MWP
CR 2004/5 (traduction)
CR 2004/5 (translation)
Mercredi 25 février 2004 à 10 heures
Wednesday 25 February 2004 at 10 a.m. - 2 -
14 Le PRESIDENT : Veuillez vous asseoir. L’audi ence est maintenant ouverte. M. Kooijmans
ne pourra être présent aujourd’hui à l’audience, pour des raisons qui ont été dûment communiquées
à la Cour.
La Cour siège ce matin pour entendre les partic ipants suivants sur la question dont elle est
saisie : le Soudan, la Ligue des Etats arabes, l’ Organisation de la Conférence islamique. Je donne
donc à présent la parole à S. Exc. M. Idris, ambassadeur du Soudan aux Pays-Bas.
M. IDRIS : Monsieur le président, Madame et Messieurs de la Cour :
1. C’est vraiment un grand plaisir et un honneur pour moi de prendre la parole devant cette
honorable Cour, au nom du Gouvernem ent soudanais, à l’occasion de la procédure orale dans une
affaire aussi importante. La ques tion sur laquelle un avis consulta tif est demandé à la Cour revêt
une importance extrême non seulement pour la Cour elle-même, en tant qu’organe judiciaire
principal des Nations Unies, mais pour le monde entier. La communauté d es nations, et tous ceux
qui aspirent à un monde fondé véritablement sur la ju stice et la primauté du droit, attendent de la
Cour qu’elle se prononce de façon décisive, s’acquittant ainsi de sa noble mission.
2. Nous tenons, dès l’abord, à nous associer aux exposés écrits qu’ont soumis à la Cour en
cette affaire la Ligue des Etats arabes et l’Organisation de la Conférence islamique, dont nous
reprenons entièrement à notre compte les arguments juridiques, les opinions et les conclusions.
Nous souscrivons également aux vues et aux argu ments juridiques exposés par la Palestine et par
d’autres délégations ici présentes.
3. Le fait d’avoir à prendre la parole à ce stade tardif de la procédure comporte à la fois des
avantages et des inconvénients. Les arguments que nous avions l’intention de développer l’ont
déjà été pour la plupart dans les communications précédentes, et nous demandons l’indulgence de
la Cour s’il nous faut dans certains cas les répé ter, mais en même temps cela nous permet de nous
concentrer plus facilement sur un petit nombre de qu estions. Ainsi, notre intervention se limitera à
trois points principaux :
a) la compétence de la Cour pour donner un av is consultatif comme suite à la demande de
l’Assemblée générale des Nations Unies; - 3 -
b) l’applicabilité du droit régissant l’occupation, et notamment des principes du droit international
humanitaire et du droit international relatif a ux droits de l’homme, à la question de la
construction du mur;
15 c) la licéité de la construction du mur et le point de savoir si cette action contrevient au droit
international et quelles en sont les conséquences.
Comme nous l’avons déjà brièvement indiqué dans notre exposé éc rit, le Gouvernement soudanais
est opposé à l’édification du mur que construit Isr aël dans le Territoire palestinien occupé, y
compris à l’intérieur et sur le pourtour de Jéru salem, parce que, en premier lieu, cette mesure
constitue une violation manifeste des principes géné raux du droit international et des obligations et
responsabilités incombant à une puissance occupante aux termes du droit international humanitaire.
Elle fait fi, en outre, de la volonté et du souhait des nations éprises de paix.
4. Nous estimons d’autre part que la C our devrait pouvoir affirmer sa compétence pour
rendre un avis consultatif non seulement sur la question des «conséquences juridiques de
l’édification du mur» mais aussi sur la violation du droit international que constitue cette action.
Nous montrerons à cet égard da ns le présent exposé oral que la Cour est «compétente» pour
rendre un avis consultatif et qu’il n’y a pas de raisons décisives l’empêchant de le faire.
Le Gouvernement soudanais est également d’avis que la construction du mur bafoue et viole
le droit international, qu’il s’agit d’un fait illicite devant immédiatement cesser, que le statu quo
ante doit être rétabli et que des réparations adéquates doivent être payées aux personnes lésées.
A. Sur la compétence de la Cour
5. En ce qui concerne la compétence de la Cour, l’article 92 de la Charte des Nations Unies a
désigné la Cour comme «organe judiciaire princi pal des NationsUnies», et le paragraphe1 de
l’article96 dispose que l’Assemblée générale ou le Conseil de sécurité peut demander à la Cour
internationale de Justice un avis consultatif sur toute question juridique. Le Statut de la Cour
(art. 65) dispose, en outre, que la Cour peut donne r un avis consultatif sur toute question juridique,
à la demande de tout organe ou institution qui aura été autorisé par la Charte des Nations Unies ou
conformément à ses dispositions à demander cet avis. Ces articles n’établissent aucune limitation, - 4 -
condition ou restriction, dès lors que l’avis demandé par ces organes porte sur une question de
droit.
6. L’Assemblée générale, ainsi autorisée par la Charte des NationsUnies, a demandé à la
Cour, par sa résolution ES-10/14 du 8 décembre 2003, de rendre d’urgence un avis consultatif sur
la question suivante :
16 «Quelles sont les conséquences en droit de l’édification du mur qu’Israël,
puissance occupante, est en train de construire dans le Territoire palestinien occupé, y
compris à l’intérieur et sur le pourtour de Jérusalem-Est, selon ce qui est exposé dans
le rapport du Secrétaire général, compte tenu des règles et des principes du droit
international, notamment la quatrième convention de Genève de1949, et les
résolutions consacrées à la question par le Conseil de sécurité et l’Assemblée
générale ?»
Cette demande émane d’un organe (l’Assemblée gé nérale des Nations Unies) dûment autorisé aux
termes de la Charte des Nations Unies et du Statut de la Cour, et porte sur une question de droit (les
conséquences juridiques de la construction du mur au regard des règles et des principes du droit
international). Les arguments en sens contraire ne sont pas valables, comme la Cour elle-même l’a
depuis longtemps démontré. Dans ses avis consu ltatifs du 28mai 1948 et du 3mars1950 sur les
Conditions de l’admission d’un Etat comme Membre des NationsUnies , la Cour a déclaré qu’elle
pouvait donner un avis sur toute question juridiqu e et qu’il n’y avait pas de disposition lui
interdisant d’exercer «une fonc tion d’interprétation qui relève de l’exercice normal de ses
attributions judiciaires».
La Cour a dit en outre dans son avis consu ltatif du 3 mars 1950 qu’elle ne pouvait attribuer
un caractère politique à une demande, «libellée en termes abstraits, qui, en lui déférant
l’interprétation d’un texte conventionnel, l’inv it[ait] à remplir une fonction essentiellement
judiciaire». Il est d’ailleurs notoire que la majorité des problèmes de droit international
s’inscrivent, en règle générale, dans un contexte plus large de nature politique.
7. Dans son avis consultatif du 21 juin 1971 sur les Conséquences juridiques pour les Etats
de la présence continue de l’Afrique du Sud en Namibie , le président de la Cour a déclaré, au sujet
des pressions politiques alléguées, et s’agissant de l’ opportunité judiciaire d’un tel avis, que la
Cour, en sa qualité d’organe judiciaire principal des Nations Unies, «ne se prononce que sur la base
du droit, indépendamment de toute influence ou de toute intervention de la part de quiconque». - 5 -
8. La Cour a de nouveau affirmé sa comp étence en octobre1975 à propos de l’avis
consultatif demandé dans l’affaire du Sahara occidental. La Cour a déclaré :
«Aux termes de l’article 65, paragraphe1, du Statut , la Cour peut donner un
avis consultatif sur toute question juridique, à la demande de tout organe ou institution
qui aura été autorisé…à demander cet avis. La présente requête a été formulée
conformément à l’article96, paragraphe1, de la Charte des NationsUnies, en vertu
duquel l’Assemblée générale pe ut demander à la Cour un avis consultatif sur toute
question juridique. Les questions soumises pa r l’Assemblée générale ont été libellées
en termes juridiques et soulèvent des pr oblèmes de droit in ternational… Ces
questions … ont en principe un caractère juridique… [même si elles présentent aussi
des aspects de fait, et même si la Cour n’ est pas appelée à se prononcer sur des droits
et des obligations existants]. [E]n c onséquence [la Cour] est compétente…pour
connaître de la présente requête.»
La Cour a également dit, dans son av is consultatif du 20 décembre 1980 sur l ’Interprétation
de l’accord du 25 mars 1951 entre l’OMS et l’Egypte , que «[si] une question formulée dans une
requête relève à d’autres égards de l’exercice normal de sa juridiction, la Cour n’a pas à traiter des
17 mobiles qui ont pu inspirer la requête». La Cour a confirmé cette position dans son avis consultatif
du 8 juillet 1996 sur l’Utilisation des armes nucléaires.
9. Ainsi, la position constante de la Cour a été qu’en tant qu’organe judiciaire principal des
NationsUnies, elle doit s’acquitter de la fonctio n d’interprétation relevant de ses attributions
judiciaires et ne peut refuser de rendre un avis que dans les cas où il existe pour cela des raisons
décisives et où la question n’est pas une question de droit. D’ailleurs, la Cour n’a jamais manqué
de se déclarer compétente pour rendre un avis cons ultatif qui lui était demandé par des organes de
l’Organisation des NationsUnies dûment autorisés à cet effet, sur des questions relevant de leur
compétence. A cet égard, la Cour a résumé sa pra tique en la matière à l’occasion de l’affaire de la
Licéité de la menace ou de l’emploi d’armes nucléaires , en1996, quand elle a déclaré:
«Conformément à [la] jurisprudence constante [d e la Cour], seules des «raisons décisives»
pourraient l’…inciter [à un tel refus]… Aucun re fus, fondé sur le pouvoir discrétionnaire de la
Cour, de donner suite à une demande d’avis consulta tif n’a été enregistré dans l’histoire de la
présente Cour.»
B. Sur l’applicabilité du droit international à l’action d’Israël
10. Monsieur le président, Madame et Messieu rs de la Cour, nous estimons qu’une fois
établie la compétence de la Cour pour connaîtr e de la requête, la question des conséquences - 6 -
juridiques de la construction du mur au regard du droit international implique l’examen d’un
certain nombre de points. Nous nous bornerons ici à en indiquer quelques-uns.
11. L’occupation par Israël du territoire pales tinien et d’autres territoires arabes est un point
incontestable, qu’établissent les résolutions per tinentes du Conseil de sécurité et de l’Assemblée
générale des NationsUnies. Ainsi, la résolu tion242 (1967) du Conseil de sécurité parlait des
«territoires occupés lors du récent conflit». La formule «Territoire palestinien occupé» a été
utilisée dans de nombreuses résolutions, notamme nt les résolutions récentes de l’Assemblée
générale, dont la résolutionES- 10/14 par laquelle l’Assemblée a demandé à la Cour de rendre
d’urgence un avis consultatif. Le Comité intern ational de la Croix-Rouge, dans une déclaration
faite devant la conférence de hautes parties c ontractantes à la quatrième convention de Genève,
tenue à Genève le 5 décembre 2001, a dit qu’il avait toujours «affirmé l’applicabilité de jure de la
quatrième convention de Genève aux territoires oc cupés depuis 1967 par l’Etat d’Israël, y compris
Jérusalem-Est». Il a ajouté :
18 «Cette convention, qui a été ratifiée par Israël en 1951, reste pleinement
applicable et pertinente dans le contexte de violence actuel. En sa qualité de puissance
occupante, Israël est également lié par d’ autres règles de droit coutumier relatives à
l’occupation, qui sont énoncées dans le règlement annexé à la convention de La Haye
du 18 octobre 1907.»
Les hautes parties contractantes ont affirmé à deux reprises l’applicabilité de la quatrième
convention de Genève au Territoir e palestinien occupé, lors des sessions extraordinaires tenues à
Genève le 15 juillet 1999 et le 5 décembre 2001. L’Assemblée générale des Nations Unies en a fait
autant dans sa résolution 58/155 du 15 juillet 2003.
12. Le rapporteur spécial de la Commission des droits de l’homme sur la situation des droits
de l’homme dans les territoires pa lestiniens occupés par Israël depuis 1967 — tel est son titre — a
cité, dans son rapport du 29 août 2002 (A/57/366), une déclaration faite par le Secrétaire général de
l’ONU devant le Conseil de sécurité le 12 mars 2002, dans laquelle il demandait à Israël de mettre
fin à son «occupation illégale» du territoire palestinien.
Interrogé sur la raison pour la quelle il utilisait le terme «illég al», le Secrét aire général a
répondu que le Conseil de sécurité et l’Assemblée gé nérale avaient tous deux déclaré en diverses
occasions que certains aspects de l’occupation isr aélienne étaient illégaux. Les observations du
Secrétaire général — a déclaré le rapporteur spécial — mettent en relief le fait que c’est au regard - 7 -
du droit applicable en matière d’occupation qu’il convient de juger la conduite d’Israël et que
nombre de ses pratiques portent atteinte aux principes fondamentaux de ce droit.
13. Il découle de l’applicabilité des dispositions de la convention et autres règles coutumières
du droit international humanitaire que la puissance o ccupante est tenue de s’abstenir de certains
actes qui contreviennent à ces règles. L’article pr emier commun aux conventions de Genève fait
obligation aux hautes parties contractantes de resp ecter et faire respecter la convention en toutes
circonstances. La construction du mur, ainsi qu’il est dit dans la résolutionES-10/13 où
l’Assemblée générale exigeait qu’Israël arrête cet te construction et revienne sur ce projet, est
contraire aux dispositions pertinentes du droit intern ational. De plus, la construction du mur et le
régime qui s’y rattache se traduisent par la confis cation de terres, de lourdes sujétions pour la
population du territoire occupé, y compris des déplacements de population, d’autres effets
démographiques et des restrictions indues à la liber té de circulation et à la mobilité des personnes,
ainsi qu’il est dit dans le rapport présenté le 24 novembre 2003 par le Secrétaire général de l’ONU
en application de la résolutionES-10/13 de l’A ssemblée générale (A/ES-10/248), sans parler du
préjudice au statut territorial, tout ceci en violation du droit international.
19 14. Le mur viole aussi le droit international relatif aux droits de l’ homme. Il inflige des
souffrances indues à la population palestinienne soumise à l’occupation et porte atteinte à ses droits
de l’homme fondamentaux tels qu’ ils sont énoncés dans les deux pactes relatifs aux droits de
l’homme et d’autres instruments pertinents, qui lient Israël. Ce fait est clairement établi par le
rapport du Secrétaire général. La Cour peut s’ap puyer, pour rendre son avis, sur l’analyse des faits
présentée par le Secrétaire général, ainsi qu’il ressort du libellé de la requête de l’Assemblée
générale. Le mur a une incidence sur la vie de quelque dix-sept mille Palestiniens en Cisjordanie et
deux cent vingt mille à Jérusalem-Est. Comme l’ a dit le Secrétaire général, «[nombre de]
Palestiniens vivront dans des enclaves, c’est-à-dir e des zones où les agglomérations et les terrains
sont presque totalement encerclés. Le tracé projeté incorpore près de trois cent vingt mille colons,
dont cent soixante-dix-huit mille environ à Jérusalem-Est occupée.»
Le rapport du Secrétaire général met aussi en lumière les incidences humanitaires et
socio-économiques du mur : «Il ressort de récents rapports de la Banque mondiale et de l’ONU que
la construction de la barrière a considérablement accru ces [dommages] dans les communautés - 8 -
situées le long de son tracé, essentiellement à cause de la perte de terres, d’emplois et de marchés
ou des grandes restrictions à l’accès à ces ressources.»
Le mur, selon les informations fournies dans le rapport, restreint la liberté de mouvement de
la population, isole les villes, entraîne une dé gradation des services de santé, ampute la production
agricole et aggrave l’insécurité alimentaire dans la région, autant de conséquences qui constituent
des violations du droit relatif aux droits de l’homme.
C. Sur les conséquences juridiques du mur
15. La construction ininterrompue du mur et le tracé qu’il suit défient la volonté de la
communauté internationale. Le Secrétaire géné ral de l’Organisation des NationsUnies indique
clairement dans son rapport qu’Israël ne s’est pas conformé à l’exigence, formulée par l’Assemblée
générale dans sa résolution ES-10/13, qu’il arrête la construction de la ba rrière ou revienne sur ce
projet. Le Secrétaire général fait l’observation suivante: «Compte tenu de la demande formulée
par l’Assemblée générale dans sa résolution ES-10/13, je suis parvenu à la conclusion qu’Israël ne
se conforme pas à la demande de l’Assemblée générale tendant à ce qu’il «arrête la construction du
mur dans le Territoire palestinien occupé … et revienne sur ce projet».»
Dans sa récente déclaration à la Cour du 19ja nvier2004, le Secrétaire général conclut en
outre que l’actualisation du rappor t «fait apparaître que le Gouvern ement israélien a poursuivi la
er
construction de la barrière selon le tracé approuvé par le cabinet israélien le 1 octobre 2003 dans
sa décision 883» [traduction du Greffe].
20 16. Le mur construit en Territoire palestinie n occupé fait obstacle à l’action menée en vue
d’arriver à un règlement définitif du problème is raélo-palestinien, qui continue de menacer
gravement la paix et la sécurité internationales.
Selon les conclusions du rapport établi par le S ecrétaire général de l’ONU en application de
la résolutionES-10/13 de l’Assemb lée générale, le mu r constitue un sujet de grave préoccupation
et comporte des conséquences pour l’avenir :
«En plein milieu du processus de la feui lle de route, à un moment où toutes les
parties devraient faire, de bonne foi, des gestes propres à renforcer la confiance,
l’édification de la barrière en Cisjordani e ne peut être considérée à cet égard que
comme un acte profondément contraire au but recherché. Le fait que l’essentiel de cet - 9 -
édifice se trouve sur des terres palestiniennes occupées pourrait nuire aux négociations
futures.»
Le mur, par conséquent, est c ontraire au droit international ⎯étant construit en territoire
occupé ⎯ et ne peut être considéré que comme visant à préjuger et compliquer le règlement
définitif. Dans son rapport, le Secrétaire général conclut aussi que le mur «pourrait porter
préjudice aux perspectives de paix à long terme, en rendant plus difficile la création d’un Etat
palestinien indépendant, viable et continu, [et] … accroît les souffrances du peuple palestinien».
Nous soutenons donc qu’un av is consultatif par lequel la Cour se prononcerait sur les
conséquences juridiques de la construction du mur se rvira la cause de la paix en faisant la lumière
sur le droit et en décourageant les actions unilatérales préjudiciables.
17. Aux termes de l’article 12 du projet d’articl es sur la responsabilité de l’Etat adopté par la
Commission du droit international en 2001, et dont l’Assemblée générale des Nations Unies a pris
acte dans sa résolution 56/83 du 12 décembre 2001, il y a violation d’une obligation internationale
par un Etat lorsqu’un fait dudit Etat n’est pas confor me à ce qui est requis de lui en vertu de cette
obligation, quelle que soit l’origine ou la nature de celle-ci.
La construction du mur doit être considér ée comme un fait internationalement illicite, car
elle constitue une violation du droit international au sens de ces articles.
Il en résulte qu’Israël demeure assujetti au devoir d’exécuter l’obligation violée, ce qui
implique la cessation et la non-répétition du fait illicite, la restitution et la réparation.
18. Par ailleurs, la construction du mur et le tracé prévu ⎯qui s’écarte de la ligne
d’armistice et ampute de quelque 16,6% le territoir e de la Cisjordanie, ainsi que le signale le
Secrétaire général de l’ONU ⎯ constituent manifestement une violation du statut de la Palestine et
21 une atteinte au droit du peuple pa lestinien à disposer de lui-même. Ils contreviennent aussi à un
principe fondamental du droit international qui est l’inadmissibilité de l’acquisition de territoire par
la force. La Cour, en sa qualité de gardienne du droit international, a un devoir de conseil en cas de
violation de ce droit. Ainsi qu’elle l’a souligné dans l’avis consultatif rendu en juin1971 en
l’affaire des Conséquences juridiques pour les Etats de la présence continue de l’Afrique du Sud en
Namibie, «une situation … illégale … ne peut rester sans conséquence». La construction du mur
par Israël, si l’on n’y met pas un frein, entraîne des conséquences indésirables. - 10 -
19. Monsieur le président, Madame et Messieurs de la Cour, en conclusion, le Gouvernement
soudanais est d’avis :
a) que la Cour est compétente pour rendre un avis consultatif sur la question juridique que lui a
posée l’Assemblée générale des Nations Unies, et qu’aucune raison décisive ne l’en empêche;
b) que la construction du mur par Israël dans le Te rritoire palestinien occupé est contraire au droit
international, et qu’Israël doit se conformer à la résolutionES-10/13 de l’Assemblée générale
du 21octobre2003, en arrêtant la construction du mur dans le Territoire palestinien occupé, y
compris à l’intérieur et sur le pourtour de Jérusal em-Est, et en revenant sur ce projet; Israël est
aussi tenu à réparation adéquate des dommages causés par la construction du mur.
Merci, Monsieur le président.
Le PRESIDENT : Merci, Monsieur l’ambassadeur. Je donne à présent la parole à M. Bothe,
qui s’exprimera au nom de la Ligue des Etats arabes.
M.BOTHE: Monsieur le président, Madame et Messieurs de la Cour, c’est un grand
honneur pour moi de me présenter aujourd’hui devant la Cour au nom de la Ligue des Etats arabes.
La présence du Secrétaire général de la Li gue des Etats arabes à l’ouverture des audiences
témoigne de l’importance que la Ligue leur a ttache. Dans un communiqué de presse diffusé lundi,
le Secrétaire général a déclaré :
«La construction de ce mur est une tacti que pernicieuse sans précédent, tendant
à perturber de nombreuses situations de fa it et de droit établies et à susciter de
nouvelles incertitudes. Cette action unilaté rale engloutit 40% du territoire de la
Cisjordanie.
22 Les effets du mur sont nombreux; mais ils sont tous négatifs. Le mur constitue
un affront au droit international, il in flige de nouvelles souffrances au peuple
palestinien et préjuge de l’avenir de tout règlement de la question de Palestine.
Par conséquent, la Cour internationale de Justice ne peut faire moins que de
nous dire quelles conséquences ce mur peut avoir en droit.
Nous espérons en tirer un enseignement sur la manière de remédier à cette
situation douloureuse.
Le mur qui est en construction dans l es territoires palestiniens occupés est un
facteur de division, conduit à la discri mination, traduit la pire des politiques
d’expansion et réduit à néant les perspectives réelles d’une paix juste et durable. - 11 -
Tout cela ne nous ramène-t-il pas à l’épisode du mur de Berlin, qui fut
surnommé le «mur de la honte» ?» [Traduction du Greffe.]
La Ligue des Etats arabes a déjà eu l’o ccasion de communiquer à la Cour, dans son exposé
écrit, des informations relatives à la requête pour av is consultatif. Elle a conclu que la Cour a
compétence et qu’il n’y a aucune raison décisive pour qu’elle s’abstienne de rendre l’avis demandé.
Sur le fond, elle a dit que la construction du mur constitue un fa it internationalement illicite, car
elle viole un certain nombre de règles et princip es fondamentaux du droit international. Ces faits
illicites engagent la responsabilité internationale de l’Etat d’Israël.
Aujourd’hui, la Ligue des Etats arabes tient à répondre à certaines objections et allégations
qui ont été formulées dans le cours de la procédure actuelle.
Monsieur le président, Madame et Messieurs de la Cour, la question qui nous occupe ne date
pas d’hier. La question de Palestine est le problème le plus ancien qui soit encore à l’ordre du jour
de l’Organisation des NationsUnies. Il convient de rappeler que la premiè re affaire qui ait été
portée devant la Cour concernait le comte Bern adotte, qui, au service de l’ONU, avait tenté de
jouer le rôle de médiateur entre les parties et av ait été tué alors qu’il Œuvrait pour la cause de la
paix. En toile de fond de cette affaire, il y avait l’obligation de réparer incombant à Israël à la suite
de cette perte tragique. Mais la Cour n’a jamais eu, jusqu’à présent, l’occasion de se prononcer sur
certains aspects de fond du problème. La présente requête est signe que l’Assemblée générale a
reconnu l’importance du rôle du droit dans le règlement de ce problème ⎯ reconnaissance qui s’est
heurtée à une résistance, comme le montre l’attitu de de certains Etats à l’égard de la procédure
actuelle. La communauté internationale doit rele ver ce défi avec fermeté. Cette déclaration,
Monsieur le président, Madame et Messieurs de la Cour, se veut une contribution à l’action menée
à cet effet.
23 Cette remise en cause du rôle du droit dans la question de Palestine revêt deux formes
distinctes. Elle se présente d’abord sous la fo rme d’objections procédurales au prononcé d’un avis
par la Cour. Au niveau du fond, le refus de reconnaître le rôle et la primauté du droit s’exprime par
une démarche qui néglige l’équilibre établi par le dr oit international entre les différents intérêts en
jeu, ne faisant valoir qu’un seul intérêt, l’intérê t d’un Etat, Israël, la puissance occupante, et faisant
abstraction de tous les autres intérêts de la communauté internationale et des victimes du conflit - 12 -
⎯ce qui, nous allons le montrer, traduit une conception fondamentalement erronée du droit
international.
Nous commencerons donc par aborder certain s aspects procéduraux importants, puis nous
ferons la synthèse des principaux points de fond.
On ne peut contester sérieusement la co mpétence qu’avait l’Assemblée générale pour
soumettre la demande, ni celle qu’a la Cour pour répondre à la question qui lui est posée. Mais, les
auteurs de certains exposés écrits insistent beauc oup sur la question de l’ opportunité judiciaire
(judicial propriety), se demandant s’il est bien conforme à la fonction de la Cour que celle-ci se
prononce sur cette question juridique. Nous avons beaucoup de sympathie pour la position qu’a
exprimée par exemple la République française, consis tant à s’en remettre sur ce point à la sagesse
de la Cour. Nous avons certes toute confiance en cette sagesse, mais nous pensons que certains des
arguments avancés sous couvert de souci d’opportunité judiciaire s ont d’une nature telle qu’ils
appellent une réponse énergique.
En réalité, ce n’est pas l’avis consultatif demandé à la Cour qui risque de porter atteinte à la
fonction judiciaire de la Cour, M onsieur le président, Madame et Messieurs de la Cour, c’est la
campagne de relations publiques menée à l’extérieur de ce prétoire, qui vise à intimider la Cour et à
rabaisser son rôle, et du même coup celui du droit international.
La Cour doit rendre l’avis demandé, car il n’y a pa s de raison décisive pour qu’elle refuse de
donner suite à la requête
Je voudrais analyser certaines objections contestant l’opportunité d’un prononcé de la Cour.
L’argument du «différend pendant» ou du «défaut de consentement»
Israël et quelques autres Etats ont prétendu que la requête concerne une affaire contentieuse
pour laquelle Israël n’a pas consenti à la compétence de la Cour, et qu’il n’est donc pas conforme à
24 sa fonction qu’elle rende l’avis demandé car cela re viendrait à tourner le principe selon lequel un
Etat n’est pas obligé de permettre qu’un différend auquel il est partie soit soumis à la Cour sans son
consentement 1.
1
Sahara occidental, avis consultatif, C.I.J. Recueil 1975, p. 25, par. 32. - 13 -
Or, une telle conception de l’opportunité judici aire ne peut s’appliquer que dans le cas d’un
différend ayant pour objet essentiel une question purement bilatérale entre deux Etats, surgi
indépendamment de l’Organisation des Nations Unies. Le problème sur lequel la Cour est priée de
se prononcer est-il donc un différend de caractère essentiellement bilatéral ?
La réponse est non. La Cour doit se prononcer sur la question dont elle est saisie en
considérant les termes dans lesquels elle est fo rmulée. L’objet de la question est d’éclairer
l’Assemblée générale sur les conséquences en droit d’une circonstance particulière : la construction
du mur.
Israël ne saurait objecter valablement à l’exercice par l’Assemblée générale des pouvoirs qui
lui sont reconnus de se pencher et demander un av is sur les violations des principes fondamentaux
de la Charte — notamment le droit des peuples à disposer d’eux-mêmes ⎯, les violations du droit
international humanitaire ⎯faisant obligation à toutes les par ties aux conventions de Genève de
«respecter et … faire respecter» leurs dispositions ⎯ et les violations du droit relatif aux droits de
l’homme fondamentaux, qui tous établissent des obligations erga omnes, «due[s] à la communauté
internationale dans son ensemble» 2. En outre, bon nombre des règles violées par Israël sont des
normes impératives du droit international (jus cogens).
Les autres Etats ⎯et pas seulement la Palestine ⎯ peuvent donc «prendre des mesures
licites» à l’encontre d’Israël «afin d’obtenir la cessa tion de la violation ainsi que la réparation dans
3
l’intérêt de l’Etat lésé ou des bé néficiaires de l’obligation violée» ⎯ je cite le projet d’articles de
la Commission du droit international; en l’occurrence, il s’agit de l’«intérêt» de la Palestine et des
Palestiniens concernés par le mur.
Certes, il existe en l’espèce une controver se, mais elle trouve son origine dans une
controverse plus large ayant surgi au sein de la Société des Nations, dont a hérité ensuite
l’Organisation des NationsUnies et qui demeure aujourd’hui sous sa r esponsabilité. C’est une
controverse sur des questions auxquelles l’Assemblée générale s’intéresse directement. Il existe
une multitude de résolutions des NationsUnies concernant l’occupation illicite par Israël des
2
Commission du droit international, projet d’articles sur la responsabilité de l’Etat, art. 48, par. 1 b).
3Ibid., art. 54. - 14 -
25 territoires où le mur est en construction. La c ontroverse n’est pas née indépendamment, dans le
4
cadre de relations bilatérales .
La requête a pour objet d’obtenir de la Cour un avis que l’Assemblée générale juge utile
pour s’acquitter convenablement de ses fonctions à l’égard de la Palestine. Les questions
juridiques que soulève la requête se situent dans un cadre de référence plus large que le règlement
d’un différend bilatéral particulier. Cette re quête embrasse toute une gamme de questions se
rapportant au fonctionnement de l’Organisation d es NationsUnies et de l’ordre juridique en
général.
Pourquoi serait-il «inopportun», au regard de sa fonction, que la Cour examine ces
questions ?
La prétendue «absence d’éléments essentiels» relatifs au contexte factuel
En prétendant qu’il n’allait pas traiter du fond ⎯ alors qu’en réalité il l’a fait ⎯, Israël tente
d’induire la Cour en erreur pour l’amener à refu ser de donner suite à la requête parce qu’elle ne
serait pas en possession des éléments de fait et de droit indispensables pour apprécier
convenablement le fond de la requête, appréciation à laquelle il se vante de pouvoir seul contribuer.
La Cour fonderait en conséquen ce ses conclusions sur des faits insuffisamment établis, et donc
relevant de la «spéculation».
Cet argument est lui-même en soi d’ordre sp éculatif. Examiner des situations où les faits
sont controversés relève de la fonction judiciaire. Etablir quels sont les faits pertinents pour arriver
à une conclusion certaine sur la situation juridique ⎯ en l’espèce sur la question de savoir si le mur
viole certaines règles de droit internati onal ou si sa construction est justifiée ⎯ relève de la
fonction judiciaire.
En fait, la Cour dispose déjà d’assez d’inform ations et d’éléments de preuve émanant de
sources indépendantes comme l’Organisation des NationsUnies, ses organes et ses rapporteurs et
d’autres institutions internationales, ainsi que d es Etats. Il n’est pas nécessaire que de telles
informations lui parviennent d’une source unique, Israël. Au demeurant, Israël a, lui aussi, versé au
dossier quantité d’informations et d’éléments de preuve par le moyen de ses déclarations officielles
4
Cf. Sahara occidental, avis consultatif, C.I.J. Recueil 1975, p. 25, par. 34. - 15 -
et de son exposé écrit, y compris les annexes, dont la Cour fera sans aucun doute usage. Israël ne
peut à présent venir alléguer que la Cour n’a pas connaissance de faits qu’en d’autres circonstances
il aurait produits. Il a été invité à le faire, mais il a choisi de ne pas en produire davantage. Il est
assurément exclu qu’un Etat refusant de communiquer à la Cour certaines informations puisse
26 invoquer une prétendue insuffisance d’informations pour contester l’opportunité judiciaire d’un
prononcé de la Cour sur la question.
D’ailleurs, il n’y a pas véritablement d’incertit ude sur les faits. Le seul point de désaccord
est sans doute celui de savoir quand et pendant combien de temps les portes du mur sont ouvertes !
L’incertitude sur les faits rend-elle donc «inoppor tun» le prononcé par la Cour de l’avis
demandé ?
La prétendue violation de l’équité procédurale
Israël affirme que la manière dont la question est posée viole les principes de l’équité dans la
procédure, et prétend que la question, arbitrai rement, ne retient qu’un aspect particulier du
problème, en négligeant les autres. Cela, sel on Israël, soulèverait une question fondamentale
d’équité procédurale.
On pourrait tout simplement répondre qu’il appa rtient à l’Assemblée générale de choisir la
question sur laquelle elle souhaite a voir l’avis de la Cour et que la Cour n’a pas à se livrer après
coup à des conjectures à ce sujet. Mais tout l’ar gument tend à déformer de façon grossière la
réalité. La principale préoccupation d’Israël , à savoir la menace alléguée à la sécurité, a
indubitablement été exposée à la Cour. Israël a eu amplement l’occasion de faire valoir cet
argument et, à toutes fins pratiques, il l’a fait da ns son exposé écrit. Il aurait sans doute été utile
qu’Israël développe devant la Cour des arguments pl us concrets. Mais Israël ne peut certainement
pas prétendre qu’il n’a pas bénéficié du respect de l’équité dans cette procédure.
Les exigences d’équité procédurale ne saurai ent rendre inopportun le prononcé d’un avis par
la Cour.
La prétendue inutilité
D’aucuns ont prétendu, se fondant à tort sur certains dicta de la Cour, que celle-ci ne doit pas
répondre à la question parce que cela ne serait d’ aucune utilité. Ils semblent penser, au vu des - 16 -
décisions déjà prises par des organes compétents de l’Organisation des NationsUnies, qu’une
décision de la Cour n’apporterait rien de plus.
L’Assemblée générale, il est vrai, s’est prononcée sur l’illicéité du mur et a aussi indiqué une
conséquence essentielle de cette illicéité, à savoir que la construction doit cesser et que les portions
existantes du mur doivent être démolies. Toutefoi s, à cet égard aussi, il appartient à l’Assemblée
27 générale de choisir la question su r laquelle elle souhaite que la C our l’éclaire davantage. Mais
au-delà de cet argument formel, il sera utile à l’Assemblée générale, entre autres résultats :
⎯ de voir ses déclarations confirmées par la Cour, en particulier parce que les vues exprimées par
l’Assemblée et d’autres organes de l’ONU sont contestées par Israël;
⎯ d’être éclairée sur certains motifs d’illicéité;
⎯ d’être éclairée sur certaines conséquences juri diques que l’Assemblée n’a pas examinées de
manière exhaustive.
A l’évidence, il n’appartient pas à la Cour de prescrire à l’Assemblée générale la nature des
mesures qu’elle devra prendre à la lumière de l’ avis rendu par la Cour. L’Assemblée demeurera
certainement saisie de la question de Palestine. So n rôle a toujours consisté à définir les principes
et les buts orientant ou devant orienter l’action de la communauté internationale et à favoriser des
processus politiques qui permettent d’atteindre ces buts. Le prononcé de la Cour la guidera
certainement dans ce rôle. Et si d’autres mesu res de mise en Œuvre s’imposent, l’Assemblée
générale pourra aussi adresser une recommandation au Conseil de sécurité ⎯ et le Conseil pourra
alors à bon droit se fonder, pour prendre sa décision, su r la situation juridique ainsi éclaircie par la
Cour.
L’avis sera donc utile, et il est opportun que la Cour le rende.
Le dernier point de procédure à examiner est celui du prétendu préjudice au processus de
paix.
Le caractère prétendument préjudiciable de la demande
On prétend que la réponse que pourrait donner la Cour serait préjudiciable au processus de
paix engagé entre Israël et la Palestine. Ce processus, selon l’argument invoqué, doit suivre la
feuille de route, qui s ouligne que les négociations entre l es parties sont le moyen essentiel de - 17 -
résoudre le différend et de régler certaines questions relatives au statut définitif dans la phase finale
qui est la phase III. L’argument, avec tout le respect dû à ceux qui l’invoquent, est quelque peu
difficile à comprendre. Nous avons de la pein e à admettre qu’éclaircir le droit pourrait faire
obstacle à un règlement négocié. Quoi que dise la C our de la situation juridique, cela n’empêchera
pas les parties de se mettre d’accord sur une solu tion de compromis respectant équitablement les
intérêts opposés qui sont en jeu. Bien au contraire : la Cour a eu à traiter de nombreuses affaires où
une clarification du droit a contribué à aider les parties à trouver un compromis sur la base ainsi
établie.
28 Un avis rendu par la Cour n’a pas pour effet d’empêcher les parties de se mettre d’accord sur
des questions qui doivent être négoc iées conformément à la feuille de route et à d’autres textes et
principes de base du processus de paix. En reva nche, ce qui fait obstacle aux négociations, c’est
notamment l’existence du mur. Celui-ci, a-t-il été souligné surtout par la Palestine mais aussi dans
d’autres rapports présentés par des organes du système des NationsUnies, retentit très
profondément sur les conditions d’existence dans le s territoires palestiniens occupés. Il provoque
des migrations, des déplacements de vastes secteurs de la population palestinienne, il favorise la
consolidation des colonies israéliennes illicites. Cet effet de facto du mur ne peut qu’avoir des
incidences sur le pouvoir de négociation respectif d es parties. C’est le mur qui fait obstacle à une
solution librement négociée conformément à la feu ille de route, ce n’est pas l’avis rendu par la
Cour. Bien au contraire : l’avis est indispensable pour remédier au déséquilibre entre les positions
des parties précisément créé par le mur. L’avis va donc en fait faciliter et promouvoir un règlement
négocié comme le prévoit la feuille de route.
Par conséquent, à cet égard aussi, il est certa inement approprié que la Cour rende l’avis
demandé.
Monsieur le président, Madame et Messieu rs de la Cour, permettez-moi maintenant
d’aborder les questions de fond. La Cour doit clairement dire pour quels motifs le mur est illicite. - 18 -
La Cour doit clairement dire pourquoi le mur est illicite
Tout en répétant avec force dans son exposé écrit qu’il n’allait pas parler de questions de
fond, Israël a en fait abordé le fond de la qu estion de l’avis consultatif en présentant certains
moyens de défense au fond.
Pour résumer, il se pose en l’espèce de ux questions fondament ales que nous avons
abondamment développées dans notre exposé écrit : il s’agit, premièrement, du statut de la
Palestine considérée comme territoire unique aspi rant à l’autodétermination, et il s’agit,
deuxièmement, des droits de la population des te rritoires palestiniens occupés. Le premier
problème touche à des principes fondamentaux de la Charte des NationsUnies, plus
particulièrement l’interdiction de l’usage de la force et le droit à l’autodétermination. De ce dernier
découle le respect de l’intégrité territoriale et de la souveraineté permanente sur les ressources
naturelles ⎯le patrimoine national, les ressources foncières et en eau. Le second problème
concerne le droit international hum anitaire, plus particulièrement le droit régissant l’occupation en
temps de guerre, ainsi que le droit international de la protection des droits de l’homme, plus
particulièrement le pacte relatif aux droits ci vils et politiques, le pacte relatif aux droits
économiques, sociaux et culturels et la convention relative aux droits de l’enfant.
29 L’objection fondamentale que formule Israël en l’espèce est fondée sur l’idée fausse selon
laquelle ces règles du droit international ne tie nnent pas suffisamment compte des intérêts
sécuritaires légitimes. C’est en effet une idée fa usse. Chacun de ces différents secteurs du droit
international permet d’équilibrer les intérêts de l’Etat et ceux de la collectivité quand ils sont
contradictoires. L’équilibre est assuré chaque fois d’une façon particu lière et complexe. Les
préoccupations sécuritaires ne relèvent pas d’une cat égorie fourre-tout qui exclut l’application de
toutes ces règles fondamentales. Elles sont prises en compte par des règles particulières et précises
concernant les dérogations et les restrictions à l’a pplication de la règle géné rale de protection. Ce
sont sur ces points particuliers que nous vous invitons, Monsieur le président, Madame et
Messieurs de la Cour, à porter votre attention.
Les règles et principes fondamentaux de la Charte
Des principes fondamentaux de la Charte sont en jeu: le point essentiel est que la
construction du mur a une incidence fondamentale su r la structure démographique des territoires - 19 -
palestiniens occupés. La construction entraîne une fragmentation de l’espace palestinien, qui à
juste titre a été qualifiée de bantoustanisation. El le rend la vie des Palestiniens difficile, voire
impossible, et les force à quitter leur foyer, tout en renforçant la position des colonies israéliennes
illicites. Israël nie que le mur ait cet effet en qualifiant la «clôture» de mesure de sécurité
temporaire. Mais cette prétention masque la réa lité. Il est de notoriété publique que de vastes
segments du mur sont constitués de structures de béton très solides, de fossés, etc. Dans le journal
d’aujourd’hui on peut lire la dernière déclarati on en date du premier ministre, M.Sharon: «Nous
construirons la clôture de sécurité et nous l’achèverons.» [Traduction du Greffe.] A l’entendre,
l’ouvrage n’a rien de temporaire. Le mur incite ra les Palestiniens à qu itter les parties encerclées,
surtout dans ce qui est appelé la «zone de jointure», et les Israéliens à rester ou à s’installer dans les
implantations fortifiées par le mur. C’est pourquoi le mur a une profonde incidence sur le droit du
peuple palestinien à l’autodétermin ation, lequel comporte le droit de demeurer à l’endroit où ce
peuple vit depuis de nombreux siècles; c’est pourquo i le mur constitue un changement de statut,
une annexion de facto qui est contraire à l’interdiction de toute acquisition de territoire par la force.
Il faut bien préciser une chose: la Palestine n’est pas une espèce de terra nullius qu’Israël
peut s’approprier. C’est un territoire unique asp irant à l’autodétermination à l’intérieur de
frontières délimitées par les lignes d’armistice de 1949. Cela a été reconnu par le Conseil de
sécurité et par l’Assemblée générale dans des dé cisions de caractère contraignant ainsi que par
Israël lui-même. Voilà quelle est la lex lata , indépendamment de ce dont les parties peuvent
librement convenir à l’avenir.
30 Cependant, la prétendue menace sécuritaire ne justifie-t-elle pas ces mesures? Le droit
naturel de légitime défense n’est-il pas reconnu par la Charte? La légitime défense est un acte
nécessaire qui vise à protéger un Etat contre une agression armée. En tant que telle, c’est
nécessairement une mesure temporaire. Il n’est pas concevable qu’un changement durable de statut
soit nécessaire à une telle protection. C’est pourquoi l’interdiction de l’acquisition de territoire par
la force, confirmée par le Con seil de sécurité dans sa résoluti on242 et énoncée dans la célèbre
déclaration de1970 sur les relations amicales, ne prévoit pas d’exception au titre de la légitime
défense. Un changement de statut de facto n’apporte aucune sécurité supplémentaire. Le mur ne
peut se justifier par la légitime défense. - 20 -
Le droit international humanitaire
On ne peut contester qu’il s’applique. Cela a été encore une fois clairement démontré par
tous les Etats qui ont abordé la question dans le urs exposés écrits, dont la France, l’Irlande et la
Suisse, gardienne des conventions de Genève, et plaidé de façon convaincante au cours de ces
audiences. L’obligation incombant à une puissance occupante de ne pas détruire la propriété privée
et d’assurer à la population civile une existence décente en constitue l’élément essentiel, obligation
qui est violée à bien des égards.
Mais la menace qui pèse sur la sécurité ne justifie-t-elle pas les mesures prises? Le droit
d’une partie à un conflit de prendre des mesures pour protéger sa propre population sur son propre
territoire est assurément reconnu. Mais, ainsi que le CICR l’a clairement indiqué dans une récente
déclaration qui, bien qu’elle ait déjà été citée devant la Cour, mérite d’être à nouveau soulignée :
«[L]a barrière en Cisjordanie est contraire au droit international humanitaire,
dans la mesure où son tracé s’écarte de la «Ligne verte» et empiète sur le territoire
occupé. Les problèmes que connaît la population palestinienne dans la vie
quotidienne montrent que la barrière va à l’encontre de l’obligation qui incombe à
Israël, conformément au droit humanitaire, d’assurer un traitement humain aux civils
vivant sous l’occupation et de veiller à leur bien-être. Les mesures prises par les
autorités israéliennes en relation avec l’édifi cation de la barrière en territoire occupé
excèdent de loin ce qu’une puissance occupa nte est autorisée à faire aux termes du
droit humanitaire.»
Les droits de l’homme
L’applicabilité des traités internationaux rela tifs aux droits de l’homme ainsi que des règles
correspondantes du droit international coutumier a été clairement réaffirmée au cours de la présente
procédure par un certain nombre d’Etats, dont la France, l’Irlande et la Suisse. La Suisse a attiré
31 votre attention sur le fait que, dans l’affaire relative à la Licéité de la menace ou de l’emploi
d’armes nucléaires, vous avez estimé qu’il y avait lieu d’appliquer concurremment le droit
international des droits de l’homme et le droit international humanitaire.
Les garanties internationales des droits de l’homme sont violées sur bien des points, comme
nous l’avons montré dans notre exposé écrit. Outre les droits lésés par la dégradation intolérable
des conditions de vie de la popula tion palestinienne, il y a lieu de souligner un autre aspect de ces
violations : l’atteinte portée à la liberté de relig ion des chrétiens et des musulmans, puisque le mur
les empêche aussi d’accéder aux lieux saints de ces religions. - 21 -
Mais la menace alléguée à la sécurité ne justifie-t-elle pas les mesures en cause? Les
clauses limitatives dont sont assorties un certain nombre de garanties déterminent jusqu’où des
considérations de sécurité peuvent justifier des restrictions aux droits de l’homme. Elles se
résument par le critère de proportionnalité.
Ce critère signifie que la mesure doit servir un objectif légitime. La sécurité de la population
est un objectif légitime mais il n’en est pas de mê me de la protection des colonies de peuplement
israéliennes. Ces colonies, ainsi qu’il a été expliqué à plusieurs reprises devant vous, sont en elles-
mêmes une violation du droit international. Une situation créée par une violation du droit
international ne saurait constituer un objectif légitime aux fins duquel limiter les droits de
l’homme : «ex injuria jus non oritur».
Une seconde condition est que la mesure doit êt re nécessaire pour atteindre l’objectif. Or,
comme Israël lui-même l’admet dans son exposé écrit, la situation en matière de sécurité n’a pas
évolué depuis la construction du mur. Les atte ntats dont se plaint Israël n’ont pas diminué.
Comme il a été plaidé hier de façon très convaincante, la sécurité que le mur est censé apporter est
illusoire. Une mesure prise en violation des dr oits de l’homme qui ne permet pas d’atteindre
l’objectif visé est inutile, et, partant, injustifiable. Force est donc de souligner que l’objectif réel du
mur est autre (et qu’il n’est pas légitime) : il s’agit d’un moyen de modifier le statu quo juridique
du territoire occupé.
Enfin, la restriction apportée aux droits de l’homme ne doit pas être excessive par rapport à
l’avantage qu’elle est censée procurer. Rendre in supportable la vie d’une population entière est
une atteinte aux droits de l’homme totalement disproportionnée par rapport à l’importance réelle de
la menace perçue par Israël.
Par conséquent, l’argument sécuritaire ne peut ju stifier aucune des restrictions aux droits de
l’homme qui sont imposées aux Palestiniens du fait de la construction du mur.
32 En résumé, Monsieur le président, Madame et Messieurs de la Cour, le mur ne se dresse pas
entre les terroristes et les victimes potentielles. Il se dresse entre le paysan et sa terre, entre le
salarié et son employeur, entre le commerçant et son client, entre l’enfant et son école, entre le
patient et son médecin, entre les membres d’une même famille qui veulent se réunir, entre le
croyant et ses lieux saints. Au regard du droit international, il n’est pas du tout à sa place ! - 22 -
La Cour devrait indiquer clairement les conséquences que ces violations du droit
international applicable entraînent pour les différents acteurs
Monsieur le président, Madame et Messieurs de la Cour, dans l’avis relatif à la Namibie,
vous avez dit —et cela a déjà été cité par le précédent or ateur— que «[q]uand un organe
compétent des Nations Unies constate d’une manièr e obligatoire qu’une situation est illégale, cette
5
situation ne peut rester sans conséquence» .
Des conséquences pour Israël: selon le droi t de la responsabilité de l’Etat, il existe
premièrement une obligation de mettre fin au fa it illicite: la construction doit immédiatement
cesser. Deuxièmement, il y a obligation de réparer so us la forme de la restitution : le mur doit être
démoli, les terres prises aux propriétaires palestiniens pour édifier le mur doivent leur être rendues,
les instruments réglementaires liés à la constructi on du mur sont nuls et non avenus et doivent être
rapportés. Les dommages qui viennent s’ajouter à la perte des terres ⎯lesquelles doivent être
rendues ⎯ doivent donner lieu à indemnisation. En outre, des assurances appropriées de
non-répétition doivent être données.
Des conséquences pour les Etats tiers: l es règles qui ont été violées établissent des
obligations erga omnes. Les autres Etats sont, par conséquent, en droit de prendre des mesures
appropriées pour faire en sorte que la violation cesse et que le préjudice soit réparé. Aux termes de
la quatrième convention de Genève, tous les Etat s parties sont tenus de respecter et de faire
respecter ses dispositions. Il s’ensuit que les infr actions à la convention déclenchent pour tous les
Etats qui y sont parties le droit et l’obligation de prendre des mesures pour en assurer le respect. Le
CICR a lui aussi une responsabilité à cet égard et s’est acquitté de son obligation de manière
exemplaire.
Par ailleurs, ces violations contreviennent à des normes impératives du droit international, au
jus cogens. Cela entraîne d’autres obligations quant aux mesures à prendre pour remédier à la
situation.
33 Il convient d’insister sur un aspect qui revêt une importance particulière pour tout règlement
futur: aucun Etat ne peut reconnaître la situation de facto créée illicitement par l’édification du
mur.
5
C.I.J. Recueil 1971, p. 54, par. 117. - 23 -
Des conséquences enfin sur le plan de la r esponsabilité pénale individuelle : la construction
du mur constitue, à divers égards, une infraction grave à la quatrième convention de Genève. Tous
les Etats sont, par conséquent, tenus de poursuivre les auteurs de la violation qui se trouveraient en
leur pouvoir ou de les extrader vers un Etat désireux de les poursuivre.
Des conséquences pour l’Organisation des Nati onsUnies et les institutions spécialisées:
l’Assemblée générale est garante du droit des Pale stiniens à l’autodétermination; le Conseil de
sécurité a examiné la situation conformément à la responsabilité principale qui lui incombe en
matière de maintien et de rétablissement de la paix et de la sécurité internationales. Dans l’exercice
de ces responsabilités, les deux organes devront prendre dûment en considération le prononcé de la
Cour. Ils ont l’obligation non seulement de poursuiv re mais encore d’intensifier leurs efforts pour
parvenir à un règlement durable et pacifique de la question de Palestine sur la base du droit. Il est
du devoir de tous les membres du système des Natio ns Unies d’apporter leur concours, dans leurs
domaines de compétence respectifs, au travail de ces organes politiques.
La Ligue des Etats arabes prie respectueusement la Cour de déclarer clairement ces
conséquences dans l’avis qu’elle donnera. Cela ne sera pas seu lement profitable à l’Assemblée
générale, qui a demandé l’avis, mais aussi à la co mmunauté internationale dans son ensemble. En
disant clairement le droit tel qu’il est, la Cour apportera sa contribution à un processus de paix
fondé sur la règle de droit.
Observations finales : la responsabilité de la Cour dans la présente procédure
La Ligue des Etats arabes voudrait, pour conclu re son exposé oral, exprimer sa certitude que
la Cour s’acquittera de la respon sabilité particulière qui lui a été assignée, en jouant son rôle
d’organe judiciaire principal des NationsUnies . Cette formule de l’artic le92 de la Charte est
lourde de sens.
La Cour, organe des NationsUnies: cela signifie qu’elle fait partie intégrante de
l’Organisation des NationsUnies et, partant, qu ’elle constitue un élément du système de maintien
de la paix et de la sécurité internationales défi ni par la Charte. Et, de fait, sa jurisprudence a
contribué à réduire les tensions dans le monde. L es buts et principes de la Charte en sont venus à
refléter les valeurs de la communauté internati onale tout entière et il est largement admis - 24 -
aujourd’hui que, outre l’agression, les violations des droits de l’homme fondamentaux, y compris le
34 droit à l’autodétermination, et les infractions graves au droit international humanitaire constituent
les menaces principales contre la paix et la sécurité internationales.
En tant qu’organe de l’Organisation des Nati onsUnies, la Cour guide sa conduite sur les
buts et les principes pour lesquels l’Organisation existe, buts et principes qui sous-tendent la
question de Palestine: autodétermination, interdictio n du recours à la force, droits de l’homme et
droit humanitaire au sens le plus large. Il y a actuellement une unanimité sans précédent parmi les
Membres de l’Organisation des NationsUnies, ses organes principaux et subsidiaires et ses
institutions spécialisées pour dire que l’édification du mur contrevient à ces buts et à ces principes,
que la Cour, par le passé, Œuvrant dans la même direction que les autres organes de l’Organisation,
s’est toujours employée à défendre. Elle a aussi favorisé l’action menée par l’Organisation pour
s’opposer aux affirmations de souveraineté abus ives d’Etats Membres. Elle a également donné
plus de force à l’activité normative des organes de l’Organisation des Nations Unies, en particulier
à celle de l’Assemblée générale, en confirmant le rôle fondamental des résolutions de celle-ci dans
la formation du droit coutumier (affaires de la Namibie, du Nicaragua et du Timor oriental) et sa
responsabilité générale à l’égard du maintien de la paix et de la sécurité internationales (Certaines
dépenses) ainsi que sa responsabilité principale à l’égar d des territoires sous mandat, des territoires
sous tutelle et des territoires non autonomes (Namibie, Sahara occidental et Timor oriental).
La Cour, organe judiciaire des NationsUnies: cela a conduit la Cour à souligner la
complémentarité entre sa fonction judiciaire et les fonctions des organes politiques de
l’Organisation des Nations Unies, en insistant sur le «parallélisme fonctionnel» qui existe entre elle
et l’Assemblée générale et le Conseil de sécurité . Elle a rejeté la thèse selon laquelle il existerait
des questions intrinsèquement juridiques d’une part et, de l’autre, des que stions intrinsèquement
politiques ne se prêtant pas à un examen juridique et judiciaire.
La Cour, organe principal des Nations Unies : cela signifie aujourd’hui qu’elle est la cour de
justice de la communauté mondiale et donc la gard ienne, sur le plan du droit, des valeurs et des
intérêts de la communauté. La Cour est conscien te de cette mission. En plusieurs occasions elle a
juxtaposé la structure bilatérale traditionnelle du droit international et la notion d’intérêt
«collectif». La Cour s’est référée au concep t de communauté interna tionale, considérant que - 25 -
celle-ci était personnifiée par l’Organisation des Na tions Unies. La Cour a affirmé non seulement
que chaque Etat a un intérêt juridique à ce que soie nt respectées les obligations qui lui sont dues à
titre individuel, mais aussi que chaque Etat a le de voir de réagir à certaines situations d’illicéité
objective (Namibie, avis consultatif).
35 La Palestine, en tant qu’ancien territoire sous mandat, est bénéficiaire de la mission sacrée de
civilisation, objectif principal du régime des mandats. Cela signifie aujourd’hui que la
communauté mondiale a une responsabilité envers le peuple palestinien en ce qui concerne la
réalisation de son droit à l’autodétermination, notamment par la solution des deux Etats, et la
protection de son intégrité territoriale, c’est-à-dire de la totalité du territoire sous occupation. En
tant que juridiction de la communauté mondiale, la Cour a son rôle à jouer dans la réalisation de
ces objectifs. L’occasion lui est maintenant donnée de se prononcer sur les conséquences
juridiques de l’édification d’un mu r. Prétendre qu’un avis de la Cour serait sans utilité pour les
négociations ou même les gênerait, comme l’ont fa it certains Etats en mettant la Cour en garde
contre un tel prononcé, est une supposition purement gratuite qui n’a rien à voir avec la réalité. Ce
qui est bien réel, en revanche, c’est que le fait pour la Cour de garder le silence aurait des
conséquences désastreuses pour l’ avènement futur d’un Etat de Palestine viable et pleinement
souverain. La Cour, par consé quent, ne doit pas abdiquer sa fonction judiciaire face à cette
tragédie palestinienne. En dernière analyse, ce sont les prononcés décisifs de la Cour dans l’affaire
de la Namibie, et non son silence dans l’affaire contentieuse du Statut international du Sud-Ouest
africain, qui ont aidé cet autre territoire sous mandat ⎯dont l’Organisation des NationsUnies
avait hérité la responsabilité de sa devancière ⎯ à exercer son droit à l’autodétermination et à
accéder à l’indépendance pleine et entière.
Monsieur le président, Madame et Messieurs de la Cour, je vous remercie de votre aimable
attention.
Le PRESIDENT : Merci, MonsieuB r oth e. Je donne maintenant la parole à
S. Exc. M. Belkeziz, secrétaire général de l’Organisation de la Conférence islamique.
Mr. BELKEZIZ: Mr.President, Members of the Court, the Organization of the Islamic
Conference, on behalf of which I am speaking, felt compelled to present both written and oral - 26 -
observations to the Court in connection with the request for an advisory opinion concerning the
legal consequences of the construction of the Wall being built by Israel, the occupying Power, in
the Occupied Palestinian Territory, including in and around East Jerusalem.
It is by virtue of that decision that I have the honour to take the floor in order to explain the
very specific reasons underlying the desire of the organization I represent to participate fully in this
36 case and to express our confidence in the ability of your Court to shed light on the question
submitted and thus provide the assistance that the General Assembly needs to fulfil its task.
The Organization of the Islamic Conference, founded in the late sixties, currently has
57 member States. Its objectives include, as stated in Article II of its Charter:
⎯ “to take necessary measures to support inte rnational peace and security founded
on justice; . . .
⎯ to create a suitable atmosphere for the promotion of co-operation and
understanding among member States and other countries; . . .
⎯ to co-ordinate efforts for the safeguard ing of the Holy Places and support of the
struggle of the people of Palestine, to help them regain their rights and liberate
their land”.
I have selected these points because they provide an understanding of our motivation. Our
Organization has a strong concern for peace and co-operation and, in view of its composition, it
also pays particular attention to the just struggle of the Palestinian people and to any violations that
may, from day to day, make peace more uncertain in the land of Palestine.
The last Summit Conference of our Organizati on was held in Malaysia in October2003.
Various documents emanated from it, but I will ju st mention two resolutions which I think it is
important to bring to the attention of the Court.
The resolution concerning the Palestinian cau se and the Arab-Israeli conflict falls squarely
within the legal context invoked extensively befo re the Court and refers to Security Council
resolutions242 and 338 as the basis of the p eace process, as well as calling on the international
Quartet to strive for the implementation of the Road Map. It urges Israel to end the construction of
the Wall and condemns it for all the unlawful ac ts perpetrated, reaffirming the ongoing and
established responsibility of the United Nations with respect to the Palestinian cause. - 27 -
In another resolution of our recent Conference, we recalled the concern of our member States
on the subject of international terrorism. The Convention on Combating International Terrorism of
the Organization of the Islamic Conference (OIC ) is now in force and we denounce any such
barbaric acts which must always be unequivocally condemned. But we have also called upon the
United Nations to convene an International Confer ence to define terrorism and to distinguish it
37 from national liberation struggles. Acts of viol ence against innocent people, provoking terror to
attain certain goals, may be committed by underground movements or even by isolated individuals,
but may also constitute the actual policy of a St ate, with the aim of preventing a people from
acquiring their independence as a nation. The relentless fight against terrorism is a global necessity
but one must not neglect another such necessity- that of saving a people which is oppressed by
violence.
Those are the issues underlying the question submitted to you. Your task is to examine the
legal issues. Our Counsel, Ms Chemillier-Gendreau, will now be taking the floor to present to you
certain legal implorations on which the OIC believ es that it can shed some further light. Thank
you.
The PRESIDENT: Merci M B.elkeziz. Je donne la parole au
Professeur Chemillier-Gendreau.
Ms CHEMILLIER-GENDREAU: Mr. President, Me mbers of the Court, it is an honour for
me to take the floor again before this Court and to present to you the views of the Organization of
the Islamic Conference concerning the very serious case of which the Court is currently seised.
But we are nearing the close of the proceed ings. Without repeating the content of our
Written Statement, I will seek to bring out the salient aspects of the case.
My consideration of what arguments I can u sefully adduce inevitably leads me to make the
following observation: the States or organizations that have expressed their views disagree as to
the necessity for the Court to give an opinion. But those who call upon the Court not to pronounce
have stressed an uneven variety of reasons why it should decline to give the requested opinion. I
will thus briefly review each of those reasons to support my conclusion ⎯ which I am sure will be
that of the Court ⎯ that no argument stands in the way of its exercising its advisory jurisdiction. - 28 -
Leaving aside jurisdiction, the States are a lo t less divided on the mer its. Whilst only 90 of
them supported the request for an opinion, 144 conde mned the construction of the Wall. Does this
38 imply total clarity with respect to the basis of the illegality and its consequences? Surely not, but
the Court, with its wisdom and experience will fi nd its own way to characterize the facts and draw
the relevant legal consequences. Allow me, at th e close of these oral proceedings, to draw the
Court’s attention to certain aspects of the context of illegality and to conclude by returning to the
argument of security and the so-called military necess ity invoked to protect what is in reality an
unlawful appropriation of land.
With respect to jurisdictio n, the Court has heard many sotto voce suggestions that it decline
to give the requested opinion, based on the term s of Article65 of the Statute and on the use in
certain earlier cases of the word discretionary to describe the Court’s ostensible freedom to decline
to respond regardless of the circumstances.
However, the Court itself has constructed the framework (borrowed from its judicial
function) within which it may assess any discretionary authority to withhold an opinion. And that
framework is a narrow one. There is no obvious r eason why the Court should reconfigure it today.
Consistent with the logic hitherto applied for the assessment of jurisdiction, there would have to be
compelling reasons for the Court not to give an opinion. That is the form of words used since
1956, when the Court gave its opinion on Judgments of the Administrative Tribunal of the ILO . In
the present case, all the arguments support jurisdiction:
1. The question is a strictly legal one.
2. A response is needed for the sake of peace.
3. The United Nations General Assembly was fully competent to submit the question.
4. There is no element here of a dispute falling within the contentious function and calling for a
judicial outcome in disregard of the rule of State consent.
5. Lastly, the Court has enough facts to give the requested opinion.
A number of arguments confirm each of these points.
1. The question submitted to the Court is clear ly legal within the meaning of Article96 of
the Charter; moreover, previous opinions have s hown that there is no such thing as a purely legal
question. Rather, certain questions receive legal tr eatment. It will be noted in passing that it is - 29 -
quite paradoxical for the political nature of the question submitted to be invoked ⎯ as it is by some
States ⎯ as grounds for advising the Court to forgo giving an opinion, while in the same breath it
is argued that a response would not be “politically expedient”. The Court is thus drawn into the
39 political arena, which is precisely where it is claimed that it should not seek to go. Let us attempt
now to identify the ever fine distinction between what is political and what is legal.
The political sphere represents the clash of subjectivities between society’s different
protagonists in a direct process which produces an unmitigated balance of power. The legal sphere
represents the transposition of that clash of subjectivities by reference to a pre-established standard,
the legal norm, under a third-party authority offe ring guarantees of objectivity. Comparison with
the reference norm by an impartial third party pr ovides the prism of objectivity through which the
factual situation can be rectified. The identificati on of something as legal is thus effected through
the fulfilment, on a formalized basis, of that search for objectivity.
The allocation of powers within the United Nations is such that the Court has been entrusted
with the authority to hear and determine cases, in other words to assess a factual situation in the
light of a norm or a set of norms recognized as applicable to the actors concerned. The sequence of
events in the present case was thus as follows: the General Assembly, the political organ, took a
political position on the Wall and demanded that Israel “reverse” its plans. Israel did not comply:
on the contrary, it proceeded with the disputed c onstruction project. The political organ thereupon
turned to the judicial organ and enquired about the legal aspects of the problem. Its purpose in
taking this initiative was to obtain legal confirma tion of the condemnation of a specific action as
well as an enumeration of the possible legal conseque nces. It would then be in a position to take
measures grounded in law. The procedure followed was flawless. One can only regret that far too
many States failed to associate themselves with it.
2. They had all the more reason to do so becau se it is essential for peace. This is the second
argument in favour of a decision to accept jurisdic tion. International justice is at a sensitive
juncture. The Court has a backlog of preliminar y objections. But regardless of the arguments
invoked to challenge its competence, the Court mu st take a position, and it has never missed an
opportunity to do so in the interests of a higher objective — the raison d’être of the Organization to
which it belongs, which is the maintenance of peac e. An objective approach to justice is more - 30 -
important for the International Court than for an y municipal court. We are familiar with the
traditional formula used by most municipal courts , which adjudicate on behalf of their sovereign
peoples. Dispensing justice involves the exercise of a higher power. In the municipal order,
40 answering the question “on behalf of whom?” is a way of confirming the legitimacy of a court and
gives its judgment the seal of authority. In the case of your own Court, Mr. President, Members of
the Court, the question “on behalf of whom?”, mu st be followed by the question “on behalf of
what?” inasmuch as the Court has been mandated to dispense justice and state the law by an
association of States, those that make up the Unite d Nations. Behind this Organization there is not
just one sovereign people but a diversity of peopl es whose representatives may disagree among
themselves. What unites them is a goal, a higher interest that transcends them — that of peace.
In recent cases the Court has demons trated its keen awareness of this ( Yugoslavia v. United
States of America, 2 June 1999, or Democratic Republic of the Congo v. Rwanda, 10 July 2002). It
has even shown concern to promote peace between th e protagonists by urging them to negotiate in
a case where it was forced to conclude that it lacked jurisdiction, that ofPakistan v. India, of
21 June 2000. In doing so, your distinguished C ourt shares the deep concern of the Organization’s
Secretary-General as set out in his report of 2September2003 on the implementation of the
Millennium Declaration (A/56/323). His analysis is pessimistic, and peace is undoubtedly under
threat in many parts of the world. Particularly so in Palestine. For a number of months, the
provocation, in the massive physical form of the Wall of separation being constructed, plainly itself
aggravates a situation in which peace has broke n down. Deaths, expulsions, the demolition of
houses and businesses and the destruction of plan tations, summary expropr iations, illegal foreign
settlements, targeted assassina tions, the encirclement of towns and villages by tanks, military
operations using armoured vehicles as in Jenin , the bombing of the Mukata in Ramallah for
example, or in many places in Gaza, suicide a ttacks in response to this by desperate and
uncontrollable elements of the population under sieg e— such are the ingredients of the state of
permanent warfare in Palestine. Yet some object ors would still tell the Court: “Do not declare
yourself competent. We are working for peace a nd have relaunched negot iations. A ruling from
you would jeopardize them.” This curious approach stands reason on its head. Negotiations have
no chance when one of the partners unrestrainedly continues to perpetrate unlawful acts, the - 31 -
41 earliest instances of which first threatened peace or led to its breakdown, and to the negotiations
that third parties are endeavouring to sponsor.
Some documents submitted to the Court ar guing against the propriety of an advisory
opinion, such as that of the United States Govern ment, are astonishingly detached from the actual
situation. The negotiations la unched over ten years ago are described as a long gently-flowing
river, which must be left to follow its course to the ocean of peace that lies just around the corner.
The initiative known as the Road Map launched in spring 2003 under the auspices of the Quartet
and endorsed by the Security Council has, like ot her peace initiatives, run up against the actions of
the foreign occupation army on the ground. Th e construction of the Wall makes these peace
projects futile. With the Wall there is no longer a viable Palestine and hence no peace between two
States. The condemnation in principle issued by the General Assembly four months ago produced
no result. Reviving the prospects for real (rather than make-believe) peace requires backing for the
request to the Court for an advisory opinion so that the General Assembly will be better equipped
for the next step.
3. This is essential, for the Palestinian pe ople today is a people forsaken, left to the
militaristic and expansionist turn taken by a power armed to the teeth. Their only protection is that
which the United Nations General Assembly may give them.
The third reason why the Court should assume jurisdiction is that this would help the
General Assembly fulfil all its responsibilities. Some States however challenge the authority of the
General Assembly, said to have improperly interven ed in a matter being handled by the Security
Council. But, quite to the contrary, the Genera l Assembly is here entrusted with a heavy and
special responsibility. Apart from the formal valid ity of the resolution seising the Court, to which
attention has already been drawn, there are two grounds establishing the competence of the General
Assembly and, as a consequence, the jurisdiction of the Court.
The first involves its share of responsibility for the maintenance of peace, alongside the
Security Council, as seen notably in Article11, paragraph2 of the Charter. And, pursuant to
resolution 377, Uniting for peace, it can take cognizan ce of a matter if the Security Council fails to
perform its task. It is for the General Assembly to assess any such failure by the Council. Here,
the failure is not open to question: the Council, having before it the issue of the Wall as an - 32 -
42 additional threat to peace, was unable to come to a decision owing to a veto. Thus, the threat to
peace persists as an insurmountable obstacle to progress in the negotiations.
But there is a second basis for the authorit y of the General Assembly, with its special
responsibility to the Palestinian people. This was a people under mandate and, in overseeing the
end of that mandate, the General Assembly proved un able to avert a crisis which continues to this
day. A number of principles have foundered in that crisis. The Palestinian people had been placed
under British Mandate within the framework of the League of Nations and the Mandate took effect
on 29 September 1923. It was a product of the developing doctrine, which saw the right of peoples
to self-determination as leading over time to th eir full-fledged independence. The Balfour
Declaration introduced into the very core of the Mandate the plan for a Jewish national home. But
the demographic ratio between Jews and Arabs in 1923 and the context of respecting peoples
without placing limitations on their future did not result in any arrangement clearly calling into
question the potential for self-determination of the Palestinian people. The quickening
demographic changes afterwards, the tragic even ts characterizing the Second World War, notably
the persecution of the Jews, and the response to th at provided by the Zionist plan were factors
which on the political level eroded the guarantees granted in the Mandate to the Arabs of Palestine.
But they did not destroy those guarantees from the legal point of view. To the contrary, the
United Nations took a clear stand on the right of peoples to self-determination and can be credited
with launching the decolonisation process. The C ourt was required to give consideration to the
mechanism for transferring the protection of certa in peoples from the League of Nations to the
United Nations in the case concerning the International Status of South West Africa. In its Opinion
of 1950 it recalled two principles of paramount importance: non-annexation and the development
of peoples as a sacred trust of civilisation ( Advisory Opinion, I.C.J. Reports 1950 , p.131). Legal
obligations had been created and the demise of the League of Nations did not dispel them. Thus, it
was the United Nations General Assembly which found itself entrusted with supervision of the
territories in question.
I will return later to resolution 181 and the wa y in which it attempted to resolve the matter.
For now, I need only note that the Assembly’s “partition” recommendation did not make it possible
to settle the fate of the Palestinian people in accordance with the principles laid down at the - 33 -
43 beginning of the Mandates. Not only did that people not accede to sovereignty on the truncated
territory it was offered, but even that territorywas in turn occupied, a nnexed, settled and is now
marked by an oppressive mechanism of lasting division: the Wall.
Throughout all the stages of this long and distressing history, the General Assembly has
increasingly shown its concern. Without ever ⎯ and this goes without saying ⎯ calling into
question the existence of Israel, created on the proposal of the General Assembly, the Assembly
has had to assume the consequences of the longsta nding rejection of resolution181 by the Arab
States and the Palestinians themselves. But it has also been confronted by the continual violation
of that resolution by Israel in the form of a hunger for land satisfied through military force and
economic support for settlements.
Thus, it is because Britain’s role as mandatory did not come to an end with Palestinian
independence and sovereignty that the General Assembly bears res ponsibility for the fate of this
people. It is therefore perfectly entitled to seek an opinion from the Court and the Court cannot
reject such a request on the ground that the Assembly lacks competence.
4. The factors asserted in support of the third reason why the Court should find that it has
jurisdiction will be used to defend the fourth reason. There is here no contentious case disguised as
advisory proceedings improperly circumventi ng the freedom of a State not to accept the
jurisdiction of the Court. Israel however lays stress on this point. But Israel cannot at one and the
same time both refuse and delay recognition of Pal estine as a sovereign State and also claim that
there is an inter-State dispute. Israel’s stubborn rejection of the Palestinian national plan has made
the issues of Palestine, the protection of its peopl e and the need to apply the Geneva Conventions
on military occupation issues of responsibility erga omnes borne by the entire community of States.
Moreover, the construction of the Wall is indeed an action perpetrated by Israel but one perpetrated
on territory not belonging to Israel. Nothing which has been said or done by the General Assembly
in this respect concerns Israeli sovereignty, but only the protection of the Palestinian people. The
advisory function is well defined and, by membersh ip of the United Nations, Israel has accepted
the exercise by the Court of that function. - 34 -
5. The last argument in favour of the Court’s jurisdiction relates to the factual elements.
44 They, and this has been said time and again, are easily available through United Nations documents
and through all the information the interested parties, i.e., the Palestinians, are able to furnish.
A few States, including Israel, have maintained that the Court is unable to render an opinion,
failing proper access to the concrete facts. At the same time, Israel, absent from this courtroom,
argued in writing only on the question of jurisdiction, not on the merits. This reluctance to
collaborate with international ju stice is no doubt unfortunate, but it does not impair the Court’s
jurisdiction, remains established for all the reasons set out above.
In now turning to all the aspects of the illegality characterizing this construction, I do so only
to draw the Court’s attention to a few key elements.
No further repetition is needed of the fact that this is a massive fortification which in itself
occupies large areas of summarily confiscated Palestinian land, that it crosses a part of the territory
of Palestine on which, internationally, there is no doubt as to the rights exercised by the
Palestinians and the fact that Israel’s only presen ce there is that of an occupying military power,
that Israel should accordingly respect the Geneva Conventions and that the Wall contravenes the
provisions of those Conventions. It has been made abundantly clear to the Court that this
enormous military structure is responsible for massive violations of the human rights recognized to
Palestinians as to all human beings. It has been observed that the route of this Wall does not reflect
a concern for protection against possible attacks, but rather an extension of Israel’s full jurisdiction
over the Palestinian Territories in which the Is raeli settlements are established. Israel
acknowledges this in the material it has submitte d (Written Statement of Israel, para. 3.49).
Similarly, Israel lays bare its unbridled expansionism by denying th at the 1949 Armistice Line has
any legitimacy. Rejecting peace agreements drafted on this basis and constantly undermined, Israel
states that it anticipates further territorial encroach ment. Jerusalem is the most significant capture.
Trampling on Palestinians’ rights over that city, flouting the desire for an international status
expressed in 1947, the Israelis envisage the future of that symbolic city neither in terms of
restitution nor in terms of sharing, but in terms of military fortification. Some States have appeared
to lend credence to the assertion that this is a te mporary construction. The Palestinian dossier and
annexes provide the Court with all the information n eeded to evaluate this hypothesis. It will have - 35 -
45 all the time it needs to observe that a radical tran sformation of the territorial situation is involved.
However, this territorial situation in regard to Pal estine, as well as in regard to the State of Israel
itself, is highly complex legally because of the circumstances of its origins.
It is true that only a fraction of the planne d wall has been completed for the time being, and
that uncertainties persist with regard to the fina l route. However, I should like to convince the
Court that no route would make this structure acc eptable from the standpoint of international law.
This Wall is a huge error on the part of those whose idea it was since, over and above the violations
of law to which it gives rise, it reveals that the legal stability of Israel itself depends on reaching a
peace settlement with Palestine. It is necessary here to distinguish the different parts of the original
mandated territory of Palestine.
The first territorial element consists of th e areas today designated as Occupied Palestinian
Territories. They cover approximately 22 per cent of the historical territory of Palestine. The
Israeli army has controlled those areas and prot ected its settlements there since 1967. Israel
attempts to impose the “disputed territories” form ula to characterize these areas, thereby laying
bare its ulterior motives. But the legal definiti on is beyond doubt. Under in ternational law, these
are territories under military occupation following the illegal use of force. Moreover, the Wall
does not delimit these areas. It runs across them. It is not a defensive military structure. It is a
component of an offensive strategy.
However, we should go further and emphasize the necessity of a formalized peace for the
two peoples. If the calculations of the Israeli strate gists working on the installation of this military
structure led them to make the route of the Wall coincide with that of the 1949 Armistice Line,
what objection could there be from the standpoint of international law? And what if the Wall went
behind that line and penetrated the areas captured by Israel during the 1948-1949 war? That would
make it necessary to reconsider the precise de limitation of those territories. It should be
remembered that Israel appropriated them without title and consequently controls them through the
illegal use of force. With the passage of time, in ternational protests have died down and Palestine
has sent a number of signals indicating that the 1949 Armistice Line could be made an international
frontier by means of a peace agreement. But no form al agreement has been reached to that effect.
Under the armistice agreements signed in 1949 be tween Israel and Egypt, Lebanon, Jordan and - 36 -
Syria, no rights are recognized to Israel in respect of the territories occupied during the 1948
46 hostilities, and the fact that the Security Counc il ordered Israel in 1967 to withdraw from the
territories occupied at that time (a withdrawal ne ver effected) does not mean that it sanctioned the
acquisitions previously made by military conqu est. Thus, the positioning of the Wall on the 1949
line or within the territories conquered at that tim e would not make it a lawful construction. The
Wall would continue to be illegal because it is built on an acquisition that is nether neither valid nor
validated.
Turning to the territory allocated to Israel under General Assembly resolution 181, we know
that a partition plan for Palestine, envisaging the establishment of a Jewish State on 56.47 per cent
of the territory, was adopted by 34 votes to 13, with 10 abstentions, on 29 November 1947. What
basis is there today for Israeli legal title to thiterritory? The General Assembly resolution was
immediately disputed by the potential holders of sovereignty over the entire mandated territory,
namely the Palestinians, as well as by the Arab St ates in the region. This resolution continues to
form the basis for the legitimacy of the State of Is rael’s existence, but it does not provide full legal
title. It is true that the undeniable effectivité of the Israeli State and the acknowledgments of its
existence serve to consolidate chaotic origins. However, an essential element is still missing: the
agreement of the Palestinian people. The latter h as to officially renounce a substantial part of the
mandated territory on which the international community had undertaken to guide it towards
independence.
Until such agreement has been reached, Israel will not be in a stable situation vis-à-vis
international law. This does not, as your distin guished Court has seen, in any way challenge the
legitimate existence of Israel. It is an obser vation based on contemporary legal principles which
leads to a common sense conclusion: Israel does not need any wall to live in peace. Israel urgently
needs to conclude an agreement with Palestine.
Is this to say that the question of Israel’s security is overlooked? The Organization of the
Islamic Conference has recently shown that it is deeply concerned by the issue of terrorism and this
does not mean treating the attacks of which Israel has been the victim as something negligible. But
without any evidence, Israel imputes responsibilit y for these criminal acts to the Palestinain
authority and refers to “those who operate from und er the protective umbrella of Palestine”. But - 37 -
the Court is not a political forum where one proceeds by insinuation. The law and the attribution of
47 responsibility which are its task require evidence. No evidence has been provided on this score.
Moreover, it should be noted that despite the ex treme military control exercised by Israel over
Palestine, Israel cannot stop the terrorist attacks. How could the Palestinian leaders, confined to
their buildings sometimes attacked by the Israeli army and rendered incapable of exercising their
powers, do so? The suicide attacks against th e Israeli population cannot be interpreted and
condemned in isolation, out of context. They must be linked to the far bloodier terror to which
Israel has subjected the Palestinians since its creation. It needs to be emphasized how impossible it
is for the Palestinian people to exercise its legiti mate right to resist a foreign occupation, a right
stemming from the very terms of General Assembly resolution2625. Israel must understand that
its security is closely bound up with the enjoymen t of freedom and sovereignty by Palestine.
Condemning the Wall is one step in that direction. For the Wall ⎯ a disproportionate response to
attacks which are themselves unacceptable ⎯ is the worst possible response, since it is itself a
source of massive rights violations.
The international community is now under an urgent obligation to create the conditions for
peace, in other words, to put a stop to the violen ce by Israel on territories which do not fall within
its sovereignty.
Mr. President, Members of the Court, all the arguments I have just put to you lead me to
conclude on behalf of the Organization of the Islamic Conference that:
⎯ the Court does not have any decisive reason that might lead it to reject the opinion it is asked to
deliver by the General Assembly;
⎯ the Wall constructed by Israel in Occupied Pal estinian Territory is an illegal act which results
in violations of the general principles of inte rnational law, United Nations resolutions, Geneva
Conventions and the fundamental rights of the Palestinians;
⎯ the legal consequences are necessarily the cond emnation of the State responsible for this
action, the obligation ⎯ of which it must be reminded ⎯ to destroy what has been built and to
make reparation for all the violations committed;
⎯ third States must recognize the illegal acts which ha ve been identified and ensure that they do
not contribute to them in any way, directly or indirectly. - 38 -
48 Tyonu.
Le PRESIDENT : Merci, Madame.
Nous en arrivons au terme de la procédure or ale sur la requête pour av is consultatif soumise
par l’Assemblée générale des Na tions Unies sur la question des Conséquences juridiques de
l’édification d’un mur dans le Territoire palestinien occupé . Avant de clore ces audiences, je tiens
à exprimer les remerciements de la Cour aux déléga tions qui ont pris la pa role devant elle durant
ces trois jours, ainsi qu’aux participants à la pro cédure écrite. Je prierai les représentants de tous
les participants de se tenir à la disposition de la Cour pour le cas où celle-ci aurait besoin
d’informations ou d’explications complémentaires.
La Cour va maintenant se retirer pour délibérer. Le greffier informera en temps utile tous les
participants à cette procédure consultative de la date et de l’heure auxquelles la Cour rendra sa
décision.
La Cour n’étant saisie d’aucune autre question aujourd’hui, l’audience est levée.
L’audience est levée à 11 h 55.
___________
Translation