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CR 93/20 (traduction)
CR 93/20 (translation)
Mardi 22 juin 1993
Tuesday 22June 199301 0 le PRESIDENT: Je donne la paroleà M. Bovett.
M. BOWETT: Monsieurle Président, Messieur ses Membresde la Cour,
hier j'ai examinél'hypothèseavancéepar le Tchadselonlaquelle,en
1919,la France aurait acqui un titreen vertud'uneoccupation
pacifique effectiv et j'aimontré, en m'appuyantsur lesfaits, que
cette hypothèsne'étaitpas soutenable.J'examinerai aujourd'huila
seuleautre possibilite énvisageable: l'existence d'utnitre parla
conquête.
a) Titrepar la conquête w
Le Tchadne soutient pas quele titreait été acquispar la conquête
françaiseet la Francene l'a jamaisprétendu. De ce pointde vue, tout
examende cette hypothèsepeut apparaîtrecomme étantsans objet.
On voit toutde suitepourquoila Francea choiside ne pas
s'appuyersur l'argument de la conquête. Une telleargumentationse
heurterait àdes problèmes envertutantdu droittraditionnel que des
normes nouvelles introduites en 1 919le Pactede la Société des
Nations.
En droit international, une occupat deoguerrene confèrepas de
titre. Une présencefrançaise réduit et trèsdispersée n'aurait pas W
constitué une occupatid on guerre suffisante etde toute façon, aucun
titrede souveraineté n'aurai pu êtreacquispar une occupationde
guerre. L'acquisition de souverainetne peut intervenir quede deux
façons : ou bien par une cessiode territoireen vertud'un traitéde
paix; ou bien pardebellatio- cessation des hostilitpésr subjugation C
totalede l'ennemi- suivie d'une annexio formelle. En fait, dansun
cas de tentatived'acquisitiond'unepartieseulement du territoired'un
Etat,une annexionpartielle n'entraîn acquisitionde titreque lorsque
1'Etatvaincuy consentexpressément....
AucunedesParties dans l arésenteaffairene soutient qule'uneou
--- 011
l'autresituationse soientproduites. Aucun traitdée paixn'a jamais
été conclu eitln'y a pas eud'annexion formelle.
On peutse demanderpourquoi la France, après avoir muené
campagne militaiprendantplusde vingt anspoursoumettre les
populationdse cette zonet revendiquelrasouverainetséur leurs
terres,a choiside ne passuivre les méthodes traditionne deles
l'acquisitio ne la souverainetéprèsunevictoire militaire.
Bienqu'onen soitréduitauxconjectures à ce sujet,on peut
néanmoinsavancerdeuxraisons.Premièrement, une annexion après
debellatioimpliquaitla préexistence'un titre juridiq uetitre
auquell'annexionsubstituaitun titrenouveau maisdérivé. C'était
exactementce que la Franceouhaitaitéviter. Car celaauraitvoulu
direqu'ellereconnaissait l'existe d'untitreantérieur - en faveur
des tribus locales, d Senoussiet de l'Empirottomanou bien,aprèsle
traitéd90uchy,de l'Italie,en tantquesuccesseur de l'Empirottoman.
Deuxièmement, une fo quela Franceavait acceptlées obligationdu
Pactede la Société des Nation il,était impossible pour edlele
revendiquer ouvertemu entitrefondé sur laconquête.
Par conséquentl,a Franceavaitde bonnesraisonsd'éviter toute
revendication dtitre fondséurla conquête.
Mais - et c'estune réserveimportante un Etatne peutse
soustraireà certaines règles contraignan applicables danun
contexte, ednéclarant unilatéralem entla situation relèvde'untout
autrecontexte.En résumé, si le contexte étavitritablemenutn
contextede conquête,la Francene pouvaitse soustrairaux règles
relativesà la conquête, simplemeentdéclarantde façon unilatérale que
le contexte étaiun contextede titreet de frontière reconnue punr
traité. C'està la Courqu'il appartiednet qualifier laituation. Or, si la Cour constate qu'inl'existepas de frontière établie par un
traitéet rejette l'argumentde terra nullius, nous serons
inévitablement amenésà nous interrogersur la légitimitédu seul autre
fondement possibleà la revendicationde titrepar la France :
, 01 2
-. l'acquisitiondu titrepar la conquête.
Examinonsmaintenantles exigences-traditfonnelld es l'acquisition
d'un titrepar la conquête.
i) Les exigences traditionnellede l'acquisitiondu titrepar
la conquête
Il ressortde l'examendes faits,commeje viens de le montrer,que w
la Francene pouvaitsatisfaire àces exigences. Il n'y a pas eu de
subjugationtotale puisque les hostilito ést éclatépériodiquement jusque
dans les annéestrente;il y est amplementfait référencedans le dossier.
Je prie la Cour de bien vouloirse reporteraux pièces produitespar la
Libye, dans sa réplique,au volume3, en particulieraux pièces7.3, 7.4
et 7.5. La Francen'a jamaistotalementcontrôlé le territoire ni exercé
des pouvoirsde gouvernementsur le territoire et sa population suffisants
pour qu'il y aitdebellatio. Et il n'ya assurément jamais eu d'acte
d'annexionformelle. Par conséquent,même au regarddes exigences
W
traditionnelles,la Francen'aurait pu acquérirde titre par la conquête.
2. Les nouvellesrestrictionsà la conquête introduitepsar le Pacte
de 1919de la Sociétédes Rationset le Pacte de Paris de 1928
On ne saurait contesteque les obligations découlant d ces traités
s'imposaientà la France àpartirde 1919, au profitde l'Italieet
peut-être,pourrait-onsoutenir,des Senoussi. La Francene pouvaitse
soustraireà ces obligations simplement en prétendq aunten 1919 elle
avait déjà acquisun titre sur le territoire,de sorte qu'en dépit de
son invasionarmée il ne pouvaitêtre questiond'une quelconque rupture
d'obligationsvis-à-vistant de l'Italieque desSenoussi. Même si l'on retientles l'éléments les plus favorabll'appuide
la thèse françaisei,l faut admettrque la Francétaitconsciente de ce
que la questiondu titre étaicontroversée. La longue séride
négociationsentre laFranceet l'Italie,qui avaient commencé en
juin 1919 (voirmémoirede la Libye,par. 5.249)et se sont poursuivies
pendantquinze ans, montraessurémenque l'Italie-revendiquaites
0 1 3 territoires.Que la Franceait accepté ounon les revendicationse
l'Italie,l'existencede ces revendications'empêchaitde soutenir que
l'obligationdécoulantde l'articleXdu Pactede la Sociétédes Nations
ne s'appliquaitpas au motif quele territoirappartenait la France.
Celane pouvaitêtre tenu pouarcquis. Il y avait manifestementn
différendsur cettequestion. Par conséquent, la Frannce pouvaitse
soustraireà l'interdiction queui imposaitl'articleX en prétendant
que son propretitren'étaitnullementcontesté.
Il fauten conclureque,compte tenude ces obligations, la France
014
--- ne pouvait revendiqueune acquisition'un titre par laconquête.
Certes, ellene l'a pas fait;et le Tchad,aujourd'hune fondepas non
plus sa revendicatiosur cettebase. Mais, cequ'ilimporteest
d'admettrequ'onne peut se soustrairà ces obligationen s'appuyant
sur une théoridee l'occupation.S'ily a eu occupatiopar la force,et
c'estde faitce qui s'estproduitaprès 1919,une telleoccupationétait
interdite,quelleque soit la façondont laFrance, danle passé, ou
aujourd'hui,le Tchadait choiside la qualifier. Qu'ils'agissede
conquêteou d'occupation,celane fait aucune différenceS'ily a eu
recoursà la force militaire,'acteétaitillégal,et aucuntitre
légitimene pouvait endécouler. 3. L'argumentinvoquépar le Tchad de la "consolidation" de son titre :
Le mythe de l'acquiescementà la "frontière"de 1899-1919
Le Tchad a consacrétout un chapitrede son mémoire - le chapitreV
pour être précis- à l'argumentselon lequel la frontièrd ee 1899-1919
aurait été "consolidée" parla reconnaissancede cette ligne ou
l'acquiescementà cette ligneen tant que frontière parles autres Etats
intéressés,durant la période 1919-1955.
Le recoursdu Tchad à l'argumentde la "consolidationl est assez
révélateur. C'est comme si le Tchad acceptaitl'idéeque son titresur
le territoireet la notiond'une frontière convenue sont viciés : le
Tchad cherchedonc à remédierà cette situation en postulantune
reconnaissance générale d son titre et de cette frontière,ou bien un
acquiescementà son titre et à cette frontière.
Une chose aumoins est claire. Si le Tchad veut s'appuyersur cet
aregument,il doitprouver la connaissance de faitsde la part de ceux
dont il dit qu'ilsont reconnu cetitre et cette frontièreou acquiescéà
ce titre età cette frontière. Car l'argumentde la consolidation repose
sur ce que la Cour décritdans l'affairedes Pêcheries (Royaume-Uni
c. Norvège)comme "la notoriétédes faits,la tolérance générald ee la
communautéinternationale..." (C.I.J.Recueil 1951, p. 139). En
résumé,la consolidation, que ist une formede consentement, explicite ou
implicite,supposela connaissance de ce à quoi l'on consent.
... Or, comme je vais maintenantvous le montrer, iln'y a jamaiseu
--. O15 consentement, ni reconnaissanceni acquiescement,ni de la part de
l'Italieou des Senoussi, non plus que de la partde la Grande-Bretagne,
des NationsUnies ou de la Libye. C'estun fait que l'on peut démontrer.
Examinons lesréactionsdes différents "acteurs"l'un après l'autre
pour voir quellesont étévéritablementleurs réactions.a) Italie
L'Italiea protesté vigoureusement conl trconvention
franco-britanniqu de 1919 et contrela nouvellelignequ'elleentendait
substituer à la lignede 1899. On ne saurait déduirdees protestations
de l'Italiecontrela lignede 1919qu'elleacceptait comme frontièl re
ligne strictemens tud-estde 1899. Car 1'Ital-i-aélevédes
protestationsà la fois contrela modificationdu tracéde la ligneet
contreson changement de statut. L'Italieétaitprêteà accepterl'idée
que la conventionde 1899avait établi une limiteà d'éventuellesfutures
revendications françaises, ma ellen'avaitjamaisreconnu que cette
ligne constituuene frontière(voir,par exemple,la note deprotestation
italienne du 14 mai 1930;mémoiredu Tchad,livreIII,annexe125). En
vérité,le Tchadne soutientpas que l'Italieait acceptéla ligne
de 1899commefrontière.L'argument du Tchad concernant
l'"acquiescement de l'Italiereposesur deux éléments : premièrement,le
traitéLaval-Mussolind ie 1935,quin'estjamaisentréen vigueur, dans
lequelle Tchadprétend trouveu rne reconnaissancpar l'Italiede la
lignede 1899-1919; et, deuxièmementl,'incidentde Jef-Jefde 1938.
i) Le traitéde 1935
En ce qui concernele premierde ces deux éléments,la question
ayant ététraitée en détaip lar M. Condorellije me contenteradie
répéterque rien dans la positionde l'Italiene revenait àreconnaître
ni que la Francesoit souverainseur les confins,ni que la frontière
soit clairemenéttablieselonla lignede 1899-1919, ni que le traité
de 1935 envisageaitune cession deterritoirefrançais à l'Italie. En
fait, c'étaittoutle contraire.. . .
En outre, l'argumentainsi invoquépar le Tchad a un aspectétrange,
--. O1 6
et je dois attirerl'attentionde la Cour sur cepoint. Le traitéa
échouéet le Tchad serait lepremierà nier que la Libyeait acquisdes
droits en vertu de ce traité. Elle ne pouvait,afortiori, acquérir
des droitsen vertu des négociations. Pourquoi doncle Tchad
considère-t-ilque la Libye a assumédes obligathns en-wrtu des
négociations? Car c'estbien ceque leTchad prétend. Son
argumentationconsiste essentiellementà dire que, dans lesnégociations,
l'Italiea reconnule titre français (et la frontière spécifique de
1899-1919);que la Libye a succédéà l'Italie;et que, par conséquent,
la Libyese trouve liée.
Mais, en l'absenced'estoppel,commentdes négociations
infructueusespourraient-ellescréerune obligation contraignant pour
un Etat successeur? On peut comprendreque la positionmême del'Italie
puissedonc être compromisepar cequ'elle a dit durant les
négociations. Ce serait commesi le fait que les deux Partienégocient
créaitdes droitspersonnels,comme cepourraitêtre le cas dans des
négociations surtout type de traité.
Mais cequi lie un Etat successeur,c'estun traitéde frontières
effectifcréantdes droitsréels. Et si aucun traiténe résultedes
négociations,il n'y a aucune raisonde considérerqu'un Etat successeur
soit lié par une simple position deégociation,non plus quede dire
qu'unEtat successeur serait lié parune quelconque formdee traité
politiqueou personnel,ou par une position de négociatioandoptée dans
ce contexte. La pertinencedu traitéde 1935 réside non pas en ce qu'ila créé
des droitsou des obligations maisen ce qu'ilmontre que les deux
Partiesreconnaissaienq tu'iln'existait pas de frontièreauparavantet
que la préférencd eevrait êtraccordée aux revendicatio desl'Italie
sur le territoire situé au norde la lignede 1935.
Voici unpointqui, làencore, a ététraitéde façonexhaustive par
M. Condorelli.Je me contenterai de rappeler quel'Italien'a pas
reconnuexpressément la frontièrede 1899-1919.Tout cequ'ellea
reconnuc'estque lepuitsen question se trouvaitdans la zonequi
devait deveniritalienneen vertude l'accortde 1935.
Il est assezextraordinairdee voir le Tchad essayedre tirerde cet
incidentisoléune "reconnaissance de la lignede 1899-1919. Il faut
considérer la conduited'un Etat dansson ensemble. Compte tenu des
protestations quel'Italiea élevéescontre la lignd ee 1919 et des
revendicationdsont elle faip tartà la France au courdse négociations,
on peutdire qu'ilest presque absurdd ee vouloir fausselre sensde cet
incidentmineurpoury voir unacquiescement à la frontière de 1899-1919.
b) Les Nations Unies
En ce qui concernela thèsedu Tchadselon laquelle une
reconnaissance générad le lafrontière de 1899-1919découlaitdes débats
aux Nations Unies dans les ann1 ées8-1952,c'est un point qui a aussi
été examinéà fond parsir Ian Sinclair. On ne saurait davantagfeausser
le sensde la documentatio pertinente.C'estprécisément cette
frontière sud qui, pour les Nations Unies, n'était pas e cldont
ellesn'étaientpas satisfaites : d'où l'appel lanc é la Franceet à la
Libyepour qu'ellesengagentdes négociations aprè l'indépendance. C) La propreconduitede la Libye
Le Tchadtire argumentde lapropreconduitede la Libye,après
l'indépendance, pou soutenirque laLibyea reconnu la frontièr de
1899-1919.Mais c'estsur cepointque l'exigence de la connaissance
des faits revêtune importance cruciale,a Libyene pouvait acquiescerà
des droitsdont ellene savaitpratiquement-rien. Et la--France très
...
délibérémentévitétoute discussion ave lca Libyeconcernant la base
- - 018
juridiqueeffectivesur laquelleune frontière résultan d'un traité
pourrait êtreétablie. La Libyen'a eu accèsà aucuntextede traité,
aucune carte,aucundocument - rien !
Par conséquent, même sli'incidendlAouzoude 1955allaitdans le
sensde l'interprétatiod nu Tchadselonlaquellela Libyeavait alors
admis qulAouzouse trouvait en territoire franç aice quin'estpas le
cas, commeM. Cahierl'a démontré - la Libyene sauraitêtre liée par
aucune déclaratiodne ce type,fauted'avoireu connaissance des faits.
...
d) L'attitudedes Senoussi
0 19
*-. On noteraque le Tchadne faitnullepart référenceà aucune
reconnaissancdeu titrefrançaisni acquiescement au titrefrançais- non
plus qu'à cettefrontière- de la partdes tribusautochtones senoussi.
L'attitudede ces tribus estapparemment considérc éemmesans intérêt.
Si la date critiqueétait1899,ou même 1919,cela pourrait être
acceptable. Le droità l'autodéterminatio n'avaitalorsqu'uncaractère
embryonnaire- en tantque prétextede bon sens politiqupelutôtqu'en
tant que principe juridique Mais,en l'occurrence, la date critique
est 1951 et, qui plus est,pour affirmer la consolidatidun titre
français,le Tchadest prêt à envisagerdes événements survenu en 1955,
et même en 1960,annéede son indépendance. Or, en 1960,le droit à l'autodéterminatio étaitbien établiet on
auraitpu penserque le Tchad aurait essayéde montrer que, danlse cadre
de la "consolidationd"u titre français,il y avait acquiescementà ce
titrede la part des populationsautochtones.
L'absencetotalede preuvedans cesens est trèsrévélatrice.
Peut-être l'élément q est déterminandtans toute consolidatio de ce
type - à savoir leconsentementde la population- fait totalemend téfaut.
Monsieur le Président c'esttoutce que j'avaisà dire. Je vous
serais reconnaissan de bienvouloirdonner la parole à M. Dolzer.
Le PRESIDENT: Je vous remerciebeaucoup MonsieuBrowett. Je donne
la paroleà M. Dolzer.
M. DOLZER: Monsieurle Président, Messieur lses Membresde la Cour,
commec'estla premièrefoisque je prends laparole,je tiens à dire que
je me senshonoré qu'on m'aitconfiécettetâcheet que j'en éprouve de
la reconnaissance.
Au coeurde l'affaire libyenne rési defaitque l'Empireottoman
et les peuplessenoussipossédaient un titresur lesconfinsen 1912.
J'exarninerales fondementsde faitet de droit de ce titre.
. . Les événements essentiedls cette période,auxquelsje me
O 2 Oréférerai,sont les suivant s
premièrement,les raids militaire sporadiqueset inefficaces dela
France dans lesconfins au courd se la période 1906-1909;
deuxièmement,la pénétration ottomad nens lesconfinsde 1908
à 1913;
troisièmement, lemodusvivendi établientre1908 et 1913aux
termesduquel lesforces française se cantonnaientau sudd'uneligne
de factosuivanten gros le lse degréde latitudenord; quatrièmement, les préparati des négociationsfranco-ottomanes
visantà délimiter la frontière méridiond alla Tripolitaine en
1911-1912;
cinquièmementl ,'avancefrançaise dans les confins aprè le retrait 7
ottoman conformément a traitédlOuchy,visant à vaincreles Senoussiet
à établirun frontmilitaire neutralis aéu-nord;-maissans occuperni
administrer la région;
sixièmement, la résistance farouchdes peuplessenoussià
l'invasion française;
enfin,la démarche officiell de M.Bonne1de Mezières,représentant 1
de la France auprèsdu chefdes Senoussi, cherchan àtétablirun
modus vivendi entre les Françaiest les Senoussi.
Je voudraisexaminerd'abordce qui se passaitsur le terrain depuis
la signaturede la déclaratiod ne 1899jusqu'àla fin de1912, lorsque
fut signéle traité dlOuchyentrela Franceet l'Empireottoman.
La carte projetée(pièce no 18 du dossier desjuges),que M. Sohier
a examinée précédemment, mont reemplacement initid als postes
d'administratiod nirectede l'Empireottoman dans les régions situées au
sud de Tripoli. Ces premiers posteo sttomansfurentétablis dans les
grandes oasis lleongdes itinéraires commerciaux, que contrôlaitle
a . .
, 021 wali de Tripoli,et à l'intérieur de la Tripolitaine, après que la
---
Porteeût remplacé en 1835 l earamanlide Tripolipar un wali envoyé
d'Istanbul.
Par la suite, les Ottoman sommencèrentà pénétrerplusprofondément
vers le sud.
Le premierincident important el uteu à Djanet,en 1906. Comme
l'indiquela carte(carte no 46),cette oasis est située juste au
sud-ouestde Ghat,où une garnison ottomane avaé ité établieen 1875. La nouvellede l'établissemendt'unposteottomanà Djanetcausaun grand
émoi à Paris. Pendantun certaintemps,les forces française et les
Ottomansse disputèrent l'oasis,créantune situationqui risquaitd'être
dangereuse.Un accord formed le statuquo fut donc concluen 1906
entrela Franceet l'Empireottoman. En 1907,comme les troubles
persistaient, le gouverne généralde 1'Aighie--promulgua--unordonnance
interdisantaux troupes françaises dse'aventurerà l'estdu 6e degré
de longitudeest. Cetteligne,pour en établirles coordonnées ajustées
à l'estde Greenwich et non plusde Parisest représentéesurl'écran.
D'autrespostesottomansfurent établi s Segedenen 1906et à Yat
en 1910.
Entre temps, l'avancée française dansKaleuar,à l'ouestdes
confins, incita laPorteà décider d'urgence par l'intermédiaire dseon
représentantà Tripoli,d'installer des postes partoutans les confins.
Après un raid françaissur Aïn Galakkan 1907,le Derde,ou chef, des
Toubouau Tibestirendit visite au Mudirde Mourzouk pour lui demander
l'aidede l'Empireottomanpour faire face à la menacefrançaise.En
conséquence,le Derde futnommépar le Mudir de MourzouKkaimakam,
ou chefde districtchargéde l'administratiod ne ce district ottoman du
Tibesti. Un posteadministratif ottomanfut établià Bardaïen 1908. A
l'époque,l'Empireottomanaffirmaitqu'unKaimakam du Tibesta ivait
déjà été nommévingt-cinqans auparavant,ce que contestaitla France.
. a .
. Deux desdocuments françai pertinents traitan de cetteaffirmation
--- 0 22
contestéesont résumés dans le volu 2mee la réplique de laLibye
(annexessupplémentairens0s 9.9 et 9.10,et sont annexésau volume3).
Ensuite,un fort fut construità Bardaïet une garnison ottomane
importantey fut établie. Deuxautrespostesottomansfurent établis
entreMourzouket Bardaï - à Tedjerréet à Al Qatrumen 1909. Un autre
fort fut construit prdès Zouarau Tibesti en1911. Il importede soulignerque ces mesures prises pal r'Empireottoman
différaient totalement des actions militai menées par les Français en
envahissantles confins après 1912.La Porte agissait pour défendrl ees
populationset régions qu'elle considérait - et proclamaitpubliquement -
t
être placéessous sa souveraineté. Les peuplessenousside la région
demandèrentà ces garnisons ottomane d'occuperdes-postes-clés situés
sur leurs terres. C'étaitune coopération pragmatique entre l Senoussi
et les Ottomansdont l'objectifcommunétait de préserverla paix,
d'organiserla vie économique et de défendre leur territoir en cas de
besoin.
... C'est dans ces conditions quel'Empireottomancontinua de
023
--- transférerses garnisonset d'installerson autorité administrative dans
les confins, progressant généraleme entdirectionsud-est à partirde
Bardaïvers le Borkou et 1'Ennedi. Il étaitdevenu importantde protéger
llEnnedi,car les Françaisavaientvaincu lesultand'Ouadaï,juste au
sud, et s'étaientemparésde sa capitale, Abéché, en 1909. L'Ounianga,
que les Senoussi contrôlaient fermemen n'étaitpas cependantmenacé
alors parl'avancefrançaise, de sorte qu'iln'y avait pas lieu d'y
établirun poste ottoman.
En 1909, les Ottomanscommencèrentla constructiond'un poste à Yen W
près dlAïn Galakka,qui étaitdevenu le bastion des forcs esnoussiaprès
la chutede Bir Alali en 1902. Un contingent importan yt fut ensuite
installé. Puis, en 1912, des postesottomansfurentétablisà Faya, dans
le Borkou,et àBaki, prèsde Fada, dans 1'Ennedi - et finalement à
Oum Chalouba, justaeu suddu 16~degré delatitudenord. Ces postes
étaientplacés sous l'autoritéciviledu Kaimakam à Aïn Galakka.
Or, pour l'essentiel,il ne s'agissaitpas d'une opération
militaire. C'étaitl'installation d'une autorité civile ottoman dans la
région,appuyéepar un contingentde l'arméeet de la gendarmerie. Aucun documentn'indiqueque lesforcesottomanes,composéesessentiellement de
gendarmes duFezzan, aient prispart à des combats- certainement pas
contreles peuples senoussiqui les avaientbien accueillis dans la
région,ni contreles forcesfrançaises, qui avaient pourinstructions
La questionde
strictes dene pas pénétrerdans les confins.
souveraineté devaie tn effet être résolue par des-moyensiplomatiqueset
non par la force,sur la tablede négociationet non sur le champ de
bataille. Telles étaientles instructions explicitd esnnéespar le
Gouvernement françaisà ses officierssur le terrain. J'en viens à la
progression des forcesfrançaisesdans les régionssituéesau nord et à
l'est du lac Tchad ,mais encore au sud des confinsJusqu'en1912 - en
...
0 24 laissantde côté les activités françaises a Kaouar,que j'aidéjà
---
évoquées. Comme onl'a vu précédemment, l'avancefrançaise sur trois
frontsvers le lac Tchadavaitaboutien 1900 à la jonction deces forces
sur les rives du lac. Les forces françaises se lancèrentalors dans
trois guerres distincte (carteno 47).
De quoi étaientcomposées ces forcesfrançaises ? D'un petitnombre
d'officierset de sous-officiers françail s; troupeétait forméede
conscritsde l'Afriquede l'ouest,force quine pouvaitcertainement pas
- je le fais remarquer- procéder à une occupation pacifiqu et civiledu
territoire.
En 1901, les Françaisattaquèrentla zaouïa senousside Bir Alali,
dont l'emplacemenetst indiqué surl'écran. Celle-cavait été
transformée en unezaouïa fortifiée,un bastion dela luttedes peuples
autochtones contre les attaquf esançaises. Le premierassaut français,
en 1901, au cours duquelles Françaistentèrentde prendre la zaouïa
par surprise,se transformaen un désastrepour les Français. Ce fut une
nette défaite des forces françaises, qui dur battre en retraite,
chassées parles forcesalliéesdes tribus touareg et Awlad Sulaiman. Les Françaisrevinrent toutefois avec un contingentbeaucoup plus
importanten 1902 et eurentraisonde la résistance farouchd ee ces
tribussenoussi. Ils détruisirentet pillèrentla zaouïa, y compris
sa mosquée et sa bibliothèque.
Auparavant,une autre guerre menée par les Françaisavait abouti à
la défaitede Rabbah à la bataille deX~usserien 1900.- La voie était
ainsi ouverteà la troisièmeguerre,lancée contre le sultanat d'Ouadaï,
qui commença sérieusemene tn 1906. Abéché,la capitale, fut occupéepar
les forcesfrançaisesen juin 1909 etun nouveau sultanfut installépar
la France. Des combats sporadiques continuèrent toutef Jusqu'en 1912, w
lorsquel'arméefrançaisepris le dessus.
S.
Jusqu'alors,les activités militaires français esaienteu lieu
025 -
--- bien au sud du 15= degré delatitude nord :Abéché,par exemple,se
trouveau sud du 14~ degré delatitudenord. Plusieursincursions
avaient cependant été menéa eus nord de ces points : àFaya et
Oum Chaloubaen 1906, à Aïn Galakka en 1907 e de nouveau àOum Chalouba
en 1909. Il convientde noterque ces incursionf surentvivement
critiquées par les hautsresponsables militaires françai qsui les
jugeaientinutiles,car ellesn'avaient euucun résultat pratique
(répliquede la Libye, pièce 9.5).
Les écrituresdu Tchad décriventl'invasionfrançaisedes confins
e
- la région située au norddu 15 degré de latitudenord - comme si
elle n'avaitvraiment commencé qu'après1900, lorsque les forces
françaises avancèrent dans les régions situées auen tordl'est du
lac Tchad,et comme sielle avait été ensuiteun processus continu et
progressif. Le Tchad traite les incursions français des1906, 1907
et 1909 au nord du 15~degré delatitude nord comms ei elles
représentaient les débuts del'occupationfrançaisesdes confins et
s'inséraientdans ce processuscontinu. C'est là une représentation tout à fait fallacieusde la réalité. En effet,depuisl'époquedes
incidentsde Djaneten 1906,qui avaient conduià t la nominationd'un
Kairnakadu Tibestià Bardaïen 1908 et à la constructiodn'un fortà
cet endroitet d'un autre plusau sud prèsde Zouar,jusqu'autraité
dlOuchy,l'avancefrançaise dans lec sonfins avait étérrêtéesur les
ordresdu Gouvernement françaisà Paris. LesFrançais avaient doncété
contraintsde trouverle moyen des'adapter à cettenouvellesituation,
et c'estprécisémentce qui s'estpassé.
Tout comme à Djanet,à l'ouestdes confins,où un accordde
statuquo fut conclu en 1906 eanttendantun règlement diplomatique,n
modusvivendi fut convenudans les confins entre lFranceet l'Empire
ottoman. A partirde 1909,aprèsl'occupation d'Abéchédans llOudaïpar
les Françaisjusqu'àla conclusion dutraitéd'0uchyet en faitjusqu'au
milieude 1913,la situationsur leterraindans les confins demeura
, 026 tellequ'onpeut la voir sur l'écran. Les forcesfrançaisesoccupèrent
- -
des postesdansune séried'oasis s'étendan de Ziguei(prèsde
Bir Alali)à l'ouest,à Ati au centreet à Abéchéet Aradaà l'est. Les
postessituésles plusau nord étaientZiguei,au sud du lse degréde
latitudenord,et Arada,pratiquement sur ce même parallèle. Ellesy
demeurèrentjusqu'àce que les instructionvenues deParisles
autorisentà progresser verlse nord pourpénétrerdans la région des
confins. Mais cette progressione commençaqu'après ledébutde 1913.
Ainsi s'établidte factoune lignequi esttracéeassez
approximativement sula carteprojetée sur l'écra (carteno 48). Ce
n'étaitpas une lignespécifiquecomme la ligndeu 6e degréde
longitudeest que les forcesfrançaisesavaientreçu ordre dene pas
franchirdans la régionde Djanet. Mais elle futrespectéepar les
Français. Ce modusvivendiou arrangementpassager,auquelles
documents française réfèrentexpressément,est passésoussilencedans les écritures duTchad. Il est camouflépar la manièredont le Tchad
décrit les faits commesi l'invasionfrançaisedes confins avait étéun
événement continu après la destructionla dezaoui'a de Bir Alali.En
réalité, iln'en fut pas ainsi. Jusqu'aumilieu de 1913, les forces
françaises secantonnèrentau sud du 15 e degré de latitudenord,
exceptionfaitede quelques incursions sans suite-aunord.
S..
Je voudraism'attachermaintenantà l'objetet à la nature dela
027
--- présence ottomane danl ses confins après 1908.
La pénétration ottomand eans lesconfinsétait le résultat d'une
politique délibéréd ee l'Empireottomanvisant à installerune
administration directe dan les régions sur lesquellel se califeavait
proclamésa souverainetéen 1890 pour mettreun terme aw menaces
militairesfrançaises.
Elle fut effectuée essentiellemen par lewali de Tripoli,au nom
du calife et par l'intermédiaire du mdir de Mourzouk.
La pénétration ottomand eans les confinsfut continueet assez
Elle commençaà Bardaïau
rapide,étant donné la naturedu terrain.
nord-ouestdes confins en 1908 et se termina,dans lesud-estdes
confins,à Baki à l'ouestde Fada et à Oum Chalouba.
Toute l'opérationottomane sedéroulasous l'autoritécivile des
Kaimakam nommés par les représentants du calife. Les principaux
postes,comme ceuxde Bardaï et d'Aïn Galakka,furentdotés d'un effectif
important, dont la composante militairé etait constituéessentiellement
de troupesalbanaiseset de gendarmes duFezzan. Plusieurs deces postes
avaientdes garnisonsd'une centained'hommesou davantageet le
contingent militairé etait équipéde canons. Des forts moderneset
d'autresinstallations défensives y furent construits. Les Ottomans unirenétvidemmentleurs forceset travaillèrenten
dont la puissancetait
collaboration avec letribussenoussi,
considérable dandses places commAïn Galakka.
L'extensionde l'administratioonttomane dansles confinsavaitété
naturellementprévuepar les autorités françaisesD.ès 1907,M. Cambon,
l'ambassadeurde Franceà Londres,avait avertique, pourprévenircette
--. manoeuvredes ottomans, ilfallait d'urgencqeue la Franceenvoieau moins
028
- - une missionau Tibestiet au Borkou.Sa propositionne fut pas acceptée
et les événementqu'il craignainte tardèrentpas à se produire.
La Frances'estefforcéede décrire la présenceottomanedans la
régiondes confinscomme éphémèroeu théorique. Les faits montrenque
cet argumentétaitdestinéaux besoins desa causeet étaitinfondé. Il
s'agissaitd'uneprésenceimportante, qui futcontinue de 1908à la fin
de 1912 et qui étaitl'expressiodirected'unerevendication de
souveraineté. Cette présefut aussiétablie à l'invitationdes tribus
senoussiet de l'ordre senoussi,t en liaisonavec eux.
Les Ottomansne se trouvaientpas dans la régiondes confinspour s'y
battre pourla bonneraisonqu'ilsn'avaientpersonne à combattre.La
simple présence danles confinsde ces postesottomans arrêtal'avance
françaisesur les instructionnettes du Gouvernemenfrançais. Ces
instructionsfurent critiquéeà l'époquedans la pressefrançaiseet
furent une sourcee frustrationpour lescommandants militaires sluer
terrain, maiselles furensuivieset c'estce quicompte. Depuisle
ministre français des colonies, Messimy,squ'auPrésident de la
Républiquelui-même,il avaitété décidéet décrété quela question de la
frontière méridionale dla Tripolitainne pouvait êtrerégléequ'à la
tablede conférence.Tous ces événements son examinésà fonddans les
écrituresde la Libye(voiren particulier lqauatrième partie dmémoire
de la Libye et les annexes supplémentair7sà 11 du volume2 de la
répliquede la Libye). Avec leurpouvoir civil et militaire,les Senoussiet les Ottomans
administrèrent entièrementles confinsde 1908 à 1913. Tous leséléments
essentiels del'administration publiqueétaient réunis, qu'on les juge
d'aprèsles normes islamiquesou d'aprèscellesdes puissancesd'Europe
.
occidentale. L'ordrerégnait dansles confins,à l'exceptiondes
... opérations militaires visan àt-intimider-lesforcesfrançaises,connues
--. 029
sous le nom de rezzous,et même celles-cidiminuèrent avec l'arrivée
des Ottomans, qui tentèrentde coopérer avec lesFrançais. La
correspondance entre l colonelLargeauet le commandant ottoman d'Ah
Galakkaqui est examinéedans lesécritureconfirme entièrement cette
conclusion.
On a la preuve indéniablneon seulementdu fait que lesOttomans
avaient établi leur autorie té leur pouvoirdans lesconfins,mais aussi
que laFrance en avait connaissance. Le ministredes colonies déclara
dans une lettredu 10 octobre 1911 que si les rapports quilui étaient
parvenus au sujetde la construction d'un fort près de Zouarau Tibesti
étaient exacts, cela constituerait"unemanifestation indiscutabl de
l'occupationeffective ottomane dan ses régions". En fait,un fort fut
construitnon seulement à Zouar surla frange méridionaledu massifdu
Tibesti, maistrois ans auparavanu tn fort très impressionnant avait été .W
construit à Bardaïdans le contredu Tibesti. Ce poste était dirigé par
un kaimakamcivil etfut bientôt occupé par une garnisonimportantede
plus de100 gendarmes,soldats etfonctionnaires civils.
Il est incontestablequ'un arrangement passageoru un modus
vivendis'instauraentre 1908 et 1913 le longd'une lignede facto que
nous avons vueprécédemmentsur l'écran,et qui suit généralement le
lse degré de latitudenord. Je dis que ces faits sont incontestables
car ils sontentièrement étayés pa des preuves. Nous ne savonspas si
le Tchad les conteste ounon, étantdonné que jusqu'àprésent,le Tchad les a simplement passésoussilence dansses écritures. Quoiqu'ilen
soit,ces accordsde statuquo ou demodus vivendimontrentles
effets produits pala décisionde l'Empireottomand'installerune
administration directe da ces régions.
. . .
Il convient maintenand'évoquerles préparatifs entreprpisr le
030
--- Gouvernement françai es le califepournégocierla délimitationde la
frontière sude la Tripolitaine.Je pense, Monsieulre président,que
c'estl'undes aspectsles plus éclairantd sanstoutel'histoire de ce
différendterritorial.En 1910,le calife s'étaitemployé, avec
réticence, à délimiter la frontièdre la Tripolitaine avec la Tunisie,
bienqu'iln'aitpas reconnu pas l perotectoratfrançaissur la Tunisie.
Or, un an plus tard, la Francfaisaitpressionpour que l'ondélimite
le restede la frontièrede la Tripolitaine.
L'impatiencedes Françaiset leurdésirde parvenir à unarrangement
s'expliquaitn,aturellementp,ar les craintescroissantesque leur
inspiraitla poursuitede l'avance ottomane dalnss confins. Le
Gouvernement françai ésaitconvaincu que lcealife tardaitàfixerune
datepourgagnerdu temps, pour achever p lanétration ottomane dalnss
confinset, ainsi, acquérirun avantage tactiququ'ilpourrait exploiter
dans les négociationsA .ussile Gouvernementfrançaisa-t-ildéclaré
publiquementqu'ilrefuserait tous timplementdans lesnégociations, de
considérer la pénétrati ottomanesur le terrain,dans lesconfins,
commeun facteur à prendre en compte dalnsrèglement du différend.
Or, ainsi quela Libye l'a montré, la semaine dernil ère,
Gouvernementfrançaisn'a à aucunmoment invoqul é'argumende
l'effectivitdéans la déterminatidon cette frontière ,i dans les
négociationsà cet effet.Ainsique je viensde le dire, en1912,les
Françaisrefusaient de considérer lesccupations ottomanes sur le
terrain commedes effectivitésp;ar la suite,le Gouvernemenfrançais n'a jamais invoqué l'argumendtes effectivités françaisedans les
négociations avecl'Italiequi ont abouti à la conclusiondu traité
de 1935; et, dans les négociationsqui ontconduit autraitéde 1955,
le Gouvernement françaias insistépour retenirune formulationde
l'article 3 du traité,qui ne faisaitréférence qu'auxaccords
internationauxen vigueuren 1951 et excluaitles effettivités. Cette
positiontenait en partie au fait que laFrancecraignait que laLibyene
fondeses revendications sur la présencedes Sénoussi,sur la puissance
ottomaneà cette époque et,plus tard, sur l'occupation italienne.
1 . .
En ce qui concerne,de nouveau,la situation en1911,je rappellerai
O 3 1 w
- m . que les Françaisont faitpressionsur la Porte pourqu'elleaccepteune
conférencede délimitation. La Porte a finalementacceptéet la
conférence devait avoir lieu Tripoli,à la fin de 1911. Elle ne s'est,
bien évidemment,jamaistenue,en raisond'autres circonstances. Nous ne
savonspas quel rôle lesconsidérations juridiques auraie joué dans les
négociations. Ce que nous savons,c'est que le vilayetde Tripoli
avait proposéen privé à Istanbulune réduction substantielle dla
revendicationsur l'hinterlandexposéepar la Porte en 1890.
Vous voyezmaintenant cette proposition l'écran (carteno 3). Il
est clair que cette propositiotenaitcompte des événements survenus w
depuis 1890. Comme la Cour peulte voir, iln'y avait guère de
différence,en fait,avec la revendicationque la Libye présente
aujourd'huià la Cour.
Je pense qu'il seraitbon d'examinermaintenantquels sont les
facteurs juridiquement pertinen qui auraient étédiscutésdurant les
négociationsentre les Françaiset les Ottomans. L'Italiea, bien
évidemment,hérité des droitset des revendications que'Empireottoman
aurait faitvaloir à la conférence. Les Françaisauraientsans doute
rappelé la déclaratiofnranco-britanniquee 1899, sachantfort bien qu'elle n'étaiptas opposableaux Ottomans. Les représentants du calife
auraientété parfaitementconscientsde ce fait,de même qu'ilsauraient
contrairementà ce que la Franceaffirmaità
été conscientsde ce que,
l'époque,aucune carte n'étaitjointeà la déclaration. Les Ottomansse
seraient référésà leur revendicatiodne 1890, à la réductionproposée
en 1911par rapport à cette revendicatioent à la présence effective
ottomanedans les confins,aux côtés des populations senoussiqui les
avaientbien accueillis.
Les Françaisne se satisfaisaient manifestemen plus du tout du
statu quo. Ils voulaient trouveu rne solutionau problèmeen suspens
du différendterritorial, non seulement avecles Ottomansmais aussi avec
les Senoussi. En fait,le Gouvernement français avait recol nnu
0 32 nécessitéde tenterde négociernon seulement avec les Ottomansmais
t
--- aussi avecles Senoussi dès1911, avantmême que ses forcesenvahissent
les confins. Le ministre des coloniea svait chargéun haut fonctionnaire
français,M. Bonnel deMezières,de prendrecontactavec l'ordresenoussi
et de tenterde parvenirà une sortede modus vivendi. On dirait
aujourd'huique M. Bonnel deMezièresétaitun ambassadeuritinérant,
chargéd'unemissionparticulière par le ministre français des colonies
(voirle documentqui est soumis à tire d'élémentde preuve dansla
présenteaffaire(mémoire dela Libye, Archives françaises, annexes,
p. 280).
Cet épisode intéressanett parfois assez comique es évoquédans les
écrituresde la Libye (mémoire dela Libye, quatrième parti et réplique
de la Libye,vol. 2, annexe supplémentaireno 10). Il est apparu que
M. Bonnel deMezières,dans le cadre desa mission, avait entreprisde
traiterformellement de la questionde la frontière sudde la
Tripolitaineavec le chefdes Senoussi - c'estdu moinsce que ce dernier
croyaitet il faut dire qu'il avaitde bonnes raisonsde le croire. L'émissairefrançais semblait acceptl eridéeque, danssa partie
orientale,la frontièresud de la Tripolitaine soit tracée la latitude
dlArada,qui se trouveexactement sur la lignedu lse degréde latitude
nord.
Le chefdes Senoussia paru prêt à accepter cette partdee la
frontièremais, lorsqu'ila formellementréponduà ia-proposition, ial
exposéles revendicationdses Senoussiqui étaientnotamment queles
Françaisse retirentau sudde Bir Alali et restituent,en outre, les
sept-centsouvragesqui avaientété pris dans lazaouïa senoussi
détruitepar les forces françaises e1n12. extrémité occidentale de
w
la ligne apparemmenptroposéepar les Senoussicorrespondaià Kousseri,
au sud-estdu lac Tchad,sur le fleuve Chari, lioeu Rabbahavait été
battupar les Français enavril 1900. La ligneque l'onpeut tracer
entreArada (If0Fi)et Kousseriapparaîtsur la carte que vouvsoyezsur
l'écran. Comme vous pouvez vou en rendrecompte,elle se situetrèsau'
sud par rapportà la propositionde 1911 duvilayetde Tripoliet elle
s'en éloignebeaucoupen cesens qu'elleauraitinclus le Kanem dans
-..
l'hinterlandde la Tripolitaine, aloqrse la propositionde 1911
O33
_-- l'excluait.La cette carte montreaussi cettelignepar rapport à la
ligne,de facto,qui séparaitles Ottomanset les Françaisde
1908-1912. Elle se seraitégalementsituée bienau sud de cettedernière
ligne.
Lorsquecet échange de propositionsa été connu,il a suscité une
vive émotion dans les milieux gouvernementaux françaàPariset sur le
terrain. Le colonelLargeauet M. Merlin,gouverneur généradle llAEF,
en particulier,ont été très choqués. Le Gouvernement françaisa pas
tardéà dénoncerla propositionde son émissaireconcernantArada,
faisantvaloirqu'ilavaitoutrepassé ses pouvoirs. Si j'ai rappelécet épisodeà la Cour,c'esten raisonde la lumière
qu'iljettesur la positioq nue la Francea adoptée ultérieuremee nt sur
celle que le Tchad adopa tejourd'hui. En 1911,de même queles Français
acceptaient de négocieravecl'Empireottoman la questionde la frontière
sud de la Tripolitaine, m deme aussien 1911ils prenaientcontactavec
le chefdes Senoussipour tenter de trouver unmodus vivendi. Cela
revenait à reconnaîtrele statutdes Senoussiet à admettreque les
populations senoussiétaientfondées à revendiquerun titresur les
territoires qu'elles occupaient.
Tandisque j'évoquais rapidementles divers événemenn tstables
survenusjusqu'en1919,on a sansdoutepu se rendrecomptede leur
importance au regarddes principesde droitrappelés précédemmen par
M. Crawford.
La questioncentraleest de savoir si l'Empireottomanest parvenuà
établirune autoritégouvernementale effectivedans les confind surant la
périodequi va de l'installation de Ottomansà Bardaï,en 1908, à leur
retrait finad le Baku etd'OumChalouka, versmars 1913. La réponse à
cettequestionest assurément positive,et cela pour de nombreuses
raisons :
- les Françaisont reconnuce fait,ainsiqu'ilressortdes élémentsde
preuve quej'ai analysés;
.-. - la conclusiondu modus vivendimarquaitla reconnaisance de
3 4
- - l'existencede l'autorité ottomane dans c lesfins;
- des postesottomansétaientétablisen tousles pointsdes confinsoù
il fallait exerceurn contrôle,à l'exclusionde l'ounianga,fermement
contrôlépar les Senoussi;
- l'autorité ottoman s'appuyaitsur le consentemendtes populations
senoussiet de l'ordresenoussiet étaitdonc soutenuepar toutes les
forcesde ces populations,qui étaientconsidérables; - les établissements ottomans dal nss confins étaient à la fois de
nature civileet militaire, et le pouvoirétait aux mains desautorités
civilesqui rendaient compte auMudir de Mourzouket au Wali de
Tripoli;
- enfin,toutes lespopulationssenoussides confins faisaient allégeance
au califeet cela s'est clairementmanifestéde maintes-façons, ainsi
que M. Maghur l'a bien montréhier.
Par conséquent,l'Empireottomansafisfaisaitaux conditions
d'acquisitiond'un titredans lesconfins,à cette époque. En fait, les
activitésconjuguéesdes Ottomanset des Senoussi allaient biea nu-delà
de ce qui auraitété nécessaire pour justifier la revendication d'un
titre dansces zonesdésoléeset faiblementpeuplées.
A la différence dece qui s'est produit parla suite avec l'invasion
militairefrançaise,les preuvesde l'exerciceeffectifd'une autorité
gouvernementale par l'Empireottoman sont manifestes. Les activités
militaires française ns'ont pas étémenées avecl'intention,de la part
des Français,d'occuperles confins (animus occupandi). Il n'a jamais
fait aucun douteque l'intentiondes Ottomansétait de gouvernercette
région,et ils avaient pour cell a'appuides habitants - les populations
senoussi. Par conséquent,les Ottomansont établidans cette région une rl
autorité continue et pacifique, à la différence des Françai sui, jusque
vers le milieu des annéestrente, combattaienl tes populations senoussi
des confins.
S..
Enfin, iln'y a eu manifestement aucun abandd on titre de la part
035
C - - des Ottomanset des populations senoussi. En 1912, l'Italiea héritédu
titre ottomanen vertudu traitédP0uchy. Et les populationssenoussi
sont restées surleurs terreset ont continuéde combattrel'invasion
militairefrançaise. J'évoqueraimaintenantles événements postérieur às1912. M. Bowett
a décrit l'invasionmilitairefrançaisedans les confins àpartirde
1913. Pour ma part, je me contenteraide montrerla différencede nature
entre lesactivités ottomanes e tes activités françaisedans les
confins etde mettre ainsi en évidence toutle'importancede ces
différences. Je retiendrai des aspects les plf usappants :
- l'invasionfrançaiseétait strictement militairel ;'objectifn'était
pas d'occuperles confins maisde vaincreles Senoussien qui les
Françaisvoyaientla sourcede toutesleursdifficultésnon seulement
dans les confins maisaussidans d'autrespartiesde l'Afrique;
- à aucunmoment avant 191( 9et, en fait,pas mêmeen 1930), les forces
françaisesne contrôlaientles confins;il y a constammenteu des
conflits armés,dans toute larégion;
- si les forces françaises déployédesns lesconfinsétaientplus
nombreuses queles forces ottomaneqsui s'en étaient retirées c'est
uniquement parce que le Français seheurtaientà la résistance des
populationssenoussiet devaient les combattre alors que
l'établissementd'une autorité ottomandeirecteavait été souhaitéet
acceptépar ces populations et par les dirigeants senoussi;
- les populationssenoussiet, à leur tête,l'ordresenoussifaisaient
allégeance aucalife etrefusaient toutt eractation avecles Français;
- à la différence des garnisons ottomanes d onntignalera,en passant,
qu'ellesétaienttoutesmusulmanes,les forces françaises se
composaientd'Africainsde l'ouestenrôléspar les Françaiset encadrés
par une poignée d'officierfsrançais. Il ne pouvaitpas s'agird'une
tentatived'occupationdes confins. La missiondes forces françaises
--- 0 36
étaitde détruire lescentres derésistancede manièreà assurer la
présence française dan se que la Franceappelaitle "Tchad utile",
expression quidésigne les régions situées au s des confins;- les postes français étaien rares et n'avaientqu'uneexistence
intermittente, et il n'y avait pasde postes français dans une grande
partie du secteurnord des confins,notammentdans tout leTibesti.
Vous pouvezle voir surla carte maintenant présentée à l'écranque
M. Bowett a déjà utilisée;
- avant 1919, le colonel Largeau et le gowerneur.général#erlinont
proposé d'accepterd'abandonnerles postes français de Gouroet
dlOuniangaKebir aux Senoussi, car ilp sensaientque les Françaisne
pouvaient tenir ces postes; mais le Gouvernement françaia s rejeté
cette proposition en songeantaux négociationsfuturesavec les
Italiens.
Par conséquent,rien, assurément,ne s'étaitproduit, avant la fin
de 1919, qui impliquait un quelconque abandod ne droitsde l'Empire
ottoman. Dans ses écritures,le Tchad, tout comme les Français
auparavant,prétendque les Français onm tis en dérouteles Senoussi,qui
s'étaientretirés à Koufra et, en fait,selon le Tchad et les Français
avaient abandonné les confins. Mais unetelle conclusionest fausse à
bien deségards :
- l'ordresenoussia retransféréson siègevers le nord,quittantGouro
pour Koufra,en 1902, après la destructiod ne Bir Alaliet la mort du
chef del'ordre. C'étaibien avant l'invasiondes confinspar les
Français,en 1913. C'étaitun choix stratégique de la part du chef des
Senoussi,inspiré essentiellemen ptar des raisonsde sécurité,mais
choix qui, avec l'invasionitaliennede la Libye, permettaià t l'ordre
senoussid'exploiterleur autoritéet son influencesur lestribusdu
nord qui s'opposaientaux forces italiennee st sur lestribusdes
confins qui combattaien les Français; - la résistancedes Senoussià l'invasion française dans les conf n'as
jamais cesséjusqu'audébutdes années trente;la carte qui portele
no83 dans votre dossier ,ejàutiliséepar M.Bowett, montre qud ees
bataillesse sont livrées dantsoute lazonedes confins durant cette
...
0 37 période;et c'esttoujoursl'ordresenoussi, depuis Koufra qui a
---
conduitet mené cette résistance;
- la thèsefranco-tchadienn d'unprétendurenoncement aux confins,de la
partdes Senoussi, après 1902p,assesoussilence un autre aspect
essentiel: leshabitants des confinsn'ontpas fuivers le nord
lorsqueles forces françaises sont arrivées; ils sont re ssuréslace
et ont combattu la pénétrati onançaise;et ce sont les Senousset
les populationssenoussiqui détenaientun titresur ces régions et
faisaient allégeance acalife. Et les droits territoriaux des
populations senoussiétaientreprésentés au niveau internationapar le
calife auquelelles faisaient allégeance.
Les troispremières négociations defrontières- en 1911avecles
Ottomans,toujoursen 1911avecles Senoussiet en 1914avec l'Italie-
n'ont paseu lieu. Le Gouvernement françaip sarviendra bien,
finalement,à un accordde frontières avelc'Italieen 1935 -accord
certainement beaucoup plus favorp ablela France queceluiqui aurait
été concluavec l'Empireottomanou avecles Senoussi en 1911. Mais,
commenous l'avonsentendudire,cet accord n'a pas débouchésur
l'établissemendt'unefrontière conventionnellesa ud de la Libye, les
ins'trumentde ratificationn'ayantpas été échangés.
Par conséquent, letsitres détenupsar les populationsenoussiet
l'Empireottoman, en 1912d,emeuraientintacts. Le titre détenupar
l'Empireottomanest passé à l'Italie, qurieprésentait, dès lors, au
niveauinternational le titredétenupar les populations senoussi. Le titre avait été reconp nur la France lorsquceelle-ciavaittenté,en
vain,de s'entendre avec le chefdes Senoussi. Par la suite,tant
l'Italieque laGrande-Bretagna ellaient conclur des traitésavecles
Senoussiqui reconnaissaieni tmplicitemenlte titredétenupar les
populations libyennes placées s leur autorité.
S.
Monsieur le Président, MessieursMl embresde la Cour, la position
0 3 8
..-- de la Libye,aujourd'hui, est trs èsmblable à cellede l'Empireottoman
à la veilledes négociations qui devaientse teniren 1911avec la
France,alors quel'Empirereprésentait led sroitset les titres des
populations autochtonessenoussiau niveauinternational. Telleétait la w
situationdont l'Italiea héritée, en 1912,en vertudu traité dlOuchy.
Aussin'y a-t-ilriend'étonnant à ce que larevendication présent àéla
Courpar la Libye,commevous pouvez lv eoir sur l'écran(carteno 3),
soit si proche de la position del'Empireottoman en1911,compte tenu de
la réduction proposéepar le vilayet de Tripolipar rapport à 1890.
J'en viensainsi à la fin de mon interventie onje voudrais
remercier le Présiden ett MessieurslesMembresde la Courpour leur
attention. Si vous êtd'accord, Monsieu lre Président,je suggèreque
nous nousinterrompionm saintenant et qu'aprèsla pausenous entendions
M. Condorelli.
Le PRESIDENT :Merci,Monsieur Dolzer. Nouslons maintenant
suspendrel'audience pour la pausecafé.
L'audience est suspendue de 11h 15à 11 h 30.
S.'
Le PRESIDENT :MonsieurCondorelli.
039 Mt. CONDORELLI:
1. Introduction
Professor Cahierand myselfhad the honourto speak to you last week
about awhole seriesof eventsin the colonialperiod. These earlier
oral arguments formedpart of the demonstration that thferontierbetween
Libya and Chadhas neverbeen delimited and that,as a result,your Court
has to establishthe delimitation in questionexnovo. Haturally,1 am
not goingto go over this demonstratio again. For we are now ata later
stagein the Libyanargument: Libya isin the processof puttingto you
its viewpointon the legalprinciplesand criteriawhich should be
appliedin order to reacha just and equitablesolution ofthis problem.
My task todayis goingto be, precisely, to help to identify and
establishthe legalprinciplesand criteriato be applied,takingspecial
accountof thoserelatedmore directlyto the "colonial heritage".
Let memake onethingclearfrom theoutset. 1 have Justspoken of
"legal"principlesand criteriato be used for reachin an "equitable"
solutionof the dispute. Although thcisllsto mind equity,let me
stress once againon this subjectwhat Professor Bowettso eloquently
illustratedin his statement of lastFriday, namely,that it is not a
questionof appealinghere to equitywith a view to askingyour Court to
resolve this disput"eex aequo etbono", sincethe FrameworkAgreement
of 1989 contemplateas legal settlemenstecundumjus, and not a
. . solutionbased on Article 38, paragraph2, of your Statute. However,
O40
--- this in no way precludes thuse of aequitas infra legem, whic oh,the
contrary,is alwaysappropriate, as your Courthas said and so often
reiteratedin connection withboth maritime and land delimitations.
Forgiveme for dwellingon such an elementary notion.But the
reason is that Chad persistsin denyingat al1 costs what shoulafter
al1 be a self-evident conceptwhen it claimsthat equityhas no role in territorial disputesuchas the one beforeyou (CMC,p. 36,
para. 1.52etseq.). Incidentally, this iassurprisingattitude,
whichcocksa snookat your case-law, and which revealhsowmuch Chad
seemsto fearequity!
Havingsaidthis,1 shouldnow liketo cometo thefirstindication
of the applicable legal principlandcriteriastenrminfgromthe
colonialperiod.
2. The maximalistnatureof the Frenchand Italianclaimsas opening
positionsin negotiations
Immediately after the Trea ofyOuchyand Lausanneof 1912,France,
having recognized without reservat tionestablishmen of Italian
sovereignty oveLribya,hastened, in 1913-1914, torepare forthe future
negotiationswith the ItalianGovernmentwith a viewto the delimitation
of the respectivceolonial territories .rom theoutset,the Frenchmade
their choice:when the timeis ripe,France willsit dom at the
negotiating table puttingto Italy theargumentthatwe andyou also,
Membersof the Court, know so wellsincewhat it amountsto in substance
is more orles$the sameargument as Chad is now puttingto you today:
... al1 the territoriessouth-westof the lineon themap allegedlyannexed
-41- -
_ - - to the Franco-BritisDheclaration o1899 belongto France,sinceItaly W
had allegedly"acceded"to thatDeclaration.
Thereis obviouslyno question ofgoing backover the artificiaand
speciousnature ofthisargument:we have already demonstrat ed. What
needsto bestressednow is thatthe argument iq nuestion hadquite
naturallybeen setforthas an openingpositionwith future negotiations
in mind: an undeniablyexcellent openin position owinto the fums
boni jurisimparted toit by the factthatit was basedon arguments
deduced, moreor lesscorrectlyin fact,fromtreatieslinkingvarious
Europeanpowers. But theterm "openingposition"is synonymouswith the "maximalist
position"that is cast as the firstshot ont0 the greenbaize of the
tablein diplomatic talks with a view to fixing thelimitswithin which
attemptswill subsequently be made,throughgradua1rapprochements in the
positionsof either side,to reachthe compromisesolution,the quid pro
quo, the compromise settlement.
To complete this picture ,t should alsobe recalledthat the French
argument of1914 wassubsequently, in the 1920s,to be touchedup, thus
making it, if 1 may Say so, even more"maximalist"than before. This was
be the case when Francueltimately assertetdhat the 1899 line(or rather
the line on the map whichwas not annexedto the 1899Declaration) was
identical,in fact and in law, withthe one, actually quitedifferent,
established by the Franco-British Agreemeonft1919; andthat the latter
line (i.e.,the oneof 1919)committedItaly,becauseit had acceptedit
in 1902,in otherwords some 17 yearsbeforeit had been drawn! In
short,the positionin question thus lost al1 credibility, though this
was not particularlyseriousbecauseit was once againa diplomatic
opening positionwith a viewto future negotiations.
The historyof the two decadesof negotiations between Franceand
042
- - Italy provesthe accuracyof this analysis mosteffectively.For
20 years, Francedid not ceaseto indicate its readinessto seek a
compromisesolution,putting forward variousproposalswhich all, and 1
say all, divergedto varyingdegreesfrom the originalposition. For
confirmation thereof one has only to recall theQuaid'Orsay's
assessmentof the delimitation resulting from the Mussolini-LaT valaty
of 1935 (which,as is commonknowledge,entailedrecognizingas Italian
114,000sq. km of territoryas againstthe originalFrenchposition).
The interna1 Quaid'Orsaymemorandumof 24 January1935 (MC, p. 349, para.10; ML, p. 323,para.5.322),unambiguously acknowledg esat:
"Thefrontier which will hencefos rtharateLibyafrom
French WestAfricaand French EquatoriaAfrica,to the east
of Toummo,represents agreatdeallessthanwas asked for by
Italy- and even lessthancertainoffersmadeby France
since1919."
...
Membersof the Court, makeo mistake: the Quaid'Orsayis gloating
- 043
becausethe 1935line,1 repeat,"represents a-greatdeal less ...than
certainoffersmade byFrance"! Frenchdiplomacyis crowing over the
realizationthat Italy iscontentwith very little: it had contented
itselfwith a greatdeallessthanFrance had beenpreparedto give it.
And on 25 March 1935the FrenchMinisterforForeignAffaira,Laval, was
w
to adopt thesametriumphal tone beforethe FrenchSenate,whenhe would
have the impertinencteo expresshis regretsbecause,in concludinthe
Treatyof Rome, Francehad not beenmoregenerous in accedin to the
Italianterritorialrequests! (ML,p. 330.)
Thesefactsshow,beyondal1 possible doubtt ,hat theFrench
position,thatChadhas now takenoveron its own account,has always
been a maximalistopeningpositionfornegotiations. 1 must add at this
juncturethat thiswas naturallyalso the casoef Italy. Italyalsohad
maximalist positions, whi chiterated thOettoman claimst their most
extreme. Buthat Italiandiplomacy referreto as theProgramma
massimo(maximumprogramme)was no more thanthe startingposition
adoptedto opennegotiations. Subsequentwly,n thenegotiationshad
started,muchmoremeasuredand realistic claimscould bemade,and
were: thiswas the case,for example,with the "Programmamedio1'
(medium programme) a with the "Programmminimo" (minimu programme),
which ProfessoBrowett will beiscussing shortlyI.ncidentally,1
should liketo say at thispoint thawhatLibyais askingof the Court
ismuch closerto theminimumItalianclaimthanto itsProgramma massimo; whereasChad1sclaimis identical to what,with your
permission,1 shallcal1 France's Programma massimo.
By puttingforwardat the veryoutsetmaximalistclaimsand
-
- .- . embarkingon the discussion frotmhat point,Franceand Italy wereonly
doingwhat the artof negotiationand international law require. For
everynegotiatorknows fullwell that the resultaf a -true, a successful
negotiation can never be representedby total acceptanceof the initial
claimof one party andthe equally total rejectionof the claimof the
otherparty. In this case, France and Italyare no exceptionsto this
rule,as demonstratedby the fact that theyhave alwaysshown themselves
preparedto contemplate llconcessions tolthe opposingparty.
In so doing,Franceand Italywere respectinga well-established
principleof international law. Accordingto this principle, inal1
caseswhere negotiationis necessaryfor the settlementof a dispute,the
Parties havea veritable obligation "so to conductthemselvesthat the
negotiations are meaningfuw l,ich will not bethe casewhen eitherof
theminsistsupon its own position without contemplatia ngy modification
of it", as the Courtput it in the case of theNorth Sea Continental
Shelf, Judgment, I.C.J. Reports1969, p. 47, para. 85(a).
Naturally,this obligation to which Franceand Italywere subjectat
thetimenow appliesto Chad and Libya sincetheir independence.Since
the Parties were notable to settletheirdisputeby agreement,and
havingagreedto put the matterto the Court for asolution,it is for
you now to find a just and equitablesolution,takinginto accountal1
the relevant legal factors. Theseshouldincludethe obligationof the
Parties notto claimthat thesettlementof a territorial dispute
...
, 0 4 5 entailing the total acceptan ofethe positionclearlydefined by one of
---
the Partiesas a simpleopeningpositionwith futurenegotiationsin mind
is fullyin keepingwith justice. The Court frequently refei rs itsJudgmentsto a famous
obiterdictumwhichappearsin an Orderof Courtof 19 August1929,
made by its predecessorthe Permanent Courotf InternationalJustice:
"thejudicialsettlement of international disputews,th a view
to which the Courthas been established,is simplyan
alternative to the directand friendly settlemenof such
disputes betweenthe Parties"(P.C.I.J.,Series A, No. 22,
p. 13).
The referenceis to the caseof the Free Zones,and thereforeto the
Orderof Courtof 1929. 1 thinkit is particularly appropriah tere to
draw attentionto this basic concept which bringsout the factthat the
Court'stask is to effectby meansof a judgment what the parties
concerned have beenunableto effectby agreement: establish a
territorial delimitatio on the basisof al1 the rightsand obligations
incumbenton the parties underinternational law, includingthe one 1
have justmentioned.
3. The delimitation whicdhid not enterintoforcein 1935
1 now cometo the Treaty ofRomeof 1935,wherebyFranceand Italy
defined the frontier betwe Libyaand theterritories of FrenchWest
Africaand FrenchEquatorial Africe aastof Toummo. As we al1 know,the
Treatynever formallyenteredintoforce,sinceItaly refused to proceed
v
with the exchangeof instrumentsof ratification, but thi doesnot
diminishits role asan essentialelementof the casebeforeyou.
Indeed,how couldit be otherwise?The Treatyof Rome is the one
and only internationa instrumentwhich,throughout the century-old
. . historyof the dispute,was intendedto plot a line defining the frontier
- 046
- - in the area in questionand actually attainetdhispurpose.
Moreover,how couldit be otherwise when before thisTreatynone of
the instrumentosn whichChadbasesits claim had beennegotiatedand
concluded bytwo States whichboth effectively exerciss edvereignty over
the territoritiesto be delimited? Therecan of coursebe no questionow of reopening the filon the
Mussolini-Laval agreementsal1we have to do isto ascertaithe extent
to whichthe Rome agreementof 1935suggestany legalindicationsthat
the Courtmighttake into accounin orderto accomplish ittsask.
In orderto carry out this analysi1smust returnto a pointthat
ProfessorBowett mentioned lastiday. In the two.casesof territorial
delimitation mostecently submitteto you, two Chambersof yourCourt
stressed most clearlnyd explicitly the pre-eminrolethat aequitas
infra legemhouldbe calledupon to play in the settlementf disputes
of thiskind. And it is importanto emphasizewhat led the Court to
resortto aequitas infralegeandwhat itappliedin this connection
in both cases:the questionwas one oferivingvaluableindications
precisely fromertaindelimitation agreemen tsich wereneverratified.
In the caseof theFrontier Dispute(BurkinaFaso/Republicof
Mali)(Judgmentof 1986),mentionis made of a recordof 15 January1965
whichcontained specifiindicationson howa certain portionf the
frontierzoneshouldbe delimited,but whichwas notsubsequently
approvedby the competentuthoritiesof eachParty,so that,as the
ChamberStates(para.147),it did not "have the bindingorceof a
convention".Nevertheless,the 1986 Judgmenruled thatin thatcase
...
equityinfra legemimposed the dutyo followthe solutionprovidedfor
.-. 0 4 7
in theunratified agreemenit, viewof what the Chambercalled"the
circumstancesn whichthatagreementwas concluded"(para.149).
In theJudgmentof 11 September1992,the Chamberresortedto
similarreasoningon two occasions.Thus,the Chamberconsideredit
rightto fa11back onaequitas infralegem,"in conjunctiowith the
unratified delimitatioon1869". The Chamberhere refersto certain
negotiationswhichtook place betweethe twoStates at thetimeand
whichresultedin the plottingof a line,without subsequent conclusion of an agreementin good and due form. Yet it was precisely the 1869ine
that theChamberconsidered to be "a reasonableand fairsolution",since
therewas nothingin the negotiationtshathad led to its adoptionto
suggestthat "there was any fundamental disagreement between the Parties
on that linel'.
In the sameJudgmentof 1992, the Chamberonce.again uses, for
another sectora ,n agreementad referendumof 1935 reachedafter
negotiations betwee El Salvadorand Honduras,whichwas not, however,
subsequently ratified by t hespectiveGovernments.Here again,the
Chamberattachedimportance to the fact thatthe Parties hadfailedto
ratify the agreemen for reasons which dindotinvolveany disagreement
as to the line in questio (paras.100 et seq.).
Members ofthe Court,it seemsto me thatyour deliberations should
lead to a similarreasoning with regardto the Rome Agreementof 1935.
Indeed, if the Treaty of Rome1o 9f35had enteredinto force, it wouldbe
completely superfluon usw to questionwhether the frontie lineprovided
for in it was supposedto modify a previoulsine orto definethisline
for the first time.
But sincethe Treatyneverentered into forceand sincethe frontier
has notbeen delimitedby any other previou or subsequent international W
instrument, it is essential fotwo specific questiontso be answeredby
your deliberations.The first relates to the circumstancein whichthe
1935 delimitation wa sgreedupon and to the objectivethe Partieswished
to attain thereby;the secondquestion is why theParties subsequently
did not wishthe Treatyformallyto enter into force.
The replyto the firstquestion is simple, in the lighof al1 the
facts knownto us: Franceand Italy officiallyrecognizedthatno
delimitation hadeverbeen established before. The 1935 Treatythus defined the frontier ft orevery firsttime in a disputedregionand
thusrecognized that theterritories on eithersideof the lineplotted
by it belongedto Franceand Italy,respectively.
Thereremainsthe secondquestion: why did theTreatyof Rome not
enter into force? Why were the ratificationsot finally exchanged in
spiteof the fanfares whichaccompanie-ditsconclusion, -theardent
speechesby the two governmentsand the enthusiasticwelcomethat the
Treatyreceivedin both Parliaments, its ratificationbeingauthorized
unanimouslyin the ItalianParliament and the FrenchSenateand bythe
overwhelmingmajorityof 555 in favourand 9 againstin the French
. .
, 049 Chamberof Deputies? Here again,the answeris easy: the Treaty
- - represented a resoundi victoryfor Frenchdiplomacy, whichsacrificed
very littleof its openingmaximalist position,whileMussolini had to be
contentwith a few acresof sand, asit was saidat the time. That is
why Francecontinuedto make representations for some f ourrs in an
attemptto convinceItalyto ratify.
But its effortswere vain,and thereasonis quiteobvious. In 1935
Mussolini hadbeen severelycriticized by Italianmilitary circles for
having soldoff Libyanterritory(as it was said at the time
sotto voce); Chad itselfhas confirmedthiseloquently in its
Memorial(p. 351). But it is perfectlywell known,and Chadhas no
difficultyin recognizing this,why theItalianGovernment agreedto such
a sacrificeof its traditionalterritorialclaims. The territorial
sacrificethatItaly waspreparedto make wouldenableit to obtaina
quid proquo which wasveryvaluableto the fascistGovernment: it
woulddiscreetly receivi en returnthenihil obstat of France,or even
its friendly blessingf,or the impendinaggression agains Ethiopia. Italy subsequentl yonsideredthatthe attitudeassumedby France
towards the Ethiopian questi(especiallyin theLeague ofNations)
did not conform withthe commitmenttso complicit(or at leastto
connivancethat it had undertaken.Hencethe riposte whereby Italy
abandoned the 1935 Agreemen tospunish France for its unfriendly
attitude andto indicatethatrelations with othercouritriesthosewith
the ThirdReich)would henceforth bp erivileged.
That is why the Treatof Romedid not enter intoforce. Francewas
. . very enthusiastic about irte,gardingit as very advantageousso
O 5 O advantageousthateven afterit had beenofficially notifiedof the
Italian intentions it informed GreaBritainon 29 December 1938that
the FrenchGovernment"intendsto maintainthe legal basisof the
understandingreachedin 1935and remains ready,despitethe tensionnow
prevailing,to carryout theseagreements fully"(ML, Exhibit58). On
the Italianside,however,the agreements in questionwere regardedas
entailingan unwarranted territorisaalcrificenot to be tolerated
withoutan appropriatereciprocal advantage.
It seemsto me thatwe have hereal1 the conditionsaccordingto
your jurisprudence, foirmportant indications be drawnfromthe Rome
Agreementsas to the delimitatioyou must carryout.
One obvious and,n my view,univocalindication,in particular,
emerges from the RomAgreements: at tlheast, the territoriesituated
to the northof the line of 193mustbe recognized as belonging
indisputablyto Libya. The Agreementsalsosuggest(buthere without
supplying anypreciseindications) tha the legal positions the same
with respectto some ofthe territorietso the southof thatline. 4. Coloniallegacyand equity
1 comenow to a lastseriesof considerations suggeste by an
analysisthathas led me to explorevariousfacetsof the influenceof
the colonial periodon the presentdispute. It is a self-evidenttruth
that thecolonial legacy alway wseighsvery heavilyupon any territorial
disputebetween States which came-intobeing -asaresultof
decolonization. And tpheesentcase is no exceptionto the rule.
..' Yet if we look at the wholebody of argumentsproposedto the Court
051
by Chad,the impression strikeu ss that theweightof the colonial legacy
is neitherequallynor equitablydistributed betweenChad and Libya: one
might Say that Italyhas passedon to Libya a legacycomposedonly of
obligationsand servitudes in favourof Chad,whereas France has passed
on to Chadnothing butrightsand advantages vis-à-visLibya. One might
Say, in fine,thatLibyahas received exclusively tl heegacy's
liabilitiesand Chad only the assets.
For Chad, the case boilsdown finallyto a seriesof decisions which
Franceallegedly adopted, negotiatit nhgemwherenecessary witha third
State,Great Britain, and towhich Italy allegedl deferred, oragainst
which it did not protestor in which it acquiesced, therebyenouncing
- withoutat any timeexplicitlystatingthe intentionto do so - the
rightsit couldhave claimed. And, as a result - forgivethe
expression- Libya is supposedto have been"had",trapped,and must bear
the consequencesof al1 theseactivities. Chad,on the otherhand, need
not sufferthe slightest prejudiceon accountof what Francemight or
mightnot have done duringthe colonialera.
Thus, for example,in 1902Italy apparently believe the untruth
that amap was annexedto the Anglo-FrencD heclarationof 1899 and Libya
today is supposedto be boundby this slip allegedlycommittedby Italy
90 years ago,while Chadmay quietlyenjoyeveryadvantage from the trick playedat the timeby France. Thus,again,Libyatodayis supposedto
pay for the factthat at the starotf the centurItalyallegedlybehaved
in such a way as to encouragethe beliefthat it was renounciin
advance(and,in any case, withoutexpresslysayingso) rightsand titles
it did not yethave and would notacquire untiten yearslater,at the
... timeof its successionto the Portein-respect-ofLibyan territory:
052
- - - whileChad,on the otherhand,is not supposed to be boundby France's
perfectly explicitacknowledgmenin 1935thatno frontier had ever been
...
determinedto the east ofToummo. Thus,again,Libya is supposedto
053
--. suffer theimplicationsof arrangementsmade in a remotera for purposes
w
otherthanthat of establishinboundaries and concludedbehindthe back
of the Statethenexercising its sovereignty oveLibyanterritory: that
is to Say,behind Turkey's bac in 1899and 1902and behindItaly'sback
in 1919.
Thereyou have a few notunimpressiveexamolesof the fundamentally
unbalanced approacadoptedby Chad. But there ismuch more: there are
two stagesin Chad'sargumentthatare realmasterpieces of theirkind.
The firstconcerns the Franco-British Agreeo ment919, which
"interpreted"the Anglo-FrencDeclarationof 1899 byshifting very
distinctly towardtshenorththe south-eastlineprovidedin that
Declaration. ProfessoCahierhas toldyou aboutthe firmand continuous
protestswhichItalyaddressedto both France and Great Britainon that
pointas soonas it had cognizanceof what thosetwo Stateshad secretly
plottedbetween them. It clearly followfsromthosethat the 1919
Agreement- res.inter alios-couldhaveno effect for Itala ynd could
havenone today forLibya,Italy'ssuccessor. But, as you know,Chad's
thesisis entirely different:in Chad'sview,it is the Italianprotests
thatwereworthlessand had noeffect,for thesimple reason that Italy
had nolegal titlefor protesting. Even leavingasidethe criticalcommentsthatLibyahas already
presentedto you, it mustbe admittedthatthisthesisleaves one
literallyopen-mouthed,becauseit irresistiblbyringsto mind a kind of
doublesomersault:Chadwouldliketo makeyou believethat in 1919,
- - 0 54
when Italywas sovereign iLibya,it was not legallyempoweredto
protestagainst the shiftinof the 1899 line,whereasin 1902, some ten
yearsbeforeit trodLibyan soil, Italy according toChad,had full
legaltitleto acceptthatsameline! In short, Italy had titleto Say
yes but not to sayno: and thiswith the remarkable consequenthat
Libyatodayis allegedly boundby the Italianacceptanceof 1902but
cannotclaim thebenefitof Italy's protestsof the 1920sand 1930s:
1 now come,in conclusion,to a second ando lesssurprising stage
of the Chadianargument. The question heris whether Libyaan or
cannot invoke to its advantage Art1iclof theLondon Treaty of 1915,
whichimposedupon Francethe obligationto accepta settlement
favourable to Italof outstandingissuesconcerningthe Libyan
boundaries:an obligationwhichFrancedid not fullydischarge, as Chad
recognizes withoudifficulty.Chad'sanswer,as we know,is negative.
Its argumentis that thPeace Treatyof 1947 sweptawaywhatwas leftof
the rights Italcould derivefrom theLondonTreaty: thisby reasonof
the factthatItaly,underArticle23 of the Peace Treaty,lostits
Africancolonies, includingLibya, withal1 the rightsand titles
relativethereto. Thoserightsand titles,Chadmaintains, were
transferredto the FourPowers,includingFranceand GreatBritain.
Accordingto Chad,the consequenceis that therights whichItalycould
derivefromthe LondonAgreement vis-à-visthosetwo Powers,lapsed
because"it is obviousthatone cannotsimultaneouslb ye theholderof a
rightand of the corresponding obligati( on",p. 85). My only reasonfor adverting to this aspectof the case,whichhas
alreadybeen discussedbeforeyou, is that 1 should liketo bring to your
notice that,accordingto Chad, the Peace Treaty(it seems)is supposed
to have sweptaway exclusively th eightsthat Italyhad vis-à-visFrance
in respectof Libyanterritory: for thatreason,Libya today is not
supposedto be able to claimthoserights against Chad. On.theother
hand, the obligations that Italy hadassumed to the advantage of France
are supposedto have miraculously survived,so thatno obstacleprevents
Chad from invoking themnow beforeyour Court. Andin this line of
reasoning the Reply ofChad (p. 92) carriesaudacityto the pointof
reprimandingLibya becauseit dares to invoketo its advantage the
provisionof a treatybetweenthe colonial powerswhich "by envisaging
...the 'slicingupv of Africa bearsthe mark ofthe most intolerable
imperialistcynicism"(thatis Chad speaking). As thoughthe
Franco-British instrument of 1899 and 1919were not a productof the
same imperialistcynicism - as thoughthey didnot bear the mark of
the same colonialistapproach!
1 think there is no need to add much more in ordeto denouncethe
fundamentally inequitable nature otfhe Chadian approachconcerningthe
distribution of the colonial legacbyetweenthe Partiesto the present V
dispute. The Court willsee justicedone by adopting asolutionin
conformitynot only with the law but alsowith equity; and equity
demands - Libya is convincedof it - that a satisfactory balancee found
as to the weight ofthe colonial legacy tha Libya and Chad are called
upon to bear.
5. The aspirationsand well-beingof the populations affecte by
- - 056 the delimitation
1 have just developed threeargumentsbased on the actionsof the
colonial powers befortehe independenceof Libyaand Chad. It is high timenow to speakof argumentsof a differenorder,arguments that
The
pertainto the humandimensionof the casebeforeyour Court.
colonialperiodsaw the emergenceof legal principleslatingto the
aspirationsand thewell-beingof thepopulationsconcerned,whichmust
be takenintoaccountin orderthata justsettlernen of the present
dispute maybe achieved.
Of courseit is necessaryto bear constantynrnindwhat is stated,
in paragraph 14of theJudgment of the Chamberin thFrontier Dispute
case,of 22 December1986,and citedwith approvalin the Judgmentof the
Court of11 September,paragraph58,namelythat: "to resortto the
conceptof equityin orderto modifyan establishedfrontierwould be
quiteunjustified".
But we arenot facedwith thissort ofsituation: the conviction of
Libya is thatargumentsconcerning theumandimension happento be
particularly importantti he present casecauseno boundaryhas ever
been drawnin the regionin questioneitherduringor afterthe colonial
period. Sincethe Courtis required todatyo establissucha boundary
for the firsttime,it is naturalthatthehumandimensionshouldcorne in
for special attentionromit. Now thisspecial attention ,n the
presentinstance,is requirednot onlyby aequitas infrlegem but also
by theapplicable legalrules.
The pointis that theItalianperiodsaw the emergence of
internationanlormsestablishingthe legitimate interests the peoples
of theregion,normsthataccordthosepeoples genuini enternationally
guaranteedrightsand specificallynjointhatdelimitation shal be
effectedwith due regard tthe interestosf the peoplesconcerned.
O 57
Emblematicallythesenormsare situated at the verybeginningand atthe
very end of the periodwithwhich am dealing. The initialnoms are thoseof the 1912 Treatyof Ouchy,of which 1
have alreadyspokenin my firststatement. 1 shallonly revert to the
subjectfor a moment to remindyou that the Treatyin question
transmitted theLibyanterritoryto Italywhile layingupon the latter
the obligationto respectthe "autonomy"of the populations concerned,
which implied their rightto freedomof mrship -and-toparticipationin
the runningof publicaffairs.
This régime hencepresupposedinternational recognitionof the
unity, identity, distinctivenes and rightsof the Libyanpeople. The
Italiancolonial authoritie sere consequentlyunder an international
w
obligationto respectthoseprinciplesin theiradministration of Libya.
... Now it seemsobviousto me that such an obligation necessarily extended
058
- - - to the handlingof the boundaryissue. In otherwords, negotiation on
delimitationwas to be conducted,on the Italianside,not only in the
exercieeof the rightsthat Italy hadinheritedfrom its predecessor but
also in compliancewith the obligationsthat Italy hadcontractedin
regardto Libya, including the duty to safeguard thunity, identityand
autonomyof the Libyanpeople.
1 have no need to remindyou that afterthe firstwar againstthe
Sanûsiyya(1911-17),Italy beganby tryingto abideby its obligationt so 'I
the Libyanpeopleby concluding a whole seriesof agreementswith the
Sanûsiyya, which was ifnact striving forindependence. 1 shallalso
leave asidethe turning-pointof 1923, which markeda radical change in
the attitudeof the ItalianGovernment. The latter denounced al1 those
agreements withthe Sanûsiyyaand launched amajormilitarycampaign,
namelythe second war betweenItalyand the Sanûsiyya(1923-1932), which
ended in the crushingof the anticolonial strugglesymbolizedtragically
by the trialand hangingof the hero and leader of the Libyanresistance against ItalyS,heikhSenussiOmar el Mukhtar,of whomyou have already
heardandwho had been entrustedby the Sanûsiyyawith the commandof the
entirearmed struggle againt ste Italianforces. Clearly, the Italian
fascist régime thereby rendered itself responsible for violating the
international obligations lu aidn it in regardto theLibyanpeople.
But it mustnow be emphasizedthatthoseobligations nevertheless
remainedin force throughout the Italian colonial period 192t3Treaty
of Lausanne having abolished the ria ghtsprivileges that Turkey had
retainedin ItalyundertheTreatyof Ouchy,andnot the rights that the
Treatyguaranteed for the Liby people.
If 1 alludenow to theseinternational obligatio vis-à-visthe
---
LibyanpeoplethatItaly shoulh dave takeninto consideratio in handling
the border issuei,t is not to proposethatthe Courtnow applythe
Treatyof Ouchy. Particularlysincetheobligations intende to benefit
theLibyanpeople were lai dpon Italy,andnot on France(or,still
less,on present-dayChad). My purposeis different:it is to highlight
thenexusof continuity existingin this regard between the 1912 Treaty
of Ouchyand the Treaty of Peacof 1947, namely the international
instrument that thitimeclosed the Italian colonia leriod andwhich,
as we know,is concerned withthe fateof Libyaand the problemof its
boundaries.Now, unlike the Treao ty Ouchy, the1947Treatyof Peace
establishedal1mannerof obligations not just for Italy but also for
France,one of the Parties;and inasmuch as the provisionsf the Treaty
of Peaceconcem the questionthatis the subjectof the present
territorial dispute, Lib andChadare unquestionably boua ndsuccessor
States.
1 should liketo recallthe relevant aspecotf AnnexXI of the
Treatyof Peace. It was by unanimous decisionof the fourPowersthat
theTreatyassigned the task of determining the finadisposa1of Libya, but alsoof effectingthe "appropriateadjustment"- which isthe
terminologyused - of their boundariesin the lightof thewishesand
welfareof the inhabitantasnd the interestsof peace andsecurity".
That is the wordingfoundin the Treatyof Peace. To do that,the four
Powers had oneyear,afterwhichthe matterwouldbe referredto the
GeneralAssembly. This is what in facthappened,-owintgo the
. . in particular,by France's bid to
disagreementamongthe Powerscaused,
.-- O60
annex to the territoryf its surrounding colonis esbstantialportions
of Libyanterritory.
The GeneralAssembly nevertheless decid not to contemplate
modifying Libya'sboundaries, as Sir Ian Sinclairhas illustrated,It
took the view that its taskwas tooncernitselfsolely withdelimiting
thoseboundariesalonewhichhad not alreadybeen fixedby international
agreement.Now, inresolution 289 (IV)of 1949, section C,it is
explicitly establishein the firsttwo preambularparagraphsthatthe
whole operation pertaintso the principles setforthin the Treatyof
Peace,particularly including - thisis repeatedexplicitly - that
relating to allowance ft ore wishesand welfareof the populations
concerned. Subsequently, in 1950 the General Assemblwyas to decide
(resolution392 (V)) to entrustto a futuredirect agreement between
Libyaand Francethe delimitation of the boundaries.
And then,as we know,in 1955 Libyaand Francedid not succeedin
delimitingthe boundariesthat hadnot alreadybeen fixedduringthe
colonial period; al1 theywere able to do was confirmthe pre-existing
delimitations.It is an acknowledged fac that,since1955,the
situation has notchanged,andnegotiations betwee Libyaand Chad,both
directand withinthe framework
of OAU, haveyieldednothingmore than
the Special Agreement underlyt ingjurisdiction of the Court. It is thereforeto the Court thatit ultimately fallsa ,fter somany
detoursand vicissitudest,o comeup witha finalsettlementfor such an
old disputethat thePartiesconcernedhave been unableto resolve
through failureto fulfilthe task assignedto themby the General
Assemblyof the UnitedNations. The functionof the Courtwill
represent,in short,the accomplishment of that of the GeneralAssembly
and will beeffectedon the basisof the same legal principles, including
thatwhich enjoins allowance fotrhe wishesand welfareof the
061
- - populations concerneda,nd hence theirethnic,culturaland socialties.
It must be concluded therefrothat,in the presentdispute,the forceof
the argumentsrelatingto the humandimensionnot only dependson
aequitasinfra legem,but derivesfrom a legal principle in forceand
specifically applicablteo the delimitation operation referrtedthe
Court.
Those then are the reasons that brinLgibya respectfullyto request
you to adjudgeand declarethat theboundarybetweenLibya and Chadmust
be determinedwith due regardto the human factor,that is, respecting
the ties of allegianceof the populationof the region; theirhistory,
their culture,theirreligionand theirsocial organization reflecta
preponderant attachment to which the applicablenorms accorda distinct
role in determiningthe rightful possessioby eitherParty to this
disputeof the territoriesthat constitute theil riving-space.And such
attachmentindisputably operatesin favourof Libya. Professorowett
will berevertingto this aspect, whichhe will tie in withLibya's
reasoningas a whole.
6. Allowancefor considerations concerningpeaceand security
1 have just to touchon one very lastpoint,on which 1 assureyou 1
shallbe very brief. This is that thesame observations 1have just
presented concerning th hemandimensioncouldbe reiterated, word for word, in regardto the "interestosf peaceand security". Theseterms
are alsoto be foundin Annex XI of the Treatyof Peacewith Italyas
criteriaproperly governing bot the finaldisposa1of Libyaand the
"adjustment"of its boundaries. 1 haveno need therefore furthet ro
. . justify the followin assertion: it is the applicablelaw,and not Just
* O62
- - aequitasinfralegem,thatcompels the Court toestablishin the
presentcasea delimitation in conformitywith the interestsof peaceand
security, thatis, onethat is balanced, fair anrdeassuring,one thatis
capableof representing a factorin appeasement, stability and détente
for the people8and theStatesconcerned, and not a sourceof fresh
tension.
My sinceresthope is that theobservations1 have mademay be of use
to the Courtin advancingitswork.
Le PRESIDENT: Merci beaucoup, MonsieC urndorelli.Et maintenant,
M. Bowett,Je pense.
M.BOWETT :
LA LIBYESUCCESSEUB EN TITRE
Monsieurle Président,alors l'exposé dl ea thèse libyenneendant
ce premiertourde plaidoiries toucheà sa fin,il faut commence r
réunir tousles différents fils dle'argumentation.
1. La coalescencedes droitset titresau bénéficede la Libye
Il faut rechercheorù résidele titresur trois plans différents,
car ilne s'agissait pas de la situationsimpled'un Etat unitaire
fortementcentralisé.Le titre existais tur trois plans: il appartenait
awc tribus autochtone sur leterrain,aux Senoussisur leplande
l'administratioent de lacoordination entretoutesles tribusdans l'ensemble du territoireet à une successiodn'Etatssouverains
- l'Empireottoman,puis l'Italie, maintenantla Libye - sur leplan
international.
a) Les tribus autochtones
En ce qui concerne lestribus autochtones le titredes diverses
tribusn'estpas seulement qui futinvoqué depuis le plus longtemps,
c'estaussi le seul qui soit resté constan malgré les changemend ts
décor. Les tribusétaientlà, commedes unités socialement organisées,
bien avant que lespuissances colonialn ees commencentà s'intéresserà
cette partie de l'Afrique,et ellessonttoujourslà maintenant. Leur
occupation des confinsa été continue :elle asurvécuaux Ottomans, aux
Françaiset aux Italiens.
La Coura sous lesyeuxune pétition des tribusdu Tibesti,en date
du 3 novembre1991 (contre-mémoird ee la Libye,vol. 2, pièce3),
affirmantqu'ellesestiment"fairepartiede la Libye". Cn'estpas
simplement qu'elle envisagent un avenir plusprospèreavec laLibye :
ellesont euun passélibyen,pendantdes dizaines d'années, pendant
lesquelles nous avonsvu en Libyenon la prospéritém ,ais la pauvretél,a
guerreet la famine. Leur allégeance à la Libyen'a jamaisété ébranlée.
. .
b) Les Senoussi
-64
-. En ce qui concerneles Senoussi, la cohésion appor técees tribus
par les Senoussia déjà été amplement démontrée. L'association e lesre
Ottomanset les Senoussin'a jamaisété plusmanifeste que dans leur
luttecontreles Français. Du pointde vue de l'administratioe nffective
du territoire,les Senoussi étaient l'associé dominaL nt.Tchadne le
contestepas. Commele Tchadle dit dans son contre-mémoiree ,n 1912la
Senoussiaétait clairement souveraine. Le Tchad concède quejusqu'en1912, les droits souverai nur la
totalitédes confinsappartenaient aux Senoussiet aux populations
senoussi.
11 ressortclairement du dossier que la France pratiquement
Elle a effectivement étabd lis
reconnula souveraineté des Senoussi.
relations officielle avec les Touareg en-signan la-tonventionde
Ghadamèsle 10 mars 1863 (voirrépliquede la Libye, pièce 7.10)et a
ainsi reconnu qul ee territoiredes Touareg n'était paun territoire
sansmaître. La Francea établi presqudees relations semblabla esec
les Senoussi. Elle concevaitles pourparlers menés avecles Senoussi
I
entre1911 et 1914 (voirmémoirede la Libye,par. 4.151-4.165) commeun
moyend'aboutirà un accord.
La Francen'a jamais mis en doutl ea réalitéde l'autoritéexercée
par les Senoussi sur le confins. Or, il s'agissait d'unaeutorité qui
dépassaitde loin toute celle que la Franceelle-mêmea exercée pendant
les cinquante année qui ont suivi.
Le caractère"libyen"des Senoussine saurait faire de doute. La
confrériesenoussiétait présente en Tripolitaineet en Cyrénaïque,et
c'estdans les régionc sôtièresde la Libyequ'ellea mené sa longue
guerrede résistance contre l'invasion italied nne1,914jusqu'autraité *
d'Acromale 17 avril 1917(mémoirede la Libye, "Accordset traités
internationaux"a ,nnexe,no 16). Elle a combattd ue même de 1923à 1932
pendantla seconde guerre italo-senoussic,omme vientde le relater
M. Condorelli(voirmémoire dela Libye,par. 5.221-5.246).
... Pendant la seconde guerre mondiale,Sl enoussiont combattu une
a - . 065 foisde plus, à côté des Britanniques,pour libérerla Libyedes
puissancesde l'Axeet il n'y a pas lieude s'étonnerque ce soit leur
émirIdriss,le dirigeantsenoussi,qui estdevenule premier dirigeant
de la Libye nouvellemen indépendante. 11 n'y a donc guèrede douteque la Libyea succédé à la partiedu
titre à la souverainetséur les confinsqui procédaitde l'autorité
senoussi. Les Senoussiétaientlibyens : ils étaientle noyaumême du
nouvelEtat.
c) Le titre d'Etatsouverain
En ce qui concernele titrede 1'Etatsouverain, du pointde vue de
la successionsur le plan internationall,a lignede succession de
l'Italie,puisde la Libye,quimène de l'Empireottoman à l'Italieet
ensuiteà la Libyeest claire et directe.
Les Ottomanspouvaientse prévaloirde la revendication antérieure
en date - c'est-à-direantérieureà cellede la France - et cette
revendicationa été portée à la connaissance.deFrançais en 1890a ,vant
que la Francen'eûtmême atteint le lacTchad.
Certes, l'Empireottomann'a pas appuyé cette revendicatiopnar la
force militaire dan toutela régionqui en faisait l'objet. La force
armée n'étaitpas nécessaire,car les tribusacceptaient la revendication
de souverainetéottomaneet il suffisait de la présence desKaimakams
ottomans,qui usaientde la délégation traditionnelldees pouvoirs. Elle
l'a fait toutefoipsour les confins,quand ily a euune menace
d'invasion françaiseL .a carte maintenant présent (carte no78) montre
commentles Ottomans ont ripostéà l'invasion français avecdes forces
militaireset arrêtéles Français au sud d'une frontièrede facto
jusqu'àleur propre retrait en1913.
Cette revendicatio turque aété transmisedirectement àl'Italieen
vertudu traitéd'0uchyde 1912. La Francea reconnul'Italiecomme
successeurde l'Empireottomancinqjours après le traitédlOuchy
(répliquede la Libye,par. 6.73)et de nouveaupar l'article 10 du
traitésecretde Londres de1915. Il est vrai que l'Italien'a pas envoyéde forcesitaliennepour
---
remplacerles forcesturques retiréed ses confinsen vertu dutraité
d'0uchy. Du pointde vuemilitaire,l'Italieétaitentièrement retenue
au nord de la Libye,où elles'efforçaitde réduireles forces ottomanes,
puis senoussi. C'estparce quel'Italieavait fortà faire avecles
Senoussi que la Francea eul'occasionde-permettreaux forcesfrançaises
de progresservers le nordà l'intérieurdes confins.
Toutefois, ces soucide l'Italieau nord du paysne sauraient être
censés impliquerune renonciationde sa part à ses revendicatiosur les
confins à titrede successeur del'Empireottoman. Deux "programmes"ont
w
Pendant les années vinglt,ministère italien
été élaborésen 1916.
des colonies a élaboré trois "programmp es",l'essentiel trois
revendications possibles en qual itsuccesseurde l'Empireottoman.
Le programme"maximum" de 1928 (cartno 53) ne différaitque peu de la
revendication ottomane 1 de90: il s'étendait,on le voit, loin asud
du lac Tchad. Le programme "moyen "carteno 54) lui aussis'étendait
loin ausud des confins. Même le programme "minimum",en teutcluant
le Kanem,allait vers le sud jusqu'au15~parallèle(carte no 35). Il
est donc bienévidentque l'Italiese considéraitelle-mêmecommeayant
W
succédéaux revendicationosttomanes.Un abandonn'a jamaisété envisagé
à ce stade.
De plus,il était clair qulees tribus autochtoneet les Senoussi
n'avaientjamaisabandonnéleurtitre.
Ce qui compte plus encorce,estque la Francereconnaissaitle lien
entreles revendicationssenoussiet italienneset admettaitque,malgré
l'hostilitéentre eux,l'Italiepouvaitbénéficier des revendications
senoussiquand elle s'opposaità la France.Ainsi, dès le 24 octobre 1916,le ministre françaides coloniesa-t-ilmis en garde
contreles dangersd'un abandondu Tibesti.
,.. "Lesabandonner[cesterritoires]m ,ême momentanément,
06 7 aux Senoussi,c'estfaciliter les revendicationde nos voisins
... [ilse réfèreaux Italiens], qui se considéreroncomme les
héritiersde la confrérie."(Réplique de la Libye,vol. 3,
pièce11.3.)
L'Italien'a doncpas seulementsuccédé aux revendications
ottomanes, ellse'estmise à la placedes Ottomans dansl'associationqui
avaitpour objet letitre dont les titulaires avaient éatéparavantles
tribus, les Senoussi et l'Empireottoman.
Qu'est-cedonc qui a incitél'Italieà effectuerun retraitsi
radicalpar rapport aux revendicationsttomanesen acceptant lalignede
1935 ? Il y a eudeux raisons principalesL.'unea été quele
maréchalBadoglione portaitguèred'intérêtà un territoirequ'il
considéraitcomme un désertstérileet improductif (mémoirdee la Libye,
par. 5.306).
La deuxièmeraison,et de loinla plusimportante, a été que
Mussolinipensaitqu'enrenonçant à ses revendicationesn Libye,il
s'était assurél'appuide la Francepoursa conquêtede 1'Ethiopie.
Voila comments'estfait le traitdée 1935.
La Coursaitmaintenantfortbienpourquoile traitéde 1935 n'est
jamaisentréen vigueur. Il n'y a pas de doutequ'il a constitu én
repli,ou un abandon,à l'égardnon seulementdes revendications
senoussi, maisaussides revendications ottomanes Si le traitéde 1935
était entréen vigueur, lapositionde la Libye seraitmaintenanttrès
difficile.La positionde la Libyeauraitsans douteété
irrémédiablement compromise.
Heureusement, tel n' pas été le cas, si biequ'enréalité la Libye
a héritéde l'Italieles revendication telles qu'elles existaient avant
1935. La difficulté,c'estqu'en tant qu'elles portens turun titre,ces
revendicationn se permettentpas, par une transposition immédiatde,
formulerune réclamation claireet reconnaissable d'unelignefrontière
précise. Il s'agitlà d'unedifficulté essentiellemel ntéeà un
Avec des tribusnomades dansun pays désertique
territoire de ce genre.
ou montagneux, il estrare que des frontières précises aientété
reconnues. De plus,à la différence des territoires espagn olAmérique
du sud ou d'Amériquecentrale,il n'y a jamaiseu de délimitations
administratives claires établp ies l'Empireottoman,par l'Italien,i
même,permettez-moi de l'ajouter, palres Françaisau sud.
w
La difficultén'estpourtant pas insurmontableet il existeen droit
.. 068
- - des critèresqui peuvent aider àdéterminer une frontière dandses
circonstances decettenature. Ce sont cescritères que je vais aborder.
2. La frontièrequi se dégagede l'ensemble de l'histoirede l'affaire,
conformémentaux critères indiquépsar le droit
Le Tchadadmetqu'en1912,c'étaient les Senoussiqui exerçaient les
droits souverainssur la totalitédu Borkou, de1'Ennediet du Tibesti;
cela s'accorde avec p leint devue de la Libye,et nous pouvonsdonc
partird'uneprémisse admise.
A partirde cetteproposition convenue nous pouvonsmaintenant
passer trèsfacilement à notrepremier critère. Quelles étaientd,'après
les éléments de fait les limitesde la possession français effective
établie entre1912 et 1919, dateà laquelle le Tchaddéclareque le titre
françaiss'esttrouvé effectivemen établi ?
a) Les limitesde la possession française effective acquise par
la conquête entre1912et 1919
Le Tchad soutient que le titrefrançais- et la frontièrequi fixait
les limites dece titre- se trouvaient établi en 1919. Nous devons donc rechercher quelle éaté l'étenduede la conquête françaisp eendant
ces sept années, avan la proscription de la conquête commmeoyen
d'acquérirun territoire.
Le mieux est d'illustrerla situationsur la carte. 11 faut se
souvenir que lesOttomansavaientmaintenules Françaisen gros le long
du lSe parallèlejusqu'àleur retrait an 1913-(=,artnoe48): Ensuite,
quand letraité dlOuchyeut entraînéle retraitdes Turcs, les Français
ont avancé. Toutefois,ce n'a pas été une progressionrégulière,
effectuéepar des forces française sui prenaientpositionet occupaient
tout le territoire derrière leur lignes. Il n'y avait pas de lignes.
Les forces françaises étaient tr opstreintes pourcela. Ce que nous
trouvonslà, c'estune sériede pénétrationspar des colonnes françaises
ponctuéespar des bataillesisolées. On peut voir la progression
françaisesur la cartemaintenantprojetée surl'écran(carteno 81).
. .
Les Françaisont occupé Oum Chalouba juste au nord du
069
-.. lSe parallèle,puis enmai 1913 un colonne française ,'environ
quatre-vingt-dixhommes commandéspar un lieutenant Dufoura , attaqué
Oum el Adam et repousséune fortecontre-attaque les 21 et 22 mai. 11y
a eu d'autresattaquessenoussi, contru en convoià Oum Chalouba le
26 juin, contreAti - vers lesud jusqu'au13 e parallèle - en août et
contreune caravane près dT eekro le 22novembre.
Les Français ontpris Ain Galakkale 27 novembre1913. Ils ont pris
Faya le 3 décembreet, laissantcinquantehommes à Faya, envoyéune
colonnevers le nord en directiod ne Gouro,qu'ilsont atteintle
14 décembre.
Toutefois,quand l'histoirefrançaiseofficielle parle de "la
conquêtedu Borkou",il ne faut pas oubliernon seulementl'échelle
limitéede la présencemilitairefrançaise, mais aussi la persistance des
hostilités (carteno 82). Comme l'indiquentles chiffres donnés dans l'Histoiremilitairefrançaiseofficielle,la présence françaisa eu
Borkou était constituée par la 7e compagnieà Faya, la 8e compagnie à
:
Fada et de petits postes avancéà sAin Galakka,Gouro et Ounianga-Kebir
peut-êtretrois centshommes au plus.
Cela ne constituait pasune occupation belligérante effecti dee
tout le Borkou. Mohammed Erbeïmi a attaqué 1-peoste de Gouro en
novembre1914, et les attaques sesont poursuivies, y comprisen 1915.
Entre avrilet mai 1915, des combatsavaientencore lieu autour de Gouro
(carte83).
En 1916, les attaques des Senoussi sont présentées co devenant
"plus agressives", MohammE edbeïmiayant rassemblé huit centh sommes
près de Fada. Comme le rapporte l'histoio reficielle :
"En résumé,fin 1916, la situation sur cette frontiè[ rel
s'agitdu Borkou-Ennedi] restait,sinon grave,tout au moins
inquiétante." (Contre-mémoire de la Libye, pièce 13, p. 467.)
Ce n'est guère là la description d'un territoire effectivement occu pé
En 1917, l'occupation française demeura circonscrite aux cinq mêmes
localités- Faya, Fada,Aïn Galakka,Gouro et Ounianga-Kébir(carte83).
Les Françaisenvoyaientdes patrouilles de reconnaissance, continuant de
070
poursuivre Mohammed Erbeïm et accrochantles Senoussi chaque fois que
les deuxcamps serencontraient. Erbeïmi s'empd arane caravane
d'approvisionnements françaiqui se rendait d'Oum Chalouba à Faya, que
les Françaisrécupérèrent à peine deux joursplus tard.
En 1918, certains chefs senoussiont cherchéà conclureune trèveavec
les Français,mais non pas Erbeïmi,et les patrouilles de reconnaissance
françaises s'aventurèren plus loin au nord, jusqu'auxcontrefortsdes
t
montagnesdu Tibesti. Même en 1919, on signaleencoredes affrontements avec
ce que l'on appelle deswrezzous"ou des "dissidents";et aucunelocalité
supplémentaire n'est réellement occupéed ,e façonpermanente,par les forces
françaises. Quelle conclusion cel suggère-t-il ? La conclusion doit être
nécessairementqu'à la fin de l'année 1919 in'y avait aucune occupatid onns
le sensqu'exigele droit international - au norddu lse parallèle. Le
Kanem,à l'ouest,était relativemen sûr. Maisni le Borkouni l'Ennedi
n'étaientfermement occupés et,bien sûr,le Tibesti avait été complètement
, . évacué parles Français. Que vous appe-lieczela.occupati-"onffective"ou
071
occupation"belligérante",ellen'aurait pas pu êtreréaliséepar si peu
d'hommes,contrôlant si peud'endroits.Cela est certain,étant donné la
résistancequi se poursuivait contr les Français. Et ainsi,le
15e parallèleapparaît commlee maximumque l'occupation effectivepar
la Franceait pu atteindreau nord. Les affrontements occasionne qui se
sont produits au norddulse parallèlene faisaient pas partied'un projet
e
qu'auraiteu la Franced'occuperdes territoires au norddu 15 parallèle :
ils faisaient partidee la politiquede "pacificationd"es tribussenoussiqui
avaitpour objetde protéger le territois retué au suddu lse parallèle.
Avantd'en terminer avec cette part deemon exposé, je dois dire
quelques motsde la cartequi apparaîtdans lecontre-mémoird eu Tchad à la
page 254, intitulée "Progressid on l'occupation françai1 se00-1914".En
effet, ce queje viens de dire dela natureet de l'étenduede l'occupation ou
de la pénétratiom nilitaire françaisdeasns les confinnse cadrepas du tout
avecla carteprésentéepar le Tchad. Et la Cour adonc droit à une
explication.
L'explication es plutôtsimple :la carteprésentéepar le Tchad
constitue une complètedistorsion de la réalité. On me permettrade donner
quelquesexemples. Aouzouest indiquépar le Tchad comme s'il avaitété occupé en1914.
Il n'a été
La véritéest qu'unecolonnefrançaisel'a traverséen 1914.
"occupé"qu'en1930,puis laissé complètement sans garnison de 1935 à 1937,
brièvement réarmé d 1937 aumois defévrier1938,ensuite évacué jusqu'en
avril1954.
Bardaïest marqué comme "occupé"en 1914. .Maisleposte a été en fait
abandonnédeux annéesplus tard, en août 1916,et n'a ensuiteété rétabli
qu'en1930.
Wour est aussi indiqué commel'occupé"n 1914 :en réalité lepremier
poste français a été établien 1930.
Tekroporte lamême indication de date. En fait,une patrouille
française y est passéeen 1914alorsqu'ellese rendaitaux puitsde Sarra
afinde voir si les puits pouvaient êtr détruits. Le premier poste français
n'y a été établiqu'en décembre 1933.
La Cour comprendraque je lui demandede ne pas faire fonsdur la carte
présentéepar le Tchad. Le récitdes événements que j'aimoi-même donnà é la
Cour est fondésur l'Histoiremilitairefrançaise officielle d la campagne
et, pour autant qujee sache,il est exact.
b) Les limitesà discernerdans les positions de négociationdes
Partiesau coursdes pourparlers concernan la frontière
Examinonsmaintenantles limites à discerner dans lepsositionsde
négociationdes Partiesau cours des pourparler concernant la frontière.
Pour l'examendes positions de négociation adoptp éersles Parties, nous
devonsgarderprésente à l'espritla distinctionfaitepar la Cour
- je me réfèreà l'arrêtqu'ellea rendu récemmend tans l'affaire
Honduras/ElSalvador - entre d'unepart les offres faitessans préjugerla
position deleurauteuret clairement destinéesà réaliserun compromis, et
d'autrepart les déclarationd se principed'unepartie reflétant sa propre
conception deses revendicationjsuridiques. Nous savonsqu'enprévision des négociations frontalières e l'tEmpire
ottomanet la France,le vilayetde Tripoli a établsia propreproposition
en 1911. On peut la voirreprésentée sur la carte(carteno 85), et elle
constituaitclairement une tentativede refléterles réalitésde la
situation.Par comparaison avecla revendication ottoma nee1890,la
propositionde 1911n'étaitpas tout-.f àaitdépourvue--dréalisme. L'autorité
des Françaissur le lacTchadétait acceptée; l'autori des Français surle
Kanem, immédiatemenatu nord du lacTchad,étaitacceptée. Mais versl'est,
c'estla lignedu lse parallèle qui constituela limitejusqu'oùles
prétentionsfrançaises devaient êt admises. Le Borkou,1'Ennediet le
Tibesti sont situésen dehorsde la zoneà concéderà la France.
La guerreayant éclaté entr l'Italieet la Turquieen 1911,il n'est
073
. . rien sortide ces négociationpsrojetées,et c'està l'Italiequ'iléchut
d'entreprendrleesnégociations.
L'évolutionde la positionde négociationde l'Italieest déjà familière
à la Cour. Les premiers "programmed s"ce pays ont étéétablisen 1916. A
la datede 1928,l'Italieavait conçu trois "programmes" ou revendica :tions
une revendicatio "maximum",une revendication "moyene ne"une revendication
"minimum",commeje l'aidéjàdit.
Prenons cette dernièrrevendicationl,a revendication minima(lcearte
no 56). Elle fait apparaîtr ene similitudemarquée avec lparopositiondu
vilayetde Tripolide 1911,donton voitmaintenant une représentation
projetéesur l'écran. C'est-à-direque l'onconcédait que la Franceavait
acquisle Kanem. Cependant, plul soin versl'est,la revendicatio descend
jusqu'aulse parallèle,et la totalitédu Borkou,de 1'Ennediet du Tibesti
se trouventen dehors du secteursoumisà l'autoritédes Français. La
principale différene cet icià l'ouest, dans le Kaour, oùrl evendicatiodne
l'Italies'étendait plus loin versl'ouest. Certes, ces "programmes" italiens étaid eent études interneest, comme
tels,n'ontpas été présentéa sux Français. Cependant, ils indiquent belet
bien ceque, selonl'Italie,ses titres pourraienê ttre et,enun sens,le
faitmême qu'ilsavaientun caractère intern les rendplus importants. En
effet, ilsn'étaientpas conçus purementcommeune tactiquede négociation,
I
une revendication exagéréeà brandirauxyeux.-deF srançaisau coursde la
première phase d'unmarchandage.
La première revendicatio formellementcommuniquée à la Francel'a été
en 1929. On peut la voir sur cette carte(carteno 57) et, manifestement,
elle estmoins ambitieuse que la revendicat "moinimum" antérieureE.lle
*
faitapparaître un reculà la foisà l'ouestet au sud : la ligneremontedu
lse au lae parallèlede façon à partagerle Borkouet 1'Ennedi.
Mais icinous distinguons clairementun marchandage et, dans cette
mesure, il s'agitd'un indicateur moins fiablede ceque l'Italieelle-même
considérait comme une revendication maxir maleonnable.
Cela est encore plusvrai de l'offrede compromis fait pear l'Italie
- .
. - en 1935. Il en est résultéun accordfinalentrel'Italieet la France sur
une lignequi partageait le Tibestipuis continuaiv ters lesud-ouest pour
rencontrer le 24e méridienen un pointsitué à 18O 45' de latitude(carte
no 64). Cette ligne avait pour effed te diviserpar parts plus ou moins W
égales le territoir compris entre la ligneorientée strictement vers le
sud-estétablie dans la conventiod ne 1899et la lignede 1919.
Mais ils'agissait là purementd'un compromis.Quelsqu'aientété les
méritesde la ligne de 193c 5omme compromis entr les revendications
italiennes et françaises,le fait estqu'ellen'est jamais devenue une
frontièreconventionnelle.
C'estla raisonpour laquelle l Libyes'estimeen droitde retourner aux
propositionsdes Ottomanset de l'Italieelle-même, élaborées longtemp avant
que n'ait été conçu ce scandaleu "marché". Et c'estla raisonpour laquelle, dans la revendicatioactuellede la Libye, cette dernièr se fonde bien
davantagesur la proposition de 1911et sur la proposition"minimum"
italienne conçueen 1928.
Une représentation de la revendication actud eella Libyeapparaîtsur
la carte maintenanptrojetéesur l'écransitué derrière moie,n même tempsque
la proposition ottomadne 1911et la revendicatio" nminimum" -italienne
de 1928 (carteno 86). Commeon peutvoir, cette revendication cad avecla
reconnaissancaentérieure,à la foispar les Ottomanset par l'Italie,de ce
que le Kanem avait étabandonnéaux Français. Mais elles'en tient à la
positionselonlaquelle, plus loinà l'est,le 15~parallèleétaitla vraie
frontière,et selonlaquelle le Borkou,1'Ennediet le Tibesti devaient
demeurerdu côté libyende toutefrontière.
Commela Libyeelle-mêmel'a reconnu dansses écritures, celnae peut pas
épuiserla question,en ce sens que, danstouteopération d'attributid on
territoire, laCourest en droitde prendreen considératioc nertains critères
d'équité. Il nous fait donc voir maintena nt cescritères confirment ou
infirment,l'existenced'une frontièreà l'endroitindiqué.
C) la pertinencedes critèresd'équité
U7t13
Parmi ces critères il y en a quatrequi semblent êtredirectement
pertinents.
1. Les liensqui unissentnaturellementla populationdes confinsà
la Libye
Des points devue ethnique,culturel, linguistiqu et religieux, les
tribusdes confinsont toujoursété rattachéesà la Libye. Les campagnes
militaires menéepsar les Françaivisaient àanéantirces liens, et ellesont
échoué.
Il n'estpas concevable que l Cour, organe judiciairperincipalde
l'organisatiodnes NationsUnies, néglige ces liens da nsaccomplissemende
sa tâche. Peut-être le progrèle plus marquant quaiit étéaccompli par l'organisatiodnes Nations Uniesau cours des quarante dernières années
environa-t-ilété de reconnaître qu'unterritoire appartientà ceuxqui
l'habitent. Un territoiren'estpas une denréequi peutfairel'objetd'un
troccommesi les habitantsn'existaient pas. Cette considératio est
d'autant plus pertinente dansla présenteaffaire que,précisément, en vertu
i
du traitéde paix conclu avel c'Italieen 1947, l'organisatiodnes
NationsUniesa assumé latâched'établir les frontièrd ees la Libye,en
tenant comptedes aspirationset du bien-êtredes habitants.
2. Considérations géographiques
Les confins sont,du pointde vue géographique, très différed nts
Tchad. Au nord dulse parallèle, on passede la savaneau désert,et
avec ce changementse produitun changement dans les population et leur
mode de vie. Le nomadedu désert,l'Arabe,remplacele paysanet pasteur
africain.
Les montagnesdu Tibesti constituent,évidemment,un trait
particulier.Leur inaccessibilitm éême lesa toujoursdistinguées du
restedes confins. Ce n'est nullemenp tar accident qulees Françaiont
complètement abandonl né Tibesti de 1916à 1929, et ce n'estnullement
par accident que la Liby ae toujours attachune importancpearticulière
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à exercerson autorité sur lT eibesti.
Les rumeursoccasionnelles selonlesquelles il y aurait dansle
Tibesti de vastes richesses minérales np 'ontcoursmaintenant. Il
n'y a pratiquement aucune preu àve'appuide cesrumeurs.
3. Considérations économiques
La réalitédes considérations économiques o qnui uneincidencesur
cette régionn'estpas constituée pa ces mythesconcernant des richesses
minérales, maispar les lienséconomiques qui existe netlongue date
entreles gensdes confinset la Libye,au nord. Les routes caravanièresse sont toujoursdirigéesvers le nord, vers
la côteméditerranéenne.C'estvers la Libye que traditionnellem sent
sont toujours tournées lp espulations- pour leur ravitaillementpour
leurs débouchésp,our leurs animaux,pourdes soins médicaux abuesoin,
et pour une aide militairpeermettantde faire faceaux invasions
étrangèresvenuesdu sud.
4. Considérations relativ àela stabilitéà long terme
En ce qui concerneles habitants des confinus,e frontière stable
marquant leur appartenance la Libyecontribuera à la sécuritéà long
termede la région dans son ensemble. La guerre civilequi n'a cesséde
faire rage au Tchaad peut-êtreeu de nombreuses causes, malis moindre
n'estpas latentative de conserverles vestiges d'autorité laiss par
les Français,et de séparer ainsi artificiellemd entla Libyela
populationdes confins.
Pour la Libyeelle-même, la sécurie tét de la plushaute
importance. Ce n'est nullemenutn accidentsi le but primordia le la
France,lorsqu'elle a cherchéà transférer lalignesud-estde la position
de 1899à cellede 1919,étaitd'exercerson autorité sur la totalitédu
Tibesti. De même, ce n'estnullementpar accident que l'Italies'y est
opposéeet que,même dansla propositiod ne compromis de 1935,ellea
insisté pour conserver la moitié septentri dunaleesti. En effet, le
Tibestia toujours dominéla penséestratégique en cq eui concerne la
région.
La situationn'a pas changé. n'est pasqu'aujourd'hul ia Libye
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craigne une attaque dTchad. La Libyeet le Tchadsont en train
d'évoluervers desrapportsde coopération amiable. Mais d'autres
puissancespourraient,à l'avenir, considérerla Libyecomme vulnérable
à une attaquevenantdu sud,une attaque qui mènerait aux champs
pétrolifères libyen et aux bassins hydrographiqulesbyens. Ainsi,pour la Libye,le Tibesti est unepartieimportante de son territoire,qu'elle
doit défendre. Les exigencesde la paixet de la sécurité ont été
déclarées pertinente en ce qui concerneles frontièredse la Libye
en 1947, et cela est dit expressémendans le traitéde paix; leur
pertinence,en 1993, est encorpelusgrande.
Monsieurle Président,Messieursde la Cour,voilà-quels sont les
critèreset les facteurs que la Libye deman idnstammentà la Courde
considérer comme juridiqueme pertinents poulra déterminatiod n'une
ligne frontièreeffective. Ce n'estpas une ligne dont chaqu pointpeut
être confirmépar des élémentsde preuveconcrets, de naturehistorique.
Mais, pourl'essentiel, l'emplaceme detla ligne ressoretffectivement
des critèreset facteursque je viensd'exposerdans leurs grandes
lignes. Et les considérationds'équité sontpleinement compatibles avec
la demandede la Libye.
Monsieur le Présidenett Messieursde la Cour, voilàqui terminela
première phasede l'argumentatiodne la Libye.
Au nom de l'agentde la Libyeet de tousles conseils de la Libye,je
voudrais fairepart à la Cour de notregratitude poursa patienceet sa
courtoisie.Merci.
Le PRESIDENT : Mercibeaucoup, MonsieurBowett.
Avant quenous nousséparions, je dois vous dire que la Coaurreçu
de l'agentdu Tchad une communicatid onoù il ressortque six audiences
suffiront pour la présentati dunpremier tourde plaidoiriesdu Tchad,
078 et qu'enconséquencenous commenceronsà entendreles exposés de cette
Partie vendredi matin 10 heures. Il n'y aura pas d'audience vendredi
après-midi entous reprendrons ensuite lun matin à 10 heures.
L'audience est levéeà 13 heures.
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