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COUR INTERNATIONALE DE JUSTICE INTERNATIONAL COURT OF JUSTICE
Non-corrigé Uncorrected
CR 2000/3 (traduction) CR 2000/3 (translation)

Wednesday 5 April 2000 at 10 a.m. Mercredi 5 avril 2000 à 10 heures

The PRESIDENT: Please be seated. The sitting is open. This hearing marks the be ginning of the second round o f

orale arguments and it is the Islamic Republic of Pakistan which will be speaking this morning. Je donne à présent la
parole à sir Elihu Lauterpacht, conseil du Pakistan.

Sir Elihu LAUTERPACHT : Je vous remercie Monsieur le président.

Monsieur le président, Madame et Me ssieurs de la Cour, il m'incombe de tenter de répondre aux moyens présentés
par le Gouvernement de l'Inde. Je vous remercie, Monsieur le p résident, de nous avoir ra ppelé hier les termes du
paragraphe1 de l'article60 du Règlement de la Cour. J'entends bien me conformer à cett e prescription ou m'y

efforcer.

Comme la Cour le comprendra, étant donné la manière dont ces audiences ont été organisées -- il ne s'est pas écoulé
vingt-quatre heures entre la plai doirie de l'Inde et la prés ente matinée où le Pakistan es t invité à répondre-- je n'ai
disposé que de très peu de temps pour me préparer. Ma réponse, à vrai dire, n'est absolument pas préparée d'avance.
Je prie la Cour de m'excuser si, en conséquence, mon exposé n'est pas t out à fait au point, faute de s'appuyer sur un
texte parfaitement rédigé. Je présente aussi mes excuses aux interprètes et compte sur leur patience et sur leur
indulgence, n'ayant pas été en mesure de leur fournir le texte de ce que je m'apprête à dire.

La manière dont l'Inde a procédé appelle de ma part un premier commentaire. Je m'attendais à ce que l'Inde réponde
hier à l'exposé liminaire du Pakistan. Or, il n'en a rien été. Les arguments du Pakistan concernant la réserve relative
aux membres du Commonwealth -- point que je tiens pour central -- ont été presque totalement passés sous silence.
Et il n'y a été tout au plus répondu que de façon oblique --oblique et incide nte-- et non de front. L'argument du
Pakistan selon lequel la réserve rela tive aux membres du Commonwealth ne pe ut lui être appliquée ou opposée n'a
jamais été commenté, pas plus que le fa it, que selon nous, cette inapplicabilité ou inopposabilité rend superflu tout
examen de la question de la divisibilité. Il n'a été fait aucun cas de ces considérations.

Peut-être la Cour pense-t-elle que l'Inde n'avait rien à répondre aux arguments du Pakistan. Toutefois, il est possible
aussi que l'Inde réserve sa véritable réponse à ce s arguments pour sa plaidoirie du deuxième tour, demain. Devant
une telle éventualité, qu'il me soit permis de dire que le Pakistan y verrait de très sérieuses objections. Si l'Inde avait
répondu hier à ce que le Pakistan a dit lundi, le Pakistan aurait eu la possi bilité de répondre aujourd'hui à ce que
l'Inde aurait pu dire hier. Mais si l' Inde répond demain, le Pakist an sera privé de cette pos sibilité, à moins que la
Cour ne reconnaisse qu'une te lle tournure des débats est source d'inéga lité et ne donne au Pakistan l'occasion de
répondre à tout nouveau moyen que l'Inde pourrait alors présenter. Dans cette hypothèse, il m'apparaîtrait nécessaire
de demander à la Cour d'envi sager la tenue d'une nouvelle audience, à quelque date qui lui conviendrait, de façon
que le Pakistan puisse compenser ce désavantage.

Monsieur le président, Madame et Messieurs de la Cour, afin de préciser le cadre de ma réponse, permettez-moi de
rappeler très brièvement les deux bases de compétence invoquées par le Pakistan : i) la clau se facultative; ii) l'Acte
général. Je ne reprendrai pas l'argumen t selon lequel la Cour a co mpétence en vertu du paragraphe 1 de l'article 36,
s'agissant d'un cas spécialement prévu da ns la Charte. En ce qui concerne la clause facultative, deux questions
principales se posent : la première qua nt à l'effet de la réserve relative aux membres du Commonwealth, la seconde
quant à l'effet de la réserve relative aux traités multilatéraux. Je peux le dire d'emblée, il ne me sera pas besoin
d'entretenir longuement la Cour de la réserve relative aux traités multilatéraux. Le Pakistan ne renonce nullement au
moyen dont il s'est prévalu à ce sujet, mais il peut se dispenser d'invoque r la Charte pour fonder sa requête, puisque

celle-ci repose en réalité sur des cons idérations relevant du droitinternati onal coutumier. Le fait que ce dernier
trouve son expression dans la Charte n'enlève rien de sa force au moyen du Pakistan.

Le Pakistan ne fait pas valoir que la réserve relative aux traités multilat éraux est nulle ou inapplicable, ou qu'elle ne
peut lui être opposée. Cela ne lui est pas nécessaire. Cette réserve est tout simplement dénuée de pertinence et le
Pakistan, il l'a dit, fait fond sur l'opinion que la Cour a exprimée au sujet de la réserve relative aux traités
multilatéraux dans l'affaire du Nicaragua. Je consacrerai donc l'essentiel de mon exposé, Monsieur le président, à la
réserve relative aux membres du Commonwealth.Il y a, semble-t-il, à cet égar d, quelque méprise de la part de l'Inde. Le Pakistan ne ch erche pas à présent à soutenir
que la réserve relative aux membres du Commonwealth est en tachée de nullité, même si l'argumentation de l'Inde a
porté essentiellement sur la question de savoir si cette réserve était ou non dénuée de validité. Tous les arguments de
l'Inde relatifs à la grande li berté dont disposent les Etats da ns la formulation de leurs ré serves sont à côté de la
question. Le Pakistan ne conteste pa s que les Etats puissent fo rmuler ce que nous avons a ppelé dans nos exposés

liminaires des «réserves extr a-statutaires», c'est-à-dire des réserves sortant du cadre prescrit au paragraphe3 de
l'article 36 du Statut.

Le raisonnement du Pakistan est plus subtil. Certes, il a pour postulat de départ que la réserve n'est pas conforme aux
dispositions du paragraphe3 de l'ar ticle36 --elle n'entre dans aucune des catégories qui y sont énoncées; il est
inutile que je répète no s arguments à ce sujet. Toutef ois, notre conclusion n'est pas que la réserve est nulle. Mais
seulement qu'elle ne peut être invoquée à l'encontre du Pakistan. Elle est inopposable au Pakistan, et cela parce que,
comme l'a expliqué le Pakistan dans ses exposés liminaires , une réserve extra-statutaire ne peut être invoquée qu'à
l'encontre d'un Etat qui, d'une façon ou d'une autre, a montré qu'il acceptait l'existence d'une telle réserve. Soit que

l'Etat demandeur ait lui-même formul é une réserve comparable, ce qui l'empê che de contester l'opposabilité de la
réserve invoquée par le défendeur. Soit que l'Etat demandeur ait choisi de contester la réserve sur le fond. La Cour,
vous vous en souviendrez, a eu à se pencher sur certains aspects de cette question dans l'affaire de la Comp ténce en
mati èe de p êheries (Espagne c. Canada) . En définitive, son approche a consis té à constater que les arguments de
l'Espagne portaient sur l'interprétation de la réserve du Canada, et non sur la vali dité de cette dernière, de sorte que
la Cour ne s'est pas prononcée sur la question de la validité ou de l'opposabilité de la réserve canadienne.

Ce que je suggère ou déclare ainsi, Monsieur le président, c'est que le Pakistan ne soutient pas que la réserve relative
aux membres du Commonwealth est nulle, mais seulement qu'elle ne lu i est pas opposable. L'Inde dit que les

arguments du Pakistan sont audacieux, originaux, mais elle part de l'hypothèse qu'ils portent sur la validité. Or, ce
n'est pas le cas. Et dans la mesure où il y a un élément d'original ité, cela n'entraîne pas que le Pakistan a tort. Les
tribunaux sont constamment confront és à de nouveaux points de droit, de nouveaux arguments, remettant en
question ce que l'on croyait tran ché ou général en matière de compétence. Si le droit n'était constitué que de points
déjà traités, les tribunaux n'auraient rien à faire. En d'autres termes, je demande instamment à la Cour d'aborder cette
question avec un esprit ouvert, comme d'ailleurs je suis pe rsuadé qu'elle le fait déjà . Permettez-moi de le dire
respectueusement, l'élément d' originalité que contie nt l'argumentation, le fait qu'elle suggère à la Cour une façon
d'aborder la résolution de ce problème, ne sont de nature ni à l'af faiblir, ni à l'infirmer. Le Pakistan a suggéré à la
Cour une manière d'échapper a ux limites posées par une réserve qui est, ains i que je l'ai fait valoir précédemment,

caduque. Elle n'a vraiment plus sa place dans le monde contemporain.

L'Inde n'a rien répondu à la démonstration du Pakistan que, d'une part, la compétence obligatoire ne pose en général
pas de problème à l'Inde dans certaines situations, et que, d'autre part , l'Inde accepte l'a pplicabilité du droit
international dans ses relations avec le Pakist an. Elle n'a rien répondu au sujet de l'affaire du Rann de Kutch , de
l'instance concernant l'OACI portée devant cette Cour, de l'effet obligatoire des dispositions de la Convention des
Nations Unies sur le droit de la mer de 1982 ou du mémorandum d'accord concernant le règlement des différends de
l'Organisation mondiale du comm erce. Pourquoi ces silences? Pourquoi l' Inde ne tente-t-elle pas d'établir une
distinction entre tout cela et ce que, le Pakistan le souligne, nous trouvons en l'espèce, c'est-à-dire une situation où

s'applique la juridiction obligatoire ? Je me permets de suggérer, Monsieur le président, que si l'Inde s'abstient d'agir
ainsi, c'est qu'il est humiliant pour un Et at d'accepter de s'exposer autant à des actions en justice dans les cas que je
viens d'énumérer, et de refuser malgré cela de se présenter devant la Cour dans le cadre de la présente affaire.

L'argumentation du Pakistan montre que le recours par l'Inde à la ré serve relative aux membres du Commonwealth
constitue tout simplement une façon arbitrai re d'empêcher le Pakistan --et lui seul-- de sais ir la Cour. Le Pakistan
dit que cela contrevient au principe de la bonne foi. A ce propos, il renvoie à l'accord de Simla, non pas en tant que
fondement direct et unique de la compétence de la Cour, ma is en tant que confirmation du fait que l'Inde n'a pas le
droit d'invoquer la réserve relative aux membres du Commonwealth pour exclur e la compétence de la Cour en

l'espèce. Comment peut-on sérieusement s'engager, comme l'Inde l'a fait da ns l'accord de Simla, à régler les
différends par des moyens p acifiques, et opposer ensuite la réserve relative au Co mmonwealth dans une affaire
comme celle-ci ? Je prie instamment la C our, Monsieur le président, d'examiner les éléments factuels de la présente
affaire, de la relation particulière entre l'Inde et le Pakistan créée par l'accord de Simla. L'Inde ne peut pas, d'un côté,
en se réclament de cet accord, faire un geste amical, en disant «nous règlerons nos différends par

des moyens pacifiques dont nous conviendrons» et, de l'autre, lorsque le Pakistan invoque ces moyens pacifiques,
qui existaient avant l'accord de Simla et continuent d'exister depuis, dire «non, nous allons nous en tenir strictement

aux termes de notre réserve».A cette argumentation, Monsieur le Présiden t, l'Inde n'a pas apporté de réponse, et je soutiens qu'elle n'est pas en
droit de revenir à ces points à ce stad e des débats. S'étant tenu e à une position préparée d'avance sur la réserve
relative au Commonwealth, elle n' a fait valoir aucun élém ent nouveau pour répondre au Pakistan à ce sujet.
Monsieur le Président, j'éviterai, comme vous nous y exhortez, les répétitions inutiles. Si toutefois il s'avère que j'ai
mal identifié les questions que je peux à juste titre laisser de côté , je serais très reconnais sant aux membres de la

Cour qui souhaiteraient des éclaircissements de me poser toutes les questions qu'ils jugeraient nécessaires.

Il a été dit au nom de l'Inde qu'il n'y a pas de limites aux réserves qu'un Etat peut faire et que c'est une bonne chose
que les réserves soient permises. Cela me paraît très discutable . Les déclarations faites en vertu de la clause
facultative ne semblent guèr e avoir constituer une sour ce significative de compéten ce pour la Cour, sauf que
l'examen d'exceptions préliminaire s lui a donné beaucoup de travail. Es t-ce une bonne chose ? Le règlement
judiciaire des différends a-t-il été facilité par une telle approche des choses ? Et, surt out, la question de la liberté de
faire des réserves a toujours été examinée dans le contexte de l'éventuelle nullité d'une réserve extra-statutaire. Mais
la thèse du Pakistan ne va pa s si loin. Il ne cherche pas à empêcher que l'on fasse des ré serves extra-statutaires. Il

admet qu'elles peuvent produire des effets lorsque l'Etat défendeur montre qu'il les accepte. Tout ce que le Pakistan
dit, c'est qu'une réserve extra-statutaire n'est pas opposable à un Etat qui ne l'accepte pas.

En tant que telle, la réserve n'est pas entachée de nullité . La condition qu'elle pose ne s oulève pas le problème de la
divisibilité. Simplement, on ne saurait y recourir cont re un Etat qui s'y oppose et qui n'a rien fait auparavant pour
donner l'impression qu'il l'accepte. La Cour n'a jamais eu l'occasion d'examiner ce point et n'a donc jamais exclu
cela. Le Pakistan soutient que c'est là une approche que la Cour peut et, je le dis av ec tout le respect voulu, devrait
légitimement adopter.

J'en viens à un autre point, Monsieur le Président. Mon savant ami, M. Brownlie, a admis à un moment donné que
certaines réserves peuvent être entachées de nullité. Il l'a fait avec circonspection. Il cherchait à discerner les affaires
dans lesquelles des juges ont fait obser ver à titre individuel que les réserves ne devraient pas êt re contraires au
Statut, mais il a dit que leur s opinions se rapportaient toutes au paragraphe 6 de l'arti cle 36, le paragraphe énonçant
le droit de la Cour de déci der de sa propre compétence. Il a négligé la mention par le Pakistan de l'observation de
M.Ago dans l'affaire Nauru concernant la désuétude et l'inapplicabil ité de la réserve relative au Commonwealth
britannique, observation qui -- émanant d'un juge d'une telle expérience et d'une telle stature -- ne risque guère de ne
pas être prise en consid ération. Pourtant, cela ne suffit pas à exclure l'application --cela ou en d'autres termes la

relation entre les juges qui ont ouvert la porte à la possibilité de contester une réserve sur la base du paragraphe 6 de
l'article 36. Cela ne suffit pas à excl ure l'application d'un rais onnement comparable à des réserves incompatibles
avec le paragraphe 3 de l'article 36. M. Brownlie n'a rien suggéré qui puisse permettre de distinguer les deux cas de
figure. Je considère que si on peut c ontester, comme M.Brownlie semble l'ad mettre, la compatibilité d'une réserve
avec le paragraphe6 de l'ar ticle 36, on peut tout aussi bien contester sa compatibil ité avec son paragraphe3 --
toujours en supposant que les conditions énoncées s'y prêtent. D'ailleurs, je le dis en passant, M. Brownlie a abordé
la question du point de vue d'une nullité résultant de l'incompat ibilité. La suggestion du Pakistan est bien moins
audacieuse -- non la nullité, mais l'inapplicabilité -- et est donc plus facilement acceptable.

M. Brownlie avance ensuite un argument tendant à démontrer que le concept de désuétude, s'il est recevable, ne l'est
que par rapport à l'ensemble de la déclaration dont la réserve désuète est un élémen t. Mais indépendamment de
l'autorité qui s'attache à une déclaration faite par lui -- et je concéde qu'elle est grande -- il n'a avancé aucune
considération objective à l'a ppui de sa position. L'Inde a peut-être réaffirmé sa réserve relative au Commonwealth
en1974, mais cela n'empêche pas qu'elle ait été désuète au moment mê me où elle a été a doptée ou réaffirmée.
Comme je l'ai dit à la Cour lundi, la date limite de la validi té de la réserve relative au Commonwealth est passée
depuis longtemps. Le fait qu'elle figure encore à l'étal ne lui donne pas une qualité supplémentaire.

Permettez-moi maintenant, Monsieur le président, de passer à la question de la survie de l' Acte général. Je laisse de

côté la question de la clause facult ative, mon point de vue étant que cet te réserve de l'Inde relative au
Commonwealth n'est pas applicable au Pakistan et que la Cour peut légitimement partir de ce principe.

La deuxième thèse de l'Inde -- à titre subsidiaire ou complé mentaire -- est que la Cour a compétence en vertu de
l'Acte général de 1928. Le Pakistan prét end que l'Acte général est un vestige de la Société des Nations, aujourd'hui
disparue. Je me vois dans l'obligation de faire observer que la relation entre l'Acte général et la Société des Nations
ou, pour reprendre le terme empl oyé par certains, la dépendance de l'Acte à l'égard de la Société des Nations, a été
quelque peu exagérée.

Si vous me le permettez, M onsieur le président -- et je n'ai pas l'intention d'y cons acrer beaucoup de temps -- je
souhaiterais que nous jetions un cou p d'Œil ra pide sur le texte de l'Acte général. Le cha pitre I, la Cour s'ensouviendra, porte sur la concil iation, et la seule mention de la Société des Nations que l'on trouve dans ce chapitre
figure dans son article 9, qui indique que, sauf accord contraire des parties, la Commission de conciliation se réunira
au siège de la Société des Nations, ce qui ne peut guère être considéré comme le sign e d'une forte dépendance à
l'égard de l'existence de la Société des Nations.

Passons maintenant au chapitreII, qui traite du règlement judi ciaire, chapitre dont les dispositions sont invoquées
par le Pakistan. Ce chapitre ne contient pas un mot relatif à la Société des Nati ons. Il en va de même du chapitre III
concernant le règlem ent arbitral. On arrive donc ainsi au chapitreIV , Dispositions générales, et c'est seulement à
l'article 43 qu'on trouve une mention de la Société des Nations. Cet article se lit comme suit :

«Le présent Acte général sera ouvert à l'adhésion de tout ch ef d'Etat ou de toute autre
autorité compétente des Membres de la Société des Nations, ainsi que des Etats
non membres à qui le Conseil de la Société des Nations aura , à cet effet, communiqué une

copie.»

Indépendamment de la question de la composition fermée, que j'aborderai ulté rieurement, c'est la référence à la
Société des Nations à l'article 43, puis à l'article44, où il est dit que l'Ac te «entrera en vigue ur le quatre vingt
dixième jour qui suivra la ré ception, par le Secrétaire général de la So ciété des Nations, de l'adhésion d'au moins
deux Parties contractantes» qui, manifest ement, a perdu son sens en raison des événements . De plus, l'article45
contient une disposition relative à la dénonciation, qui devait se faire par notif ication écrite adressée au Secrétaire
général de la Société des Na tions, et l'article46 stipule qu'un exemplaire du présent Ac te général sera déposé aux
archives de la Société des Nations. Enfi n, l'article47 fait mention de l'enregistrement de l'Acte par le Secrétaire

général de la Société des Nations.

Je ne voudrais par manquer de respect à M. Morozov, dont l'opinion a été citée par l'Inde, mais le très grand respect
que j'ai pour lui n'empêche pas que le te xte que je viens de présen ter à la Cour ne corrobor e pas vraiment sa thèse
selon laquelle l'existence et l'application de l'Acte général étaient si étroitement liées à la Société des Nations que sa
survie était subordonnée au main tien de celle-ci. De plus, comme la Cour le sait, les fonctions de la Société des
Nations du type de celles qui s ont visées dans l'Acte géné ral ont été transférées à l'Or ganisation des NationsUnies
par des résolutions concordantes de la derniè re session de l'Assemblée de la Soci été des Nations et de la première
session de l'Assemblée générale de l'ONU. La résoluti on pertinente est la résolution24(I) de l'Assembléegénérale

du 12 février 1946. Il suffira que je vous en lise quatre brefs extraits :

«L'Assembl eég né éle déclare qu'en principe et sous réserve des dispositions de la présente
résolution et de la Charte, l' Organisation est prête à assumer certaines fonctions et certains
pouvoirs précédemment confiés à la Société des Nations, et elle adopte les décisions
énoncées ci-dessous aux paragraphes A, B et C.»

Puis, plus loin :

«Ces fonctions comprennent: la réception de nouvelles sign atures et instruments de
ratification, d'adhésion et de dénonciation; la réception de notifi cations relatives à
l'extension de ces instruments soit aux colonies ou possessions d'une partie…; la
notification de ces actes aux autres parties… Toute interr uption», poursuit la résolution,
«dans l'accomplissement de ces fonctions serait contraire aux intérêts de toutes les parties.»

La résolution poursuit :

«En cons qéence : lAs'emblée g n raé é déclare que l'Organisation est disposée à accepter
la garde de ces instruments et a chargé le Secrétariat de l'Organi sation d'assumer pour le
compte des parties les fonctions de secrétariat précédemment confiées à la Société des
Nations.»

C'est tout ce qui, dans cette résolution de l'Assemblée, est réellement nécessaire pour montrer que l'Organisation des
NationsUnies était à même d'assumer le s fonctions précédemment exercées par le Secrétaire général de la Société

des Nations, ou a été habilitée à le faire. L'accomplissement de ces fonctions par le Secrétariat de l'Organisation est
attesté, comme la Cour le sait bien évidemment, par ce volume massif dit des traités multilatéraux qui est déposé
auprès du Secrétaire général et à la dernière section duquel on trouve des référe nces aux divers traités conclus sous
les auspices ou dans le cadre de la Société des Nations, ou en associa tion avec elle, lors que les fonctions
correspondantes sont maintenant assumées par le Secrétariat de l'ONU.Il y a dans cette résolution, et je le dis entre parenthè ses, une disposition additionnel le que la Cour pourrait, me
semble-t-il, souhaiter ne pas perdre de vue. Elle fait l'objet de la section C, intitulée «Fonctions et pouvoirs résultant
de traités, conventions, accords et autres instruments internationaux de caractère politique» et se lit comme suit :

« 'ssembl e é n ré é étudiera elle-même ou soumettr a à l'organe compétent des
Nations Unies toute demande émanant des parties et tendant à ce que l'Organisation assume
les fonctions ou pouvoirs confiés à la Société des Nations pa r des traités, conventions,
accords et autres instruments internationaux de caractère politique.»

Pour autant que je le sache, aucune demande de ce type n'a jamais été faite à l'Organisation des Nations Unies en ce
qui concerne l'Acte général. L'absen ce de position des parties à l'Actegéné ral semble montrer qu'elles ne voyaient
pas en lui un instrument de caractère politique. Et cela peut êt re pertinent à un autre st ade de la procédure en
l'espèce, lorsque l'opinion selon laquell e il ne devrait pas y avoi r de succession en ce qui concerne les traités

politiques sera examinée. Mais comme je l'ai dit, Monsieur le président, ce n'est qu'une parenthèse.

Je voudrais juste aborder un instant la suggestion que les Etats parties à l'Acte général constituant un cercle fermé, la
participation du Pakistan se trouve exclue. Monsieur le président, je considère -- et j'apporterai dans un moment des
éléments significatifs à l'appui de cette thèse--que cela ne peut pas concerner le Paki stan parce que celui-ci est
devenu participant en succédant à une Inde qui, a uparavant, n'était pas divisée. Le Pakistan 'était pas une nouvelle
partie, il 'aas été exclu de la participati on à l'Acte général parce qu'il ne cherchait pas à devenir une nouvelle
partie. Il était partie parce que l'Inde l'était dès le début.

Maintenant, Monsieur le président, j'en viens à une série de cons idérations assez importantes sur la nature de la
succession intervenue en Inde en 1947. M on savant ami, M.Pellet, s'est réfé ré à la convention de Vienne de 1978
sur la succession d'Etats en matière de tr aités. Ce n'est pas très important; mais je dois souligner que ce traité, cette
convention, par ses termes mêmes ne s'applique qu'à une succession intervenant peu après l'entrée en vigueur et non
à des événements qui se sont produits trente ans plus tard. Et si certaines dispositions de ladite convention peuvent
être considérées comme relevant de questions de droit intern ational coutumier, ce n'est en revanche pas le cas de
l'approche assez technique qui y est adoptée pour aborder d'autres aspects de la succession d'Etats, aussi n'ai-je
mentionné ce point que pour l'écarter.

Toutefois, l'important dans cette affair e ce sont les faits, et la manière dont l'Inde envisage la question de la
succession ne cadre pas avec les faits. C'est là un point cap ital et en ce qui me concerne, ce sont eux que je
privilégierai, comme je vais maintenant le prouver.

M. Pellet a vu dans la situat ion de l'Inde celle d'un Etat nouvellement indépendant qui hé rite de la personnalité de
l'Inde britannique. D'après lui, le Pa kistan, pour sa part, a été séparé de l'Inde et sa succession pose d'autres
problèmes. Quelle était la si tuation véritable? Pour répondre à cette quest ion, Monsieur le président, Madame et
Messieurs de la Cour, nous devons nous reporter à nouveau au troisième volume des Partition Proceedings . Je dois

dire que je n'ai vu aucun ex emplaire de ce volume jusqu' à la journée d'hier, où très aimablement l'Inde nous en a
fourni un. M. Pellet s'est donné beaucoup de peine pour démontrer que l'I nde n'avait pas escamoté ce document à
dessein, et je n'avais assurément pas voulu donner à penser à quelque dissimulation intentionnelle, bien que je tienne
à souligner que, conformément au Règlement de la Cour, l'Inde aurait dû déposer en même temps que son contre-
mémoire le document auquel elle se référa it. En tout état de cause, je suis reconnaissant à l'Inde d'avoir mis un
exemplaire à notre disposition et d'en avoir aussi, semble-t-il, fourni un à la Cour; j'ai donné aux interprètes un
exemplaire tronqué qui contient, je l'espère, toutes les pages auxquelles je vais me reporter.

La situation qui ressort des Partition Proceedings est quelque peu différente de cel le antérieurement exposée par
l'Inde. Pardonnez-moi, Monsieur le président, de passer beaucoup de temps à lire, mais c'est là une étude assez
intéressante -- qui me donne parfois l'impression d'être une sorte de détective éclaircissant un mystère. C'est aussi le
seul moyen que j'ai de porter à la connaissance de la Cour les subtilités de la situation. J'ai dans la main, Monsieur le
président, une photographie donnée par l'Inde du volumeIII des Partition Proceedings . La page de couverture
indique qu'il a été imprimé en Inde par l'Imprimerie nationale à New Delhi, en 1948. En arrière-plan à l'étude de ce
volume, la Cour doit avoir présen ts à l'esprit les termes de l' Indian Independence Act de1947, qui est entré en
vigueur le 18juillet1947. Je dois menti onner expressément deux dispositions montrant bien qu' il était prévu que
l'Inde et le Pakistan deviennent deux dominions distincts sur un pied d'égalité; il n'est pas question d'une quelconque
supériorité accordée à l'Inde en vertu de sa personnalité internationa le préexistante ni d'une quelconque

subordination du Pakistan du fait de sa séparation d'avec l'Inde.

Il ressort de la conception d'ensemble de l' Act que nous avons affaire à deux Etats é gaux et indépendants, principeque traduisent deux dispositions: section1, paragraphe1, à dater du 15 août1947, deux dominions indépendants
seront créés en Inde qui seront connus respectivement sous les noms d'Inde et de Pakistan. La seconde disposition --
qu'il ne faut pas oublier -- est celle de la section 9, qui donnait au Gouverneur général le pouvoir de promulguer les
ordonnances qu'il jugeait nécessaires ou indiquées à diverses fins. C'est au titre des dispositions de cette section qu'a
été prise l'ordonnance relative à l'indépendance de l'Inde (accords internationaux) de 1947, -- promulguée le 14 août

1947--, avant l'indépendance le 15août. De sorte que la répartition --sur laquelle je reviendrai dans un moment--
des obligations découlant de traités a été stipulée avant l'indépendance. Il ne s'agissait pas d'une dévolution par l'Inde
au Pakistan des droits et obligations découlant d'accords internationaux; il s'agissait d'une que stion réglée avant
même que n'existent les deux dominions.

Après ce rappel des faits, permettez-moi, je vous prie, de vous renvoyer au document lui-même. J'ai déjà parlé de la
page de couverture, avec l'indication de pr ovenance. On peut lire sur la couverture « Partition Proceedings ,
o
volume III, Comité d'experts n III.IX»; suivent la table des matières et neuf chapitres -- nous ne nous intéresserons
qu'au dernier, le chapitreIX, intitulé «Relations extérieures», qui va de la page201 à la page294. En tête de la
section ou du chapitre figure le titre «Relations extérieures». Le pre mier point est intitulé «Rapport du comité
d'experts n IX sur les relations extérieures»; il est précédé d'une liste des membres : composition -- je serai très bref
-- M. Pai, M. Ikramullah, M. Iskander Mirza, M. AchutaMenon, M.Jha en étaient les cinq membres; trois d'entre
eux étaient, ainsi que je crois savoir, Indiens ou Hindous et deux Pakistanais ou Musulmans, il y avait en outre deux
secrétaires.

Commençons par nous intéresser au mandat qui était donné à ce comité : «Examiner les effets de la partition et faire
à ce sujet des recommandations» -- suit une liste de cinq points :

i) des relations des gouvernements successeurs entre eux et avec les autres pays (y compris
les pays du Commonwealth britannique et les tribus limitrophes),

ii) du statut des ressortissants indiens à l'étranger,

iii) de la représentation diplomatique de l'Inde,

iv) des traités et engagements existant entre l'Inde et d'autres pays et tribus,

iv) de l'adhésion de l'Inde aux organisations internationales.

Nous entrons ensuite dans le corps du rapport, avec le s rubriques suivantes: «R elations des gouvernements
successeurs entre eux et avec les autres pays», qui ne présente pas d'intérêt pour nous; «Relations entre l'Inde et le
Pakistan», sur quoi nous n'avons pas à nous arrêter; «Relations des deux dominions avec les au tres pays». Il est
intéressant que dans cette section figure une phrase que j'admets prendre dans un sens hors de son contexte, mais qui
a une incidence sur notre propos : «le Gouvernement britannique», c'est au paragraphe 10, page 205,

«Le Gouvernement britannique s'est rangé à maintes reprises dans le passé à l' avis que les

relations de différentes parties de l'Empire inter se ne sont pas régi es par le droit
international mais sont de car actère organique; toutefois, quell e que soit leur position en
théorie, en pratique, l'un vis-à-vis de l'autre, ils ont la même position d'entité indépendante.

Je ne fais cette citation qu'à l'appui de mon propos de lundi sur l'origine ancienne, la doctrine inter se, de la réserve
relative aux membres du Commonwealth.

On passe à la page suivante à une section très importante (p. 206),

«13. Il est donc clair que dans leurs relations avec les pays étrangers, l'Inde et le Pakistan se
présenteront en unités indépendantes souveraines . A ce titre, ils seront libres de conclure
des traités ou des accords, d'écha nger des représentants diplomatiques et de siéger dans les
organisations internationales.

14. A cet égard, il est nécessaire d'examiner la situation juridique concernant la personnalité
internationale de l'Inde et du Pakistan. MM. Pail, Menon et Jha [il s'agit des membres

indiens du comité] considèrent qu'en réalité, cert aines parties de l'Inde ont été séparées de
l'entité principale qui reste continuatrice de la personnalité internationale de l'Inde actuelle. La partition n'entraînera pa s l'extinction de la personna lité internationale de
l'Inde.» [Traduction du Greffe.]

Je le souligne --même les membres indi ens du comité déclarent qu e la partition n'entraînera pas l'extinction de la

personnalité internationale de l'Inde -- ce qui confirme tout à fait la thèse que j'exposais lundi, à savoir que pour ce
qui est de l'Inde elle-même nous avons une situation de continuité.

«Parmi les nombreuses raisons qui étayent ce point de vue, il suff it de mentionner les
suivantes :

o
a) La clause n 2 de l' Indian Independence Act précise clairement que les
territoires de l'Inde ser ont les territoires relevant de la souveraineté de
SaMajesté qui, à la veille du jour fixé, faisaient part ie de l'Inde britannique
avec certaines exceptions; cette dispos ition établit l'identité du dominion de
l'Inde avec l'Inde d'aujourd'hui.

b) Une fois que certaines part ies septentrionales et orientales de ses territoires
sont retranchées de l'Inde, il reste en core à celle-ci près des trois-quarts du
territoire, ainsi que la capitale de l'Etat [c'est-à-dire l'Inde].

C'est un principe reconnu de droit in ternational qu'une réduction de la
superficie d'un Etat ne fait pas disparaître l'identité de celui-ci pour autant qu'il
en subsiste une partie essentielle. D'après les spécialistes du droit international,
on considère qu'un Etat conserve son iden tité aussi longtemps qu'il lui reste
une partie du territoire qui peut êt re reconnue comme essentielle par la
préservation de la capital e ou du noyau territorial d'or igine, ou qui représente
l'Etat par la continuité du gouvernement, soit comme vestige indépendant, soit
comme le centre d'une organisation élar gie. La question es t de savoir s'il

subsiste un noyau suffisant de territoire avec la capitale et la continuité du
gouvernement pour continuer d'assumer une personnalité capable de s'acquitter
de ses obligations générales. Toutes ces conditions seront remplies par la partie
résiduelle qui subsistera après la sécession et la constitution de certains
territoires en Gouvernement du Pakistan.

c) Le fait est que la partition de l'Inde ne résulte pas d'une révolution qui aurait
occasionné, même moment anément, le re nversement du gouvernement établi

légitimement et par conséquent l'extinction de la personnalité internationale de
l'Inde.

d) Il est entendu que le Gouvernement de Sa Majesté a reconnu que le
dominion de l'Inde hérite de la personnalité internationale de l'Inde britannique
mais, en dernier ressort, cette question sera tranchée par les organisations
internationales compétentes.»

Puis vient le paragraphe 15, qui est important :

«15. M.Ikramullah et le li eutenant colonel IskanderMi rza [ce sont les membres
musulmans du comité] n'acceptent pas la thèse selon laquelle le domi nion de l'Inde sera
seul continuateur de la personnalité internat ionale de l'Inde actue lle. Ils considèrent
fermement que le 15 août, il naîtra deux dominions in dépendants ayant un statut
international égal comme successeurs du Gouvern ement de l'Inde existant, qui disparaîtra
entièrement en tant qu'entité. Cette thèse est renforcée par le fait qu'aujourd'hui deux
gouvernements fonctionnent dans le pays, l'un pour le Pakistan et l'autre pour l'Inde, sur un

pied d'égalité. Le texte de l' Indian Independance Act ne confirme aucunement la thèse
avancée par leurs collègues. Il crée deux dom inions indépendants à partir de l'Inde
existante.»

Monsieur le président, voilà la première indication de la divergence de vues qu'il a fall u par la suite résoudre dans
l'ordonnance relative à l'indépendance de l'Inde (accords internationaux) dont l'annexe a été lue devant la Cour et qui
constitue une convention internationale entre les deux pays. Nous sommes fon dés à prendre tout cela enconsidération en lisant cette ordonnance.

Je reconnais que, lundi, j'ai indiqué que l'on n'avait pas le droit d'alle r chercher, derrière l'ordonnance, lesPartition
Proceedings comme travaux préparatoires, etc. Ma is, Monsieur le président, c'était lundi, et aujourd'hui j'ai vu les

Partition Proceedings et j'aurais tout à fait tort de prétendre que ces textes n'ont aucune incidence sur la tâche qui
incombe à la Cour.

Après m'être reporté à la page 207, où j'ai lu les paragraphes 13 à 15, j'ai laissé de côté les références au conseil des
tribus ainsi qu'à la situation des ressortissants indiens à l'étranger et à la représentation diplomatique; j'en arrive ainsi
à la page 213 :

«42. Traités et engagements exista nts entre l'Inde et d'autres pays et tribus. L'annexeV

[c'est-à-dire la liste de traités dont nous avons parlé] contient une list e des traités,
conventions, accords, etc., co nclus par le Gouvernement de l'Inde ou par le gouvernement
de Sa Majesté et qui concernent l'Inde. Les traités ont été classés en trois catégories :

A. Ceux qui intéressent exclusivement le Pakistan.

B. Ceux qui intéressent exclusivement l'Inde.

C. Ceux qui intéressent les deux Etats.

La liste comprend aussi les traités et accords conclus avec les tribus, tant sur les frontières
du nord-ouest que sur les frontières du nord-est.»

Les développements se poursuivent, paragraphe 43 :

«43. La situation juridique semb le être la suivante : si l'Inde diminuée du Pakistan
conserve, sur le plan international, la perso nnalité juridique qui étai t la sienne avant la
partition, elle continuera, pour le reste de son territoire, d'être soumise aux obligations et de
jouir des droits résultant de tous les engagements internationaux auxquels l'Inde était partie
avant la partition, soit directement, soit par l'intermédiaire du gouvernement de Sa Majesté,
à l'exception de ceux dont découlent des droits qu'elle ne peut exercer ou des obligations
dont elle ne peut s'acquitter en raison de la partition. Ni un éventuel changement dans son
ordre constitutionnel ni l'acquisit ion, par elle, de la qualité de dominion ne modifieront
cette situation. En revanche, la situation du Pakistan à cet égard n'est pas très claire. Si on le

considère comme un nouvel Etat, d'aucuns pensen t qu'il ne sera pas lié par les traités
auxquels l'Inde était partie avan t la partition et qu'il ne pourra pas jouir des droits qui en
découlent. Cette conclusion est également co rroborée par l'opinion des experts en droit
international…»

Suit une citation de sir Thomas Holland, dont je ne donnerai pas lecture. En revanche, il semble que le Pakistan soit
lié par les traités conclus par le gouvernement de Sa Ma jesté au nom des membres du Commonwealth britannique.
Nous consi dérons, par exemple, que les tra ités afghans conclus entre le gouve rnement de Sa Majesté et le
Gouvernement afghan restent en vigueur pour ce qui est du Pakistan.

Je passe à la page 214, paragraphe 44 :

«44. Sir Dhiren Mitra, Solicitor du Gouvernement de l'Inde, a exprimé le point de vue
suivant sur les droits et les obligations de l' Inde et du Pakistan né s des traités existants
appartenant aux trois catégories, à savoir [comme je viens de vous en donner lecture] :

a) les traités qui intéressent exclusivement le Pakistan,

b) les traités qui intéressent exclusivement l'Inde,

c) les traités qui intéressent les deux Etats, tels que mentionnés ci-après.»

Je continue de citer -- dans le passage que je vous lis se trouve une citation de sir Dhiren Mitra, qui exprime le point
de vue suivant : «Les traités de la catégorie a) dans votre lettre du 16juillet [qui n'est pa s incluse et que je
n'ai pas lue] relèvent de l'exception mentionnée au paragraphe 1 de ma note [je n'ai pas non
plus vu ce document]: ils lieront le Pakistan et ne seront pas transmis au dominion de
l'Inde. Les traités afghans relati fs aux frontières sont attachés au territoire et lieront le
Pakistan en tant qu'Etat successeur pour ce qui est des intérêts liés au territoire concerné.

Les traités qui se range nt dans la catégorie b)seront bien entendu dévolus au dominion de
l'Inde.

c) Les traités qui intéressent le s deux Etats déploieront leurs effets comme s'ils étaient
entrés en vigueur aprè s consultation entre le s gouvernements des deux dominions,
conformément à la procédure indiquée dans l'ouvrage de McNair sur les traités à la page 70
b).»

J'ai consulté l'ancienne édition de Mc Nair, publiée avant le volume de 1960 sur le s traités. Je me suis reporté à la
page en question. Elle n'éclaire pas beaucoup le débat. Ce qui importe en l'occurrence, c'est que sir Dhiren Mitra dit
que les traités qui intéressent les deux Etats déploieront leurs effets comme s'ils étai ent entrés en vigueur après
l'accomplissement des formalités requises -- à l'époque.

Je poursuis la lecture de l'opinion de sir Dhiren :

«Dans ce contexte, rien ne distingue un traité conclu par le Gouvernement de l'Inde en tant
que partie contractante d'un traité conclu par le gouvernem ent de Sa Majesté pour le
compte de l'Inde impériale. Les traités existants demeurent en vigueur et continuent de
déployer leurs effets comme i ndiqué plus haut et ne se ront pas abrogés par l'acte
d'accession à l'indépendance de l' Inde, sauf dans la mesure pr évue à l'article7 dudit acte
[qui ne nous concerne pas ici]. A ce sujet, il y a lieu de garder à l'esprit que l'acte
d'accession à l'indépendance de l' Inde se borne à modi fier la Constitution de l'Inde, mais
que la Couronne n'est pas touchée.»

Il poursuit :

«Nonobstant le fait que le dominion de l'Inde conservera, sur le plan international, la
personnalité juridique de l'Inde actuelle, comme cela re ssort de ma note, il ne s'ensuit pas
que le dominion du Pakistan n'aura pas de personna lité juridique propre à compter du
15 août 1947. De fait, il sera doté d'une telle personnalité.»

C'est ainsi que s'achève la citation de sir Dhiren Mitra. Le texte du rapport se poursuit en ces termes : «45. Le comité
n'est pas dans la possibilité, compte tenu des brefs délais qui lui sont impartis» -- je souligne «compte tenu des brefs
délais qui lui sont impartis» pa rce que, comme je l'ai dit lundi , tout a été fait dans la pr écipitation -- «de procéder à
un examen plus approfondi des aspects ju ridiques de la question et de parvenir à une opini on autorisée. Le comité
recommande…» --et je relève le mot «recommande», parc e que plus tard, comme vous le verrez, il est suggéré ou
indiqué de suivre la recommandation du comité ; voici sa recommandation :

«que les deux gouvernements s'a ttachent immédiatement à obtenir , sur tous les aspects de
la question, l'opinion de juristes experts en la matière. N ous recommandons également que

les dispositions de tous les traités soient examinées de près par les deux gouvernements. Par
la suite, il sera loisible à ces derniers, le cas échéant, de conclure de nouveaux accords avec
les autres Parties contractantes.»

Nous en arrivons, Monsieur le p résident, aux pages 214 et 215. Suit la rubrique «Q ualité de membre aux
organisations internationales. L'annexe VI énumère les organisations internationales et les organes subsidiaires dont
l'Inde est membre.» Nous renvoyons ensuite aux paragraphes 14 et 15 au sujet du maintien, pour ce qui est de l'Inde,
de la qualité de membre des organisations internationales. «La procédure spéciale concernant la qualité de Membre
de l'Organisation des Nations Unies es t énoncée à l'annexeVII. » Ce paragraphe est suiv i des signatures des cinq

membres et des deux secrétaires du comité.

Il y a donc lieu, Monsieur le président, de garder à l'esprit que le document dont je viens de vous donner lecture n'est
pas un accord conclu par les deux Parties, bien qu'il ait été signé par les cinq membres du comité. Il s'agit seulement
d'un document contenant une analyse et des recommandations de portée très limitée.Nous passons, Monsieur le p résident, à l'annexeV, qui débute à la page217 et s'inti tule «Liste des traités,
conventions, accords, etc. intéressant l'Inde ou applicables à l'Inde auxquels celle-ci est partie». La liste est attribuée
au ministère indien des affaires extérieures et des relations avec le Commonwealth, la branche chargée des relations
extérieures. Vient ensuite une soixantain e de pages où sont énumér és les traités auxquels l'I nde était partie, et cela

jusqu'à la page276. Comme je l'ai indiqué lundi, Monsieur le président, cette liste n'est pas totalement exacte. Elle
comporte de très importantes omissions. C'est ainsi que, comme je l'ai relevé avant-hier, les conventions de Genève
de 1929 relatives au traitement des prisonniers de guerre et pour l'amélioration du sort des blessés et des malades ont
été oubliées. Manquent aussi quarante-troi s traités d'extradition; le protocole et la convention de1923 relatifs aux
clauses d'arbitrage ne figurent pas non plus dans la liste. Si la Cour souhaitait se fair e une opinion indépendante de
la chose, elle pourrait, je pens e, consulter la publication de l'International Law Association du droit international
consacrée aux effets de l'indépendance sur les traités, où il est fait mention de ces questions à la page109. Non
seulement on a omis certains traités dans la liste, mais on en a inclus d'autres qui n'avaient pas lieu d'y figurer -- par

exemple le traité entre la Grande-Bre tagne et Bahreïn ou les traités conclus avec les souverains indiens, devenus
caducs. Par conséquent la liste, bien que remarquablement longue, n'est pas exhaustive.

Nous en venons, Monsieur le p résident, à une autre section assez intére ssante. Les annexes sont suivies à la
page 287 de quelque chose qui s'intitule «Note du comité directeur concernant l'effet de la partition sur les relations
étrangères». Les documents ne sont malheureusement pas datés, de sorte que l'on ne peut être absolument certain de
l'ordre dans lequel ils ont ét é rédigés, mais il semble qu e cette section se situe chronologiquement après ce dont je
viens de donner lecture.

«Le rapport du co mité d'experts n o9 chargé d'examiner l'effe t de la partition sur les
relations étrangères est reproduit ci-après. Le comité directeur souscrit en grande partie aux
vues qui y sont exprimées et recommande que les conclusions du comité soient
approuvées.»

Il s'agit des recommandations dont je vous ai parlé voici quelques instants, et qui n'étaient pas bien longues: les
gouvernements y étaient invités à considérer la question après avoir pris conseil. Puis, au paragraphe 2 de la note du
comité directeur, on lit ceci :

«2. Le comité d'experts n'es t pas parvenu à un accord quant à la position juridique
concernant la personnalité intern ationale de l'Inde et du Paki stan (paragraphes14 et15) et
ses effets, le cas échéant, su r les obligations conventionnelles (paragraphes43 et44) et la

qualité de membre d'organisations internationa les (paragraphe47). Le comité directeur se
propose de présenter à ce suje t une note séparée pour examen ultérieur par la commission
de partage.»

Nous passons donc à la page 288, où figure la «décision de la commission de partage» :

«1. La commission approuve les recommandations du comité directeur relatives au rapport
o
du comité d'experts n 9.

2. La commission a pris note que le comité directeur lui soumettrait, pour examen, une note
séparée sur la position juridique concernant le s responsabilités internationales de l'Inde et
du Pakistan et leurs effets, le cas échéant, sur les obligations conventionnelles et la qualité

de membre d'organisations internationales.»

Donc, la décision a été prise avant que la note ne soit présentée. Le docum ent suivant est le texte de cette note --
«Note sur la position juridique concerna nt la personnalité internat ionale et les obligations conventionnelles.» Elle
commence à la page289 et, à en juger pa r ce qui est dit dans un doc ument ultérieur, sur lequel je vais revenir, il
semble que l'auteur en soit M. Patel qui , si je comprends bien, était de nationalité indienne et n'était pas membre du
comité.

«Il convient de déterminer qui hérite des obligat ions internationales contractées par l'actuel
Government of India et des privilèges qui s'y attachent

L'examen de cette question présente un inté rêt vital non seulement pour les dominions de
l'Inde et du Pakistan, mais au ssi pour le gouvernement de Sa Ma jesté et les autres nations
membres d'organisations internationales, et tous doivent pouvoir s'exprimer.»Puis vient ce paragraphe :

«Le secrétaire d'Etat pour les Indes a été info rmé par le Foreign Office que les termes de
l'ndia Independence Act amènent à conclure que le nouveau dominion de l'Inde endosse la

personnalité internationale de l'Inde actuelle. Le comité qui, au se in du conseil des
ministres, a examiné cette question au Royaume-Uni a ét é d'avis que le gouvernement de
SaMajesté devrait accepter cette vue pour tout ce qui touche aux relations extérieures de
l'Inde, mais qu'il serait raisonnable que les biens et avoirs du Gouvernement de l'Inde situés
hors de l'Inde soient inclus da ns la division équitable conjoi nte des biens et avoirs, même
si, d'un point de vue juridique, ces biens et avoi rs devaient en principe échoir à ce qui reste
de l'Inde.»

La note dit ensuite :

«Lors de l'adoption du projet de loi à la Chambre des Co mmunes, le porte-parole du
gouvernement a clarifié la position en ces termes :

«Les dispositions du prés ent projet de loi [autrement dit le futur Indian
Independence Act] ne tranchent pas la question du statut international des deux
nouveaux dominions. Cette question intére sse les Membres de l'Organisation
des Nations Unies et les autres Etats étrangers tout autant que le gouvernement

de Sa Majesté au Royaume-Uni. Notre propre point de vue est que le nouveau
dominion de l'Inde conserve la personnalité internationale de l'Inde existante et
qu'il accèdera par voie de succession, conformément au droit international, à la
qualité de Membre de l'Organisation des NationsUnies qui s'attache à l'Inde
actuelle en tant que signataire originai re de la Charte à SanFrancisco. De
même, les représentants de ce domin ion pourront, selon nous, prétendre
légitimement à la qualité de membre des organisations internationales et
institutions spécialisées existantes a uxquelles l'Inde avait jusqu'ici participé.
Notre espoir est que, dès sa créatio n, le nouveau domin ion du Pakistan
trouvera sa place au sein de la famille des nations et sera rapidement à même

d'apporter sa contribution propre a ux efforts de bonne volonté et de
collaboration de la communauté internationale.»

M. Patel poursuit quelques lignes plus loin :

«Comme l'a fait observer le gouvernement de Sa Majesté dans la déclaration reproduite ci-
dessus, la question ne peut être tranchée qu'à la lumière du droit international en matière de
succession d'Etats et non à la convenance des parties.»

Puis il remarque: «Selon les principe s reconnus, l'identité d'un Etat n'est altérée ni par une modification dans
l'étendue de son territoire, ni par un changement dans sa constitution.»

Et de donner un certain nombre d'exemples, dont voici le dernier :

«De fait, s'agissant de l'Inde elle-même, le fait que tout e la provincebirmane se soit

détachée d'elle en 1937 n'a en ri en altéré son identité en tant qu'entité internationale et que
Membre de la Société des Nations…

A la date de l'institution de s deux nouveaux dominions, la pos ition du dominion de l'Inde
ne sera pas substantiellement modifiée.»

Il passe ensuite aux effets des modifications dans la Constitution :

«il est établi sans l'ombre d'un doute qu'un changement dans la forme de gouvernement ne
modifie d'aucune façon la personnalité internationale d'un Etat.»

Je citerai le paragraphe suivant, page 290, dans son intégralité :

«Dans ces conditions, il ne sera pas permis au dominion de l'Inde, en eût-il la volonté, de prétendre que la création des deux nouveaux dominions a eu pour effet de détruire l'identité
de l'Inde en tant que personne internationale, et qu'en conséquence le nouveau dominion de
l'Inde n'est plus responsable des obligati ons précédemment assu mées par l'Inde. Au
contraire, pour les raisons déjà exposées, le dominion appelé Inde restera, non seulement de
nom, mais aussi en fait, identifiable à la personne internationa le appelée Inde, dont

l'ensemble des obligations et des droits continueront d'êt re assumés ou exercés par le
dominion de l'Inde. Les termes du projet de loi sur l'indépe ndance de l'Inde confirment
cette interprétation.»

Je passe donc directement à la fin de la récapitulation :

«En résumé, la situation qui, da ns le domaine international, résultera de l'institution des
deux nouveaux dominions, est la suivante :

1) Toutes les obligations internationale s assumées par l'Inde actuelle seront
dévolues au dominion de l'Inde et ce dominion pourra légitimement se
prévaloir des droits dont sont assortie s ces obligations. (Entre dans cette
catégorie la qualité de Membre des Nations Unies.)

2) Toutes les obligations internationa les assumées par l' Inde actuelle dont
l'application est limitée à une région englobée dans le territoire du Pakistan

seront dévolues au dominion du Pakistan, ainsi que tous les droits dont sont
assorties ces obligations.

3) Toutes les obligations internat ionales assumées, non pas par l'entité
internationale appelée Inde en tant que telle, mais par le gouvernement de Sa
Majesté au Royaume-Uni au nom des po ssessions britanniques d'outre-mer, et
dont l'application intéresse l'ensemble du territoire de l'I nde seront dévolues
aux deux dominions, ainsi que les droits dont elles sont assorties.»

Nous en arrivons maintenant à la note du comité directeur sur la positi on juridique concernant la personnalité des
deux pays -- c'est-à-dire la note qui devait être présentée pour examen.

«1. La note ci-jointe [c'est-à-dire celle dont je viens de vous donner lecture] sur la situation
juridique relative à la personnalité internationale de l'Inde et du Pakistan et l'effet de celle-
ci sur les obligations internationales a été rédigée par M. Patel et se fonde sur un résumé de
la correspondance échangée entre le secrétaire d' Etat aux affaires indi ennes et S. Exc. le
gouverneur général. M.Mohammed Ali [un me mbre musulman du comité] ne partage pas

l'avis qui y est exposé. Il considère que le Gouvernement de l'Inde actuel disparaîtra
totalement comme entité et que lui succéderont deux dominio ns indépendants, de statut
international égal, qui pourront tous les deux prétendre [succéder] aux droits et obligations
du Gouvernement de l'Inde actuel.» [Traduction du Greffe.]

Nous avons là une indication supplémentaire de la divergence d'opinion entre les parties indienne et pakistanaise au
sujet de la succession véritable. «Cette note est soumise à la commission de partage pour examen.»

Nous en venons donc, Monsieur le président, à la décision de la commission de partage. Cela devient de plus en plus
intéressant.

«Son Excellence [c'est-à-dire sans doute le gouverneur géné ral] déclare qu'il vient de
recevoir un télégramme du secrétaire d'Etat soulignant qu'il est indispensable que le
Pakistan présente sa candidature à l'ONU avant le 10août…» -- cela, pour que le Pakistan
puisse devenir Membre des Nations Unies dès cette session-là.

«Son Excellence déclare que le gouvernement de Sa Majesté ne tient pas à intervenir dans
ce qu'il considère comme une affaire interne entre l'Inde et le Pakistan, mais qu'il lui semble
nécessaire de souligner qu'il existe une grave objection à ce que l'identité nationale de l'Inde
disparaisse du fait de la partition.»Traduction du Greffe.]

Le motif avancé était l'incidence que cela pouvait avoir sur les règles relatives à la dette internationale en cas desuccession d'Etat.

Et il poursuit :

«M.Mohmad Ali [et c'est un me mbre pakistanais du comité] d éclare que selon la formule
qu'il a suggérée, l'Inde continuera d'être me mbre d'organisations internationales comme
l'ONU au nom du dominion de l'Inde à partir du 15août, cependant que le Pakistan
demandera à devenir membre des organisations internationales auxquelles il désire adhérer.
Pour ce qui est des obligations et des droits découlant de traités d'application territoriale il
est décidé que ceux-ci seront dévolus seulement au dominion intéressé. L'avis du Pakistan
est toutefois que les deux dominions devraient assume r toutes les obligations
internationales et bénéficier de tous les droits d écoulant des traités et accords négociés par
le Gouvernement de l'Inde actuel ou par le gouvernement de Sa Majesté pour le compte de

son dominion d'outre-mer. L'avan tage pratique de cette soluti on serait que le Pakistan ne
serait pas obligé d'ouvrir des négociations nouvelles dans ces domaines.» [Traduction du
Greffe.]

Et nous en venons au é d nouement [En français dans le texqui est intéressant.

«Son Excellence [c'est-à-dire le vice-roi] suggère que M. C ooke [M. Cooke était un avocat
anglais très brillant qui était à l'époque membre du service parlementaire de la rédaction de

textes législatifs], le conseiller constitutionnel, soit prié d'élaborer, si possible, une formule
qui répondrait aux besoins des deux parties.» [Traduction du Greffe.]

Je souligne cela :«une formule qui r péndrait aux besoins des deux parties».

«Il présentera cette formule a ux Gouvernements du Pakistan et de l'Inde afin que ceux-ci
l'examinent en conseil, pour ét udier les ordonnances d'application.» [Traduction du
Greffe.]

Vient ensuite la décision de la commission de partage :

«La commission est convenue de demander au conseiller constitutionnel [je crois que c'est
d'élaborer, mais mon exemplaire n'est pas très lisible] d'éla borer, si possible, une formule
qui répondrait aux besoins des deux parties.» [Traduction du Greffe.]

Il s'agit là d'une décision de la commission de partage. «Une telle formul e, si elle est élabor ée, sera présentée aux
Gouvernements du Pakistan et de l'Inde pour approbation.» [Traduction du Greffe.]

Le document suivant, et -- vous serez heureux de l'apprendr e, Monsieur le président -- le dernier, est l'ordonnance
relative ? l'indépendance de l'Inde (accords internationaux) de 1947, qui doit être lue à la lumière du long historique
que je viens de rappeler, et en particulier au regard de la mission donnée au conseiller constitutionnel d'élaborer une
formule répondant aux besoins des deux parties. Et quelle es t cette formule? Eh bien, je vais seulement lire le
premier attendu de l'ordonnance relative à l'indépendance de l'Inde (accords internationaux) : « Attendu que l'accord
figurant en annexe à cette or donnance a été conclu lors d'une séance de la commission de partage, le 6 août 1947»;

nous en venons au paragraphe 4 :

«Sous réserve des articles2 et3 du présent accord [à savoir la question de l'application
territoriale et celle des organisations internat ionales], les droits et obligations découlant
d'accords internationaux auxquels l'Inde est partie à la veille du jour fixé seront dévolus à la
fois au dominion de l'Inde et au dominion du Pakistan et, le ca s échéant, répartis entre ces
deux dominions.»

«[tous les] accords internationaux auxquels l'Inde est partie à la veille du jour fixé seront dévol us à la fois au
dominion de l'Inde et au do minion du Pakistan.» C'est donc de cette manière que le conseiller constitutionnel a
concilié les positions des deux Etats, et a tenu compte à la fois de l'av is de l'Inde et de celui du Pakistan, en
particulier de celui du Pakist an. La situation était celle d'une parthénogenèse, autr ement dit vous avez deux entités,
une cellule qui se divise en deux entités distinctes, dont chacune a sa propre personnali té et hérite, ou assume, ou
contient, peu importe le term e, les droits et obligations d'ordre intern ational de la personna lité internationale
précédente.Monsieur le président, je crois qu'il est l'heure à laquelle vous souhaitez avoir une suspension d'audience, et je peux
très bien m'interrompre ici. J'espère que je n'en aurai ensuite plus pour très longtemps.

Le PRESIDENT : Merci beaucoup, sir Elihu. L'audience est suspendue pour quinze minutes.

La'dience est suspendue de 11 h 15 11 hà35.

Le VICE-PRESIDENT, faisant fonction de président: En raison d'une obligation officielle importante, le président
m'a demandé de présider la fin de l'a udience d'aujourd'hui. Je donne la parole au professeur Elihu Lauterpacht, afin
qu'il poursuive son exposé.

Sir Elihu LAUTERPACHT : Merci, Monsieur le président.

Avant la suspension d'audience, j'ai terminé l'analyse des travaux de la commission de partage. Je ne vais pas tenter
d'énumérer tous les points sur lesquels l'exposé que je viens de faire diffère de celui de mon ami M.Pellet, mais
deux exemples suffiront. Contrairement à ce qu'il a dit, le comité d'experts n'a pas préparé l'annexe où figure la liste
des traités; cette annexe a ét é établie ailleurs et a pu être adoptée par le comité, mais elle n'avait pa s d'autorité
particulière.

Contrairement aussi à ce qu'il a déclaré, le rapport du comité d'experts, bien que signé par les experts, ne constituait

pas un accord -- une position concerté e sur le point en question : aucun accord n'a été c onclu jusqu'à ce que la
commission de partage délègue à M.Cooke le soin de trouver une solu tion, et que celui-ci rédige l'annexe à
l'ordonnance, en des termes qui donnaient un statut égal à l'Inde et au Pakistan en ce qui concerne la succession aux
traités ou leur continuation.

Je devrais peut-être simpleme nt souligner ici que l'Inde et le Pakistan ont commencé leur existence après le 15
novembre en tant qu'Etats placés sur un pied d'égalité. Ce n' est pas que le Pakistan ait fait sécession d'avec un Etat
indien préexistant ou s'en so it séparé. Les termes de l' Indian Independence Act montrent cela assez clairement. Le

préambule, ou le titre --assez long -- de ce texte le décrit comme un instrument destiné à établir en Inde -- ce nom
désignant ici le sous-continent indien -- deux dominions indépendants. Ces deux dominions indépendants sont créés
dans l'ancien territoire de l' Inde et, ainsi que je l'ai dit, l'article premier stipul e «à compter du 15août1947, deux
dominions indépendants seront créés en Inde». La création du Pakistan n' a pas donné lieu à une sécession d'avec
l'Inde, et elle n'a pas impliq ué non plus une subordination du statut international du Paki stan à celui de l'Inde. Les
traités par lesquels l'Inde était liée avant l'indépendance liaient tout autant le Pakistan après l'indépendance, à
l'exception des traités faisant l'objet de dispositions particulières, à savoir ceux qui concernaient la position de l'Inde
à l'égard des organisations internationales et ceux qui étaient d'application territoriale.

Tel est, Monsieur le président, le point de vue que le Pa kistan a par la suite maintenu devant les NationsUnies. La
Cour a devant elle, en a nnexeG au mémoire du Pakistan, un extrait du recueil très volum ineux publié par le
Secrétaire général, sous le titre de «Traités multilatéraux déposés auprès du Secrétaire général». J'ai ici l'exemplaire
de la bibliothèque, mis à jour au 31décembre1997. Evidemment la pa gination n'est pas exactement la même que
celle de l'exemplaire d'où provient l'annexe G au mémoire du Pakistan. Ma is le contenu est le même. La Cou r
trouvera aussi le texte de l'annexe G à la page 1001 de l'édition de 1997.

Or, ce recueil du Secrétaire général contient une référence à ce qui était appelé une notification de succession. Je lis
maintenant, dans la note11 [de la vers ion française] jointe à l' Acte général d'arbitrage de 1928, une notification de

succession émanant du Gouvernement du Pakistan. Donc, le texte -- ou ce qui est censé l'être -- de la notification du
Pakistan, figure à la note 11. La communication du Pakistan n'est pas datée. Nous avons néanmoins réussi à obtenir,
certes plutôt à la dernière minute, mais nous sommes parvenus à obtenir de la mission du Paki stan auprès des
Nations Unies, un exemplaire du texte original communiqué au Secrétaire général. Il est daté du 3 octobre 1973. Si
je précise la date, c'est qu'il faut la rattacher à la réponse, ou à la réaction, de l'Inde, qui a tardé pendant près d'un an,
jusqu'au 18 septembre 1974.

L'aspect le plus singulier du document déposé par le Pakistan le 3octobre1973 est que certains passages semblent
avoir disparu dans la version imprimée du recueil du Secrétaire général. Les passages omis concernent trois endroits

différents de la lettre du Pakistan, et ils ont tous un contenu simi laire -- leur omission ne peut donc guère avoir été
accidentelle. C'est comme si quelqu'un -- je ne dis pas que c'est le cas, mais je dis que c'est comme si quelqu'un --
avait décidé pour une raison quelconque d'omettre dans la version impr imée qui serait diffusée au monde entie r
certains passages de la communication d'origine. Quels étaient ces passages ? Tout d'abord, le troisième paragraphe,
dont les premiers mots, tels qu'ils apparaissent dans le recueil du Sec rétaire général, à la page1020 [de la versionfrançaise] reproduite dans l'annexe G, sont :

«Conformément aux accords ment ionnés au paragraphe premie r [ce qui apparaît dans la
lettre comme suit], le Pakistan est partie [de son chef]* à l'Acte général de 1928 depuis la

date de son indépendance, à savoir le 14 août 1947…»

[*Note du traducteur : le mot «separ ately» n'a pas été traduit dans la ve rsion française du recueil des traités
des Nations Unies; il est rétabli ici entre crochets.]

C'est une date sur laquelle je devrais peut-être m'expliquer : bien que l'Independence Act date la création de ces deux
dominions distincts à compter du 15 août, il était entendu et admis en fait que le Pakistan deviendrait indépendant le
14 août, la veille de l'Inde, en grande partie afin d'éviter de donner l'impression que le Paki stan s'était détaché de
l'Inde nouvellement indépendante. Ce n'est effectivement pas le cas. Cela soit dit en passant. «Le Pakistan est partie
*
[de son chef ] à l'Acte général de 1928 depuis la date de son indépendance, à savoir le 14 août1947, puisque, en
vertu de l'article 4 de l'ordonnance» correspondante, dont le texte est reproduit ci-dessous : «[Le Pakistan] a succédé
aux droits et obligations de l'Inde britannique découlant de tous les traités multilatéraux qui liaient ce pays avant son
partage entre deux Etats successe urs. En vertu» -- et voici les mots, le passage omis: «de la continuité de la
personnalité juridique de l'ex-Inde britannique et» [traduction du Greffe] «de ces accords le Gouvernement
pakistanais n'était pas tenu de faire connaître sa volonté d' adhérer aux conventions mult ilatérales par lesquelles
l'Inde britannique avait été liée.» Le pa ssage «En vertu de la con tinuité de la personnalité juridique de l'ex-Inde

britannique» est omis. Autrement dit, la position juridique fondamentale du Pakistan est ici déformée, ou éludée.

[*En français dans le texte.]

Je passe au paragraphe suivant, qui correspond à la dernière phrase du même paragr aphe de l'annexe G :
«Néanmoins, le Secrétaire général de l'Organisation des Nations Unies a été informé de la situation par la
communication susmentionnée …» Et à cet endroit figurent les mots ci -après, également om is dans texte du
Secrétaire général. Le Secrétaire général a été informé de la si tuation par la communication susmentionnée, et c'est

ici que s'insèrent les mots omis, qui sont les suivants :

«qui comprenait le texte de l'ordonnance applicable rendu e par le dernier gouverneur
général de l'Inde britannique , à savoir l'ordonnance d'indé pendance de l'Inde de1947
(accords internationaux), qui contenait un accord de dévolution entre l'Inde et le Pakistan».

Cela n'a pas été inclus. Pourquoi ? Je l'ignore. Prenons maintenant, sur cett e même page, la suite de ce paragraphe,

après la citation intégrale de l'ordonnan ce d'indépendance de l'Inde (accords intern ationaux) (c'est la lettre originale
du Pakistan) :

«Il ressort de la section 4 de l'accord de dévolut ion, que le Pakistan et l'Inde ont tous deux
accepté d'être liés par toutes les obligations multilatérales de l'Inde britannique, y compris
les obligations au titre de l'Acte général de 1928.»

Et cela ne figure pas da ns la publication du Secrétaire général. Là encore, on se de mande pourquoi, mais le fait est
que cette absence est en elle-même intrinsèquement significative. En effet, si ces mots dont j'ai donné lecture avaient
été inclus, la vraie nature de la succession du Pakistan et de l'Inde aux obligations de l'Inde britannique originelle
aurait d'une manière générale été plus largement comprise.

Vient ensuite le paragraphe 5, partiellement repris dans la communication du Secrétaire général :

«5. Cependant, afin de dissiper tout doute à cet ég ard, et sans préjudice des droits du
Pakistan en tant qu'Etat succ esseur de l'Inde britannique , le Gouvernement du Pakistan
notifie par la présente au Secrétaire général [ces termes ne figurent pas tout à fait sous cette
forme] en sa qualité de dépositaire de l'Acte gé néral que le Pakistan continue d'être lié par
[selon les termes utilisés dans la note du Pakistan] la ratification de l'Inde britannique.»

Et, dans la note du Secrétaire général, il est fait référence à «l'adhésion de l'Inde britannique» à l'Acte général. Cela
semble bien montrer que l'Inde a adhé ré à l'Acte général. A quel moment ? Nous l'ignorons. Mais ce qui compte,

c'est que le terme utilisé dans la note pakistanaise est «rat ification». J'invite donc la C our, à qui une copie de cette
lettre sera bien évidemment fournie, à en tenir compte lorsqu'elle examinera la vraie nature de la succession.Il me semble que cette analyse des Partition Proceedings et de cette lettre amène à s'interroger sur la validité des
vues exprimées par les conseillers juridi ques du Secrétaire général de l'Orga nisation des Nations Unies, auxquelles
M. Pellet a fait référence à la page 16 de son texte. Ce numéro de page n'est peut -être pas tout à fait exact car il me
semble que c'est celui de son texte original et non celui du compte rendu. Ma is il est clair que les conseillers
juridiques du Secrétaire général ne connaissaient pa s, à l'époque où ils ont pris la position sur laquelle l'Inde s'est

fondée, les circonstances qui ont conduit à l'adoption de l'ordonnance d'indépendance de l'Inde.

Voilà donc pour ce point, qui est, je crois, un élément vraiment central de l'argumentation relative à l'Acte général. Il
suffira maintenant que j'évoque très succinctement la réfé rence faite par l'Inde à l'affaire Yangtze (London) Limite d
v. Barlas Brothers (Karachi) and Co . Je pourrais bien sûr analyser longuement cette affaire devant la Cour, mais je
m'en abstiendrai. Elle est bien plus comp lexe que la simple lecture d'extraits de l'arrêt pourrait le laisser entendre.
Cette affaire porte en fait sur l'inappli cabilité d'un traité qui n'a pas été incorporé au droit national. Elle ne montre
pas ce que son Excellence l'A ttorney General de l'Inde a dit qu'elle montrait (CR2000/2, p. 15). Mais il n'est pas
inutile de garder à l'esprit que , quel que soit le poi ds que la Cour pourrait souhaiter conférer aux mots utilisés dans

l'affaireYangtze (London) Limited . Bvrlas Brothers (Karachi) and Co , il s'agit d'une affaire où le Gouvernement
du Pakistan n'était pas en cause. Ce gouvernement n'a pas eu la possibilité de s'exprimer devant la Cour suprême, et
nous ne savons pas si la Cour a bénéficié d'un concours suffisant pour la mise au point de son argumentation relative
au droit international. De plus, cette Cour n'aurait en t out cas pas pu avoir connaissan ce de toutes les indications
détaillées des Partition Proceedings dont j'ai donné lecture ici ce matin et il serait compréhensible que, faute de
connaître aussi bien la vraie nature de la relation entre le Pakistan et l'Inde après l'indépendance et avec l'Inde avant
l'indépendance, elle n'ait pu se fair e une idée exacte de la question. Je n'en dirai pas plus sur l'affaire Yangtze
(London) Limited . varlas Brothers (Karachi) and Co.

Cela m'amène ainsi, Monsieur le président, aux observati ons que je souhaite présenter respectueusement à la Cour
en guise de conclusion. Elles ont principalement trait à la clause facultative comme fondement de la compétence de
la Cour mais elles ont aussi une certaine pertinence générale pour la démarche que la Cour suivra en l'espèce.

Je fais valoir respectueusement que la Cour n'a pas à se préoccuper des a ppréhensions que l'on peut attribuer aux
Etats qui ont alourdi leur déclaration en vertu de la clause facultative de réserves qui en limitent sensiblement l'effet
-- à tel point, même, qu'il est réduit à néant. La démarche d'interprétation stricte que l'Inde demande aujourd'hui à la
Cour de suivre ne diffère guère ou nul lement de la démarche mise au point par la Cour permanente de Justice

internationale il y a soixante-dix an s, qui a constitué une ca ractéristique marquante du traitement par la Cour
internationale des déclarations en vertu de la clause facultative, des réserves et de leur interprétation. Cette démarche
a été mise au point dans un c ontexte international totalement différent. La recherche du consentement par les voies
les plus strictes possibles est toujours mise au premier plan comme s' il était impossible que les Etats acceptent
jamais la compétence de la Cour si les limites indi quées dans leur notification de consentement étaient moins
rigoureusement appliquées.

Par principe, je conteste respectueuse ment le bien-fondé de ce tte conception. La Cour ne devrait pas appréhender
autant-- si je puis m'exprimer ains i -- les conséquences qu'aurait une accepta tion de compétence dans des affaires

où quelques doutes subsistent à ce sujet et où elle est confrontée très souvent à des objections à sa compétence
fondées sur une interprétation stricte de la notion de consentement, et donc sur une conception limitée de sa capacité
de rendre la justice en aborda nt le fond d'une affaire. La Cour ne peut pas fermer les yeux sur le fait que les Etats
acceptent de plus en plus la compétence obligatoire de tribunaux internationaux pour un grand nombre d'affaires qui
ne sont pas moins importantes que celle s portées devant la Cour, et ce sur la base d'un consentement exprimé en
termes généraux. En effet, bien des affaires dont ces autres tribunaux sont saisis -- ou dont ils pourraient l'être -- sont
en fait plus importantes, économiquement et politiquement, que certaines de celles qui so nt soumises à la Cour. Je
pense en particulier au type d'affair es examinées dans le ca dre du mécanisme de règlem ent des différends de
l'Organisation mondiale du commerce. Ce sont des affaires de très grande portée, qui touchent de larges secteurs de
l'économie nationale et influent sur les moyens d'existence de très nombreuses personnes. Pourtant, les Etats se sont

montrés disposés à accepter à leur sujet la juridiction obligatoire. Quel problème po se donc, je ne dis pas la
juridiction obligatoire de la Cour, mais l'adoption par celle-ci d'une conc eption plus large du mode d'expression du
consentement à sa compétence ? Et ai-je besoin de rappeler que si le Conseil de sécurité n'est pas un organe
judiciaire, il n'en est pas mo ins amené à examiner de près les activités le s plus sensibles des Etats --des activités
liées à des enjeux de sécurité nationale -- sans que soit posée la question de sa compétence en la matière.

J'espère que la Cour ne me trouvera pas trop arrogant si je l'invite à se reporter à un petit ouvrage que j'ai écrit il y a
une dizaine d'années sous le titre Aspects of International Adjudication , dont un chapitre est consacré au

consentement, et où les idées que j'exprime maintenant devant la Cour sont exposées plus en détail, avec quelques
exemples très intéressants. La lecture de ces quelques pages ne devrait pas prendre longtemps à la Cour et je les luisoumets respectueusement.

Il y a, me semble-t-il, quelque absurdité à ce que l'Inde puisse être forcée de répondre en justice pour une affaire de
commerce international susceptible d'avoir des répercussions graves sur s on économie mais qu'elle puisse pourtant

tenir en échec la compétence de cett e Cour, appelée à résoudre une affaire telle que la destruction illicite d'un
aéronef. J'invite respectueusement la C our à adopter le point de vue qui s'offre à elle, c onsistant à voir dans la
relation spécifique entre l'Inde et le Pakistan, et en particulier dans les engagements réciproques des deux Parties que
constitue l'accord de Simla, une base qui lui permette -- j'entends, qui permette à la Cour -- d'interpréter la réserve de
l'Inde de manière à lui ouvrir la porte à l'exercice de se s véritables fonctions, et non interposer une barrière. La
fonction de la Cour est de trancher de s questions de fond, et non d' explorer encore les fut ilités plutôt passées de
l'interprétation restrictive des clauses attributives de juridiction.

Ceci conclut, Monsieur le président, ma plaidoirie du sec ond tour. Je vous remercie de m'avoir écouté. Le Statut

demande qu'à ce stade de la procédure l'agent confirme officiellement les conclusions du Pakistan et je vous prierai
donc, Monsieur le président, de bien vouloir l'y inviter. Je vous remercie.

Le VICE-PRESIDENT: Merci beaucoup, Monsieur Lauterpacht. Je donne main tenant la parole à M. l'agent du
Pakistan.

M.HAMID: Monsieur le président, Madame et Messieurs de la Cour, pe rmettez-moi, en tant que coagent du
Pakistan, de saisir cette occa sion pour confirmer offi ciellement les conclusions du Pakistan, et de prier la Cour de

dire et juger qu'elle rejette les exceptions soulevées par l'Inde à sa compétence, et que l'affaire doit suivre son cours.
Je vous remercie.

Le VICE-PRESIDENT : Je vous remercie, Monsieur l'agent du Pakistan.

Le second tour de plaidoiries de la République islamique du Pakistan est ainsi terminé. La Cour se réunira à nouveau
demain matin à 10 heures pour le second tour de plaidoiries de la République de l'Inde. L'audience est levée.

L'audience est levée à midi.

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