CR 95/11
Cour internationale International Court
de Justice of Justice
LA HAYE THE HAGUE
ANNEE 1995
Audience publique
tenue le vendredi 10 février 1995, à 10 heures, au Palais de la Paix,
sous la présidence de M. Bedjaoui, Président
en l'affaire relative au Timor oriental
(Portugal c. Australie)
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COMPTE RENDU
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YEAR 1995
Public sitting
held on Friday 10 February 1995, at 10 a.m., at the Peace Palace,
President Bedjaoui presiding
in the case concerning East Timor
(Portugal v. Australia)
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VERBATIM RECORD
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Présents : M. Bedjaoui, Président
M. Schwebel, Vice-Président
M. Oda
Sir Robert Jennings
MM. Guillaume
Shahabuddeen
Aguilar Mawdsley
Weeramantry
Ranjeva
Herczegh
Shi
Fleischhauer
Koroma
Vereshchetin, juges
Sir Ninian Stephen
M. Skubiszewski, juges ad hoc
M. Valencia-Ospina, Greffier
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Present: President Bedjaoui
Vice-President Schwebel
Judges Oda
Sir Robert Jennings
Guillaume
Shahabuddeen
Aguilar Mawdsley
Weeramantry
Ranjeva
Herczegh
Shi
Fleischhauer
Koroma
Vereshchetin
Judges ad hoc Sir Ninian Stephen
Skubiszewski
Registrar Valencia-Ospina
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Le Gouvernement de la République portugaise est représenté par :
S. Exc. M. António Cascais, ambassadeur de la République portugaise
auprès du Gouvernement de S. M. la Reine des Pays-Bas,
comme agent;
M. José Manuel Servulo Correia, professeur à la faculté de droit de
l'Université de Lisbonne et avocat au barreau du Portugal,
M. Miguel Galvão Teles, avocat au barreau du Portugal,
comme coagents, conseils et avocats;
M. Pierre-Marie Dupuy, professeur à l'Université Panthéon-Assas
(Paris II) et directeur de l'Institut des hautes études
internationales de Paris,
Mme Rosalyn Higgins, Q.C., professeur de droit international à
l'Université de Londres,
comme conseils et avocats;
M. Rui Quartin Santos, ministre plénipotentiaire, ministère des
affaires étrangères,
M. Francisco Ribeiro Telles, premier secrétaire d'ambassade,
ministère des affaires étrangères,
comme conseillers;
M. Richard Meese, avocat, associé du cabinet Frere Cholmeley, Paris,
M. Paulo Canelas de Castro, assistant à la faculté de droit de
l'Université de Coimbra,
Mme Luisa Duarte, assistante à la faculté de droit de l'Université de
Lisbonne,
M. Paulo Otero, assistant à la faculté de droit de l'Université de
Lisbonne,
M. Iain Scobbie, Lecturer in Law à la faculté de droit de
l'Université de Dundee, Ecosse,
Mlle Sasha Stepan, Squire, Sanders & Dempsey, Counsellors at Law,
Prague,
comme conseils;
M. Fernando Figueirinhas, premier secrétaire de l'ambassade de la
République portugaise à La Haye,
comme secrétaire.
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The Government of the Portuguese Republic is represented by:
H. E. António Cascais, Ambassador of the Portuguese Republic to the
Government of H.M. The Queen of the Netherlands,
as Agent;
Mr. José Manuel Servulo Correia, Professor in the Faculty of Law of
the University of Lisbon and Member of the Portuguese Bar,
Mr. Miguel Galvão Teles, Member of the Portuguese Bar,
as Co-Agents, Counsel and Advocates;
Mr. Pierre-Marie Dupuy, Professor at the University of Paris II
(Panthéon-Assas) and Director of the Institut des hautes études
internationales of Paris,
Mrs. Rosalyn Higgins, Q.C., Professor of International Law at the
University of London,
as Counsel and Advocates;
Mr. Rui Quartin Santos, Minister Plenipotentiary, Ministry of Foreign
Affairs,
Mr. Francisco Ribeiro Telles, First Embassy Secretary, Ministry of
Foreign Affairs,
as Advisers;
Mr. Paulo Canelas de Castro, Assistant in the Faculty of Law of the
University of Coimbra,
Mrs. Luisa Duarte, Assistant in the Faculty of Law of the University
of Lisbon,
Mr. Paulo Otero, Assistant in the Faculty of Law of the University of
Lisbon,
Mr. Iain Scobbie, Lecturer in Law in the Faculty of Law of the
University of Dundee, Scotland,
Miss Sasha Stepan, Squire, Sanders & Dempsey, Counsellors at Law,
Prague,
as Counsel;
Mr. Fernando Figueirinhas, First Secretary of the Portuguese Embassy in The Hague,
as Secretary.
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Le Gouvernement du Commonwealth d'Australie est représenté par :
M. Gavan Griffith, Q.C., Solicitor-General d'Australie,
comme agent et conseil;
S. Exc. M. Michael Tate, ambassadeur d'Australie aux Pays-Bas et
ancien ministre de la justice,
M. Henry Burmester, conseiller principal en droit international,
bureau du droit international, services de l'Attorney-General
d'Australie,
comme coagents et conseils;
M. Derek W. Bowett, Q.C., professeur émérite, ancien titulaire de la
chaire Whewell à l'Université de Cambridge,
M. James Crawford, titulaire de la chaire Whewell de droit
international à l'Université de Cambridge,
M. Alain Pellet, professeur de droit international à l'Université de
Paris X-Nanterre et à l'Institut d'études politiques de Paris,
M. Christopher Staker, conseiller auprès du Solicitor-General
d'Australie,
comme conseils;
M. Christopher Lamb, conseiller juridique au département des affaires
étrangères et du commerce extérieur d'Australie,
Mme Cate Steains, deuxième secrétaire à l'ambassade d'Australie aux
Pays-Bas,
M. Jean-Marc Thouvenin, maître de conférences à l'Université du Maine
et à l'Institut d'études politiques de Paris,
comme conseillers.
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The Government of Australia is represented by:
Mr. Gavan Griffith, Q.C., Solicitor-General of Australia,
as Agent and Counsel;
H.E. Mr. Michael Tate, Ambassador of Australia to the Netherlands and
former Minister of Justice,
Mr. Henry Burmester, Principal International Law Counsel, Office of
International Law, Attorney-General's Department,
as Co-Agents and Counsel;
Mr. Derek W. Bowett, Q.C., Whewell Professor emeritus, University of
Cambridge,
Mr. James Crawford, Whewell Professor of International Law,
University of Cambridge,
Mr. Alain Pellet, Professor of International Law, University of Paris X-Nanterre
and Institute of Political Studies, Paris,
Mr. Christopher Staker, Counsel assisting the Solicitor-General of
Australia,
as Counsel;
Mr. Christopher Lamb, Legal Adviser, Australian Department of Foreign Affairs and
Trade,
Ms. Cate Steains, Second Secretary, Australian Embassy in the
Netherlands
Mr. Jean-Marc Thouvenin, Head Lecturer, University of Maine and
Institute of Political Studies, Paris,
as Advisers.
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The PRESIDENT: Please be seated. The Court will now resume its sittings and continue to
hear the oral arguments of Australia. I call upon Mr. Alain Pellet for his statement.
M. PELLET : I don´t dare say, thank you, Mr. President! Merci, Monsieur le Président.
LE DROIT DE L'AUSTRALIE DE NEGOCIER EN VUE DE LA PROTECTION
DE SES PROPRES RESSOURCES NATURELLES
1. Mes collègues, Henry Burmester, James Crawford et Christopher Staker ont démontré
qu'en concluant le traité du 11 décembre 1989 avec l'Indonésie, l'Australie n'a porté aucune atteinte à
un droit quelconque appartenant au Portugal ou au peuple de Timor oriental et le professeur Bowett
va montrer tout à l'heure que le traité qui est au coeur de notre affaire préserve les droits et les
intérêts des Timorais.
Il m'appartient d'établir que, par la conclusion de ce traité, l'Australie n'a fait qu'exercer les
droits souverains que lui reconnaît le droit international; plus même : qu'elle s'est acquittée des
devoirs lui incombant à l'égard de son propre peuple.
Et ceci à deux points de vue :
- d'une part, l'Australie a protégé ses propres ressources et richesses naturelles, en application du
principe, dont le Portugal, non sans raison d'ailleurs, fait grand cas, le principe de la souveraineté
permanente sur ses ressources naturelles;
- d'autre part, en application des règles contemporaines du droit de la mer, l'Australie a conclu un
accord à cette fin.
2. Durant toute la procédure écrite, le Portugal s'est ingénié à présenter l'affaire qu'il a
soumise à la Cour d'une manière passablement biaisée et qui relève de ce que l'on pourrait appeler la
«psychologie judiciaire».
A entendre les plaidoiries que nous avons écoutées la semaine dernière au nom du Portugal,
l'affaire opposerait un petit peuple opprimé dont lui, Portugal, se serait fait le champion généreux et
désintéressé, à un grand pays industrialisé, cynique et avide, qui aurait profité d'une situation
douloureuse pour s'approprier des richesses qui ne lui appartiennent pas - car ce n'est pas une
révélation, le sous-sol du «Timor Gap» recèle des traces de pétrole, en effet assez prometteuses.
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Mais ce n'est pas du tout ainsi que la situation se présente :
- en premier lieu, les Parties au différend ne sont pas celles que décrit le Portugal;
- en deuxième lieu, l'Australie n'a porté atteinte aux droits de personne; elle a, je le répète, protégé
ses propres droits, ceux que le droit international lui reconnaît, comme à tout autre Etat;
- enfin, loin de «profiter de la situation» comme le Portugal veut le faire croire, elle a, au contraire,
dû négocier dans des conditions difficiles, un accord qui ne fait que partiellement droit à des
revendications anciennes dont, au demeurant, le bien-fondé au regard du droit international paraît
difficilement contestable.
3. Sous un angle particulier, le premier de ces points a déjà été longuement évoqué depuis le
début de la semaine et je n'y reviens que pour mémoire : l'Australie n'est ici qu'un «faire-valoir», un
leurre, un substitut, dont la présence à cette barre a pour seule fonction d'apaiser, faute de mieux, la
tardive mauvaise conscience de l'ancienne puissance coloniale au Timor oriental aussi bien
intentionnée soit-elle - et je n'ai pas de doutes sur ses bonnes intentions tout en pensant qu'il est
regrettable que l'Australie en fasse les frais... Le véritable défendeur, chacun le sait, est l'Indonésie,
absente de l'instance, mais présente derrière chaque phrase prononcée par les conseils du Portugal.
C'est elle qui est visée. C'est elle seule que l'Etat requérant cherche à atteindre.
Quant à celui-ci, il se peint sous un jour qui ne doit pas abuser : Etat industrialisé, membre de
l'Union européenne, il est surtout ici un colonisateur qui, après avoir maintenu Timor dans une
pauvreté misérable, en a totalement perdu le contrôle et s'en est, à vrai dire, largement désintéressé
pendant des années. C'est cet Etat, Monsieur le Président, et non le «peuple de Timor» - car, et on
peut le déplorer, les peuples n'ont pas, en tant que tels, accès à cette barre -, c'est cet Etat qui
a introduit une requête devant la Cour. C'est lui, et lui seul, si vous faisiez droit à ses conclusions,
qui serait le bénéficiaire de votre arrêt. Le bénéfice qu'il en tirerait ne pourrait d'ailleurs qu'être
purement politique; en revanche, le peuple de Timor risquerait fort d'être privé durablement des
retombées économiques positives qu'il peut espérer de l'exploitation des ressources naturelles que
recèle la région.
Si, par exemple, contre l'attente confiante de l'Australie, vous en veniez à dire que la
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conclusion du traité de 1989 porte atteinte à la souveraineté permanente de Timor sur ses ressources
et richesses naturelles, c'est au Portugal, lointaine puissance coloniale européenne, totalement
absente de la région, que vous reconnaîtriez le droit d'exploiter ces ressources au nom du peuple
timorais - c'est-à-dire à un Etat qui ne les a jamais mises en valeur du temps où il pouvait le faire et
qui ne le ferait pas davantage aujourd'hui, même s'il est animé des meilleures intentions du monde
comme il l'affirme, et comme d'ailleurs j'ai tendance à le croire. Et ceci pour une raison évidente, et
qu'il reconnaît du reste lui-même : il n'exerce aucun contrôle effectif sur le territoire qu'il affirme
représenter. Il est «évident, écrit le Portugal lui-même dans sa réplique, que la réalité factuelle de
l'occupation du Timor oriental par l'Indonésie dure encore» (p. 190, par. 6.7). Certes ! ... et pour
autant que je puisse en juger, cette manière de s'exprimer relève plutôt de la litote... Et, pour sa part,
l'Indonésie ne manquerait pas de voir dans votre arrêt une approbation implicite de ses propres
positions, une sorte de «quitus», puisqu'aussi bien elle se considère comme le souverain territorial à
Timor. Est-ce cela le résultat recherché par le Portugal ? Encore une fois, nous l'avons déjà dit, les
bonnes intentions de ce pays ne sont pas en cause; mais l'enfer est pavé de bonnes intentions...
4. En tout cas, le fait est : c'est avec lui, ancienne puissance coloniale, qui, de son propre aveu,
n'exerce plus aucune compétence territoriale sur Timor depuis vingt ans, que le Portugal reproche à
l'Australie de ne pas avoir négocié et traité, et c'est un arrêt l'y obligeant qu'il veut obtenir.
Supposons un instant que cela se soit passé ou que cela se produise à l'avenir. Que l'Australie
ait conclu ou conclue avec le Portugal un traité portant sur l'exploitation conjointe des ressources
naturelles du «Timor Gap». Il s'agirait là, Monsieur le Président, d'un exercice parfaitement futile,
d'un traité entièrement fictif.
D'ailleurs, est-ce qu'on pourrait même parler de «traité» dans une telle hypothèse ? Il est de
l'essence du traité de pouvoir être appliqué. Comme l'a fort bien relevé le professeur Julio Barberis,
dans un article publié à l'Annuaire français de droit international en 1984, «une prescription n'a de
sens que si ce qu'elle dispose peut être ou non suivi» («Le concept de «traité international» et ses
limites», A.F.D.I. 1984, p. 254); et, comme il l'explique avec humour, «Les dispositions prévoyant
comme condition d'application une situation qui est naturellement impossible n'ont pas ... une
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fonction de prescription. Tel serait le cas, par exemple, de dispositions fixant les obligations des
capitaines de navires marchands au cas où ils trouveraient des sirènes en haute mer, ou celles
établissant des règles de trafic aérien pour les sorcières volant sur leur manche à balai.» (Ibid.)
C'est, malheureusement, à un exercice de ce genre que le Portugal invite l'Australie et la Cour.
Mais, n'en déplaise à Giraudoux, le droit n'est pas une école de l'imagination. Nous ne sommes pas
au concours Jessup - Moot Court competition - ou au concours Rousseau, occupés par un procès
fictif devant une Cour fictive; de «vrais» Etats s'opposent devant la Cour mondiale sur des
problèmes réels qui se posent dans des circonstances concrètes.
5. Comme le rappelle l'article 26 de la convention de Vienne sur le droit des traités : «Tout
traité en vigueur lie les Parties et doit être exécuté par elles de bonne foi» et, comme le proclame
clairement l'article 94 de la Charte des Nations Unies, «Chaque Membre des Nations Unies s'engage
à se conformer à la décision de la Cour internationale de Justice dans tout litige auquel il est partie.»
(Les italiques sont de nous.)
Or, si l'Australie avait conclu avec le Portugal un traité conforme aux voeux de celui-ci, ou si
la Cour faisait droit à ses conclusions, le Portugal, comme l'Australie d'ailleurs, serait, tout
simplement, dans l'impossibilité absolue d'exécuter le traité ou de se conformer à l'arrêt de la Cour.
Celui-ci n'aurait pas les «conséquences pratiques» qui font l'objet même de la fonction judiciaire
comme la Cour l'a rappelé dans l'affaire du Cameroun septentrional, arrêt, (C.I.J. Recueil 1963,
p. 34).
6. Je sais bien, Monsieur le Président, que le Portugal ne veut pas entendre parler d'effectivité
qui, selon lui, «en elle-même ne produit pas de conséquences juridiques» (réplique du Portugal,
p. 184, par. 6.52). Mais ceci n'est pas exact.
Certes, comme l'a dit le professeur Rosalyn Higgins jeudi dernier, «Political realities only
become legal effectivités by reference to the rules of international law.» (CR 95/5, p. 11.) Mais,
d'une part, pour ce qui nous intéresse en ce moment, ce n'est pas tant l'effectivité de la présence
indonésienne qui importe - aussi pesante que puisse être cette présence - que la totale ineffectivité de
celle du Portugal; et, d'autre part et surtout, il existe dans ces domaines, des «rules of international
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law», des règles précises, bien établies, qui tirent des conséquences fermes de cette absence
d'effectivité.
Comme on l'a écrit, un Etat ne peut prétendre à la possession d'un titre territorial
«que s'il déploie dans la réalité des faits l'exercice exclusif des compétences
souveraines à l'intérieur dudit territoire, non seulement par l'édiction de règles et de
normes obligatoires, mais aussi par leur application effective» (Pierre-Marie Dupuy,
Droit international public, Dalloz, Paris, 1993, p. 26; les italiques sont de nous).
Et c'est à juste titre qu'un autre auteur a souligné
«the importance, both in the creation of title and of its maintenance, of actual effective
control» (Sir Robert Jennings, The Acquisition of Territory in International Law,
Manchester U.P., 1963, p. 4).
Max Huber ne disait pas autre chose dans sa célèbre sentence dans l'affaire de l'Ile de Palmas :
«territorial sovereignty cannot limit itself to its negative side, that is to excluding the
activities of other States» (C.P.A., sentence du 4 avril 1928, RSA II, p. 839).
Or c'est très précisément ce à quoi vise l'action du Portugal : il ne peut, concrètement, exercer
aucun droit à Timor, mais il entend empêcher l'autre Etat riverain d'exercer les siens, chez lui.
Même si le traité australo-indonésien permettait à l'Australie de bénéficier de ressources naturelles
appartenant au peuple timorais - ce qui n'est pas -, même dans ce cas, les prétentions exclusivement
négatives du Portugal ne pourraient être admises. L'effectivité n'est pas autre chose que la capacité
réelle d'exercer toutes les fonctions étatiques : le maintien de la sécurité et de l'ordre à l'intérieur,
mais aussi l'exécution des engagements extérieurs (cf. Nguyen Quoc Dinh et as., Droit
international public, LGDJ, 1994, p. 407).
C'est que, écrit le professeur Jean Combacau,
«[d]es principes comme le respect des engagements conventionnels ..., des mécanismes
comme l'obligation de vigilance, impliquent que chaque Etat puisse faire crédit
aux autres de leur aptitude à user de leurs pouvoirs internes dans la mesure nécessaire
au respect de leurs obligations internationales» (in J. Combacau et S. Sur, Droit
international public, Monchrestien, Paris, 1993, p. 269-270).
Or, précisément, le Portugal n'a pas cette capacité de se lier, indépendamment des raisons plus
précises expliquées par M. Staker hier, il n'a pas cette capacité d'exécuter les engagements qu'il
prétend imposer à l'Australie de contracter avec lui. L'Australie ne dit pas qu'ex facto jus oritur
mais qu'ex absentia jus non oritur ou, plutôt que l'absence, que l'ineffectivité portugaises le privent,
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lui, Portugal, dans cette circonstance particulière en tout cas, de toute capacité de contracter.
7. Le Portugal n'est pas là. Il est à plus 15 000 kilomètres du territoire sur lequel il prétend
exercer ses droits; il est à un «demi-monde» de là; il n'exerce absolument aucun droit; et,
concrètement, il lui est impossible d'en exercer; il ne peut plus y assumer non plus aucune
responsabilité.
Dès lors, un traité fût-il conclu avec lui, il ne pourrait évidemment le mettre en oeuvre et
l'accord serait, pour les deux parties, condamné à n'être qu'un chiffon de papier. Pour les deux
parties - car l'Indonésie, elle, est bien présente et ne laisserait certainement pas l'Australie et le
Portugal porter atteinte à ce qu'elle considère être ses droits et elle a, en effet, les moyens de les en
empêcher.
Ce n'est pas l'analyse du Portugal. Pour lui : «Qu'à cela ne tienne; il suffit de ne pas explorer,
ni exploiter.»
C'est une réponse facile lorsque, de toutes manières, on se trouve à mille milles et plus du
théâtre des opérations et que l'on ne peut, de toute façon, avoir le moindre espoir, ni immédiat ni
lointain, d'accéder à ces ressources. Mais c'est surtout une réponse qui ne tient aucun compte des
droits, ceux-là à la fois réels et réalistes, de l'Australie.
Et qu'on ne fasse pas dire à l'Australie ce qu'elle ne dit pas, Monsieur le Président. Le
Portugal a inventé une «défense» de l'Australie, je ne dis pas «perfide» - ce ne serait pas dans la
manière de ma collègue et adversaire, et de ce fait, deux fois «néanmoins amie», le professeur
Rosalyn Higgins - mais enfin une thèse qui déforme gravement celle que soutient l'Australie. Selon
elle, la Partie australienne s'abriterait derrière l'argument de nécessité (CR 95/5, p. 14-15). Ce n'est
pas du tout ce dont il s'agit. La nécessité est, comme l'indique l'article 33 de la première partie du
projet d'articles de la Commission du droit international sur la responsabilité des Etats une
«circonstance excluant l'illicéité». Or l'Australie ne prétend excuser aucune illicéité ni s'abriter
derrière aucune cause exonératoire de responsabilité. Le fondement de la responsabilité de l'Etat en
droit international est son «fait internationalement illicite» ou celui qui lui est attribué, comme l'a
rappelé le professeur Pierre Dupuy la semaine dernière (CR 95/4, p. 48). Un Etat ne commet, bien
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sûr, aucune illicéité (aucun «illicite» comme dit le Portugal) lorsqu'il se borne à exercer un droit, un
droit qui lui appartient, comme à tout autre Etat. Nul besoin dès lors de cause exonératoire ou de
circonstance excluant l'illicéité.
8. Tant dans ses écritures qu'en plaidoirie, le Portugal a longuement développé, sous une
forme d'ailleurs assez académique, une théorie de la souveraineté permanente sur les ressources
naturelles (voir notamment mémoire du Portugal, p. 100-114, par. 4.39-4.61 - notamment p. 113,
par. 4.59; p. 216-219, par. 8.15-8.21; réplique du Portugal, p. 167-170, par. 6.18-6.22; CR 95/3,
p. 22-23), à laquelle l'Australie peut sans doute globalement souscrire même si elle ne saurait le
suivre dans les conséquences qu'il en tire.
Mais cette présentation est extrêmement unilatérale. Si le Portugal évoque, au passage, la
«dualité du droit à la souveraineté permanente - un droit souverain des Etats et un droit des peuples»
(réplique du Portugal, p. 149, par. 5.67; voir aussi CR 95/3, p. 23), le Portugal s'étend longuement
sur ce second aspect mais manifeste une indifférence j'allais dire «souveraine», à l'égard du premier,
sauf à concéder du bout des lèvres qu'il peut appartenir à l'Etat d'exprimer le droit du peuple (CR
95/3, p. 23).
Or, si elle est indiscutablement un droit des peuples, la souveraineté permanente sur les
ressources et les richesses naturelles est aussi un droit des Etats. La première résolution de
l'Assemblée générale qui la consacre, la résolution 626 (VII) du 21 décembre 1952,
«Recommande ... à tous les Etats Membres de s'abstenir de tout acte direct ou
indirect destiné à empêcher un Etat quelconque d'exercer sa souveraineté sur ses
ressources naturelles.»
Tel est aussi le principe posé, par exemple, par la déclaration concernant l'instauration d'un nouvel
ordre économique international du 1er mai 1974 (par. 4, alinéa e)) ou par l'article 2, paragraphe 1er
,
de la charte des droits et devoirs économiques des Etats :
«Chaque Etat détient et exerce librement une souveraineté entière et permanente
sur toutes ses richesses, ressources naturelles et activités économiques, y compris la
possession et le droit de les utiliser et d'en disposer.» (Les italiques sont de nous.)
On trouve la même idée énoncée dans un très grand nombre de résolutions ou d'instruments
conventionnels, de la déclaration de Rio de 1992 (principe no
2) à la convention de Vienne de 1978
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sur la succession d'Etats en matière de traités (art. 13), etc.
Et si, comme le Portugal se plaît à le souligner (mémoire, par. 4.42, p. 102; réplique,
par. 5.66, p. 149; CR 95/3, p. 23), la célèbre résolution 1803 (XVII) du 14 décembre 1962,
reconnaît «le droit de souveraineté permanente des peuples et des nations [terme ambigu], sur leurs
richesses et leurs ressources naturelles», elle ajoute aussitôt que ce droit «doit s'exercer dans l'intérêt
du développement national et du bien-être de la population de l'Etat intéressé»; et son préambule
qualifie le droit, des Etats toujours, sur leurs ressources naturelles de «droit inaliénable».
9. Bien entendu, et l'Australie ne le conteste nullement, ce droit de souveraineté permanente a
été conçu, prioritairement même si pas exclusivement, comme un instrument de protection des pays
en développement. Il n'en reste pas moins qu'il appartient à tous les Etats. Comme on l'a écrit,
«en élaborant ce nouveau concept de souveraineté, le Tiers Monde ... n'a pas recherché
exclusivement son propre développement; encore moins a-t-il visé son développement
exclusif au détriment de celui des pays industrialisés» (Mohammed Bedjaoui. Avantpropos
à Dominique Rosenberg, Le principe de la souveraineté des Etats sur leurs
ressources naturelles, LGDJ, Paris, 1983, p. 23).
Au surplus et de toutes manières, comme je l'ai rappelé tout à l'heure, ce sont deux Etats développés
qui se présentent devant vous.
Mais il y a plus.
Même dans sa version «droit des peuples», la souveraineté permanente sur les ressources
naturelles est un droit de tous les peuples. Comme le dit l'article 1er, paragraphe 2, de chacun des
deux pactes relatifs aux droits de l'homme de 1966, «Pour atteindre leurs fins, tous les peuples
peuvent disposer librement de leurs richesses et de leurs ressources naturelles.» (Les italiques sont
de nous.)
Il y a là un principe universel qui doit être appliqué à tous les Etats et à tous les peuples, sans
discrimination, conformément aux principes de l'égalité de droits des peuples et de l'égalité
souveraine des Etats qui, aux termes des articles 1er, paragraphe 2, et 2, paragraphe 1, de la Charte,
constituent un but des Nations Unies et un principe sur lequel l'Organisation est fondée.
10. Il en résulte quelque chose d'à la fois très simple et très important si l'on veut envisager
l'affaire qui nous réunit en toute objectivité :
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- en premier lieu, le peuple de Timor a, comme tout peuple, des droits sur ses ressources et
richesses naturelles, quel que soit l'Etat qui puisse exercer ces droits en son nom puisque, en
définitive, ce sont toujours les Etats qui exercent au nom du peuple les droits de souveraineté
permanente; et c'est bien, en effet, ce que le Portugal prétend faire dans le cadre de cette instance
aussi discutables que soient, en l'espèce et aujourd'hui, ses prétentions sur le plan juridique; et,
- en second lieu, et c'est le point qui nous intéresse pour l'instant, l'Australie aussi bénéficie de
droits de souveraineté permanente sur ses ressources et ses richesses naturelles, et elle peut en
revendiquer l'exercice à la fois en tant qu'Etat souverain et au nom du peuple australien qui, lui
aussi, comme tous les autres peuples, en bénéficie.
11. En concluant le traité du 11 décembre 1989 - j'ose à peine ajouter «avec l'Indonésie»
puisque le Portugal veut nous interdire de parler de cette partie absente ... -, en concluant ce traité
donc, l'Australie n'a fait qu'exercer un droit lui appartenant. En même temps, elle s'est acquittée d'un
devoir, celui qui lui incombe à l'égard du peuple australien, de favoriser son développement, puisque,
comme le rappelle l'article 3, paragraphe 1, de la Déclaration sur le droit au développement adoptée
par l'Assemblée générale le 4 décembre 1986,
«Les Etats ont la responsabilité première de la création des conditions nationales
et internationales favorables à la réalisation du droit au développement»,
droit inaliénable de l'homme et des peuples (art. 1er
, par. 1).
Tel est précisément l'objet du traité de 1989 dont le préambule affirme la détermination des
parties
«to co-operate further for the mutual benefit of their peoples in the development of the
resources of the area of the continental shelf yet to be subject of permanent continental
shelf delimitation between their two countries» (alinéa 6).
12. Ainsi, le traité a été, pour l'Australie, le moyen, le seul moyen envisageable en pratique, de
mettre en oeuvre le droit subjectif que le droit international lui reconnaît, et qu'il reconnaît au peuple
australien, de souveraineté permanente sur les ressources et les richesses naturelles de son plateau
continental.
À cela, si je le comprends bien, le Portugal oppose deux objections :
- en premier lieu, l'Australie pouvait certes conclure un accord international à cette fin, mais elle
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devait le faire avec lui, Portugal et non avec ..., j'allais m'oublier, Monsieur le Président, et
prononcer le mot «Indonésie» !; et
- en second lieu, en concluant ce traité, l'Australie aurait disposé de ressources ne lui appartenant
pas (voir par exemple CR 95/2, p. 37 ou CR 95/4, p. 71)
Puisque je n'aurais pas dû dire «Indonésie», Monsieur le Président, je ne reviens pas sur le
fait, déjà largement débattu, que le Portugal s'est, s'il veut rester cohérent, interdit la première
objection. Mais, tout de même, s'il y a là une illicéité, c'est bien parce que l'Australie a conclu le
traité de 1989 avec ... l'Indonésie et on en revient toujours à cela ! Et c'est, décidément, très
important car, si un traité de ce type avait pu être conclu avec le Portugal, c'est bien que c'est
uniquement la capacité de l'Indonésie, partie absente, que conteste le Portugal. Le professeur
Crawford a exposé ce point essentiel lors de l'audience de mardi dernier. Au surplus, c'est l'Indonésie
qui a cédé ces droits dont, en effet, légalement ou non, elle disposait; elle et pas l'Australie. J'en ai
parlé lors de ma précédente plaidoirie.
13. Je passe donc à la seconde objection portugaise. Elle est, à la fois, contradictoire en ellemême
et incompatible avec la première. Si, en effet, le Portugal admet qu'un accord était nécessaire -
et il l'admet : sa troisième conclusion (et, en partie, sa cinquième conclusion, sous la lettre
a)) l'impliquent nécessairement (voir aussi le mémoire portugais, par. 8.18, p. 218 et la réplique,
par. 6.74, p. 194) - puisque, donc, le Portugal admet la nécessité d'un accord, c'est évidemment parce
qu'il considère que la consistance ou mieux,
peut-être, la territorialité des ressources naturelles en cause étaient incertaines. Il n'est donc pas
possible d'affirmer que celles-ci «appartiennent», par la grâce d'une espèce de droit naturel, à l'une
ou l'autre des Parties. Leurs prétentions s'opposent et c'est tout ce que l'on peut dire. Et le Portugal
lui-même admet cela puisque, par la voix de son très éminent coagent, le professeur Sérvulo Correia,
il reconnaît qu'il s'agit «to prevent Australia from disposing of petroleum resources which might be
subject to East Timorese permanent sovereignty» (CR 95/2, p. 45; les italiques sont de nous).
«Which might be», «qui pourraient être» voilà au moins l'aveu très franc d'une incertitude !
Et quelle incertitude !
- 18 -
Le 1er février, Me Galvão Teles est venu dire à cette barre que c'est en effectuant des
«prélèvements»" «au nord de la ligne de 200 milles mesurés à partir des lignes de base
australiennes», que l'Australie porterait atteinte aux droits portugais et timorais (CR 95/4, p. 72;
les italiques sont de nous). Soit dit incidemment, elle n'effectue aucun prélèvement, mais passons...
Ce qui nous importe pour l'instant, c'est que le coagent du Portugal déclare que ce qu'il appelle
l'«emprise directe» de l'Australie «sur les ressources de Timor oriental» commence au-delà de la
ligne se trouvant à 200 milles marins des lignes de base australiennes et cette ligne est figurée en
rouge sur la deuxième carte incluse dans le dossier que l'Australie a remis à la Cour et à la Partie
portugaise. Ingénument, nous pensions que c'était la thèse de la Partie portugaise.
Pas du tout, vient dire le professeur Higgins le lendemain, 2 février ! rien, selon cet autre
conseil du Portugal, n'autorise «Australia to seek access, through arrangements with a third party, to
oil reserves on the East Timor side of the line» - et il s'agit cette fois, Monsieur le Président, de la
ligne d'équidistance, de la «median line» (CR 95/5, p. 32; les italiques sont de nous).
Si les conseils du Portugal ne sont pas d'accord entre eux - et sur ce point, qui n'est tout de
même pas indifférent -, il paraît difficile qu'ils persuadent l'Australie - et la Cour - de l'évidence de
leur thèse. Quelle thèse d'ailleurs ?
Car cette dissension interne montre quelque chose d'important : l'étendue de la zone maritime
sur laquelle chacun des pays se faisant face peut prétendre à des droits souverains est pour le moins
incertaine. Le Portugal avance deux thèses incompatibles; l'Australie en soutient une troisième...
14. D'une certaine manière, le problème se pose dans des termes assez voisins de celui qui
divisait la Guinée-Bissau et le Sénégal dans l'affaire qui a donné lieu à la sentence arbitrale du 31
juillet 1989 dans laquelle la Guinée-Bissau estimait que l'accord franco-portugais du 26 avril 1960
était incompatible avec le droit de souveraineté sur les ressources de son plateau continental.
Je ne pense pas, Monsieur le Président, que je vous apprendrai que le tribunal et l'arbitre
dissident ont analysé ce problème en des termes très différents; mais, en ce qui concerne l'affaire qui
nous occupe aujourd'hui, l'une et l'autre de ces analyses opposées contredisent la thèse portugaise.
Au paragraphe 39 de la sentence, il est dit :
«Avant l'Accord, les limites maritimes n'étaient pas fixées et, par conséquent,
- 19 -
aucun des deux Etats ne pouvait affirmer qu'une fraction déterminée de la zone
maritime était «sienne». D'un point de vue logique, la Guinée-Bissau ne peut soutenir
que la norme qui a déterminé quel était son territoire maritime (l'Accord de 1960) lui a
enlevé une partie du territoire maritime qui était le «sien».» (Tribunal arbitral pour la
détermination de la frontière maritime, Guinée-Bissau/Sénégal, sentence du
31 juillet 1989.)
Ceci est la façon la plus directe de répondre à l'objection portugaise : aussi longtemps qu'il n'y
a pas eu d'accord, l'extension territoriale de la «souveraineté permanente» des deux parties demeure
indéterminée et le Portugal n'est pas fondé à proclamer a priori que le traité de 1989 porte atteinte
aux droits portugais ou timorais.
15. Il est cependant une autre manière de voir, que l'arbitre dissident a exposée de la façon
suivante : chaque peuple ou chaque Etat a un droit «inhérent» sur ««son» domaine maritime même si
celui-ci n'est pas encore concrètement délimité» (p. 77, par. 1). En apparence, un tel raisonnement
contredit moins manifestement la thèse du Portugal que le précédent et M. Galvão Teles, pour toute
démonstration, de citer in extenso le passage pertinent de l'opinion dissidente (CR 95/3, p. 77), mais
en se gardant bien d'en faire application en l'espèce, à notre affaire.
Bien entendu, s'il n'existe pas de contestation sur l'étendue de ce domaine, la mise en oeuvre de
ce principe va de soi. En revanche, en cas de différend, sa mise en oeuvre exige que l'on procède à la
délimitation des domaines maritimes respectifs des Etats en litige. Et c'est précisément ce à quoi
l'arbitre dissident consacre la seconde partie de son opinion (p. 145-208 de la sentence),
conformément au mandat confié au tribunal par le Compromis.
Mais cette délimitation est impossible à la Cour dans notre espèce : ni le Portugal, ni
l'Australie ne le lui ont demandé et les Parties sont d'accord pour dire que tel n'est pas l'objet de la
présente instance (mémoire, p. 196, 199 et 200, par. 7.03, 7.07 et 7.08; contre-mémoire, p. 167, par.
376; réplique, p. 193, par 6.73; duplique p. 153, 154 et 156, par. 2.72, 2.73 et 2.83; CR 95/3, p.
76). Dès lors, l'allégation du Portugal selon laquelle l'Australie «pillerait» (would «plunder») les
ressources timoraises demeure une pure affirmation sans aucune base juridique et, par sa propre
attitude, le Portugal empêche la Cour d'en apprécier le bien ou le mal-fondé.
16. Avant de poursuivre, Monsieur le Président, une parenthèse s'impose.
En apparence, l'attitude des deux Parties est, sur ce point, identique : l'une et l'autre entendent
- 20 -
exclure la compétence de la Cour à cet égard. Mais je ne suis pas sûr que, même sur ce point, je
puisse partager la vision, modérément optimiste, de M. Galvão Teles qui se félicitait de «trouver
enfin une proposition ... commune», fût-elle «négative» (CR 95/3, p. 76) - car cet accord apparent
cache des motivations profondément différentes.
Sauf à agir de manière totalement illogique et incohérente, l'Australie ne pouvait évidemment
pas demander à la Cour de fixer la limite du plateau continental entre elle-même et le Portugal
puisqu'elle considère que l'ancienne puissance coloniale du Timor oriental n'est plus à même
d'exercer aucun droit territorial dans la région, en tout cas pas celui de participer à une telle
délimitation.
L'attitude du Portugal est plus surprenante. Voilà un Etat qui se plaint de ce que l'Australie ne
traite pas avec lui; qui affirme qu'il existe des «concours de droits ou de prétentions sur les espaces
maritimes» entre les deux pays; qui prétend vouloir régler complètement le différend qui, selon lui,
les oppose sur ce point; et qui, à cette fin, saisit la Cour; mais qui, en même temps, lui interdit de se
prononcer sur un point qu'il dit être à la fois en litige et incertain (CR 95/2, p. 45) et qui, à vrai dire,
conditionne toute l'affaire si, en tout cas, on se place dans sa logique.
Il doit bien y avoir une explication à une telle incohérence. Et, en effet, je la crois assez
évidente : le Portugal sait à quel point sa position sur l'étendue du plateau continental du Timor est
contraire aux principes les mieux établis du droit de la délimitation maritime.
17. Monsieur le Président, je ne me hasarderai pas à entrer dans le fond de ce débat
puisqu'aussi bien, les deux Parties en sont d'accord, il n'appartient pas à la Cour de délimiter le
plateau continental. Donc, refermant cette parenthèse, j'en reviens au constat : certes, et l'Australie
et Timor, quel que soit, encore une fois, le souverain sur ce territoire, ont des droits de souveraineté
permanente sur les ressources naturelles de leur plateau continental respectif, mais la Cour n'est pas
appelée à se prononcer sur l'étendue de ceux-ci.
Dès lors, de deux choses l'une :
- ou bien, conformément aux vues des arbitres majoritaires dans l'affaire Guinée-Bissau/Sénégal,
l'extension territoriale de ces droits est indéterminée faute d'accord valide ou, si l'on préfère, faute
- 21 -
pour la Cour de pouvoir tenir compte de l'accord australo-indonésien de 1989;
- ou bien, si l'on suit la position de l'arbitre dissident, ces droits sont condamnés à demeurer
contestés, faute pour la Cour de pouvoir procéder à une délimitation ex novo.
Dans l'une et l'autre de ces hypothèses, on aboutit à une impasse et il est en tout cas
impossible d'imputer à l'Australie une quelconque atteinte aux droits souverains qu'aurait le peuple
de Timor sur les ressources naturelles de «son» - je mets le mot entre guillemets avec la bénédiction
exceptionnelle du professeur Crawford, qui n'aime pas les guillemets, comme vous le savez - plateau
continental.
18. En revanche, et comme je l'ai dit tout à l'heure, force est de constater qu'en concluant le
traité de 1989, l'Australie n'a fait, pour reprendre l'expression de l'Assemblée générale dans la
résolution 3171 (XXVIII) du 17 décembre 1973, qu'exercer ses propres
«droits inaliénables, à la souveraineté permanente sur toutes [ses] ressources naturelles
... du fond des mers et de leur sous-sol à l'intérieur des limites de [sa] juridiction
nationale et dans les eaux sous-jacentes».
Etant entendu, comme je viens de le démontrer, que ces limites sont soit indéterminées, soit
indéterminables. Dès lors, le procédé retenu, la conclusion d'un accord, était le seul compatible avec
le droit international, c'est le principe qui résulte de la jurisprudence de la Cour, que synthétise
l'article 83, paragraphe 1, de la convention de Montego Bay et que prévoyait déjà l'article 6,
paragraphe 1, de la convention de Genève de 1958 sur le plateau continental.
Peu importe, encore une fois, le partenaire - c'est un sujet tabou -, le fait est que l'Australie
devait conclure un accord pour déterminer l'étendue de ses droits et elle ne pouvait le faire, je l'ai
montré aussi, qu'avec l'Etat exerçant un contrôle effectif sur les côtes et les eaux faisant face aux
siennes.
Encore convient-il de rappeler l'objet précis de ce traité, sur lequel le professeur Bowett
reviendra plus longuement dans un instant : il ne s'agit pas, les Parties en conviennent (mémoire,
p. 56-57, par. 2.05; contre-mémoire, p. 171 et 174, par. 385, 404 et 405; réplique, p. 169, par. 6.20;
CR 95/3, p. 76), d'un accord sur la délimitation du plateau continental, mais, conformément à ses
- 22 -
termes mêmes, d'un accord provisoire dans l'attente d'une telle délimitation. L'alinéa premier
du préambule, les paragraphes 3 et 4 de l'article 2, ou l'article 34 ne laissent aucun doute sur ce
point. Il s'agit très exactement d'un «arrangement provisoire de caractère pratique» conclu dans
l'attente d'un accord définitif, conformément aux directives de l'article 83, paragraphe 3, de la
convention des Nations Unies sur le droit de la mer, que vise expressément le premier alinéa du
préambule du traité.
19. Comme tout traité, celui du 11 décembre 1989 bénéficie d'une présomption de validité. Ce
principe est tellement évident qu'il est difficile de trouver des précédents jurisprudentiels en ce sens,
mais à ma connaissance, aucune voix discordante ne s'est fait entendre dans la doctrine et comme l'a
fait remarquer le professeur Paul De Visscher, «(s)emblable présomption est dans la logique du
système de l'article 65 [de la Convention de Vienne de 1969] qui place le bénéficiaire des causes de
nullité dans la situation d'un demandeur» (Cours général de droit international public, RCADI 1972-
II, vol. 136, p. 930 - voir aussi Sir Ian Sinclair, The Vienna Convention on the Law of Treaties,
Manchester U.P., 1984, p. 162).
On peut d'ailleurs noter aussi qu'avant d'énoncer le principe sous la forme négative que lui
confèrent les articles 42 et 65 de la convention sur le droit des traités, la Commission du droit
international avait, dans un premier temps, envisagé de le formuler positivement (voir notamment le
2
e
rapport de sir Humphrey Waldock, Annuaire de la Commission du droit international, 1963,
vol. II, p. 40 et les discussions de la Commission, ibid., p. 318-319 et 1966, vol. I, 1ère partie, p. 4-
9) et qu'elle n'y a renoncé que parce qu'une majorité de ses membres, suivis par la conférence de
Vienne, ont estimé qu'il s'agissait d'un truisme superflu et qu'il était évident qu'un traité était fait
pour s'appliquer (voir Annuaire de la Commission du droit international, 1966, vol. I, p. 128-129).
Au demeurant, l'Australie convient bien volontiers que cette présomption n'est pas
irréfragable. Mais elle ne tombe qu'en cas de contrariété avec une norme impérative du droit
international général. Sur ce point, le Portugal ne semble pas avoir fait sa religion puisque, après
avoir affirmé qu'il était indifférent à sa thèse de savoir si les normes qu'il invoque ont ou non un
caractère impératif (cf. mémoire du Portugal, p. 123-124, par. 4.71; CR 95/3, p. 34), il les déclare
- 23 -
expressément cogens par la voix du professeur Rosalyn Higgins (cf. CR 95/5, p. 26).
James Crawford a montré, mardi dernier, les conséquences qui en résulteraient inévitablement en ce
qui concerne l'irrecevabilité de la requête portugaise (CR 95/8, p. 50-60). Mais, indépendamment de
ceci, et de toutes manières, il faut remarquer que ce serait «norme impérative contre norme
impérative», «souveraineté permanente de l'Australie contre droits de souveraineté du Portugal».
Je sais bien, Monsieur le Président, que le Portugal distingue la validité du traité de la licéité
de sa conclusion (mémoire du Portugal, p. 75, par. 3.06; réplique du Portugal, p. 14, par. 2.08,
p. 16-19, par. 2.11, 2.12, 2.14, p. 21, par. 7.21; CR 95/6, p. 32-33); mais comment la conclusion
d'un traité valide pourrait-elle être «illicite» dès lors que
«la faculté de contracter des engagements internationaux est précisément un attribut de
la souveraineté de l'Etat" (affaire du Vapeur Wimbledon, arrêts, C.P.J.I. série A no
1,
p. 25) et qu'en l'espèce, la conclusion d'un traité était indispensable et même
juridiquement obligatoire.
Quoi qu'il en soit, la validité de l'accord australo-indonésien paraît difficilement contestable.
20. Et ce n'est donc qu'avec beaucoup d'hésitation, Monsieur le Président, que je m'engage,
brièvement et pour surplus de droit, dans une discussion qui a opposé les Parties au stade de la
procédure écrite et qu'a rouverte Me Galvão Teles la semaine dernière (CR 95/3, p. 73-81). Le traité
australo-indonésien du 11 décembre 1989 répond-il à l'exigence du résultat équitable, que la
jurisprudence de la Cour aussi bien que l'article 83 de la convention de Montego Bay assignent
comme objectif à un accord de ce type ?
La réponse à cette question, qui ne fait guère de doute, doit tenir compte d'une considération
fondamentale, qui «irrigue», si j'ose dire, tout le droit de la délimitation des espaces marins : les
règles pertinentes n'ont que le caractère de directives générales et n'enferment pas les Etats dans un
carcan juridique rigide. Les Etats conservent en la matière une compétence discrétionnaire -
«discrétionnaire» au sens du droit administratif français; c'est-à-dire qu'ils sont tenus d'aboutir à une
solution équitable, mais que cette norme «laisse aux Etats ou au juge le soin de lui donner un contenu
précis» (Plateau continental (Jamahiriya arabe libyenne/Malte, arrêt, C.I.J. Recueil 1985, p. 30).
En outre, comme l'a relevé le professeur Prosper Weil, «le droit de la délimitation ne revêt à l'égard
des Etats qu'un caractère supplétif» (Perspectives du droit de la délimitation maritime, Pédone,
- 24 -
Paris, 1988, p. 13).
Faute de quoi, l'exigence fondamentale d'un accord ne se justifierait d'ailleurs nullement.
Pourquoi négocier s'il n'y a rien à décider ? Le droit international fixe les directives générales,
celles-ci n'ont pas un caractère obligatoire ni, moins encore, impératif et laissent aux Etats, dans leur
application, une marge d'appréciation à laquelle, comme elle l'a indiqué dans l'affaire du Plateau
continental de la mer du Nord, la Cour n'entend pas se substituer «par une indication détaillée
des méthodes de délimitation», qui relèvent des Etats intéressés (C.I.J. Recueil 1969, p. 46).
Allant plus loin, votre haute juridiction a même envisagé, dans son arrêt du 3 juin 1985, qu'il
n'y avait «peut-être pas de limite juridique aux considérations dont les Etats sont en droit de tenir
compte» (affaire du Plateau continental (Jamahiriya arabe libyenne/Malte), C.I.J. Recueil 1985,
p. 40).
C'est à la lumière de ces indications qu'il convient d'apprécier le traité du 11 décembre 1989.
21. Le Portugal s'insurge contre le traité au prétexte qu'il ne fait pas droit aux revendications
qu'il avait fait valoir en son temps, lorsque, dans les années soixante-dix, des contacts préliminaires
avaient eu lieu entre lui et l'Australie. Certes ! Mais il est de l'essence d'un accord de ce type et, à
vrai dire, de tout traité international, de réaliser un compromis entre les prétentions opposées des
parties. Et c'est très précisément ce que fait le traité de 1989.
A cet égard, plusieurs points, sur lesquels le professeur Bowett reviendra en partie de manière
plus détaillée tout à l'heure, doivent être soulignés :
- 1° Le Portugal a manifesté fort peu d'enthousiasme pour négocier l'accord auquel il dit
maintenant aspirer, à l'époque où il en avait, concrètement, la possibilité. Ainsi, il se refusa à ouvrir
les négociations en vue de la conclusion d'un accord de délimitation comme l'Australie le lui avait
proposé par sa note du 5 mars 1973 (mémoire du Portugal, p. 197-198, par. 7.04, et annexe IV.7,
vol. V, p. 289 et annexe IV.11, ibid., p. 327).
- 2° Le traité de 1989 n'entérine pas davantage le point de vue de l'Australie qu'il ne reflète les
revendications indonésiennes. Décidément, il s'agit d'un compromis. Et, à cet égard, le Portugal
commet, volontairement ou non, une grave confusion. Aux pages 191 à 193 de sa réplique, par
- 25 -
exemple, il affecte de considérer que les limites de la zone de coopération sont des limites
territoriales et il insiste sur le fait que la limite nord «de l'aire C visée dans l'«accord» est une ligne
simplifiée de l'axe bathymétrique de la «fosse de Timor»» (réplique du Portugal, p. 191, par. 6.69;
voir aussi p. 192, par. 6.70; CR 95/3, p. 78-79).
Telle est, en effet, la ligne extrême des revendications australiennes qui correspond à la ligne
simplifiée qui partage en deux la fosse de Timor. Elle apparaît, coloriée en violet sur la deuxième
carte qui se trouve dans votre dossier, celle que j'ai mentionnée tout à l'heure.
Mais, à l'inverse, la limite sud de l'aire B «correspond à une ligne de 200 milles à partir du
Timor oriental» (ibid.), c'est-à-dire, à la ligne extérieure des prétentions portugaises puis
indonésiennes - ces prétentions sont identiques. Cet équilibre aussi est le signe d'un compromis
équitable et même, d'un compromis plutôt désavantageux pour l'Australie.
- 3° En effet, ce résultat, je crois, est infiniment moins favorable à l'Australie que ne l'avaient
été ceux des accords de 1971 et 1972 avec l'Indonésie dont le résultat apparaît également, en noir,
sur la carte que j'ai mentionnée (c'est la ligne qui porte la légende «Agreed Seabed Boundary»). Sauf
à remettre en cause tous ces accords de délimitation entre les deux Etats, ceci montre bien que le
traité de 1989 est, si je peux dire, «moins équitable» pour l'Australie que pour son partenaire et que,
s'il est porté atteinte aux droits de souveraineté permanente de quelqu'un, ce sont, assurément, ceux
de l'Australie qui sont en cause et non pas ceux du Portugal.
- 4° Cet Etat, le Portugal, pose avec beaucoup de légèreté le postulat selon lequel l'Indonésie
aurait été, pour l'Australie, un interlocuteur facile et accommodant (mémoire du Portugal, p. 53,
par. 2.03; réplique du Portugal, p. 195, par. 6.74). Il n'en va évidemment pas ainsi. L'Indonésie est
une puissance régionale de premier plan avec laquelle il faut compter et dont la présence effective est
assurément bien plus marquée que ne l'a jamais été celle de la puissance coloniale somnolente
qu'était le Portugal qui s'est toujours largement désintéressée de sa lointaine possession. La longueur
des négociations qui ont abouti à la conclusion du traité de 1989 montre du reste combien les
négociations furent âpres et difficiles.
On peut du reste relever au passage que, dans les zones marines contestées et potentiellement
- 26 -
riches en ressources pétrolières, les divergences de position entre les Etats côtiers trouvent souvent
une solution juridique dans le gel des prétentions territoriales (comme ici) et dans l'établissement d'un
régime conjoint d'exploitation (comme ici) (voir les exemples donnés par Henry Burmerster, The
Timor Gap Treaty, Australian Mining and Petroleum Law Association Yearbook, 1990, p. 235;
H. Fox et as., Joint Developpement of Offshore Oil and Gas, British Yearbook of Comparative Law,
1989, p. 53-114, ou Ian Brownlie, Legal Status of Natural Resources in International Law, RCADI
1979-I, vol. 162, p. 290-291).
Le traité de 1989 doit être, Monsieur le Président, considéré pour ce qu'il est : un compromis,
certainement «équitable» au sens de ce mot dans le cadre du droit des espaces marins qui laisse aux
Etats un pouvoir d'appréciation en la matière, mais un compromis qui, globalement, n'est pas très
favorable à l'Australie - ni par rapport à ce qu'elle avait obtenu à la suite de ses précédentes
négociations avec l'Indonésie, ni par rapport aux règles générales applicables en la matière, ni par
rapport aux droits qu'elle a constamment affirmé détenir.
22. Dans ses écritures, le Portugal a, longuement, tenté de démontrer qu'il ne s'agissait pas de
droits, mais de simples prétentions : il ne s'agirait «pas de droits établis, mais de prétentions que le
Portugal a contestées et conteste toujours» (réplique du Portugal, p. 191, par. 6.68).
L'Australie maintient évidemment que ses prétentions correspondent à ses droits. Mais, pour
dire vrai, il n'est pas besoin de s'appesantir sur ce point dans le cadre de la présente affaire puisque,
on le sait, il ne s'agit pas pour la Cour, de procéder à une délimitation ex novo ni de confirmer une
délimitation existante.
Plus importante est l'idée qu'il s'agit, en effet, de revendications et, contrairement à ce
qu'affirme le Portugal (ibid. et réplique du Portugal, p. 191-192, par. 6.68-6.70), de revendications
anciennes et constantes.
Sans entrer dans tous les détails, il convient de rappeler que dès le 30 octobre 1970, le
ministre australien des affaires étrangères a déclaré devant la Chambre des représentants, que,
conformément aux dispositions de la convention de 1958 sur le plateau continental et
à la jurisprudence de la Cour de rendre son arrêt dans l'affaire du Plateau continental de la mer du
- 27 -
Nord.
«the rights claimed by Australia in the Timor area are based unmistakably on the
morphological structure of the sea bed, ... the Timor Trough thus breaks the continental
shelf between Australia and Timor, so that there are two distinct shelves, and not one
and same shelf separating the two opposite coasts. The fall-back median line between
the two coasts, provided for in the Convention in the absence of agreement, would not
apply for there is no common area to delimit.»
Cette position fut communiquée à l'ambassadeur du Portugal à Canberra par une note du
25 mai 1971 (mémoire du Portugal, vol. V, annexe IV.6, p. 287).
23. Pourquoi, Monsieur le Président, ceci présente-t-il de l'importance ?
Parce que cela établit que, contrairement à ce que laisse entendre le Portugal, de manière un
peu déplacée, l'Australie n'a nullement «profité de la situation» malheureuse du peuple timorais
(réplique du Portugal, p. 195, par. 6.75; voir aussi mémoire du Portugal, p. 53-55, par. 2.03). Elle
avait établi sa position avant que le Portugal soit évincé de Timor et elle souhaitait mener des
négociations avec lui sur cette question; c'est le Portugal qui s'est dérobé. Les événements qui se
sont déroulés ensuite et dans lesquels le Portugal porte une grande part de responsabilité ont conduit
l'Australie à attendre que la situation se stabilise, ceci au détriment de ses intérêts et de ceux du
peuple australien, de son développement et de ses droits de souveraineté permanente sur ses
ressources naturelles dont, de ce fait, l'exercice s'est trouvé paralysé. Puis, constatant que la
situation s'était stabilisée, l'Australie a entamé des négociations en vue de la délimitation de son
plateau continental avec la puissance côtière lui faisant face, la seule dont la présence effective
pouvait lui garantir l'exercice paisible et effectif de ses droits souverains.
Il se trouve que cette puissance est l'Indonésie. Et, sur ce point, on peut retourner contre le
Portugal l'argument qu'il répète à satiété : pour le problème qui nous intéresse, peu importe, en effet,
la personnalité de l'Etat cocontractant de l'Australie. Le fait est qu'en concluant cet accord, comme
les principes du droit de la mer lui en faisaient l'obligation, l'Australie a, tout simplement, exercé son
propre droit de souveraineté permanente sur ses ressources naturelles, qu'il lui appartient de protéger
au mieux de ses possibilités dans l'intérêt du développement du peuple australien. Du reste,
s'intéresser à l'autre cocontractant, c'est, de nouveau, se heurter au principe de l'Or monétaire.
24. Moyennant quoi, l'Australie ne peut laisser sans réponse sur le fond les allégations du
- 28 -
Portugal selon lesquelles, en concluant ce traité du 22 décembre 1989, elle se serait appropriée
indûment les ressources naturelles relevant de Timor.
En réalité, en se plaçant sur le terrain des «titres potentiels» qu'a invoqués Me Galvão Teles la
semaine dernière, il ne fait aucun doute que l'Australie a, très évidemment un tel titre et cela ressort à
l'évidence des dispositions de l'article 76, paragraphe 1, de la convention de Montego Bay,
disposition sur laquelle le coagent du Portugal a observé un silence prudent... Le professeur Bowett
va revenir sur ce point dans un instant, et montrer que le traité préserve soigneusement non
seulement les droits de l'Australie, mais aussi ceux de Timor. La consécration de la thèse portugaise
reviendrait, au contraire, à stériliser les premiers, ceux de l'Australie, sans garantir davantage les
seconds, ceux de Timor.
25. Toutefois, avant d'en terminer, Monsieur le Président, je souhaite, si vous m'y autorisez,
récapituler très brièvement les différents points que je pense avoir établis :
L'Australie l'a dit et répété : elle ne conteste nullement que, comme tout peuple, celui du Timor
oriental a le droit de disposer de lui-même; il bénéficie des droits de souveraineté permanente que
reconnaît aussi le droit international contemporain à tous les peuples. Le peuple australien a, lui
aussi, les mêmes droits, et l'Etat australien peut, et doit, les exercer en son nom. En négociant, en
concluant et en exécutant l'accord du 11 décembre 1989, le Gouvernement australien a usé de ces
droits et il s'est acquitté du devoir qui lui incombe envers le peuple dont il a la charge. Il s'est, au
surplus, conformé scrupuleusement aux principes, conventionnels et coutumiers, du droit de la
délimitation maritime.
Il se trouve que les côtes australiennes font face à celles du Timor oriental. Il se trouve que le
statut de ce pays est disputé entre l'ancienne puissance coloniale et l'Indonésie. Mais il se trouve
aussi que c'est celle-ci, et non celle-là, qui est présente; il y a là un fait qu'il est difficile de ne pas
reconnaître ou de ... «méconnaître».
Pragmatisme ? Oui, sans doute. Mais cynisme : non ! Car ce traité qui irrite tant le Portugal
n'est pas seulement conforme aux droits de l'Australie et du peuple australien, il respecte aussi les
droits et les intérêts du peuple de Timor, comme le professeur Bowett va le montrer maintenant.
- 29 -
Monsieur le Président, Messieurs de la Cour, je vous remercie bien vivement de m'avoir prêté
attention; et, Monsieur le Président, je vous prie de bien vouloir appeler à cette barre le
professeur Derek Bowett.
Le PRESIDENT : Merci, Monsieur le professeur Pellet. Je donne maintenant la parole au
professeur Derek Bowett.
Mr. BOWETT: Mr. President, Members of the Court.
1. The Effect of the Timor Gap Treaty
My task this morning is to explain the effect of the Timor Gap Treaty and, as Professor Pellet
has shown, the negotiations between Portugal and Australia over a maritime boundary revealed a
sharp difference of opinion over the extent of their respective rights. It must be added that
subsequent negotiations with Indonesia revealed the same difference, and Indonesia proved in
negotiations that it was just as tough as Portugal had been in defending the rights of the territory of
East Timor.
Portugal would have the Court believe that Australia preferred to negotiate with Indonesia:
that Indonesia was a "soft option"! Australia's experience is quite the reverse. Portugal might have
been a "soft option", for Portugal had no long-term interest in the area: its days in East Timor were
numbered. But Indonesia is an important State in the region, safeguarding its long-term interests.
The Gap Treaty is a compromise precisely because Indonesia refused to accept the Australian
position on delimitation and each party reserved its position over delimitation. The Court has only to
look at the delimitations agreed between Australia and Indonesia on either side of the Gap, in 1971
and 1972, to see that in negotiating the Gap Treaty Indonesia was adopting a far tougher stance.
Mr. President, both Parties were agreed in their written pleadings that this unresolved
difference of opinion over delimitation - what I may call the delimitation dispute - is not before the
Court.
However, in the course of its oral arguments, Portugal has developed an attack on the
Timor Gap Treaty (CR 95/2, pp. 37-45; CR 95/3, pp. 73-81) which essentially argues that, by
virtue of this treaty, Australia seeks to deprive the territory of East Timor, and its people, of
- 30 -
resources which attach to the territory under the principle of sovereignty over natural resources.
"Plunder" was the word used. For Professor Higgins it is plunder north of the median line (CR 95/5,
p. 32); for Mr. Galvão Teles it is plunder only north of Australia's 200-mile limit (CR 95/4, p. 73).
This new line of attack is not without its dangers for Portugal. This is a bilateral treaty. If
Australia has unlawfully acquired the resources of the territory thereby in breach of a rule of
jus cogens - that is the right of self-determination - it must follow that the other party, Indonesia, has
unlawfully ceded those resources to Australia in breach of the same rule of jus cogens. And that is a
finding of illegality by both parties - Indonesia and Australia - a finding which the Court cannot
make, given that Indonesia is not before it, or subject to the Court's jurisdiction. The treaty is, on
Portugal's own arguments (CR 95/5, p. 26) invalid. Still, Portugal has decided to run that risk.
But let me turn to the substance. Australia does not wish to hide behind this jurisdictional
objection so as to avoid facing Portugal's allegation of "plunder" on the merits.
Australia's position over many years prior to 1989 was that its shelf continued to the foot of
the continental slope - identified in this case by the bathymetric line along the Timor Trough. In
Australia's view, that position was consistent with the accepted definitions of the continental shelf in
terms of natural prolongation. That concept continues to form part of the definition of the limits of
the continental shelf in Article 76 of the 1982 Convention. Australia ratified that Convention in
October 1993 and is an original party to that Convention. So, if Article 76 is to be applied, it is
incorrect to state (see CR 95/3, p. 78) that Australia's claims or "potential title" must end at the
200-mile limit. The Court's dictum in Libya/Malta cited by Mr. Galvão Teles spoke of the
irrelevance of geomorphological features within 200 miles. It did not say that a State could not
claim beyond 200 miles, for that would be to contradict Article 76. We are, of course, not concerned
with water column rights based on exclusive economic zones. The treaty with Indonesia is only
concerned with petroleum resources in the sea-bed. Thus, there was nothing improper in Australia's
view of its entitlement, nothing illegal, or even avaricious, in making this claim.
True, there was an "opposite" State, an opposite coast with its own entitlements - East Timor -
but, in Australia's view that entitlement stopped at the Trough. Thus, East Timor's shelf ended at the
- 31 -
Trough, just as Australia's did. These were two different shelves, so in reality we were not facing a
problem of a delimitation between two opposite States abutting on the same shelf.
Certainly Portugal, and lately Indonesia, saw the position differently. They rejected the view
that, based on natural prolongation, there were two different shelves. The 1982 Convention accepted
that the continental shelf could, as an alternative, be defined by reference to distance. Both now
argued that, on the basis of the "distance principle", and, given that the total distance between the
coasts was less than 400 miles, the Trough should be ignored and a median line should be drawn.
But this is to ignore Australia's right, on the basis of the Article 76 definition, to rely instead on the
natural prolongation element of this definition, given that we are dealing with two separate shelves.
Both claims - Australia's and Indonesia's (the latter taking virtually the same position as
Portugal) - are quite genuinely made. It was for this reason that, failing agreement on a delimitation,
Australia and Indonesia defined the limits to the Zone of Co-operation on the basis of those claims.
Certainly, it was never Australia's view that East Timor had indisputable rights to areas south of the
Trough: quite the contrary.
I know of no case where a Court has ever challenged a delimitation agreement, let alone a cooperation
agreement, voluntarily reached between two coastal States, on the basis that it allows one
party to "plunder" the resources properly attaching to the other State. As I have said, Indonesia had
no reason for generosity towards Australia, and in fact struck a hard bargain.
The evidence so far suggests that, far from Australia profiting from the "plunder" of resources
belonging to East Timor, Australia will be the loser. As of last month all the drilling which has
revealed commercial prospects of oil has been in the Elang fields in Area A. So Australia now has
to accept joint control and equal sharing of economic benefits from resources Australia had
previously claimed to belong exclusively to it.
Mr. President, I will now return to the charges made by Portugal - and they are quite different
charges - in its submissions to the Court.
What is before the Court is whether either by negotiating the Timor Gap Treaty with
Indonesia or by implementing that Treaty, Australia has infringed the rights of the people of
- 32 -
East Timor or the powers of Portugal as an Administering Power.
Let me take the first allegation.
(a) Has the Gap Treaty infringed the rights of the people of East Timor?
As I said earlier, if Australia had done nothing, and refused to negotiate this agreement with
Indonesia, there would have been no chance of any exploitation of any of the disputed area: the
economic benefits to the people would have been nil.
Moreover, it is very doubtful whether Australia could, legally, have done nothing. Article 83,
paragraph 3, of the 1982 Law of the Sea Convention anticipates situations in which, for whatever
reason, agreement cannot be reached on delimitation. In such situations, States
"Shall make every effort to enter into provisional arrangements of a practical
nature and, during this transitional period, not to jeopardize or hamper the reaching of
the final agreement. Such arrangements shall be without prejudice to the final
delimitation".
The Gap Treaty is very much a provisional arrangement so that to this extent Australia has
fulfilled this obligation. The question is, has Australia, in so doing, violated the people's rights?
What, in fact, does the Treaty offer them? To answer this question, one has to distinguish
between the three different areas which can be seen on the maps B and C in your folder. The Zone
of Co-operation comprises three component areas, A, B and C. The Zone is bounded in the north by
a simplified bathymetric axis line and, in the south, by the 200-mile limit drawn from Indonesia's
base-lines.
Let me deal first with areas C and B, lying to the north and south of the Zone - I will leave
area A, the central area, until later. In a sense areas C and B were less controversial and each party
was prepared to accept that the area nearest to its coast should be administered under the national
law of that State. Thus, area C is administered under Indonesian law, and area B under Australian
law. Both States have well-developed legislation on petroleum exploration and exploitation.
Both States undertake to notify the other of any permits, leases or production licences they
grant in their areas. And under Article 4(1)(b) Australia agrees to pay to Indonesia ten per cent of
the gross resource rent tax it collects. Correspondingly, Indonesia agrees to pay Australia ten per
cent of the contractors' income tax it collects. In a sense, these payments reflect the maintenance of
- 33 -
the claims by the parties: Australia's claim to area C, and Indonesia's claims to area B.
For it must be remembered that the whole zone is an area of overlapping claims, claimed by
first Portugal and then Indonesia on the basis of the "distance principle", and by Australia on the
basis that all this, geomorphologically, is Australian shelf and, in any event, backed by a much
longer Australian coast. I may add that the Australian claim was formulated following the Court's
own decision in the North Sea Continental Shelf case in 1969, a decision of which the validity has
been reaffirmed in all subsequent cases. Let me now deal with area A, the area of true joint
development. In this area A there is joint control and joint ownership of all petroleum and equal
sharing of the economic benefits: not just tax revenues, but all economic benefits. The area is under
joint control, operated on a day-to-day basis by a joint authority responsible in turn to a ministerial
council on which each party is equally represented, and all decisions are taken by consensus.
This is not a delimitation agreement. Article 2, paragraph 3, expressly safeguards the position
of both parties as regards any future delimitation. So, if East Timor does become independent there
is no question of the Treaty, as a boundary treaty, binding East Timor for all time. True, under
Article 33, it is to run for 40 years, and can be extended for further periods of 20 years, but a
reasonable period of permanence was considered in practice to be essential if licensees from the Joint
Authority were to enjoy long-term licences and so have the confidence to invest.
In Australia's view this Treaty offers considerable economic benefits to East Timor. In the
Timor Sea, in areas adjacent to the Zone of Co-operation, several high yield discoveries of petroleum
have been made. In the Zone of Co-operation itself little is known about the prospects of similar
discoveries, and only a number of exploration wells have been drilled so far, but there is every
reason to be confident that ultimately the Zone will be productive. Australia entirely rejects
Portugal's allegation that, under the Treaty, Australia will be exploiting the natural resources
belonging to East Timor. In Australia's view, the real situation is that East Timor will be deriving
economic benefits from resources on the Australian shelf.
Obviously, it suits Portugal to pretend that it is Indonesia, and not East Timor, that will
benefit. But the evidence is that Indonesia is likely to devote a large measure of these economic
- 34 -
benefits to the good of the territory and its people - far more than Portugal would have done, on past
experience.
The Australian Government believes that, with United Nations encouragement, the Indonesian
Government can be persuaded to do that. And that is not baseless optimism. Let me quote to you
what was said on behalf of the United States Government in hearings in the United States Senate on
14 September 1992.
"Let me now report on what is being done to address the humanitarian and
economic development problems that remain in East Timor.
By far the most active and important role is being undertaken by the Government
of Indonesia itself, which has significantly expanded its development activities in
East Timor each year since 1976.
This Indonesian effort is even more striking when viewed in the context of that
country's overall development needs. Although faced in each of its 26 far-flung
Provinces with enormous socio-economic problems [it] has given top development
priority to East Timor. This year it will spend more per capita on development in
East Timor than in any other Province." (ARej., Ann. 5, A22.)
Moreover, Indonesia will not be left with a free hand in deciding how to use its half-share of
the benefits to be derived from co-operation with Australia. The United Nations has determined that
East Timor is a non-self-governing territory under United Nations supervision. It falls to the
United Nations to ensure that the territory genuinely benefits from the economic benefits payable to
Indonesia, but arising from the exploitation of the resources covered by this Treaty.
It is a matter of record that no United Nations body - not the General Assembly, not the
Committee of 24, nor the Human Rights Committee - has seen fit to criticize the conclusion of the
Timor Gap Treaty. This supports Australia's view that the Treaty can be viewed as offering real,
long-term economic benefits to the territory and people of East Timor.
Mr. President, I am in your hands, I have perhaps another ten minutes to go.
Le PRESIDENT : Je crois qu'on va faire une pause maintenant et je vous donnerai la parole
après la pause-café de quinze minutes.
L'audience est suspendue de 11 h 30 à 11 h 55
- 35 -
The PRESIDENT: Please be seated. Thank you, Professor Bowett, for having interrupted
your statement. I now give you the floor to complete the statement which you began a few moments
ago.
Mr. BOWETT: Thank you, Mr. President.
(b) Has the implementation of the Treaty infringed the rights of the people of East Timor or the
powers of Portugal as Administering Power?
So far as the people of the territory are concerned, I need not repeat what I have already said:
implementation of the Treaty, far from harming the people, is one of their best hopes for the
resources needed for their development. And the Treaty offers more than just the possibility of
injecting much-needed capital into the territory. The concept of an "equal sharing of benefits", which
is fundamental to the Treaty, extends to opportunities for employment and the provision of
support-services in connection with the offshore operations.
Certainly Australia recognizes that the rights of the people are political as well as economic.
But nothing in this Treaty hinders in any way the political choice which the people of this territory
will make as to their future. Indeed, in the discussions by the representative of the Secretary-General
and the Governments of Indonesia and Portugal the suggestion has never been made, so far as
Australia is aware, that this Treaty is an impediment to the free exercise by the people of their right
to self-determination. Nor has the Secretary-General ever made that suggestion directly to Australia,
whether in public or in private.
The same is true of the related right to sovereignty over natural resources. Under the Treaty
Australia does not acquire resources that appertain to the territory: in Australia's view the converse
is true, in that Australia accepts joint control with Indonesia on behalf of the territory, of resources
which Australia believes belong to it. And if, in the future, the territory and its people acquire
independence, then the new State will have the right to accept, or reject, the Treaty. Australia has
made it perfectly clear in its written pleadings (ACM, para. 380) and in its oral arguments that it
would not regard the Treaty as binding on an independent East Timor.
So far as Portugal is concerned the allegation that the Treaty infringes the rights of Portugal is
- 36 -
hardly serious. What are these "powers" of Portugal that are infringed? Portugal has quit the
territory - just abandoned its responsibilities and left. So what "powers" as regards the development
of offshore resources does it have? None! Absolutely none! A power is a capacity to act, and in
this area Portugal has no such capacity. It was precisely this lack of power which made negotiations
with Portugal futile.
In Australia's view the Portuguese request for an injunction against Australia, to have the
Court order Australia to cease all further implementation of the Treaty - that is in effect Portugal's
Submission 5(a) - in fact reveals exactly how inadmissible this case is.
As Professor Crawford has shown, if the Treaty is not invalid - and Portugal does not claim it
is invalid - how can Australia cease performance without infringing the rights of Indonesia? It
clearly cannot. So the effect of any such injunction would be directly to nullify and render
unenforceable the rights of Indonesia to the performance of the Treaty: and Indonesia is not a party
before this Court.
2. The attack on Australia's capacity is a sham, for it conceals Portugal's real purpose which is to
deprive Indonesia of the benefits of its control over East Timor
Mr. President, I now turn to an examination of the sheer artificiality of this case. It is a sham
- a blatant artifice, by which, under the guise of attacking Australia's capacity to conclude the
Treaty, in reality Portugal seeks to deprive Indonesia of the benefits of its control over East Timor.
Let us consider the essentials of the legal issue now before us. A treaty may be valid or
invalid. The invalidity can stem from an intrinsic defect in the complex of rights and obligations - as
when the object of the treaty is unlawful - or from a lack of capacity in one or other of the parties.
Portugal does not say the Treaty is intrinsically invalid because for the Court to make that finding
would obviously be to rule on the rights of Indonesia.
So, we have to proceed on the basis that the validity of the Treaty is not challenged. But if
you have a bilateral treaty, and you say one party, Australia, has no capacity to conclude the treaty,
how can the treaty be valid? There is this fundamental problem about the whole structure of
Portugal's case.
Even apart from that there is the difficulty that, as a challenge to one party's capacity to
- 37 -
conclude the Treaty, the challenge to Australia is really a sham. The real challenge is to Indonesia's
capacity. In effect Portugal makes two propositions:
1. Australia had capacity to make the Treaty with Portugal.
2. Australia did not have capacity to make the Treaty with Indonesia.
If you examine those two propositions it is clear that the difference between them relates not to
Australia's capacity but to the incapacity of the other party. Either Australia has capacity or it
doesn't. That capacity exists or not in relation to all other parties: it cannot vary according to
whether Australia treats with Indonesia or Portugal. If I may use a private law analogy, an infant - a
minor - has no capacity to contract: but this incapacity exists erga omnes. The infant cannot lack
capacity to contract with A, but have capacity to contract with B. So, too, with Australia: if
Australia had capacity to treat with Portugal, it had capacity to treat with Indonesia. If a treaty with
Indonesia is invalid, it must be because Indonesia lacks capacity, not Australia. What Portugal is
really saying is that Australia could not treat with Indonesia because Indonesia had no capacity to
represent the territory. That is what the case is about. It is about Indonesia's capacity, not
Australia's.
Now the real substance of Portugal's case - and it is a case against Indonesia - is clear enough.
Portugal accuses Indonesia of aggression against East Timor and seeks to do everything in its power
to deprive Indonesia of what Portugal sees as the fruits of that aggression. The tragedy for Portugal
is that the United Nations, and other States, have not shared that view. Call it "realism", call it
"apathy", call it what you like: the facts are that the United Nations and the world at large believe
Indonesia is in East Timor to stay. This is not Australia's doing, and Australia on its own cannot
change things. Australia must face realities and look after its own interests, in a way consistent with
its legal obligations. And that is exactly what Australia has done.
Mr. President, that concludes what I have to say. Could I ask you now to call on the Agent
for Australia, Mr. Griffith?
The PRESIDENT: Thank you. I call Mr. Griffith to the bar.
- 38 -
Mr. GRIFFITH: Mr. President, Members of the Court.
I turn to a final group of issues under the heading of judicial propriety.
Our use of this term does not imply that these issues are in any way subordinate, or
secondary, or that they involve merely discretionary issues of a kind that the Court simply has to
balance alongside other factors. In some cases, issues of judicial propriety can assume a dominating
role, imposing limitations on the exercise of jurisdiction which this Court, as a judicial body, cannot
ignore: this was true, for example, in the Northern Cameroons case (I.C.J. Reports 1963, p. 15). It
is certainly the case here. Indeed, due to the tortuous way in which its case has been presented by
Portugal, many of the considerations properly termed considerations of "judicial propriety", are
reflections of the basic obstacles and difficulties the Court faces. At each level of this case, these
same issues present and represent themselves. And, at each level they have their own logically and
legally compelling character.
The difficulties presented for the Court at the level of judicial propriety are clearly seen from
an analysis of the remedies Portugal says it is seeking from the Court. In its presentation, Portugal
separately dealt with remedies and propriety. And, propriety was dealt with under two separate
headings of "illegitimate means" (CR 95/6, p. 57) and "inappropriate means" (CR 95/6, p. 67).
Also, in its presentation on standing, Portugal strayed into the area of propriety and remedies by
discussing the Northern Cameroons case (CR 95/6, pp. 47-48).
But, we note, in the presentation on remedies by Professor Dupuy (CR 95/5, p. 34), there was
no attempt to show the legitimacy or propriety of the actual remedies sought.
We say this link is absolutely essential. An examination of the remedies Portugal seeks
cannot be divorced from the actual claims made by Portugal and the propriety of pronouncing on
those claims.
But first, Mr. President, we must make it clear, beyond misunderstanding, that in addressing
the question of remedies, Australia considers the Court should never reach the stage where it has to
consider such issues. Our principal submission remains that, for the reasons Australia has
elaborated at length, the Court should find as a preliminary matter, that the case is inadmissible.
- 39 -
Clearly, if it so finds, that is the end of the matter. It is only if the Court rejects Australia's
arguments on admissibility issues that it need consider the arguments I now make.
Mr. President, we now make a reluctant, but forced, observation on Portugal's conduct. As an
indispensable part of the Court's protection of its judicial propriety, the Court must necessarily make
a judgment on the propriety of allowing any particular claimant to use the judicial process. The
maxim known to many legal systems: "He who comes to equity must come with clean hands" is only
one way of expressing a much broader principle. Here, it means that the Court is entitled to consider
the motives, the bona fides, the consistency, the propriety of both the allegations made by a claimant
and also the specific remedies it claims.
In this case, we have Portugal who comes before the Court to plead the right of selfdetermination
of peoples. Yet, we know few States have a worse record in that regard. The
"Carnation Revolution" cannot obliterate Portugal's own colonial record. And, it is Portugal's total
abdication of responsibility in East Timor after that Carnation Revolution which is of particular
relevance here.
We know, also, that in the analogous situation of Western Sahara, Portugal has deliberately
participated as a principal in the exploitation of the off-shore natural resources of that territory and
its people.
As to Portugal's motives, Australia has sufficiently identified that Portugal's real and true
target is Indonesia. Australia, and the 1989 Treaty, simply offer a means for Portugal to apply
pressure to Indonesia. And there is not the slightest doubt that any judgment in Portugal's favour
will not be used by Portugal as a judgment merely prescribing Australia's responsibility. Plainly,
also, it will be used to prescribe the responsibility of other States, particularly Indonesia.
So, Mr. President, this case is brought against Australia by Portugal and has been
demonstrated as one singularly devoid of essential merit. Here I speak of substantive justice, not the
purely legal grounds, which attempt to provide a façade of respectability.
I turn, now to a different point.
One central component of the judicial role is that judgments should be capable of effective
- 40 -
application: this Court will not render judgments which are "fruitless" and "devoid of purpose"
(Northern Cameroons case, I.C.J. Reports 1963, p. 38; Nuclear Tests case, I.C.J. Reports 1974,
p. 271). We must ask what would be the purpose and practical effect of a judgment in Portugal's
favour?
We examine the actual remedies sought by Portugal.
Professor Dupuy (CR 95/5, p. 34) analysed the grounds on which he said Portugal was
entitled to the remedies it seeks. These are:
(a) a declaration of opposability to Australia of the right of the people of East Timor to
self-determination, to territorial integrity and to permanent sovereignty over its wealth and
natural resources, and the "concomitant opposability" of the duties, powers and rights of
Portugal as Administering Power of the territory of East Timor;
- this was acknowledged to be a "preliminary declaration" (CR 95/5, p. 37) which, it was
said, was necessary as any order concerned with declaring Australia's responsibility
presupposed such a preliminary declaration of opposability;
- this is the first submission of Portugal (PM, p. 205);
(b) declarations that Australia has committed a series of wrongful acts and is still persisting in
wrongful conduct by negotiating, concluding and implementing the 1989 Treaty, and in
excluding any negotiation with Portugal;
- these are the second and third submissions of Portugal (PM, pp. 205-206);
(c) an order to cease the so-called wrongful acts; this is part (a) of Portugal's fifth submission
(PM, p. 206);
(d) a guarantee of non-repetition of those acts:
- this is part (b) of the fifth submission (PM, p. 206); and
(e) reparation in the form of damages in a form and determined in a manner decided by the Court:
- this is the fourth submission of Portugal (PM, p. 206).
Professor Dupuy says these declarations and orders have both a preventive and conservatory
aspect (CR 95/5, p. 42). They are consistent, also, with Professor Correia's categories (CR 95/6,
- 41 -
pp. 42-43).
But, what are the wrongful acts complained of?
On this, counsel for Portugal are confused amongst themselves. In the written pleadings, it is
clear that the illegal conduct in relation to which remedies are sought is the negotiation, conclusion
and implementation of the Treaty. But, now, in oral arguments, the conduct that is challenged
extends to the exploitation by Australia of resources which Portugal says belong to East Timor.
As we have said, what is not clear, is whether this illegal conduct is alleged because the
Treaty operates in areas of seabed north of the median line, or only because it operates north of the
200 nautical mile line drawn from Australia. Professor Higgins says the first (CR 95/5, p. 32);
Mr. Galvão Teles the second (CR 95/4, p. 72).
What is clear, is that the oral submissions expose that Portugal's real objective is an attack on
the Treaty. The attack based upon a principle of jus cogens - the right of self-determination - must
be a pleading that the Treaty is invalid. And, apart from the new jus cogens ground, Portugal now
seeks, not just a declaration, but the equivalent of an injunction. (Also, in a further display of the
bizarre unreality of its whole case, Portugal seeks orders in relation to damages, even though it
acknowledges that no material damage has yet occurred.) For the moment, I concentrate on the
declaratory relief sought.
Portugal acknowledges that judgment cannot be given in a case unless the case has a
contentious character: that there exists an "actuality of the controversy" (CR 95/6, p. 48). But this
is not enough. It must be possible to render an effective judgment. I remind the Court of what was
said in Northern Cameroons:
"There are inherent limitations on the exercise of the judicial function which the
Court, as a court of justice, can never ignore. There may thus be an incompatibility
between the desires of an applicant, or, indeed, of both parties to a case, on the one
hand, and on the other hand the duty of the Court to maintain its judicial character. The
Court itself, and not the parties, must be the guardian of the Court's judicial integrity."
(I.C.J. Reports 1963, p. 29.)
The Court also said:
"If the Court were to proceed and were to hold that the Applicant's contentions were
all sound on the merits, it would still be impossible for the Court to render a judgment
capable of effective application." (Ibid., p. 33).
- 42 -
Here it is necessary to analyse the Portuguese submissions by reference to this requirement of
effectiveness.
This can be done by having regard to both the positive and negative remedies sought by Portugal.
As to the positive, Portugal seeks declarations
- that Australia is under a duty to respect the right of the people of East Timor to selfdetermination;
- that Australia is obliged to respect the status of Portugal as the Administering Power with
respect to East Timor; and
- that by its conduct it has acted wrongfully contrary to these duties.
In relation to the first of these declarations, Australia has, of course, made it clear that it
recognizes the right of self-determination. There is no dispute, so such a declaration would be
meaningless. I will return to this issue later.
As to the negative, Portugal seeks, in effect, declarations that
- Australia not negotiate with a State other than Portugal, and that
- Australia not give effect to the 1989 Treaty.
These negative declarations are of course dependent, or consequential, on the positive
declarations first being made, and are a direct legal consequence of its request for an order to cease
the alleged wrongful acts.
Declarations
I turn first to examine the declarations sought - the second and third submissions of Portugal.
I remind the Court that before the Court could award satisfaction of any sort, it must first
determine the responsibility of Australia. It is asked by Portugal to pronounce on Australia's
conduct. Assuming it considers the claims admissible, it can do that only do that if it first finds a
breach of an obligation by Australia.
If one examines both the positive and negative propositions, it becomes clear that the
declarations sought are incapable of effective application. Truly they are divorced from reality.
This is confirmed whether one examines the Portuguese claims from the perspectives of:
- 43 -
(1) the interests of the people of East Timor;
(2) the role of the United Nations;
(3) the impact of any judgments on Indonesia;
(4) the ability of Portugal to negotiate with Australia in place of Indonesia over the resources of
the Timor Gap;
(5) the position of member States; and finally,
(6) the position in which Australia would be placed in any judgment.
I turn first to:
1. The interests of the people of East Timor
Mr. President, Members of the Court, I ask you to put yourself in the position of the people of
East Timor. What will be the effect of any judgment on them? Indonesia will still control the
territory. Portugal will have no greater ability to advance their interests: not one iota will have
changed in terms of securing the economic well-being or the exercise of the right of
self-determination of the people of East Timor.
Certainly, judgment in Portugal's favour would not lead to, or even assist, the realization of
self-determination in East Timor.
If recognition of Portugal as the sole legitimate authority pending self-determination would be
helpful in the process of self-determination, one would have expected the General Assembly to have
adopted such a policy already to achieve that very objective.
Here we know enough to be sure that a judgment in Portugal's favour could only make more
difficult the delicate negotiations between Indonesia and Portugal under the auspices of the
Secretary-General. Only a few weeks ago the Secretary-General expressed the need for the two
governments to co-operate with him in his initiative (paras. 3 and 4 of Press Release in Folder). A
finding by this Court that Portugal, and only Portugal, may represent the people of East Timor,
cannot possibly help the Secretary-General. And, such a finding would also contradict the decisions
of the Security Council and General Assembly to involve separate representatives of the people of
East Timor quite distinct from Portugal itself.
- 44 -
Further, many States, including Australia, would be debarred from dealing with Indonesia as
the competent governmental authority in East Timor.
2. The role of the United Nations
Portugal does not ask this Court to criticize directly the United Nations nor to pronounce the
resolutions of the Security Council or General Assembly in some way invalid (see PR, para. 9.08).
But a finding by this Court that the 1989 Treaty violates the right of self-determination of the East
Timorese must at the least imply a dereliction of duty on the part of the General Assembly and the
Security Council for the past 12 years since they last considered the issue. They have known about
the Treaty since 1988 and have kept silent.
Moreover, a judgment for Portugal will contribute nothing to the actual achievement of
self-determination. The United Nations General Assembly has taken note the right of the people of
East Timor to self-determination and independence (resolution 37/30). But it has not endorsed any
particular outcome for the process of consultations. Although integration with Indonesia,
independence, or restoration of Portuguese control are but some of the range of possible outcomes,
Portugal seems to assume that independence is the only possible outcome from the exercise of the
fact of self-determination. Indeed, at times much of its argument seems to equate the exercise of the
right of self-determination with independence (cf. Art. 297 of the Portuguese Constitution).
One thing is clear. A judgment by the Court that a State such as Australia (and, consequently,
any State) can only deal with Portugal in relation to a treaty such as the 1989 Treaty (or, indeed, any
treaty) can do nothing to create a "real" role for Portugal within the territory of East Timor such as
would advance the people's right to conduct an act of self-determination.
The futility of any court judgment in this regard is evident. Portugal does not, and cannot,
establish any causal link between the future exercise of the right to self-determination, in a form that
might be approved by the United Nations, and any judgment in the form sought by Portugal. The
situation is comparable to that referred to in Northern Cameroons in the passage I previously
quoted. No judgment will bind the United Nations political organs, or contribute anything towards a
- 45 -
political solution.
Contrary to what Professor Dupuy has said (CR 95/3, p. 12), the admitted right of people of
East Timor to self-determination nonetheless is a vague general principle which requires to be given
particular content and application by the General Assembly. In this case, the United Nations organs
have not given any guidance. In its absence, it is for each State to promote the right to
self-determination as is appropriate. It is a firmly established principle of international law that
limitations upon State sovereignty cannot be presumed (cf. Lotus case (1927) P.C.I.J., Series A, No.
10 ).
It is because issues concerning the exercise of self-determination are essentially for political
resolution, that the Charter "leaves the General Assembly a measure of discretion with respect to the
forms and procedures by which the right is to be realized" (Western Sahara case, I.C.J. Reports
1975, p. 36). Here, as in the Western Sahara case, there is no dispute about the right to
self-determination, the issue is how that right may be exercised. But, in terms of providing an
answer to this, any judgment of this Court, whether on the broad issue or the narrow treaty issue,
can be of no direct effect.
We know that the General Assembly has indicated a means to resolve the dispute in relation to
East Timor. The latest report of the Secretary-General shows that progress is occurring in the
dialogue between Portugal and Indonesia. The Court have a copy of that in their folder. A judgment
for Portugal could only derogate from this process of dialogue. One thing is certain: whatever this
Court orders Portugal will never have any ability to negotiate exclusively on behalf of the people of
East Timor in relation to the territory. A judgment in Portugal's favour might require the
Secretary-General not to treat Indonesia as having any governmental role in East Timor or, more to
the point, not to deal with any other alleged representatives of the people of East Timor. Portugal
invites the Court into potentially disruptive action.
Speaking of its advisory opinions, in the Western Sahara case, the Court said:
"to what extent or degree its opinions will have an impact on the action of the General
Assembly is not for the Court to decide. The function of the Court is to give an opinion
based on law, once it has come to the conclusion that the questions put to it are relevant
and have a practical and contemporary effect and consequently are not devoid of
object or purpose" (I.C.J. Reports 1975, p. 37, para. 73; emphasis added).
- 46 -
Here, a judgment for Portugal would fail to meet these minimum requirements of relevance and
object and purpose. It would, we say, support a role which common sense tells us it is quite
impossible for Portugal to assume.
One can contrast the Advisory Opinion requested in relation to Western Sahara. As we have
noted, Portugal's claim has the features of a substitute for an advisory opinion. But, unlike such an
opinion, it has no object or purpose related to the discharge by the United Nations of its role in the
self-determination exercise. It is inconceivable that a judgment for Portugal will assist the
United Nations in any way. Yet, Portugal puts the issue of self-determination as if it were acting on
behalf of the United Nations.
Portugal's pretence is that what it seeks is a judgment, a narrowly circumscribed issue
concerning a maritime resources issue, it cannot disguise, what is, in fact in the heart of the dispute -
namely, a claimed crucial role, by Portugal, in the exercise of a right of self-determination by the
peoples of East Timor. If one examines closely the role of the United Nations in relation to the issue
of East Timor, it becomes apparent that a judgment for Portugal would elevate Portugal to a central
role which may be entirely contrary to the political solution sought by the United Nations.
It is precisely because any judgment on the particular claims against Australia can serve no
purpose or have any effect in relation to that ultimate issue, that Australia says, apart from and
additional to the other admissibility grounds raised by it, that the Court should conclude that the
claim is inadmissible.
3. Impact of judgment in relation to actions of Indonesia
Portugal continues to insist that the case does not concern or involve any issue concerning the
use of force by Indonesia or the rights or wrongs of Indonesian actions since it obtained possession
of East Timor in 1975. Portugal carefully asserts, in its Reply, that:
"the Portuguese Application does not relate to the violation of the duty of
non-recognition of a situation resulting from the wrongful use of force as such but
rather to the failure of Australia to recognize the existing rights of the people of
East Timor and of Portugal" (PR, p. 182, para. 7.28; see also CR 95/9, p. 24, Mr.
Crawford).
As we have seen, to assert this is to demonstrate the unreality of the Portuguese claim, and to
- 47 -
confirm the plain reasons of judicial propriety for not entertaining them. As the submissions by
Professors Crawford and Pellet have shown, Indonesian actions are at the heart of the Portuguese
claims.
Portugal is asking the Court to take note of and then ignore the fact that the Indonesian army
entered East Timor in 1975. Portugal says it does not need to establish the illegality of Indonesia's
presence. It then says that, even though Indonesia remains in East Timor, and Portugal is not there,
the Court should say that Australia cannot deal with Indonesia. What Portugal wants the Court to
do is to assume a lawful, (or not unlawful) occupation by Indonesia, yet deal with Portugal's role in
relation to the self-determination issue as if Indonesia was not there at all. What could be more
remote from reality than the Court being so asked to determine the issue on a basis that cannot
address the key issue of Indonesia's presence as the State in actual control of the territory?
Further, Portugal insists that it is not making any claim as to the invalidity of the Treaty, or of
Indonesia's capacity to make it. Yet, it attacks Australia's capacity to conclude it. It is only
Australia's actions that are in some way said to be unlawful. What, as we heard from
Professor Bowett, could be more divorced from the reality of the situation?
Professor Crawford has outlined in his submissions on admissibility the way in which
Portugal's attempts to distinguish "validity" and "unlawfulness" fail. This failure is further evidence
of the futility of a judgment against Australia which cannot, because of Article 59, also speak to
Indonesia.
As between Australia and Indonesia, Australia would be bound by a judgment in Portugal's
favour, but Indonesia would not. For Australia, its obligations to Indonesia under the Treaty would
have necessarily been declared invalid. But, except in the content of mandatory Security Council
resolutions, the Court cannot enjoin a State from performing a valid treaty. Indonesia would not be
bound, and could insist (and, as far as the Statute of the Court is concerned (Art. 59), would be
entitled to insist) on performance of the Treaty. But Australia would be forced into the position of
not complying with the Treaty. This would deprive Indonesia of Australia's performance.
Thus, by seeking an order, and an injunction restraining Australia, Portugal is, in essence,
- 48 -
seeking to create a dispute between Indonesia and Australia. Any Court order effectively
invalidating a treaty which settled a real dispute between two neighbouring States would force those
States back into their conflicting claims, whilst prohibiting one State (here Australia as a third party
to the real dispute over East Timor) from doing anything effective to settle the dispute.
Indonesia would not be prevented by the Court's judgment from unilaterally exploiting the
petroleum resources in the Timor Gap. Indeed, Indonesia might unilaterally exploit the resources in
the entire area which Australia claims as its own. It cannot be part of the judicial function to
pronounce judgment and award remedies which dictate an inter-State dispute unresolvable because
of the terms of the judgment which created it!
4. The ability of Portugal to negotiate and to comply itself with the Court's order
This issue relates to the status of Portugal. If Portugal's specific claims are to be upheld, it
can only be on the basis that in some way - whether on its own behalf or in some other way as
representative of the people of East Timor - it is in a position to act and negotiate as a coastal State
in relation to the maritime entitlements of East Timor.
The unreality and the futility of any judgment in this regard also is obvious.
Even if Portugal is an Administering Power, how can Australia be expected to negotiate with
Portugal as a coastal State in relation to adjacent maritime resources? Does Portugal offer to send
its warships to defend the continental shelf of East Timor which it abandoned almost 20 years ago?
Of course not. Whatever its status as "administering Power", Portugal is in no position to discharge
the rights let alone the responsibilities of a coastal State. International law, and this Court, do not
operate in a vacuum. Portugal's inability to act as the coastal State is common ground. Yet in the
absence of such capacity, the unreality of any judgment in favour of Portugal's claims against
Australia is manifest.
5. The position of member States
Any judgment for Portugal would require those having recognized Indonesia in sovereignty
over East Timor to withdraw that recognition. It would require those having concluded treaties with
Indonesia relating to East Timor to suspend, or terminate, their capacity to implement those treaties
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with respect to the territory of East Timor.
There would be a whole series of one-legged treaties created by the judgment of the Court.
6. The position of Australia
Mr. President, Members of the Court, the unreality of the present action is highlighted in this
aspect. As Professor Crawford said, a decision in this case which denies Australia the ability to
exercise its own vested rights as a coastal State over its own continental shelf, would require
Australia to retreat backwards across the continental shelf to avoid dealing with Indonesia. Or, as
Professor Bowett said, it would require Australia to surrender, or forfeit, its bona fide claims to
continental shelf rights beyond the median line.
As any judgment under Article 59 of the Statute will not be binding on Indonesia, unilateral
exploration, exploitation unilaterally by Indonesia of Area A of the Zone of Co-operation (the area
north of the median line) cannot be prevented by any judgment of this Court. Yet this is the likely
consequence if Australia is told it must negotiate only with Portugal.
Alternatively, because Portugal says the invalidity of the Treaty is not an issue upon which it
wishes the Court to pronounce, Indonesia could continue to demand performance by Australia of its
treaty obligations. This is an absurd situation and its contemplation reinforces the unreality of the
claims brought by Australia.
Here, the observations already made about Indonesia being placed in dispute with Australia as
a result of a judgment with Portugal apply just as strongly. Australia, and the rest of the
international community, could only suffer from such perverse outcome.
Restraining Order
Mr. President, I turn now to Portugal's claims for a restraining order - in effect an injunction.
This, and the claim for damages, confirm the inability of any decision sought in this case from the
Court to be effective.
Portuguese Submission 5, unlike Submissions 2 and 3, is concerned solely with the future
conduct of Australia. Portugal here seeks a declaration that "until the people of East Timor shall
- 50 -
have exercised its right to self-determination", Australia is bound by international law to refrain from
certain conduct.
The conduct to which the proposed declaration would apply extends far beyond the confines of
the existing dispute. Submission 5(a) would require Australia to refrain not only from proposed
future dealings with Indonesia, in respect of a maritime delimitation in the area, as foreseen in the
1989 Treaty, but would apply to any future dealings by Australia with any State other than Portugal
in relation to the matters specified. Similarly, Submission 5(b) would apply to any "plurilateral" title
to which Portugal is not a party, whether or not Indonesia was in any way involved. The declaration
sought by Portugal would amount to an injunction against Australia, requiring it to refrain from all
future conduct relating to exploration and exploitation in the continental shelf in the area of the
Timor Gap, and not merely the particular conduct originally complained of by Portugal, namely, the
conclusion of the Treaty. The injunction would be permanent, at least until such uncertain time as
the people of East Timor "shall have exercised its right to self-determination, under the conditions
laid down by the United Nations".
Such an injunction, indefinite in duration, and extending to unspecified and uncertain future
dealings by Australia with unspecified and uncertain third States, would be unprecedented in the
history of this Court. Indeed, it would be unprecedented in the history of international adjudication.
Even on Portugal's theory, it is possible that at some future date, before the people of East
Timor have exercised their right to self-determination, the United Nations could take action which
resulted in the cessation of any remaining rights of Portugal in relation to the territory. To give but
one example, the General Assembly might expressly determine that Indonesia is now the
Administering Power of East Timor. According to Portugal's own argument, in that event, Australia
would be required to deal solely with Indonesia with respect to the territory. However, if the
declaration sought by Portugal were granted by the Court, Australia would remain bound by a
judgment of this Court to continue to deal solely with Portugal. And Australia could not have resort
to a request for a revision of a judgment. No new unknown fact would have been discovered, for the
purpose of Article 99 of the Rules and Article 61 of the Statute. Rather, the international situation
- 51 -
would have evolved.
Damages
Mr. President, Members of the Court, I now turn to consider the claim for damages.
In its Submission 4, Portugal seeks reparation for the damage which Australia allegedly "has
caused" by the conduct referred to in Submissions 2 and 3. However, it is not possible for the Court
in this case to determine whether there have been any injuries sustained at all by the people of
East Timor. As you have heard often enough, there has been no continental shelf delimitation in the
area of the Timor Gap between Australia and East Timor. Australia still claims sovereign rights in
respect of the whole of the area covered by the 1989 Treaty. Portugal, of course, disputes this, but
the Court is not asked to resolve, and of course, it cannot resolve, the dispute in this area.
Portugal itself acknowledges that it is not possible for the Court finally to determine the extent
of any patrimonial injuries sustained by the people of East Timor until such time as a maritime
delimitation has been effected (PM, para. 9.13; CR 95/5, p. 45). Yet, it is not possible for the Court
to undertake such a delimitation in this case, and it is not possible to say when, if ever, such a
delimitation might occur. Speaking last Thursday (CR 95/5, p. 45), Professor Dupuy asserted that,
any resources in the area north of a 200-mile limit from Australia's coast, were clearly East
Timorese. He suggested that the Court should, as a minimum remedy, order Australia to refrain
from any exploration or exploitation north of the 200-mile limit - in effect, granting an injunction
against Australia. Professor Higgins referred instead to the median line.
What Portugal is inviting the Court to do is to adopt the 200-mile limit, or the median line, as
a kind of de facto boundary: a boundary which could be of indefinite duration. As we have seen,
Mr. President, this is, in essence, inviting the Court to make a delimitation - precisely what both
Parties have agreed the Court cannot do!
Further, if the Court were to grant the declaration sought, the result would be an award of
damages of an indeterminate amount which may never be determined.
As the Court recognized in the Fisheries Jurisdiction case, to award compensation the Court:
"can only act with reference to a concrete submission as to the existence and the amount
- 52 -
of each head of damage. Such an award must be based on precise grounds and detailed
evidence concerning those acts which have been committed, taking into account all
relevant facts of each incident and their consequences in the circumstances of the case.
It is only after receiving evidence on these matters that the Court can satisfy itself that
each concrete claim is well founded in fact and in law." (I.C.J. Reports 1974, p. 204,
para. 76.)
The Court added that it
"is prevented from making an all-embracing finding of liability which would cover
matters as to which it has only limited information and slender evidence" (ibid., p. 205).
The Court indicated that it could only grant a general declaration establishing a principle that
compensation is due if the Court is able to receive evidence and to determine the amount of damage
in a subsequent phase of the same proceedings (ibid.).
If the Court cannot ascertain the extent of any damage in a certain amount, it would be
inconsistent with this established principle for it to award unspecified damages at large. To do so
would merely be to create another dispute.
But, in any event, there is simply no evidence of any material injury to the patrimony of
East Timor. Portugal admitted this in argument last week (CR 95/5, p. 44; see also PM, paras.
9.12-9.13; PR, para. 9.49). Its suggestion of a Fund (CR 95/5, p. 46) into which damages would be
paid merely obscures, by its imprecision, the legal difficulties in Portugal's claim for damages. Also,
it overlooks two things. First, unless there was a sufficient legal basis for awarding damages, there
would be nothing to pay into the Fund. Second, the use of the moneys from the Fund inside the
territory of East Timor would be impossible without the goodwill and co-operation of Indonesia.
With this kind of judgment Portugal is seeking, such goodwill and co-operation is unlikely. Further,
any implementation of such an order would depend on outside bodies, and the Court cannot make an
order which it cannot supervise.
Declaration of Opposability
Mr. President, Members of the Court, the preceding analysis has concentrated on the
- 53 -
substantive remedies sought by Portugal. There is one preliminary remedy - the declaration of
opposability - on which I should say a little more. If the Court rejects all Portugal's substantive
claims against Australia, we say that it should also refuse to make the first declaration sought.
Portugal's Submission 1 (PM, p. 204) seeks first a general declaration that the people of
East Timor has the right to self-determination and to permanent sovereignty over natural resources.
Secondly, as we have seen, it seeks an order that Portugal has certain rights as Administering Power,
and that these rights are opposable against Australia. But, if the Court determines that the specific
acts of Australia referred to in Portuguese Submissions 2 and 3 do not infringe any rights of
Portugal or the people of East Timor, there is no longer any matter in dispute between the Parties.
As Professor Crawford reminded the Court, this submission is no more than a "moyen"
(CR 95/7, p. 66; ACM, para. 10, ARej., para. 69).
To adopt the language of the Court in the Norwegian Fisheries case, Submission 1 is no more
than a statement of "propositions which ... purport to justify certain contentions and do not constitute
a precise and direct statement of claim" (I.C.J. Reports 1951, p. 126). In that case, the Court said
that the contents of such a final submission "may be taken into account only in so far as they would
appear to be relevant for deciding the sole question in dispute". The Court said the contents of such
a submission, "might furnish reasons in support of the Judgment, but cannot constitute the decision"
(ibid., emphasis added).
In truth, Submission 1, standing alone, is an abstract statement about the rights of the people
of East Timor, and the status of Portugal as Administering Power, unrelated to whether any conduct
of Australia infringes those rights.
Further, there is no basis for a finding as to Portugal's right to represent the territory as
Administering Power, if Submissions 2 and 3 are rejected. The claim is illusory. It would be
inconsistent with the judicial function for Portugal to use the Court's contentious jurisdiction to
obtain an abstract declaration of rights, where there is no dispute, or there has been found to be no
breach of those rights, by the other party. In particular, there is no occasion for the Court to grant a
declaration that the people of East Timor have the right to self-determination. Australia agrees that
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they have this right. There is simply no legal dispute requiring judgment or a declaration by the
Court.
The declaration of Submission 1 should not be made.
Conclusion
Mr. President, Members of the Court, the conclusion is inescapable. The remedies Portugal
seeks are impractical, unjustified and unrealistic. They raise, for the Court, the very obvious
question of the judicial impropriety of entertaining the submissions at all.
Mr. President, Members of the Court,
That concludes Australia's submissions in the first round of oral argument. I thank the Court
for the patience, and attention it has displayed throughout this week, and the one which has gone
before.
The PRESIDENT: I thank Mr. Griffith, the Agent of Australia, for his statement. This
concludes the first round of oral arguments in the case concerning East Timor. I thank the
delegations of both Portugal and Australia for their valuable efforts to assist the Court in the
accomplishment of its task.
The Court will resume its hearings next Monday, 13 February, and will hear the second round
of oral arguments presented by Portugal, the Applicant. It will hear the representative of Australia
on Thursday, 16 February, which will conclude the hearings. Meanwhile, the hearings are adjourned
until next Monday. Thank you.
The Court rose at 12.55 p.m.
__________
Public sitting held on Friday 10 February 1995, at 10 a.m., at the Peace Palace, President Bedjaoui presiding