Non corrigé
Uncorrected
CR 2011/3
International Court Cour internationale
of Justice de Justice
THHEAGUE LAAYE
YEAR 2011
Public sitting
held on Wednesday 12 January 2011, at 4.30 p.m., at the Peace Palace,
President Owada presiding,
in the case concerning Certain Activities carried out by Nicaragua in the Border Area
(Costa Rica v. Nicaragua)
________________
VERBATIM RECORD
________________
ANNÉE 2011
Audience publique
tenue le mercredi 12 janvier 2011, à 16 h 30, au Palais de la Paix,
sous la présidence de M. Owada, président,
en l’affaire relative à Certaines activités menées par le Nicaragua dans la région frontalière
(Costa Rica c. Nicaragua)
____________________
COMPTE RENDU
____________________ - 2 -
Present: Presiewtada
Vice-Presdenkta
Judges Koroma
Al-Khasawneh
Simma
Abraham
Keith
Sepúlveda-Amor
Bennouna
Skotnikov
Cançado Trindade
Yusuf
Greenwood
Xue
Donoghue
Judges ad hoc Guillaume
Dugard
Registrar Couvreur
⎯⎯⎯⎯⎯⎯ - 3 -
Présents : M. Owada,président
vicepra,ident
KoMroMa.
Al-Khasawneh
Simma
Abraham
Keith
Sepúlveda-Amor
Bennouna
Skotnikov
Crinçade
Yusuf
Greenwood
XuMe mes
Dojnogshue,
GuMilMu.me
jDgesard, ad hoc
Cgefferr,
⎯⎯⎯⎯⎯⎯ - 4 -
The Government of Costa Rica is represented by:
H.E. Mr. René Castro Salazar, Minister for Foreign Affairs and Worship of Costa Rica;
H.E. Mr. Edgar Ugalde Álvarez, Ambassador of Costa Rica to the Republic of Colombia,
as Agent;
H.E. Mr. Jorge Urbina, Ambassador of Costa Rica to the Kingdom of the Netherlands,
as Co-Agent;
Mr. Sergio Ugalde, Special Adviser to the Ministry of Foreign Affairs and Worship of Costa Rica,
member of the Permanent Court of Arbitration,
as Co-Agent, Counsel and Advocate;
Mr.JamesCrawford, S.C., F.B.A., Whewell Professor of International Law, University of
Cambridge, member of the Institut de droit international, Barrister,
Mr.MarceloKohen, Professor of International Law at the Graduate Institute of International and
Development Studies, Geneva; associate member of the Institut de droit international,
Mr. Arnoldo Brenes, Senior Adviser to the Ministry of Foreign Affairs and Worship of Costa Rica;
member of the Costa Rican Bar,
as Counsel and Advocates;
Mr. Manuel Dengo, Ambassador and Chief of Mission of Costa Rica to the United Nations Office
at Geneva,
Mr.Christian Guillermet, Ambassador and De puty Chief of Mission of CostaRica to the
United Nations Office at Geneva,
Mr. Ricardo Otarola, Minister and Consul General of Costa Rica to the Republic of Colombia,
Mr.GustavoCampos, Minister and Consul Ge neral of CostaRica to the Kingdom of the
Netherlands,
Ms Shara Duncan, Counsellor at the Costa Rican Embassy in the Kingdom of the Netherlands,
MsJuliette Marie Revell-Nussio, Research Associ ate at the Lauterpacht Centre for International
Law, University of Cambridge, Barrister,
Ms Katherine Del Mar, Teaching and Research Assistant, Faculty of Law, University of Geneva,
Ms Lilliana Arrieta, Adviser to the Ministry of Foreign Affairs and Worship of Costa Rica,
as Advisers. - 5 -
Le Gouvernement du Costa Rica est représenté par :
S.Exc. M. René Castro Salazar, ministre des affaires étrangères et du culte du Costa Rica ;
S. Exc. M. Edgar Ugalde Álvarez, ambassadeur de la République du CostaRica auprès de la
République de Colombie,
comme agent ;
S. Exc. M. Jorge Urbina, ambassadeur de la République du CostaRica auprès du Royaume des
Pays-Bas,
comme coagent ;
M.SergioUgalde, conseiller spécial auprès du ministère des affaires étrangères et du culte du
Costa Rica, membre de la Cour permanente d’arbitrage,
comme coagent, conseil et avocat ;
M.JamesCrawford, S.C., F.B.A., professeur de droit international à l’Université de Cambridge,
titulaire de la chaire Whewell, membre de l’Institut de droit international, avocat,
M. Marcelo Kohen, professeur de droit internationa l à l’Institut de hautes études internationales et
du développement de Genève, membre associé de l’Institut de droit international,
M.ArnoldoBrenes, conseiller principal auprès du mi nistère des affaires étrangères et du culte du
Costa Rica, membre du barreau du Costa Rica,
comme conseils et avocats ;
M.ManuelDengo, ambassadeur, représentant pe rmanent du CostaRica auprès de l’Office des
Nations Unies à Genève,
M. Christian Guillermet, ambassadeur, représentant permanent adjoint du CostaRica auprès de
l’Office des Nations Unies à Genève,
M. Ricardo Otarola, ministre et consul général du Costa Rica en République de Colombie,
M. Gustavo Campos, ministre et consul général du Costa Rica au Royaume des Pays-Bas,
Mme Shara Duncan, conseiller à l’ambassade du Costa Rica au Royaume des Pays-Bas,
Mme Juliette Marie Revell-Nussio, Research Associate au Lauterpacht Centre for International
Law de l’Université de Cambridge, avocat,
MmeKatherineDelMar, assistante d’enseignement et de recherche à la faculté de droit de
l’Université de Genève,
MmeLilliana Arrieta, conseiller auprès du ministère des affaires étrangères et du culte du
Costa Rica,
comme conseillers. - 6 -
The Government of Nicaragua is represented by:
H.E. Mr. Carlos José Argüello Gómez, Ambassador of Nicaragua to the Kingdom of the
Netherlands,
as Agent and Counsel;
H.E.MsJuana Argeñal Sandoval, Minister of the Environment and Natural Resources of
Nicaragua;
Mr.Stephen C. McCaffrey, Professor of Internati onal Law at the University of the Pacific,
McGeorge School of Law, Sacramento, former member of the International Law Commission,
Mr.AlainPellet, Professor at the University ParisOuest, Nanterre-La Défense, Member and
former Chairman of the International Law Co mmission, associate member of the Institut de
droit international,
Mr. Paul S. Reichler, Attorney-at-Law, Foley Hoag LLP, Washington D.C., Member of the Bars of
the United States Supreme Court and the District of Columbia,
as Counsel and Advocates;
Mr. César Vega Masís, Director of Juridical Affairs, Sovereignty and Territory, Ministry of
Foreign Affairs of Nicaragua,
Mr. Walner Molina Pérez, Juridical Adviser, Ministry of Foreign Affairs of Nicaragua,
Mr. Martin Lawrence H., Foley Hoag LLP, Washington D.C., Member of the Bars of the United
States Supreme Court, the District of Columbia and the Commonwealth of Massachusetts,
Ms Tania Elena Pacheco Blandino, Juridical Adviser, Ministry of Foreign Affairs of Nicaragua,
as Counsel;
MsAlinaMiron, Researcher, Centre for International Law (CEDIN), University ParisOuest,
Nanterre-La Défense,
MsCicely Parseghian, Foley Hoag LLP, Member of the Bar of the Commonwealth of
Massachusetts,
Mr. Edgardo Sobenes Obregon, First Secretary, Embassy of Nicaragua in the Kingdom of
the Netherlands,
as Assistant Counsel. - 7 -
Le Gouvernement du Nicaragua est représenté par :
S.Exc.M. Carlos José Argüello Gómez, amba ssadeur de la République du Nicaragua auprès du
Royaume des Pays-Bas,
comme agent et conseil ;
S. Exc. Mme Juana Argeñal Sandoval, ministre de l’environnement et des ressources naturelles de
la République du Nicaragua ;
M. Stephen C. McCaffrey, professeur de droit international à la McGeorge School of Law de
l’Université du Pacifique à Sacramento, ancien membre de la Commission du droit
international,
M. Alain Pellet, professeur à l’Université de Pari s Ouest, Nanterre-La Défense, membre et ancien
président de la Commission du droit internatio nal, membre associé de l’Institut de droit
international,
M. Paul S. Reichler, avocat au cabinet Fole y Hoag LLP, Washington D.C., membre des barreaux
de la Cour suprême des Etats-Unis d’Amérique et du district de Columbia,
comme conseils et avocats ;
M. César Vega Masís, directeur des affaires juridiques, de la souveraineté et du territoire au
ministère des affaires étrangères de la République du Nicaragua,
M. Walner Molina Pérez, conseiller juridique au ministère des affaires étrangères de la République
du Nicaragua,
M. Martin Lawrence H., cabinet Foley Hoag LLP, Washington D.C., membre des barreaux de la
Cour suprême des Etats-Unis d’Amérique, du district de Columbia et du Commonwealth du
Massachusetts,
Mme Tania Elena Pacheco Blandino, conseiller juridi que au ministère des affaires étrangères de la
République du Nicaragua,
comme conseils ;
Mme Alina Miron, chercheur au Centre de droit in ternational de Nanterre (CEDIN), Université de
Paris Ouest, Nanterre-La Défense,
Mme Cicely Parseghian, cabinet Foley Hoag LLP, membre du barreau du Commonwealth du
Massachusetts,
M. Edgardo Sobenes Obregon, premier secrétaire à l’ambassade du Nicaragua aux Pays-Bas,
comme conseils adjoints. - 8 -
The PRESIDENT: Please be seated. The s itting is now open. The Court meets this
afternoon to hear the second round of oral observations of CostaRica on its Request for the
indication of provisional measures. Let us begin immediately. The first speaker on my list is
Professor Marcelo Kohen. You have the floor.
M. KOHEN :
L A PRÉSERVATION DE LA SOUVERAINETÉ ET DE L INTÉGRITÉ TERRITORIALE
COSTA -RICIENNES DANS LE CADRE DE L ’INDICATION
DE MESURES CONSERVATOIRES
Monsieur le président, Mesdames et Messieurs les juges,
Introduction
1. Notre tâche cet après-midi est essentiellement de répondre aux argumentations de la Partie
adverse au sujet de la demande d’indication de mesures conservatoires.
2. Permettez-moi tout d’abord quelques cons idérations générales sur la présentation du
Nicaragua d’hier. Les efforts nicaraguayens pour minimiser l’importance et la gravité de la
question qui motivent cette affaire et la demande de mesures conservatoires n’ont pas échappé à
l’attention de la Cour. A commencer par le territoire objet d’occupation lui-même, «un marécage
1
de moins de 3kilomètrescarrés», selon l’agentArgüello , comme si la taille ou la nature du
territoire en question justifiait des voies de fait pour s’en emparer. L’abattage de presque
deuxcentaines d’arbres sur un siteRamsar semble être quelque chose d’insignifiant aussi. La
construction d’un canal artificiel par deux cent cinquante personnes ⎯c’est une information
soumise par le Nicaragua à la Cour 2⎯ n’a été qu’un «modeste travail de nettoyage» . Insignifiant
aussi est le dragage actuellement en cours, même si l’on annonce que trois autres dragueurs
s’apprêtent à participer aux travaux.
3. En revanche, les conseils nicaraguayens n’ ont pas hésité à mettre la barre le plus haut
possible quant aux conditions nécessaires pour l’indi cation de mesures conservatoires. Si on les
1
CR 2011/2, p. 8, par. 4 (Argüello Gómez).
2Nicaragua, documentation soumise à la Cour le 4janvier2011, annexTechnical Report on the Inspection
regarding the expansion of the project “Improvement of the Navigability of the San Juan River”, 7-8 septembre 2009.
3CR 2011/2, p. 8, par. 3 (Argüello Gómez). - 9 -
suivait, votre Cour n’ordonnerait jamais de mesu res conservatoires. En outre, je remarque le
silence significatif face à des questions essentielles et qui ne peut s’expliquer par les deuxheures
entre les audiences du matin et de l’après-midi. Je me réfère en particulier à l’acceptation claire et
constante par les deuxParties depuis plus d’un siècl e de la frontière telle qu’elle découle de la
sentence Alexander et reproduite par la cartographie officielle des deux pays.
4. L’ambassadeur Argüello a qualifié de «scandale international», le fait que le Costa Rica se
soit présenté devant l’OEA et ait saisi votre Cour au lieu de discuter de la question au sein de la
4
commission binationale . Je trouve curieux de critiquer le Costa Rica alors que le Nicaragua a cru
plus pertinent de procéder unilatéralement à la mo dification de la situation territoriale existante,
que d’en référer la question à la commission binationale. Si scandale il y a, je me demande de quel
côté du fleuve SanJuan il se trouve. Par rapport à la commission binationale, j’en profite pour
mettre au clair deux points relatifs à la démarcation de la frontière. Le premier point, relatif à la
borne frontière à Punta Castilla. Que l’on n’ait pas encore établi le lieu exact de la première borne
o
n’a rien à voir avec [projection n 1] la situation à l’endroit où le canal artificiel a été construit, qui
se trouve d’ailleurs à un endroit que l’on connaît pa rfaitement bien sur la rive droite du fleuve
o
SanJuan. [Fin projection n 1.] Le deuxième point a trait, quant à lui, aux travaux de
5
«densification» des bornes frontières décidés dans le cadre de la commission binationale . Cette
«densification» des bornes correspond exclusivement à la partie terrestre stricto sensu de la
frontière, autrement dit, lorsque la frontière cess e d’être fluviale. Par conséquent, ce travail
supplémentaire de démarcation n’a rien à voir avec la construction du canal à une zone bien
éloignée.
5. Dans mon exposé, je vais m’occuper des questions de souveraineté dans la région occupée
où le Nicaragua a construit ce qu’ils appellent «le caño Harbor Head» ou caño tout court. Le
professeurCrawford, pour sa part, abordera les c onditions relatives au préjudice irréparable et à
l’urgence ainsi que la nature des mesures conservatoires qu e le CostaRica vous demande
d’indiquer.
4
Ibid.
5CR 2011/2, p. 11, par. 16 (Argüello Gómez). - 10 -
A. La revendication nicaraguayenne de souveraineté n’est pas plausible
6. Hier après-midi, nous avons enfin pris c onnaissance de l’argumentation juridique que le
Nicaragua a choisie parmi toutes les ébauches que ses différents agents avaient publiquement
avancées après l’occupation du territoire costa-ricien.
7. La position du Nicaragua peut se résumer en quatrepropositions: primo, pendant plus
d’un siècle, la cartographie officielle a montré une ligne frontière qui correspondait au tracé de
l’arbitre Alexander; secundo, la situation sur le terrain aurait entre-temps changé et ces cartes ne
reflèteraient plus la réalité topographique ; tertio, le Nicaragua aurait nettoyé un canal qui serait le
premier canal que l’on trouve en pa rtant de la lagune de Los Portillos envers le fleuve San Juan et
dont la rive droite serait la véritable frontière entre le Costa Rica et le Nicaragua ; quarto, les seules
effectivités sur le territoire en question seraient nicaraguayennes.
8. Je vais vous démontrer que les trois derniè res propositions ne sont pas correctes et que la
revendication de souveraineté ex post facto du Nicaragua n’a pas l’once ⎯ et en disant cela je ne
crois pas exagérer du tout Monsieur le président ⎯ d’un minimum de crédibilité.
B. Les difficultés du Nicaragua avec les sentences Alexander
9. Hier, mon collègueStevenMcCaffrey a procédé à une longue lecture des passages des
sentences Alexander et s’est livré à une interprétation libre de la première sentence. Il signalait en
passant qu’Alexander ne reconnaîtrait pas aujourd’ hui l’embouchure, tant les changements sont
6
considérables . J’émets des forts doutes quant à cette probable incapacité de l’arbitre, bien que
nous ne saurons jamais si tel est le cas ou pas. Par contre, il me semble bien plus probable que
M.Alexander ne se reconnaîtrait pas dans l’in terprétation que M.Mc Caffrey a donnée de sa
première sentence arbitrale. M on collègue trouve en effet que le caño, que je ne résiste pas à
désigner comme « cañoPastora» serait plus rationnel que cel ui que M.Alexander lui-même avait
désigné comme constituant le premier canal pour relier la lagunede LosPortillos à l’embouchure
7 e
du fleuve . Malheureusement pour le Nicaragua, St even McCaffrey n’est pas né au XIX siècle et
ne pouvait pas être l’ami du président des Etats-Unis de l’époque, comme l’était E.P. Alexander…
6
CR 2011/2, p. 16, par. 23-24 (McCaffrey).
7CR 2011/2, p. 18, par. 24 (McCaffrey). - 11 -
10. Je me concentre maintenant sur ce que l’arbitreAlexander a vraiment établi dans ses
sentences arbitrales. M. McCaffrey a cité la deuxi ème sentence, qui devait trancher la question de
savoir si l’on devait procéder à des trav aux de mensuration et de cartographie ⎯ comme le
proposait le CostaRica ⎯ ou non ⎯comme le soutenait le Nicaragua. La sentence explique la
position du Nicaragua de la manière suivante :
«The Nicaraguan Commission expressed the view that the measurement and
mapping work on that portion of the line was pointless and worthless because,
according to the Award by General E.P. Alexander, the left bank of the Harbor and of
the river formed the boundary an8 that therefore the dividing line was subject to
change and not permanent.»
Il est intéressant de relever la manière dont la commission nicaraguayenne explique la première
sentence arbitrale : «the left bank of the Harbor and of the river». Aucune mention n’est faite du
canal qui relie les deux. La raison à cela est simple. Le canal était véritablement situé à
l’embouchure du fleuve; il était une prolongation du fleuve vers la lagune. L’arbitre a été
soucieux, comme il l’a lui-même affirmé, de resp ecter ce que les auteurs du traité du 15 avril 1858
avaient eu à l’esprit. La frontière était la rive droite du fleuve depuis l’embouchure. Il ne pouvait
pas y avoir de territoire nicaraguayen du côté droit du fleuve. C’est précisément ce que défie la
construction du canal artificiel par le Nicaragua, comme on a pu l’apprécier à l’écran.
11. L’arbitre expliqua qu’il pouvait y avoir des changements graduels ou soudains des rives
et des chenaux du fleuve mais que ces changements devaient être réglés quant à leurs conséquences
9
par les principes de droit interna tional qui leur seraient applicables . L’arbitre Alexander, fin
connaisseur des questions de frontières, n’ignorait certainement pas, qu’en1884, son pays et le
Mexique avaient conclu un traité concernant la frontière du Río Grande qui prévoyait un régime
différent pour les changements graduels d’alluvion et les changements soudains d’avulsion 10.
12. Mais tout cela n’aide en rien la position du Nicaragua. L’arbitre n’a même pas pris
position sur le type de changement naturel qui produirait des variations de la frontière ou non. Les
8Deuxième sentence arbitrale rendue par le surarbitre ingénieur, en vertu de la convention entre le Costa Rica et
le Nicaragua du 8 avril 1896 pour la démarcation de la frontière entre les deux républiques, 20 décembre 1897,
Nations Unies, Recueil des sentences arbitrales, vol. XXVIII, p. 224.
9Ibid.
10Convention between the United States of America and the United States of Mexico touching the boundary line
between the two countries where it follows the bed of the Rio Grande and the Rio Colorado , Nations Unies, Recueil des
sentences arbitrales, vol. XI, p. 323. - 12 -
changements en questions concernaient les rives et les chenaux. On pourrait même se demander si
le fait qu’un nouveau canal viendrait à se former naturellement pourrait produire la modification de
la frontière, en d’autres termes, l’abandon du can al déjà établi comme frontière au profit d’un
nouveau. La réponse me semble négative mais de toute façon la question est d’ordre purement
académique puisqu’aucun canal ne s’est formé, contrairement à ce que prétend le Nicaragua.
13. La question des variations naturell es du fleuve est revenue à nouveau devant
l’ingénieurAlexander. La troisième sentence arbitr ale réitère la position prise dans la seconde et
précise entre autres que «Costa Rican land that Nicaragua waters submerge or uncover from time to
time, during periods of rise and fall in water le vel, does not accrue to adjoining (Nicaraguan)
11
territory.»
14. Quoi qu’il en soit Monsieur le président, la question des changements naturels sur les
rives du fleuve est purement mineure. La géographie de la région n’a en effet pas
substantiellement varié, sauf récemment et du fait même de l’action dirigée par M. Eden Pastora en
toute illicéité, bien évidemment.
15. Pour illustrer cela, Mesdames et Messieurs les juges, je vous propose de regarder une
surimposition des photographies satellites avec des cartes. [Projection n o2.]
16. Voici une photographie satellite qui date de 1981. Procédons à une superposition avec le
croquis Alexander, la carte costa-ricienne de 1988 et la carte nicaraguayenne de1988. La
coïncidence est globalement remarquable. Il n’y a pas de traces du « caño Pastora». [Fin
projection n o 2.]
o
17. [Projection n 3.] Voici une photographie satellite présentée par le Nicaragua. Elle date
de2007. Procédons à la comparaison avec la carte nicaraguayenne de1988. A nouveau, la
coïncidence est remarquable. Je ne vois toujours pas de « caño Pastora», sec ou humide. [Fin
projection n o 3.]
18. Que dire alors des cartes? Nos contradicteurs ont plutôt été silencieux ou ont fait des
affirmations sans aucun soutien probatoire. Je vous renvoie, Mesdames et Messieurs les juges, à
nos considérations d’hier matin.
11Troisième sentence arbitrale rendue par le surarbitre ingénieur, en vertu de la convention entre le Costa Rica et
le Nicaragua du 8avril1896 pour la déma rcation de la frontière entre les de ux Républiques, décision du 22mars1898,
Nations Unies, Recueil des sentences arbitrales, vol. XXVIII, p. 229. - 13 -
19. Tout cela ne fait que confirmer une chose Monsieur le président : que la frontière décidée
par Alexander et que les deux Parti es vous ont montrée dans l’affaire du Différend relatif à des
droits de navigation et des droits connexes (CostaRica c.Nicaragua) , et qu’elles ont reproduite
dans toutes les cartes officielles, correspond non seulement à la perception que les deux Parties se
font de leur frontière, mais aussi à la situation sur le terrain.
C. Le Nicaragua : à la recherche du prétendu caño
20. Le professeur McCaffrey a affirmé avec raison que «a question of crucial importance in
this provisional measures phase of the case, and indeed in the case as a whole, is, where is the «first
channel met» today» 12. [Projection n 4.] Voici graphiquement sa réponse. Quelques remarques
s’imposent. Il n’a pas utilisé une carte officielle du Nicaragua et je le comprends bien. Il a voulu
éviter l’embarras de montrer la vraie frontière. Il a alors utilisé une photo satellite prise lorsque le
o
«caño Pastora» était déjà construit, l’indiquant en rouge. [Fin projection n 4.]
En réalité la réponse à StevenMcCaffrey est simple puisque, malgré les changements dans
sa configuration par rapport à 1897, le premier canal est toujours là. En revanche, si la question est
«Where has been the Caño Pastora?», nos am is francophones l’appelleraient certainement
«L’Arlésienne», comme le personnage fantôme d’AlphonseDaudet. En effet, les Nicaraguayens
en parlent, ils évoquent son existence, mais pe rsonne avant sa construction ne l’avait vu. Oui,
Mesdames et Messieurs les juges : le Nicaragua n’a pas apporté une seule preuve ⎯ je dis bien, pas
une seule ⎯ de l’existence préalable d’un caño qu’il prétend simplement «nettoyer». Je pose alors
les questions suivantes : à quelle époque ce caño a donc été créé par l’action de la nature ? Quelles
preuves existe-il du fait que l’on a navigué sur lui ? Et quand est-ce que la navigation sur ce caño a
été stoppée ? A quelle date le Nicaragua a-t-il notifié son voisin que la frontière telle que tracée par
Alexander avait changé ? Parce que, que je sache, M onsieur le président, la frontière est l’affaire
de deux Parties, pas d’une seule. Il n’y a pas une seule carte ou croquis, pas une seule
photographie, satellite ou autre, pas un seul récit, chronique ou quoi que ce soit qui montre que ce
caño a existé en dehors de l’imagination du command ant Pastora. Même pas les déclarations des
militaires et fonctionnaires de police nicaraguayens auxquelles je vais me référer dans un instant.
12CR 2011/2, p. 24, par. 17 (McCaffrey). - 14 -
Elles affirment que les agents en question ont na vigué par des canaux dans la zone de «Harbor
Head», mais personne n’articule la moindre descrip tion qui permettrait d’identifier le canal où ces
agents ont prétendument navigué par le « caño Pastora» 13. De surcroît, ils affirment qu’ils ont
navigué à l’intérieur de la zone depuis1979 alors qu’il y existe des données scientifiques qui
montrent que ce canal n’existait pas : le rappor t d’UNOSAT/UNITAR est catégorique. L’examen
de photographies satellite des trente dernières années ne montre pas de canal là où il a été construit
14
par le Nicaragua .
Enfin, la carte officielle du département du Río San Juan de 2003 que je vous ai montrée hier
a été vérifiée par la direction de l’aménagement du territoire de l’INETER et on ne voit aucun canal
à l’endroit où le canal artificiel a été construit 15.
D. Le Nicaragua fait fi du principe de stabilité des frontières
21. Mesdames et Messieurs les juges, je passe maintenant à une autre considération
fondamentale qui permet d’établir le caractère artif iciel de la frontière revendiquée aujourd’hui par
le Nicaragua, sur la base de la construction d’un canal lui-aussi artificiel. C’est le principe de
stabilité des frontières, qui s’applique également à des frontières fluviales. Votre Cour a défini le
contenu de ce principe de la manière suivante :
«D’une manière générale, lorsque deux pays définissen t entre eux une frontière,
un de leurs principaux objectifs est d’arrêter une solution stable et définitive. Cela est
impossible si le tracé ainsi établi peut être remis en question à tout moment, sur la
base d’une procédure constamment ouverte, et si la rectification peut en être demandée
chaque fois que l’on découvre une inexac titude par rapport à une disposition du traité
de base. Pareille procédure pourrait se poursu ivre indéfiniment et l’on n’atteindrait
13
Nicaragua, documentation prés entée à la Cour le 4 janvier 2010, doc.1: affidavit de M.Gregorio de Jesús
Aburto Ortiz, Major Police Commissioner of the Nicaraguan Na tional Police, 15 décembre 2010, p. 1 ; doc. 2 : affidavit
de ML. uis Fernando Barrantes Jiménez, Major Police Commissioner of the Nicaraguan National Police,
15 décembre 2010, p. 1 ; doc. 3 : affidavit de M. José Magdiel Pérez So lis, Major Police Commissioner of the
Nicaraguan National Police, 15 décembre 2010, p.1; doc.4: af fidavit de M. Douglas Rafael Pichardo Ramírez, Major
Police Commissioner of the Nicaraguan National Police, 15 décembre 2010, p. 1-2 ; doc. 6 : affidavit de
M.SubanAntonio Yuri Valle Olivares, Mayor [sic] Police Commissioner of the Nicaraguan National Police,
15décembre2010, p.1; documentation soumise à la Cour le 4janvier2010, doc.7: affidavit de M. Juan Francisco
Gutiérrez Espinoza, Military in active duty, 15 décembre 2010, p. 1 ; documentation soumise à la Cour le 4 janvier 2010,
doc. 8 : affidavit de M. Norman Javier Juárez Blanco, active Military, 15 décembre 2010, p. 1 ; documentation soumise à
la Cour le 4 janvier 2010, doc.8: affidavit de M. Denis Membreño Rivas, Military in active duty, 15 décembre 2010,
p. 1 ; doc. 8 : affidavit de M. Manuel Salvador Mora Oritz, Military in retirement, 15 décembre 2010, p. 1.
14
UNITAR/UNOSAT, Morphological and Environmental Change Assessment: San Juan River Area,
Costa Rica, EN-20101229-CRI, 4 janvier 2011, disponible à l’adresse : http://www.unitar.org/unosat/node/44/1526.
15
Departamento de Río San Juan, División politico-administrativa (Department of San Juan del Norte,
Political-Administrative Division), Nicaragua, Instituo Nica ragüense de Estudios Territoriales (INETER), avril2003,
dossier de plaidoiries, vol. III, onglet n 85. - 15 -
jamais une solution définitive aussi longtemps qu’il resterait possible de découvrir des
erreurs. La frontière, loin d’être stable, serait tout à fait précaire.» ( Temple de Préah
Vihéar (Cambodge c. Thaïlande), fond, arrêt, C.I.J. Recueil 1962, p. 34.)
22. Je me permets de vous dire, Monsieur le président, très re spectueusement, qu’en réalité
ni votre devancière dans l’affaire du Mossoul 16 ni votre Cour dans les affaires du Temple de Préah
17
Vihéar (Cambodge c.Thaïlande) et du Différend territorial (Jamahi riya arabe libyenne/Tchad)
n’ont rien inventé au point de vue jurisprudentiel en parlant du principe de stabilité des frontières.
On en trouve une première référence jurisprudentielle en date du 22mars1898. Son auteur n’est
autre que notre bien connu arbitre Alexander, le quel, face aux prétentions du Nicaragua avait déjà
averti :
«Borders are intended to maintain peace, thus avoiding disputes over
jurisdiction. In order to achieve that goal, the border should be as stable as possible.
Obviously, such a state of affairs would be unacceptable to residents and property
owners close to the borders of the two countries, if the line that determines the country
to which they owe allegiance and must pay taxes, and whose laws govern all their
affairs, was there one minute and not there the next, because such border line would
just generate conflicts instead of preventi ng them. The difficulties that would arise,
for example, if certain lands and forests and their owners and residents or people
employed in any capacity thereon, were re quired to be Costa Rican in dry season and
Nicaraguans in the rainy season and altern 18 atively of either nationality during the
intermediate seasons are self evident.»
Quel dommage que le Nicaragua ait décidé d’ignorer ces mots prémonitoires de
l’arbitre Alexander !
23. L’acte final des travaux de la commissi on de démarcation, du 24juillet1900, définit
clairement la frontière depuis la Punta Castilla, pa r la rive droite de la Laguna connue en anglais
comme «Harbor Head» et continue par la rive dr oite du premier canal qui s’y trouve, continuant
par la rive droite du San Juan, je cite textuellement «tout cela conformément avec les opérations
19
géodésiques et croquis qui se trouvaient dans les comptes rendus correspondants» .
16Interprétation de l’article 3, paragraphe 2, du traité de Lausanne, avis consultatif, 1925, série B, nº 12.
17Différend territorial (Jamahiriya arabe libyenne/Tchad), arrêt, C.I.J. Recueil 1994, p. 37, par. 72.
18
Troisième sentence arbitrale rendue par le surarbitre ingénieur, en vertu de la convention entre le Costa Rica et
le Nicaragua du 8 avril 1896 pour la démarc ation de la frontière entre les deux Républiques, décision du 22 mars 1898,
Nations Unies, Recueil des sentences arbitrales, vol. XXVIII, p. 228.
19
Original espagnol: «todo esto conforme con las oper aciones geodésicas y planos que se ven en las actas
correspondientes». Version anglaise : «all of the above in compliance with geodetic operations and layout plans included
in the respective proceedings», Final Proceedings, No. XXVII. Dossier de plaidoiries, vol. II, onglet n 42. - 16 -
24. Les commissaires et l’ingénieur Alexander déclarent dans cet acte final qu’«[a]vec cette
démarcation demeurent réglées toutes les questions qui demeuraient indéterminées par rapport à la
20
frontière jusqu’aujourd’hui entre les Républiques de Nicaragua et du Costa Rica» .
25. Monsieur le président, le Nicaragua n’i gnore pas le principe de stabilité des frontières
21
puisqu’il l’a invoqué devant vous et face au Costa Rica il y a moins de trois mois . Est-il possible
que, à quelques jours d’intervalle, après avoir affi rmé le besoin du respect du principe de stabilité
des frontières devant votre Cour, le Nicaragua fait en sorte de passer impunément outre ce principe,
traversant la frontière et revendiquant ensuite qu’en fait la frontière a changé son cours ?
E. Rien dans le comportement nicaraguayen ne remet en question son acceptation claire
et constante de la frontière existante
26. Malgré sa revendication tardive et, je di rais, plus sinueuse que les méandres du fleuve
SanJuan, la réalité, Mesdames et Messieurs les juges, est que rien dans le comportement du
Nicaragua ne remet en cause son acceptation claire et constante de la frontière, telle que tracée par
l’arbitreAlexander et reconnue durant plus d’un siècle par les cartes officielles des deux pays.
Apparemment, le Nicaragua voudrait nous faire cr oire que, puisqu’il exerçait de temps en temps
des effectivités dans la région, il pouvait se souc ier des cartes costa-riciennes et de ses propres
cartes montrant le territoire comme relevant du Cost a Rica. Ce serait en quelque sorte ce que la
Thaïlande avait essayé de faire devant votre Cour pour éviter le constat de son acceptation de la
souveraineté cambodgienne telle qu’établie par la cél èbre «Carte de l’annexe I» produite par la
France. La Thaïlande avait soutenu que si elle n’ avait pas soulevé la question de la carte produite
par la France pour la commission de délimitation montrant Préah Vihéar en territoire cambodgien,
«c’est qu’elle a[vait] été à toutes les époques critiques en possession de Préah Vihéar ; elle n’avait
donc aucun besoin de soulever cette question» (Temple de Préah Vihéar (Cambodge c. Thaïlande),
fond, arrêt, C.I.J. Recueil 1962, p.29). Mais le Nicaragua se tr ouve dans une situation bien pire
que celle de la Thaïlande à l’époque. Il a accepté ⎯il avait l’obligation de le faire ⎯ la carte
20«Con esta demarcación quedan concluídas todas las cuestiones que por límites indefinidos han tenido hasta hoy
entre sí, las Repúblicas de Nicaragua y Costa Rica» (Acta Final, NoXXVII, Art. 2). Version anglaise: «With this
demarcation all the matters that the Republics and Nicaragua and Costa Rica have between them until now due to
os
undefined borders are settled», Final Proceedings, No. XXVII. Dossier de plaidoiries, vol. II, onglets n 41 et 42.
21CR 2010/16, p. 27-28, par. 32-34 (Reichler). - 17 -
dressée par Alexander, il a accepté les cartes costa -riciennes, il a produit ses propres cartes jusqu’à
nos jours montrant le territoire comme costa-rici en et sa seule «effectivité» vraiment avérée a été
celle brutale à laquelle le Costa Rica a fait face en faisant valoir sa souveraineté. Je me réfère
naturellement à l’incursion et occupation nicaraguayennes datant d’octobre 2010.
27. Si le Nicaragua croyait à un moment donné qu’il était le souverain de la partie occupée
d’IslaPortillos, il ne l’a jamais manifesté publiq uement. Hier, le conseil du Nicaragua a qualifié
d’«admission against interest» une déclaration du ministre costa-ricien des affaires étrangères
22
concernant les opérations de dragage, faite sur la base de l’information disponible à ce moment .
Je me demande comment ce même conseil appelle-t-il les cartes officielles nicaraguayennes
publiées durant plus d’un siècle montrant Isla Portillos comme costa-ricienne ?
28. Face à la concordance des cartes costa-ri ciennes et nicaraguayennes, on peut fermement
soutenir qu’il existait un accord quant à la manière d’interpréter la frontière. Jamais le Nicaragua
n’a soulevé la question de la souveraineté de la région occupée, ni sur le plan bilatéral, ni sur le
plan international. Jamais il n’a réagi lorsque le Costa Rica a invoqué sa souveraineté devant des
instances internationales, comme par exemple lo rs de l’inclusion d’Isla Portillos dans le
site Ramsar auquel nous avons fait référence hier.
29. Au contraire, le Nicaragua a continué la semaine dernière à produire des cartes qui
montrent IslaPortillos comme étant costa-ricie nne. Le document dans lequel ces cartes sont
reproduites n’est pas anodin: il ne s’agit ni plus ni moins que de la version finale de l’«étude
d’impact sur l’environnement pour l’amélioration de la navigation du fleuve San Juan de Nicaragua
23
(Delta-San Juan de Nicaragua)» de la compagnie portuaire nationale du Nicaragua . On peut
supposer cette fois-ci qu’on a bien étudié le te rrain. Le Nicaragua n’a pas cru opportun de
reproduire dans sa traduction en anglais les premiè res pages de cette étude, par exemple celle-ci,
[projection n o 5] que vous voyez à l’écran dans sa version originale en espagnol. Elle contient une
o
carte montrant Isla Portillos comme costa-ricienne. [Fin projection n 5.] Mais surtout, regardez
s’il vous plaît cette carte, [projection n o6] cette fois-ci traduite en anglais, où l’on voit le lieu des
22
CR 2011/2, p. 40, par. 27 (Reichler).
23Documentation présentée par le Nicaragua le 4janvier2011, doc.15, annexe3, Excerpts from project design
final revised report, p. 22 (carte intitulée «Measurements and widths of the San Juan River of Nicaragua»). - 18 -
travaux envisagés et la désignation de certains caños, comme le San Juanillo. Mais pas de « caño
Harbor Head» du tout, Monsieur le président. Au c ontraire, encore une fois, la frontière montrant
o
Isla Portillos fait de ce territoire, territoire costa-ricien. [Fin projection n 6.]
F. Les effectivités sont costa-riciennes, pas nicaraguayennes
30. Je passe maintenant à la question des effec tivités soulevée par nos contradicteurs. Voilà
maintenant que le Nicaragua nous apprend qu’il a toujours exercé sa souverain eté territoriale sur la
partie occupée d’Isla Portillos, contrairement au CostaRica 24. C’est une affirmation tout à fait
25
surprenante. Le Nicaragua prétend que la preuve qu’il a de ses effectivités est «abondante» .
Cette preuve abondante est constituée…par une poignée de déclarations sous serment de
fonctionnaires de police et militaires, à une excepti on près, tous en activité. Elle a été présentée
mercredi de la semaine dernière. Ces déclar ations ont toutes été faites entre le 15 et le
16 décembre, auprès du même notaire qui, on dirait, a dû avoir deux journées bien remplies 26. Le
CostaRica n’accepte pas la véracité de ces témoignages, tant ils ont un caractère intéressé et peu
crédible, aussi bien par leur contenu que par le ur source. Leur artificielle ressemblance saute
facilement aux yeux.
31. Votre Cour a déjà rappelé au Nicaragua que: «Un membre du gouvernement d’un Etat
qui est partie non seulement à un procès internati onal mais à une instance concernant un conflit
armé tendra vraisemblablement à s’identifier aux inté rêts de son pays et s’efforcera en témoignant
de ne rien dire qui puisse nuire à sa cause.» ( Activités militaires et paramilitaires au Nicaragua et
contre celui-ci (Nicaragua c.Etats-Unis d’Amérique), fond, arrêt , C.I.J. Recueil 1986, p.43,
par. 70.) 27 Ceci est également valable pour des membres de forces armées et de sécurité, a fortiori
en fonction.
32. Mesdames et Messieurs de la Cour, f ace à cette preuve prétendument abondante, nous
avons mentionné hier trois éléments qui témoigne nt clairement de véritables comportements à titre
24
CR 2011/2, p. 12-13, par. 23-24 (Argüello Gómez) ; CR 2011/2, p. 29, par. 26 (McCaffrey).
25CR 2011/2, p. 27, par. 25 (McCaffrey).
26Documents présentés par le Nicaragua le 4 janvier 2011, doc. 1-10.
27Version anglaise : «A member of the government of a St ate engaged, not merely in international litigation, but
in litigation relating to armed conflict, wi ll probably tend to identify himself with the interests of his country, and to be
anxious when giving evidence to say nothing which could prove adverse to its cause.» - 19 -
de souverain effectués par le Costa Rica d’une manière publique et sans que l’on puisse estimer
qu’ils ont été réalisés dans le but d’améliorer la position juridique de la partie à l’origine de ces
comportements. Il s’agit des permis d’utilisation des terrains inscrits au cadastre national
costa-ricien 28, de l’inscription du site Humedal Ca ribe Noreste dans la liste Ramsar ⎯ incluant
Isla Portillos ⎯, de la législation nationale relative à la même zone ⎯ incluant Isla Portillos ⎯ et
de la propre réaction rapide des ministères de l’ environnement, de la justice et des affaires
étrangères, tout de suite après que le Nicaragua ait entrepris son action d’occupation.
33. J’attire votre attention sur le fait que les inscriptions au cadastre datent de 2003 et 2006,
qu’elles ont été faites par des individus et que, co mme partout dans le monde, ces inscriptions sont
publiques. Dans le cas en présence, elles sont même accessibles sur l’Internet 29.
Conclusion
34. En arrivant à mes conclusions Mesdam es et Messieurs les juges, je voudrais vous
soumettre quelques considérations sur la question de la souverainet é dans le contexte d’un débat
sur l’indication de mesures conservatoires. Pour dé terminer si les droits apparaissent plausibles, il
faut procéder à un examen minimum des questions de fond. Les deux Parties l’ont fait par ailleurs
devant vous hier et il n’y a en cela rien d’extraordinaire. Mon collègue et ami Alain Pellet a insisté
hier après-midi sur l’impossibilité d’ordonner des mesures conservatoires avant qu’on ne détermine
qui a la souveraineté territoriale. Au fond, je crois que nous lui avons répondu hier matin et je vous
30
y renvoie . Le Nicaragua utilise en fait le même argument que l’Iran dans l’affaire des Otages. Je
cite la lettre du 9 décembre 1979 du ministère des affaires étrangères de l’Iran adressée à la Cour :
«En ce qui concerne la demande de mesures conser vatoires, telle que formulée par les Etats-Unis,
elle implique en fait que la Cour ait jugé de la substance même de l’affaire qui lui est soumise.»
(Personnel diplomatique et consulaire des Etats-Un is à Téhéran (Etats-Unis d’Amérique c.Iran),
mesures conservatoires, ordonnance du 15 décembre 1979, C.I.J. Recueil 1979, p. 11, par. 8, par. 4
de la lettre.) Comme on le sait, la Cour a néanmoins ordonné des mesures conservatoires.
28 os
Dossier de plaidoiries, vol. I, onglets n 10 à 15. Voir aussi CR 2011/1, p. 47, par. 30 (Kohen).
29
Voir cadastre national de la Répubique du Costa Rica : http://www.registronacional.go.cr.
30CR 2011/1, p. 47-49, par. 33-36 (Kohen). - 20 -
35. J’ajouterai simplement que si l’on croit le Nicaragua, un Etat pourrait faire ce qu’il veut
sur un territoire étranger. Il suffirait ensuite d’en revendiquer la souveraineté pour se mettre à
l’abri de toute mesure conservatoire, voyant ainsi «garantie» sa présence pour au moins quelques
années.
36. Un examen sommaire à ce stade de la procédure montre clairement que le CostaRica
possède les titres, les effectivités, la cartographie, le comportement étatique et la géomorphologie
en sa faveur. Ses droits sont amplement prouvés, exigibles, opposables et plus que plausibles. En
revanche, il n’existe aucun droit plausible du Nicar agua qui puisse être affecté par l’indication de
mesures conservatoires.
37. Vous avez le choix, Mesdames et Messieurs les juges. Vous pouvez choisir entre le
respect de la force de la chose jugée d’une sentence arbitrale qui s’impose sans avoir besoin
d’attendre la fin de ce différend et le com portement unilatéral fondé sur une revendication
postérieure. Il s’agit de préserver la stabilité d’une frontière que les deux pays ont eu tant de mal à
définir durant la dernière moitié du XIX esiècle. Le CostaRica et le Nicaragua ont beaucoup
discuté depuis la fin des travaux de la commission présidée par Alexander sur les droits découlant
du traité Cañas-Jerez. Ils l’ont fait par la voie di plomatique, au sein de la Cour centraméricaine de
justice ou devant votre propre Cour. C’est pourtant la première fois que l’on remet en question
l’ossature même de cet édifice si difficilement cons truit: la souveraineté territoriale de part et
d’autre. Votre indication de mesures conservatoires vise précisément à préserver cet édifice.
Ouvrir la possibilité à ce que l’on puisse remettr e en question facilement et par la force une
frontière établie par sentence arbitrale équivaut à instaurer l’insécurité dans les relations
internationales. Vous avez le pouvoir de remettre les choses à l’état où elles se trouvaient il y a
trois mois. Que les Parties viennent ensuite devant vous avec toutes les argumentations qu’ils
voudront, mais qu’elles le fassent dans le respect des règles qui sont à la base de la coexistence
entre les nations, a fortiori entre deux pays unis par des liens historiques et qui ont inscrit les pages
les plus glorieuses de leur histoire lorsqu’ils l’ont fait ensemble.
38. Je vous remercie de votre bienveillante attention, Mesdames et Messi eurs les juges, et je
vous prie, Monsieur le président, de donner la parole au professeur James Crawford. - 21 -
The PRESIDENT: I thank Professor MarceloKohen for his presentation. Now I invite
Professor James Crawford to take the floor.
Mr. CRAWFORD:
T HE CONDITIONS FOR PROVISIONAL M EASURES REVISITED
1. The Situation at the Time of the Request
1. Mr.President, Members of the Court, Professor Pellet, in that extreme manner which
makes him such an engaging friend and opponent , said that this Application was abusive 31. There
are a number of points to be made here.
2. When this Application was filed nearly three months ago, on 18 November 2010, the
situation was as follows:
(i)First, the so-called Harbor Head Ca nal was under construction, with depositing of
sediment, chopping down of several hundred trees, military occupation, flying of the
Nicaraguan flag, and so on;
(ii) The area where it was being constructed w as undisputed Costa Rican territory, so far as
the records show;
(iii)That area, so far as the records showed , had not been occupied or administered by
Nicaragua prior to October 2010;
(iv) Nicaragua had not, despite repeated requests, provided any information whatever about
the larger dredging project, still less about wh at I will call the Pastora Plan, named after
the leader of the construction team for the canal, Mr. Eden Pastora;
(v) Since his plan had begun to be implemented, Mr.Pastora, had publicly announced grand
plans to “restore the Nicaraguan border river to its historic channel to the sea”.
3. Mr.President, Members of the Court, that combination of facts was itself a sufficient
warrant for the bringing of a provisional measures application. But let us expand a little on each of
3CR 2011/2, p. 63, para. 30 (Pellet).
3Report of interview with Edén Pastora on Nicaran television channel 100% Noticias, in Tim Rogers,
“Nicaragua Denies Reports of Intrusion into Costa Rica” Tico Times, 2 Nov2.010, available at:
http://www.ticotimes.net/News/Daily-News/Nicaragua-Denies-Reports-of-In…-
November-02-2010/: Application, Attachment 9. - 22 -
these five points, taken together they present a comp letely different picture than the one presented
to you yesterday by counsel for Nicaragua. The “little bit of housekeeping” theory of what is going
on.
(a) The so-called Harbor Head Canal
4. Let me deal first with the Harbor Head Canal. I will not say very much about it because it
has been dealt with by my colleague. We are fa ced with the Nicaraguan contention that this canal
has always existed but there is not a single piece of evidence to demonstrate this. Not one of
yesterday’s submissions addressed that question: all were based on the presumption that the
hitherto unnamed and unmapped canal has always ex isted. No maps were produced to prove this
contention, and we have seen no photographs that indicate the existence of such a canal, although
there was plenty of opportunity for taking such photographs if necessary.
5. It is actually a logical problem facing Nicaragua in this matter, either the caño did not
exist in 1897, in which case it cannot possibly have been intended as a boundary by Alexander who
definitively settled the boundary, or it did, in which case it was overlooked by Alexander, and
deliberately. He surveyed the area carefully, he paid no attention to any canal. The suggestion that
hypothetically his delimitation needs to be set aside on the ground that there is now a canal is
fanciful in the context of the delimitation or demarcation.
6. I reiterate that not a single piece of evidence has been presented by Nicaragua to prove the
existence of the purported canal. Yesterday Mr. Brenes and Professor Kohen showed you some of
our evidence. Today Professor Kohen has show n you some more. Satellite images from 1961 to
present times show the same thing. On the screen you can see a sequence of satellite images,
33 34 35 36 37
corresponding to the following years: (a) 1961 ; (b) 1981 ; (c) 1986 ; (d) 1997 ; (e) 2007 .
33Project: 55 AM73, Roll 141, Line 64, Photo 5881, Scale 1.60 000, Date: 12 January 1961, Source:
US Government.
34Project: Punta Castilla, Roll 183, Line 0, Photo 26249, Scale 1: 48 000, Date: 03 January 1981, Source:
National Geographic Institute of Costa Rica.
35Project: STAMP, Roll 1, Line 319, Scale 1:35 000, Date: 10 December 1986, Source US. Government
(Defense Mapping Agency - DMA).
36Project: Terrra, Roll 04, Line 50B-51B, Photos 35 and 38, Scale 1:40 000, Date: 13 December 1997, Source:
Hauts Monts (Canada) for the Government of Costa Rica.
37
Submitted by Nicaragua to the Court under its letter dated 4 January 2011. - 23 -
This also proves that whatever statement presente d by Nicaragua on behalf of its army personnel
claiming that they navigated canals from the San Juan river to Harbor Head Lagoon either refer to
the real canal that is now closed, or they refer to other waterways ⎯ there are plenty in the region.
This is relevant, of course, to the merits but it is also relevant to the provisional measures Request,
because the question is what we reasonably believed at the time of the Request, what was going on.
There is no basis for the allegation that the canal was already there.
(b) The absence of a territorial dispute
7. Nicaragua has gone to great lengths to est ablish that there is a territorial claim pending
before this Court and that the events that have occurred were subsequent to that. Mr.McCaffrey
submitted:
“Nicaraguan Army and Police authorities have always patrolled the Harbor
Head Lagoon and in so doing ha ve navigated through the caño and other small
channels connecting the San Juan river with the Harbor Head Lagoon during the
winter and so38times during the summer, as well when the water level permitted
navigation.”
But Costa Rica has never denied that Nicaragua has a right to patrol the San Juan river and Laguna
Los Portillos. The waters of the river and the Laguna are Nicaraguan and patrolling them, and even
wandering off, does not constitute a claim to title. The extent of its patrols are not within the
knowledge of Costa Rica.
(c) The status quo ante
8. As Mr. Kohen has mentioned, it is dem onstrably not the case that Costa Rica has not
exercised its sovereignty over the land area of Isla Portillos. And I will not repeat the indications
that Mr. Kohen has given on that. The third of th e facts at the time of the commencement of this
proceeding was the existence of a status quo ante. Costa Rica, of course, agrees that you cannot, at
this stage of the proceeding, decide on issues of s overeignty. But that does not mean that the right
to sovereignty and territorial integrity cannot be protected and preserved pending a merits
39
judgment. The Court can decide on the status quo ante as in the cases that I mentioned yesterday .
38
CR 2011/2, p. 28, para. 25, note. 21 (McC affrey). See, e.g., affidavits of Major Police Commissioner Gregorio
de Jesús Aburto Ortiz (doc. No. 1); Major Police Commissi oner Douglas Rafael Pichardo Ramírez (doc. No. 4); and
Army officer Juan Francisco Gutiérrez Espinoza (doc. No. 7).
3See CR 2011/1, p. 57, paras. 13-14 (Crawford). - 24 -
(d) The absence of information about Nicaraguan dredging plans
9. I come to two points which I am going to develop at greater length. The fourth of the
relevant facts is the absence of information about Nicaraguan dredging plants. Costa Rica first
40
requested technical information regarding the dredging project on 26 January 2006 . This request
was reiterated on 27 August 2009 41and 12 July 2010 . On its own evidence, Nicaragua had in its
possession a completed Environmental Impact Study, relating exclusively to the dredging of the
43 44
San Juan river, in September 2006 . We are told this was “exhaustive” . The study does not
mention the construction or clean-up, manual or otherwise, of any “caño” or canal. That
terminology does not appear in the Report.
10. Counsel for Nicaragua emphasized the importance of this Study. The first point to be
made about it is that Nicaragua’s hypothesis of its “comprehensive trans-boundary . . . EIS” 45, and
its suggestion that it shows that the dredging activities will not cause, or will cause very little
damage, to Costa Rica.
11. This begs a question. Nicaragua points to certain technical elements in the EIS, and says
that they were confirmed by Costa Rica. The most important of these elements appears to be that
the Nicaraguan study, which we provided last week, suggests that work on the San Juan would
represent, at most, a 5per cent diversion of water from the Colorado, which would not cause any
significant damage. To support this hypothesis, Nicaragua devoted a great deal of its time through
Mr.Reichler in emphasizing a statement given by Foreign Minister René Castro to Costa Rica’s
Legislative Assembly on 8 September 2010.
12. The very first thing to say about this is why, if Nicaragua had such a superb competent
study which indicated to its satisfaction that no harm would be caused, was this Study not shared
with Costa Rica? Why was it was only last Thursday, and only in connection with these
40Tab 21, Vol. 1, judges’ folders: No te from the Minister of Foreign Affairs and Worship of Costa Rica to the
Minister of Foreign Affairs of Nicaragua, original and English translation, 26 Jan. 2006.
41See Attachment PM 1, Request for Provisional Measures submitted by the Republic of Costa Rica, 18Nov.
2010: Note from the Minister of Fore ign Affairs and Worship of Costa Ri ca (DM-637-9), dated 27Aug. 2009, and
addressed to the Minister of Foreign Affairs of Nicaragua.
42Tab 25, Vol. 1, judges’ folders: Note from acting Minister of Foreign Affairs and Worship of Costa Rica to the
Minister of Foreign Affairs of Nicaragua, original and English translation, 12 July 2010.
43Nicaragua doc. No. 16.
44CR 2011/2, p. 32, para. 6 (Reichler).
45
CR 2011/2, p. 31, para. 4 (Reichler). - 25 -
proceedings, that that Study was provided? Costa Rica asked for it several times. And then there is
another question. How could Nicaragua have made an assessment of a trans-boundary
environmental impact on a river whose right bank is an international boundary, without asking for
the assistance of the neighbour whose boundary it was?
13. Costa Rica’s repeated requests for technical information reflected its true concern that,
recognizing as we do, Nicaragua’s right to dredge the San Juan, nonetheless there is a correlative
obligation to ensure, and not just assure with empty words, that Cost a Rica’s territory will not be
subject to damage.
14. When Minister Castro visited Managua on 21 July 2010, he was given verbal assurances
that Nicaragua would not damage Costa Rican territory. Now Mr.Pellet tells us that there is a
privilege to damage the territory provided that an indemnity is eventually forthcoming, and I will
deal with that argument later. But that is not what Minister Castro was promised by his colleague,
Minister Santos. When Minister Castro stated before the Costa Rican Congress that the projected
works of improvement would not damage the Co lorado river, he was working on the presumption
that Nicaragua’s assurances were true. At that point, there was no mention, verbal or otherwise, of
Nicaragua’s plans to build the canal, though the plan s already existed. Yet, Costa Rica now finds
itself confronted with the reality that the “modest dredging activities” 46, as ProfessorMcCaffrey
put it, constitute an entirely different project.
15. Mr. President, there are two dredging projects, not one. Project one is the one described
by the EIS. Project two is the project that Mr. Eden Pastora is actually carrying out. Indeed, there
is a question which project is the real one? We will see about that shortly.
16. Nicaragua asked yesterday what happened between Minister Castro’s statements on
8September and 18 November, when the proceedings were commenced. I can answer that
question by saying that Mr. Pastora happened. Before we deal with his dredging project, however,
I should take some time to consider the EIS as it stands, which, of course, we had not seen until last
week.
46
CR 2011/2, p. 26, para. 23 (McCaffrey). - 26 -
17. One thing that is striking about the EIS is that there is not a single piece of information,
technical or otherwise, from the Costa Rican side. A good reason for that, of course, is that we
were not consulted and no technical informati on from any independent reputable Costa Rican
source was used either.
18. The same thing is true of the terms of reference for the preparation of the Study, as
47
published by MARENA and provided to the Court on 4January. There is not a single item
requesting that the Study look at technical consider ations related to the effects of the dredging on
Costa Rica’s territory. If such requirements were not present in the requisition, it is pretty obvious
that they would not be present in the Study itself.
19. An additional striking point relates to the permit issued by MARENA in December 2008,
approving the EIS and authorizing the dredging activities on the San Juan. Point16 states as a
condition for the granting of the permit, and I quote:
“Dumping of material generated by the clean-up on the river bank and nearby
areas between the outlet of Caño Sucio and Boca de San Juanillo is to be avoided, so
as to prevent alterations in the circulation of waters in view of the very gentle slope in
48
that natural drainage area . . .”
And it goes on to give some of the ecological reasons for that.
20. Despite this clear condition, Nicaragua dumped 240 truck loads of sediment 200 m from
Caño Sucio, across the right bank of the San Juan . It seems the principles of respect for the
environment only apply when that environment is in Nicaragua.
21. Time restraints do not allow us to fully explore all the assumptions underlying the EIS.
Let me make one final point. The December 2008 MARENA permit has the following condition:
“This permit shall enter into force as of the date of delivery to the
Proponent,... and if the project is not executed in the next 18 months, it must be
renewed, for which MARENA shall evaluate the conditions prevailing at the date
thereof, being empowered to authorize its renewal provided no changes or variations
49
of the original environmental parameters in the area of the project have occurred.”
22. Now the dredging work which was subject to the permission began on 17 October 2010.
Twenty-two months later, so there is a question there.
47Documents Republic of Nicaragua, 4 Jan. 2011, Ann. 5, doc. No. 13.
48
Ibid., Ann. 8, doc. No. 13.
49Ibid. - 27 -
23. Let me now consider the permit extension granted by MARENA in October 2009 for the
construction of the canal connecting Harbour Head Lagoon to the San Juan river, which
Mr.Reichler tried to convince us yesterday, was nothing more than a little bit of domestic
housekeeping. According to Mr. Reichler, and I quote:
“EPN’s application for expansion of its permit explained that it was necessary
to clear ‘the caño that connects the San Ju an River to the Harbor Head Lagoon’ in
50
order to assure the year-round navigability of the entire river.”
And he went on to talk about some other advantages of the caño.
24. The remarkable thing about the permit extens ion to clean the so-called “caño” is that the
most basic of requirements was overlooked. MA RENA swiftly authorized the cleaning of the
canal without any environment impact study having been conducted or even commissioned. There
is none referred to in any of the affidavits submitted by Nicaragua 5. Clause III of the permit
extension states that the cleaning of the canal should “be performed along a length of 1,560 linear
meters with a maximum of 30 meters in width”, this was not a small job. It is very remarkable that
such an authorization ⎯ leaving aside the question whether it was authorized ⎯ would be granted
in this rather summary way 52. The “extension” also points out that there would be work performed
by a dredge on a section that has become sedimented, 59 m wide by 300 m long and 6 m in depth.
That means of 37,500 m 3of sediment will be removed. It appears from what Mr. Reichler said that
the extension of the permit was given for the clear ing of the “caño” only. The implication is that
the planned dredging related to the caño in some way. So, while I thank Mr.Reichler for his
assurances that the work on the canal has finished, Costa Rica su spects that the reality may be
different.
(e) The Pastora plan
25. This brings me to my second point. The minor dredging works characterized by
Nicaragua yesterday as housekeeping are not the dredging works that are being carried out by
Mr. Eden Pastora on the San Juan river. It is cu rious that Nicaragua did not mention Mr. Pastora’s
50
CR 2011/2, p. 43, para. 35 (Reichler).
5Doc. No. 13, affidavits of Hilda Espinoza and doc. No. 16, affidavit of Lester Gómez, documents Republic of
Nicaragua, 4 Jan. 2011.
5Documents Republic of Nicaragua, 4 Jan. 2011, Ann. 10. - 28 -
name yesterday, or at least only once that I could see. Since his plan has begun to be implemented,
he has publicly announced that he to plans to “restore the Nicaraguan border river to its historic
channel to the sea” 53; that: “In late December, . . . in the Delta, 30 km upriver [a second dredge
54
will be ready]. . . . [A] third dredge is coming, . . . It will work along the river, in the lagoons” ;
that Nicaragua wishes to recover the 1,700m 3 a second” 55and that “the project will have a duration
of two years and then when the work is finished, large ships will be able to navigate the Río San
56
Juan.” This on a budget of $7.5 million.
26. We have every reason to believe Mr.P astora when he speaks to the press about this
project. So far, everything he has announced to th e press seems to come true. He was the first to
announce that he would dredge the San Juan river, and he is doing it. He said that he interpreted
the Alexander Awards in a completely new way, and that is precisely the way in which Nicaragua’s
counsel interprets the Awards. He set aside Nicaragua’s official cartography, and Nicaragua has
done the same. He stated that three dredges will jo in the current dredger, and they materialized as
we speak. This Monday, the Nicaraguan paper La Prensa reported that:
“Next February, at the latest, the Government of Daniel Ortega expects to
increase the dredging load on the San Juan River, by putting to work on the site
another three dredges, up to four in total, which together will clean some one thousand
five hundred cubic metres per hour . . .”. [It is quite a project.]
Pastora, for his part, explained that with the four dredges they will try to reduce
the time that it would otherwise take to clean the river with one single dredge.
‘With a fourth, that will come at the end of February, opening the channel on
the sea and the sand bar where the San Juan River will empty . What would have
taken us three to four years, we are going to do in one year’, explained Pa57ora, who
said that there would be many more people working on the site.”
53
Report of interview with Edén Pastora on Nicaragua n television channel 100% Noticias, in Tim Rogers,
‘Nicaragua Denies Reports of Intrusion into Costa Rica’ Tico Times , 2Nov. 2010, available at:
http://www.ticotimes.net/News/Daily-News/Nicaragua-Denies-Reports-of-In…-
November-02-2010/: Application, Att. 9.
54
Tab 18, Vol. I, judges’ folders submitted on 11Jan. 2011. Confidencial.Com, 30 Nov. 2010: “Pastora: I
interpreted the Alexander Award”, available at: http:/ /www.confidencial.com.ni/articulo/2522/pastora-ldquo-yo-
interprete-el-laudo-alexander-rdquo, English translation.
55
Tab 78, Vol. III, judges’ folders submitted on 11 Jan. 2011. La Prensa, 25 Aug. 2009: “They are going for the
flow of the San Juan River”.
56
Costa Rica, Request for the Indication of Provisional Measures, 18 Nov. 2010, Att.PM2: ‘Nicaragua Sends
Two More Dredges to the Río San Juan’, Tico Times, 8 Nov. 2010, available at: h ttp://www.ticotimes.net/News/Daily-
News/Nicaragua-Sends-Two-More-Dredges-to-the-Rio-San-Juan_Monday-November-08-2010.
57
La Prensa, 9 Jan, 2011: “Another three dredges to the [San Juan] river”. Tab 80, Vol. I, judges’ folders,
11 Jan. 2011; emphasis added. - 29 -
27. Mr. Pastora also considers it necessary to cut across meanders of the San Juan to speed
up water velocity ⎯ we saw pictures of that activity yesterday. Indeed, the permit extension
granted by MARENA on 30 October 2009 to the Nicaraguan Port Company to construct the canal,
gave co-ordinates which indicate the starting and ending points of the canal. When verified against
an official map, as we have done on the screen, the co-ordinates curiously coincide with the actual
site where the canal has been constructed on Cost a Rican territory. One might wonder, with so
many sand bars to clean up, why Nicaragua treats as its priority the straightening of a meander
directly opposite the entrance to the Pastora canal.
28. Who should we believe? Counsel for Nicaragua alleging the existence of
well-thought-out, carefully examined data ⎯ though not previously transmitted to Costa Rica ⎯ in
the context of a mere housekeeping operation, or the person who is on the ground, giving the
instructions and who, despite not being an engineer, knows perfectly well what he is doing? I think
we should give some credibility to Mr.Pastora. After all he anticipated ProfessorMcCaffrey on
the boundary, which takes some doing. Thus we must give some attention to Mr. Pastora when he
3
says that he intends to divert 1,700 per second of water from the Colorado river, to return the flow
of water of the San Juan to that allegedly obtaining in 1858.
29. So, again, when Nicaragua asked what happened between 8 September and
18 November, the answer is simple. Mr. Pastor a happened. As soon as the Nicaraguan incursion
took place, Costa Rica responded and monitored the situation. MinisterCastro had stated before
the Costa Rican Congress that it would do so. In Costa Rica’s view, Nicaragua was then
undertaking a major work. If it turns out that that is not true, then any provisional measure will
have no incidence on Nicaragua.
30. The evidence Costa Rica has presented s hows an entirely different dredging works from
those that have been presented. Mr.Pastora’s co nstant press interviews tell us of an entirely
different dredging operation, with four dredges, operating on an intensive campaign. If the four
dredges were to work for a full year, the proj ect would remove three million cubic metres of - 30 -
sediment, not the 942,000 we were promised yesterday 58. It is going to be a work of substantive
proportions, there is no doubt of it, because Mr. Pastora will take care of it.
2. The situation now and the continuing need for
provisional measures
31. That was the situation then, Mr. President , Members of the Court, when we commenced
these proceedings. I turn to the situation now and the continuing need for provisional measures.
As I made, or tried to make, clear yesterday ⎯ the counsel was careful not to refer to what I said
yesterday by and large ⎯ it cannot be the case that because a State says that it has completed its
activity, which was alleged to be a ground for pr ovisional measures, that provisional measures
become irrelevant. That is the fait accompli point that I have already made. Against that
background, let us make three points under this heading. The first is the story of the dying San
Juan.
(a) The dying San Juan
32. Ambassador Argüello (CR2011/2. p.8, para. 5) argues that “[w]ithout even minor
cleaning, the river’s mouth will be dried up in a matter of decades”. In fact, there is a
long-standing issue about the San Juan, which is that there is not enough water in summer. We
have very good evidence for that proposition in th at Lieutenant Horatio Nelson had problems with
the river in his mission in 1780. He got extremely unwell after the mission; fortunately from the
British point of view, perhaps unfortunately from the French, he recovered.
33. The Nicaraguan historian Alejandro Bolaños Geyer refers to an event that occurred
shortly after the conclusion of the Treaty of Limits , in which there was some change in the volume
of water as between the two rivers. He says in his book, published in Managua in 1999:
“90% of the water is now diverted to the Co lorado. . . . When an American engineer
examines and measures them in 1873, the Colorado is 1,200 feet wide and ten feet
deep at the junction, and the Lower San Juan only 324 feet wide and six inches of
59
depth . . . .
The first Alexander Award recognized the same problem:
58
CR 2011/2, p. 17, para. 40 (Argüello Gómez).
5Alejandro Bolaños Geyer, “Campana rota, camalotes, tumbas y olvido” (Masaya, Nicaragua 1999) pp. 55-56. - 31 -
“ The peculiarity of this bay, [this is the Bay of San Juan del Norte, which now
is silted up] to be noted, is that the river brings down very little water during the
annual dry season. When that happens, particularly of late years, sand bars, dry at
all ordinary times, but submerged more or less and broken over by the waves at all
high ones, are formed, frequently reaching the adjacent headlands, so that a man might
cross dry-shod.”
So we should take, as so often with nature, with a pinch of salt the suggestion that things are
drastically worse. Having said that, we accept that there is a problem with sedimentation, but
perhaps not as drastic as presented.
(b) No irreparable harm
34. I turn to the question of the irreparabl e harm, which Mr.Reichler and ProfessorPellet
spent much time on yesterday. The first point ⎯ and I would emphasize this ⎯ is that Costa Rica
does not, at the present stage, need to establish that its rights have actually been harmed
irremediably. Indeed, it need not prove actual harm at all. It is sufficient to satisfy the Court that
there is a risk of irreparable prejudice to the rights in dis pute, and that the risk of such harm is
sufficiently serious and imminent that provisional measures are required to protect the rights.
35. Nicaragua appears to be suggesting that where a fait accompli has been imposed, quite
dramatically altering the status quo, this situ ation should be permitted to continue until the
conclusion of a decision on the merits, particularly where issues of sovereignty are involved. By
the time the Court comes to make its final decision, in two or three years’ time, the situation on the
ground could be very different. By then, we have no idea how wide or deep the canal would be
assisted by other changes to the banks. We do not know to what extent the changes to the
wetlands ⎯ it cannot be denied there would be some changes ⎯ would have become permanent.
There is a risk of irreparable harm to Costa Rica’s rights sufficient to justify provisional measures.
36. When referring to the felling of trees , Mr. Reichler referred to the environmental reviews
before the felling was authorized, including the trans-boundary impacts ⎯ though he was talking
about his own boundary, I think.
“Vegetation was cleared only on the Nicar aguan side of the channel; and, in
compliance with the environmental permit, fe lled trees have been replaced at the rate
of ten new trees planted for every one removed, [ten new trees for every century or
200-year old trees] so that there is no lasting environmental impact.” (CR2011/2,
p. 32, para. 7.) - 32 -
Well, I dealt with that point yesterday in wh at was a remark about the Court, but I hope the
Court did not take it in any respect as a threat.
The only evidence presented on the purported envi ronmental review is an affidavit. Where
are the original studies? Is this planting of ten new trees ⎯ seedlings to replace trees hundreds of
years old ⎯ intended, or has it already happened? All these questions arise.
37. If felled trees are going to be replaced, one might ask, why cut them down in the first
place?
38. Nicaragua cut down some 200 trees, then they made the canal through a somewhat
different route. Why was it necessary to cut them down?
39. Referring to the depositing of sediments, Mr. Reichler says:
“that these would be placed exclusively on the Nicaraguan side, in designated and
secure locations at least 50 m from the river bank, in order to assure against runoff
back into the river” (CR 2011/2, p. 38, para. 22).
Well, you have seen the pictures of them, they do no t look particularly secure. Immediately after,
he quotes a witness saying that “none of the by-products of the dredging work were to be deposited
on the Costa Rican side of the River” (ibid., p. 39, para. 23).
41. These statements do not coincide with the EIS. On page 24 of the EIS, a list of 24 sites
for depositing the sediment from the dredging is pr esented, including precise co-ordinates. When
the co-ordinates are located on a map, it turns out that several sites are on the right margin of the
San Juan river, on the Costa Rican side. One of th em (No.2) coincides fully with the site where
sediment was initially deposited in October 2010. Th is site is described as “public property”; and
so are the others which are across the right margin of the San Juan.
42. Mr. Reichler said:
“In September, the impact of the dr edging project was negligible. Since
November, the impact of the same project is catastrophic, requiring urgent measures.
It is not the dredging that caused Costa Rica to drastically change its position. It is the
political decision to file this lawsuit.” (CR 2011/2, p. 42, para. 31 (Reichler).)
Another suggestion of an abusive process.
Mr. President, Members of the Court, in Sept ember 2010, Minister Castro’s statements were
based on the premise that the dredging project w ould be carried on in Nicaraguan territory. He
later found out that it included taking over Costa Rican territory. - 33 -
43. Moreover, we have never said that we have to meet a threshold test of a catastrophe or
that, for the moment, there has been a catastrophe. It is still the case that there may be irreparable
harm.
(c) Delft Report
44. Finally, let me say something about the Ramsar and Delft Reports. Yesterday,
Mr.Reichler mounted what might be described as a “frontal attack” ⎯ in so far as anyone so
pleasant can be held to engage in a frontal attack ⎯ on the Ramsar Report. What he said was that
60
it had been based entirely on information provided by Costa Rica .
45. He carried on in the same vein for some time, as you no doubt recall. He said it was
“nothing more than an uncritical acceptance of Costa Rica’s own position, based on the assumption
that everything Costa Rica and its e xperts told the mission was correct” 61. Well, the first point to
be made is that the Ramsar Secretariat is a resp ected international organization for the supervision
of the protection of wetlands. Moreover, there is also a certain irony to Mr.Reichler’s zealous
denunciation of Ramsar. Nicaragua submits a report which it expressly characterized as
independent ⎯ this is the Morphological Stability Report, with aspects of which I should say we
agree. The Morphological Stability Report begins:
th
“On the 18 of November 2010, Costa Rica initiated a case against the Republic
of Nicaragua...” It then goes on to state “we have review ed data related to
Nicaragua’s proposed dredging and completed caño-clearing project contained in
Nicaragua’s Environmental Impact Study a nd supporting documentation, as well as
various affidavits by Nicaragua’s officials…” 62
46. No attempt at independent fact-finding. The Dutch report refers the Harbor Head Caño,
giving the label third party credence for the first ti me as far as the record shows. I have not got
time to deal with the inadequacies of the Delft Report. The Dutch experts, of course, were not even
on the same continent. At least the Ramsar people tried to get to the site, though weather prevented
them.
60
CR 2011/2, pp. 33-44, para. 10 (Reichler).
61
CR 2011/2, pp. 39-40, para. 26 (Reichler).
62Documents of Nicaragua, doc. No. 18. - 34 -
3. The legal barriers to provisional measures
47. Leaving aside what I would describe as the “we have already dunnit” defence and a
certain amount of hyperbole, Professor Pellet made two ex jure arguments against provisional
measures.
(a) Prejudgment in sovereignty disputes
48. The first is that in sovereignty disputes the Court cannot award provisional measures
because that amounts to prejudging the issue of sove reignty. I spent a great deal of my time
yesterday morning addressing that argument, you will have noticed, and I will not repeat what I
said then. I will only make three points.
49. First, you do not by making a provisiona l measures order prejudge anything. At this
provisional phase you have to appreciate the situation. You had to appreciate in the Hostages case
that there were hostages held in an embassy and held in circumstances from which they were
unfree. That was a provisional appreciation ⎯ it was one that you made.
50. Secondly, and this is crucial, here the di spute over the construction of the canal predated
the dispute over sovereignty. Colourable late clai ms for sovereignty are not a joker in the pack of
provisional measures applications. They are not a basis for trumping rights that would otherwise
exist.
51. Thirdly, you have in fact ordered provi sional measures in sovereignty disputes, as I
showed yesterday.
(b) Cleveland Award Article 6
52. Then Professor Pellet argued that paragra ph 3.6 of the Cleveland Aware gave another
trump card to Nicaragua, the right, in effect, to en ter Costa Rican territory and engage in works of
improvement, provided only that Costa Rica was inde mnified in the outcome. Of course, that is
not their case. Their case is that they were not entering Costa Rican territory at all but has argued,
as it were, in the alternative.
53. In fact, paragraph 3.6 is not a one-way pass granted by the President of the United States
to allow unfettered activity on the right bank of the San Juan, subject to payment of an
indemnification. It is a right set out on a hypothesis of legality. - 35 -
54. It is true that paragraph 3.6 sets out Costa Rica’s right to indemnification. But the right
is preceded by the primary and correlative rights othe parties, set out in the first sentence of
paragraph 3.6, which says,
“The Republic of Costa Rica cannot prevent the Republic of Nicaragua from
executing at her own expense and within her own territory such works of
improvement, provided [emphasis in original] such works of improvement do not
result in the occupation or flooding or damage of Costa Rican territory...” (First
emphasis added.)
55. Three conditions have to be met for theundertaking of lawful works of improvement.
The works have to be undertaken as a Nicaraguan expense as opposed to the expense of the Costa
Rican rain forests, for example. They are to bexecuted in Nicaraguan territory. They must be
necessary to achieve one of the purposes defined iparagraph3.4 as clarif ied by paragraph 3.5,
namely, “to prevent the Bay of San Juan del Norte from being obstructed; to keep the navigation
of the River or Port free and unembarrassed, or to improve it for the common benefit”.
56. A contrario, Costa Rica can prevent Nicaragua from executing works on its own territory
or works which do not comply with these conditions and that this was precisely what Costa Rica
was asking the Court to do today in its fifth request.
THE PROVISIONAL M EASURES SOUGHT
57. I am not going to deal as I did yesterday in some detail with the specific measures
sought. In the light of developments in the last two months, and of what we heard yesterday, we
have modified the provisional measures to some degree. And you will see here from the Agent that
it is largely a question of drafting, but they speak for themselves.
C ONCLUSIONS
58. Mr.President, Members of the Court, wh at does the Court expect of co-riparians in
situations such as this? Well, I have already said the word “co-riparians”, Nicaragua has the whole
river, but we have the right bank. In the conteof that situation, there is the same obligation of
co-operation that would exist if this was a regular river with a median line. There is a community
of interest in the navigable river, and the commun ity of interest ought to give rise to co-operation
rather than to the refusal of information, the refusal of consultation, the invective of the white - 36 -
book ⎯ which, as I say, we urge you to read, and the present situation, which is thoroughly
unsatisfactory, thoroughly uncertain, notwithstanding the blandishments of counsel from
Nicaragua.
59. Mr. President, Members of the Court, thank you for your attention.
The PRESIDENT: I thank Professor James Craw ford for his presentation. Now the third
speaker, I invite, is Ambassador Edgar Ugalde.
M. UGALDE ALVAREZ :
1. Monsieur le président, Mesdames et Messieurs les juges, je suis honoré de comparaître
devant cette honorable Cour.
2. Monsieur le président, hier, nous avons été témoins, à nouveau, d’une réponse particulière
du Nicaragua aux revendications légitimes de mon pays liées au comportement du Nicaragua.
Nous avons entendu des propos qui ont fait recours à la disqualification constante.
3. Hier, le Nicaragua a manqué à la vérité quand son distingué agent a indiqué à cette Cour
que le passage d’un navire de guerre en1884, nous a menés à l’arbitrage du président
GroverCleveland. Cet arbitrage s’est produit, comme le sait bien la Cour, car le Nicaragua,
quatorzeans après le traitéCañas- Jerez, signé en1858, a décidé de méconnaître ledit traité. Ceci
est clair à la seule lecture de l’article I de l’arbitrage Cleveland.
4. Le Nicaragua a également manqué à la vér ité quand son distingué agent a dit que cent ans
plus tard, lorsque son pays a parlé d’un canal interocéanique, le CostaRica a décidé d’envoyer
naviguer des gardes civiles au fleuve San Juan. Un e telle affirmation ne résiste pas à l’examen de
cette Cour, et la Cour en est témoin.
5. Nous sommes aussi face à une affirmation sans fondement, en affirmant que l’incursion,
l’occupation et l’utilisation du territoire du Costa Ri ca par le Nicaragua ont motivé le Costa Rica à
initier un scandale international. Le Nicaragua ve ut nous faire croire qu’il a droit à des privilèges
spéciaux pour pénétrer dans le territoire d’Etats voisins, de causer des dommages, et de manquer au
respect des résolutions d’orga nismes internationaux, et même de cette façon manquer à une
quelconque responsabilité internationale. - 37 -
6. Les thèmes récurrents, tels que l’obsession pour présenter le CostaRica comme un pays
militarisé, avec un budget élevé pour son armement, fa it partie du livret d’agression avec lequel on
attaque mon pays.
7. Nous avons été particulièrement surpri s de voir comment les représentants du Nicaragua
ont perdu tout sens du respect envers toute organisation internationale qui travaille de façon
objective et en accord avec les directives strictes établies par la communauté internationale.
8. De la sorte, hier nous avons assisté à des attaques malveillantes et sans précédent envers
Ramsar, une organisation internationale, comprena nt cent soixantepays, juste par le seul fait
d’avoir établi des études techniques, sous le parrainage de la convention de 1971, lors de la mise en
danger d’une zone humide, comme dans le cas de la zone humide costa-ricienne CaribeNoreste.
Cependant, il semblerait que le Nicaragua n’a pas cons idéré de la même façon le travail de Ramsar
lors de la mission 57 de 2005 quand Ramsar a visité la baie de Bluefields au Nicaragua.
9. L’Organisation des Etats américains a connu le même sort ; elle a aussi subi une critique
sévère et une disqualification qu’elle n’avait jamais reçue d’un pays membre. Le Nicaragua traite
avec mépris l’organisation en allant à l’encontre de deux de ses résolutions et en l’accusant de
répondre aux intérêts des narcotrafiquants. Que dire de plus ?
10. Les supposés insignifiants travaux de dr agage avec lesquels le Nicaragua minimise ses
graves actions en territoire costa-ricien ont un autre but dans la stratégie du Nicaragua. Hier encore
on nous a rappelé l’intention du Nicaragua de construire un canal interocéanique sur le fleuve
San Juan. Ainsi la proposition est simple : le Nicaragua occupe et détruit une partie du territoire du
CostaRica. Il déclare que seulement cette Cour peut connaître de cette affaire puisque c’est une
affaire juridique et cherche à convaincre cette Cour d’admettre un supposé droit du Nicaragua, sur
la base de la sentence arbitraleCleveland, dans la quelle le Nicaragua peut occuper et détruire le
territoire costa-ricien, sans que le Costa Rica puisse faire quoi que ce soit, parce qu’aux termes du
Nicaragua, la seule obligation qu’il a est d’indemniser le dommage ainsi causé.
11. Si cette Cour accepte cette proposition, no n seulement le Nicaragua se sentira autorisé à
poursuivre les incursions et la destruction du terr itoire du Costa Rica, mais aussi on sera face à un
précédent inouï dans l’histoire de cette honor able Cour: la confirmation d’une politique - 38 -
d’agression d’un Etat sur la base d’une enquête sur un fait accompli. Respectueusement, le
Costa Rica demande à la Cour de ne pas tomber dans ce piège.
12. Monsieur le président, la seule conclusi on à laquelle vous pouvez arriver dans ce cas est
que le Nicaragua a une vision utilitariste déguisée en raisonnement juridique. Car, au Nicaragua, il
n’y a pas d’actes illégaux en soi, mais des act es qui doivent se qualifie r en fonction de leurs
conséquences. Dans le cas particulier du Costa Rica, cela signifie que le Nicaragua peut agir
illégalement, sans conséquences juridiques, et dans le pire des cas s’en sortir en payant une
indemnisation. Dans ce sens, le Nicaragua nous a signalé constamment des parties incomplètes de
la sentence arbitrale Cleveland. Maintenant, le Nicaragua nous annonce qu’il paiera seulement des
dommages, mais n’acceptera pas la responsabilité légale et morale de ses actes.
13. Ne vous méprenez pas, cette vision simplis te et l’utilitarisme du droit international sont
exactement les raisons pour lesquelles nous sommes ici. Cette vision qui propose une situation
comme un fait accompli: la forêt est déjà détruite, le canal est déjà creusé, alors, selon le
Nicaragua, nous n’avons pas besoin d’indication de mesures conservatoires. Accepter cette vision
constitue un affront aux principes du droit international et à tout ce que cette Cour représente.
14. Monsieur le président, avant la fin de mon exposé, permettez-moi de procéder à la
lecture des requêtes présentées au nom du Costa Rica à l’honorable Cour :
15. Le Costa Rica demande à la Cour d’ordonner les mesures conservatoires suivantes :
16. En attendant la décision finale sur le fond, et dans la zone comprenant l’entièreté de
IslaPortillos, c’est-à-dire, à la rive droite du fleuve SanJuan et entre les rives de la lagune
LosPortillos (connue aussi comme Harbour Head Lagoon) et de la rivière Taura («la zone
pertinente»), le Nicaragua doit s’abstenir de :
a) stationner ses troupes armées ou autres agents ;
b) construire ou élargir un canal ;
c) procéder à l’abattage d’arbres ou à l’enlèvement de végétation ou de terre ; et
d) déverserdessédiments.
17. En attendant la décision finale sur le fond, le Nicaragua doit suspendre son programme
de dragage du fleuve San Juan dans la zone adjacente à la zone pertinente. - 39 -
18. En attendant la décision finale sur le fond, le Nicaragua doit s’abstenir de toute autre
action pouvant porter préjudice aux droits du Co staRica, ou pouvant aggraver ou étendre le
différend porté devant la Cour.
19. Monsieur le président, Mesdames et Messieurs les juges, permettez-moi de vous
remercier de votre attention ainsi que les interprètes, le personnel de la Cour et tous ceux qui ont
contribué au bon déroulement de notre travail. Merci.
The PRESIDENT: I thank His Excellency Ambassador Edgar Ugalde, the Agent of the
Republic of CostaRica, for his statement. This brings to an end the second round of oral
arguments of Costa Rica. The Court will meet again tomorrow at 4.30 p.m. to hear the second
round of oral argument of Nicaragua. Before clos ing this session, I would like to note that it is
possible that Members of the Court might wish to put questions to the two Parties in the context of
the pleadings which have been made by the two Parties in their first round of oral argument and the
second round of oral argument. And given the fact this is an essential procedure for a request for
provisional measures, the time factor is an impor tant factor which the Court has to take into
account. For that reason, we are going to make this prior announcement at this stage that those
questions, if they come, would be put to the two Parties at the end of tomorrow’s session and the
time to be given to the two Parties to answer those questions might be somewhat limited in order to
expedite the whole process. I just want to give this information to you so that you will be prepared
for that.
Now that brings the second round of oral argument of Costa Rica today to an end and
tomorrow, as I said, the Court will meet again at 4.30p.m. to hear the second round of oral
argument of Nicaragua. Thank you. The Court is adjourned.
The Court rose at 6.00 p.m.
___________
Public sitting held on Wednesday 12 January 2011, at 4.30 p.m., at the Peace Palace, President Owada presiding, in the case concerning Certain Activities Carried Out by Nicaragua in the Border Area (Costa Rica v. Nicaragua)