

I. The Court’s lack of jurisdiction

2. Members of the Court, it is always somewhat embarrassing to have to explain in an

address to this Court that it has no jurisdiction. But that is our position and if Japan raises this

objection, it is obviously not out of distrust of the Court, but because it considers that, given its

technically very delicate nature, the case brought before you by Australia does not lend itself to a

settlement by this Court.

3. Our objection to jurisdiction is based on reservation (b) contained in Australia’s

declaration under Article 36, paragraph 2, of the Statute and which must be applied on the basis of

the reciprocity that informs the entire optional clause system.

[Slide 1: The second Australian reservation]

4. In his introductory address, the Attorney-General of Australia summarized the Applicant’s

argument in the following terms: “the reservation only operates in relation to disputes between

Australia and another country with a maritime claim that overlaps with that of Australia that is,

a situation of delimitation. Australia has no delimitation with Japan and hence the paragraph (b)

reservation can have no operation” . And this was indeed practically the only argument developed

by Mr. Burmester in his statement in favour of the Court’s jurisdiction, despite the terms of the

reservation and the explanations given at the time by the Australian authorities with regard to its

scope. However, before applying myself to the task of rebutting this argument, I wish to make two

preliminary remarks on points that my opponent raised only in passing: the scope ratione loci of

the Australian reservation and the definition of the term “exploitation”.

5. Mr. President, as I indicated on 2 July, the French translation of the Australian declaration

is abysmal 78 so much so that, with apologies to the heroic defenders of francophonie, I shall

34 base myself exclusively on the English text while leaving the translation on screen in case there

are among the judges or in the public any Francophiles fanatical enough to try to make sense of it.

6. In the original English-language version, therefore, Australia excludes from the

jurisdiction of the Court cases concerning certain matters (although this is not what is of immediate

interest to us) concerning “ . . . any disputed area of or adjacent to any such maritime zone”.

77
CR 2013/18, p. 18, para. 15 (Dreyfus).
7CR 2013/12, p. 27, para. 9 (Pellet). - 26 -

79
Mr. Burmester notes that JARPA II “extends well outside any waters claimed by Australia” . It is

true that there is no precise correspondence between the disputed scientific research programme

and the areas of the Southern Ocean claimed by Australia, whose title to which is disputed by

Japan; however:

[End of slide 1 Slide 2: Figure 3: Crimes at Sea Act Cooperative Scheme Adjacent Areas

(Illustrative Map available at http://www.comlaw.gov.au/Details/C2012C00054/Html/Text

#_Toc316906735)]

the reservation expressly refers not only to the waters that are the subject of a dispute, but also

to those that are adjacent thereto, and

Australia takes a particularly broad view of the meaning of adjacency, as is shown by one

example among others, namely the map now on the screen which is reproduced at tab 8-2 of

your folders illustrating the Australian Crimes at Sea Act of 2000; this sketch, which is

appended to the Act, is eloquent: the “adjacent areas” that it describes extend well beyond

200 nautical miles from the coasts of the States of the Commonwealth of Australia well

beyond.

[End of slide 2 Slide 1bis: Repeat of slide 1]

7. In order to be excluded from the Court’s jurisdiction, the dispute must relate to a

particularly activity being conducted in a disputed maritime area or an adjacent area: it must

involve the exploitation of such areas. Mr. Burmester explained that “a dispute arising out of,

concerning, or relating to the exploitation of any disputed area . . . ordinarily requires competing

claims by the relevant States to a right to exploit the relevant resources” . Subject to a few words

35 which I omitted from my citation, but to which I shall return, I have no quarrel with that. But it is

what follows that I find stupefying: how can Henry Burmester assert that there is no dispute in this

case concerning the exploitation of the areas in question, while expressly recognizing, in the same

breath, that “only Japan wishes such exploitation”. Ah yes, Japan wishes to engage in a certain

79
CR 2013/18, p. 27, para. 18 (Burmester).
80Ibid., para. 17 (Burmester). - 27 -

81
form of exploitation and Australia disputes its right to do so I hardly see how that can be

anything other than a dispute “arising out of, concerning, or relating to the exploitation . . .”!

8. Consequently, my opponent focuses his attacks or pins all his hopes on the last three

words of reservation (b): “pending its delimitation” but instead of confining his attention to this

82
expression which, whatever he may say , clearly describes a moment, he transforms this

expression into another one, and here one finds the words that I omitted from my previous citation:

“in a delimitation context” or “in a delimitation situation” . But these are not the words chosen

by Australia to express its reservation: it used a temporal formula: “pending delimitation”

“pending”: what is meant is certainly something temporary; once this condition is fulfilled, the

reservation no longer applies. There is nothing untoward about this and, in any case, that is how

Australia chose to word its reservation.

9. However, my opponent and friend says in substance: “Australia and Japan have no

dispute involving a delimitation”. A few quick remarks on this point, Mr. President.

10. Throughout his presentation, Mr. Burmester recognized (leaving aside the applicability

of the Australian reservation) that the situations it covered were those arising from competing

claims to the same maritime areas:

paragraph 16 of his statement: “the reservation only applies to exploitation disputes between

Australia and another State with an overlapping claim with Australia”;

paragraph 1: “this is not a dispute about overlapping claims to sovereign rights”;

paragraph 15: “Reservation (b) remains, however, a reservation directed at disputes about
36

maritime boundaries or exploitation issues arising between Australia and another State with

overlapping claims . . .”;

paragraph 9: “The fundamental difference not addressed by Professor Pellet is that Australia

and Timor-Leste are in a delimitation situation with each other there are overlapping

claims. That is not the case with Japan.”

81
See CR 2013/12, pp. 35-39, paras. 23-33 (Pellet).
8CR 2013/18, p. 26, para. 14 (Burmester).

8Ibid., p. 27, para. 17 (Burmester).
84
Ibid., pp. 22-23, paras. 4 and 5 (Burmester). - 28 -

11. With all due respect, this is totally incorrect: Australia and Japan have competing claims

to a maritime zone adjoining the so-called Australian Antarctic Territory. The situation is summed

up clearly in a recital of the judgment delivered on 15 January 2008 by the Federal Court of

Australia in a case concerning a Japanese company accused of having trespassed in connection

with the JARPA programme on the “Australian Whale Sanctuary” established pursuant to the

Environment Protection and Biodiversity Conservation Act 1999 (EPBC Act):

“Australia’s claim to sovereignty over Australian Antarctic Territory is
recognised only by four nations (New Zealand, France, Norway and the United
Kingdom), themselves with asserted (and otherwise disputed) claims over various
parts of the Antarctic land mass. Japan rejects Australia’s purported exercise of
jurisdiction over waters that are considered by Japan to be the high seas.” 85

In that case, Mr. President, there are indeed “overlapping [maritime] claims” the very ones

which, according to my opponent’s argument, are covered by the Australian reservation. And it

would be a highly artificial contrivance to exclude them from the scope of the reservation on the

pretext that, in the area in question, Japan does not claim sovereign rights for itself but disputes the

rights claimed by Australia. What Japan disputes is the outer limit a delimitation, therefore

of the exclusive economic zone which Australia has assigned to itself. And just as according to

Mr. Burmester, “[w]ith respect to Timor-Leste and Australia, the two States have reached no final

delimitation agreement and have instead agreed to freeze their respective claims for 50 years”, in

the same way here, Australia and Japan have not settled the dispute arising from their competing

claims with regard to the waters adjoining the Antarctic, but the two countries nevertheless agreed,

37 by ratifying the Antarctic Treaty of 1 December 1959, to freeze, in their case also, their territorial

claims ; nevertheless, their dispute remains in existence.

[End of slide 1bis Slide 3: National Interest Analysis, Australian Declaration under paragraph 2

of Article 36 of the Statute of the International Court of Justice 1945 (paras. 12 and 17, omitting

subparas. (a) and (c)), available at: http://www.austlii.edu.au/au/other/dfat/ATNIA/2002/20.html.]

12. It was, moreover, in this very way that the Australian Government explained its

reservation in a note to Parliament drafted at the time when the declaration was deposited by the

85
Humane Society International Incorporated v. Kyodo Senpaku Kaisha Ltd, [2008] FCA 3, 15 Jan. 2008,
para. 13; CMJ, Ann. 177.
86Art. IV, para. 1. - 29 -

Attorney-General’s Department. This explanation, given twice in identical terms in this official

document, reads as follows:

“The new declaration limits Australia’s acceptance of the compulsory
jurisdiction of the ICJ. This means that an action cannot be commenced against

Australia in the following circumstances:

. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .

(b) where disputes involve maritime boundary delimitation or disputes concerning the
exploitation of an area in dispute or adjacent to an area in dispute.”87

13. The Australian Government cannot be suspected of having deceived its own Parliament

about the scope of its optional declaration, by providing it with an erroneous interpretation of that

declaration. Its interpretation coincides with the one which Japan asks you to accept today,

Members of the Court. And it inevitably entails a lack of jurisdiction on the part of the Court, as it

removes from your jurisdiction “disputes involving maritime delimitations or disputes concerning

the exploitation of an area in dispute or adjacent to an area in dispute”. The dispute brought before

the Court by Australia obviously concerns the exploitation of a maritime area in dispute or adjacent

to an area in dispute. Consequently, it falls outside your jurisdiction.

[End of slide 3]

38 14. Like many States that accept the optional clause, Australia attempted a sleight of hand by

accepting it in principle but excluding from it disputes concerning which it might actually be

brought before the Court. It must now suffer the consequences of its . . . “artful ruses”.

Mr. President, I shall now go on to an entirely different subject, and I wonder . . .

The PRESIDENT: Yes, this is a good moment for a 15-minute break. L’audience est

suspendue pendant 15 minutes.

L’audience est suspendue de 11 h 20 à 11 h 40.

The PRESIDENT: Please be seated. Professor Pellet, you have the floor.

87National Interest Analysis, Australian Declaration under Paragraph 2 of Article 36 of the Statute of the
International Court of Justice 1945, lodged at New York on 22 March 2002, tabled in the Australian Parliament
18 June 2002, available at http://www.austlii.edu.au/au/other/dfat/ATNIA/2002/20.html. - 30 -

Mr. PELLET:

II. The structure of the Convention

15. Mr. President, before you ordered the break, I showed that the Court lacked jurisdiction

on account of reservation (b) in Australia’s declaration of acceptance of the compulsory

jurisdiction of the Court, which Japan is able to rely on under the principle of reciprocity.

Consequently, everything that Japan’s counsel will say from now on must be understood as being

argued in the alternative, solely to cover the eventuality of the Court dismissing our objection to

jurisdiction. That applies to the presentation which I shall now make on the general structure of the

Convention of 2 December 1946 for the Regulation (not the abolition . . .) of Whaling, of which our

friends from Australia (and from New Zealand — but their arguments are the same) give a highly

misleading description.

16. This requires us to return, on the one hand, to the object and purpose of the

Convention (A) and, on the other, to the way in which all the Parties — a term in which I include

New Zealand — are in agreement that Article VIII is the key to the present case (B).

A. The object and purpose of the Convention

17. Mr. President, I am perfectly ready to admit that treaties are not forever carved in stone

and that they must, in so far as their text allows, be interpreted according to the context in which

88
39 they apply and its evolution. But interpretation is not revision , and one cannot, under the guise of

interpretation, turn a treaty for the regulation of whaling into a treaty prohibiting it; nor a treaty

provision expressly authorizing States to make an activity subject to such conditions as “[they]

think fit” into an obligation to submit to prior authorization.

[Slide 4: Article V, paragraph 2, of the Convention for the Regulation of Whaling]

18. And all the more so in the present case, since the drafters of the Convention made

specific provision for a mechanism enabling it to be adapted in a relatively flexible way to

developments in the areas covered by the Schedule to the Convention. However, such amendments

are expressly limited to the matters listed in Article V, paragraph 1, and must respect the conditions

8See CR 2013/13, pp. 68-69, paras. 25-26, and CR 2013/14, p. 73, para. 73 (Pellet). - 31 -

set forth in paragraph 2 of that provision — a provision which it is perhaps worth returning to for 89

a few moments:

point (b) requires that the Commission’s actions “shall be based on scientific findings” — shall

be based on, Mr. President, not merely “shall take account of” or “shall take into

consideration” — I stress this in passing, even though it is not directly linked to the subject of

this presentation, because the least that can be said is that, in numerous decisions concerning

the subject-matter of our case, the IWC has not cared a fig for scientific data;

point (d) invites the Commission to “take into consideration”, this time, “the interests of the

consumers of whale products and the whaling industry”; this is a far cry from the interests of

the whale “in itself” ;

and this is overwhelmingly confirmed by point (a), which states that amendments to the

Schedule “shall be such as are necessary to carry out the objectives and purposes of this

Convention and to provide for the conservation, development, and optimum utilization of the

whale resources”.

40 19. We agree, I think, on the conservation; perhaps on the development — although

Australia scarcely uses the term, which is important in order to understand the very philosophy on

which the Convention is based; on the other hand, there can be no question of “optimum

91 92
utilization” for Australia or New Zealand , which show complete disdain for the interests of

consumers and the whaling industry, despite the fact that these are expressly safeguarded by the

Convention and defined as being among its purposes, in particular in Article V.

[End of slide 4]

20. This seems to me, Mr. President, to be the right moment to reply to one of the questions

put by Judge Cançado Trindade: “How do you interpret the terms ‘conservation and development’

93
of whale stocks under the International Convention for the Regulation of Whaling?” . We took

89
See also CR 2013/13, p. 39, para. 3, and p. 42, para. 11 (Boyle).
90See CR 2013/18, pp. 34-35, paras. 23-25, and p. 36, para. 29 (Boisson de Chazournes).

91See CR 2013/18, p. 35, para. 26 (Boisson de Chazournes).
92
See the written response of New Zealand dated 12 July 2013 to the question of Judge Cançado Trindade,
paras. 5 and 6.
93
CR 2013/17, p. 49. - 32 -

94
note of Australia’s reply given by Professor Boisson de Chazournes ; however, it seems to me

that reducing the conservation and development of whale stocks to whale watching is a little

inadequate . . . And it calls for a number of remarks:

(1) it is not a question of conserving “whales per se” (as we have pointed out on numerous
95
occasions, the 1946 Convention is not a treaty concerned purely with preservation ), but of

conserving “whale stocks”;

(2) that conservation being assured — since it is clearly a prerequisite — it is necessary to

“manage”, i.e., to avoid any exploitation of stocks of species which are genuinely endangered

and any over-exploitation of those species, such as minke whales, which are not endangered;

(3) in other words, as indicated very clearly in the preamble, it is a question of “protect[ing] all

species of whales” from “overfishing of one area after another and of one species of whale after

another”, so as to permit “increases in the numbers of whales which may be captured without

endangering these natural resources”; and

41 (4) this clearly demonstrates that the conservation of whales — as important and indisputable as

that objective is — is not an end in itself; ultimately, it is a question of “achiev[ing] the

optimum level of whale stocks as rapidly as possible”, and “thus mak[ing] possible the orderly

development of the whaling industry”.

21. Moreover, while it is true to say that the lack of concern which characterized the 1960s

and 1970s led the IWC to adopt “conservationist” measures, such as the introduction of the

moratorium and the sanctuaries, these are provisional measures to be lifted as soon as, on the basis

of “scientific findings” (which the Commission makes every effort not to take into account), the

conditions for sustainable commercial whaling have been met. However, there has never been any

question of abandoning the — statutory — objective of such whaling, nor of prohibiting scientific

whaling under Article VIII. Or rather, yes, there has been some question of it, because Australia

and New Zealand have presented proposals to that end, but recognizing that this could be achieved

94See CR 2013/18, p. 37, para. 31 (Boisson de Chazournes).

95See CR 2013/13, pp. 48-59, paras. 30-63 (Boyle). - 33 -

only by means of a formal protocol of amendment to the Convention, which would have to be

ratified by all the States parties ; those proposals have not been taken further.

22. At the hearing of 8 July, New Zealand rehearsed the argument which it seeks to base on

the fact that the Convention is open to all: “Membership of the Commission is universal. It is open

97
for all countries to join, whether they have a whaling industry or not” . In actual fact, I fail to see

what difference that might make to the case: at the outset, the Convention was negotiated and

ratified by a small number of whaling States. Those States drafted the Convention according to

their interests and concerns. Subsequently, other States have acceded to the Convention in

accordance with Article X, thus expressing their interest in the treaty as it then was, and its object

and purpose, as defined therein. But why should their arrival have modified that object and

purpose? New Zealand has got it the wrong way around.

23. In replying to the question put to it by Judge Bhandari , Australia asserted that all States

parties have a common interest in ensuring the integrity of the objectives and the régime

42 99
established by the Convention . That is true, and it means that all States parties — whether

“whalers” or not, whether original IWC members or not — are bound by the Convention as it was,

and remains, intended — and not as they would like it to be. In other words, everyone must accept

that the institutional mechanism established by the Convention operates in order to achieve the

objectives set out therein: namely, the conservation and management of stocks of the different

whale species, so as to make possible “the orderly development of the whaling industry”.

100
24. Taking up the key idea contained in its written observations , New Zealand set about

circumventing this ticklish problem (as far as it is concerned) of the object and purpose of the

Convention. Rather than addressing the substantive aim of the latter, New Zealand focuses on its

procedural aspects: “the object and purpose of the Convention . . . is to establish a system of

101
collective regulation for the conservation and management of whales” ; or even more explicitly:

96
CR 2013/14, pp. 71-73, paras. 67-73 (Pellet).
97CR 2013/17, p. 19, para. 16 (Finlayson); see also WON, paras. 27 and 32, and WOJ, paras. 21-22.

98CR 2013/13, p. 73.
99
See CR 2013/18, pp.33-34, paras. 17-20 (Boisson de Chazournes).
100
See WON, paras. 6, 7, 14-32.
101CR 2013/17, p. 17, para. 3 (a) (Finlayson); see also p. 16, para. 9 (Ridings), and p. 17, para. 5 (Finlayson). - 34 -

“The purpose of the Convention was to provide a system through which those

individual interests could be managed and resolved in the light of the greater shared
interest of the parties in the long-term future of whale stocks. That shared interest
would be achieved not through unilateral action, but by a comprehensive system of
collective regulation.” 102

25. This analysis is questionable in certain respects and objectively wrong in others.

26. It is questionable because it confuses the means with the end. It is true that the

Convention creates a mechanism for the partial regulation of whaling activities (and in French the

word “régulation” is certainly more appropriate than “réglementation”), but that is not the end

pursued by the drafters of the Convention; it is a means to achieve the object and purpose of the

latter, as defined in the preamble and recalled in Article V, paragraph 2, which we have just seen

projected, and in Article VI.

27. In a question addressed to New Zealand, Judge Cançado Trindade asked whether “to

replace unregulated, unilateral whaling by States with collective regulation as a mechanism to

43 provide for the interests of the parties in the proper conservation and management of whales”, as

New Zealand had stated in its Written Observations , is “a widely accepted interpretation

nowadays of the object and purpose of the International Convention for the Regulation of

Whaling?” 104 In its letter to the Registrar of 12 July, the intervening State gave a cautious answer

to this question, which I see no point in commenting on in detail. But I hope that the author of the

question, which he did not address to us, will forgive me for supplementing New Zealand’s reply

by citing a passage from the proposed consensus decision put forward by the Chair and Vice-Chair

of the Commission, which, as we know, was torpedoed by Australia in 2010:

“Reconciliation of differences in views about whales and whaling will strengthen
actions related to the common goal of maintaining healthy whale populations and
maximising the likelihood of the recovery of the depleted populations.” 105

Furthermore, and perhaps this is even more significant, in Resolution 2006-1, the important

St. Kitts and Nevis Declaration, the Commission stated that it was its understanding

10CR 2013/17, p. 18, para. 13 (Finlayson).

10WON, p. 16, para. 33.
104
CR 2013/17, pp. 49-50.
10See Proposed Consensus Decision to Improve the Conservation of Whales from the Chair and Vice-Chair of
the Commission, Ann. E, Chair’s Report of the 62nd Annual Meeting, Annual Report of the International Whaling
Commission 2010, submitted to the Commission 22 April 2010 (emphasis added), available at:

http://iwc.int/index.php?cID=1740&cType=document (CMJ, Ann. 118). - 35 -

“that the purpose of the 1946 International Convention for the Regulation of Whaling
(ICRW) is to ‘provide for the proper conservation of whale stocks and thus make

possible the orderly development of the whaling industry’ (quoted from the Preamble
to the Convention) and that the International Whaling Commission (IWC) is therefore
about managing whaling to ensure whale stocks are not over-harvested rather than

protecting all whales irrespective of their abundance”,

and the Commission noted it is a resolution of the Commission

“that the position of some members that are opposed to the resumption of commercial

whaling on a sustainable basis irrespective of the status of whale stocks is contrary to
the object and purpose of the International Convention for the Regulation of
Whaling” .106

To my knowledge, Mr. President, these represent the Commission’s most recent and

authoritative statements on what actually constitutes the object and purpose of the Convention.

44 28. And it seems to me that this is not unrelated to one of the questions again put by Judge

Cançado Trindade to New Zealand: “Does the fact that the International Convention for the

Regulation of Whaling is a multilateral treaty, with a supervisory organ of its own, have an impact

107
on the interpretation of its object and purpose?” . In its reply, annexed to its letter to the Registrar

dated 12 July, the Agent of New Zealand merely returned to that country’s refrain that the

conservation of whales (the management of stocks is referred to only at the very end of the reply

and somewhat reluctantly) is a “collective enterprise”; that is true — within the limits I have

described — but that hardly takes us forward and does not really answer the question. However, I

think it deserves more attention. Although this question was not addressed to us either, allow me to

highlight the following points:

108
1. unlike other constituent instruments of international organizations , the 1946 Convention

makes no express provision for a mechanism to deal with disputes as to its interpretation;

2. the Court is nonetheless surely not prevented from exercising in regard to the Convention, “a

multilateral treaty, an interpretative function which falls within the normal exercise of its

judicial powers” ;109

106
IWC, Resolution 2006-1, St. Kitts and Nevis Declaration. See also CR 2013/16, pp. 59-60, para. 55 (Pellet).
10CR 2013/17, p. 49.
108
See, for example, Art. IX of the IBRD Statute, Art. XXIX of the IMF Statute, Art.75 of the WHO
Constitution, Art. 286 of the United Nations Convention on the Law of the Sea and Art. IX, para. 2, of the Marrakesh
Agreement of 15 April 1994 establishing the WTO.
109
Conditions of Admission of a State to Membership in the United Nations (Article 4 of the Charter), Advisory
Opinion, 1948, I.C.J. Reports 1947-48, p. 61. - 36 -

3. in the exercise of this interpretative function, the Court may legitimately take account of

interpretations given by the organs of the organization, including when those organs expressly

define the object and purpose of the organization, as is the case in the examples I have just

provided;

4. in so doing, this Court must take full account of the circumstances in which those

interpretations were given — and on this point let me refer to my pleading in the first round, in

which I set out the precautions to be applied in establishing whether an interpretative practice

exists — a fortiori a modificatory one . 110

45 29. Furthermore, Mr. President, as regards the actual definition of the collective regulatory

power enjoyed by the IWC, New Zealand’s analysis is inaccurate:

it is not true to say that States have conferred on the IWC a generalized power of decision on

whaling matters; contrary to what New Zealand and Australia would have us believe, the

Commission is not a supranational organization for integration able to impose majority (or

even unanimous) decisions on the “Contracting Governments” — a term which speaks for

itself;

the Attorney-General of New Zealand stated that “[a]ll decisions of the Commission are taken

collectively by a vote of its members. And the regulations so adopted are binding on members

111
of the Commission” ; with all due respect, this is patently not the case: except under

Article V, the IWC can only adopt recommendations which are not binding on States ; and 112

even when it can take decisions, in the true sense of the word, under Article V of the

Convention, the Contracting Governments are still free to object, without having to give a

reason;

and last but not least, it is not correct that the Convention has promoted a “comprehensive

113
system of collective regulation” .

110
CR 2013/14, pp. 64-65, paras. 50-53 (Pellet).
11CR 2013/17, p. 19, para. 16 (Finlayson).
112
See CR 2013/14, pp. 60-70, paras. 38-66 (Pellet).
113
CR 2013/17, p. 18, para. 13 (Finlayson). - 37 -

30. In fact, the Convention system allows areas to remain in which States continue to make

wide use of their discretionary power. Such is the case with the opting-out procedure in Article V,

which I have just referred to, the right of free withdrawal expressly envisaged in Article XI, and of

course with Article VIII on special permits. I thus come to the presentation of the structure of the

Convention and the place of that now famous provision in it.

B. The structure of the Convention and the role of Article VIII

31. Mr. President, in the exercise of their sovereignty, States may enter into engagements by

means of treaties: but that is a “right” 114and except in very particular circumstances, which are

46 not relevant here certainly not an obligation. Moreover, when regulating a particular matter by

treaty, the States parties may exclude specific aspects of the matter concerned from those

conventional provisions, either by including a special clause in the treaty in question, or even by

adopting a unilateral act, in other words a reservation, on the subject of which I shall refrain from

giving a lecture.

32. Here, there is no reservation in the technical sense of the term. On the contrary, by

including Article VIII in the 1946 Convention, the States parties intended to reserve for themselves

the right to grant or decline to grant special permits, a right that entails, by definition, the

authorization to “kill, take and treat whales” which “shall be exempt from the operation of this

Convention”. They also allowed participating Governments to make that authorization subject to

“restrictions as to number” and “such other conditions as the Contracting Government thinks fit”;

and all of that “[n]otwithstanding anything contained” in the Convention. Mr. President, try as they

might, and despite all their talent, science and imagination, our opponents can change none of that:

it would be a strange interpretation that had a treaty say exactly the opposite of what it says 115 in

this instance, that the special permits may only be granted in accordance with not just the other

provisions of the Convention (whose application is twice ruled out by Article VIII) but also the

non-binding recommendations adopted by the organs of the Convention, which would imply that

11S.S. “Wimbledon”, Judgments, 1923, P.C.I.J. Series A, No. 1, p. 25.

11Ibid. (Translator’s note: this is a literal translation of the French text from the Judgment (“[c]e serait une
singulière interprétation que de faire dire à un traité exactement le contraire de ce qu’il dit”); in the corresponding
English text, the point is expressed in a completely different way.) - 38 -

those organs have the power to authorize or disallow such permits. Mr. President, that is quite

simply absurd.

33. It is true that “Article VIII forms an integral part of the Convention” and must, indeed,

116
“be interpreted and applied consistently with the Convention’s other provisions” consistently

with how that Article itself relates to the Convention, which is to say as an exception or

“exemption” the word “exempt” specifically appears in the English version, which is the only

authoritative one.

47 34. Mr. Finlayson dwelt on Article VIII, paragraphs 3 and 4, and paragraph 30 of the

Schedule, in order to justify his analysis of the “integral role of Article VIII within the

Convention”. However, those provisions are exceptions, leges speciales, within the general system

of derogation that applies to the issuing of special permits, whether it be the obligation on the

Contracting Governments to report the special permits and all the “scientific information available

to that Government with respect to whales and whaling” to the Scientific Committee, or the

obligation to engage in the “continuous collection and analysis of biological data in connection

with the operations of factory ships and land stations”. All of this must be done because it is laid

down in the Convention; in every other respect, Article VIII is exempt from the provisions of the

Convention because . . . the Convention so provides.

35. Obviously, Japan must act in accordance with the special obligations contained in
117
Article VIII and in paragraph 30 of the Schedule (to which Ms Takashiba will be returning in a

few moments). And it must also perform its obligations, in connection with the Convention, under

general international law, starting with the obligation to comply in good faith with the Convention

itself pacta sunt servanda. But it is precisely because Japan like the other Parties, including

Australia and New Zealand is bound to respect the Convention, such as it accepted it (and

nothing more), that other conventional obligations cannot be imposed on it by being imported into

Article VIII when they do not appear there and even worse when they are, on the contrary,

expressly excluded from it . Australia and New Zealand are well aware of this, so much so that

116
CR 2013/17, pp. 21-23, paras. 22-27 (Finlayson).
11See CR 2013/17, pp. 23-24, para. 29 (Finlayson).

11See CR 2013/15, pp. 15-16, paras. 6-14 (Lowe). - 39 -

they are constantly seeking to modify or repeal the special provision represented by Article VIII ; 119

were they to succeed, it is true that there would be no more special permits and the rules that apply

to whaling would be standardized. But I repeat: they have not succeeded.

48 36. That is not to say, Mr. President, that Japan is claiming a “carte blanche”, as the

120
Solicitor-General of New Zealand would have you believe , or a purely arbitrary freedom of

discretion, as Professor Crawford asserted in his caricature of what he kindly termed the “Pellet

121
void” and the “Lowe vacuity” . What we are saying, much more simply and reasonably, is that

when the particular provisions of the Convention essentially do not apply to the issuing and

implementation of special permits, we are governed only by the general rules of public

international law, which accord to sovereign States very broad powers to analyse the situations in

which they find themselves, and to act accordingly. Professor Lowe will be returning to that

fundamental point this afternoon.

37. For my part, I would like to conclude by giving our reply to a question put by

Judge Gaja who will forgive me, I am sure, if I do so in French, a language in which he is just as

comfortable as that of Oxbridge. Nonetheless, I shall read the question in English: “If a whaling

programme is both for purposes of scientific research and for commercial purposes, what are the

122
applicable rules according to the ICRW?”

38. Mr. President, the Court seems to have relaxed its practice considerably with regard to

judges’ questions but not yet to the point of allowing counsel to enter into a dialogue with them.

Had that been so, I would have ventured to ask Judge Gaja what he means by a programme which

is for both scientific and commercial purposes. Since I cannot do so, I shall imagine several

hypotheses (prompted, I do not deny, by the case at hand).

First scenario: the programme is scientific in terms of its objective and its research methods,

but has recourse to “commercial” procedures for funding purposes; that is a very common way

119
See CR 2013/17, p. 22, para. 25 (Finlayson); see also CR 2013/14, pp. 71-73, paras. 67-73 (Pellet).
12CR 2013/17, p. 21, para. 24 (Finlayson).

12CR 2013/19, p. 57, paras. 2-4 (Crawford).
122
CR 2013/16, p. 63. - 40 -

123
of funding research, as Professor Walløe noted in his written statement , for example; it does

49 not modify the actual objective of the research, which is and remains scientific; the applicable

rules are solely those of Article VIII on that point I am delighted to agree with Australia’s

124
position, as expressed by Professor Crawford in reply to Judge Gaja’s question .

Second hypothesis, which is probably more in line with the judge’s question: a research

programme including special permits receives data collected partly from commercial whaling

operations, as was the case for the scientific programmes before the adoption of the

moratorium, and as remains or may remain the case in those countries which are not

bound by it; the answer is the same: the objective remains scientific if the information thus

acquired is processed using scientific methods; Article VIII must be applied.

It is a different matter when commercial hunts are scheduled using scientific information: in

that case, the objective is assumed to be commercial; science merely facilitates its

achievement; the applicable law is that of the Convention’s provisions on commercial

whaling.

Fourth and final scenario which is in fact our own situation: a programme of scientific

research has a long-term commercial aim, in this case the sustainable resumption of

commercial whaling; there is no doubt, in my view, that the programme remains a scientific

one to reason otherwise would be to deny the scientific nature of any applied research;

Article VIII applies.

It seems to me that a general rule can be stated: as long as research is the principal and immediate

objective the driver of the operation and the commercial and economic dimension remains
125
“incidental” (the term used by James Crawford ) or a long-term aim, the rules of Article VIII

must be applied, and to the exclusion of all others (subject, of course, to the general principles of

international law).

39. And that brings me to one final comment, Mr. President: neither Australia nor New

Zealand has explained how they reconcile the assertion that Article VIII is subject to the rules

123
Lars Walløe, Scientific review of issues raised by the Memorial of Australia including its two Appendices,
9 April 2013, p. 9.
12CR 2013/20, p. 26, para. 66, and p. 27, para. 71 (Crawford); contra: CR 2013/17, p. 19, para. 16 (Finlayson).

12CR 2013/20, p. 26, para. 67, and p. 27, para. 71 (Crawford). - 41 -

established by the IWC (the various amendments to the Schedule, in particular paragraph 30, the

50 violation of which is invoked by these two States) with the proposition that the Convention

establishes three types of whaling, and only three: commercial whaling, aboriginal subsistence

whaling, and whaling for scientific purposes, to which specific rules apply . Either Australia and

New Zealand succeed in establishing that JARPA II is, in reality, whaling for commercial

purposes, and consequently the rules on special permits do not apply; or it is a programme for

scientific purposes and, conversely, only those rules apply. However, in its final submissions read

out at the hearing, Australia haphazardly invokes the violation of the rules on commercial whaling

and those on scientific whaling. Japan cannot be held responsible for both. I shall return to that

point briefly tomorrow in the final pleading that I shall have the honour to present (in this case, at

least).

Members of the Court, thank you for your attention. Mr. President, would you be so kind as

to give the floor to Ms Takashiba?

The PRESIDENT: Thank you, Professor Pellet. I give the floor to Ms Takashiba. You have

the floor, Madam.

Mme TAKASHIBA : Je vous remercie Monsieur le président.

L EJ APON A PLEINEMENT HONORÉ SES OBLIGATIONS PROCÉDURALES
ET SON DEVOIR DE COOPÉRATION

1. Monsieur le président, Mesdames et Messieurs de la Cour, en complément de l’exposé de

M. Pellet sur le cadre établi par la convention, il m’incombe de démontrer que le Japon a

pleinement honoré ses obligations procédurales relatives à la délivrance des permis spéciaux et son

devoir de coopération.

I. Le règlement, un instrument à caractère obligatoire

A. Le paragraphe 30 du règlement

2. Outre qu’elle demande à la Cour de conclure que JARPA II n’est pas un programme au

sens de l’article VIII de la convention, l’Australie prie la Cour de dire et juger que le Japon a

12CR 2013/17, p. 19, para. 16 (Finlayson), and Australia, CR 2013/11, p. 15, para. 46 (Crawford). - 42 -

51 enfreint les paragraphes suivants du règlement : l’alinéa e) du paragraphe 10, qui impose un

moratoire de la chasse commerciale ; l’alinéa b) du paragraphe 7, qui interdit la chasse

commerciale au rorqual commun dans le sanctuaire de l’océan Austral ; l’alinéa d) du

paragraphe 10, qui applique un moratoire à la capture, à l’abattage et au traitement des baleines, à

l’exception des petits rorquals, pratiqués par des usines flottantes ; et le paragraphe 30 relatif aux
127
obligations procédurales applicables à la chasse à la baleine soumise à un permis spécial . Je

commencerai par formuler deux remarques préliminaires.

3. Premièrement, l’allégation de l’Australie selon laquelle le Japon a enfreint le

paragraphe 30 est une affirmation controuvée, un argument bien commode, fabriqué uniquement

pour les besoins de la cause. D’ailleurs, avant de saisir la Cour, jamais l’Australie n’avait reproché

au Japon d’agir en violation du paragraphe 30. Ni le comité scientifique ni aucun autre Etat

contractant n’ont jamais critiqué le Japon à ce sujet. Il est pour le moins étrange que cette
128
allégation — brièvement mentionnée dans le mémoire — apparaisse pour la première fois, à ce

stade tardif de la procédure orale, dans les conclusions finales de l’Australie. Il est également

intéressant de relever que l’Australie n’a commencé à accorder une réelle importance au

paragraphe 30 qu’après le dépôt par la Nouvelle-Zélande de ses observations écrites, dans

lesquelles ce paragraphe est mentionné 26 fois.

4. Deuxièmement, cet ajout factice dessert la cause de l’Australie. En présentant

cumulativement ces violations présumées des quatre paragraphes, l’Australie révèle l’incohérence

de son argumentation. En fait, le seul article du règlement qui concerne la chasse relevant d’un

permis spécial au titre de l’article VIII est le paragraphe 30 adopté par la CBI en 1979. A supposer,

pour les besoins de la démonstration, que la thèse de l’Australie se défende, il peut s’agir soit d’une

violation des paragraphes 10 e), 7 b) et 10 d) qui interdisent la chasse commerciale à la baleine — à

l’exception des petits rorquals —, soit d’une violation du paragraphe 30 dont relève la chasse à la

baleine soumise à un permis spécial. La logique interdit de dire qu’un Etat a enfreint

cumulativement les quatre paragraphes.

127
CR 2013/20, p. 47 (Campbell).
128MA, par. 5.127. - 43 -

5. En tout état de cause, puisque l’Australie prétend que le Japon a violé le paragraphe 30, je

vais à présent m’employer à dissiper tous les doutes qu’elle a tenté de créer dans vos esprits.

52 B. Le Japon a pleinement respecté le paragraphe 30 lorsqu’il a soumis son projet JARPA II

en 2005

6. Monsieur le président, le Japon a agi en pleine conformité avec le paragraphe 30. J’en

veux pour preuve le fait que le projet JARPA II a été soumis à la CBI en mars 2005, afin de donner

au comité scientifique la possibilité de l’examiner et de le commenter avant que le Japon ne délivre

129
un permis spécial sur la base de ce projet .

7. Le raisonnement de l’Australie est là encore artificiel. Tout d’abord, elle s’empare du

libellé du paragraphe 30, qui prévoit que les Etats contractants doivent fournir les «propositions de

permis spéciaux», pour lui faire dire qu’un Etat contractant qui ne fournit pas chaque année au

secrétariat de la CBI ses propositions de permis en instance de délivrance contrevient au

130
paragraphe 30 . Or une telle interprétation méconnaît entièrement la manière dont cette

procédure d’examen et de commentaires est appliquée dans la pratique au sein du comité

scientifique. Le comité admet que les propositions de permis spéciaux relèvent du paragraphe 30.

S’il en était autrement, il n’aurait pu consigner par écrit, dans son rapport de 2005, que la

proposition de recherche pluriannuelle soumise par le Japon avait fourni «les informations requises

au titre du paragraphe 30 du règlement» . 131

8. JARPA II n’est pas le seul programme à avoir fait l’objet d’une proposition de recherche

pluriannuelle. Les propositions relatives à JARPN II, un autre programme de chasse scientifique

mené le Pacifique Nord-Ouest, couvraient une période de deux ans, qu’il s’agisse de l’étude de

132 133
faisabilité soumise en 2000 ou de la phase de recherche proprement dite soumise en 2002 . Le

comité n’a rien trouvé à y redire . C’est sur ce fondement que le président américain du comité

12SC/57/01 ; CMJ, annexe 150.

13CR 2013/18, p. 19, par. 17 (Dreyfus) ; CR 2013/20, p. 39-40, par. 19-26 (Gleeson).

13J. Cetacean Res. Manage. (JCRM) n°8 (Suppl.), 2006, p. 50
132
SC/52/O1, http://www.icrwhale.org/pdf/SC52O1.pdf, site consulté le 12 juillet 2013.
13SC/54/O2, http://www.icrwhale.org/pdf/SC5402.pdf, site consulté le 12 juillet 2013.

13JCRM n 3 (Suppl.), 2001, p. 61-64 ; JCRM no5 (Suppl.), 2003, p. 66-77. - 44 -

scientifique a pu dire en 2010 : «tant JARPA II que JARPN II se poursuivent sur la base de plans

135
qui ont déjà été présentés et examinés au sein du comité scientifique» .

9. Cette manière de procéder est également conforme aux lignes directrices les plus récentes

du comité scientifique, à savoir l’annexe P. L’annexe P définit des lignes directrices à l’aune

desquelles le comité scientifique exerce son rôle en application du paragraphe 30 (examen et

commentaires sur les propositions de permis spéciaux). En vertu de la procédure d’examen prévue

53 à l’annexe P, seules les «nouvelles propositions» sont censées être examinées. Le comité

scientifique a décidé de ne pas réexaminer chaque année les propositions relatives à des projets en

cours n’ayant pas fait l’objet de modifications.

10. Cette pratique, qui est désormais formellement établie par l’annexe P, n’est pas issue de

nulle part. En fait, à compter de 2000, époque à laquelle le Japon a présenté les propositions

relatives à JARPN II, le comité scientifique n’a pas jugé utile d’examiner la même proposition

année après année, et a préféré renvoyer aux commentaires qu’il avait déjà formulés dans ses

rapports précédents . Cette année, le Japon a informé le comité qu’il «n’envisageait pas de

modifier JARPA II» , et aucun débat n’a donc été consacré à ce programme au titre du point de

138
l’ordre du jour intitulé «examen de propositions nouvelles ou en cours» . Il en va de même de

l’examen par le comité des résultats de la recherche. A sa réunion de 2008, à l’issue de laquelle a

été adoptée l’annexe P, le comité scientifique a indiqué qu’il «n’examinerait pas les résultats des

permis en vigueur entre chaque examen périodique, mais se contenterait de prendre note des

rapports annuels succincts fournis par les auteurs de la recherche relevant d’un permis spécial» . 139

11. Au vu de tous ces éléments, il est d’autant plus étrange que l’Australie accuse le Japon

d’avoir violé le paragraphe 30, en faisant état des préoccupations suscitées par «l’absence

d’examen et de commentaires en dehors des examens périodiques prévus par l’annexe P» . De 140

135JCRM n 12 (Suppl.), 2011, p. 57.

136Voir par exemple, JCRM n 8 (Suppl.), 2006, p. 259 ; JCRM n 9 (Suppl.), 2007, p. 63 ; JCRM n 10 (Suppl.),
2008, p. 60.

137 Report of the Scientific Committee 2013, p. 80 http://iwc.int/cache/downloads/
1lwj9m9sehus40kswskggk8cw/2013%20IWC%20SC%20report.pdf ; site consulté le 12 juillet 2013.

138 SC Report 2013, Annex P: Special Permits, p. 5 http://iwc.int/index.php?cID=
3313&c Type=document&download=1, site consulté le 13 juillet 2013 ; onglet n 9.

139JCRM n 11 (Suppl.), 2009, p. 64.

140SC Report 2013, Ann. P: Special Permits, p. 5; onglet n 9. - 45 -

telles préoccupations n’ont jamais été exprimées devant le comité scientifique avant la dernière

réunion de juin 2013. Mais la manière dont l’Australie y fait référence révèle la tactique dont elle a

usé tout au long de la procédure orale : dénaturer les conclusions du comité scientifique . Le 141

o
document qui figure sous l’onglet n 9 de vos dossiers de plaidoiries est le rapport complet sur les

permis spéciaux, annexé au dernier rapport annuel du comité scientifique. Le titre «Annexe P» est

une simple coïncidence. Ce document n’a rien à voir avec les lignes directrices connues sous le

titre «Annexe P». Ce que l’Australie omet de dire, c’est que nous avons là un autre exemple de

142
«préoccupations» exprimées par certains membres du comité et contestées par d’autres . La

54 ressemblance entre la procédure d’examen et de commentaires de JARPA II en 2005 et la manière

dont l’Australie traite ces divergences d’opinion est frappante. J’en viens à présent à cet aspect

précis de l’affaire.

12. La non-participation de 63 scientifiques à la procédure d’examen et de commentaires

de 2005 est le deuxième argument que l’Australie continue d’invoquer pour démontrer que le

143
processus était «biaisé» . Outre que cet argument présuppose que le projet JARPA II a bel et bien

été soumis au comité scientifique — et il y a donc là une contradiction de la part de l’Australie —,

cet incident est à replacer dans le contexte d’une divergence d’opinions entre scientifiques. Le

comité scientifique n’a pas été dans l’incapacité de mener à bien sa procédure d’examen et de

commentaires. A y regarder de plus près d’ailleurs, la composition du groupe de scientifiques

ayant participé à cet examen est intéressante. Je vous invite à consulter la liste de ces

122 scientifiques sous l’onglet n 10 de vos dossiers de plaidoiries. Y figurent quatre anciens

présidents du comité scientifique, dont le président en exercice de l’époque, originaires d’Australie,

du Royaume-Uni et des Etats-Unis (et trois futurs présidents). Etre élu président du comité est une

distinction spéciale, et la participation de ces membres en particulier à la procédure d’examen pèse

141
CR 2013/8, p. 63, par. 19 (Sands) ; CR 2013/9, p. 37, par. 78 (Sands) ; CR 2013/19, p. 25-32, par. 4-24
(Sands).
142
CR 2013/20, p. 39-40, par.23 (Gleeson) ; SC Report 2013, Ann. P: Special Permits, p. 10, Ann. P3,
«Comments by some members on the Special PermitoWhaling Programmes: General comments», p. 10-11, Ann. P4,
«Response by other members to Annex P3»; onglet n 9.
143CR 2013/18, p. 19, par. 17 (Dreyfus) ; CR 2013/19, p. 27, par. 10, p. 32-36, par. 25-32, p. 37, par. 34, p. 38,
par. 37, p. 43-44, par. 50, p. 50-51, par. 68 (Sands) ; CR 2013/20, p. 32-33 (Sands) - 46 -

144
un certain poids. Au total, sur 31 Etats contractants, 19 étaient représentés par des scientifiques ,

dont le Brésil, les Etats-Unis, la Fédération de Russie, la Nouvelle-Zélande, la République de Corée

et le Royaume-Uni, pour n’en citer que quelques-uns. Etait également présent en qualité de

participant invité un ancien président du comité, M. John Bannister, de nationalité australienne.

La déclaration d’objection présentée par ces 63 scientifiques 145 a été contestée dans un document de

146
travail , que M. Sands a omis de mentionner. On ne saurait laisser entendre que les vues de la

minorité, celle des scientifiques ayant quitté la salle, ont plus de valeur que celles de la majorité,

celle des scientifiques qui sont restés.

13. Sur ces 63 scientifiques, 50 étaient présents lorsque le comité scientifique s’est réuni
55

en 2007, après l’évaluation finale de JARPA en 2006 , mais ils n’ont formulé aucune «critique

détaillée», critique qu’ils se seraient abstenus de faire à l’époque de l’examen du projet JARPA II.

L’Australie n’a pas réfuté ce point.

14. Dans son avis consultatif sur les Conséquences juridiques pour les Etats de la présence

continue de l’Afrique du Sud en Namibie, la Cour a reconnu que le respect de la pratique établie

d’une organisation internationale était suffisant . 148

15. Enfin, l’interprétation donnée par la Nouvelle-Zélande du paragraphe 30 appelle

quelques commentaires. La Nouvelle-Zélande a exagéré la portée exacte du paragraphe 30

lorsqu’elle a déclaré la semaine dernière qu’il fallait que «les intérêts légitimes des parties

paraissent objectivement avoir été pris en considération. Soutenir le contraire priverait le

149
paragraphe 30 de tout son sens» . Le Japon ne partage pas cette opinion. Le paragraphe 30

établit un mécanisme de coopération entre l’Etat contractant et le comité scientifique, et le Japon a

144Antigua-et-Barbuda, Australie (un ancien président), Brésil, Danemark, Dominique, Espagne, Etats-Unis (un

ancien président et le président en exercice de l’époque), Fédération de Russie, Grenade, Islande, Japon, Nicaragua,
Norvège, Nouvelle-Zélande, Portugal, République de Corée, Royaume-Uni (un ancien président), Sainte-Lucie,
Saint-Kitts-et-Nevis et Saint-Vincent-et-les-Grenadines.
145 o
JCRM n°8 (Suppl.), 2006, p. 260, annexe O1, appendice 2; CMJ, annexe 108, onglet n 11.
146Ibid., p. 262, annexe O1, appendice 3; CMJ, annexe 152, onglet n 11.

147«Comments on the Government of Japan's Proposal for a Second Phase of Special Permit Whaling in the
Antarctica (JARPA II)», App. 2, Ann. O1 to the Report of the Scientific Committee, JCRM n°8 (Suppl.), 2006, p. 260 ;
«List of Participants», Ann. A to the Report of the Scientific Committee, JCRM n 10 (Suppl.), 2008. p. 75.

148 Conséquences juridiques pour les Etats de la présence continue de l’Afrique du Sud en Namibie
(Sud-Ouest africain) nonobstant la résolution 276 (1970) du Conseil de sécurité, Avis consultatif, C.I.J. Recueil 1971,
p. 22, par. 22.

149OEN, par. 95 ; CR 2013/17, p. 46, par. 33 (Ridings). - 47 -

démontré qu’il participait pleinement au dialogue scientifique en cours au sein du comité. Bien

entendu, la Nouvelle-Zélande, en tant qu’Etat intervenant au titre de l’article 63 du Statut, a eu

l’heur de ne pouvoir formuler de commentaires sur l’engagement du Japon.

16. La Nouvelle-Zélande tente une nouvelle fois de renverser la charge de la preuve, en

soutenant que les vues des autres parties devaient paraître «avoir été prises en considération» 150,15.

Elle a déclaré la semaine dernière qu’«il ne s’agi[ssai]t pas de se plier aux vues exprimées par [les

autres parties]» .152 Cependant, son interprétation du paragraphe 30 en tant que «mécanisme

permettant d’assurer … la protection des intérêts des parties à la convention dans le cadre du

processus de délivrance des permis spéciaux» 153et son utilisation de résolutions controversées de la

154
CBI en tant qu’éléments de preuve de ces intérêts laissent entendre le contraire.

56 II. Les résolutions et les lignes directrices de la CBI, des instruments
à caractère non obligatoire

A. Les résolutions de la CBI

17. Monsieur le président, Mesdames et Messieurs de la Cour, jusqu’à présent j’ai eu

l’honneur de vous exposer la manière dont le Japon avait agi conformément à la seule disposition

contraignante du règlement régissant la chasse à la baleine soumise à un permis spécial. J’en viens

à présent aux dispositions non contraignantes, à savoir les résolutions et lignes directrices de la CBI

auxquelles l’Australie accorde tant d’importance.

18. Il est clairement établi en droit international que les résolutions sont des

recommandations. Comme la Cour l’a déclaré dans les affaires du Sud-Ouest africain,

«Certes, les résolutions de l'Assemblée générale peuvent avoir une grande

influence mais c'est là une autre question. Cela joue sur le plan de la politi155 et non
du droit; cela ne rend pas ces résolutions juridiquement obligatoires.»

150CR 2013/17, p. 46, par. 33 (Ridings).
151
Ibid., p. 47, par. 37 (Ridings).
152Ibid, p. 46, par. 33 (Ridings).

153OEN, par. 86.
154
CR 2013/17, p. 31, par. 54 (Finlayson).
155Sud-Ouest africain (Ethiopie c. Afrique du Sud ; Libéria c. Afrique du Sud), deuxième phase, arrêt, C.I.J.
Recueil 1966, p. 51, par. 98. - 48 -

19. Les résolutions adoptées par la CBI, en proie à des dissensions profondes, ne peuvent

constituer un accord ultérieur ou une pratique ultérieure des Etats contractants , comme nous l’a

expliqué M. Pellet au cours du premier tour de plaidoiries.

20. Il serait étrange d’affirmer que des résolutions non contraignantes adoptées par l’organe

conventionnel lient les Etats contractants, alors que le règlement, de caractère obligatoire, prévoit

un mécanisme permettant à ces derniers de se libérer en soulevant une objection. L’Australie a

nettement atténué ses prétentions sur ce point. Alors que, dans son mémoire, elle faisait valoir que

les résolutions de la CBI constituaient un accord ultérieur ou, indifféremment, une pratique

ultérieure , elle admet aujourd’hui que les décisions de la CBI, autres que les modifications

apportées au règlement, sont de simples recommandations. L’Australie convient également que la

délivrance de permis spéciaux ne doit pas «recevoir l’assentiment ou l’autorisation de la

commission ou du comité scientifique» et que nul «gouvernement ou autorité autre que l’Etat qui

158
délivre les permis en question [n’a le pouvoir de] les révoquer ou [de] les annuler» .

21. C’est là qu’entre en jeu l’étroite interaction entre l’Australie et la Nouvelle-Zélande.

L’Australie s’empresse d’ajouter que la question est «de savoir si les actes du Japon sont ou non

159
conformes … aux décisions qui ont été prises en vertu [du traité]» . Elle invoque ensuite

systématiquement l’interprétation donnée par la Nouvelle-Zélande de la valeur juridique des

160
57 résolutions de la CBI , à savoir que ces résolutions sont des «outils d’interprétation légitimes» et

qu’une coopération effective impose aux Etats parties à la convention de tenir dûment compte des

161
conditions énoncées dans ces résolutions . Sur la foi de cette interprétation proposée par la

Nouvelle-Zélande, l’Australie conclut que «le Japon d[oi]t tenir compte des intérêts des autres

parties à la convention, dont ces résolutions … [sont] également le reflet» . 162

156CR 2013/14, p. 63-70, par. 47-66 (Pellet).

157MA, par. 4.65-4.69.
158
CR 2013/18, p. 39, par. 5 (Crawford).
159
Ibid.
160CR 2013/19, p. 63, par. 16 (Crawford) ; CR 2013/20, p. 37, par. 12 (Gleeson) ; CR 2013/19, p. 63, par. 16

(Crawford) ; CR 2013/20, p. 42, par. 32 (Gleeson).
161CR 2013/17, p. 30-31, par. 51-54 (Finlayson).

162CR 2013/20, p. 42, par. 32 (Gleeson). - 49 -

22. Et la Nouvelle-Zélande prend alors le relais pour renchérir sur l’Australie : «Lorsqu’une

proposition de programme de chasse au titre d’un permis spécial ne satisfait pas à ces conditions,

les membres de la commission sont en droit d’attendre que celui-ci ne soit pas mis en œuvre sans

avoir été modifié…» 163

23. L’Australie, pour sa part, tente de réécrire unilatéralement les conclusions du comité

scientifique, comme s’il s’agissait de critiques unanimes à l’égard de la chasse à la baleine

164
pratiquée par le Japon en vertu d’un permis spécial , alors qu’il n’en est rien. Elle laisse entendre

que le comité scientifique a rejeté les données issues de JARPA II et leur analyse comme si elles

165
étaient sans valeur , ce qui est également faux. Puis elle invoque les résolutions critiques à

l’égard du programme adopté par une CBI profondément divisée et affirme que le Japon ne les a

166
pas prises en compte .

24. Le Japon est ici mis en présence de deux thèses défendues par deux Etats. Cette

considération mise à part, les Etats contractants sont effectivement tenus de prendre en compte les

167
résolutions de la CBI , mais pas au point d’être obligés de modifier leurs positions.

25. L’interprétation que nous livrent l’Australie et la Nouvelle-Zélande est même contraire à

l’interprétation exprimée au début d’une série de résolutions critiques à l’égard de la chasse

soumise à un permis spécial au lendemain de l’adoption du moratoire imposé par l’alinéa e) du

paragraphe 10. C’est ainsi qu’en 1987, le représentant des Etats-Unis a déclaré au sujet de la

résolution sur les programmes de recherche scientifique :

«Les Etats-Unis admettent volontiers et même insistent sur le fait qu’un Etat
demeurerait libre d’ignorer l’avis rendu par la commission et de délivrer des permis.

58 La question ne se discute pas. Un Etat possède ce 168it. Il aurait la faculté au titre de
la convention d’ignorer la recommandation.»

Il semble que la position de l’Australie sur l’effet des résolutions de la CBI ne soit pas partagée par

toutes les autres parties à la convention.

163CR 2013/17, p. 31 par. 52 (Finlayson) ; (les italiques sont de nous).

164CR 2013/8, p. 25, par. 44 (Burmester) ; CR 2013/8, p. 63, par. 19 (Sands) ; CR 2013/19, p. 32, par. 24, p. 36,
par. 32 (Sands).

165CR 2013/19, p. 17, par. 11 (Gleeson).
166
CR 2013/11, p. 35-36, par. 36 (Gleeson).
167Procédure de vote applicable aux questions touchant les rapports et pétitions relatifs au territoire du

sud-ouest africain, avis consultatif, C.I.J. Recueil 1955, opinion individuelle du juge Lauterpacht, p. 120.
168Procès-verbal de séance, 1987, p. 40 (Etats-Unis d’Amérique). - 50 -

B. Les lignes directrices de la CBI

26. Je voudrais à présent en venir aux lignes directrices de la CBI. A compter de 1986,

celle-ci a adopté une série de lignes directrices sous forme de résolutions. Etant de simples

recommandations, ces résolutions ne sont pas contraignantes. Les lignes directrices sont annexées

aux rapports du comité scientifique correspondant à leur année d’adoption et désignées sous

l’appellation d’«annexes».

27. Les lignes directrices en application desquelles le comité scientifique a examiné et

commenté le projet JARPA II figurent à l’annexe Y (2000). Comme l’a expliqué M. Boyle au

premier tour, l’annexe Y est «est une simple liste de résolutions non contraignantes de la CBI

concernant les permis spéciaux» 169établie par le directeur scientifique du secrétariat de la CBI, au

170
nombre desquelles figure la résolution 1999-2 contre laquelle le Japon a voté . Ce n’est pas le

comité scientifique lui-même qui a élaboré les lignes directrices en vertu desquelles devait être

conduit un examen scientifique. L’annexe Y a été jointe en annexe au rapport du comité

scientifique de 2000 . Les lignes directrices les plus récentes forment l’annexe P, laquelle se

distingue des autres annexes en ce que les Parties sont convenues qu’elle serait élaborée et adoptée

par le comité scientifique en 2008 pour être ensuite approuvée par la CBI . 172

28. Monsieur le président, il est faux d’affirmer que le Japon tourne le dos aux résolutions de

la CBI . Même s’il était opposé à l’adoption de quelques-unes des résolutions dans lesquelles la

commission — et non le comité scientifique — a énoncé les critères applicables aux fins de

l’examen scientifique, le Japon a soumis son projet JARPA II à une procédure «d’examen et de

commentaires» en 2005 en application de l’annexe Y. Cette procédure a été menée à bien en se

174
59 conformant exactement au modèle fourni par l’annexe Y . Sous chaque rubrique, le comité

scientifique a reproduit les critères détaillés énoncés à l’annexe Y et il n’a pas conclu que le projet

JARPA II ne satisfaisait pas à ces critères.

169
CR 2013/15, p. 53, par. 33 (Boyle).
170Procès-verbal de séance, 1999, p. 157.

171JCRM n° 3 (Suppl.), 2001, p. 371-372.
172
Chair’s Report of the 60th Annual Meeting, p. 26 http://iwc.int/index.php?
cID=2555&cType=document&download=1, site consulté le 13 juillet 2013.
173
CR 2013/11, p. 35-36, par. 36 (Gleeson).
174JCRM n° 8 (Suppl.), 2006, p. 48-53. Cf. CR 2013/19, p. 38-39, par. 36-37 (Sands). - 51 -

D. A propos de la «coopération effective»

29. Monsieur le président, Mesdames et Messieurs de la Cour, j’aimerais enfin en venir à la

question de la coopération de la part du Japon, et ce, sous deux angles : premièrement, la prise en

compte par celui-ci des vues exprimées à la CBI par les autres Etats contractants et, deuxièmement,

le dialogue scientifique dans lequel il est en permanence engagé avec le comité scientifique.

30. Sur le premier point, à la lumière de ce qui précède, l’argument selon lequel le Japon ne

175
coopérerait pas de façon effective au seul motif qu’il est fortement en désaccord avec certaines

des vues exprimées à la CBI sous la forme de résolutions (qui ne sont pas fondées sur les

176
conclusions formulées par le comité scientifique) est intenable. Cela ne revient pas pour le Japon

à penser qu’«il lui est loisible de faire, au titre de [l’article VIII], ce que bon lui semble» , comme

l’Australie le prétend avec insistance, loin s’en faut.

31. Bien au contraire, c’est en réaction à l’avis exprimé par d’autres Etats que le Japon s’est

abstenu de capturer des baleines à bosse comme cela devait être le cas à partir de la

saison 2007/2008. Les résolutions 2005-1 et 2007-1 étaient l’expression de l’opposition de certains

Etats contractants aux objectifs de capture proposés dans le programme JARPA II pour les baleines

à bosse et les rorquals communs. A la réunion annuelle de la CBI qui s’est tenue en 2007, au titre

du point de l’ordre du jour «Permis spéciaux», l’Australie a fait une déclaration dans laquelle elle

s’opposait aux objectifs de capture proposés par le Japon pour les baleines à bosse dans le cadre du

programme JARPA II, déclaration qui était la suivante :

«[L’Australie] relève que le programme JARPA II revêt pour elle une
importance toute particulière étant donné que des objectifs de capture de baleines à

bosse y sont envisagés pour la saison 2007/2008. Elle estime que le Japon devrait
faire preuve de bonne volonté et au moins retirer les objectifs de capture de baleines à
bosse, même si cela n’éliminerait pas de son programme tout aspect létal. Elle estime

en outre que, en capturant des baleines à bosse, le Japon jetterait encore de l’huile sur
le feu dans un débat déjà houleux, et qu’il engendrerait contre lui une réaction hostile
de la part de l’opinion publique australienne, ce qu’elle trouverait fâcheux.» 178

175OEN, par. 81-107 ; CR 2013/17, p. 43-47, par. 27-36 (Ridings).

176CR 2013/19, p. 36, par. 33 (Sands).
177
CR 2013/18, p. 20, par. 20 (Dreyfus).
178Rapport du président sur les travaux de la 59 réunion annuelle de la CBI, rapport annuel de la commission

baleinière internationale, 2007, p. 40 ; les italiques sont de nous. - 52 -

60 32. En décembre 2007, le Japon a décidé de suspendre la mise en œuvre des objectifs de

capture de baleines à bosse qui étaient prévus. Aucune baleine à bosse n’a jamais été capturée dans

le cadre de JARPA II, et ceci pour répondre à la demande formulée en ce sens par le président de la

179
CBI de l’époque, l’américain William Hogarth . L’Australie a demandé que le Japon fasse

preuve de bonne volonté, notamment pour ne pas aggraver la réaction hostile de l’opinion publique

australienne. A présent, elle refuse de reconnaître comme il se doit la décision prise par le Japon

et, au lieu de cela, raille le programme JARPA II car il ne se déroule pas conformément au projet

initial.

33. Deuxièmement, sur la question du dialogue scientifique permanent, la réactivité du Japon

aux commentaires et recommandations du comité scientifique a été démontrée de façon

180
circonstanciée lors du premier tour de plaidoiries et n’a pas été réfutée .

34. L’Australie passe sous silence la valeur scientifique de JARPA II afin de pouvoir

affirmer que le programme n’est pas conçu en vue de recherches scientifiques au sens de

l’article VIII , mais elle n’a pas été capable de réfuter le fait même que le Japon était engagé dans

un dialogue scientifique permanent et sérieux.

35. En ce qui concerne les analyses statistiques intégrées des captures par âge (en anglais,

SCAA), l’Australie a en vain tenté de nier l’importance de la contribution du Japon . Une fois 182

encore, la manière dont celle-ci évoque les opinions exprimées par les membres du comité

scientifique à propos de l’utilité des données relatives à l’âge obtenues par des méthodes létales est

totalement inexacte. L’attachement profond du Japon au dialogue scientifique demeure inébranlé.

Cela peut être démontré tant par le contexte que par le fond. M. Boyle abordera le fond de la

question, et je me concentrerai à présent sur le contexte.

36. Pendant ces dix dernières années, le comité scientifique a alloué des fonds pour la mise

au point de la méthode des analyses statistiques intégrées des captures par âge (SCAA) afin de

179CMJ, par. 5.80, note de bas de page 740, Conférence de presse donnée par Masahiko Koumura, ministre des
affaires étrangères, le vendredi 21 décembre 2007, à 18 h 35, http://www.mofa.go.jp/announce/fm_press/2007/12/1221-
2.html, consulté le 14 juillet 2013 [onglet n° 12].

180CR 2013/19, p. 36, par. 32 (Sands).
181
CR 2013/8, p. 63, par. 19 (Sands) ; CR 2013/9, p. 37, par. 78 (Sands) ; CR 2013/19, p. 25-32, par. 4-24, et
p. 47-50, par. 61-65 (Sands).
182
CR 2013/19, p. 48, par. 62 (Sands). - 53 -

mieux utiliser encore les données relatives à l’âge recueillies dans le cadre des programmes JARPA

183
et JARPA II . Le comité a unanimement consenti et ce, sans que les propres chercheurs de

l’Australie ne s’y opposent à la recommandation tendant à ce que la CBI finance les analyses

statistiques intégrées des captures par âge, pour poursuivre l’examen de cette méthode lors de sa
184
61 réunion de 2013 . Pareil comportement de la part du comité serait peu logique si celui-ci estimait

que ces données n’ont aucune valeur, et que leur analyse ne «produit rien de fiable», ainsi que l’a

affirmé M. Sands.

37. Voici ce que déclare le sous-comité sur l’évaluation approfondie à l’annexe G du rapport

publié cette année par le comité scientifique, et vous trouverez cette déclaration dans le corps du

texte reproduit sous l’onglet n 13 de vos dossiers de plaidoiries : «Les estimations du rapport

âge-longueur, obtenues grâce à l’analyse des couches de cérumen accumulées chaque année dans le

conduit auditif des baleines, constituent un important apport des analyses statistiques intégrées des

185
captures par âge.»

38. Au lieu de mentionner cela, M. Sands a donné une interprétation erronée de quelques

mots clés extraits d’un tableau récapitulatif figurant au bas d’une page de ce même rapport, sans

consulter le rapport dans son ensemble. Le fait que l’Australie se soit contentée d’associer

quelques mots «TRMR» et «pas solide» ou «mortalité naturelle» et «il est recommandé de

poursuivre l’examen» extraits du tableau récapitulatif, sans montrer qu’elle comprenait tout ce

que cela signifiait prouve qu’elle n’est pas vraiment engagée aux côtés des chercheurs qui

participent à ce sous-comité.

39. Quand on en vient à débattre des méthodes d’échantillonnage létales et non létales, un

clivage se crée au sein du comité scientifique. Mais il est irréfutable que les données obtenues à

partir des méthodes létales d’échantillonnage dans le cadre des programmes JARPA et JARPA II

sont utilisées par le comité scientifique. L’Australie soutient que, sur les huit années qui se sont

183Par exemple, Report of the Scientific Committee, JCRM n° 7 (Suppl.), 2005, p. 55, onglet n 5 ; Report of the
Scientific Committee, 2013, p. 89, onglet n 10.
184
Report of the Scientific Committee, 2013, p. 88-91; http://iwc.int/cache/downloads/
1lwj9m9sehus40kswskggk8cw/2013%20IWC%20SC%20report.pdf, consulté le 13 juillet 2013.
185Report of the Sub-Committee on In-depth Assessments, Annex G, Report of the Scientific Committee 2013,
p. 1; http://iwc.int/cache/downloads/dfk3x3g3hy0ckww8k4ogw0kgo/AnnexG.pdf, consulté le 13 juillet 2013 [onglet

n° 14]. - 54 -

186
écoulées depuis l’établissement du projet initial, le programme JARPA II n’a abouti à rien . Bien

au contraire, de précieux résultats ont été obtenus . 187 L’Australie n’a pas pu mettre à bas

l’argument du Japon selon lequel celui-ci est pleinement engagé dans le processus de dialogue

188
scientifique .

Conclusion

40. A titre de conclusion, j’aimerais faire quelques observations. Premièrement, à la lumière

de ce qui précède, l’Australie n’est pas parvenue à démontrer que le Japon avait agi en violation

d’une quelconque obligation procédurale. Le Japon a accepté la procédure d’examen et de

62 commentaire prévue à l’annexe Y et le projet de programme JARPA II a passé cet examen avec

succès.

41. Deuxièmement, en ce qui concerne la gestion des peuplements baleiniers, il y a

coopération effective lorsqu’un dialogue scientifique est engagé. L’analyse des données

scientifiques réalisée dans le cadre de JARPA II a concrètement contribué au travail du comité

scientifique et de plusieurs sous-comités en particulier.

43. Enfin, coopération effective ne saurait être synonyme d’acceptation unilatérale des

intérêts d’autres parties tels qu’ils sont exprimés dans des résolutions adoptées à une faible majorité

et qui, de toute façon, ne sont pas contraignantes.

44. Quant à l’attachement du Japon à la CBI, M. Akhavan vous en a déjà parlé. Monsieur le

président, Mesdames et Messieurs de la Cour, cela a été un grand honneur pour moi de plaider

devant vous au nom du Japon. Je vous remercie pour votre aimable attention.

Le PRESIDENT : Je vous remercie, Mme Takashiba. Je crois comprendre que cela vient

clore les exposés du Japon pour ce matin. La Cour se réunira de nouveau cet après-midi à partir de

15 heures pour entendre la suite des plaidoiries du Japon. L’audience est levée.

L’audience est levée à 12 h 45.

___________

186
CR 2013/19, p. 36, par. 32 (Sands).
187CR 2013/15, p. 40-41, par. 33-36, notes de bas de page 93-105 (Takashiba).

188CR 2013/18, p. 41, par. 5 (Crawford).

Document Long Title

Translation

Links