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Uncorrected Translation
CR 2012/36 (traduction)
CR 2012/36 (translation)
Vendredi 14 décembre 2012 à 15 heures
Friday 14 December 2012 at 3 p.m. - 2 -
Le PRESIDENT: Veuillez vous asseoir. Bonjour. L’audience est ouverte. La Cour se
12
réunit cet après-midi pour entendre la conclusion du second tour de plaidoiries du Chili. J’appelle
à la barre M. Samuel Wordsworth. M. Wordsworth, vous avez la parole.
M. WORDSWORTH :
L E CADRE DANS LEQUEL DOIT ÊTRE APPRÉCIÉE LA PRATIQUE DES E TATS
1. Introduction
1. Je vous remercie, Monsieur le président. Monsieur le président, Mesdames et Messieurs
de la Cour, c’est un honneur et un privilège pour moi que de me présenter devant vous au nom du
Chili pour brosser le tableau d es actes effectués par les Parties postérieurement aux accords
de 1952 et de 1954, tout en les replaçant dans le cadre juridique approprié.
2. Le Pérou a abordé la pratique des Par ties suivant deux principes, que vous connaissez
bien. Le premier est l’ampleur de la charge de la preuve lorsqu’il s’agit d’établir l’existence d’une
frontière maritime; le second, le fait que cette pratique doit être concordante, commune et
cohérente.
3. Le premier point peut être traité très rapi dement. Le Pérou a fini par reconnaître que le
1
Chili n’invoquait pas l’existence d’un accord tacite et que ses renvois répétés aux dicta de l’affaire
Nicaragua c. Honduras n’étaient donc pas pertinents 2.
4. Pour autant, la question de la charge de la preuve n’est pas régl ée, puisque le Pérou a
lui-même affirmé qu’il existait un accord entre les Parties, accord ayant, selon lui, établi un
3
arrangement pratique et provisoire concernant une ligne de délimitation de zones de pêche .
5. Il est donc légitime de se demander où se tr ouve cet accord, et ce qu’il en est de la
pratique cohérente permettant de l’étayer ou d’ét ablir l’existence d’un accord tacite ayant le même
effet. A cet égard, c’est au Pérou qu’il incombe de s’acquitter de la charge de la preuve, et ce, dans
le cadre de l’article IV de la déclaration de Santiago ainsi que de l’article premier de l’accord relatif
1
CR 2012/33, p. 32, par. 4.
2Différend territorial et maritime entre le Nicaragle Honduras dans la mer des Caraïbes (Nicaragua
c. Honduras), arrêt, C.I.J. Recueil 2007 (II), p.735, par.253Délimitation maritime en mer Noire (Roumanie
c. Ukraine), arrêt, C.I.J. Recueil 2009, p. 86, par. 68.
3Voir, par exemple, CR 2012/33, p. 27, par. 109 ; p. 36, par. 19 ; p. 43, par. 41. - 3 -
13 à la zone frontière mariti me spéciale, dans lequel ⎯ et cela ne fait pas l’ombre d’un doute ⎯, les
Parties ont jugé bon de se référer à leur frontière maritime existante en des termes explicites et
mûrement réfléchis. Et si vous me permettez, un court instant, de m’inspirer des exposés du Pérou,
l’existence, en la présente espèce, d’un accord sur une ligne provisoire établie aux fins d’activités
de pêche ne saurait être présumée facilement.
2. L’alinéa b) du paragraphe 3 de l’article 31 de la convention de Vienne
6. Pour en venir à la question du critère auquel il doit être satisfait pour qu’une pratique
puisse être retenue au sens de l’alinéa b) du paragraphe 3 de l’artic le31 de la convention de
Vienne, je développerai six points et répondrai, ce faisant, aux arguments avancés mardi dernier sur
cette question par sir Michael Wood.
4
7. Premièrement, le Pérou a tenté, tant dans ses écritures que dans ses exposés de la semaine
dernière 5, de présenter l’accord de 1954 relatif à une zone frontière maritime spéciale comme
faisant partie de la pratique des Parties au sens de l’alinéa b) du paragraphe 3 de l’article 31. Cette
position est aussi défensive qu’erronée. Il n’y a rien d’autre à ajouter.
8. Si l’on en vient maintenant à la pratique réelle ⎯et c’est mon deuxième point ⎯, les
Parties s’accordent naturellement sur le fait que , pour satisfaire aux exigences de l’alinéa b) du
paragraphe 3 de l’article 31, la pratique doit établir l’accord des Parties à l’égard de l’interprétation
en cause. Toutefois, comme l’a précisé M.Wood au premier tour, «[i]l convient de faire preuve
d’une grande prudence lorsqu’il s’agit de recour ir à la pratique pour confirmer ou établir
l’existence d’un accord frontalie r, surtout si celui-ci est censé établir une frontière maritime
6
internationale» . Selon lui, «[l]a situation en l’espèce est comparable à celle … décrite» en l’affaire
du Différend frontalier terrestre, insulaire et maritime , dont il a cité un passage énonçant que la
pratique des Parties ne saurait prévaloir sur l’ab sence, dans le traité, de toute mention spécifique
4
RP, chapitre IV, par. 4.1-4.2 et 4.3 et suiv.
5
Voir CR 2012/28, p. 26-28.
6 CR 2012/28, p. 27, par. 5, citant le Différend frontalier terrestre, insulaire et maritime (El Salvador/Honduras ;
Nicaragua (intervenant)), arrêt, C.I.J. Recueil 1992, p. 586, par. 380. - 4 -
d’une délimitation. Cet extrait était, semble-t-il, tellement pertinent qu’il a d’ailleurs cru bon de le
répéter mardi dernier .7
9. Cependant, et la Cour l’aura sans dout e déjà relevé, le passage invoqué concerne
l’interprétation d’un compromis par lequel les deux pa rties avaient saisi la Cour de leur différend.
14 Cela n’a donc rien à voir avec l’interprétation d’ un accord frontalier. Il se trouve que ledit
compromis ne contenait aucune demande expresse des parties tendant à ce que la Cour se livre à un
exercice de délimitation et que, dans la phrase venant juste après le passage cité, la Cour
poursuivait en énonçant que, «[c]haque fois que par le passé [elle] s’[était] vu confier par un
compromis une tâche de délimitation, le compromis formulait très clairement ce qui lui était
demandé» 8. Le contexte ne pourrait donc être plus diffé rent, et le Pérou peut bien citer cet extrait
tant qu’il veut, celui-ci n’est d’aucune utilité à la Cour en la présente espèce, laquelle concerne, à
l’évidence, une frontière maritime, et non l’étendu e de la compétence de la Cour en vertu d’un
compromis.
10. J’en viens maintenant au troisième point : se référant à la déclaration de M. Ian Sinclair
selon laquelle la pratique doit êt re concordante, commune et cohérente, M.Wood y a ajouté
⎯avec, sûrement, tout le respect dû par un ancien conseiller juridique du ministère des affaires
étrangères à un autre ⎯ un critère de son cru : celui de la clarté 9. En réalité, M. Sinclair, qui avait
pris part à la conférence de Vienne, s’était contenté de dire que «[l]a valeur et l’importance de la
pratique suivie ultérieurement dépend[aient] na turellement de la mesure dans laquelle celle-ci
[était] concordante, commune et cohérente», ajoutant que «[l]a pratique se défini[ssait] comme une
succession de faits et d’actes et ne [pouvait], en géné ral, être établie par un fait ou un acte isolé, ni
10
même par plusieurs applications individuelles» .
11. La formule de M.Sinclair n’a rien de surprenant. J’ajouterai qu’il s’était lui-même
inspiré des conférences données à l’Académie de droit international de La Haye par
M.MustafaYasseen, pour lequel il était partic ulièrement important que la pratique soit
7 CR 2012/33, p. 32, par. 14.
8
Différend frontalier terrestre, insulaire et maritime (E lSalvador/Honduras; Nicaragua (intervenant)), arrêt,
C.I.J. Recueil 1992, p. 586, par. 380.
9
CR 2012/33, p. 32, par. 15.
10Sinclair, The Vienna Convention on the Law of Treaties, p. 137. - 5 -
11
«concordante, commune et d’une certaine constance» . Précisons que la formulation «d’une
certaine constance» est parfaitement justifiée, étant donné qu’il s’agit d’une notion nécessairement
relative. Ce qui importe, c’est de déterminer si la pratique établit, globalement, un accord sur
l’interprétation en cause. Sur la base des faits qui lui avaient été présentés, la Cour a dit que tel
12
n’était pas le cas dans l’affaire de l’ Ile de Kasikili/Sedudu , affaire sur laquelle M. Wood a appelé
votre attention. Or, il est totalement incongru de comparer la présente espèce, dans laquelle les
deux Etats n’ont cessé, depuis plusieurs décennies, d’affirmer l’existence de leur frontière
maritime, à celle de l’ Ile de Kasikili/Sedud , où la pratique de la Namibie était limitée et où le
Botswana avait, pour l’essentiel, observé le silence.
15 12. Quatrièmement, il a été dit que, en la pr ésente espèce, il convenait d’écarter la pratique
«dans sa quasi-totalité», car elle ne s’inscrivait pas dans le cadre de l’application de la déclaration
13
de Santiago . Cela implique que, pour établir un accord en matière d’interprétation, la pratique
devrait renvoyer expressément à un traité donné. Or, pareille exigence ne ressort, ni expressément
ni implicitement, de l’affaire de l’Ile de Kasikili/Sedudu invoquée par la Partie adverse. Dans cette
affaire, la Cour s’était attachée à examiner si les faits invoqués constituaient une «pratique
ultérieure des parties au traité de 1890 quant à l’interprétation de celui-ci» 14.
13. De plus, pour prendre un autre exemple dans le «voisinage», si je puis dire, les actes du
Chili dans l’arbitrage du Canal de Beagle ne renvoyaient pas expressément au traité frontalier
de1881 dont il était alors question. Le tribunal ⎯composé, rappelons-le, de cinq membres ou
anciens membres de la Cour ⎯ a néanmoins considéré lesdits actes comme étant des éléments
pertinents aux fins de l’interpré tation du traité, observant qu’il s’ agissait de documents «publics et
15
bien connus de l’Argentine, et qu’ils ne pouvaient que découler du traité» .
11
Yasseen, Recueil des cours, 1976, p. 48.
12
Ile de Kasikili/Sedudu (Botswana/Namibie), arrêt, C.I.J. Recueil 1999 (II), p. 1087, par. 63.
13CR 2012/33, p. 34, par. 11.
14Ile de Kasikili/Sedudu (Botswana/Namibie), arrêt, C.I.J. Recueil 1999 (II), p. 1087, par. 80.
15
Affaire concernant un litige entre la République argentin e et la République du Chili relatif au canal de Beagle,
sentence du 18février 1977, Nations Unies, Recueil des sentences arbitrales (RSA) , vol.XXI, par.169. Voir également
Actions armées frontalières et trans frontalières (Nicaragua c.Honduras), co mpétence et recevabilité, arrêt,
C.I.J. Recueil 1988, p. 87, par. 40. - 6 -
14. Les faits de la présente affaire, en revanc he, sont bien plus solides : les actes en question
émanent des deux Etats, lesquels ont agi publiquement, au vu et au su l’un de l’autre, ne serait-ce
que parce qu’il s’agissait d’échanges de communicati ons sur des questions relatives à la frontière
maritime et, dans certains cas, d’actes bilatéraux. De plus, ces actes découlaient nécessairement, de
par leur nature même, de la déclaration de Santiago et de l’accord qui l’a confirmée en 1954. A cet
égard, le Pérou s’est montré parfaitement incapab le de présenter à la Cour un autre fondement
juridique viable sur lequel les Parties auraient pu agir; il n’existe aucun accord quant à
l’établissement d’une ligne provisoire en matière de pêcheries, et le Pérou a été dans l’incapacité
d’apporter le moindre élément plausible démontrant le contraire.
15. Il aurait été tout à fait inhabituel que le Chili ou le Pérou, chaque fois qu’ils faisaient
référence, au cours des décennies de pratique évoquées devant vous, à la frontière convenue fassent
également référence à la déclaration de1952 ou a ux accords de1954. Certes, il existe plusieurs
16
exemples dans cette pratique où les Parties ont mentionné explicitement lesdits instruments , mais
la frontière maritime entre le Chili et le Pérou est un fait juridique établi de longue date et considéré
comme tel par les deux Etats. Comme cela a été démontré de manière remarquablement claire par
16 M. Petrochilos, ceux-ci n’ont cessé d’agir sur cette base, que ce soit dans leur pratique unilatérale
ou bilatérale. En résumé, cette prati que concordante ne peut s’expliquer que par le fait que les
deux Etats considéraient que leurs espaces mariti mes étaient délimités par le parallèle convenu
dans la déclaration de Santiago et confirmé en 1954.
16. Cinquièmement, je relèverai qu’il est ina pproprié, et tout à fait inexact, de décrire,
comme le fait le Pérou, la pratique postéri eure à 1954 comme un «collage de morceaux choisis» 17.
Chaque élément de cette pratique doit être examin é isolément et pris en compte pour autant qu’il
«constitue une preuve objective de l’accord des parties sur le sens» de l’article IV de la déclaration
18 19
de Santiago . Le Chili n’a pas, contrairement à ce qu’a laissé entendre M.Wood , adopté une
16CMC, vol. III, annexe 134, p. 843, art. 1 ; DC, en ci nq points vol. II, annexes 53, 59-63 et 65-67 ; MP, vol. II,
annexes 31 et 32 ; CMC, en cinq points vol. IV, annexe 167.
17
CR 2012/28, p. 25.
18
Ile de Kasikili/Sedudu (Botswana/Namibie), arrêt, C.I.J. Recueil 1999 (II), p. 1087, par. 49.
19CR 2012/33, p. 35, par. 18. - 7 -
«vision globale» de la pratique, et il considère que, bien qu’elle soit assez fastidieuse, la tâche
confiée à la Cour, consistant à examiner cette pratique dans le détail, demeure essentielle.
17. Je soulignerai en outre, au risque d’énon cer une évidence, le la rge éventail des actes en
question. Les actes effectués par les deux Etats dans le cadre de leur entente, en 1968-1969, en vue
de matérialiser le parallèle qui constitue leur frontière maritime ⎯ point qui cause au Pérou tant de
difficultés ⎯ doivent être pris en compte au sens de l’alinéa a) du paragraphe 3 de l’article 31 de
la convention de Vienne comme un accord en application de la déclaration de 1952. Autre élément
revêtant une importance par ticulière, la pratique pertinente au sens de l’alinéa b) du paragraphe3
de l’article 31 est en grande partie constituée d’ échanges bilatéraux qui mentionnent expressément
l’existence de la frontière maritime et re posent sur celle-ci. Prenons deux exemples:
M. Petrochilos a parlé des négociations menées au milieu des années 1950 et en 1961 pour parvenir
à un accord visant à autoriser les pêcheurs des deux Et ats à exercer leur activité de part et d’autre
de la ligne frontière ; il a également abordé la proposition que le Chili a adressée au Pérou en 1975
tendant à octroyer à la Bolivie son propre «terr itoire maritime compris entre les parallèles passant
par les extrémités de la côte ainsi cédée» 20.
a) S’agissant du premier exemple, le Pérou lui- même a reconnu expressément l’existence de la
ligne frontière dans le cadre des négociations avec le Chili.
b) Pour ce qui est du second, il s’agissait préciséme nt d’une communication «de nature à appeler
17
dans un délai raisonnable une réacti on de la part des autorités» pé ruviennes, pour reprendre la
formule bien connue de l’affaire du Temple de Préah Vihéar 21.
c) L’absence d’objection de la part du Pérou a une va leur probante incontestable, surtout si on la
considère à la lumière de la pratique suivie pa r cet Etat au cours des vingt années précédentes,
laquelle confirme l’existence de la frontière ma ritime convenue. La s ituation était analogue à
celle de l’affaire de la frontière entre le Gu atemala et le Honduras, da ns laquelle le tribunal
d’arbitrage avait estimé que,
20
DC, vol. II, annexe 26, p. 141.
21Temple de Préah Vihéar (Cambodge c. Thaïlande), fond, arrêt, C.I.J. Recueil 1962, p. 23. - 8 -
«[s]i l’on avait considéré que … le Guatem ala revendiquait l’autorité sur un territoire
qui était, ou avait été avant l’indépendan ce, sous le contrôle administratif du
Honduras, il ne fait aucun doute que de telles revendications de la part du Guatemala
auraient immédiatement suscité une certa ine hostilité et auraient donné lieu à des
protestations ou objections de la part du Honduras» . 22
18. Il en va tout à fait de même en la présente affaire. Il ressort très clairement de ce passage
que les actes unilatéraux peuvent eux aussi se révé ler suffisants s’ils reflètent l’existence de
23
l’accord entre les parties sur l’interprétation, ce qui, du reste, est établi de longue date .
19. Dans cette hypothèse, les actes unilatéraux doivent, bien entendu, pouvoir être portés à la
connaissance de l’autre, ou des autres parties conc ernées, et être de nature à appeler une réponse,
mais ce sont là des critères auxquels il est aisément satisfait. Dans ses deux exposés,
M.Petrochilos vous a donné de nom breux exemples de lois et de règlementations chiliennes, de
permis de pêche industrielle publiés au journal officiel et de faits d’interception ou de reconduite de
navires péruviens à la ligne de frontière maritime avec, dans certains cas, remise aux autorités
24
péruviennes .
20. L’argument avancé a posteriori par le Pérou, selon lequel en ne formulant aucune
protestation, il se serait simplement abstenu de réagir est, avec tout le respect que je dois à mes
contradicteurs, totalement dénué de sérieux et, qui plus est, sans rapport avec le contexte juridique
25
18 et factuel de l’affaire Jan Mayen invoquée à cet égard . L’on ne saurait, en effet, établir quelque
rapprochement que ce soit avec les faits de la présente espèce, ne serait-ce que parce que le Pérou a
lui-même invoqué ou mentionné la frontière maritime en de multiples occasions.
21. J’observerai enfin, à titre de sixième et dernière observation sur ce sujet, que la Cour
considère parfois la pratique comme étant pertinente, même lorsqu’elle ne satisfait pas au critère de
l’alinéa b) du paragraphe 3 de l’article 31. Ainsi, dans l’affaire de l’ Ile de Kasikili/Sedudu, elle a
estimé que certains actes, même s’ils ne constituaient pas une pratique ultérieure des parties quant à
22
Affaire des Frontières du Honduras (Guatemala/Honduras), sentence du 23 janvier 1933, RSA, vol. II, p. 1324.
23
Voir Documents officiels de la conférence des Nations Unies sur le droit des traités ⎯première et seconde
sessions : documents de la conférence (1968-1969), p. 42, par. 15 :
«L’accord peut s’exprimer par une action positive conjointe ou parallèle, mais il peut aussi être
constaté dans l’activité de l’une de s parties seulement dès lors que l’au tre partie donne son consentement
ou n’émet pas d’objection. Comme la Commission du droi t international le fait observer, il suffit que
cette autre partie accepte la pratique en question».
24Voir, par exemple, CR 2012/31, p. 53-54, par. 50-51 ; p. 56-57, par. 58-61 ; p. 57-58, par. 63 (Petrochilos).
25CR 2012/33, p. 36. - 9 -
l’interprétation du traité de1890, n’en étayaien t pas moins les conclusions auxquelles elle était
26
parvenue en interprétant le tr aité suivant son sens ordinaire ; on relèvera aussi que, dans
l’arbitrage Ethiopie/Erythrée, le tribunal a conclu que «la prati que ou le comportement des Parties
p[ouvai]t fort bien avoir une incidence sur les re lations juridiques de celles-ci, même si cette
pratique ou ce comportement ne pouvait être considéré comme une pratique à l’égard de
27
l’application du traité ou comme un accord entre les Parties» .
3. Application des principes juridiques aux arguments respectifs des Parties
concernant la pratique
22. Comment, donc, étant donné ce contexte juridique, les argumentaires respectifs des
Parties sur la pratique résistent-ils à l’examen ?
23. Dans sa première plaidoirie, la semaine dernière, M. Lowe a évoqué l’image d’un puzzle,
et dit que le Chili essayait d’assembler des pièces qui en fait provenaient de différents puzzles . 28
24. La comparaison n’est pas dénuée d’intérêt, car la Cour a effectivement devant elle un
ensemble de pièces, et la question se pose de savoir si, lorsqu’on les assemble, celles-ci font
apparaître les mots «Frontière maritime convenue en1952 et confirmée en1954», ce qui est bien
entendu la position du Chili, ou «Aucune frontière maritime ; uniquement un accord sur une ligne
de délimitation provisoire des pêcheries côtières», ce qui est le point de départ de la demande du
Pérou. Et la solidité des arguments relatifs à la pratique qui ont été avancés peut aisément être
éprouvée en identifiant, en ce qui concerne les arguments respectifs des Parties, les pièces du
puzzle qui ne peuvent être utilisées. Ces pièces dém ontreront dans quelle mesure la pratique a été
incohérente ou a manqué d’uniformité.
19 Les arguments du Chili
25. Commençons donc par la thèse du Chili. Au cours des deux semaines passées, il est
apparu que le Pérou avait en sa possession des piècesA, B et C dont il affirme qu’elles sont
incompatibles avec la position du Chili ⎯ ces pièces sont l’Argentine, les deux B Bázan et Bákula,
26
Ile de Kasikili/Sedudu (Botswana/Namibie), arrêt, C.I.J. Recueil 1999 (II), p. 1096, par. 80.
27
Décision concernant la délimitation de la frontière entre l’Erythrée et l’Ethiopie, décision du 13avril2002,
Nations Unies, RSA, vol. XXV, par. 3.6.
28CR 2012/29, p. 21. - 10 -
et enfin le C, qui est le comportement du Chili, en particulier pour ce qui est des prétendues lacunes
dans la législation et les cartes chiliennes.
26. M. Petrochilos a déjà examiné la question de l’Argentine en relation avec la ratification
de la CNUDM, et M. Colson reviendra ultérieurement sur les arguments avancés par le Pérou en ce
qui concerne la forme du traité conclu en1984 par le Chili avec l’Argentine. Pour ce qui est du
mémorandum de M.Bákula, je me contenterai d’ajouter que, en particulier eu égard aux
observations du ministre des relations extérieure s, M.Wagner, reconnaissant l’existence d’une
frontière maritime établie, ce document ne sau rait être considéré comme une communication
appelant une réaction des autorités chiliennes 29. Le Pérou n’avait en aucune manière revendiqué
positivement une zone maritime chilienne. Et, bien entendu, sa pratique ultérieure le confirme.
27. Toutefois, comme on nous a reproché de ne pas parler suffisamment de l’avis de
30
M. Bázan , je vais l’examiner un peu plus en détail.
28. Et comme pour tous les documents que le Pé rou a produits, nous invitons la Cour à lire
31 o
l’avis du conseiller Bázan dans son intégralité . Cet avis figure sous l’ongletn 167 de votre
dossier, et je vous invite à en prendre connaissance.
a) En haut de la première page de la tr aduction, qui se trouve page 3 de l’onglet n o 167 et apparaît
maintenant sur votre écran, vous pouvez voir le titre, qui rend compte de la conclusion finale de
l’avis. Il se lit comme suit : «Le parallèle passan t à l’endroit où la frontière terrestre touche la
mer constitue la délimitation maritime entre le Chili et le Pérou.» Ceci semble assez clair.
b) Si vous passez à la page 5, en bas de page, vous pouvez lire le passage que le Pérou a souligné
⎯ «il est possible de conclure à l’existence d’un te l accord». On ne vous a pas lu le reste de la
32
phrase , qui indique clairement qu’il n’y avait au cune équivoque. M.Bázan estimait qu’en
conséquence l’accord «[devait] être appliqué».
20 c) De même, en haut de la page 7, on trouve une ré férence à l’article IV de la déclaration de 1952,
une disposition qui, si elle «ne constitue pas un pacte explicite fixant la limite latérale de leurs
29CR 2012/28, p. 25.
30
CR 2012/33, p. 36.
31DC, vol. II, annexe 47.
32CR 2012/28, p. 43. - 11 -
eaux territoriales respectives,…commence par s upposer que ladite limite coïncide avec le
parallèle…». Le Pérou ne vous a toutefois pas donné lecture de la conclusion de M. Bázan au
sujet de l’articleIV, qui se trouve plus bas, page7, et qui est que «le paragrapheIV
susmentionné révèle de manière indiscutable que, aux yeux des parties contractantes, les eaux
territoriales ne sont délimitées ni par la prol ongation de la frontière terrestre, ni par une
perpendiculaire au littoral, ni par la ligne mé diane, mais par un parallèle géographique».
Etl’on voit facilement pourquoi le Pérou a pu om ettre ce passage lorsqu’il a cité l’avis de
M. Bázan à l’appui de sa thèse.
d) Au bas de la page7, M.Bázan commence à ex aminer l’accord de1954, relatif à la zone
frontière maritime spéciale, et relève que l’ar ticle1 dudit accord contient une reconnaissance
explicite de la frontière maritime. Nous so mmes d’accord. Cet examen se poursuit page9 et
33
aboutit à un passage que le Pér ou a cité hors de son contexte . Mais l’analyse ⎯ la
déclaration ⎯ se limite à réaffirmer, avec emphase et positivement, un fait préexistant sur
lequel le Chili, le Pérou et l’E quateur sont d’accord. Le fait que la frontière entre leurs mers
territoriales est un parallèle géographique, ce qui est une analyse étayant à l’évidence
l’existence en 1954 d’une frontière maritime convenue, et non d’un quelconque accord pratique
et provisoire.
e) Il est aussi remarquable que le Pérou n’ait pas lu à la Cour la conclusion générale de M. Bázan,
qui figure page 11 de l’onglet, selon laquelle :
«la frontière maritime entre le Chili et le Pé rou épouse le parallèle traversant le point
où la frontière terrestre aboutit en mer, da ns la mesure où les Etats concernés ont
convenu d’exercer leur souveraineté par le biais d’un accord dont la portée et les
caractéristiques sont déterminés par e ux dans les instruments internationaux
susmentionnés».
f) Vous vous souviendrez également que l’on vous a montré le croquis qui accompagne l’avis, sur
lequel figure le parallèle gé ographique mais aussi une ligne médiane et une ligne
perpendiculaire. Par contre, on ne vous a pas donné lecture du passage de l’avis ⎯ qui se
trouve juste au-dessus de la conclusion, page11 ⎯ où ce croquis est invoqué. M.Bázan
explique que toute autre méthode de délimitati on que celle utilisant le parallèle «aurait amputé
33
CR 2012/33, p. 37. - 12 -
21 notre zone de 200 milles de la partie située entre Iquique ou Pisagua et Arica, tandis que la zone
péruvienne aurait été élargie vers le sud de ce port et occupé une portion comprise entre les
eaux soumises à notre souveraineté et la haute- mer». Et il poursuit, en des termes dont, pour
être honnête, on vous a peut-être donné lecture: «Le croquis ci-joint prouve de manière plus
claire l’inadmissibilité de la situation qui aurait résulté d’ une telle approche» (les italiques sont
de nous). En d’autres termes, le croquis montre précisément les deux lignes autres que le
parallèle que le Chili n’aurait jamais approuvées.
29. Voilà donc pour ce que M.Bázan a réellement dit. Trois points méritent d’être
brièvement notés :
30. Premièrement, la note expose les vues d’un ancien conseiller juridique, consignées dans
un avis donné en interne, et dans la mesure où on doit lui accorder quelque poids, il étaye la thèse
du Chili. La conclusion relative à l’existence d’une frontière maritime est sans équivoque, les
différences dans le raisonnement juridique de l’intéressé viennent peut-être du fait qu’il ne
mentionne pas les procès-verbaux de 1952 et de 1954 et ne les a peut-être pas pris en considération.
31. Deuxièmement, lorsque l’avis a été par la suite publié par le ministère chilien des
relations extérieures, le Pérou ne s’est aucunement déclaré préoccupé, notamment par sa conclusion
principale selon laquelle que la frontière maritime suivait un parallèle de latitude.
32. Enfin, l’avis de M.Bázan est daté du 15septembre1964. S’agissant des relations
bilatérales des Parties, il est manifeste que cet avis n’a pas été perçu comme remettant en question
l’existence d’une frontière maritime convenue; co mment aurait-il pu le faire? En termes de
pratique concrète, l’événement majeur qui a suivi a consisté pour le Chili et le Pérou à entreprendre
“l’installation de marques d’aligne ment pour matérialiser le para llèle constituant la frontière
maritime» ⎯ ceci est bien entendu une citation de la lettre adressée par le Pérou au Chili le
34
5 août 1968 .
33. Je passe très brièvement du A et du B au C, à savoir la conduite du Chili.
34. Les lacunes supposées n’existent pas, comme l’a montré M.Petrochilos. La législation
chilienne ne révèle pas le vide que le Pérou voud rait y voir, alors que l’argumentation du Pérou en
34
MP, vol. II, annexe 47. - 13 -
ce qui concerne les cartes repose sur le mé morandum Bákula, dont l’importance supposée a
maintenant été démentie. Le fait demeure que le Chili a publié plusieurs cartes sur lesquelles
figurait la frontière maritime ⎯ et que le Pérou n’a protesté que huit ans après la publication de la
première de ces cartes.
22
Les arguments du Pérou
35. Pour revenir à l’analogie de M. Lowe, il est tout à fait évident que lorsqu’on compare la
position du Pérou à celle du Chili, il y a de nombre uses pièces que le Pérou ne peut placer dans le
puzzle qu’il vous a présenté: d’abord la nécess ité de donner un sens aux dispositions clés de
l’articleIV de la déclaration de Santiago, puis les diverses séries de procès-verbaux, les accords
de1954, le décret présidentiel péruvien de1955, qui bien sûr vise expressément la déclaration de
Santiago que le ministre péruvien des relations exté rieures a pris soin de faire publier dans la série
législative des NationsUnies au moyen d’une note verbale datée du 22août1972 35, les accords
de 1968-1969 sur la matérialisation de la frontière maritime et, enfin, l’abondante pratique.
36. Le Pérou a fait ce qu’il a pu, mais il ne peut amener ces éléments à servir sa cause, ni par
référence aux faits, ni par référence aux principes juridiques applicables.
37. A cet égard, il est utile de faire une pause pour imaginer ce qu’aurait pu être la conduite
du Pérou durant ces décennies s’il avait vraiment pensé qu’il n’y avait pas de frontière maritime et
que la ligne convenue n’était vraime nt qu’une ligne provisoire aux fins des activités de pêche. Si
tel avait été le cas, on vous aurait montré :
a) premièrement, un libellé de car actère provisoire, et un arrangement pratique d’application
côtière, éléments que le conseil du Pérou tente tardivement de lire dans l’accord relatif à une
zone frontière maritime spéciale, sans parler d’un accord dont le titre serait différent ;
b) deuxièmement, la présence d’une réserve équivalente dans les accords de1968-1969 sur la
matérialisation de la frontière maritime, sans pa rler d’un acte final d’août1969 doté d’un titre
ne visant pas expressément le «limite maritimo» 36;
35
CMC, vol. IV, annexe 164, p. 990, note 1.
36
CMC, vol. II, annexe 6, p. 34. - 14 -
c) troisièmement, le Pérou aurait fait fond sur l’absence de documents dans lesquels il invoquait la
frontière maritime ou la mentionnait ⎯ainsi, par exemple, pas de décret suprême de1955, et
pas publication de celui-ci par l’Organisation des Nations Unies ;
23 d) quatrièmement, on vous aurait montré une l ongue série de protestations péruviennes
correspondant à toutes les fois où le Chili a invoqu é la frontière maritime dans ses relations
37
avec le Pérou et, de même, celles où l’Equateur l’a invoquée ;
e) cinquièmement, ou aurait invoqué devant vous une opposition ou réaction du Pérou lorsque
d’autres Etats ont invoqué la frontière maritime, que ce soit devant la Cour 38 ou dans leurs
publications, comme celles des Etats-Unis d’Amérique ou de la Chine citées par M.Crawford
au début des audiences 39 ;
f) Et, finalement, on aurait fait état d’une réaction, quelle qu’elle soit, aux vues judiciaires du
40 41
président Bustamante y Rivero , ou aux vues clairement exprimées par Jiménez de Aréchaga
ou d’autres commentateurs 42.
38. Mais bien sûr il n’y a rien eu de tout cela. Les éléments de preuve disent tout le
contraire.
4. Conclusion
39. Monsieur le président, Mesdames et Messieurs de la Cour, la réalité est que l’on est en
présence d’une affaire dans laquelle les deux Parti es ont, par leur pratique, reconnu l’existence de
la frontière maritime, et cette pratique a toujou rs été précisément ce que l’on aurait pu attendre,
étant donné que les deux Parties reconnaissaient une frontière maritime convenue. Le Pérou
voudrait tardivement déconstruire une pratique qui satisfait sans difficulté aux critères énoncés à
l’alinéa b) du paragraphe 3 de l’article 31 et qui est en outre aussi cohérente qu’exhaustive.
37
CMC, vol. IV, annexe 212.
38Voir CMC, par. 2.230-2.234 ; DC, par. 5.7-5.8.
39CMC, vol. IV, annexes 216, 219, 220 et 222; CMC, vol. VI, fig. 13; CMC, vol. IV, annexe 218; CMC,
vol. VI, fig. 14.
40Plateau continental de la mer du Nord (République fédérale d’Allemagne/Danemark) (République fédérale
d’Allemagne/Pays-Bas), arrê t, C.I.J.Recueil1969 , opinion individuelle du président Bustamante y Rivero, p.61,
par. 6 b).
41CMC, vol. V, annexe 280.
42Voir CMC, par. 2.237-2.262 ; DC, par. 5.16-5.17. - 15 -
40. Quant aux puzzles en présence, une raison fort simple explique pourquoi le Pérou ne peut
placer ses pièces dans son puzzle, la thèse qu’ia développée devant vous. Cette raison est que,
jusque très récemment et jusqu’à ce qu’il monte son dossier il y a quelque cinq ou dix ans, les
puzzles ⎯ terminés ⎯ des deux Parties faisaient apparaître les mots «Frontière maritime convenue
en 1952, confirmée en 1954».
Monsieur le président, Mesdames et Messieurs de la Cour, je vous remercie pour votre
aimable attention et vous demande de donner la parole à M. Dupuy.
24 Le PRESIDENT : Merci, Monsieur Wordsworth . I now give the floor to Professor Dupuy.
You have the floor, Sir.
Mr. DUPUY:
T HE ATTITUDE OF E CUADOR
1. Mr. President, last Tuesday, Peru’s counsel, in his presentation on this question⎯ the
attitude of Ecuador — tried to convince you of two th ings. Firstly, that Chile’s assertions that Peru
had made a whole series of concessions to Ecua dor regarding the existence of the maritime
boundary between the two countries were imaginary; then, that that boundary had in fact been fixed
only very recently, on 2 May 2011, proof, in his vi ew, that, hitherto, it had not existed. Peru’s
counsel thus wanted, albeit implicitly, to lead you to conclude that Ecuador shared Peru’s
contention that the delimitation was new.
2. This means that we must reframe the debate , Mr. President. The point of fact and of law
that is of relevance to the Court at this stage is not Peru’s argument concerning its maritime
boundary with its neighbour to the north; what is at issue now is whatEcuador — the third State
party to the 1952 and 1954 agreements— thinks and what it has always thought. Has Ecuador
always considered that the maritime boundaries be tween the three countries, and therefore its own
boundary with Peru as well, were fixed on 18 August 1952? Or does it share Peru’s view that that
boundary is still brand new, since it is said to date from only 2 May 2011?
3. In the latter case, Peru’s argument would be strengthened. In the former case, on the
contrary, it would be necessary for the Court to find that two out of three of the States parties to the - 16 -
Santiago Declaration, Chile and Ecuador, share th e same interpretation of the content of the
Santiago Declaration, since the conventional na ture of the latter is now accepted by Peru.
Ecuador’s position is therefore quite simply decisive in this case. As I demonstrated last week, this
explains why Peru has gone to such lengths to ensure that you cannot hear the reply of the Party
conspicuously absent from this room.
25 4. In these circumstances, the best way to use this second rou nd, even if it means repeating
some of the facts already reported in my presentation last week — no aspects of which have been
genuinely disputed—, is to revisit the successive manifestations of Ecuador ’s consistency. This
will form the first of the two parts of my presentation. The second will be devoted to a
reconsideration of the boundary line shown on the map annexed to the Exchange of Notes of
2 May 2011 between Peru and Ecuador.
I. The chronology of the manifestations of the Ecuadorean interpretation
of the Santiago Declaration
5. Mr. President, we have prepared a worki ng document in the form of a table for Members
of the Court. It can be found at tabs 170 and 171 of the judges’ folder. The first of those is in
English and the second in French. The table is ma de up as follows. In the first column, starting
from the left, you will find dates; these are the dates of documents or, as the case may be, legal
facts. They all have one thing in common. They have the same author. That author is Ecuador 43.
6. In the second column, again starting from the left, you will find a description of each of
the texts considered, be they resolutions or communiqués — either unilateral or joint —, diplomatic
notes, press releases from the Ecuadorean Ministry of Foreign Affairs, marine charts and reports of
parliamentary commissions.
7. In the third column, you have the rele vant passage of the document in question and you
will thus be able to see what it expressly states. Finally, in the last column on the right of the table,
you will find the references to the annexes in which the full text of those documents may be found.
8. The table is very enlightening. All tho se documents, all of them, Mr. President, Members
of the Court, say two things. The first is th at, in Ecuador’s opinion, the maritime boundaries
43
With the exception of Annex 79 of Chile’s Counter-Memorial, which was produced by Peru but which presents
the views of Ecuador. - 17 -
between the three States were fixed in 1952. The second is that the text that gave rise to that
26 determination is always the same. It is the Sa ntiago Declaration — and that, need I recall — was
also the position shared by Peru until 2005.
9. As time is important in this case as in many others, in order to be fully persuaded that
Ecuador said the same thing before and after 2May2011, you may also consult a timeline at
tab173 of the judges’ folder showing the issue dates of those documents listed in the previous
table, which were already presented in chronological order.
10. So, I could stop there and leave you to study that table in your respective offices, since it
is self-explanatory. I could have left it at that , especially since you would perhaps have preferred
to hear a more colourful presentation of Chile’s argument on this point, with rhetorical flourishes
and dramatic gestures.
11. Unfortunately, there will be none of this, Mr. President. We have to consider the facts
and nothing but the facts. It is the facts alone th at will reveal time and ag ain Ecuador’s consistent
and unchanging position concerning the date on which its boundary with Peru was established and
the choice of the geographic parallel as its basic vector.
12. I will, however, ensure that I do not tax your attention too much, given that you will have
every opportunity to consult this document again for the purposes of preparing the judgment which
you will deliver in the present case. I will ther efore select some of those documents, even
though — and I stress this point — all of them are equally relevant.
13. In my presentation last week, I already discussed the Ecuadorean law of 1971 concerning
44
its baselines, to which Peru has never raised any objection ; I will now turn to the fourth
document in the table before you. This is the Joint Declaration by the Presidents of Ecuador and
Chile dated 1December2005, which was made s ubsequent to the resolution of the National
Congress of Ecuador adopted two weeks previously; they reaffirm therein the complete validity of
the maritime boundaries established by the 1952 Declaration and their full agreement relating to the
Special Maritime Frontier Zone. Let us recall th at the purpose of this joint statement was to
44
CR 2012/32, p. 15, para. 14 (Dupuy); CMC, Vol. IV, Ann. 212, p. 1263. - 18 -
27 counter the claims of Peru, which had decide d to openly dispute the existence of those
45
boundaries .
14. I would now like to draw your attenti on to a document mentioned on the second page of
the table. This is the document which, on 7Fe bruary2008, stated that the Santiago Declaration
and the aforementioned 1954 treaty did not merely lay down delimitation criteria, but indeed
established the delimitation itself. Ecuador insi sted on that point because it distrusted Peru’s
reference to mere “criteria” in that regard 46, since, by definition, criteria can be revised and are
hardly compatible with the stability of existing boundaries.
15. Again on page 2 of the table, in addition to the joint communiqué of
6-7 September 2009, again issued by Ecuador a nd Chile, reaffirming the treaties of 1952 and 1954
as the basis of an effective delimitation, you will find in particular the communiqué by President
47
Correa, the President of Ecuador, dated 11 Oc tober 2010, which I also cited last Friday . As you
will recall, this document is a formal notice, if not a threat, addressed by him to Peru. It is the
document in which the President of Ecuador states:
“if the boundaries are legally ratified in accord ance with the nautical chart — this is
chart IOA 42— there would be no need to intervene in the proceedings, but if the
nautical chart is challenged by Peru, we should consider seriously the prospect of
Ecuador taking part in the proceedings at The Hague”.
16. It is clear that this declaration, made by a politician who is not a lawyer by training, is
not strictly accurate in terms of the terminolog y used, since the term “ratifica” is, technically
speaking, inappropriate here. Nevertheless, this doc ument is of the utmost importance. It is this
document that brings Peru face to face with its responsibilities. Either it accepts the existing
boundary or Ecuador will request to intervene before the Court.
17. However, we know what happened next. Peru complied and accepted chart IOA 42, the
same chart that contains the inset which Mr. Bundy seems to have forgotten about, and
which contains the explicit references to the treaties of 1952 and 1954 as giving rise to the
4CR 2012/32, p. 16, para. 18 (Dupuy).
46
RC, Vol. III, Ann. 108, para. 2.
4CR 2012/32, pp. 22-23, para. 47 (Dupuy); RC, Vol. III, Ann. 144. - 19 -
28 existing boundary, constituted, as the chart show s, by the geographic parallel, and which does
indeed date back to 18 August 1952.
18. The date here is 11 October 2010, that is to say, 58 years after the Santiago Declaration
was adopted and still eight months before the Exchange of Notes of 2May2011 between Quito
and Lima.
19. Be that as it may, Peru complied. It said nothing and consented to recognize the chart,
even though it contains the reference which coun sel for Peru again avoided mentioning: the
reference which links the line of parallel between the two States, not to a future agreement between
them, but to existing treaties. It will be recalled that the reference is repeated in the official
geographic map included in the folder, which was presented during Chile’s pleadings on
48
7 December .
20. The final document to which I would like to draw your attention is the last one in the
table. It appears on page 3 and is the most recent document since it dates from 25 and
26July2012, when it was adopted by the ministers of Chile and Ecuador, meeting in council. It
confirms that both sides once again agree to refer to the 1952 and 1954 agreements as the source of
the maritime boundaries between the three Stat es. However, this time it is 15 months after the
Exchange of Notes between Peru and Ecuador. Thus, whether we place ourselves before or after
the Exchange of Notes, there is no change in Ecuador’s position.
21. I could continue in this way with all of the items in the table, each element of which, I
must repeat, provides equally conclusive evidence of the consistency of Ecuador’s position and the
lack of protest by Peru. Following President Co rrea’s declaration, Peru was fully aware of the
sanction awaiting it if it were explicitly to argue in respect of its neighbour to the north what it
asserts in respect of Chile, namely that there is no maritime boundary.
22. It is clear, then, that the statement by wh ich Peru seeks to substantiate the argument that
the agreement between Ecuador and Peru dat es only from 2May 2011 is, to say the least,
29
erroneous. Let us now reconsider the line of delimitation adopted in that Exchange of Notes.
48
CR 2012/32, p. 20, paras. 36-37 (Dupuy). - 20 -
II. The course of the boundary line annexed to the Exchange of Notes of
2 May 2011 between Ecuador and Peru
23. Counsel for Peru affects to believe th at the terms of the Exchange of Notes of
49
2 May 2011 would embarrass us . Very well! Then let us examine the terms of that Exchange of
Notes: in the view of my friend, Mr. Bundy, th e fact that paragraph 2 of the Exchange of Notes
contains the phrase “ shall extend along the line” is critical. Yet, immediately afterwards, he
himself gave you the key to this future indicative, on the basis of which he sought nonetheless to
show that the agreement established a new bounda ry. Clearly, there is something new there
compared to the previous situation, but I already indicated that last Friday 50. This is the fact that
the endpoint of the maritime boundary slides on the line of parallel, the same parallel as before, so
as now to be displaced westwards; I shall explain the reasons for this in a moment. You see here
the map produced on 7 December.
24. This lateral displacement of the mar itime boundary does not mean that Ecuador’s
position is incompatible with the one it has consistently upheld, namely that the 1952 Declaration is
the source of the parallel of latitude and the axis of the delimitation. The Santiago Declaration
defined the boundary with certainty; but its three co-signatories sought to safeguard the future and
retain the option of extending the projection of their zone of jurisdiction beyond 200 nautical miles,
which they ultimately settled on, thus foreshadowi ng the breadth of the exclusive economic zone.
We see evidence of this in the wording of Article II of the Declaration, which speaks of a minimum
distance of 200 nautical miles.
25. What matters, in this case, and what en sures the consistency of Ecuador’s position with
the position it has always adopted, is that the geogr aphic parallel is indeed the same parallel which
has always resulted from the application of the Santiago Declaration.
26. Let us return then to the reason for the seaward shift of th e endpoint of the maritime
30 boundary which explains the use of the future in the Note of 2 May 2011. I discussed the reason,
51
Mr. President, in my presentation last Friday : it relates to the final concession made by Peru to
Ecuador’s long-standing aspirations. That concession was to close the entire Gulf of Guayaquil by
4CR 2012/33, p. 62, paras. 9-10 (Bundy).
50
CR 2012/32, p. 21, para. 39 (Dupuy).
5CR 2012/32, pp. 20-21, para. 39 (Dupuy). - 21 -
means of straight baselines, not only on the Ecuadorean side, that is to say to the north of the
parallel, as had been the case since the Ecuadorean la w of 1971, but also to the south, with Peru
now agreeing to align itself — it can be said — with the Ecuadorean straight baselines.
27. This is therefore for the future, hence the use of the future tense, in other words starting
from the Exchange of Notes of 2 May, which — albeit only to the extent mentioned — constitutes
a new agreement. However, it is an agreemen t which is still positioned, in the most spatial
meaning of the term, on the rail of the already ex isting parallel, since it resulted from the Santiago
Declaration, which Ecuador recalled on its nau tical chart, but which Peru avoids recognizing
officially.
28. That has not in any way prevented Ecuador from reasserting, without fear of
contradiction, this time in the framework of the Chile-Ecuador Inter-Ministerial Council of 25 and
26 July 2012, its firm commitment to the 1952 and 1954 agreements.
29. Thus, to sum up, Mr. President, what occurred with the Exchange of Notes of
2May2011 between Quito and Lima is that Peru accepted the positions that Ecuador has always
defended. This agreement sees two diplomacies, that is to say, two sets of ulterior motives,
meeting on the geographic parallel. The line of pa rallel is confirmed, but Lima wishes to assert
that it is new, while Quito considers that it has never changed, because it has existed since
18 August 1952. Peru was thus able to “save face”, if I may use that expression, by not needing to
state expressly that, in recognizing the nautical chart, which refers to the 1952 and 1954
agreements, it went back to the parallel aris ing from the Declaration. As far as Ecuador was
concerned, there was to be no change in its convic tions; it had no need to reiterate this since it had
already been indicated on its 2010 maps, henceforth accepted by Peru; and President Correa had
said that, if that condition was met, he would be able to renounce intervening in this case.
31 30. Mr. President, it remains for me to lay stress on the fact that the seaward extension of the
boundary sliding thus on the rail of the parallel reached Point B. I would remind you that this
proves that, contrary to the terms of the Exchange of Notes, the western endpoint of the maritime
boundary does not result from a reading of Article IV of the Declaration based solely on the
presence of the islands, which would have taken it only as far as Point A. In that connection, allow - 22 -
me to refer you to my presentation of 7 December 52 and to the accompanying map at tab 75 of the
judges’ folder.
31. In conclusion, allow me simply to point out that, with respect to the application of
ArticleIV of the Santiago Declaration, Peru’s di stinguished counsel have not taken the time to
harmonize their approach! At one and the same s itting, last Tuesday morning, our distinguished
colleague Vaughan Lowe explained that that provision could only be understood if the parallel was
continued beyond 200 nautical miles, until it met the maritime zone projected around the
53
Galapagos group ; whereas, Mr. Bundy wished to see in th e agreement made by the Exchange of
Notes of 2 May 2011 the application of the principles of an Article IV that would apply not to the
54
distant Galapagos archipelago but to the islands near the coast .
Mr.President, that concludes my presentati on on the consistency of Ecuador’s position.
Thank you for your attention. I would now ask you to give the floor to Mr. Colson.
The PRESIDENT: Thank you, Professor. Je donne à présent la parole à M. Colson.
32 M. COLSON :
L’alta mar
1. Je vous remercie, Monsieur le président, Mesdames et Messieurs de la Cour. Pour
commencer, j’indique à l’intention du Greffe et des interprètes que le paragraphe7 de la
déclaration qu’ils ont devant eux est supprimé de mon exposé. Cet exposé vise à répondre à ce
qu’a dit M.Pellet au sujet de la question de l’ alta mar/du triangle extérieur, ainsi qu’à présenter
quelques observations additionnelles.
1. Deux points d’accord essentiels entre les Parties
2. Je pense que, à ce stade, nous pouvons dire que M.Pellet et moi sommes d’accord sur
deux points essentiels: premièrement, il existe des situations comparables d’ alta mar/de triangle
extérieur dans la pratique des Etats; et, deuxi èmement, le droit international autorise une
5CR 2012/32, p. 19, para. 32.
53
CR 2012/33, p. 18, para. 45.
5CR 2012/34, p. 19, para. 55. - 23 -
délimitation même lorsqu’il n’y a pas chevauchem ent des arcs de cercles décrivant les limites
extérieures de zones de 200 milles marins voisines.
3. M. Pellet a, lors de sa seconde plaidoi rie, abandonné l’antienne que nous avons entendue
lors du premier tour, à savoir que le Chili empêchait le Pérou d’avoir cette zone ⎯ le cas échéant
55
par la force, déclarait-il . Lors du second tour, il a modifié sa technique et posé la question
rhétorique de savoir pourquoi le Pérou aurait accep té une frontière avec le Chili qui implique une
zone d’alta mar aussi vaste. Je ne peux répondre à cette question rhétorique ⎯je n’y étais pas.
Mais je soupçonne qu’elle a quelque chose à voir avec l’observation du président de Aréchaga
selon laquelle les Etats sud-américains riverains du Pacifique considèrent qu’ils ont une «projection
directe et linéaire» dans l’océan 56. Les arcs de200milles marins qui se chevauchent et les zones
«enveloppantes» n’ont pas leur place dans cette conception.
4. Le fait que l’ alta mar est plus vaste que d’autres alta mar n’a en lui-même aucune
conséquence juridique.
5. Ainsi, il n’y a aucune différence dans les principes juridiques; la question est seulement
de savoir si l’accord des Parties a pleinement dé limité les zones de200milles marins respectives
du Chili et du Pérou.
6. Je souhaiterais maintenant faire quelques observations sur ce qu’a dit M. Pellet au sujet de
trois des exemples de la pratique des Etats que nous avons invoqués la semaine dernière.
57
33 2. Les Grisbådarna
7. [Montrer le graphique 1.] M.Pellet a a ppelé l’attention sur la carte que nous avons
produite, qui montrait que les parties avaient étendu le ur frontière dans des accords ultérieurs, et il
a appelé l’attention sur le fait que l’accord de1968 relatif au plateau continental 58appliquait la
méthode de l’équidistance. J’en conviens, mais je souhaiterais souligner un point différent. Et ce
point est que lorsque ces parties ont élargi leurs zones et conclu de nouveaux accords de
55CR 2012/29, p. 46, par. 6 (Pellet).
56
CMC, annexe 280, p. 794.
57Affaire des Grisbådarna (Norvège, Suède), sentence du 23 octobre 1909.
58Accord entre la Suède et la Norvège concernant la dé limitation du plateau continental, 24 juillet 1968 (entré en
vigueur le 18 mars 1969), Nations Unies, Recueil des traités, vol. 968, p. 241. - 24 -
délimitation, la ligne frontière établie par la sentence rendue par le tri bunal dans l’affaire des
Grisbådarna n’a pas été modifiée : la Norvèg e ne pouvait revendiquer la zone d’ alta mar à cause
de la sentence Grisbådarna, et cette zone est demeurée hors de sa portée dans ces accords
ultérieurs. Elle se trouve en effet du côté suédois de la ligne frontière et elle y est toujours restée.
[Fin du graphique 1/afficher le graphique 2.]
3. Colombie-Equateur
8. Ma seconde observation concerne la fr ontière entre la Colombie et l’Equateur 5. Comme
vous vous en souviendrez, cet accord désigne le parallèle de latitude passant par le point terminal
de la frontière terrestre comme constituant la frontiè re maritime entre la Colombie et l’Equateur, et
60
qu’il crée une zone d’ alta mar. Et comme M.Dupuy l’a relevé vendredi dernier , lorsque cet
accord a été ratifié, l’explication donnée devant le Parlement colombien était que la délimitation au
moyen du parallèle géographique passant par le point terminal de la frontière terrestre «avait été en
particulier choisi par les pays signataires de la déclaration de San tiago pour délimiter leurs
juridictions maritimes respectives» et, poursu it ce document, «[i]l est évident que, dans
l’océan Pacifique, cette ligne [le parallèle] constitue une frontière claire, juste et simple, qui répond
61
adéquatement aux intérêts des deux pays» . La thèse du Pérou nous emmène de l’autre côté du
miroir : l’accord frontalier Colombie-Equateur de 1975, que l’on pensait être le dernier des accords
frontaliers conclus entre les Etats signataires de la déclaration de Santia go, est devenu dans la
version péruvienne de l’histoire le premier accord de délimitation entre ces Etats !
34 9. Mais prenons le temps de regarder cet accord à la lumièr e du guide des traités frontaliers
62
en cinq points de M. Bundy . Certes, la convention sur le droit de la mer ne contient ni guide ni
liste de ce type, et nous allons voir que dans leur pratique, les Etats n’ont peut-être pas eu
connaissance ni utilisé la liste de M. Bundy.
59Accord entre la Colombie et l’Equateur, 23 août 1975 (entrée en vigueur le 22 décembre 1975), Nations Unies,
Recueil des traités, vol. 996, p. 239.
60
CR 2012/31, p. 26, par. 9.
61
CMC, vol. IV, annexe 214; voir aussi annexe 215.
62CR 2012/29, p. 15-16, par. 61 (Bundy). - 25 -
10. L’accord apparaît maintenant sur votre écran ⎯ et sous l’onglet 178 de votre dossier. Le
premier point de M. Bundy était qu’un accord étab lissant une frontière maritime doit indiquer que
sa matière concerne la frontière maritime ⎯ et vous voyez qu’en l’occurrence l’article premier vise
63
la «limite de leurs zones marines et sous-marines respectives» . Donc, sur ce point, l’accord passe
le test.
11. Le second critère de M. Bundy est qu’un accord frontalier doit préciser les zones qui sont
délimitées. L’accord est vague à cet égard: il vise la «souveraineté», la «juridiction» et la
64
«surveillance» en termes généraux . Notateurs sévères, force nous est de dire que sur ce point
l’accord ne passe pas le test.
12. Le troisième critère de M. Bundy est que le point de départ doit être indiqué au moyen de
coordonnées. A l’évidence, l’accord qui est deva nt vous ne satisfait pas ce critère. L’accord
de1975 ne contient en effet pas de coordonnées, et ce n’est que cette année, en2012, que les
65
parties concernées ont convenu des coordonnées précises du parallèle constituant la frontière . Au
regard de la liste de M. Bundy, l’accord ne satisfait pas à ce critère, mais la Colombie et l’Equateur
n’ont rien à craindre parce que, comme vous l’av ez noté dans l’arrêt que vous avez rendu en
l’affaire Cameroun c.Nigéria s’agissant de la délimitation de la zone du lac Tchad, le fait qu’un
accord puisse «présent[er] quelques imperfections t echniques et que certains détails rest[ent] à
préciser» (Frontière terrestre et maritime entre le Cameroun et le Nigéria (Cameroun c. Nigéria ;
Guinéeéquatoriale (intervenant)), arrêt, C.I.J.Recueil2002 , p.34, par.50) ne signifie pas qu’il
n’y a pas accord sur la frontière.
13. Le quatrième critère de M. Bundy veut que la totalité du tr acé de la frontière, y compris
ses points terminaux, soit définie, soit par des coordonnées, soit par l’indication exacte de la
distance jusqu’à laquelle la frontière s’étend en me r à partir de son point de départ. Là encore,
35 l’accord ne passe pas le test. L’intention des parties est que le parallèle serve à toutes fins et que la
63
Accord entre la Colombie et l’Equateur, 23 août 1975 (entrée en vigueur le 22 décembre 1975), Nations Unies,
Recueil des traités, vol. 996, p. 239.
64
Ibid., art. 3.
65Déclaration conjointe des ministres des affaires étrang ères des Républiques de l’Equateur et de la Colombie,
publiée le 13 juin 2012, annexe CH-2. - 26 -
66
ligne continue de diviser les zones qui pourraient être établies à l’avenir . [Fin du
graphique 2/montrer le graphique 3.] Aucun point terminal n’est spécifié. De fait, lorsque l’accord
a été conclu, l’Equateur avait une zone de 200m illes marins, mais la Colombie n’en avait pas
déclaré, et elle ne l’a pas fait pendant les tr ois années qui ont suivi, n’en déclarant une que
le 4 août 1978. Mais l’intention des parties est clai re : le parallèle s’applique à toutes fins et, bien
sûr, il délimite maintenant les zones de 200milles marins des deux pays. Et comme nous le
voyons, il y a une zone d’ alta mar sur la carte que nous avons préparée, qui décrit l’accord et
apparaît maintenant sur votre écran (onglet n o 179).
14. Enfin, le cinquième critère de M.Bund y veut que l’accord comprenne une carte. En
l’occurrence, la carte qui apparaît sur votre écran est notre carte, car aucune carte n’était annexée
au traité.
15. Cet accord ne satisfait pas à quatre des ci nq critères énoncés par M.Bundy. Mais je
pense que celui-ci conviendrait que le traité de1975 entre la Colombie et l’Equateur est un traité
délimitant une frontière. [Fin du graphique 32/montrer le graphique 4.]
4. Le traité de 1984 entre le Chili et l’Argentine
67
16. La troisième observation concerne le tr aité de 1984 entre le Chili et l’Argentine . Vous
le voyez maintenant sur votre écran. Il crée une zone d’ alta mar relativement importante
(onglet 180). M. Pellet a évoqué le contexte histor ique de cet accord. Ses explications sur le plan
68
de savoir pourquoi et comment cet accord a vu le jour ne sont pas exactement celles du Chili,
mais je pense qu’il conviendrait avec nous que le traité de 1984 entre l’Argentine et le Chili a vu le
jour à la suite d’un arbitrage dont le résultat n’a pas été bien accueilli par le Gouvernement argentin
de l’époque, la guerre menaçait, le pape est in tervenu comme médiateur et ceci a abouti à une
solution globale exhaustive. Ces circonstances sont extrêmement différentes de celles dans
lesquelles la déclaration de Santiago a été signée. Pourtant le Pérou a à maintes reprises essayé de
tirer argument des différences existant entre les text es de la déclaration de Santiago de 1952 et du
66
Accord entre la Colombie et l’Equateur, 23 août 1975 (entrée en vigueur le 22 décembre 1975), Nations Unies,
Recueil des traités, vol. 996, p. 239, article premier.
67Traité de paix et d’ amitié entre le Chili et l’Argentine, signé à la cité du Vatican le 29 novembre 1984 (entrée
en vigueur le 2mai 1985), Nations Unies, Recueil des traités, vol. 1399, p. 89, CMC, vol. II annexe 15.
68CR 2012/34, p. 23, par. 7 (Pellet) - 27 -
traité entre l’Argentine et le Chili de1984 69, alors même que 32ans de pratique des Etats, de
nombreuses décisions judiciaires et arbitrales intern ationales sur le sujet et trois conférences sur le
36 droit de la mer séparent ces deux textes. Et, comm e en convient le Pérou, les circonstances dans
lesquelles ces accords ont été conclus sont extrêmement différentes. [Fin du graphique 4.]
17. L’argument du Pérou est quelque peu similaire à deux arguments avancés par le
Danemark dans l’affaire Jan Mayen que la Cour a rejetés. Dans cette affaire, le Danemark a voulu
assujettir à la Norvège des normes de comporteme nt applicables ailleurs. Premièrement, le
Danemark faisait valoir qu’il devait bénéficier du même traitement que la Norvège avait accordé à
l’Islande dans un accord de délimitation qu’elle avait conclu avec ce pays ( Délimitation maritime
dans la région située entre le Groenland et Jan Mayen (Danemark c.Norvège), arrêt,
C.I.J. Recueil 1993, p.75-76, par.83). Sur ce point, la Cour a déclaré, au paragraphe86 de son
arrêt :
«En opposant à la Norvège les accords de 1980 et 1981, le Danemark entend
obtenir, par voie judiciaire l’égalité de tr aitement avec l’Islande…Mais dans les
relations conventionnelles, il appartient toujours aux parties intéressées de déterminer
par accord, les conditions dans lesquelles peuvent au mieux être aménagés leurs
rapports mutuels.» (Ibid., p. 77, par. 86.)
18. Si cela est vrai de la méthode de délimitation, cela doit assurément l’être aussi des textes
dans lesquels les accords de délimitations sont consignés.
19. Le second argument du Danemark concerna it l’île aux Ours de la Norvège et la
délimitation interne établie par celle-ci entre la zone économique exclusive de son territoire
continental et la zone de protection des pêches autours de Svalbard. Dans le cadre de cette
délimitation interne, la Norvège ne donnait pas plei nement effet à l’île aux Ours afin que la zone
maritime de celle-ci n’empiète pas sur la zone de 200 milles marins de son territoire continental. Et
le Danemark voulait qu’il en soit de même pour le Groenland. Cet argument danois a lui aussi été
rejeté par la Cour. Il concernait la délimitati on, et non la forme de l’accord, mais ce qu’a dit la
Cour en cette occasion est pertinent. Elle a déclaré :
«En ce qui concerne l’île aux Ours, ce territoire est situé dans une région sans
rapport avec la zone de chevauchement des revendications à délimiter maintenant. A
cet égard, la Cour observe qu’une Partie à un différend ne saurait être juridiquement
69
CR 2012/29, p. 15-16, par. 61-62 (Bundy). - 28 -
tenu de transposer, pour le règlement de ce différend, une solution particulière qu’elle
a adoptée précédemment dans un contexte différent.» (Ibid., p. 76, par. 85.)
20. Là encore, si tel est le principe applicable à la méthode de délimitation elle-même, il doit
assurément s’appliquer aussi à la forme d’un acco rd de délimitation adopté par le même Etat
trente-deuxans après et dans des circonstan ces géographiques et historiques extrêmement
différentes.
37 21. Ainsi, l’argument rhétorique opposant les s ituations du Pérou et de l’Argentine n’est rien
d’autre que cela. Le fait qu’il y ait une différe nce dans les textes juridiques que constituent la
déclaration de Santiago et le traité de 1984 entre le Chili et l’Argentine est dénué de pertinence.
22. Monsieur le président, Mesdames et Messi eurs de la Cour, la frontière maritime à
vocation générale délimitant l’ intégralité des zones de 200mille s marins du Chili et du Pérou a
bien rempli sa fonction pendant soixante ans. Qu’il y ait une zone d’ alta mar à la disposition de la
communauté internationale n’est pas inhabituel dans la pratique des Etats. En l’occurrence, c’est
simplement le résultat d’une dé limitation des zones de 200 milles marins du Chili et du Pérou qui
respecte la projection directe et frontale en mer de chaque Etat.
Je vous remercie, Monsieur le président. Je re mercie la Cour de s on attention et je vous
demande de donner la parole à M. Crawford.
Le PRESIDENT: je vous remercie Monsieur Colson. MonsieurCrawford, c’est à votre
tour. Vous avez la parole.
M. CRAWFORD :
CONCLUSIONS
1. Introduction
1.1. Monsieur le président, Mesdames et Messi eurs de la Cour, comme vous l’avez fort bien
compris, la présente espèce n’a pas trait à un accord tacite; ce n’est pas l’affaire Nicaragua
70
c. Honduras, et le Pérou le reconnaît aujourd’hui . Elle ne peut pas non plus être comparée à
d’autres affaires dans lesquelles une partie prétendait qu’il existait un accord frontalier :
70
CR 2012/33, p. 32, par. 4 (Wood). - 29 -
a) il ne s’agit pas d’une tentative d’appliquer à d es frontières maritimes un accord qui traite de la
division de la souveraineté territoriale, comme dans la première phase de l’affaire
Nicaragua c. Colombie . 71
b) La présente espèce n’est pas fondée sur l’appli cation d’un accord définissant des «frontières
d’Etat» pour la zone économique exclusive et le plateau continental, comme dans l’affaire
Roumanie c. Ukraine 72.
73
38 c) Elle ne repose pas sur le comportement d es Etats, que ce soit en matière de pêcheries ou de
74
concessions pétrolières , comme c’était le cas dans les affaires Golfe du Maine, Jan Mayen et
Cameroun c. Nigéria.
1.2. Il ne s’agit pas non plus d’une affaire fa isant intervenir un accord découlant de l’usage
d’une ligne à «vocation spécifique, limitée», co mme M. Lowe voudrait vous le faire accroire 75, ou
d’une ligne représentant un «arrangement[] proviso ire[] de caractère pratique», comme vous l’ont
76
assuré M.Lowe et sirMichael . En la présente espèce, l’argumentation du Chili repose sur de
véritables accords que les Parties ont conclus, a ppliqués et respectés pendant soixanteanssans
aucune réserve, sans clause «sans préjudice de», ni indication d’une application intérimaire,
77
provisoire ou limitée. Il appartient donc à la Cour d’interpréter ces accords , qui sont spécifiques à
la présente espèce.
2. Continuité historique : le caractère durable des zones de 200 milles marins
2.1 Les Parties s’acco rdent à dire qu’elles ont joué un rô le pionnier en proclamant leurs
zones de 200 milles marins. Mais elles ont aussi, tant bien que mal, fini par faire Œuvre normative.
71 Différend territorial et maritime (Nicaragua c. Colombie), exceptions préliminaires, arrêt,
C.I.J. Recueil 2007 (II), p. 867, par. 115.
72Délimitation maritime en mer Noire (Roumanie c. Ukraine), arrêt, C.I.J.Recueil2009 , p. 85, par. 64 et p. 87,
par. 70.
73Délimitation maritime dans la région situ ée entre le Groenland et Jan Mayen (Danemark c.Norvège), arrêt,
C.I.J. Recueil 1993, p. 83, par. 40.
74 Délimitation de la frontière maritime dans la régiondu golfe du Maine (Canada/Etats-Unis d’Amérique),
arrêt, C.I.J. Recueil 1984, p. 310-311, par. 150-151 ; Frontière terrestre et maritime en tre le Cameroun et le Nigéria
(Cameroun c. Nigéria; Guinée équatoriale (intervenant)), arrêt, C.I.J. Recueil 2002, p. 447-448, par. 304.
75CR 2012/29, p. 20, par. 17 (Lowe).
76CR2012/28, p.29, par.11 (Wood); CR2012/29, p.20, par. 17 (Lowe) ; CR 2012/33, p. 27, par. 109 (Lowe)
et p. 28, par. 112 (Lowe).
77
Délimitation maritime en mer Noire (Roumanie c. Ukraine), arrêt, C.I.J. Recueil 2009, p. 86, par. 68. - 30 -
Le point essentiel est que lesdites revendications ont finalement été acceptées et en sont venues à
faire partie du droit international général. Il existe donc une continuité historique entre les zones
établies en1952 et celles d’aujourd’hui, modulée, dans le cas du Chili, par son adhésion à la
convention de 1982. Ces zones n’ont jamais été supprimées ni dénoncées et, dans le cas du Pérou,
elles n’ont même jamais été modifiées ; le Pérou conserve aujourd’hui son «autorité» sur l’espace
aérien situé au-dessus de sa zone maritime, sous réserve toutefois d’un droit de «passage
inoffensif»! Mais l’élément essentiel aux fins de la présente espèce est que le Chili, le Pérou et
l’Equateur ont défendu ensemble leurs zones et ont finalement recueilli l’assentiment général.
2.2. Le Pérou soutient à présent que le fait que ces Etats aient été les premiers à revendiquer
des zones de 200milles marins ⎯assorties de périmètres ⎯ confirme qu’ils sont précisément
parvenus à faire ce qu’il était «ext rêmement difficile d’imaginer» 78. Il va même jusqu’à insinuer
qu’ils ne pouvaient pas le faire, qu’au moment où leurs zones de 200milles marins étaient
39 reconnues par la communauté internationale, un nouvel accord frontalier était nécessaire pour les
délimiter.
2.3. A l’appui de cet argument, M. Treves s’ est référé à la décision que vous avez rendue en
79
l’affaire Roumanie c. Ukraine . Il a soutenu qu’«un accord de délimitation relatif à la mer
territoriale ne pouvait pas s’appliquer au plateau c ontinental ni à la zone économique exclusive et
que, pour la délimitation de ces zones, l es parties étaient «supposées conclure un nouvel
80
accord»» . Ce dernier membre de phrase est, bien évidemment, tiré de votre arrêt en l’affaire
Roumanie c. Ukraine. Or, l’aspect essentiel de cette affaire était que les accords en cause portaient
exclusivement sur la limite de la mer territo riale, à 12milles marins, comme vous n’avez pas
manqué de le relever. Ne serait- ce qu’en raison de ce facteur de distance, lesdits instruments ne
pouvaient être considérés comme portant sur la zone économique exclusive et le plateau
continental. En pareilles circonstances, comme vous l’avez noté, les parties «sont supposées
conclure un nouvel accord» pour délimiter leurs re vendications jusqu’à 200milles marins. En
revanche, rien dans cette décision ne vient étayer la conclusion selon laquelle des Etats qui ont des
78CR 2012/33, p. 53, par. 8 (Treves).
79
CR 2012/33, p. 56, par. 24 (Treves).
80Délimitation maritime en mer Noire (Roumanie c. Ukraine), arrêt, C.I.J. Recueil 2009, p. 86-87, par. 69. - 31 -
zones de 200milles marins déjà délimitées, lesquelles ont été déclarées à une époque où elles
étaient contestables, devraient les délimiter de nouveau après que ces zones sont devenues
conformes au droit international général. Suiv ant ce raisonnement, il faudra it renégocier le traité
du golfe de Paria, ce qui serait fondamentalement c ontraire au principe de stabilité des frontières,
tel que reflété aux paragraphes4 des articles74 et 83 de la convention sur le droit de la mer et
applicable aux frontières conclues avant l’adoptio n de cet instrument. Les accords frontaliers
s’appliquent pendant des siècles: pour être stabl es, ils doivent pouvoir survivre aux changements
de la coutume, et il en va ainsi ⎯ a fortiori, pourrait-on dire ⎯ des accords qui sont eux-mêmes à
l’origine des changements en question. En droit international, il est possible de faire quelque chose
pour la première fois.
2.4. M.Treves a cherché à s’appuyer sur la décision rendue par le tribunal arbitral en
81
l’affaire Guinée Bissau c. Sénégal . Il avait été demandé à ce tribunal de déterminer si un accord
de1960 s’appliquait pour établir une frontière maritime unique jusqu’à 200milles marins 82.
L’accord en question avait pour objet d’effectuer une délimitation de la mer territoriale, de la zone
83
40 contiguë et du plateau continental . Le tribunal a conclu que l’accord faisait droit entre les parties
uniquement en ce qui concerne ces zones, et non en ce qui concerne la zone économique exclusive.
Contrairement à la déclaration de Santiago, il n’ était nullement suggéré que la Guinée Bissau ou le
Sénégal ⎯ ou encore leurs prédécesseurs coloniaux ⎯ ait prétendu exercer l’autorité sur une zone
économique exclusive en tant que telle. A l’inver se, la reconnaissance internationale, en 1982, des
zones de 200milles marins a été présentée par le Chili, l’Equateur et le Pérou comme consacrant
les revendications qu’ils avaient formulées trente ans auparavant. A la conférence de1982, ces
trois Etats ont ainsi annoncé fièrement que «la reco nnaissance universelle de la souveraineté et de
la juridiction de l’Etat côtier dans la lim ite de 200 milles … [étai]t un objectif fondamental» 8. Ils
n’avaient donc nul besoin de déclarer de nouvelles zones, ayant la même largeur et, pour
l’essentiel, le même contenu, de même qu’ils n’avaient nul besoin de les délimiter de nouveau.
81
CR 2012/33, p. 55-56, par. 23 (Treves).
82Affaire de la délimitation de la frontière ma ritime entre la Guinée-Bissau et le Sénégal, sentence du
31 juillet 1989, RSA, vol. XX, p. 132, par. 29 (citant l’article 2 du compromis arbitral).
83Affaire de la délimitation de la frontière ma ritime entre la Guinée-Bissau et le Sénégal, sentence du
31 juillet 1989, RSA, vol. XX, p. 151-152, par. 85.
84MP, vol. III, p. 84, annexe 108. Voir aussi CMC, vol. II, p. 167, annexe 50 et p. 170, annexe 51. - 32 -
3. Equité n’est pas synonyme d’équidistance
3.1. Le Pérou n’a pas eu le courage d’a ller jusqu’à admettre qu’il était convenu de sa
frontière maritime et de demander explicitement à la Cour de la remplacer par une nouvelle, tracée
selon la méthode moderne de l’équidistance. Au lieu de cela, il prétend qu’il n’aurait pu accepter
85
une délimitation aussi manifestement inéquitable . Et en quoi était-elle inéquitable ? En ce qu’elle
ne suivait pas une ligne d’équidistance, nous dit-il. Encore aurait-il fallu, pour que cet argument
soit recevable, que les représentants à Santiago en 1952 connaissent cette mé thode de délimitation
des espaces maritimes entre Etat s adjacents et la considèrent comme pouvant produire un résultat
équitable. Or, tel n’était pas le cas, étan t donné, premièrement, que la commission technique
86
conseillant la CDI n’a expliqué la méthode de l’équidistance que plus tard et, deuxièmement, que
la Cour a estimé, dès 1969, qu’équité n’était pas synonyme d’équidistance 87.
41 3.2. Le Pérou affirme qu’il aurait été «extrêmement improbable» que les Etats parviennent, à
la conférence de Santiago, à délimiter leurs espaces étendus 88. Je rappellerai cependant que,
en1954, ces mêmes Etats ⎯représentés, pour l’essentiel, par les mêmes délégués ⎯ étaient
expressément convenus de ce qui suit :
«Une zone spéciale est créée par le présent accord à une distance de 12
milles marins de la côte et avec une largeur de 10 milles marins de part et 89autre
du parallèle qui constitue la frontière maritime entre les deux pays.»
La meilleure preuve de ce que les délégués pensai ent faire à Santiago n’est-elle pas la description
expresse qu’ils en ont fait deux ans plus tard ?
4. Et si le Pérou avait formulé ses revendications en 1954
4.1 Monsieur le président, Mesdames et Messieurs de la Cour, c’est une insulte à la mémoire
des délégués à la conférence que de dire qu’ils ne savaient pas où étaient leurs intérêts, ou plutôt,
ceux des Etats qu’ils représentaient. [Projecti on.] Imaginez que le Pérou ait participé à la
conférence de 1954 en revendiquant la frontière av ec l’Equateur qu’il vous a montrée l’autre jour,
85Voir, par exemple, CR 2012/34, p. 39, par. 42-43 (Pellet) ; CR 2012/33, p. 52, par. 4 (Treves).
86
CMC, vol. IV, p. 149, annexe 233.
87
Plateau continental de la mer du Nord (République fédérale d’Allemagne/Danemark) (République fédérale
d’Allemagne/Pays-Bas), arrêt, C.I.J. Recueil 1969, p. 41, par. 69.
88CR 2012/33, p. 52, par. 4 (Treves).
89MP, vol. II, p. 82, annexe 50, art. 1 ; les italiques sont de nous. - 33 -
et la frontière qu’il revendique aujourd’hui f ace au Chili! Imaginez que les représentants
péruviens se soient rendus à la table des négociatio ns en 1954 avec pareilles prétentions ; celles-ci
apparaissent maintenant à l’écran (ongletn o 182). Après ce qui s’était passé à Santiago, les deux
autres délégations auraient très fermement rappelé le Pérou à la réalité. La note Bazán, que vient
de mentionner M. Wordsworth, nous a effectivement a ppris que c’est ainsi qu’aurait réagi le Chili.
Si le Pérou avait persisté dans ses prétentions, la conférence de Lima se serait soldée par un échec,
laissant place au chaos, et ce, pour le plus gra nd bonheur des représentants des Etats pratiquant la
pêche hauturière. Le consensus qui existait alors entre les trois Etats, contra mundum, aurait volé
en éclats. [Fin de projection/projection suivante.]
4.2. Or, rien de la sorte ne s’est produit. Au contraire, les délégués sont convenus de
protéger «le parallèle qui constitue la frontière maritime entre les deux pays», parallèle dont la
o
latitude est celle de la borne frontière n 1. Ils en ont largement bénéficié, et notamment le Pérou,
devenu depuis le deuxième plus im portant producteur mondial de produits liés à la pêche. Mais à
part ça, ils ne savaient pas où étaient leurs intérêts... [Fin de la projection.]
5. La stabilité des frontières
5.1. Monsieur le président, Mesdames et Messieurs de la Cour, dans les derniers instants de
sa plaidoirie de mardi, après vous avoir exposé le dernier des arguments changeants du Pérou,
42 M. Pellet vous a dit que cette affaire éta it l’occasion d’imposer une solution équitable 90. Le Pérou
vous demande de faire comme si vous pouviez utiliser une page blanche. C’est là faire peu de cas
de la règle principale qui s’applique aux frontières maritimes, à savoir celle de l’accord.
5.2. Vendredi dernier, j’ai abordé ⎯ assez brièvement, il est vrai ⎯ le fondement juridique
du principe fondamental de stabilité des frontières. Le Pérou ne l’a pas c ontesté, sauf à considérer
que la Cour a l’occasion de remplacer un arrangement stable par un autre, qu’il juge plus équitable.
Mais qu’adviendrait-il si l’on reve nait ainsi sur cette frontière convenue 91? Une réponse brève
consiste à dire que cela créerait un environnement juridique caractérisé par une grave incertitude, et
ce, à deux niveaux :
90
CR 2012/34, p. 39, par. 43 (Pellet).
91Voir aussi DC, chap. V. - 34 -
a) premièrement, dans le contexte de la présente espèce, les Etats auraient agi depuis le début sur
une base erronée, chaque fois qu’ils s’appuyaie nt sur une frontière maritime convenue qui ne
correspondait pas à une ligne d’équi distance. Et je ne pense pas uniquement aux parties à la
déclaration elle-même, mais au renvoi exprès à ce lle-ci qui a été fait par des Etats tiers dans le
92
cadre de l’établissement d’une frontière maritime ; je pense aussi à l’invocation de la
déclaration par des Etats qui ont été parties à des affaires soumises à la Cour 93, par certains
membres de la Cour eux-mêmes 94et par des Etats ayant soumis leur différend à l’arbitrage 95en
96
faisant expressément référence à des frontières maritimes suivant des parallèles de latitude . Et
puis, bien évidemment, il y a les cas d’invocation expresse des frontières maritimes établies par
43
la déclaration de Santiago de la part d’Et ats de la région ayant entamé leurs propres
97
négociations de délimitation .
b) [Projection.] Deuxièmement, l’approche du Pérou remettrait immanquablement en cause
d’autres accords frontaliers dans la région. Il pourrait en aller ainsi lorsque ces frontières sont
fondées en tout ou partie sur des parallèles de latitude, comme c’est souvent le cas dans la
98
pratique des Etats américains . Il pourrait également en aller ainsi des frontières convenues
92Voir, par exemple, CMC, vol. IV, annexes 216 et 218.
93Plateau continental de la mer du Nord (Danemark/République fédérale d’Allemagne), voir la réplique soumise
par la République fédérale d’Allemagne le 31 mai 1968, annexe “International and Inter-state Agreements concerning the
Delimitation of Continental Shelves and Territorial Waters”, Chile-Peru-Ecuador, C.I.J. Mémoires, plaidoiries et
documents, vol. I, p.437; la duplique comm une soumises par les Royaumes du Dane mark et des Pays-Bas le 30 août
1968, C.I.J. Mémoires, plaidoiries et documents , vol. I, p. 496, par. 68 ; Délimitation de la frontière maritime dans la
région du golfe du Maine (Canada/Etats-Unis d’Amérique), voir le mémoire soumis par les Etats-Unis d’Amérique
le 27 septembre 1982, C.I.J. Mémoires, plaidoiries et documents, vol. II, p. 101, par. 265 ; le contre-mémoire du Canada
soumis le 28 juin 1983, C.I.J. Mémoires, plaidoiries et documents , vol.III, p.239, par. 639; annexe de la réplique du
Canada soumise le 12décembre1983, C.I.J. Mémoires, plaidoiries et documents , vol. V, p182; Plateau continental
(Jamahiriya arabe libyenne/Malte), voir le contre-mémoire soumis par la Libye le 26 octobre 1983, C.I.J. Mémoires,
plaidoiries et documents, vol. II, p. 110, note de bas de page 5 ; Expertise de M. J.R.V. Prescott, annexe 4 de la réplique
soumise par Malte le 12 juillet 1984, C.I.J. Mémoires, plaidoiries et documents, vol. I, p. 245 : voir tableau n° 4, p. 267 ;
Délimitation maritime dans la région située entre le Groenland et J an Mayen (Danemark c.Norvège), voir le mémoire
soumis par le Royaume du Danemark le 31 juillet 1989, C.I.J. Mémoires, plaidoiries et documents, vol. I, par. 364.
94
Plateau continental de la mer du Nord (République fédérale d’Allemagne/Danemark) (République fédérale
d’Allemagne/Pays-Bas), arrêt, C.I.J. Recueil 1969, p. 41, par. 69; voir également l’opinion individuelle du président,
M. Bustamante y Rivero, ibid., p. 61, par. 6 b).
95Guyana/Suriname, compte rendu de l’audience du 14 décembre 2006, p. 872 et 874.
96
Différend territorial et maritime entre le Nicaragua et le Honduras dans la mer des Caraïbes (Nicaragua
c. Honduras), compte rendu de l’audience qui s’est tenue le 16 mars 2007, CR 2007/10, p. 31, par. 150.
97
Voir, par exemple, CMC, vol.II, p.16, annexe9; ibid., vol.IV, p.69, annexe214; voir également ibid.,
vol. IV, p. 70, annexe 215.
98
Voir l’onglet n°120 du dossier de plaidoiries. - 35 -
fondées sur des méridiens de longitude 99 ou, de fait, de toute autre frontière qui ne suivrait pas
la ligne d’équidistance. L’on imagine déjà les arguments qu’avanceraient les Etats qui se
sentiraient désavantagés par une frontière établie ;ils pourraient désormais soutenir que des
délimitations convenues n’étaient, en réalité, pas convenues, ou qu’elles l’étaient simplement de
manière temporaire, provisoire ou pratique, ou encore qu’il s’agissait d’arrangements côtiers.
5.3. En ce qui concerne spécifiquement la frontière entre le Chili et le Pérou ⎯ deux Etats
ayant eu, disons-le, une histoire tourmentée ⎯, les deux Parties coexistent pacifiquement depuis
plus d’un demi-siècle. L’agent du Chili vous dira combien la frontière revêt d’importance pour la
communauté locale, qui s’est développée sur cette base. Monsieur le président, Mesdames et
Messieurs de la Cour, Quieta, non movere. [Fin de projection.]
Je vous remercie de votre patiente attention. Monsieur le président, je vous saurais gré de
bien vouloir appeler maintenant l’agent à la barre afin qu’il présente les conclusions du Chili.
Le PRESIDENT: Je vous remercie, Monsieur Crawford. J’invite l’agent à présenter ses
dernières observations et les conclusions final es du Chili. Monsieur l’ambassadeur, vous avez la
parole.
M. van KLAVEREN STORK :
44 1. Introduction
1.1. Monsieur le président, Mesdames et M essieurs de la Cour, c’est pour moi un honneur
que de me présenter une nouvelle fois devant v ous, cette fois pour clore le second tour de
plaidoiries du Chili en la présente affaire. Je tiens à redire que notre pays est foncièrement attaché
au règlement pacifique des différends, et résolu à voir primer le droit dans les relations
internationales. A cet égard, mon illustre homologue, M. l’ambassadeur Allan Wagner, a eu
l’obligeance de prendre acte de la contribution que le Chili avait apportée au processus de paix
entre le Pérou et l’Equateur, en tant qu’Etat ga rant. Les valeurs que nous partageons, conjuguées
au respect mutuel que nous nous portons, ont fac ilité la coopération entre nos deux pays dans bien
99Voir CMC, par.2.44-2.49; voir également les accords conclus entre la Gambie et le Sénégal, J.I. Charney et
L.M. Alexander (dir.pub.), International Maritime Boundaries, vol.I, 1993, report 4-2; le Kenya et laibid.,nie,
Report 4-5; les Pays-Bas (Antilles) et le Venezuibid., report 2-12; la Colombie et Panaibid. ; report 2-5; et
CMC, vol. II, p. 16, annexe 9. - 36 -
des domaines. En 1999, au terme d’un processus co mplexe jalonné de négociations et reculs, nous
avons ainsi pu conclure un accord relatif aux in stallations portuaires à l’usage du Pérou à Arica,
comme le prévoyait le traité de Lima. Il ne s ubsistait plus entre nous de litige frontalier ; c’est du
moins ce nous pensions.
2. La frontière maritime existante
2.1. En 1952, le Chili, le Pérou et l’Equa teur ont ouvert une voie «entièrement nouvelle en
droit de la mer en revendiquant une zone de 200 milles [marins] 100». Nous avons, selon les termes
de la déclaration de Santiago, affirmé une «jurid iction et … [une] souveraineté exclusives» sur les
101
fonds marins, le sous-s ol et la colonne d’eau . Ensemble, nous avons instauré un système
régional de délimitation fondé sur la notion de «par allèle passant par le point où aboutit en mer la
102
frontière terrestre des Etats en cause» , méthode de délimitation qui a été adoptée par les Etats de
la côte ouest de l’Amérique du Sud.
2.2. En 1954, le Chili, l’Equateur et le Pérou ont conclu plusieurs accords, dont un accord
relatif à la zone frontière maritime spéciale, expressément basés sur la frontière maritime dont nous
nous étions dotés 103. Et en 1968 et 1969, le Chili et le Pé rou ont décidé de «donner matériellement
effet au parallèle passant pa r…[la] borne frontière n 1», «afin de signaler la frontière
104 o
maritime» . Les Parties avaient conjointement choisi et fixé la borne n 1 en tant que point du
littoral le plus proche de la mer, en 1929 et 1930 105. Cette borne a toujours servi de référence
marquant le point de départ de la frontière maritime. La loi de 2001 sur la démarcation territoriale
45 de la province de Tacna adoptée par le Pérou lui- même reconnaissait expressément que la frontière
terrestre partait de cette borne, puisqu’il est préci sé, en son article 3, que «la limite commence à la
o 106
borne frontièren 1 (Océan Pacifique)…» . La frontière terrestre avait été entièrement
déterminée, et elle échappe donc à la compétence de la Cour.
100CMC, vol. V, annexe 279, p. 286
101
MP, vol. II annexe 47, art. II et III.
102
MP, vol. II, annexe 47, art. IV.
103MP, vol. II, annexe 50.
104CMC, vol. II, annexe 6.
105MP, vol. II, annexe 45 ; MP, vol. II, annexe 54 ; MP, vol. II, annexe 55.
106
CMC, vol. IV, annexe 191, art. 3. Le Pérou a modifié sa loi le lendemain du dépôt de sa requête. - 37 -
2.3. Monsieur le président, Mesdames et Messi eurs de la Cour, tout au long de la présente
procédure, le Chili a apporté la preuve irréfu table de l’existence d’ un accord de délimitation
maritime. Au surplus, la pratique ultérieure ne laisse à cet égard pas l’ombre d’un doute. Le
Pérou, en revanche, a été incapable de démontrer le bien-fondé de sa thèse.
2.4. Point n’est besoin pour la Cour de déterm iner une frontière maritime entre le Chili et le
Pérou. Cette question est réglée depuis longtemps. C’est pourquoi, pendant plus d’un demi-siècle,
le Pérou n’a protesté ni contre les représentations qui ont été faites de cette frontière maritime ni
contre les initiatives visant à donner effet à cette fron tière. C’est pourquoi le Pérou et le Chili ont
toujours respecté le parallèle constituant la fron tière. C’est aussi pourquoi le Pérou n’a jamais
exercé sa juridiction au sud de ce parallèle, yco mpris dans la zone d’«altamar», et pourquoi le
Chili n’a jamais exercé la sienne au nord.
2.5. Et c’est encore pourquoi les habitants d’ Arica et d’Iquique pâtir aient considérablement
si cette frontière maritime stable venait à être m odifiée. Le port d’Arica se trouve à 15 km à peine
de la frontière. C’est là – ou à Iquique, le por t chilien suivant – que sont enregistrés bon nombre
des bateaux de pêche petits et moyens du pays, dont le rôle dans l’économie régionale est crucial.
La population locale ⎯près d’un demi-million d’âmes ⎯ s’y est développée sur la base de
l’existence d’une frontière stable. Qui plus est, Arica sert aussi les intérêts du Pérou et de la
Bolivie, en offrant des installations essentielles à ces deux pays.
3. Les conséquences de la remise en cause d’une frontière maritime établie
3.1. Monsieur le président, remettre en cause une frontière maritime établie depuis plus d’un
demi-siècle est lourd de conséquences. Le parallèle passant par la bornen o1 constitue une
frontière maritime opérationnelle, stable, claire, et garante d’une situation pacifique. Des bateaux
et des aéronefs le franchissent en ce moment même. Personne, ni le capitaine, ni le pilote, ni même
le Gouvernement du Pérou ne niera que le Pérou app lique sa législation au nord du parallèle, et le
46 Chili, au sud. De même que personne ne niera que l’Equateur et le Pérou ont respectivement
exercé leur juridiction au nord et au sud du para llèle utilisé, conformément à la déclaration de
Santiago de 1952, pour marquer leur frontière. - 38 -
3.2. Cinq années se sont écoulées depuis le dépôt, par le Pérou, de la requête introduisant la
présente instance. Le Chili a défendu sa frontière maritime avec le Pérou avec une résolution et
une énergie que justifie l’importance de cette cause. Les frontières, après tout, déterminent
l’étendue des pouvoirs souverains d’un Etat. Et l’observation de bonne foi des dispositions de
traités existants est la clé de voûte du maintien des relations pacifiques entre Etats. Aujourd’hui, le
Chili se félicite de la perspective de voir réaffirmer la frontière maritime stable entre nos deux
pays, et se poursuivre et se développer les relations amicales qui unissent nos deux peuples et
gouvernements.
Remarques et conclusions finales
4.1. Monsieur le président, le Chili voudrait vous remercier très sincèrement, ainsi que les
autres membres de la Cour, de la patience et de l’attention dont vous nous avez témoigné tout au
long de la procédure écrite et orale. Je tiens également à exprimer toute ma gratitude au greffier de
la Cour, M.PhilippeCouvreur, ainsi qu’à son équi pe, aux interprètes et à tous ceux qui assistent
cette vénérable institution dans son travail.
4.2. Je voudrais aussi remercier nos éminents a vocats, conseillers et experts, ainsi que les
autres membres de la délégation chilienne. Et je tiens à exprimer une reconnaissance toute
particulière aux coagents, pour le dévouement sans faille dont ils ont fait montre. Enfin, je
voudrais remercier mon collègue et ami, M. l’amba ssadeur Allan Wagner, de ses aimables paroles
et l’assurer que j’ai moi aussi beaucoup apprécié le professionnalisme de nos contradicteurs, et
l’atmosphère cordiale qui a prévalu au cours de ces audiences.
4.3. Monsieurle président, Mesdames et Mess ieurs de la Cour, sur la base des faits et
arguments qu’il a exposés dans son contre-mémoire, dans sa duplique et au cours de la présente
procédure orale, le Chili prie respectueusement la Cour :
a) de rejeter l’intégralité des conclusions du Pérou ;
b) de dire et juger :
i) que les espaces maritimes respectifs des Parties ont été intégralement délimités par voie
d’accord ; - 39 -
ii) que la frontière délimitant ces espaces maritimes suit le parallèle passant par la borne
marquant la frontière terrestre entre les Parti es la plus proche de la mer, connue sous le
47
o
nom de borne n 1 et située par 18°21'00"de latitude sud selon le système de référence
WGS84 ; et
iii) que le Pérou ne peut prétendre à aucun espace maritime au sud de ce parallèle.
Monsieur le président, Mesdames et Messieurs de la Cour, merci de votre bienveillante
attention. Voilà qui met un terme aux plaidoiries du Chili.
Le PRESIDENT : Je vous remercie infiniment, M. l’ambassadeur van Klaveren Stork.
La Cour a pris acte des conclusions finales dont vous venez de donner lecture au nom de la
République du Chili.
Ainsi s’achève en effet la procédure orale en l’espèce. Je tiens à remercier les agents,
conseils et avocats pour la qualité de leurs arguments et exposés, et pour avoir su, tout au long de
ces audiences, maintenir un esprit empreint de courtoisie et de respect mutuel.
Conformément à la pratique habituelle, je pr ierai les agents des Parties de demeurer à la
disposition de la Cour pour tous renseigneme nts complémentaires dont celle-ci pourrait avoir
besoin. Sous cette réserve, je déclare maintena nt close la procédure orale relative à l’affaire du
Différend maritime (Pérou c. Chili).
La Cour va à présent se retirer pour délibérer. Les agents des Parties seront avisés en temps
utile de la date à laquelle ellerendra son arrêt. La Cour n’ét ant saisie d’aucune autre question
aujourd’hui, l’audience est levée.
L’audience est levée à 16 h 30.
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