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CR 2009/26 (traduction)

CR 2009/26 (translation)

Mercredi 2 décembre 2009 à 10 heures

Wednesday 2 December 2009 at 10 a.m. - 2 -

8 Le PRESIDENT : Veuillez vous asseoir. L’audience est ouverte.

La Cour se réunit ce matin pour entendre les participants ci-après sur la question soumise à

la Cour, à savoir l’Albanie, l’Allemagne, l’Ar abie Saoudite et l’Argentine. Chacune des

délégations, comme je l’ai dit hier, dispose de 45minutes pour sa présentation. A cet égard, je

tiens à rappeler deux points de procédure.

Premièrement, pour que la procédure puisse se dérouler avec la célérité voulue, je présenterai

le premier orateur de chaque délégation. Etant donné que certaines délégations comptent plusieurs

orateurs qui devront intervenir dans le délai imparti et qu’il me sera difficile d’appeler chacun

d’eux, j’appellerai uniquement le premier de la délégation, et chacune pourra poursuivre sans

intervention de ma part.

Deuxièmement, je tiens à souligner que, puis que quatre orateurs s’exprimeront aujourd’hui

pendant 45 minutes chacun, il me semble opportun d’observer une brève pause-café de 15 minutes

à l’issue des exposés des deux premières délégations, après quoi nous entendrons les deux

suivantes.

Sur ce, je donne maintenant la parole à M. Gazmend Barbullushi.

M. BARBULLUSHI :

I.H ISTORIQUE DE L ’AFFAIRE

1. Monsieur le président, Messieurs de la C our, c’est un grand honneur et un grand privilège

de me présenter devant vous au nom de la Ré publique d’Albanie pour qui cette affaire revêt à

l’évidence un grand intérêt.

2. Il y a vingt ans, en1989, le Kosovo a été illégalement privé de son autonomie et de son

droit à l’autodétermination en vertu de la constitution yougoslave de 1974. Dix années de

discrimination sanctionnée par l’Etat ont suivi, marquées par des violations généralisées et

systématiques des droits de l’homme. Il y a dixans, en1999, la population du Kosovo a été

victime de la plus importante opération de nettoyage ethnique ob servée depuis la seconde guerre

mondiale. Des milliers de personnes ont été tuées ou ont disparu, et des dizaines de milliers de

foyers ont été endommagés ou détruits. Comme l’ a constaté le Tribunal pénal international pour - 3 -

l’ex-Yougoslavie, et comme d’autres sources le confirment, les forces paramilitaires et l’armée

serbes se sont livrés à une campagne systématique de nettoyage ethnique du Kosovo qui

comprenait le déplacement forcé de civils, le pill age de foyers et d’entr eprises, la destruction

gratuite de biens, des exécutions sommaires, des viols, des actes de torture et des traitements

inhumains et cruels. Plus d’1,5 million d’Albanais kosovars ont été chassés de leurs foyers par la

9
force. Durant ces heures sombres, l’Albanie a accueilli près de 700 000 Kosovars. Tous ces faits

sont de notoriété publique et ont été portés à votre attention par un grand nombre d’Etats au cours

de la présente procédure.

3. Monsieur le président, Messieurs de la Cour , la situation que je viens d’évoquer contraste

fortement avec celle qui règne aujourd’hui. Le Kosovo est un Etat indépendant et multiethnique,

soucieux du respect de la démocratie et de la légalité et qui protège pleinement les droits de tous

ses habitants. La volonté du Kosovo de protéger l es droits de l’homme et les droits des minorités

est un exemple pour les autres Etats du monde. Par sa maturité et son comportement, le Kosovo

contribue à la paix et à la stabilité dans les Balkans. Cela est un fait, et il est largement reconnu.

4. La République d’Albanie et de nombre ux autres pays ont reconnu la République du

Kosovo, considérant que la déclaration d’indépe ndance du Kosovo était pleinement conforme au

droit international. L’Albanie a appuyé et con tinuera d’appuyer pleinement le peuple du Kosovo

dans l’action qu’il mène pour assurer la paix, le progrès et la prospérité de tous.

5. Monsieur le président, avec votre permission, M.Frowein, qui dirige notre équipe

juridique, va maintenant examiner plus en détail un certain nombre de questions juridiques relatives

à cette affaire. Je vous remercie.

M. FROWEIN :

1. Monsieur le président, Messieurs de la C our, c’est un grand honneur et un grand privilège

de me présenter à nouveau devant vous, cette fo is pour la République d’Albanie qui, comme l’a

déjà dit Monsieur l’ambassadeur, est très concerné e par la présente instance. Celle-ci revêt une

grande importance pour le peuple du Kosovo, dont la majorité ⎯ plus de 90 % ⎯ est de souche

albanaise par la langue et la culture en général. - 4 -

2. Si vous me le permettez, Monsieur le président, je revie ndrai d’abord brièvement sur la

question de la demande d’avis consultatif. J’examinerai ensuite la conformité au droit international

de la déclaration d’indépendance.

3. Je commencerai par quelques remarques sur l’approche générale de cette affaire. Je me

pencherai ensuite sur les circonstances dans lesque lles une déclaration d’indépendance peut violer

le droit international, puis sur la relation existant entre une déclaration d’indépendance et la règle

10 de l’intégrité territoriale. En quatrième lieu, j’ét udierai l’interprétation de la résolution1244. La

cinquième partie de mon exposé sur l’autodétermin ation sera présentée par mon collègue, M. Gill.

J’en viendrai alors à une conclusion. J’ai bien peur, Monsieur le préside nt, qu’il n’y ait quelques

répétitions, mais j’espère jeter un nouvel éclairage sur certains problèmes.

II.C OMPÉTENCE ET OPPORTUNITÉ

4. L’Albanie a soumis quelques observations au sujet de la compétence, mais j’aimerais

revenir sur deux points qui pourraient être utiles à la Cour lorsqu’elle déci dera de donner suite ou

non à la requête pour avis consultatif.

1. Action possible de l’Assemblée générale

5. Comme en témoigne la jurisprudence de la Cour, les avis consultatifs ont pour but

d’apporter aux organes demandeurs des NationsUnies les éléments de droit nécessaires à leur

action.

6. La Cour a déclaré que l’Assemblée générale était habilitée à décider elle-même de l’utilité

d’un avis au regard de ses propres besoins, mais elle a souvent indiqué en quoi il pouvait être utile.

Elle l’a fait pour la dernière fois au paragraphe62 du célèbre avis sur le Mur ( Conséquences

juridiques de l’édification d’un mur dans le t erritoire palestinien occupé, avis consultatif,

C.I.J. Recueil 2004, p. 163, par. 62). La Cour a indiqué que l’Assemblée générale ou le Conseil de

sécurité pouvait tirer des conclusions spécifiques de ses obser
vations.

7. La question posée à la Cour aujourd’hui est formulée de telle sorte qu’elle porte

uniquement sur la conformité au droit international de la déclaration d’indépendance du

17février2008. L’avis consultatif est demandé sur une question précise et limitée. Depuis la

déclaration, soixante-troisEtats ont reconnu l’ indépendance du Kosovo, le dernier étant la - 5 -

Nouvelle-Zélande. L’Assemblée générale ne peut annuler ces reconnaissances. Personne n’en n’a

invoqué la nullité au regard du droi t international, et cette question n’est en aucun cas celle qui est

posée à la Cour, comme la France et le Japon l’ont souligné à juste titre.

8. Il semblerait donc qu’en l’espèce la Cour doive se demander si un avis consultatif pourrait

aider l’Assemblée générale dans l’exercice de ses fonctions. L’Assemblée pourrait-elle tirer des

11
conclusions des déterminations de la Cour ? Supposez que le Kosovo sollicite un jour la qualité de

membre à l’Organisation des Nations Unies, comme beaucoup d’entre nous l’espèrent.

9. L’Assemblée générale devra alors se prononcer sur la recommandation du Conseil de

sécurité. Le Kosovo devra être un Etat pacifique qui accepte les obligations de la Charte, comme la

Cour l’a confirmé dans un avis précédent sur l’admission d’Etats à l’Organisation des

Nations Unies (Compétence de l’Assemblée générale pour l’admission d’
un Etat aux

Nations Unies, avis consultatif, C.I.J. Recueil 1950 , p. 4). Aux fins de la décision de l’Assemblée

générale, qui ne sera pas rendue demain, ni dans quelques mois, mais certainement à un moment ou

à un autre, les problèmes posés par la déclaration d’indépendance du 17 fé vrier 2008 ne pourraient,

selon moi, jouer le moindre rôle. J’estime que la Cour devra tenir compte de cet élément

lorsqu’elle décidera de rendre ou non un avis consultatif. Ma deuxième remarque, dans cette

perspective, concerne le problème de l’acte ultra vires.

2. L’argument selon lequel la déclaration constitue un acte ultra vires

10. On fait valoir que la déclaration constitue un acte ultra vires et, partant, une violation du

droit international. Si la Cour se penchait sur cette question, elle agirait comme un tribunal

national et examinerait les pouvoirs spécifiques que les règles adoptées sur la base de la

résolution 1244 confèrent aux organes provisoires établis au Kosovo. Certains Etats les qualifient

même de règles de droit interne, tels les Etats-Unis et le Royaume-Uni. Il paraît fort douteux qu’il

appartienne à la Cour internationale de Justice de vérifier la conformité de la déclaration avec ces

règles. Sans aller aussi loin que les Etats-Unis et le Royaume-Uni, et que M.Murphy pour le

Kosovo hier (CR 2009/25), la Cour devrait se demander si cette question relève effectivement de sa

compétence. - 6 -

11. Toutefois, même à supposer que la Cour juge que la déclaration en tant que telle

constitue en ce sens un acte ultra vires , quel pourrait être l’effetd’une telle conclusion pour

l’action de l’Assemblée générale? Il est clai r que la déclaration resterait l’exercice du pouvoir

constituant du peuple du Kosovo. Même si les organes provisoires n’étaient pas mandatés pour

faire une telle déclaration, je suis d’avis que la s ituation n’en serait en rien modifiée. On peut en

fait la comparer à la célèbre action du tiers état à Paris en 1789. Cela se passait à l’intérieur d’un

Etat, mais c’est exactement la même chose lorsqu’un acte de sécession entraîne la création d’un

nouvel Etat. Le pouvoir constituant n’est pas lié par les règles du précédent système

12
constitutionnel. C’est là une autre raison pour la quelle il me semble douteux que la Cour puisse

faire droit à la demande d’avis consultatif. Et pe rmettez-moi de l’ajouter, car à mon avis il ne faut

pas l’oublier, la grande majorité des Etats Membres des Nations Unies n’ont pas exprimé le souhait

que la Cour rende un avis consultatif.

III. CONFORMITÉ DE LA DÉCLARATION AU DROIT INTERNATIONAL

1. Approche générale

12. J’en viens maintenant à la conformité de la déclaration au droit international. De

nombreux exposés ont montré que le droit intern ational ne réglemente pas les déclarations

d’indépendance. La pratique des Etats ⎯du moins, selon moi, depuis la déclaration

d’indépendance des Etats-Unis et la discussion qui a suivi et qui est très connue, et jusqu’à la

période récente des déclarations d’indépendance fa ites dans le contexte de la désintégration de

l’ex-Yougoslavie, de la sécession de nombreux Et ats d’avec l’ex-Union soviétique et d’autres

exemples encore ⎯ montre que le droit international est mu et sur les déclarations d’indépendance

en tant que telles.

13. La sécession n’est pas réglementée par le droit international. La seule question est donc

de savoir si, dans un cas spécifique, une violation du droit international peut être démontrée. A cet

égard, je me permets, respectueusement mais très fermement, de marquer mon désaccord avec

MM Shaw, Zimmermann et Kohen. Aucune règle de droit international n’interdit la sécession. Et

l’ouvrage sur la sécession publié sous la direction de M. Kohen le prouve am plement. Nous avons

cité dans nos écritures plusieurs extraits de ce livre assez bien structuré. - 7 -

14. Il existe en particulie r deux situations dans lesquelles une déclaration d’indépendance

constitue une violation du droit international, prem ièrement, lorsqu’il y a intervention illégale et,

deuxièmement, lorsqu’il y a violation de règles obl igatoires précises du droit international, le jus

cogens.

2. Une déclaration d’indépendance résultant de l’intervention illégale d’un Etat constitue une
violation du droit international

15. Lorsque l’intervention d’un Etat tiers, que ce soit par l’emploi de la force ou par tout

autre moyen, a joué un rôle décisif dans la pr oclamation de l’indépendan ce, elle constitue bien

entendu une violation grave du droit international. Aussi le Conseil de sécurité et parfois

l’Assemblée générale ont-ils engagé les Etats à ne pas reconnaître l’entité nouvellement formée.

13
Chypre-Nord est à l’évidence un exemple particulière ment éloquent. Aucun Etat, à l’exception de

celui qui est intervenu, n’en n’a reconnu la déclaration d’indépendance.

16. Rien de la sorte ne s’est produit en l’espèce. Le Conseil de sécurité n’a pris aucune

mesure, et l’Assemblée générale n’a pas recommandé la non-reconnaissance. Personne n’a soutenu

que l’intervention d’un Etat était à l’origine de la déclaration d’indépendance de la République du

Kosovo. Je maintiens donc que la situation ne peut être comparée à celles dans lesquelles

l’intervention d’un Etat a entraîné une déclaration d’indépendance.

3. Déclaration d’indépendance en violation du jus cogens

17. Deuxièmement, lorsque le régime minoritaire raciste de Rhodésie a déclaré son

indépendance, le Conseil de sécurité a adopté une résolution appelant les Etats à ne pas le

reconnaître, le qualifiant de «r égime minoritaire raciste illégal» . De même, le Conseil et

l’Assemblée générale ont demandé aux Etats de ne pas reconnaître l’indépendance des anciens

«homelands» d’Afrique du Sud.

18. L’Assemblée générale a condamné ces ac tes «destiné[s] à consolider la politique

inhumaine d’apartheid». Elle a rejeté la décl aration d’indépendance comme nulle et a demandé à

tous les gouvernements de refuser «de reconnaître sous quelque forme que ce soit le Transkei

prétendument indépendant» et les autres bantoustans. Rien de la sorte en l’espèce. Il est très - 8 -

révélateur que la Serbie n’ait pu citer que ces exemples pour soutenir qu’une sécession, en tant que

telle, constitue une violation du droit international.

IV. D ÉCLARATION D ’INDÉPENDANCE ET INTÉGRITÉ TERRITORIALE

19. J’en viens maintenant au problème de l’inté grité territoriale. L’intégrité territoriale est,

bien évidemment, l’un des fondements du droit interna tional. Le paragraphe 4 de l’article 2 de la

Charte interdit le recours à la menace ou à l’emploi de la force contre l’intégrité territoriale de tout

Etat. D’aucuns soutiennent que l’intégrité terr itoriale est également une règle qui préserve le

territoire d’un Etat de toute évolution constitutionnelle interne, et en particulier des déclarations

d’indépendance faites par des mouvements sécessionnistes. Selon moi, cette thèse traduit toutefois

une incompréhension totale de la règle en question.

20. La création d’un nouvel Etat par voie de sécession est sans rapport avec le non-respect de

l’intégrité territoriale de l’Etat concerné. Cela r essort de la pratique des Etats, qui n’ont jamais

14 recouru à l’argument selon lequel une déclaration d’indépendance faite par un groupe

sécessionniste est contraire au principe de l’intégrité territoriale.

21. Lorsqu’une déclaration d’indépendance est provoquée par l’intervention d’un Etat tiers,

on peut tout à fait soutenir que cette intervention constitue également une violation du principe de

l’intégrité territoriale. En revanche, tel n’est pas le cas lorsque l’évol ution interne d’un Etat

conduit à la sécession d’une partie de cet Etat. Il est, selon moi, complètement erroné d’affirmer

que la sécession en tant que te lle constitue une violation de la règle de droit international de

l’intégrité territoriale.

22. La manière dont la Serbie traite cette question dans ses observations du mois de juillet

est, soit dit en passant, fort éloquente. La Serbie a la gentillesse de citer une déclaration que j’ai

faite au sujet des résolutions dans lesquelles s ont réaffirmées la souveraineté et l’intégrité

territoriale de l’Irak. Elle omet cependant de reprendre la phrase dans laquelle j’explique la

formule contenue au paragraphe4 de l’article2, qui interdit l’emploi de la force contre l’intégrité

territoriale de tout Etat.

23. En supprimant cette phrase, la Serbie lais se entendre que la notion d’intégrité territoriale

s’applique également aux mouvements sécessionnistes. A l’évidence, ce n’est pas le cas, et ce - 9 -

o
n’est pas ce que j’ai dit. Je renvoie la Cour à la note de bas de page n 489 des observations de la

Serbie du mois de juillet.

24. Il ne fait de doute pour personne qu’une déclaration d’indépendance peut constituer une

violation du droit constitutionnel, et c’est d’ailleurs la position de la Serbie en ce qui concerne la

déclaration du Kosovo. La Serbie n’est cependa nt pas en mesure de démontrer qu’une telle

violation a une quelconque pertinence du point de vue du droit international. Elle cite à cet égard

la résolution169(1961) du Conseil de sécurité c oncernant la situation au Congo, laquelle, là

encore, avait trait à une intervention étrangère.

25. Dans cette résolution, le Conseil de sécur ité réaffirme en effet que «tous les personnels

militaire et paramilitaire et conseillers étra ngers ne relevant pas du commandement des

Nations Unies, ainsi que … tous les mercenaires» doivent se retirer. Au paragraphe 1 du dispositif,

il «Réprouve énergiquement les activités sécessionnistes illégaleme nt menées par l’administration

provinciale du Katanga avec l’appui de ressources de l’extérieur et secondées par des mercenaires

étrangers.»

Ces extraits démontrent qu’il s’agissait clairement d’un cas d’intervention extérieure.

26. Il en va bien évidemment de même de la résolution787(1992) concernant la

Bosnie-Herzégovine. Au paragra phe5 de cette résolution, le Conseil de sécurité exige «que

cessent immédiatement toutes les formes d’ingérence provenant de l’extérieur de la République de

15 Bosnie-Herzégovine, y compris l’infiltration d’unités et d’éléments irréguliers». Il est, selon moi,

quelque peu paradoxal que la Serbie cite cette résolution à l’appui de sa thèse.

27. Permettez-moi de clarifier un autre point: lorsque le Conseil de sécurité estime que la

paix est menacée, il peut, naturellement, intervenir su r la base du chapitreVII. Tel a été, dans le

cas de la Bosnie-Herzégovine, le fondement juridique de la résolution que je viens de citer. En

revanche, aucune décision de cette nature n’a été prise à la suite de la déclaration d’indépendance

du Kosovo, laquelle s’est faite de manière pacifique au terme d’une longue période de négociations

qui n’avait pu déboucher sur un accord.

28. Si la règle de l’«intégrité territorial e» protège les Etats contre les interventions

extérieures, elle ne s’applique pas, en revanc he, à l’évolution constituti onnelle interne. La

sécession en tant que telle n’est pas — comme l’atteste la pratique étatique et comme l’ont précisé - 10 -

de nombreux auteurs—, régie par le droit inte rnational. Nous l’avons démontré avec force

références.

29. Toutes les résolutions citées par la Serbie qui se rapportent à la désintégration violente de

la Yougoslavie sont autant de preuves que le Con seil de sécurité a, en vertu du chapitreVII,

compétence pour prendre des mesures contre les menaces à la paix ou les ruptures de la paix. Elles

ne démontrent pas, en revanche, que la sécession en tant que telle constitue une violation du droit

international ou de la règle de l’intégrité territoriale.

30. Cette précision est également pertinente aux fins de trancher la question de savoir si les

acteurs non-étatiques sont liés par le droit international. Certes, la Serbie a raison de rappeler que

le Conseil de sécurité traite désormais, dans de nombreuses résolutions, la question des acteurs

non-étatiques en se fondant sur le chapitreVII. Mais cela ne prouve en rien que, en l’absence

d’une telle résolution adoptée en vertu du chapitre VII, un mouvement sécessi onniste est lié par le

principe de l’intégrité territoriale. Or, le Conseil de sécurité n’a p as adopté pareille résolution

lorsque le Kosovo a déclaré son indépendance de manière pacifique.

31. Et permettez-moi d’ajouter ceci : à la page 111, paragraphe 254, la Serbie déclare que le

Royaume-Uni a raison de souligner la possibilité d’une dissolution ou d’une reconfiguration de

l’Etat. La Serbie limite cependant cette hypo thèse aux «réorganisations consensuelles [qui]

peuvent toujours intervenir», ajoutant que l’ob servation du Royaume-Uni est correcte, «mais pas

au-delà», pour reprendre ses propres termes. Cela a ét é répété hier. Par cette restriction, la Serbie

tente de revenir à l’époque où, en droit internati onal, le consentement de l’ancien souverain était

considéré comme le seul moyen pour qu’un nouvel Etat voie le jour. Or, comme nous l’avons

démontré, cette règle a été abandonnée aux alentours de1820, c’est-à-dire il y a presque

deux cents ans.

16 32. Je formulerai, Monsieur le président, une dernière observation sur ce point. Il est vrai

que, dans l’avant-dernier paragra phe de la section de la célèbre résolution2625 sur les relations

amicales, il est fait référence à la notion d’intégrité territoriale en rapport avec le principe de

l’autodétermination. Cela doit cep endant être replacé dans le cont exte de l’explication dans son

ensemble. En effet, ainsi que le dernier paragraphe le démontre, cette référence vise l’action des

autres Etats et précise dans quelles circonstances la «sécession en tant que remède» peut - 11 -

s’appliquer. Cette question sera examinée par M. Gill. Le fait qu’il soit fait référence à cette

notion ⎯à savoir la notion d’«intégrité territoriale» ⎯ dans ce texte n’étend pas l’application de

ladite règle aux processus de sécession en général. En tout état de cause, comme nous le savons,

une résolution de l’Assemblée générale ne saurait avoir un tel effet.

V. L’importance de la résolution 1244

33. J’en viens à l’importance de la résolutio n1244. La Serbie pr ésente une argumentation

détaillée aux fins de démontrer que la déclaration d’indépendance est contraire à cette résolution.

Celle-ci revêt, bien entendu, un caractère très pa rticulier. Elle a été adoptée pour lancer un

processus visant à clarifier le statut futur du Kosovo. Les notions auxquelles elle se réfère pour

qualifier le résultat final de ce processus ne sont nullement limitées, de toute évidence à dessein.

M. Murphy a eu plus de temps que moi pour l’expo ser. La résolution parle de «règlement final»,

de «règlement politique» ou encore de «statut futur». Cela démontre qu’elle ne préjuge en rien le

résultat final d’un processus qui a été inauguré par son adoption; à n’en pas douter, tous les

membres du Conseil de sécurité en étaient pleinement conscients.

34. Cela ressort aussi clairement de la référence expresse aux accords de Rambouillet qui est

faite au paragraphe8 de l’anne xe2. Aux termes de ce paragra phe, un accord est conclu sur un

processus politique en vue de l’établissement d’ un accord-cadre politique intérimaire prévoyant

une autonomie substantielle. Dans la dernière phrase dudit paragraphe, il est précisé que les

négociations entre les parties en vue d’un règlement ne doivent pas retarder ni perturber la mise en

place d’institutions d’auto-administration démocratiques.

35. Cette référence aux accords de Rambouillet établit un équilibre crucial dans la

résolution1244. Comme nous l’avons entendu hier, et comme nous le savons tous, l’une des

solutions envisagées dans lesdits accords —et cela était expressément indiqué—, était

l’indépendance totale du Kosovo en tant qu’Etat souverain sur la base de la volonté du peuple. En

se référant à ces accords, la résolution1244 confirme cette possibilité. D’un autre côté, elle se

17 réfère à la souveraineté et à l’intégrité territori ale de la RFY, ce qui démontre clairement que, à

l’époque où elle a été adoptée, aucune décision finale n’avait été prise. Il est indiqué tout aussi - 12 -

clairement que le processus politique ne saurait port er atteinte à la souveraineté et à l’intégrité

territoriale de la Yougoslavie.

36. On est en droit de penser que le système établi par la résolution excluait toute mesure qui

aurait modifié la situation avant que les négociations prévues, y compris dans les annexes, ne soient

arrivées à leur terme. En revanche, une fois que ces négociations furent arrivées à leur terme et que

tous les acteurs concernés eurent confirmé qu’aucun accord ne pouvait être conclu, la

résolution 1244 n’offrait plus de solution intérimaire.

37. Certes, au moment où la résolution a été adoptée, chacun espérait que l’on pourrait

parvenir à une solution négociée. Cependant, lors qu’il est devenu évident que tel ne serait pas le

cas, le système ne pouvait plus fonctionner en tant que système intérimaire. La résolution 1244 ne

saurait, selon moi, s’appliquer éternellement à une situation d’impasse entre les parties, ce qui

résulterait de la position adoptée hier par la Serbie. Par conséquent, la déclaration d’indépendance

ne saurait être considérée comme étant contraire à la résolution, même si l’on admet que cette

dernière a inauguré une période intérimaire au cour s de laquelle une déclaration de cette nature lui

aurait été contraire.

38. Cela démontre que la résolution 1244 n’exclut pas la déclaration d’indépendance dans les

circonstances particulières de l’affaire. Le fait que la Serbie semble aujourd’hui laisser entendre

que le processus politique n’a pas été mené de manière transparente et impartiale ne peut, selon

moi, que susciter l’étonnement, compte tenu de la réputation dont jouit M. Ahtisaari dans le monde

entier. Je tiens d’ailleurs à dire que j’ai eu le plaisir de travailler avec lui en2000 à la rédaction

d’un important rapport international.

39. Il est en effet assez révélateur que la Se rbie, dans ses observations, cite une remarque

faite par M.Ahtisaari et l’interprète comme indiqua nt que celui-ci considérait, dès le départ, que

l’indépendance était la seule solution. Cela ne ressort nullement des propos en question.

Permettez-moi de les reprendre, tels qu’ils ont ét é cités par la Serbie au paragraphe106 de ses

observations. M.Ahtisaari aurait indiqué: «L’une des conditions formulées au départ était de ne

surtout pas revenir à la situation d’avant 1999.» Ce la ne démontre en rien que l’indépendance était

la seule solution qu’il envisageait. Avant 1999, comme nous le savons tous, le Kosovo ne jouissait

plus d’aucune autonomie et, à cette époque, les droits de l’homme du peuple kosovar étaient l’objet - 13 -

18 de graves violations. La résolution 1244 prévoya it clairement, à tout le moins, un degré important

d’autonomie. Voir dans cette déclaration de M.Ahtisaari la preuve que celui-ci manquait

d’impartialité et n’envisageait que la possibilité d’ une indépendance totale revient à en travestir

totalement le sens.

40. Si vous le permettez, Monsieur le pr ésident, j’aimerais maintenant demander à mon

collègue, M.Gill, d’exposer notre position sur la question de l’autodétermination, avant de

reprendre la parole pour conclure.

M. GILL :

1. Monsieur le président, Messieurs de la Cour, c’est un honneur pour moi de représenter la

République d’Albanie devant cette Cour. M on exposé a pour objet la pertinence du droit à

l’autodétermination au regard de la question de la licéité de la déclaration d’indépendance du

Kosovo, et les conséquences à en tirer.

VI. A UTODÉTERMINATION ET DROIT À LA SÉCESSION À TITRE DE REMÈDE

2. Mon exposé se compose de deux parties. J’aborderai en premier lieu la question de savoir

si l’on peut considérer que le droit à l’autodéte rmination s’oppose à la déclaration d’indépendance

du peuple du Kosovo, empêchant par là-même la créa tion d’un Etat indépendant garant de l’égalité

des droits pour tous ses habitants. Je présenterai en second lieu les arguments relatifs au droit de

faire sécession à titre de remède pour les peuples qui, au sein d’un Etat indépendant, sont victimes

de pratiques discriminatoires systématiques et sont privés d’une participation complète au

gouvernement et à l’administration de cet Etat, et j’ établirai le lien entre ces observations et la

question posée à la Cour.

3. Mais avant d’entrer dans ces développeme nts, j’aimerais faire observer que l’Albanie

considère que la licéité de la déclaration d’i ndépendance du Kosovo ne dépend en aucun cas de la

nécessité pour le Kosovo de disposer d’un dr oit à l’indépendance fondé sur le droit à

l’autodétermination. Dès lors, les arguments rela tifs au droit de faire sécession à titre de remède

viennent simplement s’ajouter à ceux qui concer nent le caractère non illicite de la sécession en

droit international. - 14 -

1. L’autodétermination en droit international
19
Plaise à la Cour :

4. Le droit à l’autodétermination est à la fois une règle du droit international des traités et

une règle du droit international coutumier, qui est largement ad mise et reconnue comme ayant un

caractère erga omnes et valeur de jus cogens. On considère généralement qu’il comporte deux

dimensions distinctes mais étroitement liées, qui sont couramment appelées, respectivement, les

dimensions externe et interne du droit à l’autodé termination. La dimensionexterne est, pour un

peuple sous domination coloniale ou sous occupati on étrangère, le droit à l’indépendance ou celui

de décider librement, d’une quelconque autre manière, d’un statut politique par le biais de

l’association ou de l’intégration à un autre Etat. Dans la résolution2625 (XXV) de l’Assemblée

générale du 24octobre1970 ⎯dite déclaration relative aux relations amicales ⎯ il est en outre

déclaré que ce droit peut éventuellement être pertinent lorsqu’un peuple se voit refuser une

véritable participation au gouvernement et à l’administration d’un Etat du fait d’actes

discriminatoires commis de manière systématique à l’égard d’une partie de la population et lorsque

celle-ci se voit en outre refuser l’égalité des droits, le gouvernement de l’Etat n’étant alors pas

représentatif de l’ensemble de la population.

5. On considère généralement que la dimens ion interne du droit à l’autodétermination est

principalement constituée par le droit d’un peuple à une participation complète et véritable au

gouvernement et à l’administration d’un Etat existant ainsi qu’à une représentation complète et

véritable dans ce gouvernement et cette administration, fondées sur l’égalité de traitement et la

non-discrimination.

6. Bien entendu, les titulaires du droit à l’autodétermination sont les peuples. Bien que les

éléments constitutifs d’un peuple puissent varier en fonction du contexte dans lequel ce terme est

employé, il ne fait absolument aucun doute que la population du Kosovo constitue un peuple,

comme cela a été reconnu dans les accords de Ra mbouillet, dans le cadre constitutionnel du

Kosovo adopté par la MINUK, par les ministres du gr oupe de contact et par le représentant spécial

du Secrétaire général au nom de l’Organisation des Nations Unies, l’Albanie s’étant déjà référée à

ces instruments aux paragraphes61 à 65 des exposés écrits qu’elle a présentés à la Cour en

juillet2009. Et je dois souligner que cela c ontredit ce que nos respectés collègues serbes ont - 15 -

déclaré hier à la Cour sur la question de savoir si les Kosovars étaient un peuple. Il n’est certes pas

demandé à la Cour de se prononcer sur la ques tion de savoir si la population du Kosovo constitue

un peuple aux fins de l’autodétermination, mais il ne fait aucun doute que les Kosovars constituent

effectivement un peuple et cela pourrait avoir son importance si la Cour se déclarait compétente en

l’espèce.

20 7. J’aimerais maintenant me pencher sur la question de savoir si le droit à

l’autodétermination emporte l’interdiction de faire sécession et examiner quelles conditions

pourraient éventuellement donner lieu à un droit de faire sécession unilatéralement en tant que droit

s’inscrivant spécifiquement dans le contexte du droit à l’autodétermination. Et pour commencer, je

préciserai que le droit à l’autodétermination n’emporte ni un droit général ni une interdiction de

faire sécession. Si le droit de faire sécession d’un peuple appartenant à un Etat existant était exclu,

cela serait exprimé sans ambiguïté dans le texte de la déclaration relative aux relations amicales,

dont l’objectif est de clarifier et de réaffirmer l es principes fondamentaux sous-jacents à la Charte.

C’est d’ailleurs ce qu’elle fait en ce qui concerne l’intégrité territorial e d’un Etat à l’égard de tout

autre Etat, avec cette dernière phrase du paragraphe consacré à l’autodétermination, qui dispose

clairement que «[t]out Etat doit s’abstenir de toute action visant à rompre partiellement ou

totalement l’unité nationale et l’intégrité terr itoriale d’un autre Etat ou d’un autre pays».

M.Frowein a déjà abordé cette question et, ce faisan t, il a affirmé que le principe de l’intégrité

territoriale a principalement vocation à s’app liquer aux menaces externes, et il n’en va pas

différemment si on l’envisage dans la perspective de l’autodétermination.

8. Le mode normal d’exercice de l’autodétermin ation au sein d’un Etat indépendant existant

passe par l’exercice des droits civils et politiqu es conformément aux procédures en vigueur dans

ledit Etat, de manière non discriminatoire et sur la base de l’égalité des droits. Dans tout Etat

fonctionnant conformément à ces principes, il ne fait aucun doute que l’autodétermination ne donne

pas lieu à un droit général de faire sécession. Néanmoins, lorsque ces conditions ne sont

systématiquement, et de manière flagrante, pas respectées, et qu’un peuple se voit refuser une

participation complète à la vie politique et à l’administration du pays, ni le droit relatif à

l’autodétermination ni aucune autre règle de dro it international n’interdisent de faire sécession.

Cela est indiqué dans un autre passage de la résolution 2625 ainsi libellé : - 16 -

«Rien dans les paragraphes précédents ne sera interprété comme autorisant ou
encourageant une action, quelle qu’elle soit, qui démembrerait ou menacerait,
totalement ou partiellement, l’intégrité te rritoriale ou l’unité politique de tout Etat

souverain et indépendant se conduisant confor mément au principe de l’égalité de
droits et du droit des peuples à disposer d’eux-mêmes … et doté ainsi d’un
gouvernement représentant l’ensemble du peuple appartenant au territoire sans
distinction de race, de croyance ou de couleur.»

9. Monsieur le président, Messieurs de la Cour, ce passage ne constitue certes en rien une

porte ouverte à la sécession, mais on ne peut pas non plus considérer qu’il établisse un droit

inconditionnel au maintien de l’intégrité territoriale au prix de pratiques discriminatoires à l’égard
21

d’une partie de la population, de son exclusion de la participation à la vie politique et du déni de

représentation de cette partie de la population. Telle est l’interp rétation qui en est généralement

admise par la doctrine, ainsi que celle qu’a exprim ée la Cour suprême du Canada en 1998 dans son

avis consultatif relatif à la Sécession du Québec. Dans cette décision, qui est unique dans la mesure

où elle traite directement de la question de savoir quand l’éventue lle absence d’interdiction de la

sécession pourrait se présenter dans le contexte de l’exercice de l’autodétermination, la Cour a jugé

que, puisque le Canada remplissait les conditions d’un Etat démocratique, garantissant la

participation complète de l’ensemble de la population à la vie politique et à l’administration

publique, la population du Québec ne disposait pas d’un droit de sécession unilatérale.

10. La décision de la Cour suprême du Ca nada étant généralement considérée comme

donnant une interprétation correcte du droit, il s’ ensuit naturellement que, dans un Etat disposant

d’un système juridique ménageant la participation de l’ensemble de la population à la vie politique

et à l’administration sur la base de l’égalité de droits et de la non-discrimination, le droit à

l’autodétermination n’emporte pas le droit de faire sécession. En revanche, un Etat mettant en

Œuvre des politiques fondées sur l’exclusion d’une pa rtie de la population ne saurait s’appuyer sur

le droit relatif à l’autodétermination pour préserver so n intégrité territoriale. Le point important de

ce raisonnement est que le droit à l’autodétermin ation ne garantit pas de manière inconditionnelle

l’intégrité territoriale des Etats par rapport à une pa rtie de leur propre population. En fait, il

n’interdit pas la sécession en cas de pratiques discriminatoires systématiques et de déni de l’égalité

de traitement juridique. - 17 -

2. Les circonstances dans lesquelles est intervenue la déclaration d’indépendance
du Kosovo et la sécession à titre de remède

11. J’aimerais maintenant étudier si ces circonstances exceptionnelles étaient réunies au

Kosovo.

12. La question de savoir si la déclarati on d’indépendance constitue en quoi que ce soit une

violation du droit à l’autodétermination est d’une importance capitale pour la présente procédure, et

on ne peut y répondre qu’en appl iquant le droit aux circonstances factuelles et historiques

spécifiques qui ont entouré cette déclaration. Ces faits sont présentés de manière détaillée dans les

exposés écrits de l’Albanie et d’autres Etats, ils sont incontestables et sont consignés dans les

archives nationales. Ces exposés relatent une sér ie d’événements qui se sont déroulés sur une

période d’environ dix ans et qui relevaient d’une politique consistant à discriminer les Albanais du

Kosovo et à les exclure systématiquement de la vie publique de la province, par la dissolution de

22 tous les organismes publics représentatifs de cette population, par l’exclusion des Albanais du

Kosovo à tous les échelons de l’administration publi que et par la suppression de la langue et de la

culture albanaises. Cette politique s’est heurtée à une opposition massive et a entraîné l’extension

au Kosovo du conflit armé qui se déroulait dans l’ex-Yougoslavie, débouchant finalement sur une

intervention internationale et le placement du territoire sous administration internationale.

13. Voilà dans quelles circonstances la résolu tion 1244 du Conseil de sécurité a été adoptée

et, sur une période de dix années, aucune tentativ e de parvenir à une solution négociée menée sous

les auspices de la communauté internationale n’a débouché sur un accord qui aurait été acceptable

et durable. On a prétendu que les politiques au trefois menées par la Serbie ne devraient pas

l’empêcher de réaffirmer sa souveraineté sur le Kosovo. En substa nce, cet argument revient à dire

que, même si les politiques et les événements de la période 1989-1999 constituaient des violations

de l’égalité des droits et du dro it à l’autodétermination, il conviendrait de ne pas en tenir compte,

que le Gouvernement serbe actuel est prêt à rétablir le statut autonome de la province au sein de la

Serbie et que, dès lors, le Kosovo ne dispose pas du droit de décider de son avenir en tant qu’Etat

indépendant. Monsieur le président, Messieurs de la Cour, cela constitue une interprétation

totalement absurde et erronée du droit à l’autodétermination.

14. En premier lieu, cette option n’est tout simplement pas acceptab le pour le peuple du

Kosovo, qui a très clairement exprimé son absence totale de confiance en ces assurances et fait - 18 -

savoir qu’il ne souhaitait en aucun cas demeurer au sein de la Serbie. Cela seul rend une telle

solution totalement intenable et vouée à l’échec, quand bien même on supposerait que

l’administration serbe actuelle est de bonne foi. Car il ne fait aucun doute que le seul moyen pour

la Serbie de réaffirmer sa souveraineté sur le Kosovo serait d’incorporer celui-ci de force, avec

l’assentiment de la communauté internationale, et il va sans dire que, au regard des récents

événements et de la signification de l’autodéterm ination, une telle solution ne serait ni juste ni

viable.

15. Le droit relatif à l’autodétermination ne prévoit pas qu’un Etat puisse, après avoir

pendant toute une décennie systématiquement et vi olemment dénié à une partie de la population

vivant sur son territoire ses droits à l’égalité de tr aitement et à une participation complète à la vie

politique et à l’administration du pays, revendiquer le droit de ré affirmer sa souveraineté sur ce

territoire et sur ce peuple qui, du fait du déni de son droit à l’égalité de traitement, a choisi de se

constituer en Etat indépendant. En revanche, ce mê me droit prévoit, dans de telles situations, un
23

droit de faire sécession à titre de remède et j’ affirme que nous sommes en l’espèce typiquement

dans une situation où la sécession à titre de remède constituait le dernier recours possible.

16. Monsieur le président, Messieurs de la Cour, le droit est un instrument destiné à favoriser

et à apporter une solution juste et acceptable, mais également viable et durable à un problème tel

que celui-ci. A tous ces égards la question de savoi r ce qui est à la fois juste et viable en l’espèce

ne devrait même pas se poser. Dès lors, si la Cour décide d’exercer sa compétence pour se

prononcer sur cette question, elle ne devrait pas le faire d’une manière qui fasse obstacle au choix

opéré par le Kosovo, un choix résultant d’un ensemble unique de circonstances et d’événements

historiques qui ont débouché sur une nouvelle situation où un peuple a décidé de son avenir et où

un tiers de la communauté internationale a reconnu l’irréversibilité de ce choix.

17. Monsieur le président, Messieurs les juges, cela conclut mon intervention. J’aimerais

remercier la Cour pour l’attention qu’elle a prêtée à mes propos et, avec votre permission, donner la

parole à M.Frowein afin qu’il fasse quelques d éclarations finales au nom de la République

d’Albanie. - 19 -

Le PRESIDENT: J’aimerais informer la dé légation albanaise que le temps qui lui est

imparti ⎯ 45 minutes ⎯ s’est écoulé. La Cour doit demeurer impartiale à l’égard de toutes les

délégations. Je vous donne quelques minutes pour pr ésenter votre conclusion, mais veuillez être

aussi bref que possible. Merci.

M.FROWEIN: Monsieur le président, je vous prie de bien vouloir m’excuser. Ma

déclaration sera très brève.

VII. C ONCLUSIONS

1. Permettez-moi de résumer nos arguments et d’exposer notre conclusion.

2. La règle fondamentale de protection de l’intégrité territoriale est sans rapport avec la

question.

3. La résolution 1244 n’a nullement garanti le résultat final. La question de savoir si le

Kosovo deviendrait finalement un Etat indépendant n’y était, à dessein, pas tranchée.

4. J’en viens à la conclusion de notre interv ention. Aucune affaire portée devant la Cour

internationale de Justice et, évidemment, au cune demande d’avis consultatif n’a jamais

potentiellement revêtu une telle importance pour un nouveau membre de la communauté

internationale, lequel est aujourd’hui reconnu par plus d’un tiers des Etats qui la composent — dont

24 trois membres permanents du Conseil de Sécurité —, par tous ses voisins, sauf un, et par la grande

majorité des Etats de la région qui font partie de l’Union européenne.

5. Un avis non contraignant de la Cour, selon lequel la déclaration d’indépendance de la

jeune nation kosovare serait contraire au droit international, ne pe rmettrait certainement pas de

remonter le temps. Comme M.Ahtisaari l’a ré cemment indiqué, il ne fait aucun doute que le

Kosovo restera un Etat indépendant. Il finira par être reconnu par la plupart, si ce n’est la totalité,

des Etats. Une telle décision serait cependant fort regrettable pour l’avenir.

6. Cela aurait certainement une incidence tr ès négative sur le sentiment du peuple kosovar à

l’égard du droit international et sur le moral d’un e jeune nation qui a subi une répression brutale et

perdu nombre de ses citoyens lors du conflit armé.

7. Il est compréhensible que la Serbie ait du mal à accepter de perdre un territoire qui,

compte tenu de son histoire, a revêtu une grande importance pour elle. Ce n’est pas la première - 20 -

fois, dans l’histoire du droit international, qu’ un Etat éprouve de grandes difficultés à reconnaître

un Etat nouvellement indépendant créé sur un territoire qui lui a appartenu.

8. Ce qui est néanmoins fort difficile à admettre, c’est que la Serbie cherche à dissimuler le

véritable contexte dans lequel la situation a évolué en affirmant qu’une reconnaissance de la licéité

de la déclaration reviendrait à récompenser ce ux qui refusent de poursuivre de bonne foi un

processus de négociation. La Serbie semble oublier totalement le contexte dans lequel la situation

a évolué.

9. Si la Cour devait dire conclure à l’illicéité de la déclaration, cela reviendrait au contraire à

récompenser ceux qui ont violemment réprimé le peuple qui a finalement choisi l’indépendance.

10. Monsieur le président, l’Albanie prie la Cour de dire, si elle décide de rendre un avis, que

la déclaration d’indépendance était conforme au droit international.

11. Je vous remercie, Monsieur le président, M essieurs de la Cour, pour votre attention et

vous prie encore de m’excuser d’avoir dépassé mon temps de parole de quelques minutes. Merci.

Le PRESIDENT : Merci, M. Frowein, pour votr e exposé. Nous allons maintenant entendre

le prochain participant, l’Allemagne. J’appelle à la barre Mme Susanne Wasum-Rainer.

25 Mme WASUM-RAINER :

1. Monsieur le président, Messieurs de la Cour, c’est réellement un grand honneur pour moi

que de plaider devant la Cour à l’occasion de ces audiences sur la demande d’avis consultatif

soumise par l’Assemblée générale. Si vous le permettez, je présenterai maintenant les observations

de la République fédérale d’Allemagne sur les questions de droit soulevées par cette demande.

J’interviens devant la Cour pour la prier, très respectueusement, de confirmer que la déclaration

unilatérale d’indépendance d es institutions provisoires d’administration autonome du Kosovo

⎯pour reprendre les termes empl oyés par l’Assemblée générale ⎯ était effectivement conforme

au droit international. - 21 -

2. Monsieur le président, je voudrais commencer par mettre en exergue la qualité des

relations que l’Allemagne entretient tant avec la Serbie qu’avec la République du Kosovo. Mon

gouvernement est convaincu que l’indépendance du Kosovo a favorisé la stabilité et la sécurité

dans les Balkans. Selon l’Allemagne, l’avenir, pour les deux Etats ⎯ la Serbie et la République du

Kosovo ⎯, doit revêtir la forme d’un partenariat au sein de l’Union européenne.

3. L’Allemagne a déjà exposé sa position en dé tail dans ses écritures. Nous avons examiné

attentivement toutes les autres pièces de procédure soumises à la Cour, ainsi que les arguments

développés hier à l’audience par la Serbie et par le Kosovo. Aussi me bornerai-je, dans le présent

exposé, à développer quelques points revêtant une pertinence particulière.

4. Notre argumentation s’articulera autour des points suivants. Je commencerai par

examiner la question soumise à la Cour par l’Asse mblée générale, une question bien précise et de

portée restreinte (I). Pour y répondre, je m’inte rrogerai, dans la deuxièm e partie de mon exposé,

sur l’existence de règles de droit international susceptibles d’être violées par la déclaration en

cause (II). Au terme d’un examen approfondi, il s’avèrera qu’il n’en existe aucune et, partant, que

la déclaration est conforme au droit international. Ayant ainsi montré que le droit international ne

comporte aucune règle qui interdise la déclaration, je chercherai à déterminer, dans la troisième

partie de mon exposé, s’il en contient une qui la justifierait expressément. A cet égard, je

reviendrai sur le fait qu’il existe désormais un Etat du Kosovo ⎯un fait dont, au regard du

principe d’effectivité en droit international, ne saurait être fait abstraction (III). Je montrerai

ensuite, dans la quatrième section, que l’existence de cet Etat repose sur l’exercice du droit à

26 l’autodétermination du peuple du Kosovo (IV). En conclusion, je confirme rai que la déclaration

d’indépendance en cause est conforme au droit international (V).

I.R ÉSOLUTION 63/3DE L ’A SSEMBLÉE GÉNÉRALE EN DATE DU 8 OCTOBRE 2008

5. Monsieur le président, Messieurs de la Cour , l’Allemagne est d’avis que le libellé de la

question qui nous occupe ici a été soigneusement ch oisi par l’Assemblée générale. Cette question

ne concerne que la déclaration d’indépendance du Kosovo. Cela a été reconnu dans les différentes

pièces de procédure soumises, y compris par la Se rbie en sa qualité de principal auteur de la - 22 -

résolution63 de l’Assemblée générale en date du 8octobre2008, et cela l’a été également par la

Serbie à l’audience, hier (CR 2009/24).

6. C’est donc la déclaration d’indépendance ⎯et elle seule ⎯ qui doit être appréciée au

regard du droit. Les actes d’Etats ou d’orga nisations internationales en rapport avec cette

déclaration, le statut du Kosovo en droit international ou la question de la reconnaissance par des

Etats tiers ne forment pas l’objet de la présente instance.

7. Toutefois, contrairement à ce que donne à entendre le libellé de la question soumise à la

Cour, la déclaration d’indépendance du Kosovo n’a pas été le fait des institutions provisoires

d’administration autonome. Tant le libellé exprès de la déclaration même que les circonstances de

son adoption montrent clairement que ceux qui ont voté et signé cette déclaration agissaient en

qualité de dirigeants démocratiquement élus du peuple du Kosovo, et non simplement à titre de

membres d’une assemblée créée dans le cadre de l’administration internationale du Kosovo. Ils

exprimaient, en tant que pouvoir constituant *, la volonté du peuple du Kosovo de vivre dans un

Etat qui lui soit propre.

8. Puisque la déclaration était l’expression de la volonté du peuple, elle était nécessairement,

de par sa nature même, unilatérale. Toutefois, les circonstances exceptionnelles qui ont mené et

abouti à la déclaration d’indépendance du Kosovo, y compris la participation du Secrétaire général

de l’Organisation des Nations Unies et de son envoyé spécial, M. Ahtisaari, sous l’égide du Conseil

de sécurité, témoignent du cadre multilatéral da ns lequel s’est inscrite la proclamation de

l’indépendance du Kosovo. Le contexte global entourant ces événements fait donc du Kosovo un

cas inédit et à part.

II.NORMES QUI POURRAIENT INTERDIRE LA PROCLAMATION DE L ’INDÉPENDANCE

9. L’Allemagne est d’avis qu’une déclaration d’indépendance aboutissant à la sécession,

ainsi, du reste, que la sécession elle-même ne sont rien d’autre que des éléments factuels. La

27 question de la licéité de cette déclaration relève peut-être du droit interne, notamment

constitutionnel, mais le droit international est muet à cet égard.

*
En français dans le texte. - 23 -

10. La quête systématique de règles du dro it international susceptibles de faire obstacle à

pareille déclaration dans le cas d’espèce conduit à examiner le principe de l’intégrité territoriale et

la résolution1244 (1999) du Conseil de sécurité ⎯ sur lesquels, avec votre permission, Monsieur

le président, je vais maintenant me pencher.

11. Le principe de l’intégrité territoriale de tout Etat est bien établi en droit international.

Dans la Charte des NationsUnies, ce principe est étroitement associé au principe fondamental

d’interdiction du recours à la menace ou à l’emploi de la force entre Etats. Cette règle s’adresse

aux Etats. Les Etats doivent respecter leur intégrité territoriale respective.

12. Le droit international ne crée à cet égard aucune obligation applicable aux individus.

Savoir s’il existe une norme équivalente applicable aux individus est une question de droit interne.

Elle n’est pas régie par le droit international. Il en va de même en ce qui concerne les peuples qui

jouissent du droit à l’autodétermination. La norme juridique internationale prescrivant le respect de

l’intégrité territoriale des Etats ne leur est pas applicable.

13. Permettez-moi de renvoyer à cet égard à la résolution2625 (XXV) de l’Assemblée

générale, la «déclaration relative aux relations amicales». Celle-ci comporte un chapitre consacré

au «principe de l’égalité de droits des peuples et de leur droit à disposer d’eux-mêmes», dont un

paragraphe semble revêtir une pertinence toute pa rticulière en l’espèce: ce paragraphe souligne

l’importance du droit des peuples à disposer d’eux-mêmes, mais précise que rien dans cette

déclaration ne doit être interprété comme autorisan t le démembrement de l’intégrité territoriale des

Etats.

14. Qu’en déduire aux fins de l’espèce? C es éléments permettent-ils de répondre à la

question de la licéité de la déclaration d’indépendance du Kosovo? La réponse est non. La

«déclaration relative aux relations ami cales» porte sur les relations entre Etats. Lorsqu’elle

souligne l’importance du droit des peuples à disposer d’eux-mêmes, elle rappelle aux Etats le

devoir qui leur incombe de respecter ce droit. Et lorsqu’elle précise que la disposition concernée

ne doit pas être interprétée comme autorisant une a tteinte à l’intégrité territoriale des Etats, elle

s’adresse également aux Etats ⎯ et non à des individus, groupes d’in dividus, entités au sein d’un

Etat ou encore à des peuples. - 24 -

15. Qu’il existe des résolutions du Conseil de sécurité qui portent sur telle ou telle situation

de conflit et qui, dans ces circonsta nces particulières, imposent aussi aux acteurs non étatiques de

respecter l’intégrité territoriale d’un Etat donné ne vient nullement contredire ce constat.

Contrairement à ce qu’a affirmé hier la Serbie, l’incorporation d’une te lle obligation dans une
28
résolution du Conseil de sécurité peut aussi être interprétée ⎯et nous l’interprétons ainsi ⎯

comme créant une obligation qui, autrement, n’existerait pas.

16. Dans le contexte d’une déclaration d’i ndépendance, des Etats peuvent bien sûr être

amenés à violer l’obligation qui leur incombe de respecter leur intégrité territoriale respective, dans

le cas d’interventions illicites, par exemple. Mais tel n’est pas ce qui s’est produit en ce qui

concerne le Kosovo, et telle n’est pas la question soumise aujourd’hui à la Cour.

17. J’en viens maintenant à la résoluti on1244 (1999) du Conseil de sécurité. Cette

résolution interdisait-elle de proclamer l’indépe ndance du Kosovo ? La répon se, une fois de plus,

est non. La résolution1244 (1999) établit un régime intérimaire dont le but est de permettre un

processus politique devant aboutir à une solution finale.

18. La résolution1244 n’anticipe pas telle ou telle issue à ce processus politique, pas

davantage qu’elle n’impose que le statut final fasse l’objet d’un accord. Mon gouvernement

espérait certes que la Serbie et le Kosovo parviendraient à un tel accord, et avait activement appuyé

les initiatives prises en ce sens. Permettez-moi de mentionner, à cet égard, la contribution apportée

par l’ambassadeur Ischinger en tant que membre de la « troïka», formée de l’Union européenne,

des Etats-Unis d’Amérique et de la Russie. Néanmoins, quelque souhaitable qu’un accord ait pu

être, la résolution 1244 (1999) n’en fait pas une obligation.

19. L’Organisation des Nations Unies a lancé un processus politique aux fins de déterminer

l’avenir du Kosovo. La situation a fondament alement changé lorsque, toutes les possibilités

envisageables de parvenir à un règlement négocié ayant été examinées et épuisées, il s’est avéré

que le processus avait clairement et irrémédiablement échoué. La communauté internationale s’est

alors trouvée aux prises avec la question de savoir comment gérer une impasse qui, si on la laissait

se perpétuer, déstabiliserait tant le Kosovo que la région dans son ensemble. A alors été avancée

une proposition de règlement prenant en compte les positions que les parties avaient avancées dans

le cadre du processus de négociation et mettan t en avant des compromis sur l’ensemble des - 25 -

questions en rapport avec le statut du Kosovo. Il ne s’agissait pas d’une solution négociée, il

s’agissait d’une solution de compromis, qui prenait en compte les négociations déjà menées afin de

parvenir à une solution durable propice à la stabilité du Kosovo et de la région.

20. La résolution 1244 (1999) prescrivait que le processus menant à cette solution définitive

tienne compte des accords de Rambouillet de mars 1999. Mais elle n’excluait pas la possibilité

d’une déclaration d’indépendance. Le fait que ni le représentant spécial du Secrétaire général ni le

29 Secrétaire général lui-même ni le Conseil de sécu rité n’ont pris de mesures en vue d’annuler la

déclaration d’indépendance de février 2008 conforte résolument l’idée que cette déclaration n’était

pas contraire à la résolution 1244 (1999).

21. Monsieur le président, Messieurs de la Cour, permettez-moi de m’interrompre un instant

pour résumer : la déclaration d’indépendance en cause en l’espèce ne viole pas le droit international

et, en particulier, elle n’est pas proscrite par le principe de l’intégrité territoriale ou par la

résolution 1244 (1999) du Conseil de sécurité.

22. En référence à la célèbre décision re ndue par la Cour permanente de Justice

internationale en l’affaire du Lotus (Lotus, arrêt n9, 1927, C.P.J.I. série A n 10), la réponse à la

question posée par l’Assemblée généra le peut être formulée de la manière suivante: puisqu’elle

n’est pas proscrite par le droit international, déclaration d’indépendan ce est conforme au droit

international.

III.L E PRINCIPE D ’EFFECTIVITÉ : L’EXISTENCE DE L ’ETAT DU K OSOVO

23. Monsieur le président, Messieurs de la Cour, j’ai répondu à la question de l’Assemblée

générale et pourrais donc achever mon exposé ic i. Permettez-moi néanmoins de poursuivre mon

argumentation et d’appeler votre attention sur un autre aspect important.

24. Nous avons vu que le droit international ne contient pas de règle interdisant la

déclaration d’indépendance en question. Allons un peu plus loin et voyons si le droit international

la justifie formellement.

25. A cet égard, je me réfère au fait qu’au moment même où je vous parle il existe un Etat

indépendant du Kosovo. La déclaration d’indépenda nce a été une étape cruciale dans la formation - 26 -

de cet Etat. Si le droit international accepte l’existence du Kosovo, force est de conclure que le

droit international accepte aussi la déclaration d’indépendance qui en porte création.

26. Je parlerai d’abord de l’existence de l’Etat du Kosovo. Traditionnellement, il ne peut y

avoir d’Etat sans population, sans territoire et sans gouvernement. Or ces trois éléments sont réunis

dans le cas du Kosovo. La présence continue de la communauté internationale au Kosovo n’est pas

incompatible avec l’autorité du Gouvernement kosovar qui agit de manière indépendante et

autonome. Les institutions de l’Etat ont considérablement progressé sur la voie de la stabilisation.

30 27. Au nombre des exemples récents, citons l es élections municipales indépendantes qui ont

eu lieu le 15 novembre de cette année et la créati on de la cour constitutionnelle en juin. A ce jour,

soixante-troisEtats ont reconnu cet Etat, y comp ris les Etats successeurs de l’ex-Yougoslavie à

l’exception de la Serbie et de la Bosnie-Herzé govine et, avec l’appui d’une centaine d’Etats, le

Kosovo est devenu membre du fond monétaire international et du groupe de la banque mondiale.

28. La question dont la Cour est saisie ne porte ni sur le statut du Kosovo lui-même, ni sur

celui de sa reconnaissance par d’autres Etats, mais elle concerne une situation factuelle qui existe et

qui ne peut donc être méconnue. Le principe ju ridique auquel je me réfère ici est celui de

l’effectivité.

29. Il va de soi que toutes les situations fact uelles ne sont pas conformes à la loi du simple

fait qu’elles sont factuelles. Mais lorsqu’il s’agit de questions se rapportant au statut d’Etat, la

pratique internationale renvoie clairement au principe d’effectivité.

30. Cela vaut aussi pour l’acte qui a porté créa tion de l’Etat, la déclaration d’indépendance.

Dans des affaires passées où des violations du dr oit international ont été dénoncées en rapport avec

une déclaration d’indépendance, ce n’est pas la déclaration elle-même mais un acte distinct lié à la

déclaration qui a été jugé contraire à une règle de droit international. Tel n’est pas le cas en

l’espèce et aucune question de cet ordre n’a donc été portée devant la Cour.

IV. D ROIT À L ’AUTODÉTERMINATION

31. Outre le principe d’effectivité, il existe une norme du droit international qui semble

justifier formellement la création de l’Etat du Kosovo : le droit à l’autodétermination. - 27 -

32. Pour préserver la stabilité du système international, l’autodétermination devrait

normalement s’exercer dans le cadre existant d’un Etat, mais la sécession peut, à titre exceptionnel,

être considérée comme légitime si l’on peut établir qu’elle représente le seul recours possible face à

un refus prolongé, implacable et abusif d’accorder l’autodétermination interne.

33. Telle était précisément la situation da ns laquelle le peuple du Kosovo se trouvait. Les

événements qui ont précédé la déclaration d’in dépendance montrent clairement qu’il y a eu

répression et déni prolongés et inflexibles du droi t à l’autodétermination interne, ce qui n’a pas

laissé d’autre choix au peuple du Kosovo.

34. Dans le débat sur le droit à l’autodétermination, d’aucuns ont exprimé la crainte qu’une

exégèse trop générale du contenu de ce droit ne soit source de risques pour la stabilité, la paix et la
31

sécurité et, par mesure de précaution, on s’est efforcé d’en restreindre et d’en limiter la portée.

35. Cet argument repose sur une perspective ex ante : à savoir, la situation avant l’exercice

d’un éventuel droit à l’autodétermination. Or, le cas qui nous occupe est différent : il concerne une

situation a posteriori.

36. L’Etat du Kosovo existe, le peuple kosovar a exercé son droit à l’autodétermination. Lui

dénier ce droit aurait créé de gros risques pour la stabilité et la sécurité au Kosovo et dans la région.

Par ailleurs, on l’a vu, la reconnaissance de ce droit a été, à l’évidence et sans contestation possible,

favorable à la stabilité et à la sécurité au Kosovo et dans la région.

37. A ce jour, je l’ai déjà dit, la quasi-totalité des pays de la région ont reconnu le Kosovo,

indiquant ainsi qu’ils avaient confiance dans la légitimité et la pérennité du nouvel Etat, leur

voisin ⎯ confiance qui s’appuyait sur une évidence au jourd’hui largement acceptée : cette qualité

d’Etat est bénéfique pour la stabilité régionale et la conforte.

38. Monsieur le président, Messieurs de la Cour, le Kosovo n’est pas un précédent. C’est un

cas spécifique et inédit.

39. Ses principales caractéristiques sont les suivantes : une période de répression massive et

systématique au Kosovo qui a débouché sur une po litique de massacre et de déplacement dirigée

contre la population majoritaire, dont nous a vons donné le détail dans notre exposé écrit.

Deuxième élément, une présence durable de la communauté internationale sous l’égide des

NationsUnies durant une période pendant laquelle la Serbie, sur fond de répression et de déni - 28 -

persistant du droit démocratique à l’autodétermination interne, n’a conservé ni pouvoir, ni

influence à Pristina et sur Pristina. Quant au tr oisième élément, c’est le processus de négociation

unique, conduit par les NationsUnies, au cours duquel toutes les possibilités imaginables de

règlement ont été passées en revue afin de rech ercher une solution négociée. Ce processus a

échoué. A ce stade, compte tenu de ces circonstances particulières, un Etat du Kosovo indépendant

était le seul recours possible.

40. A la lumière des circonstances très par ticulières qui entourent l’affaire du Kosovo,

craindre qu’elle ne serve de précédent indésirable n’est pas justifié.

32 41. Permettez-moi de résumer. La création de l’Etat du Kosovo était justifiée en droit

international. Elle repose sur le droit à l’autodétermination exercé par le peuple du Kosovo. Elle a

établi un fait qui doit être examiné à la lumière du principe d’effectivité en droit international. La

déclaration d’indépendance en question était un élément constitutif de ce processus. Il s’ensuit que

le droit international justifie au ssi cette déclaration, même si, stricto sensu, il ne traite pas

spécifiquement de la question.

V. C ONCLUSION

42. Monsieur le président, Messieurs de la Cour, je conclus de ce qui précède que la

déclaration d’indépendance du Kosovo est conforme au droit international et que, en particulier,

elle ne va pas à l’encontre du principe de l’inté grité territoriale des Etats ou de la résolution 1244

(1999) du Conseil de sécurité. C’est une mesure prise par le pe uple kosovar, dans des

circonstances très particulières, pour exercer son dr oit à l’autodétermination. Elle ne met pas en

cause le principe de l’intégrité territoriale qui conserve toute sa pertinence, s’agissant en particulier

de l’intégrité territoriale de l’Etat du Kosovo lui-même.

43. Monsieur le président, nous célébrons cette année le vingtième anniversaire de la chute

du mur de Berlin. Grâce à cet événement, le peuple allemand a exercé son droit à

l’autodétermination obtenant ainsi sa réunification, et une belle histoire a commencé, celle de

l’intégration de l’Europe orientale et de l’ Europe occidentale, évolution que bien peu

d’observateurs auraient pensée possible il y a vingt ans. Mon gouvernement est convaincu que les

deux Etats, le Kosovo et la Serbie, ont leur place dans notre maison commune, l’Europe. - 29 -

Je vous remercie, Monsieur le président.

Le PRESIDENT: Je remercie MmeWasum- Rainer pour son exposé. Comme je l’ai

annoncé plus tôt, nous allons faire une pause de quinze minutes. La séance reprend à 11 h 30.

L’audience est suspendue de 11 h 15 à 11 h 30.

Le PRESIDENT : Veuillez vous asseoir. L’audience est reprise. J’appelle

S. Exc. M. Abdullah Alshaghrood à la barre pour présenter l’exposé de l’Arabie saoudite.

33 M.ALSHAGHROOD: Monsieur le président, Messieurs de la Cour, j’ai l’honneur de

représenter le Royaume d’Arabie saoudite à la prés ente procédure orale, au terme de laquelle la

Cour rendra un avis consultatif sur la déclaration unilatérale d’indépendance des institutions

provisoires d’administration autonome du Kosovo. Le Royaume d’Arabie saoudite a été informé

de la tenue de ces audiences publiques par une note adressée par la Cour à son ambassade royale à

La Haye le 20octobre2008. Dans cette note, la Cour se référait à la demande d’avis consultatif

que lui avait soumise l’Assemblée générale des Nations Unies au sujet de la déclaration unilatérale

d’indépendance des institutions provisoires d’admi nistration autonome du Kosovo, conformément

à la résolution63/3 adoptée par celle-ci le 8oc tobre2008. La même note contenait également

o
copie de l’ordonnance n 141 de la Cour, en date du 17 octobr e 2008, concernant l’organisation et

le calendrier de la procédure. Le Gouvernemen t du Royaume d’Arabie saoudite a fait part à la

Cour de son intention de participer à ces audien ces par une note qu’il lui a fait adresser par son

ambassade à La Haye le 14 septembre 2009. En réponse, la Cour a adressé une note à l’ambassade

le 29septembre2009 pour l’informer que, co mpte tenu du calendrier établi, la délégation

saoudienne aurait la possibilité de prendre la parole aux audiences du mercredi 2 décembre 2009.

Monsieur le président, Messieurs de la C our, mon pays a reconnu l’indépendance de la

République du Kosovo en vertu de la déclaration faite par une source officielle du ministère des

affaires étrangères du Royaume d’Arabie saoudite le 24 Rabi’II 1430 de l’hégire, ce qui correspond

au 20avril2009. Si le Royaume d’Arabie sa oudite a pris cette décision souveraine, c’est

principalement pour contribuer à re nforcer la sécurité, la stabilité et la prospérité du Kosovo et de

ses Etats voisins dans la région des Balkans. N’oubl ions pas, en particulier, que la région a connu - 30 -

de longues périodes de guerre, d’affrontements et d’instabilité, qui ont laissé des séquelles

économiques et politiques et ont eu de lourdes c onséquences humanitaires. Il convient de rappeler

ici que, en septembre 2007, le Secrétaire général de l’Organisation des Nations Unies avait estimé

que, si aucune solution n’était trouvée, «les progrès accomplis jusqu’[alors] risqu[ai]ent fort d’avoir

été vains et de laisser la place à l’instabilité au Kosovo et dans la région».

34 De notre point de vue, la déclaration d’indépendance proclamée par le Kosovo le

17 février 2008 constituait l’aboutissement d’un pro cessus destiné à régler la question du statut de

ce territoire et respectait tant la résolution 1244 (1999) du Conseil de sécurité que le droit

international général. Bien qu’il n’ait pas soumis d’exposé écrit à la Cour, mon gouvernement

souscrit aux conclusions écrites formulées par le Ko sovo et par d’autres, à savoir qu’il n’y a pas eu

violation du droit international, et que la résolu tion1244 n’interdisait pas au Kosovo de déclarer

son indépendance. Il est important de mentionne r ici la résolution adoptée par le conseil des

ministres des affaires étrangères de l’Organisation de la conférence islamique à sa trente-sixième

session, tenue en mai 2008, dans laquelle le conseil a pris note de la résolution 1244 du Conseil de

sécurité et de la déclaration d’indépendance du Koso vo. Dans cette même résolution, le conseil a

reconnu les progrès accomplis sur la voie de la démocratie, de la paix et de la stabilité au Kosovo et

dans la région tout entière.

A cet égard, la décision du Royaume d’Arab ie saoudite de reconnaître l’indépendance et

l’autodétermination du Kosovo ré pond aux aspirations d’une major ité écrasante de la population

kosovare, qui a clairement plébiscité l’indépend ance, dans l’exercice de son droit à disposer

d’elle-même. Elle confirme le désir du Royaume de rétablir la stabilité dans le pays tout en

témoignant de la volonté du Gouvernement saoudien de coopérer avec le reste de la communauté

internationale dans ses efforts pour ramener la st abilité dans la région et pour aider les Etats

concernés à faire prévaloir leurs droits, légitimes, à la stabilité politique ainsi qu’au développement

économique et social. Mon gouvernement exhorte la Cour, lorsqu’elle examinera la question

juridique spécifique qui lui est soumise, à ne pas perdre de vue le contexte plus général de la

situation, y compris ses aspects politiques, humains et économiques. Nous ne doutons pas que la

Cour tiendra compte des progrès importants qui ont été accomplis au Kosovo et de la stabilité qui y

règne à présent, de même que dans toute la région. - 31 -

Pour finir, je voudrais vous remercier, Monsieur le président et Messieurs de la Cour, pour

cette possibilité qui m’a été offerte de préciser le point de vue du Royaume d’Arabie saoudite au

sujet de la déclaration unilatérale d’indépendance de la République du Kosovo. Je vous remercie.

35 Le PRESIDEN:TJe remercie infinime nt E.xc. MA.bdullah Alshaghrood

pour l’exposé qu’il a présenté au nom de l’ Arabie saoudite. J’appelle maintenant

S. Exc. Mme Susana Ruiz Cerutti, qui exposera les vues de l’Argentine.

Ms RUIZ CERUTTI:

1. Mr. President, Members of the Court, it is an honour to take part in the oral phase of these

advisory proceedings in order to set forth the views of the Argentine Republic. My country

attaches fundamental importance to respect for international law in general, and for United Nations

resolutions in particular. The opinion which the Court renders on this occasion will have a definite

impact not only on the question of Kosovo, but also far beyond. Indeed, what is at issue here is the

place which international actors give to international law in the conduct of their relations, as well as

the ability of the United Nations to stand by its commitments and to assert its resolutions.

Argentina has every confidence in the role which the principal judicial organ of the United Nations

is called upon to play in these advisory proceedings , as guarantor of the authority of international

law.

2. Since the start of the Yugoslav crises, Ar gentina has participated in all the peacekeeping

and administrative operations decided on by th e United Nations in the former Yugoslavia,

including Kosovo, through UNMIK and KFOR. Taki ng part in these proceedings before the Court

in order to uphold respect for international law is also a way of paying tribute to the Argentine

nationals who have lost their lives while carrying out the tasks entrusted to them by the United

Nations in this area of the world. Argentina was also a member of the Security Council when

resolution 1244 was adopted, which is a key factor in the answer to be given to the question put by

the General Assembly, whose true scope my Gove rnment wishes to help clarify during these

proceedings, as one of those which voted in favour of that resolution.

3. This presentation will deal with seven main points:

A. the jurisdiction of the Court and whether it should be exercised; - 32 -

B. the scope of Security Council resolution 1244 and its infringement by the Unilateral

Declaration of Independence;

36 C. the violation of Serbia’s territorial integrity;

D. the impossibility of invoking the principle of self-determination to justify the Unilateral

Declaration;

E. the obligation to pursue the settlement of di sputes by peaceful means and the impossibility of

imposing a unilateral solution;

F. the sui generis character of Kosovo, which is a further reason for declaring the Unilateral

Declaration to be unlawful; and, finally,

G. the other arguments justifying secession, which are not admissible.

A. There are compelling reasons for the Court

to exercise its advisory jurisdiction

4. Some participants in these proceedings are explicitly requesting the Court not to render an

advisory opinion, arguing essentially that the questio n is not regulated by law, or that, even should

the Declaration prove unlawful, the pr esent situation would remain unchanged 3. In fact, those

participants are looking for the Court to answer the question as they want it to, without rendering

the opinion sought by the General Assembly. Other participants have put forward exactly the same

ideas in claiming that the Unilateral Declaration of Independence is not in br each of international

law. As we shall see in a moment, both the argument of judicial neutrality as regards the Unilateral

Declaration and that of the fait accompli are inadmissible.

5. For the rest, Mr.President, Members of the Court, it is clear that we are not in the

4
situation of Eastern Carelia , nor in the situation of the opinion on nuclear weapons that was

requested by the World Health Organization 5. There is consequently no need at all for us to dwell

on the matter. The three conditions for rendering the advisory opinion have clearly been fulfilled:

For technical reasons, the numbering of the footnotes begins at 3.
3
Albania, Written Statement (WS), pp. 27 and 30-37, paras. 47 and 54-70; France, WS, pp. 16 and 19, paras. 1.6
and 1.13.
Status of Eastern Carelia, Advisory Opinion, 1923, P.C.I.J., Series B, No. 5.

Legality of the Use by a State of Nuclear Weapons in Armed Conflict, Advisory Opinion, I.C.J. Reports 1996 (I),
p. 66. - 33 -

the Charter gives the Assembly the power to reque st an opinion, the question put is of a legal

nature, and it falls within the competence of the General Assembly.

6. There is no compelling reason to prevent the Court from exercising its jurisdiction. On

the contrary, it is absolutely essential that an authoritative voice such as the Court’s should provide

the legal guidance which the political organs so greatly need. Taking account of the particular
37

responsibility of the United Nations with regard to Kosovo, and of your jurisprudence pointing to

the limited use of the Court’s discretionary power in advisory proceedings 6, it is hardly conceivable

that the principal judicial organ of the United Na tions should decide not to answer the question put

to it by the General Assembly.

7. Argentina maintains that the question can be answered by examining the Unilateral

Declaration of independence in the light of Security Council resolution1244 and of the

fundamental principles of international law. In the opinion of my country, the Unilateral

Declaration is not in accordance with resolution1244; it breaches the obligation to respect the

territorial integrity of Serbia, the obligation to settle disputes peacefully and the principle of

non-intervention– by virtue of having been issued in co-ordination with foreign States.

Furthermore, the resolution makes no reference to the principle of self-determination as providing

any form of legal basis.

B. The Unilateral Declaration of Independence is in breach
of Security Council resolution 1244 (1999)

8. The Unilateral Declaration of Independence of 17 February 2008 is not in accordance with

resolution 1244 for a number of serious reasons:

⎯ first, because its authors, namely, the Provisi onal Institutions of Sel f-Government of Kosovo,

which were themselves created by the Un ited Nations and derive principally from

resolution 1244, have no power to issue such a declaration 7;

Certain Expenses of the United Nations (Article17, paragraph2, of the Charter), Advisory Opinion , I.C.J.
Reports 1962, p.155; Application for Review of Judgement No.333 of the United Nations Administrative Tribunal,
Advisory Opinion, I.C.J. Reports 1987, p.31, para.25;Western Sahara, Advisory Opinion , I.C.J. Reports 1975, p.21,
para. 23; Legality of the Threat or Use of Nuclear Weapons, Advisory Opinion, I.C.J. Reports 1996 (I), p. 235, para. 14;
Difference Relating to Immunity from Legal Process of a Special Rapporteur of the Commission on Human Rights,

Advisory Opinion, I.C.J. Reports 1999 (I), pp. 78-79, para. 29; Legal Consequences of the Construction of a Wall in the
Occupied Palestinian Territory, Advisory Opinion, I.C.J. Reports 2004, p. 157, para. 45.
Argentina, WS, pp. 26-27, paras. 61-64. - 34 -

⎯ second, because the Declaration, which is aime d at establishing a new sovereign State in a

territory subject to a régime put in place by a resolution adopted under ChapterVII of the

Charter, calls the very basis of that régime into question. Permitting a local administrative

organ created by the United Nations to do with complete impunity something which no

Member State would be allowed to do would re present a serious development. The Unilateral

38
Declaration thus undermines the very bases of th e competence of the organ which adopted the

resolution, and thereby the entire system of collective security;

⎯ third, because the Declaration purports to modi fy unilaterally the distribution of powers

between the international administration and the sovereign State, as set out in the resolution,

violating both the administrative jurisdiction of the United Nations and the sovereign

jurisdiction of Serbia;

⎯ fourth, and as a corollary, the Declaration is blatantly inconsistent with respect for the

territorial integrity of Serbia, a fundament al element of the régime put in place by

resolution 1244;

⎯ fifth, because the Declaration implies that the party which adopted it has unilaterally decided to

put an end to the political process aimed at determ ining the future status of Kosovo. However,

only the Security Council is able to take such a decision;

⎯ sixth, because the Declaration seeks to impose on Serbia and on the international community as

a whole a particular solution which, however , can only be the outcome of negotiations

conducted in good faith. If not even the Security Council is able to impose a solution, then the

provisional institutions of local government creat ed by the United Nations itself are certainly

not in a position to do so.

(a) The authors of the Declaration are the Provis ional Institutions of Self-Government, which

have received support from foreign States

9. Recognizing that the Unilateral Declaration is openly in breach of the law established by

the Charter, its authors and the States which support them have claimed that this Declaration was

not adopted by the provisional institutions. This is to deny the facts. However, it is a claim which

is easily refuted: the General Assembly itself h as determined who the authors are, in the question

put to the Court; they are the Provisional Institu tions of Self-Government. During the debates and - 35 -

after the vote on the request for an advisory opinion, no State ⎯ I repeat, no State ⎯ even

mentioned the matter. Why did the States which are now putting forward this argument not point

out to the General Assembly that the question wa s mistaken, and should not have referred to the

Provisional Institutions of Self-Government as being the authors? The answer is simple: because

they all knew that it was indeed those organs whic h had adopted the Declaration. No one at the
39

time even thought of this argument, which has been concocted during these proceedings.

10. The truth is reflected in the General As sembly debate on the request for an advisory

opinion, which included the following statement, for example: “in co-ordination with many of the

countries most closely involved in stabilizing th e Balkans, Kosovo’s Assembly declared Kosovo

8
independent on 17 February 2008” . To put it plainly, one of the participants in those proceedings

even took the trouble to specify which of the pr ovisional institutions had declared independence:

the Assembly. And he indicated that this had been done “in co-ordina tion” with a number of

foreign States. This admission, which could hard ly be any clearer, shows that the Declaration was

the result of co-ordinated action between the prov isional institutions and a number of States, which

supported them and gave them their backing even before the Declaration of Independence. Now, if

there is one point on which there is unanimous agreement in this context, it is the recognition that

encouraging secessionist movements prior to secess ion taking place constitut es interference in the

internal affairs of the State concerned 9. The States in question did not confine themselves to

expressing their views and explaining that, in thei r opinion, the best solution was independence.

No. They took specific action ⎯ they co-ordinated with the orig inators of secession in issuing the

Unilateral Declaration of Independence. There is absolutely nothing in resolution1244 which

permits States to support and actively promote secession in co-operation with a separatist

movement or province.

8Sir John Sawers (United Kingdom), 8 Oct. 2008, United Nations doc. A/63/PV.22, p. 3.
9
Sir Michael Wood, “The Principle of Non-Intervention in Contemporary International Law: Non-Interference in
a State's Internal Affairs Used to be a Rule of International Law: Is it StillSummary of the Chatham House
International Law discussion group meeting ofFe28ru2a0r0y7 , available at:
http://www.chathamhouse.org.uk/research/international_law/papers, p.7; Crawford, JameThe Creation of States in
International Law, 2nd edition, Oxford, Oxford University Press, 2006, pp.388-389; Crawford, JameState Practice
and International Law in Rela tion to Unilateral Secession , Report for the Attorney General of Canada, 19Feb.1997,
reproduced in Bayefsky, Anne (ed.), Self-determination in International Law: Quebec and Lessons Learned, The Hague,
Kluwer Law International, 2000, 31-61, p. 36. - 36 -

40 11. For the rest, it was demonstrated in the written phase that the General Assembly’s

conclusion completely tallied with the facts: it was the Provisional Institutions of Self-Government

which declared independence 1; and they did so quite unlawfully.

(b) The Security Council could not and did not limit respect for Serbia’s territorial integrity. On

the contrary, it strengthened it

12. Mr.President, Members of the Court, the States which support secession are invoking

other arguments that are blatantly inconsistent with resolution1244. Thus to avoid the simple

acknowledgment that the Declaration is not in accordance with resolution 1244, they claim that the

latter only protected Serbia’s territori al integrity during the interim period 11. Members of the

Court, Argentina participated in the adoption of resolution1244, and voted in favour of it. No

State claimed at that time that the territorial in tegrity of what was then the Federal Republic of

Yugoslavia was only temporary, or that the guaranteeing of it was limited to the interim period.

How could the explicit inclusion of that guara ntee, whose purpose was to provide assurances

regarding the territorial integrity of Yugoslavia when the latter agreed to submit part of its territory

to international administration, be interpreted in precisely the opposite way? Argentina would

simply never have voted for resolution 1244 if it had contained a clause of the kind which is now

being invoked by some participants. And lastly, Mr. President, it would quite simply not even be

within the power of the Security Council to limit th e principle of respect for the territorial integrity

of States.

(c) Resolution 1244 favours autonomy and makes no mention of secession

13. I now turn to the argument that resolution 1244 in no way prejudges the final outcome of

the political process aimed at determining the future status of Kosovo. This so-called “neutrality”

of resolution1244 is being put forwar d as an argument to justify secession 12. Resolution1244

points in the opposite direction, however, when it affirms in general terms ⎯ and not merely for
41
the interim period ⎯ “the commitment of all Member States to the sovereignty and territorial

1Argentina, Written Comments (WC), pp. 15-16, paras. 26-27.
11
United States of America, WC, p.31; Authors, Written ContributionI, para.9.05; against: Argentina, WC,
p. 20, para. 38.
1United Kingdom, WS, para. 6.6; Switzerland, WS, p. 14, para. 56. - 37 -

integrity of the Federal Republic of Yugoslavia” 13. Rather, the resolution favours substantial

autonomy within the framework of the State, and it paves the way for that autonomy by setting up

the Provisional Institutions of Self-Government. Not one word in resolution 1244 suggests that the

Security Council in some way authorized the Koso vo Albanians, or the Provisional Institutions of

Self-Government in question, unilaterally to decl are their independence. On the contrary, the

resolution speaks of a “final settlement” and a “political settlement”. But by definition, a unilateral

decision by one of the parties cannot constitute a “se ttlement”; rather, it is an aggravation of the

dispute. As long as there is no settlement of the “future” status, therefore, the “present” status

remains in place. That is the normal reading of the resolution. Any other reading would have

serious consequences for the stability of international relations.

14. But essentially, Mr.President, there is not ev en any reason for having this debate. For

supposing that resolution 1244 is neutral as regards th e future status of Kosovo, that would simply

mean that any settlement, including a poten tial agreement on independence, would be possible.

But certainly not an attempt to impose independence unilaterally.

15. The Security Council has never imposed on Serbia, without its consent, the ultimate loss

of its territory. And nor could it do so. The founding fathers of the United Nations never even

contemplated the possibility of the Member States giving the Security Council the power to sever,

or allow the severance of, the territory of a Member State.

16. Moreover, Mr.President, there is one essential feature that distinguishes the régime put

in place by resolution1244. Normally, resolu tions setting up peacekeeping operations or those

administering a territory establish fixed-term mandates which require a subsequent resolution in
42
order to be extended 14. In contrast, resolution1244 established an open-ended régime which

requires a further Security Council resolution for it to be terminated. This clearly shows that the

1[Not applicable to the English text.]
14
For example, the mandate of the United Nations operation in Cyprus was extended until 15 December 2009 by
resolution1873, 29May 2009, para.6; the mandate of the United Nations Stabilization Mission in Haiti was extended
until 15October 2010 by resolution1892 (2009), para.1; themandate of the United Nations Disengagement Observer
Force was renewed until 31 December 2009 by resolution187 5, 23June 2009, para.3; the mandate of the United
Nations Interim Force in Lebanon was extended until 31 A ugust 2010 by resolution 1884, 27 August 2009, para. 1; and
the mandate of the United Nations Integrated Mission in Timor-Leste was extended until 26February 2010 by
resolution1867, 26February 2009. The United Nations Mission of Support in East Timor was established by
resolution1410, 17May 2002, para.1, for an initial period of 12 months, and has been extended in turn by resolutions
1480, 19 May 2003, and 1573, 16 November 2004. - 38 -

Council wished to keep this régime in place as long as there was no majority for it to be altered. So

how could the provisional institutions then do that on their own initiative?

17. The conclusion is therefore unequivocal: the Unilateral Declaration of Independence is

blatantly inconsistent with resolution1244. But that is not all: this Declaration also conflicts, in

itself, with fundamental principles of international law.

C. The Unilateral Declaration of Independence
contravenes Serbia’s territorial integrity

18. The first of these principles is that of territorial integrity. Argentina welcomes the broad

consensus in these proceedings on the importance in international law of the principle of respect for

15
the territorial integrity of States . As explained in the written phase, this is a fundamental

principle of international law 16. However, some participants have been reluctant to recognize this

importance, their timid recognition of principl e then immediately coming up against another

assertion, namely, that respect for territorial integrity is an applicable rule solely in State-to-State

relations17. These same participants c onsider that the infra-State actors are therefore not bound to

18
respect the territorial integrity of States . But both Argentina and othe r participants have already

shown that the development of international la w has made respect for territorial integrity a

19
principle applicable to all international actors . As regards the situation in Bosnia and
43

Herzegovina, in Georgia, in Azerbaijan, in the Comoros or in Kosovo among others, the

international community has addressed all the parties ⎯ including, therefore, the secessionist

movements ⎯ reminding them of the obligation to respect the territorial integrity of the States

concerned 20. United Nations practice as regards Kosovo confirms this even before resolution 1244.

1Argentina, WS, pp.28-30, paras.69-75; Azerbaijan, WS, para.19; Bolivia, WS, p.1; China, WS, pp.2-3;

Cyprus, WS, paras.81-82; Egypt, WS, para s.26-29; Spain, WS, paras.25 and 27; Iran, WS, para.2.1; Serbia, WS,
pp. 28-30; Slovakia, WS, para. 3; Romania, WS, paras. 5.8-5.11; Russia, WS, paras. 76-78.
1Argentina, WS, p. 28, para. 69.

1United States of America, WS, p. 69; United Kingdom, WS, p. 86, para. 5.10.

1United Kingdom, WS, p. 86, para. 5.9; authors, Oral Statement of 1 December 2009, CR 2009/25 (Müller).
19
Argentina, WC, pp. 20-21, paras. 39-40.
20
For Georgia, cf. Security Council resolutions876 (1993), 896(1994) and 906(1994). For Azerbaijan,
SC resolutions 882 (1993), 853 (1993), 874 (1993) and 884 (1993). For the Comoros, cf. the Addis Ababa Agreement of
13 December 1997 in: 4 Documents d’actualité internationale, Paris, La documentation fr ançaise, 1998, p.143. For
Kosovo: resolutions 1160 (1998), 1199 (1998) and 1203 (1998). - 39 -

19. In fact, this discussion would even be acad emic in the circumstances of the present case:

the Provisional Institutions of Self-Government ⎯ a United Nations creation ⎯ must respect the

legal framework laid down by the international in strument in which they originate, and that

instrument confirms respect for the territorial integr ity of the sovereign State. The same applies to

all the participants in the political process initiate d under resolution 1244, be they “democratically

elected representatives”, political parties or others. To claim the contrary is to ignore the now

numerous Security Council resolutions governing inte rnal conflicts threatening international peace

and security. It is to condemn them to being ma ndatory only for the Stat es parties, whereas they

would become optional for non-State actors.

20. Mr. President, Members of the Court, at the very heart of the principle of respect for

territorial integrity lies the idea of providing a gua rantee against any dismemberment. By trying to

put an end to Serbian sovereignty over the province of Kosovo, the Provisional Institutions of

Self-Government have dealt a serious blow to Serbia’s territorial integrity.

D. The right to self-determination does not constitute a basis
for the Unilateral Declaration of Independence

21. During the written phase, many partic ipants referred to the principle of

self-determination, either to point out its irreleva nce, some of them even States having recognized

21
the alleged “Republic of Kosovo” , or to rely on it as justification for alleged compliance with the

44 international law of the Unilateral Declaration of Independence 22. Argentina has explained why, in

23
its view, this principle does not constitute a legal basis for the Declaration .

22. Mr. President, Members of the Court, your Court has had several occasions to recall the

importance of this fundamental principle in inte rnational relations, as well as the competencies of

the United Nations ⎯ in particular the General Assembly ⎯ in this area, recognizing that only

“peoples” in the international legal sense of the term and recognized as such, have the right of

self-determination. In your Advisory Opinion on the Western Sahara, your Court noted that

21
Albania, WC, p.34, para.61; United States of Ameri ca, WC, p.21; Norway, WC, p.3, para.8; United
Kingdom, WS, paras. 5.33, 6.65.
22Albania, WS, p.39, para.74; aut hors, Written Contribution II, pp.80-86 , paras.4.42-4.53; Netherlands, WC,

p. 5; Slovenia, WS, pp. 2-3; Switzerland, WS, p. 21, para. 77.
23Argentina, WS, p. 37, para. 95, and WC, pp. 26-27, paras. 59-61. - 40 -

“The validity of the principle of self-determination, defined as the need to pay
regard to the freely expressed will of peoples, is not affected by the fact that in certain
cases the General Assembly has dispensed with the requirement of consulting the

inhabitants of a given territory. Those instances were based either on the
consideration that a certain population did not constitute a ‘people’ entitled to
self-determination or on the conviction that a consultation was totally unnecessary, in

view of special circumstances.” ( Western Sahara, Advisory Opinion,
I.C.J. Reports 1975, p. 33, para. 59; emphasis added.) 24

23. In the present case, neither the Secu rity Council nor the General Assembly has

recognized the existence of a “Kosovar people” with the right to self-determination. Neither

explicitly nor implicitly. This is hardly surprising. The Peace Conference on the Former

Yugoslavia had treated the Kosovo Albanians as a minority, not as a people with the right to

self-determination. According to the Yugoslav Constitution of 1974, only the Republics had the

right to self-determination. Furthermore, the process of the dissolution of the Former Yugoslavia

25
was regarded by the Badinter Commission as completed on 29November 1991 . As we have

already explained in the written phase 26, even Rambouillet, with its reference to the “will of the

people”, does not authorize any recognition of the right to self-determination. Nor is this

45
authorized by the single reference in resolution 1244 to the fact that Rambouillet should be taken

into account 27. However, taking a non-binding text into account in no way means that this text has

become mandatory.

24. Certainly, the Albanian population in Kosovo enjoys substantial rights as an

internationally recognized minority and its interest s must be taken into account. Yet this does not

transform it into a decision-maker as regards the destiny of the territory in which it resides. As one

author has pointed out: “[s]elf-determination for peop les or groups within a State is to be achieved

by participation in the constitutional system and on the basis of respect for its territorial

integrity”28.

24
(French translation: «La validité du principe d’autodé termination, défini comme répondant à la nécessité de
respecter la volonté librement exprimée des peuples, n’est pas diminuée par le fait que dans certains cas l’Assemblée
générale n’a pas cru devoir exiger la cons ultation des habitants de tel ou tel territoire. Ces exceptions s’expliquent soit
par la considération qu’une certaine population ne constituait pas un «peuple» pouvant prétendre à disposer de lui même,
soit par la conviction qu’une consultation eût été sans nécessité aucune, en raison de circonstances spéciales.»)
25
Opinion No. 8 of 4 July 1992, reproduced in RGDIP, 1993, Vol. XCVII, p. 590.
26
Argentina, WS, p. 39, paras. 98-99.
2Resolution 1244 (1999), para. 11 (e).

2Crawford, James, The Creation of States in International Law, 2nd. ed., Oxford, Oxford University Press, 2006,
p. 417. - 41 -

25. Some participants have also turned to the controversial doctrine of “corrective

secession”, without, however, having proved its existence in international law. At this juncture, to

everything which has already been said and written, I would merely add that this doctrine is not

even based on the alleged aims it is supposed to take into account. As one author has stated:

“[o]nce a new State is created it has by force of circumstance a certain permanence.
This duration derives from the vocation of States. In contrast, a violation of minority

rights is a reflection of the attitude of a gove rnment, which is by definition temporary.
Consequently, there is no need to resort to rupture, designed to be of long duration, in
order to respond to a situation that is only temporary. A violation of minority rights

should not be addressed by creating peoples, but b29re-establishing their rights and by
guaranteeing these at the international level.”

26. Mr. President, Members of the Court, some participants have asked you not to rule on

30
self-determination . But in these proceedings, you are suppo sed to enlighten the requesting organ

on all the rules which have been relied on and which could prove relevant, either for confirming the

conformity with international law of the fact, act or situation being considered, or for excluding it
46
as a legal justification. This is what you did, for example, in two of your most recent advisory

31
opinions . The strict way the international community determines the existence of a people with

the right to self-determination, the fact that this principle is exercised by the whole population

within the territory of a sovereign State and th e obvious fact that the United Nations has not

recognized the existence of a “Kosovar people” with the right to self-determination mean that this

argument can be dismissed as justification for the Unilateral Declaration of Independence.

E. The obligation to settle disputes by peaceful means signifies that the parties

must refrain from taking unilateral steps and must pursue negotiations

27. Mr. President, Members of the Court, Argentina wishes to draw the Court’s attention to a

point of law which it considers particularly relevant. This is the obligation to settle disputes by

peaceful means. From the moment the question of the future status of Kosovo had been placed in

the international arena, the Security Counc il had decided on a political process aimed at

2Kohen, Marcelo, “Création d’Etats en droit international contemporain”, Cours euro-méditerranéens Bancaja

de droit international, Vol. VI, 2002, p. 596.
3Albania, WC, p.34, para.61; authors, Written Contribution I, p.157, para.8.38; United States of America,
WC, p. 21; Norway, WC, p. 3, para. 8; United Kingdom, WS, paras. 5.33 and 6.65.

3Legal Consequences of the Construction of a Wall in the Occupied Palestinian Territory, Advisory Opinion,
I.C.J. Reports 2004, p. 136; Legality of the Threat or Use of Nuclear Weapons, Advisory Opinion, I.C.J. Reports
1996 (I), p. 226 - 42 -

determining that status, the principal parties to the negotiation of that status had been clearly

defined and the negotiations under a mediator appointed by the Secretary-General had taken place,

there can be no doubt that the peaceful settlement of disputes, as a fundamental principle of

contemporary international law, is applicable to the parties. Moreover, it is not the first time that

the Security Council has put in place a negotiation process aimed at settling internal disputes with

an international aspect, subsequent to their char acterization as threats to international peace and

security 32. Examples of internal conflicts settled by in ternational arbitral bodies applying rules of

33
international law might also be mentioned .

28. In the case which concerns us, the Secr etary-General appointed a Special Envoy to
47

perform the task of mediator. Certain prejudices a nd the lack of the sort of imaginative solutions

found in various parts of the world and which would have enabled the two parties to obtain the

essence of their claim, are to be regretted: territorial sovereignty to Serbia and the maximum

conceivable self-governing powers for the province. We all know what followed, less than two

years after the start of the negotiations, the medi ator proposed independence, which was accepted

by one party and rejected by the other.

29. Members of the Court, a mediator is neither an arbitrator nor a judge. The special

envoy’s plan is never a mere proposal to the part ies, without binding effect. It is impossible to

34
consider it as the basis of the Unilateral Declaration of Independence, as some people do .

Moreover, it would not be the first time that a United Nations mediator sees his proposal rejected 35.

30. The attempt to derive advantage from a mediator’s failure to transform his proposal into

a kind of arbitral award and to unilaterally impo se it on the other party constitutes a serious failure

to comply with the obligations stemming from the pr inciple of the peaceful settlement of disputes.

32Security Council resolution367, 12Mar.1975; Security Council resolution874, 14Oct.1993; Security
Council resolution 1345, 21 Mar. 2001; Security Council resolution 1393, 31 Jan. 2002.
33
Dubai/Sharjah Arbitration, 91 ILR (1993); Federation of Bosnia and He rzegovina/Republica Srpska
(Arbitration for the Brcko Area), Final Award of 5 March 1999, 38 ILM 534; Newfoundland and Labrador/Nova Scotia
Arbitration, 128 ILR (2002), p.425; Government of the Sudan/Popular Army for the Liberation of Sudan (Abyei
Arbitration), Final Award of J2l009, avaible at: http//www.pca-cpa.org/upload/files/Abyei%
20Final%20Award.pdf .

34France, WS, paras. 2.65-2.67.
35
See: Report of the Secretary-General on his Mission of Good Offices in Cyprus, 1April 2003,
UNdoc.S/2003/398; Comments by Mr.Alvaro de Soto, De puty Secretary-General and Special Advisor of the
Secretary-General on Cyprus, Security Council, 4738th meeting, 10 April, UN doc. S/PV.4738, pp. 2-4. - 43 -

To gloss over such an infringement of this fundamental principle would set a dangerous precedent

with prejudicial consequences for implementing the obligation of the p eaceful settlement of

disputes. Article 7 or the Manila Declaration sets out the procedure to be followed by the parties in

the event of deadlock: “they shall continue to seek a peaceful solution and shall consult forthwith

on mutually-agreed means to settle the dispute peacefully” 3. A unilateral step such as the

Declaration of 17 February 2008 is the very antithesis of that procedure.

48 F. The sui generis character of the Kosovo case is yet another reason
to declare the Unilateral Declaration of Independence unlawful

31. Another way of seeking to avoid the obvious conclusion that the Unilateral Declaration is

unlawful is the assertion that the Kosovo case is sui generis and that it does not therefore constitute

37
a precedent . But what are the elements that make Kosovo sui generis? Certainly not the political

considerations put forward, but rather what aris es from the relevant United Nations resolutions.

The characteristic features of the Kosovo situa tion are Serbian sovereignty, an international

administration, local autonomy in the context of that administration and negotiations under

international auspices with a view to determining the future status of the territory. There is nothing

here which authorizes a unilateral declaration of independence. On the contrary, by placing the

Kosovo situation in the international arena, the internal separatist movement ⎯ and all the more so

the provisional institutions created by the United Nations itself ⎯ now have the duty to respect the

international rules of the game.

G. The other arguments put forward to justify
secession are not legally admissible

32. Allow me, Mr.President, if you will, to br iefly refer to other arguments marshalled to

justify secession, but which are not admissible. First, it should be noted that the events subsequent

to the Declaration of 17February 2008 can in no wise determine the legal characterization of the

latter or remedy its intrinsic unlawfulness. Serbia has not accepted the independence of its

3A/RES/37/10.

3Albania, WS, paras. 72 and 95; Germany, WS, pp. 26-27, WC, p. 6; Azerbaijan, WS, para. 17; Denmark, WS,
p.6; Estonia, WS, paras.2.1 and 2.2; Finland, WS, para.10; France, WS, paras.2.1 and 2.16-2.82; Ireland, WS,
para.33; Japan, WS, para.3; Latvia, WS, para.8; Luxembourg, WS, paras.5-8; Maldives, WS, p.1; Poland, WS,
paras.3.2 and 5.1-5.25; Czech Republic, WS, p.6; United Kingdom, WS , paras.0-.17-0.23, WC, paras.11-14;
Slovenia, WS, pp.2-3, WC, para.6. Contra: Argentina, WS, para.60, WC, paras.33-35; Cyprus, WS, para.77, WC,
paras. 28-29; Serbia, WC, paras. 124-170. - 44 -

province and recognition by minorities does not alte r the situation either, which legally remains

that established by resolution 1244 until the Council decides otherwise.

33. The argument that Kosovo’s Unilateral Declaration of Independence could not be

deemed unlawful inasmuch as that would also amount to condemning the “controversial”

38
emergence of certain States is at variance with the practice since the adoption of the United
49
Nations Charter. This practice clearly shows that, since 1945, all the new States were created

pursuant to the relevant United Nations resolutio ns, owing to the dissolution of the predecessor

State or in rare cases of separation, always with the consent of the parent State ⎯ a consent given

either in advance or later. The case of Kosovo does not come under any of these situations.

34. I now come to the attempt to impose the fa it accompli. Reference has been made to the

idea that a decade without Serbia being able to exercise its administration over the territory, and

with the international presence as well, has allegedly created an irreversible reality. Mr. President,

this scarcely veiled attempt to try and impose th e fait accompli is at variance with numerous

examples in which certain territorial situations have lasted much longer, yet without this making it

impossible to modify them later: think of South Africa’s control of Namibia for over seven

decades, of the century it took for the restitution of Hong Kong to China, of the quarter of a century

for EastTimor, and there are many others. The arguments of the fait accompli and the alleged

“irreversible realities” ⎯ which, moreover, are not irreversible ⎯ stem from a policy of force,

which in no wise constitutes a legal basis, and which deserves to be condemned for the contempt of

international law it represents.

Conclusion: it is time to return to respect for international legality in Kosovo

35. Mr. President, Members of the Court, no situation which is not in compliance with

international law can bring stability or peace or democracy or respect for human rights in the

Balkans or elsewhere. By definition, no unilatera l measure is likely to settle disputes. On the

contrary: contempt for international law and the attempt to impose unilateral measures undermine

the very bases of the international system.

38
United Kingdom, WS, p. 9, para. 0.15. - 45 -

36. Argentina regards it as expedient for your Co urt to consider the most fundamental legal

consequences which will ensue from your reply. Admittedly, unlike other questions asked in

advisory opinions, the current request for an opi nion does not ask the Court to establish “the legal

consequences” of a given situation. However, when exercising its authority to assess the question,

it would be no problem for the Court to provide so me general pointers to the legal significance of

its reply.

50 37. In the view of Argentina, the Court’s re ply will enable the Secretary-General and his

representative on the ground to perform their precise duties as laid down by resolution 1244; it will

also require the Provisional Institutions of Self-Government to perform their duties in their own

particular legal framework, thus ceasing to unilaterally to proclaim themselves organs of an

independent State which does not exist. Your reply will also enable Member States to adapt their

recognition policies to the requirements of internatio nal law; it will provide for a new start in the

negotiations on future status, without any pressur es, apart perhaps from the pressure on all parties

to scrupulously respect international law; it will ha ve a definite and beneficial influence on other

similar conflicts, thereby helping to do away with policies with double standards; it will also calm

down the internal situation of the neighbouring States, which are also composed of national

minorities— which, moreover, would receive quite the wrong message if independences were to

be regarded as pure matters of fact. No futu re will be solid if it is built on contempt for

fundamental norms and the flagrant violation of a Security Council resolution adopted under

Chapter VII of the Charter.

38. Mr. President, Members of the Court, Arge ntina does not adopt one legal position in one

situation and the exact opposite in another neverthe less similar situation; it is guided by its

determination to respect international law in all circumstances. Argentina condemns the

infringements of territorial integrity wherever they occur; it rejects legally unfounded calls for

self-determination wherever they are made; it firm ly supports the application of the principle of

self-determination everywhere where there is a people which has a right to it and is prevented from

exercising it. It is guided by this strong convi ction that Argentina has participated in these

proceedings and sought to make its contribution to them.

39. Mr. President, Members of the Court, thank you for your attention. - 46 -

Le PRESIDENT: Je remercie infini ment, S. Exc. Mme Susanna Cerutti. Voilà qui met un
51
terme à l’exposé et aux observations présentés oralem ent par l’Argentine, et qui conclut l’audience

d’aujourd’hui. La Cour se réunira de nouveau demain, à 10heures, pour entendre l’Autriche,

l’Azerbaïdjan et le Bélarus. L’audience est levée.

L’audience est levée à 12 h 25.

___________

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