Public sitting held on Monday 17 February 2020, at 10 a.m., at the Peace Palace, President Yusuf presiding, in the case concerning Immunities and Criminal Proceedings (Equatorial Guinea v. France)

Document Number
163-20200217-ORA-01-00-BI
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Number (Press Release, Order, etc)
2020/1
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Uncorrected
CR 2020/1
Cour internationale International Court
de Justice of Justice
LA HAYE THE HAGUE
ANNÉE 2020
Audience publique
tenue le lundi 17 février 2020, à 10 heures, au Palais de la Paix,
sous la présidence de M. Yusuf, président,
en l’affaire relative aux Immunités et procédures pénales (Guinée équatoriale c. France)
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COMPTE RENDU
________________
YEAR 2020
Public sitting
held on Monday 17 February 2020, at 10 a.m., at the Peace Palace,
President Yusuf presiding,
in the case concerning Immunities and Criminal Proceedings (Equatorial Guinea v. France)
____________________
VERBATIM RECORD
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Présents : M. Yusuf, président
Mme Xue, vice-présidente
MM. Tomka
Abraham
Bennouna
Cançado Trindade
Mme Donoghue
M. Gaja
Mme Sebutinde
MM. Bhandari
Robinson
Crawford
Gevorgian
Salam
Iwasawa, juges
M. Kateka, juge ad hoc
M. Gautier, greffier
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Present: President Yusuf
Vice-President Xue
Judges Tomka
Abraham
Bennouna
Cançado Trindade
Donoghue
Gaja
Sebutinde
Bhandari
Robinson
Crawford
Gevorgian
Salam
Iwasawa
Judge ad hoc Kateka
Registrar Gautier
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Le Gouvernement de la République de Guinée équatoriale est représenté par :
S. Exc. M. Carmelo Nvono Nca, ambassadeur de la République de Guinée équatoriale auprès des Royaumes de Belgique et des Pays-Bas,
comme agent ;
M. Anatolio Nzang Nguema Mangue, procureur de la République de Guinée équatoriale,
M. Juan Olo Mba, ministre délégué de la justice de la République de Guinée équatoriale,
M. Pascual Nsue Eyi, directeur au ministère des affaires étrangères de la République de Guinée équatoriale,
S. Exc. M. Miguel Oyono Ndong, ambassadeur de la République de Guinée équatoriale auprès de la République française,
comme membres de la délégation ;
M. Maurice Kamto, professeur à l’Université de Yaoundé II (Cameroun), avocat au barreau de Paris, ancien membre et ancien président de la Commission du droit international,
M. Jean-Charles Tchikaya, avocat au barreau de Bordeaux,
Sir Michael Wood, KCMG, membre de la Commission du droit international, membre du barreau d’Angleterre et du pays de Galles,
M. Francisco Evuy Nguema Mikue, avocat de la République de Guinée équatoriale,
comme conseils et avocats ;
M. Alfredo Crosato Neumann, Institut de hautes études internationales et du développement de Genève,
M. Francisco Moro Nve Obono, avocat de la République de Guinée équatoriale,
Mme Magdalena Nanda Nzambi, avocate de la République de Guinée équatoriale,
M. Omri Sender, George Washington University Law School, membre du barreau d’Israël,
M. Alain-Guy Tachou-Sipowo, chargé de cours, Université McGill et Université Laval,
M. Nick Kaufman, avocat aux barreaux d’Angleterre et du pays de Galles et d’Israël,
comme conseils ;
Mme Emilia Ndoho, secrétaire à l’ambassade de la République de Guinée équatoriale à Bruxelles,
comme assistante.
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The Government of the Republic of Equatorial Guinea is represented by:
H.E. Mr. Carmelo Nvono Nca, Ambassador of the Republic of Equatorial Guinea to the Kingdoms of Belgium and the Netherlands,
as Agent;
Mr. Anatolio Nzang Nguema Mangue, Public Prosecutor of the Republic of Equatorial Guinea,
Mr. Juan Olo Mba, Minister Delegate for Justice of the Republic of Equatorial Guinea,
Mr. Pascual Nsue Eyi, Director, Ministry of Foreign Affairs of the Republic of Equatorial Guinea,
H.E. Mr. Miguel Oyono Ndong, Ambassador of the Republic of Equatorial Guinea to the French Republic,
as Members of the Delegation;
Mr. Maurice Kamoto, Professor at the University of Yaoundé II (Cameroon), member of the Paris Bar, former member and former chairman of the International Law Commission,
Mr. Jean-Charles Tchikaya, member of the Bordeaux Bar,
Sir Michael Wood, KCMG, member of the International Law Commission, member of the Bar of England and Wales,
Mr. Francisco Evuy Nguema Mikue, avocat of the Republic of Equatorial Guinea,
as Counsel and Advocates;
Mr. Alfredo Crosato Neumann, Graduate Institute of International and Development Studies of Geneva,
Mr. Francisco Moro Nve Obono, avocat of the Republic of Equatorial Guinea,
Ms Magdalena Nanda Nzambi, avocate of the Republic of Equatorial Guinea,
Mr. Omri Sender, George Washington University Law School, member of the Israel Bar,
Mr. Alain-Guy Tachou-Sipowo, Lecturer at McGill University and Université Laval,
Mr. Nick Kaufman, member of the Bars of England and Wales and of Israel,
as Counsel;
Ms Emilia Ndoho, Secretary at the Embassy of the Republic of Equatorial Guinea in Brussels,
as Assistant.
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Le Gouvernement de la République française est représenté par :
M. François Alabrune, directeur des affaires juridiques du ministère de l’Europe et des affaires étrangères,
comme agent ;
M. Alain Pellet, professeur émérite à l’Université Paris Nanterre, ancien président de la Commission du droit international, membre de l’Institut de droit international,
M. Hervé Ascencio, professeur à l’Université Paris 1 Panthéon-Sorbonne,
M. Pierre Bodeau-Livinec, professeur à l’Université Paris Nanterre,
M. Mathias Forteau, professeur à l’Université Paris Nanterre,
Mme Maryline Grange, maître de conférences en droit public à l’Université Jean Monnet à Saint-Etienne, Université de Lyon,
M. Ludovic Legrand, docteur en droit public, Université Paris Nanterre,
comme conseils ;
M. Julien Boissise, conseiller juridique à la direction des affaires juridiques du ministère de l’Europe et des affaires étrangères,
M. Nabil Hajjami, conseiller juridique à la direction des affaires juridiques du ministère de l’Europe et des affaires étrangères,
Mme Sophie Lacote, cheffe du bureau du droit économique, financier et social, de l’environnement et de la santé publique à la direction des affaires criminelles et des grâces du ministère de la justice,
comme conseils adjoints ;
S. Exc. M. Luis Vassy, ambassadeur de la République française auprès du Royaume des Pays-Bas,
Mme Florence Levy, première conseillère à l’ambassade de France aux Pays-Bas,
Mme Hélène Petit, conseillère juridique à l’ambassade de France aux Pays-Bas,
Mme Charlotte Daniel-Barrat, chargée de mission juridique à l’ambassade de France aux Pays-Bas,
comme membres de la délégation.
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The Government of the French Republic is represented by:
Mr. François Alabrune, Director of Legal Affairs, Ministry of Europe and Foreign Affairs,
as Agent;
Mr. Alain Pellet, Emeritus Professor at the University Paris Nanterre, former Chairman of the International Law Commission, member of the Institut de droit international,
Mr. Hervé Ascencio, Professor at the University Paris 1 Panthéon-Sorbonne,
Mr. Pierre Bodeau-Livinec, Professor at the University Paris Nanterre,
Mr. Mathias Forteau, Professor at the University Paris Nanterre,
Ms Maryline Grange, Lecturer in Public Law at the Jean Monnet University in Saint-Etienne, University of Lyon,
Mr. Ludovic Legrand, Doctor of Public Law, University Paris Nanterre,
as Counsel;
Mr. Julien Boissise, Legal Consultant, Directorate of Legal Affairs, Ministry of Europe and Foreign Affairs,
Mr. Nabil Hajjami, Legal Consultant, Directorate of Legal Affairs, Ministry of Europe and Foreign Affairs,
Ms Sophie Lacote, Head of the Office of Economic, Financial and Social Law, the Environment and Public Health, Directorate of Criminal Affairs and Pardons, Ministry of Justice,
as Assistant Counsel;
H.E. Mr. Luis Vassy, Ambassador of the French Republic to the Kingdom of the Netherlands,
Ms Florence Levy, First Counsellor, Embassy of France in the Netherlands,
Ms Hélène Petit, Legal Consultant, Embassy of France in the Netherlands,
Ms Charlotte Daniel-Barrat, chargée de mission for legal affairs, Embassy of France in the Netherlands,
as Members of the Delegation.
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Le PRESIDENT : L’audience est ouverte.
La Cour se réunit aujourd’hui et se réunira au cours des prochains jours pour entendre les plaidoiries des Parties sur le fond de l’affaire relative aux Immunités et procédures pénales (Guinée équatoriale c. France). Ce matin, la Cour entendra la Guinée équatoriale en son premier tour de plaidoiries.
La Cour ne comptant sur le siège aucun juge de nationalité équato-guinéenne, la Guinée équatoriale s’est prévalue du droit qui lui est conféré par le paragraphe 2 de l’article 31 du Statut de la Cour de désigner un juge ad hoc pour siéger en l’affaire : elle a désigné M. James Kateka. M. Kateka a été installé en cette qualité en 2016, au cours de la phase de l’affaire consacrée à la demande en indication de mesures conservatoires.
*
Je rappellerai maintenant les principales étapes de la procédure en la présente espèce.
Le 13 juin 2016, la République de Guinée équatoriale a introduit une instance contre la République française au sujet d’un différend ayant trait à l’immunité de juridiction pénale du vice-président de la République de Guinée équatoriale, M. Teodoro Nguema Obiang Mangue, ainsi qu’au statut juridique de l’immeuble situé 42 avenue Foch à Paris qui, selon la Guinée équatoriale, abrite son ambassade en France.
Pour fonder la compétence de la Cour, la Guinée équatoriale invoque le protocole de signature facultative concernant le règlement obligatoire des différends relatifs à la convention de Vienne sur les relations diplomatiques du 18 avril 1961 ainsi que la convention des Nations Unies contre la criminalité transnationale organisée du 15 novembre 2000.
Par une ordonnance en date du 1er juillet 2016, la Cour a fixé au 3 janvier 2017 et au 3 juillet 2017, respectivement, les dates d’expiration des délais pour le dépôt d’un mémoire de la Guinée équatoriale et d’un contre-mémoire de la France. Le mémoire de la Guinée équatoriale a été déposé dans le délai ainsi prescrit.
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Le 29 septembre 2016, la Guinée équatoriale, se référant à l’article 41 du Statut et aux articles 73, 74 et 75 du Règlement, a présenté une demande en indication de mesures conservatoires.
Par ordonnance en date du 7 décembre 2016, la Cour a indiqué les mesures conservatoires suivantes :
«La France doit, dans l’attente d’une décision finale en l’affaire, prendre toutes les mesures dont elle dispose pour que les locaux présentés comme abritant la mission diplomatique de la Guinée équatoriale au 42 avenue Foch à Paris jouissent d’un traitement équivalent à celui requis par l’article 22 de la convention de Vienne sur les relations diplomatiques, de manière à assurer leur inviolabilité.»
Le 31 mars 2017, dans le délai fixé au paragraphe 1 de l’article 79 du Règlement du 14 avril 1978, tel qu’amendé le 1er février 2001, la France a soulevé des exceptions préliminaires à la compétence de la Cour. En conséquence, par ordonnance du 5 avril 2017, la Cour, constatant que la procédure sur le fond a été suspendue, a fixé au 31 juillet 2017 la date d’expiration du délai dans lequel la Guinée équatoriale pouvait présenter un exposé écrit contenant ses observations et conclusions sur les exceptions préliminaires soulevées par la France. La Guinée équatoriale a déposé un tel exposé dans le délai ainsi fixé.
Par un arrêt du 6 juin 2018, la Cour a dit qu’elle avait compétence, sur la base du protocole de signature facultative à la convention de Vienne, pour se prononcer sur la requête de la Guinée équatoriale, en ce qu’elle a trait au statut de l’immeuble situé au 42 avenue Foch à Paris en tant que locaux de sa mission, et que ce volet de la requête était recevable. Elle a, en revanche, déclaré qu’elle n’avait pas compétence pour connaître du volet de la requête relatif au différend ayant trait à l’immunité de juridiction pénale du vice-président de la République de Guinée équatoriale.
Par une ordonnance en date du 6 juin 2018, la Cour a fixé au 6 décembre 2018 la date d’expiration du délai pour le dépôt du contre-mémoire de la France. Le contre-mémoire a été déposé dans le délai ainsi fixé.
Par une ordonnance du 24 janvier 2019, la Cour a autorisé le dépôt d’une réplique par la Guinée équatoriale et d’une duplique par la France, et fixé au 24 avril 2019 et au 24 juillet 2019, respectivement, les dates d’expiration des délais dans lesquels ces pièces devaient être déposées.
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Par une ordonnance du 17 avril 2019, faisant suite à une demande de la Guinée équatoriale, lesdits délais ont été prorogés et les dates d’expiration des délais dans lesquels la réplique et la duplique devaient être déposées ont été fixées au 8 mai 2019 et au 21 août 2019, respectivement. Les deux pièces ont été déposées dans les délais ainsi prorogés.
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Ayant consulté les Parties, la Cour a, conformément au paragraphe 2 de l’article 53 de son Règlement, décidé ce matin de rendre accessibles au public, à l’ouverture de la procédure orale, des exemplaires des pièces de procédure écrite et documents annexés. En outre, conformément à la pratique de la Cour, les versions électroniques de ces documents seront placées dès aujourd’hui sur le site Internet de la Cour.
*
Je note la présence devant la Cour des agents, conseils et avocats des deux Parties. Conformément aux dispositions relatives à l’organisation de la procédure arrêtées par la Cour, les audiences comprendront un premier et un second tour de plaidoiries. Le premier tour débute aujourd’hui avec l’exposé de la Guinée équatoriale, et se terminera demain, mardi 18 février, à l’issue du premier tour de plaidoiries de la France. Aux fins de ce premier tour, chacune des Parties disposera d’une séance de trois heures. Le second tour de plaidoiries s’ouvrira le mercredi 19 février dans l’après-midi et s’achèvera le vendredi 21 février. Chacune des Parties disposera d’une heure et trente minutes au maximum pour présenter sa réponse.
Lors de cette première audience, la Guinée équatoriale pourra, si besoin est, déborder légèrement au-delà de 13 heures, compte tenu du temps consacré à ma déclaration liminaire.
Je donne à présent la parole à l’agent de la Guinée équatoriale, S. Exc. M. Carmelo Nvono Nca. Vous avez la parole, Monsieur l’ambassadeur.
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M. NVONO NCA :
1. INTRODUCTION
1. Monsieur le président, Mesdames et Messieurs de la Cour, c’est un grand honneur pour moi de paraître devant cette Cour, et de le faire encore une fois au nom de mon pays, la République de Guinée équatoriale, au stade final de cette importante procédure. Comme il ne peut en être autrement, et compte tenu des bonnes relations d’amitié entre le peuple de la Guinée équatoriale et le peuple français, je voudrais saisir cette occasion pour saluer la délégation française, et de façon très spéciale mon cher ami et collègue, M. l’agent François Alabrune.
2. Je commence mon intervention aujourd’hui, comme je l’ai toujours fait par le passé, en appelant la France encore une fois au dialogue amical pour résoudre pacifiquement par la voie diplomatique le différend qui nous oppose.
3. Le différend entre la Guinée équatoriale et la France concerne des principes fondamentaux du droit diplomatique. En particulier, il s’agit de déterminer les conditions dans lesquelles un immeuble peut être considéré comme les locaux d’une mission diplomatique, au sens de l’article 1, alinéa i), de la convention de Vienne sur les relations diplomatiques, ainsi que les actes d’un Etat accréditaire susceptibles de constituer des violations de cette convention.
4. Nous ne sommes malheureusement pas d’accord avec la France sur le fond de ce différend, parce qu’elle persiste à ne pas respecter un Etat souverain et totalement indépendant. De manière surprenante, la délégation française avance de fausses interprétations de la prestigieuse convention de Vienne dans ce temple de la justice internationale pour justifier les violations sérieuses de cette convention qu’elle a commises à l’encontre de la Guinée équatoriale. Comme nos avocats l’expliqueront ce matin, la convention de Vienne établit que l’Etat accréditant a le droit de choisir librement les locaux de sa mission diplomatique ; les locaux de la mission jouissent d’une inviolabilité absolue, et l’Etat accréditaire a l’obligation de ne faire aucune discrimination entre Etats.
5. Les faits dans cette affaire sont clairs. La Guinée équatoriale a décidé d’acquérir de nouveaux locaux pour sa mission diplomatique en France, au plus tard en 2010. Le 15 septembre 2011, avant l’adoption des mesures coercitives qui sont à l’origine du présent différend, la Guinée
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équatoriale a acquis légalement l’immeuble du 42 avenue Foch. Deux semaines plus tard, le 4 octobre 2011, la Guinée équatoriale a informé la France du changement des locaux de sa mission diplomatique.
6. A partir de cette date, la Guinée équatoriale a commencé le procès de déménagement des services de l’ambassade, lequel a fini en juillet 2012.
7. Monsieur le président, Mesdames et Messieurs de la Cour, même si l’interprétation de la convention de Vienne présentée par la France était acceptée, la Cour ne pourrait ignorer que, dans sa volonté de faire croire que sa conduite par rapport à la Guinée équatoriale est en conformité avec le droit existant, l’autre Partie fait des contradictions manifestes et propose des conditions pour l’établissement de nouveaux locaux des missions diplomatiques absolument injustifiables. La Cour ne peut pas non plus ignorer, qu’en déniant à la Guinée équatoriale le choix de sa mission diplomatique le 11 octobre 2011, sur la base d’une prétendue pratique constante, qui en réalité n’existe pas, et sans consulter la Guinée équatoriale, la France a soumis mon pays à un traitement totalement arbitraire et discriminatoire, et par conséquent contraire au droit international.
8. Incapable de répondre aux arguments de la Guinée équatoriale concernant son droit de propriété sur l’immeuble abritant sa mission diplomatique, la France demande à la Cour de ne pas aborder cette question car, à son avis, une mesure qui affecte la propriété d’un immeuble ne peut pas constituer une violation de l’article 22 de la convention de Vienne. Cet argument est insoutenable et inacceptable, surtout parce que la France ne peut se fonder sur l’excuse erronée que l’immeuble appartenait au domaine privé.
9. Mesdames et Messieurs de la Cour, l’immeuble est du domaine public depuis le 15 septembre 2011. Il a été acheté et enregistré au nom de l’Etat de Guinée équatoriale, qui l’utilise depuis lors aux fins de sa mission diplomatique.
10. Nous ne comprenons pas pourquoi la France continue à se baser sur de prétendues preuves qui n’ont aucune valeur, telles que le papier à entête de l’ambassade non actualisé ou des affiches. Ceci reflète une attitude quelque peu condescendante de la France dans la présente affaire, ce qui est regrettable.
11. Contrairement à la manière dont la France comprend et conduit ses relations diplomatiques et de coopération, je voudrais rappeler à la délégation française qu’en 1990, la
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Guinée équatoriale et la France ont conclu un protocole relatif à la construction d’immeubles pour assurer l’hébergement du personnel de la coopération française. De cette façon, la Guinée équatoriale a offert de bonne foi à la France plusieurs terrains au libre choix des Français : l’un pour installer leurs locaux diplomatiques à Malabo et l’autre pour installer son consulat ou bureau de coopération dans la ville de Bata, tous à titre gratuit, exemptés d’impôts, libres de taux fiscaux et jouissant des immunités diplomatiques.
12. Monsieur le président, nous exprimons encore une fois notre regret pour le ton des arguments de la France, ainsi que les accusations de mauvaise foi et d’abus de droit, que nous rejetons très fermement.
13. La délégation française arrive à cette prestigieuse Cour avec de fausses accusations contre la Guinée équatoriale. Il paraît que, en réalité, la France veut continuer devant cette Cour les attaques contre la dignité de mon pays qui ont débuté il y a presque 10 ans devant les tribunaux français, où ils ont accusé notre vice-président, et même notre chef d’Etat, de crimes qui, de notre point de vue, n’ont jamais eu lieu. Messieurs de la délégation de la France : la dignité de mon chef d’Etat est intouchable. Il faut rappeler que, en novembre 2010, le procureur général de la République a fourni un rapport aux autorités judiciaires compétentes de la France, qui concluait à l’absence de toute infraction de détournement de fonds publics en Guinée équatoriale. Les autorités françaises ont pourtant complètement ignoré ce rapport et semblent croire que la France connaît mieux que mon gouvernement ce qui se passe en Guinée équatoriale.
14. Dès le début, la Guinée équatoriale s’est opposée, et s’oppose toujours, à la procédure pénale en France car elle est contraire au droit international, considérant le mépris manifeste qu’ont démontré les tribunaux français en traitant mon pays de manière injuste. A plus d’une occasion, les tribunaux français ont jugé de manière inacceptable et sans aucune preuve le comportement de la Guinée équatoriale : ils se sont référés à l’acquisition de l’immeuble du 42 avenue Foch, par exemple, comme un «habillage juridique» ; ils ont qualifié la nomination de M. Obiang Mangue à ses hautes fonctions comme une «nomination de circonstance» ; ils ont dénié à la Guinée équatoriale la possibilité de participer aux procédures pénales pour faire valoir ses droits, raison pour laquelle la version des faits de la Guinée équatoriale n’a jamais été prise en considération. Cette attitude, Monsieur le président, ne peut pas être permise ou approuvée par cette Cour.
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15. Monsieur le président, Mesdames et Messieurs de la Cour, ce matin la Guinée équatoriale va présenter son cas de la façon suivante : après mon propos, Sir Michael Wood fera un exposé général de la position de la Guinée équatoriale. Il sera suivi par Me Tchikaya et Me Evuy, qui aborderont les faits relatifs à l’acquisition de l’immeuble du 42 avenue Foch et son affectation à des fins diplomatiques, respectivement. Ensuite, le professeur Kamto expliquera les violations par la France de la convention de Vienne sur les relations diplomatiques. Pour finir, Sir Michael Wood démontrera que les accusations d’abus de droit de la Partie adverse sont totalement injustifiées.
16. Monsieur le président, Mesdames et Messieurs de la Cour, je vous remercie pour votre aimable attention. Je vous prie respectueusement, Monsieur le président, de donner à présent la parole à Sir Michael Wood.
Le PRESIDENT : Je remercie S. Exc. M. Carmelo Nvono Nca. J’invite maintenant Sir Michael Wood à prendre la parole. Vous avez la parole, M. Wood.
Sir Michael WOOD:
2. OVERVIEW OF EQUATORIAL GUINEA’S POSITION
1. Mr. President, Members of the Court, it is an honour to appear before you, and to do so once again on behalf of the Republic of Equatorial Guinea. I shall first say a brief word about the scope of the dispute before the Court in response to what France said in its Rejoinder. I shall then give an overview of Equatorial Guinea’s position in response to France’s written pleadings. Mr. President, Members of the Court, as you may have seen, rather than bulky judges’ folders, we have provided the Court with a small pack of the slides that we shall be projecting. The other documents referred to are, of course, in the written pleadings and we hope that this reflects the injunction to exercise restraint that we find in Practice Direction 9ter.
2. Mr. President, Equatorial Guinea’s case is straightforward. At the same time, as the Agent has just recalled, it raises important points of diplomatic law, a body of law essential for the conduct of peaceful relations among States. In your Judgment in the Diplomatic and Consular Staff case, where the inviolability of a foreign embassy was very much at issue, you referred to
“the edifice of law carefully constructed by mankind over a period of centuries, the maintenance of which is vital for the security and well-being of the complex
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international community of the present day, to which it is more essential than ever that the rules developed to ensure the ordered progress of relations between its members should be constantly and scrupulously respected”1.
These words remain as true today as they were in 1980. The absolute inviolability of mission premises is one of the most important rules of diplomatic law.
3. The fundamental legal issue in this case is how, and when, premises become “premises of the mission” within the meaning of the Vienna Convention on Diplomatic Relations (hereinafter the “Vienna Convention”). At what stage do newly acquired premises become premises of the mission? In other words, when can they be said to be “buildings or parts of buildings . . . used for the purposes of the mission” within the meaning of Article 1, paragraph (i), of the Vienna Convention? When and under what conditions may a receiving State decline to accept premises that are used as premises of the mission? Here the receiving State’s obligation not to discriminate plays an essential role. Article 47 of the Vienna Convention reads: “In the application of the provisions of the present Convention, the receiving State shall not discriminate as between States.” Professor Kamto will be addressing these issues later this morning.
4. Mr. President, Members of the Court, I must say a word about the scope of the dispute now before the Court; in its Rejoinder, France continues to accuse Equatorial Guinea of straying beyond this scope2. We for our part have set out our position, I hope clearly, in our Reply3.
5. In fact, Mr. President, there is hardly any practical difference between the Parties on this question. Equatorial Guinea agrees, of course, that jurisdiction and applicable law are two distinct matters. The Parties agree that, following your Judgment on preliminary objections4, jurisdiction is based solely on the Optional Protocol to the Vienna Convention on Diplomatic Relations (which covers “[d]isputes arising out of the interpretation or application of the Convention”)5. However, we do not share France’s view that the case is necessarily limited to the interpretation and
1 United States Diplomatic and Consular Staff in Tehran (United States of America v Iran), Judgment, I.C.J. Reports 1980, p. 43, para 92.
2 Rejoinder of the French Republic (RF), paras. 0.13-0.14.
3 Reply of the Republic of Equatorial Guinea (REG), paras. 0.19-0.22.
4 Immunities and Criminal Proceedings (Equatorial Guinea v. France), Preliminary Objections, Judgment, I.C.J. Reports 2018 (I), p. 292.
5 Optional Protocol to the Vienna Convention on Diplomatic Relations concerning the Compulsory Settlement of Disputes, Vienna, 18 April 1961, Art. 1.
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application of Article 22 of the Vienna Convention, read in isolation from the other provisions6 and without taking into account, as appropriate, other relevant rules of international law applicable in the relations between the Parties7. That is not how treaties are interpreted and applied. Article 22 obviously has to be read with Article 1, paragraph (i), which defines “premises of the mission” —France seems to accept this now — and both have to be interpreted and applied in the context of the other provisions of the Convention, including, for example, Article 47 on non-discrimination.
6. France urges you not to look at the ongoing criminal proceedings against the Vice-President of Equatorial Guinea8, proceedings that are being conducted in blatant disregard of the immunity to which he is entitled under international law9. In fact, Mr. President, Members of the Court, those criminal proceedings remain central to the present case. Our Application commencing proceedings made that clear10. As Professor Kamto will show, a principal violation of the premises of Equatorial Guinea’s mission in France lies in the seizure and threatened confiscation of the premises by order of the French court in those criminal proceedings. Those orders of the French court are the reason for the measures imposed upon France in your provisional measures Order11.
7. Equatorial Guinea accepts, of course, that the scope of the dispute now before the Court is limited by your 2018 preliminary objections Judgment to the disputes covered by the Optional Protocol to the Vienna Convention.
8. Of course, the fact that the Court’s jurisdiction is limited to that provided for in the Optional Protocol in no way affects the continuing validity of the other claims which Equatorial Guinea sought to bring before the Court in its Application. These were: (i) the dispute between Equatorial Guinea and France concerning the immunity from foreign criminal jurisdiction of Equatorial Guinea’s Vice-President; (ii) the dispute between Equatorial Guinea and France concerning the jurisdictional immunity of the building at 42 avenue Foch, being a building owned
6 RF, para. 0.14.
7 Vienna Convention on the Law of Treaties, Art. 31, para. 3 (c).
8 RF, para 1.1.
9 Memorial of the Republic of Equatorial Guinea (MEG), Chap. 7.
10 Application of the Republic of Equatorial Guinea (AEG), 13 June 2016, para. 2.
11 Immunities and Criminal Proceedings (Equatorial Guinea v. France), Provisional Measures, Order of 7 December 2016, I.C.J. Reports 2016 (II), p. 1148.
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by Equatorial Guinea and used for non-commercial purposes; and (iii) the dispute concerning France’s contravention of the principles of sovereign equality and non-intervention in internal affairs. These disputes remain, but unfortunately they cannot be resolved in the present proceedings. But as this Court has frequently had occasion to point out, “[w]hether or not States accept the jurisdiction of the Court, they remain in all cases responsible for acts attributable to them that violate the rights of other States”12. The French Court of Appeal’s most recent judgment, just one week ago, on 10 February 2020, which Maître Tchikaya will mention in a few minutes, can only make the situation more acute and the need for peaceful settlement more urgent.
9. Mr. President, Members of the Court, central to France’s argument in its written pleadings is the assertion that there are incoherencies and contradictions in Equatorial Guinea’s pleadings13, and that Equatorial Guinea has not supported its factual claims with evidence14. That is a serious charge; it comes close to accusing Equatorial Guinea of making up the facts. As I shall explain, it is a charge without merit.
10. As we read France’s written pleadings, in particular its unfounded accusations against Equatorial Guinea, we ask whether France has looked at all in the mirror. It accuses Equatorial Guinea of incoherencies and contradictions, but it turns a blind eye to the extraordinary inconsistency with which its own authorities have treated Equatorial Guinea with regard to the building housing its Embassy, a matter to which we shall come back later. France also accuses Equatorial Guinea of a “biased presentation of the facts”15, and of advancing “repeatedly arguments that are not supported by any evidence”16, but that is precisely what France itself does in these proceedings. France further says that Equatorial Guinea is advocating a “unilateral and unbalanced reading of the Vienna Convention that goes against fundamental principles governing diplomatic relations between sovereign States”17, but that, Mr. President, Members of the Court, is precisely
12 Aerial Incident of 10 August 1999 (Pakistan v. India), Jurisdiction of the Court, Judgment, I.C.J. Reports 2000, p. 33, para. 51 (citing Fisheries Jurisdiction (Spain v. Canada)); see also para. 53 (“The Court’s lack of jurisdiction does not relieve States of their obligation to settle their disputes by peaceful means.”).
13 RF, Chap. 1.
14 RF, paras. 0.6-07.
15 For example, RF, para. 1.18.
16 RF, para. 0.6.
17 RF, para. 2.28.
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the kind of interpretation of the Convention that France would have you endorse. All this is, I am afraid, characteristic of the attitude that France has regrettably shown towards Equatorial Guinea from the start of the present dispute.
11. The silences in France’s written pleadings speak volumes. For example, France has not responded at all to what we say about
 the fact that, in the bilateral relations between Equatorial Guinea and France, it has in practice sufficed for the sending State to inform the receiving State that a building was destined to serve as the Embassy18;
 it has not responded to the serious difficulties that would arise if one were to apply the theory of “two cumulative conditions” which is advanced in France’s written pleadings19; and
 it has not said anything about the wholly unacceptable approach that the French Foreign Ministry adopted at the critical dates of the present case, between 4 and 11 October 2011, when it unilaterally decided not to recognize Equatorial Guinea’s new Embassy20 and when it so informed the French courts.
12. Mr. President, Members of the Court, that brings me to the central point of the present case, the status of the building at 42 avenue Foch as premises of Equatorial Guinea’s diplomatic mission in France, and the violation of that status by the French authorities, including by the French courts. Here it is essential to have a clear view of the timeline, something that France has sought to obfuscate. As I shall explain, on 11 October 2011, France  unilaterally and without any consultation whatsoever with Equatorial Guinea and, it seems, without any real investigation  informed the French judges that the building at 42 avenue Foch belonged to the private domain and had no immunity21. That false information given to the judges by the Quai d’Orsay is the fons et origo of the dispute over the status of the building.
18 REG, paras. 1.2, 1.14-1.15, 2.67.
19 REG, paras. 2.22-2.23.
20 REG, paras. 1.34-1.40.
21 MEG, Ann. 35.
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13. Mr. President, Members of the Court, we set out a detailed chronology of all the events in this case in our Memorial22. The key period is the two weeks between 15 September 2011 and 11 October 2011. As you will now see on the screen:
 On 15 September 2011, Equatorial Guinea purchased, for a fair market price, the building at 42 avenue Foch23.
 On 4 October 2011, Equatorial Guinea informed the French Ministry of Foreign Affairs that the building formed part of the premises of its diplomatic mission within the meaning of Article 1 of the Vienna Convention on Diplomatic Relations. (I would note in passing that the Quai d’Orsay stamped the Note saying that it was received on 6 October, which left even less time for an investigation before a decision was taken.)
 Just a couple of days later, on 10 October 2011, the juges d’instruction asked the Quai d’Orsay about the status of the building.
 The very next day, on 11 October 2011, the French Foreign Ministry informed the Ministry of Justice, in response to this enquiry by the judges, that the building had never been recognized as forming part of the diplomatic mission of Equatorial Guinea and that it “falls within the private domain and is, as such, subject to ordinary law”  that is the Registry’s translation of “relevait du domaine privé et, de ce fait, du droit commun”24. The Quai enclosed, for the benefit of the judges, its exchange of Notes with Equatorial Guinea of 4 and 11 October. Equatorial Guinea was not consulted before the Foreign Ministry wrote this letter, and indeed knew nothing at the time about this correspondence between the French Government and the French courts. Importantly, the letter to the judges also makes reference to a certain “vérification process” that was to take place in order to determine whether the building could be considered as premises of the mission; however, so far as we are aware, this vérification never took place. While France produced to this Court many court documents in the course of the provisional measures hearing, it did not see fit to inform this Court or the Applicant about its own correspondence with the judges.
22 MEG, pp. 185-196 (pp. 125-133 in the English translation).
23 MEG, para. 2.17; see also the reply of Equatorial Guinea to the question put by Judge Bennouna at the public sitting held on 19 October 2016.
24 MEG, Ann. 35.
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 Also on 11 October 2011, the French Foreign Ministry wrote to Equatorial Guinea informing it that 42 avenue Foch did not form part of the premises of Equatorial Guinea’s diplomatic mission because, once again, it “belonged to the private domain”25. No reasons were given for this conclusion. There were no contacts with Equatorial Guinea preceding this Note. Equatorial Guinea and the French Foreign Ministry then engaged in a prolonged but fruitless exchange of diplomatic Notes concerning the status of the building26.
 It was on 19 July 2012 that the French court issued an order of saisie légale against the building at 42 avenue Foch. This was more than nine months after it had become clear that there was a serious dispute between France and Equatorial Guinea concerning the status of the building.
14. Mr. President, throughout this period, the French Foreign Ministry, having misled the French court right at the outset on 11 October 2011, did nothing whatsoever to correct its false statements or even to discuss the matter with Equatorial Guinea despite the numerous appeals by the Embassy, the Minister of Justice and even the Head of State of Equatorial Guinea. The Foreign Ministry merely repeated its mantra that the building fell within the private domain, which was patently false. To make matters worse, France now claims that it cannot remedy the present situation by making its views known to the French courts. Yet making its views known to the French courts is precisely what it did at the very outset of this sorry affair, when on 11 October 2011, it transmitted its erroneous view to the court. If the Foreign Ministry had not misinformed its own courts, we would not find ourselves before this Court over the matter of the building.
15. Mr. President, Members of the Court, that concludes what I have to say at this stage. I thank you for your attention. I should be grateful if you would invite Maître Tchikaya to the podium.
Le PRESIDENT : Je remercie Sir Michael Wood. Je donne à présent la parole à M. Jean-Charles Tchikaya. Vous avez la parole, Monsieur.
25 MEG, Ann. 34.
26 MEG, Ann. 37; Ann. 38; Anns. 21-24; Anns. 43-44; Anns. 45-48.
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M. TCHIKAYA :
3. DERNIERS DÉVELOPPEMENTS DES PROCÉDURES PÉNALES EN FRANCE ET CIRCONSTANCES DE L’ACQUISITION PAR LA GUINÉE ÉQUATORIALE DE L’IMMEUBLE AU 42 AVENUE FOCH
1. Monsieur le président, Mesdames et Messieurs les juges, c’est un grand honneur pour moi de prendre de nouveau la parole devant vous au nom de la République de Guinée équatoriale.
2. Mon intervention, aujourd’hui, portera dans un premier temps sur l’état actuel des procédures pénales en France contre le vice-président de la Guinée équatoriale relativement à leur conséquence sur l’immeuble du 42 avenue Foch à Paris. Puis, dans un second temps, j’aborderai brièvement les circonstances de l’acquisition par la Guinée équatoriale de cet immeuble, question à laquelle nos contradicteurs attribuent une grande importance dans leur argumentation sur l’abus de droit.
I. Derniers développements des procédures pénales en France
3. Monsieur le président, comme nous l’avons exposé lors des audiences consacrées aux exceptions préliminaires27, le vice-président de la Guinée équatoriale avait interjeté appel du jugement du Tribunal correctionnel de Paris, qui l’avait condamné à une peine d’emprisonnement de trois ans avec sursis et au paiement d’une amende de 30 millions d’euros, également assortie du sursis, outre la confiscation de l’immeuble du 42 avenue Foch, abritant l’ambassade de la Guinée équatoriale en France.
4. A la suite des audiences en appel, qui se sont tenues en décembre 2019, et au cours desquelles l’avocat général avait requis à son encontre les peines de quatre ans d’emprisonnement fermes, 30 millions d’euros d’amende, non assortie du sursis, la confiscation de l’immeuble du 42 avenue Foch, ainsi qu’un mandat d’arrêt international, la Cour d’appel de Paris a rendu son arrêt le 10 février 2020.
5. La Cour a, sur la culpabilité, réformé partiellement le jugement déféré, en relaxant M. Teodoro Nguema Obiang Mangue à raison de faits de blanchiment de corruption et, pour le surplus du jugement, confirmé la culpabilité du prévenu pour des faits de blanchiment de
27 CR 2018/3, p. 23-27, par. 26-48 (Tchikaya).
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détournement de fonds publics et de blanchiment d’abus de biens sociaux. En répression, la Cour d’appel a reformé partiellement le jugement entrepris, en déclarant que la peine de 30 millions d’euros d’amende n’était pas assortie du sursis et, pour le surplus, a confirmé la peine d’emprisonnement de trois ans avec sursis, ainsi que la confiscation de l’immeuble du 42 avenue Foch.
6. Il est à noter que, pour rejeter la demande de renvoi soutenue par les conseils de M. Teodoro Nguema Obiang Mangue, au motif que l’instance pendante devant votre Cour fait obstacle à ce qu’une peine de confiscation de l’immeuble puisse être envisagée, la Cour d’appel a noté que, concernant les questions de l’immunité revendiquée par le prévenu et celle de l’immunité de toute mesure de contrainte invoquée par la Guinée équatoriale en faveur de l’immeuble du 42 avenue Foch, en tant que bien de l’Etat, la Cour internationale de Justice a jugé, le 6 juin 2018, ne pas être compétente pour connaître de cet aspect du différend, et que le fait de fonder une demande de renvoi sur l’hypothèse du prononcé d’une peine complémentaire, référence faite aux termes exacts du litige devant votre Cour, n’est pas un motif admissible.
7. Ainsi, par déclaration en date du 14 février 2020, M. Teodoro Nguema Obiang Mangue a formé un pourvoi en cassation contre ledit arrêt. Le pourvoi étant, en la matière, suspensif, c’est donc, encore une fois, grâce à l’exercice par le prévenu d’une voie de recours contre une décision prononcée à son encontre que la confiscation de l’immeuble n’est pas définitive, évitant ainsi la vente aux enchères publiques et l’expulsion de la mission diplomatique de la Guinée équatoriale des locaux qu’elle occupe depuis maintenant près de dix ans. Il est probable que la Cour de cassation ne rendra pas son arrêt avant plusieurs années.
8. En réalité, la volonté de la France de ne pas se conformer à l’ordonnance sur les mesures conservatoires, qui lui impose de prendre toutes les mesures dont elle dispose pour que les locaux du 42 avenue Foch jouissent d’un traitement équivalent à celui requis par la convention de Vienne sur les relations diplomatiques, ne fait aucun doute. Cela est si vrai que, dans ses réquisitions orales devant la Cour d’appel, l’avocat général a soutenu que l’instance dont la Cour d’appel était saisie concernait exclusivement une personne physique, en l’occurrence M. Teodoro Nguema Obiang Mangue et pas la Guinée équatoriale, non partie à l’instance.
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9. Monsieur le président, Mesdames et Messieurs les juges, permettez-moi d’aborder, comme je l’ai indiqué, le point relatif aux circonstances de l’achat par la Guinée équatoriale de l’immeuble du 42 avenue Foch à Paris.
II. Circonstances de l’acquisition de l’immeuble du 42 avenue Foch
10. En effet, en dépit des précisions apportées par la Guinée équatoriale dans ses écritures et au cours des procédures orales devant votre Cour, la Partie adverse s’obstine à vous présenter un exposé des faits erroné, voire contradictoire, dans le seul but de conforter sa thèse d’abus de droit dont Sir Michael Wood démontrera plus tard le caractère non fondé, en l’espèce.
11. La Guinée équatoriale tient, tout d’abord, à informer la Cour, comme elle l’a expliqué dans sa réplique28, qu’elle a une politique générale d’acquérir la propriété des immeubles qu’elle entend utiliser à des fins diplomatiques, tant pour ses ambassades que pour les résidences de ses diplomates. Cette politique n’a absolument rien d’extraordinaire, d’autant qu’elle est également celle de plusieurs Etats.
12. L’acquisition de l’immeuble du 42 avenue Foch est donc le résultat ou plus exactement la concrétisation d’un projet datant de 1999.
13. En effet, déjà en octobre 1999, l’ambassadeur de la Guinée équatoriale en France avait exprimé par écrit le souhait de son gouvernement d’acheter les locaux 6 rue Alfred de Vigny, qu’il louait pour le compte de la mission diplomatique.
14. Puis, en 2010, la Guinée équatoriale a poursuivi ses démarches en vue d’acquérir de nouveaux locaux pour sa mission diplomatique, comme en attestent, par exemple, des échanges de correspondances entre son ambassadeur et des agences immobilières concernant un hôtel particulier, alors en vente29. Cette décision était motivée par le fait que les locaux précédents, situés au 29 boulevard de Courcelles, étaient, de l’avis de la Guinée équatoriale, trop petits pour l’accomplissement effectif des fonctions de l’ambassade et que, de plus, ils n’avaient pas les qualités de représentation que la Guinée équatoriale estime nécessaires pour l’une de ses missions diplomatiques les plus importantes.
28 Voir réplique de la Guinée équatoriale (RG), par. 1.17.
29 RG, annexe 5.
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15. C’est alors qu’en 2011, l’opportunité s’est présentée à la Guinée équatoriale d’acheter l’immeuble du 42 avenue Foch, qui non seulement présente les caractéristiques adéquates pour abriter sa mission diplomatique, mais encore a l’avantage d’être situé dans une zone géographique où se trouvent plusieurs ambassades.
16. Dès lors, l’analyse chronologique de ce processus d’acquisition contredit l’affirmation de la France selon laquelle l’achat de cet immeuble était «précipité»30.
17. De plus, il convient d’observer que l’acquisition de cet immeuble est parfaitement licite au regard du droit français et du droit suisse.
18. En effet, la Guinée équatoriale est devenue propriétaire de l’immeuble du 42 avenue Foch le 15 septembre 2011, comme nous l’avons vu tout à l’heure, en vertu d’une convention de cession d’actions et de créances conclue avec M. Teodoro Nguema Obiang Mangue31. A la suite de cette transaction signée pour le prix de 34 millions d’euros, la Guinée équatoriale est devenue précisément l’actionnaire unique des cinq sociétés suisses copropriétaires de l’immeuble. On notera que la date de cette convention de cession est bien antérieure à celle des premières mesures de contrainte prises contre l’immeuble en cause par les autorités judiciaires et policières françaises, à savoir les perquisitions conduites du 14 au 23 février 2012, ainsi que la saisie des véhicules appartenant à M. Teodoro Nguema Obiang Mangue, le 28 septembre et le 3 octobre 2011.
19. Aujourd’hui, il est incontestable que c’est la Guinée équatoriale qui apparaît dans le registre du commerce du Canton de Fribourg, en Suisse, comme l’actionnaire unique de chacune des sociétés copropriétaires de l’immeuble du 42 avenue Foch32.
20. Le 17 octobre 2011, la cession des actions sur les sociétés suisses au Gouvernement de la République de Guinée équatoriale a été officiellement constatée et enregistrée en France par l’administration fiscale française, sur le formulaire «Cession de droits sociaux non constatée par un acte à déclarer obligatoirement»33. Le formulaire fait référence à la Guinée équatoriale comme
30 CR 2016/15, p. 24, par. 18 (Pellet).
31 Réponse de la Guinée équatoriale aux juges Bennouna et Donoghue (ReGE), annexe 1.
32 Ibid., annexe 3.
33 Ibid., annexe 5.
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«cessionnaire» et indique que les biens représentés par les droits sociaux cédés sont des biens immobiliers. Il est à noter que, à l’occasion de cet enregistrement, la Guinée équatoriale, cessionnaire, s’est acquittée d’un impôt pour la somme de 317 672 euros. La Guinée équatoriale a par ailleurs payé au Gouvernement français une somme de 1 145 740 euros au titre de la plus-value relative à la cession de droits sociaux34.
21. La France ne s’est jamais opposée à ce que la Guinée équatoriale s’acquitte des impôts dus pour cette transaction. Avant de qualifier cette transaction d’«habillage juridique»35, la France aurait dû, me semble-t-il, commencer par en poursuivre l’annulation devant ses tribunaux et, ensuite, rembourser les sommes qu’elle a encaissées de la Guinée équatoriale à titre d’impôt et de plus-value dus à l’occasion de cette transaction. Or, à ce jour, rien de tel n’a été fait. La France n’a jamais remboursé la Guinée équatoriale, de même qu’aucune action en annulation de la transaction concernant l’immeuble du 42 avenue Foch n’a été initiée par le procureur de la République de Paris.
22. L’immeuble du 42 avenue Foch est bien la propriété de la Guinée équatoriale, et le fait que la Guinée équatoriale a été empêchée de transcrire son titre de propriété à la publicité foncière, à cause de la saisie pénale immobilière, intervenue en juillet 2012, n’a juridiquement aucune incidence sur son droit de propriété. La formalité de la publicité foncière étant destinée à l’information des tiers, elle ne constitue nullement la preuve d’un droit de propriété. Cette preuve, en droit français, du moins en matière immobilière, est libre.
23. Pour conclure, Monsieur le président, il est clairement établi que l’immeuble du 42 avenue Foch a été régulièrement acquis par la Guinée équatoriale, qui ne l’a jamais utilisé autrement qu’à des fins de service public non commerciales, et a, dans les 19 jours suivant l’acte d’acquisition, soit le 4 octobre 2011, informé la France de son affectation à sa mission diplomatique.
24. Je vous remercie, Monsieur le président, Mesdames et Messieurs les juges, de votre attention. Je vous prie respectueusement, Monsieur le président, de donner à présent la parole à Me Francisco Evuy.
34 ReGE, annexe 6.
35 RG, par. 1.20.
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Le PRESIDENT : Je remercie M. Tchikaya. J’invite à présent M. Francisco Evuy à prendre la parole. Vous avez la parole, Monsieur.
M. EVUY :
4. L’AFFECTATION DE L’IMMEUBLE DU 42 AVENUE FOCH AUX FINS DE LA MISSION DIPLOMATIQUE
1. Monsieur le président, Mesdames et Messieurs les juges, c’est un grand honneur pour moi de paraître aujourd’hui devant votre Cour au nom de la République de Guinée équatoriale.
2. Ma tâche aujourd’hui est d’exposer les faits relatifs à l’affectation de l’immeuble sis au 42 avenue Foch aux fins de la mission diplomatique de la Guinée équatoriale en France, et de répondre aux allégations erronées de la Partie adverse qui ne visent qu’à semer la confusion.
3. Comme Me Tchikaya vient de l’expliquer et comme la véritable chronologie des faits le démontre, la décision de la Guinée équatoriale d’acquérir l’immeuble du 42 avenue Foch n’avait qu’un seul but : l’affecter aux fins de sa mission diplomatique. Nous nous voyons obligés de réaffirmer ce fait de la manière la plus ferme possible, compte tenu des allégations de la France selon lesquelles la Guinée équatoriale aurait acquis l’immeuble pour différentes raisons. Ces allégations sont non seulement insultantes et témoignent d’un mépris à l’égard de la Guinée équatoriale ; elles sont également dépourvues de tout, et je répète tout, fondement factuel.
4. Le 4 octobre 2011, date qui, comme Sir Michael Wood vient de le mentionner, est critique dans la présente affaire, l’ambassade de la Guinée équatoriale a officiellement communiqué à la France sa décision d’affecter l’immeuble du 42 avenue Foch aux fins de sa mission diplomatique. Comme la Guinée équatoriale l’a expliqué à maintes reprises, même si elle a acquis l’immeuble et l’a affecté aux fins de sa mission diplomatique bien avant le 4 octobre, c’est à partir de cette notification que l’immeuble constitue les «locaux de la mission» au sens de l’article 1, alinéa i), de la convention de Vienne sur les relations diplomatiques. Il aurait dû bénéficier du régime d’inviolabilité prévu à l’article 22 de la convention.
5. La France n’a jamais contesté que l’objet de cette note verbale visait à ce qu’elle reconnaisse le statut diplomatique de l’immeuble du 42 avenue Foch36. Elle a pourtant remis en
36 Contre-mémoire de la République française (CMF), par. 1.19.
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question l’affirmation que fait la Guinée équatoriale dans cette note selon laquelle (je cite), «[elle] dispos[ait] depuis plusieurs années d’un immeuble … qu’elle utilis[ait] pour l’accomplissement des fonctions de sa Mission Diplomatique sans qu’elle ne l’ait formalisé expressément». Selon la Partie adverse, cette affirmation serait inexacte puisque la Guinée équatoriale n’aurait jamais fait un usage diplomatique de l’immeuble avant le 4 octobre 201137. Nous avons déjà amplement répondu aux questions de la France à cet égard, Monsieur le président, et il n’est pas nécessaire d’y revenir encore une fois. Nous relevons, en tout cas, que dans sa duplique, la France admet que les explications de la Guinée équatoriale semblent «au moins corroborer les termes de la note verbale … en date du 4 octobre»38.
6. Entre le 4 octobre 2011 et le 27 juillet 2012, la Guinée équatoriale a poursuivi la planification du transfert de l’ambassade et du déménagement effectif des services des locaux antérieurs, situés au 29 boulevard des Courcelles, aux nouveaux locaux du 42 avenue Foch. C’est également dans cette période, notamment en février et juillet 2012, que les autorités policières et judiciaires françaises ont pris des mesures coercitives contre l’immeuble du 42 avenue Foch. Rien de tel n’aurait été possible si le ministère des affaires étrangères de la France n’avait informé de manière erronée les autorités judiciaires que cet immeuble appartenait toujours à M. Teodoro Nguema Obiang Mangue. Il me faut par conséquent, Monsieur le président, revenir brièvement sur les faits qui se sont déroulés à cette époque.
7. Après avoir notifié la France de l’affectation de l’immeuble du 42 avenue Foch comme locaux de sa mission diplomatique en France, la Guinée équatoriale a apposé des affiches à l’entrée de l’immeuble avec les inscriptions «République de Guinée équatoriale  locaux de l’ambassade». La France caricature parfois le fait que ces affiches étaient dans un premier moment en papier, mais nous ne pensons pas qu’il faille s’attarder sur la rhétorique de la Partie adverse. Pour la Guinée équatoriale, ses affiches devaient être apposées tout simplement pour faire montre du fait que l’immeuble était destiné à l’accomplissement des fonctions de sa mission diplomatique, et pour éviter des intrusions. Rien d’extraordinaire dans ceci.
37 CMF, par. 4.18, 4.21; duplique de la République française (DF), par. 3.12-3.14.
38 DF, par. 1.8.
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8. En octobre 2011, lorsque l’ambassade de la Guinée équatoriale préparait le déménagement de ses services, Mme Bindang Obiang, représentante permanente de la Guinée équatoriale auprès de l’UNESCO et chargée d’affaires ad interim à l’époque, a été logée dans l’immeuble du 42 avenue Foch39. Comme on l’a expliqué, cette réinstallation se justifiait parce que le logement antérieur s’était avéré impropre à l’habitation et que la dignité des nouvelles fonctions de Mme Bindang Obiang exigeait un meilleur cadre résidentiel40.
9. La France a fait valoir que la réinstallation de Mme Bindang Obiang constitue une incohérence dans la présentation des faits relatifs à l’affectation de l’immeuble à des fins diplomatiques41. Mais il n’en est rien. La note verbale du 17 octobre 2011, qui informait la France du changement d’adresse de la chargée d’affaires ad interim, disait précisément que sa résidence se trouvait «dans les locaux de la mission diplomatique». La réinstallation de Mme Bindang Obiang fait montre tout simplement de l’utilisation diplomatique que la Guinée équatoriale faisait déjà de l’immeuble à l’époque.
10. Monsieur le président, comme la Guinée équatoriale l’a expliqué dans ses écritures, le déménagement des services de l’ambassade a été progressif. Ces services, tels que le consulat, le bureau de comptabilité et le bureau d’administration, ont commencé à opérer depuis l’immeuble au fur et à mesure qu’ils étaient déménagés.
11. Depuis le 27 juillet 2012, tous les services de l’ambassade sont installés dans l’immeuble, comme en attestent les notes verbales de l’ambassade de cette date et du 2 août 2012.
12. Comme la Guinée équatoriale l’a étayé dans ses écritures, les autorités françaises ont reconnu à maintes reprises, et bien avant l’ordonnance en indication de mesures conservatoires de votre Cour, que les locaux de la mission diplomatique équato-guinéenne se trouvent bien au 42 avenue Foch. C’est effectivement à cette adresse, par exemple, que les autorités françaises se sont déplacées et se déplacent toujours pour obtenir des visas. Il a également été accordé à l’immeuble une protection conformément à la convention de Vienne sur les relations diplomatiques en 2015 en raison d’une manifestation et, en 2016, à l’occasion des élections présidentielles en
39 Mémoire de la Guinée équatoriale (MGE), par. 4.10.
40 ReGE, par. 24.
41 Exceptions préliminaires de la République française (EPF), par. 22-23, 27 ; CMF, par. 1.24.
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Guinée équatoriale. Ce comportement, Monsieur le président, ne peut être interprété que comme une reconnaissance tacite par la France du statut diplomatique de l’immeuble.
13. Cette réalité, qui dure depuis près de dix ans, n’a pas été contestée par la France. Et, contrairement à ce qu’affirme la sous-directrice des privilèges et immunités diplomatiques et consulaires du protocole du ministère des affaires étrangères de la France42, la Partie adverse adresse bien ses correspondances aux locaux de la mission sis au 42 avenue Foch. Elle l’a fait encore récemment, notamment lorsqu’elle a sollicité le soutien de la Guinée équatoriale pour promouvoir ses intérêts au niveau international43. Voilà donc, Monsieur le président, la réalité des faits.
14. Les faits que je viens de vous exposer, Mesdames et Messieurs les juges, montrent que la Guinée équatoriale a eu l’intention, dès le début, et avant que toute mesure de contrainte ne soit prise par les autorités françaises, d’affecter l’immeuble du 42 avenue Foch à Paris à l’accomplissement des fonctions de sa mission. La Guinée équatoriale a toujours agi de manière conséquente, avec le but de garantir la bonne conduite de sa diplomatie.
15. Pour conclure, compte tenu des faits que je viens d’exposer, et comme Sir Michael Wood l’a expliqué, l’immeuble du 42 avenue Foch jouit d’un statut double : le premier est le statut diplomatique, sur la base duquel l’immeuble jouit de l’inviolabilité diplomatique en vertu de l’article 22 de la convention de Vienne sur les relations diplomatiques. Ceci a été confirmé par le Tribunal de grande instance de Paris dans son ordonnance de référé du 22 octobre 2013. L’immeuble est également un bien de l’Etat utilisé à des fins de service public non commerciales, lequel fait donc partie du domaine public. La France ne peut pas, par conséquent, qualifier l’immeuble comme relevant du domaine privé.
16. Je vous remercie, Monsieur le président, Mesdames et Messieurs les juges, de l’attention que vous avez bien voulu m’accorder. Je vous prie très respectueusement, Monsieur le président, de donner à présent la parole au professeur Maurice Kamto.
42 DF, annexe 1.
43 Voir les quatre documents annexés à la note de la Guinée équatoriale adressée au greffier en date du 24 janvier 2020 et la lettre du greffier en date du 6 février 2020.
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Le PRESIDENT : Je remercie M. Evuy. Avant d’inviter l’intervenant suivant à la barre, la Cour observera une pause de 15 minutes. L’audience est suspendue.
L’audience est suspendue de 11 h 15 à 11 h 30.
Le PRESIDENT : Veuillez vous asseoir. L’audience reprend. Je donne maintenant la parole au professeur Maurice Kamto. Vous avez la parole, Monsieur.
M. KAMTO :
5. LA VIOLATION PAR LA FRANCE DE LA CONVENTION DE VIENNE DU 18 AVRIL 1961 SUR LES RELATIONS DIPLOMATIQUES
1. Monsieur le président, Mesdames et Messieurs de la Cour, c’est un honneur renouvelé de prendre la parole devant vous, au nom de la Guinée équatoriale que je remercie pour sa confiance dans la présente affaire.
2. Mes confrères vous ont rappelé le contexte du différend soumis à votre auguste juridiction, clarifié la question de la propriété de l’immeuble sis au 42 avenue Foch à Paris faisant partie de la mission diplomatique de la Guinée équatoriale, ainsi que les circonstances factuelles de l’affectation dudit immeuble. Il m’échoit, à présent, d’aborder ce qui est désormais le coeur du litige, dès lors que la Cour a jugé, dans son arrêt rendu le 6 juin 2018 sur les exceptions préliminaires, qu’elle n’a compétence que sur la base du protocole de signature facultative à la convention de Vienne sur les relations diplomatiques (CVRD) concernant le règlement obligatoire des différends, en ce qui a trait au statut de l’immeuble sis au 42 avenue Foch à Paris, en tant que locaux de la mission diplomatique de la Guinée équatoriale44.
3. Monsieur le président, Mesdames et Messieurs les juges, la question que la Cour est appelée à trancher est celle de savoir si l’immeuble en question constitue les locaux de la mission de la Guinée équatoriale, au sens de la convention de Vienne sur les relations diplomatiques ; et si oui, si la France n’a pas respecté l’inviolabilité de cet immeuble en tant que locaux de la mission de cet Etat, et, par suite, a violé ses obligations au titre de la convention de Vienne précitée.
44 Immunités et procédures pénales (Guinée équatoriale c. France), exceptions préliminaires, arrêt, C.I.J. Recueil 2018 (I), p. 292.
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4. La Guinée équatoriale soutient que, conformément à la convention de Vienne, pour qu’un immeuble acquière la qualité de «locaux de la mission», il suffit que l’Etat accréditant affecte l’immeuble aux fins de sa mission diplomatique. Naturellement, la notification de cette affectation à l’Etat accréditaire est nécessaire pour que celui-ci puisse s’acquitter de ses obligations. Mais la convention ne contient aucune exigence d’obtenir le consentement de l’Etat accréditaire. Certes, la convention n’interdit pas à l’Etat accréditaire d’imposer une obligation d’obtenir son consentement ; mais si cet Etat en décide ainsi, il doit le faire de manière claire, transparente et non discriminatoire, en respectant sa législation ou sa pratique générale, si elles existent. En d’autres termes, il doit agir en conformité à la lettre et l’esprit de la convention de Vienne, faute de quoi il violerait ses obligations au titre de cette convention.
5. Afin d’étayer cette position, la Guinée équatoriale établira d’abord que l’immeuble sis au 42 avenue Foch à Paris constitue les locaux de la mission de la Guinée équatoriale (I), avant de montrer ensuite que la France, Etat accréditaire, a violé ses obligations en vertu de la convention de Vienne sur les relations diplomatiques (II).
I. L’immeuble sis au 42 avenue Foch à Paris constitue les locaux de la mission diplomatique de la Guinée équatoriale en France
6. Il est établi que la Guinée équatoriale est propriétaire de l’immeuble sis au 42 avenue Foch à Paris. Mon confrère Jean-Charles Tchikaya vient d’en faire un rappel éloquent. Certes, du point de vue de la protection offerte par la convention de Vienne sur les relations diplomatiques, la propriété de l’immeuble n’est pas déterminante, mais dans la présente affaire elle est importante. Sur le plan théorique, alors même que la Guinée équatoriale n’aurait pas été propriétaire de l’immeuble en question, celui-ci demeurait tout de même les locaux de sa mission, en vertu des dispositions pertinentes de la convention de Vienne. Toutefois, dans la présente espèce, la Guinée équatoriale n’utilise l’immeuble sis au 42 avenue Foch comme locaux de sa mission qu’en sa qualité de propriétaire.
7. A cet égard, la Guinée équatoriale rappellera d’abord la définition de la notion de locaux de la mission contenue dans la convention et les rôles respectifs de l’Etat accréditant et de l’Etat accréditaire dans l’établissement desdits locaux (A). Elle montrera ensuite qu’en l’absence de toute autre règle d’application générale et non discriminatoire imposée par l’Etat accréditaire, en
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l’occurrence la France, dans le respect de la convention de Vienne, la désignation de ces locaux par l’Etat accréditant est valide et la contestation par l’Etat accréditaire d’une telle désignation doit se faire dans le respect du droit international (B).
A. La définition de la notion de locaux de la mission diplomatique par la CVRD et les rôles respectifs de l’Etat accréditant et de l’Etat accréditaire
8. La Guinée équatoriale rappellera d’abord que la convention donne une définition objective de la notion de locaux de la mission (1.1) ; elle exposera ensuite que l’utilisation desdits locaux suppose leur désignation préalable (1.2) ; et soutiendra enfin que la convention de Vienne ne requiert pas le consentement de l’Etat accréditaire pour qu’une telle désignation soit valide (1.3).
1.1. La CVRD donne une définition objective de la notion de locaux de la mission diplomatique
9. Monsieur le président, Mesdames et Messieurs de la Cour, bien que vous l’ayez entendu à plusieurs reprises depuis le début de cette procédure, il n’est pas superflu de rappeler ici les dispositions pertinentes de la convention à cet égard. Aux termes de l’article premier, alinéa i), de la convention, qui est maintenant à l’écran «l’expression «locaux de la mission» s’entend des bâtiments ou des parties de bâtiments et du terrain attenant qui, quel qu’en soit le propriétaire, sont utilisés aux fins de la mission, y compris la résidence du chef de mission».
10. Au regard de cette disposition, c’est l’utilisation des locaux «aux fins de la mission» qui détermine son statut diplomatique ; c’est en cela que cette définition peut être considérée comme objective, car chacun peut constater factuellement si les locaux en question sont utilisés «aux fins de la mission».
11. On peut remarquer que cette disposition est silencieuse sur les rôles respectifs de l’Etat accréditant et de l’Etat accréditaire quant à la désignation des locaux utilisés aux fins de la mission diplomatique. Mais la Guinée équatoriale soutient que ce rôle revient, au regard du texte, du contexte, de l’objet et du but de la convention, et surtout en l’absence de toute autre règle d’application générale et non discriminatoire imposée par la France dans le respect du droit international à l’Etat accréditant. En effet, comme je vais maintenant vous le démontrer, l’utilisation des locaux diplomatiques suppose leur désignation préalable.
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1.2. L’utilisation des locaux de la mission suppose une désignation préalable de ces locaux
12. Monsieur le président, la France a tenté de créer sur ce point, et ce, depuis le début de la présente procédure, une fausse impression dans l’esprit de la Cour sur ce qu’elle appelle encore dans sa duplique les «nouvelles contradictions de la Guinée équatoriale», ou encore les «nouvelles variations de la Guinée équatoriale quant à la date de début d’utilisation des locaux de l’immeuble du 42 avenue Foch»45. Elle voit ces contradictions dans le fait que, d’une part, la Guinée équatoriale a écrit dans sa requête qu’après avoir acquis l’immeuble en question, le 15 septembre 2011, elle l’a «affecté» à sa mission diplomatique, et, d’autre part, dans sa lettre du 4 octobre 2011, la Guinée équatoriale déclare qu’elle «dispose depuis plusieurs années d’un immeuble situé au 42 avenue Foch, Paris XVIe qu’elle utilise pour l’accomplissement des fonctions de sa mission diplomatique sans qu’elle ne l’ait formalisé expressément auprès de vos services à ce jour». La France ajoute, de manière emphatique, que «[j]amais la Guinée équatoriale n’a apporté le moindre début de preuve au soutien de cette affirmation»46, et n’hésite pas à accuser la Guinée équatoriale de «duplicité» quand celle-ci considère cette prétendue contradiction «de peu d’importance»47.
13. A vrai dire, il s’agit là, de la part de la Partie adverse, d’une tentative d’embrouiller l’affaire par des digressions et des insinuations malveillantes, afin de détourner l’attention du coeur du différend et d’échapper à sa responsabilité pour violation de ses obligations internationales.
14. Oui, Monsieur le président, Mesdames et Messieurs de la Cour, la Guinée équatoriale a écrit dans sa lettre du 4 octobre 2011 qu’elle disposait depuis plusieurs années d’un immeuble sis au 42 avenue Foch, qui est utilisé pour l’accomplissement de sa fonction.
15. La France ne saurait adopter sur ce point un ton aussi offensif, alors qu’à cette aune-là, elle n’est pas exempte de reproche.
16. En effet, la France déclare, par exemple, que «[l]e service du Protocole du ministère français des Affaires européennes et étrangères veille attentivement à ne pas adresser officiellement
45 DF, p. 40.
46 Ibid., p. 42, par. 3.12.
47 Ibid., par. 3.13.
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sa correspondance au 42 avenue Foch à Paris»48, en se gardant de dire de quand date cette pratique, à supposer qu’elle soit établie. Or elle date seulement du 24 juillet 2019, c’est-à-dire bien après le dépôt de la réplique de la Guinée équatoriale dans la présente affaire, alors que le différend entre les deux Etats ayant donné lieu à la présente procédure remonte à 2011. Au demeurant, comme la Guinée équatoriale vient de le démontrer, diverses autorités françaises, principalement le ministère de l’Europe et des affaires étrangères, ont continué à adresser leur courrier au 42 avenue Foch à Paris. La plus récente de ces correspondances date du 9 octobre 201949.
17. Les termes clés dans la définition de la notion de locaux de la mission diplomatique, que j’ai rappelée il y a un instant, sont : «utilisés aux fins de la mission». L’«affectation» et l’«utilisation» s’inscrivent dans un même processus et peuvent être concomitantes ou séparées dans le temps. Le but ultime de ce processus est de concrétiser l’intention de l’Etat accréditant de faire de l’immeuble désigné les locaux de sa mission. La position de la France épouse sur ce point celle de la Guinée équatoriale, comme l’atteste le passage suivant du contre-mémoire de la France :
«la notification officielle et préalable par l’Etat accréditant de son intention d’affecter des locaux aux services de sa mission suffit généralement au ministère pour leur reconnaître le bénéfice du régime de la Convention de Vienne sur les relations diplomatiques»50.
18. Ainsi donc, pour des raisons incompréhensibles, la France ne change de position en la matière que vis-à-vis de la Guinée équatoriale.
19. Dans sa lettre du 4 octobre 2011, la Guinée équatoriale déclare qu’elle «dispose depuis plusieurs années d’un immeuble situé au 42 avenue Foch ... qu’elle utilise pour l’accomplissement des fonctions de sa mission diplomatique». La seule date qui importe vraiment aux fins de la présente procédure c’est le 4 octobre 2011 ; c’est pour ainsi dire la «date critique» : d’une part, celle à laquelle la Guinée équatoriale désigne à l’Etat accréditaire l’utilisation de l’immeuble en question aux fins de sa mission diplomatique ; d’autre part, la date à partir de laquelle la France
48 DF, par. 3.32, p. 52.
49 Correspondance no 2019-0590239/NUOI/EB du ministère de l’Europe et des affaires étrangères du 9 octobre 2019 demandant le soutien de la Guinée équatoriale pour l’élection d’un représentant de la France à l’Organisation maritime internationale (OMI), à l’occasion de la trente et unième session de l’Assemblée du 25 novembre au 5 décembre 2019.
50 CMF, par. 3.44 ; RG, par. 2.9.
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aurait dû accorder à ces locaux les protections prévues par la convention de Vienne sur les relations diplomatiques, ou, le cas échéant, demander à la Guinée équatoriale de faire une telle désignation des locaux de sa mission conformément à la législation française en la matière, si une telle législation existait, ou conformément à la pratique française en vigueur, si une telle pratique était établie. Or, ni une telle législation ni une telle pratique n’existent. L’Etat accréditant, même en ayant écrit qu’il dispose depuis plusieurs années de l’immeuble sis au 42 avenue Foch, ne revendique pas la protection des locaux de sa mission diplomatique pour la période antérieure à la date critique du 4 octobre 2011. Il est à cet égard cohérent depuis le début des présentes procédures.
20. Monsieur le président, Mesdames et Messieurs les juges, la France veut faire grand cas de ce que la Guinée équatoriale puisse désigner un immeuble pour servir de locaux de sa mission avant le déménagement de tous les services et documents officiels. Cela n’est ni étrange ni contraire à la convention et plus largement au droit international. Il en est ainsi de la convention des Nations Unies de 2004 sur les immunités juridictionnelles des Etats, qui exonère de toute mesure de contrainte les biens utilisés à des fins diplomatiques. Une disposition pertinente de cette convention évoque précisément «les biens, … utilisés ou destinés à être utilisés dans l’exercice des fonctions de la mission diplomatique des Etats»51 (les italiques sont de nous).
21. Cette disposition établit, ainsi que le souligne un auteur, «the bridge between the regimes of diplomatic immunity and State immunity»52. La convention de 2004 codifie une pratique internationale qui reconnaît que la désignation par l’Etat accréditant de ses locaux diplomatiques précède leur utilisation et fonde l’inviolabilité. L’auteur en question ajoute, jurisprudence à l’appui que :
«Courts may also accord immunity on the mere basis of a foreign State’s statement that it intends to use the property, especially the embassy premises, at any time in the future for the performance of diplomatic functions, even if at the time of the taking of measures of execution it was not so used.»53
51 Convention des Nations Unies de 2004 sur les immunités juridictionnelles des Etats et de leurs biens, art. 21, par. 1, al. a). La convention a été ratifiée par la Guinée équatoriale et la France.
52 Cedric Ryngaert, “Immunity from Execution and Diplomatic Property”, in Tom Ruy, Nicolas Angelet, Luca Ferro, éd., The Cambridge Handbook of Immunities and International Law, Cambridge, CUP, 2019, p. 288.
53 Ibid., p. 290.
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22. Dans la même veine, la Cour suprême de Suède a statué que :
«According to State practice, the relevant time for assessing whether the use was of such specific nature that the property should be protected from enforcement was the time the claim was filed at the Swedish Enforcement Authority.»54 (Les italiques sont de nous.)
23. Monsieur le président, Mesdames et Messieurs les juges, à la lumière de ce qui précède, la position de la Guinée équatoriale est conforme à la convention de Vienne et à la pratique des relations diplomatiques entre les Etats. La désignation par un Etat accréditant marque bel et bien le point de départ de l’inviolabilité des locaux de sa mission. Il n’est guère nécessaire d’en référer au consentement de l’Etat accréditaire lorsque ce dernier n’a pas adopté une législation ou une pratique d’application générale, transparente et non discriminatoire en la matière.
1.3. La désignation des locaux de la mission diplomatique ne requiert pas le consentement de l’Etat accréditaire
24. Monsieur le président, pour la France,
«conformément à la lettre et l’esprit essentiellement consensuels de la convention de Vienne, les locaux que l’Etat accréditant souhaite utiliser aux fins de sa mission diplomatique ne peuvent l’être que lorsque l’Etat accréditaire y consent, a fortiori ne s’y oppose pas expressément, à la suite de la notification réalisée par l’Etat accréditant»55.
25. Cette interprétation résulte d’une pratique que la France semble avoir mise au point face à la Guinée équatoriale et face à elle seule ; il s’agit d’une pratique circonstancielle dont l’Etat accréditaire dans cette affaire n’a pas pu montrer qu’elle a jamais existé auparavant. Selon la thèse française, pour que des locaux soient identifiés comme locaux de la mission et bénéficient du régime de protection découlant de ce statut, il faut, d’une part, que «l’Etat accréditaire ne s’oppose pas expressément à l’octroi du statut diplomatique … , et, d’autre part, que l’immeuble soit affecté de manière effective aux fins de la mission diplomatique»56. Ces deux «conditions» sont «cumulatives», selon la France.
54 Cedric Ryngaert, “Immunity from Execution and Diplomatic Property”, in Tom Ruy, Nicolas Angelet, Luca Ferro, éd., The Cambridge Handbook of Immunities and International Law, Cambridge, CUP, 2019, p. 290. Voir également RG, p. 41, par. 2.46, note 113 (Kenyan Diplomatic Residence Case, ILR, vol. 128, p. 632-639).
55 CMF, par. 3.9.
56 Ibid., p. 35, par. 3.5.
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26. Je m’en tiendrai ici à la première «condition», celle de l’affectation ayant déjà été examinée par Me Francisco Evuy. Mais avant d’y arriver, permettez-moi de souligner que la France n’a pas répondu, dans sa duplique, aux nombreuses interrogations de la Guinée équatoriale relatives aux incidences de ses différentes et nombreuses pratiques qu’elle invoque sur l’inviolabilité des locaux de la mission diplomatique de la Guinée équatoriale57.
27. Monsieur le président, Mesdames et Messieurs de la Cour, rien dans la convention de Vienne ne permet de soutenir que la désignation des locaux de la mission requiert le consentement de l’Etat accréditaire. Des auteurs faisant autorité dans l’étude de cette convention et la pratique des Etats y afférente vont dans ce sens58, tout comme la pratique française elle-même, jusqu’à la survenance des faits à l’origine du présent litige.
28. La convention de Vienne est explicite lorsque ses rédacteurs ont cru nécessaire de soumettre un acte ou un fait de l’Etat accréditant au consentement de l’Etat accréditaire59. De même, quand les rédacteurs de la convention ont entendu soumettre le comportement ou tout fait de l’Etat accréditant à sa notification à l’Etat accréditaire, ils l’ont expressément mentionné60.
29. Par comparaison, même dans la convention de Vienne sur les relations consulaires, lorsqu’on a estimé que le consentement de l’Etat accréditaire était requis, la convention l’a dit expressément, notamment en son article 4, par. 1 : «un poste consulaire peut être établi sur le territoire de l’Etat d’accueil seulement avec le consentement de cet Etat»61.
30. Le texte et le contexte de la convention de Vienne sur les relations diplomatiques ne laissent donc aucune incertitude quant à la validité de la position de la Guinée équatoriale dans la
57 RG, par. 2.22-2.23.
58 Voir notamment les auteurs cités dans la réplique de la Guinée équatoriale, p. 26, par. 2.3-2.4.
59 Il en est ainsi, notamment, de : l’établissement des relations diplomatiques (art. 2), l’accréditation du chef de la mission diplomatique (art. 4) ; le recrutement du personnel diplomatique ressortissant de l’Etat accréditaire (art. 8, par. 2) ; l’effectif de la mission diplomatique (art. 11) ; les bureaux de la mission dans d’autres régions que la capitale (art. 12) ; les classes des chefs de mission respectifs de l’Etat accréditaire et de l’Etat accréditant (art. 15) ; le refus de reconnaître une personne comme membre de la mission (art. 43, par. 3) et la protection temporaire des intérêts d’un Etat tiers (art. 46).
60 Il s’agit notamment de l’accréditation auprès de plusieurs Etats (art. 5) ; les arrivées et départs du personnel de la mission (art. 10 et 13) ; la fin des fonctions de l’agent diplomatique (art. 43) ; l’ordre de préséance du personnel diplomatique de la mission (art. 17) ; l’accréditation auprès de plusieurs Etats (art. 5), les arrivées et départs du personnel de la mission (art. 10 et 13), La fin des fonctions de l’agent diplomatique (art. 43) ; l’ordre de préséance du personnel diplomatique de la mission (art. 17) ; le nom du chargé d’affaires ad interim (art. 19) et le commencement des privilèges et immunités des personnes (art. 39).
61 Convention de Vienne sur les relations consulaires du 24 avril 1963, art. 4, par. 1.
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présente affaire : la désignation des locaux de sa mission n’est pas subordonnée au consentement de la France.
31. Pour soutenir que la désignation n’est valide qu’en cas de «non-opposition» ou par «consentement implicite» de l’Etat accréditaire, la France s’appuie  faute de disposition explicite dans la convention  sur un paragraphe du préambule qui parle des «individus»62, pour démontrer ce qu’elle considère comme des «abus possibles de la part de l’Etat accréditant». On ne voit pas en quoi la désignation de l’immeuble sis au 42 avenue Foch à Paris comme locaux de la mission de la Guinée équatoriale viserait à favoriser un «individu», puisque, comme on l’a montré, l’immeuble en question était la propriété de l’Etat de Guinée équatoriale au moment où celui-ci l’a désigné comme locaux de sa mission, et non pas le bien d’un quelconque individu. Ce faisant, la Guinée équatoriale ne pouvait commettre et n’a commis aucun abus possible au regard de la convention de Vienne. Le harcèlement dont sa mission à Paris fait l’objet depuis plusieurs années maintenant ne lui permet pas d’«assurer l’accomplissement efficace de ses fonctions diplomatiques en tant que représentant de l’Etat»63. Or tel est précisément la ratio legis de la convention, de l’avis de la Guinée équatoriale.
32. Dans sa duplique, la France prétend que la procédure en matière d’exemption fiscale, en ce qui concerne la résidence de l’ambassadeur, est celle qu’aurait dû suivre la Guinée équatoriale au sujet de l’immeuble sis au 42 avenue Foch comme locaux de sa mission. Dans ce qui s’apparente au fond à une énième variante de ce que la Partie adverse considère comme «juste reflet de la pratique française»64, il n’apparaît nulle part que l’affectation réelle ou le consentement de l’Etat accréditaire détermine la reconnaissance du statut diplomatique à un immeuble, ainsi que la Guinée équatoriale l’a fait valoir dans sa réplique au contre-mémoire de la France65.
33. Monsieur le président, Mesdames et Messieurs les juges, suite à une procédure en référé engagée par le syndicat de copropriétaires du 40-42 avenue Foch, en vue d’astreindre la Guinée équatoriale à libérer les parties communes de l’immeuble des drapeaux, affiches et plaque disposés
62 CMF, par. 3.10-3.11.
63 CVRD, préambule, par. 4.
64 DF, par. 2.34
65 RG, par. 2.67.
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pour signaler la localisation de sa mission diplomatique, le juge français compétent s’est appuyé sur la notification de la note verbale du 4 octobre 2011 pour rejeter les demandes des requérants qui contestaient le statut diplomatique de l’immeuble. Le juge déclare
«qu’il résulte d’une note verbale du 4 octobre 2011 adressée par l’Ambassade de la République de Guinée équatoriale au Protocole du ministère des affaires étrangères de la République Française que cet Etat a entendu affecter les locaux du 40-42 avenue Foch à l’accomplissement des fonctions de sa Mission diplomatique»66.
34. A aucun moment le juge ne se demande si la France a donné son consentement à la désignation de l’immeuble comme locaux de la mission. Cette décision du juge français est conforme à la position soutenue par la Guinée équatoriale.
35. Je voudrais démontrer maintenant que, au regard de la convention de Vienne, la France ne pouvait agir de la sorte qu’en l’absence d’une réglementation ou d’une pratique claire, appliquée de façon cohérente et non discriminatoire.
B. En l’absence de formalités énoncées clairement et appliquées sans discrimination, la désignation des locaux de la mission par l’Etat accréditant est concluante, et en cas de contestation par l’Etat accréditaire, celui-ci doit agir dans le respect du droit international
36. En l’absence de formalités énoncées clairement et appliquées sans discrimination, la Guinée équatoriale soutient que la désignation des locaux de sa mission est concluante (1.1) ; que la contestation par l’Etat accréditaire d’une prétendue désignation abusive des locaux d’une mission doit se faire dans le respect du droit international (1.2).
1.1. La désignation des locaux de sa mission par l’Etat accréditant est concluante
37. Lorsque l’Etat accréditant a procédé à la désignation des locaux de sa mission diplomatique en notifiant les autorités compétentes de l’Etat accréditaire, les locaux en question sont présumés avoir acquis le statut de «locaux de la mission [diplomatique]» S’il n’en était pas ainsi, l’Etat accréditant serait placé dans une situation d’incertitude et de précarité dans l’attente du consentement de l’Etat accréditaire. En effet, l’immeuble considéré comme locaux de la mission ne pourrait pas bénéficier de la protection offerte par la convention aux locaux de sa mission
66 RG, annexe no 6, p. 135.
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diplomatique et ne pourrait donc pas «assurer l’accomplissement efficace de ses fonctions diplomatiques en tant que représentant de l’Etat»67.
38. Monsieur le président, si l’Etat accréditaire peut s’opposer à la désignation par l’Etat accréditant des locaux de sa mission, il ne peut le faire qu’en référence à sa législation ou sa pratique en la matière, comme la Guinée équatoriale l’a montré dans son mémoire68 et dans sa réplique69. Lorsqu’une telle législation ou pratique n’existe pas, comme dans la présente espèce, l’Etat accréditaire ne peut le faire qu’en concertation avec l’Etat accréditant. Il s’agit d’une exigence de transparence qui seule permet de respecter les principes de l’égalité et de la non-discrimination entre les Etats. A supposer même fondée la thèse française du consentement explicite ou implicite, elle ne pourrait être valable que dans ce contexte.
39. Au demeurant si, comme l’écrit la France dans son contre-mémoire, la lettre et l’esprit de la convention sont «essentiellement consensuels»70, elle ne dénonce l’unilatéralisme de la Guinée équatoriale qu’en lui opposant son propre unilatéralisme. En effet, elle oppose à la Guinée équatoriale le refus de reconnaître à l’immeuble sis au 42 avenue Foch le statut de locaux d’une mission diplomatique sans aucune concertation avec l’Etat accréditant et de manière manifestement arbitraire. Au nom du consensualisme qu’elle préconise en la matière, la France aurait dû au moins avoir des discussions avec la Guinée équatoriale avant son refus. Il n’en a rien été.
40. La Guinée équatoriale réitère qu’il n’y a dans la lettre de la convention aucune disposition qui accorde un rôle prépondérant à l’Etat accréditaire. Dire, comme le prétend la France, que «la désignation de locaux de la mission diplomatique dans la capitale de l’Etat accréditaire reste en tout état de cause subordonnée à l’approbation tacite de ce dernier»71, c’est faire dire à la convention ce qu’elle ne dit pas. La libre désignation par l’Etat accréditant des locaux de sa mission respecte le but et l’objet de la convention de Vienne, notamment la règle des immunités, qui visent à favoriser l’accomplissement efficace des fonctions diplomatiques à l’abri des intrusions et interférences de l’Etat accréditaire.
67 CVRD, préambule, par. 4.
68 MGE, par. 8.42-8.43.
69 RG, par. 2.25-2.30.
70 CMF, par. 3.9.
71 DF, par. 2.27.
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41. La France a tort de penser, comme elle l’écrit dans sa duplique, que le délai d’une semaine qu’elle a pris pour donner suite à la note verbale du 4 octobre 2011 constitue une preuve de sa «diligence»72 pour ne pas laisser la Guinée équatoriale dans l’incertitude. Si l’on se fiait à son consentement implicite, l’immeuble sis au 42 avenue Foch à Paris constituerait les locaux de la mission de la Guinée équatoriale durant le temps où celle-ci est sans réponse de la France. Il y aurait ainsi une forte emprise de l’Etat accréditaire sur le choix par l’Etat accréditant des locaux de sa mission diplomatique. C’est fort de cela que la notion de «locaux de la mission» doit inclure, comme n’a eu de cesse de le plaider la Guinée équatoriale, les immeubles qu’un Etat «destine» aux fonctions diplomatiques. La France a rejeté cette interprétation en prétendant que la Guinée équatoriale soutenait l’application de la convention des Nations Unies sur les immunités juridictionnelles de l’Etat73. Cette convention, même inapplicable en l’espèce, est éclairante : les deux Etats parties l’ont ratifiée ; elle est le reflet du droit international coutumier et il est cohérent de vouloir interpréter la convention de Vienne sur les relations diplomatiques en l’harmonisant avec un instrument qui porte sur la même matière, à savoir les biens destinés aux fonctions diplomatiques de l’Etat.
42. Enfin, la France a tort de prétendre que la position de la Guinée équatoriale s’assimile à une présomption «irréfragable»74. La portée de cette présomption est du reste conforme à l’importance que les Etats reconnaissent à la règle de l’inviolabilité des locaux de la mission diplomatique, qui a été déjà rappelée par cette honorable Cour75 ainsi que par la doctrine pertinente76.
43. Le point de départ de la protection des locaux de la mission ne tient pas compte du consentement de l’Etat accréditaire. Faisant un état des lieux de la position des tribunaux, un auteur écrit :
72 DF, par. 2.30.
73 DF, par. 2.33.
74 DF, par. 2.31.
75 Personnel diplomatique et consulaire des Etats-Unis à Téhéran (Etats-Unis d’Amérique c. Iran), arrêt, C.I.J. Recueil 1980, p. 40, par. 86.
76 Cedric Ryngaert, “Immunity from Execution and Diplomatic Property”, in Tom Ruy, Nicolas Angelet, Luca Ferro, éd., The Cambridge Handbook of Immunities and International Law, Cambridge, CUP, 2019, p. 288. L’auteur écrit : “Currently, diplomatic property enjoys quasi-absolute protection against measures of constraint. In some countries, and not only common law countries, this is also stipulated in domestic legislation.”
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«(Courts) have generally refrained from drawing ‘negative inferences’ from the sending State’s refusal to establish the use of a given diplomatic property, or for its refusal to provide any evidence regarding the claimed use. In this context, citing the prohibition of interference in matters within the exclusive competence of the sending State, they have refrained from requiring that the sending State provide [sic] ‘details concerning the existence of the past, present or future purposes’ of diplomatic property, such as funds in embassy bank accounts. Instead, they tend to accept at face value foreign ambassadors’ certificates that a property is used for sovereign, diplomatic purposes.»77
44. Ainsi se résume l’Etat du droit sur la question qui divise les Parties : la désignation par l’Etat accréditant des locaux de sa mission est concluante aux fins de l’acquisition du statut diplomatique pour lesdits locaux.
1.2. La contestation par l’Etat accréditaire d’une désignation abusive des locaux d’une mission doit se faire dans le respect du droit international
45. Monsieur le président, c’est un principe de base du droit international que lorsqu’un Etat souscrit à ses obligations internationales, il est tenu de les respecter de bonne foi. La Guinée équatoriale et la France sont toutes deux parties à la convention de Vienne sur les relations diplomatiques ; c’est dans ce cadre que doivent s’organiser leurs relations diplomatiques. Si la France estimait que la Guinée équatoriale a fait une désignation abusive des locaux de sa mission diplomatique en France et voulait s’en assurer, elle ne pouvait le faire que dans le respect du droit international, à commencer par les dispositions pertinentes de la convention de Vienne qui prescrivent notamment l’inviolabilité des locaux d’une mission.
46. Or, la règle de l’inviolabilité énoncée à l’article 22 de la convention de Vienne est absolue. Je rappelle que votre Cour elle-même a expliqué que
«même en cas de conflit armé ou de rupture des relations diplomatiques, ces dispositions obligent l’Etat accréditaire à respecter l’inviolabilité des membres d’une mission diplomatique aussi bien que celle de ses locaux, de ses biens et de ses archives»78.
La France a violé de diverses manières cette règle. C’est ce que la Guinée équatoriale entend démontrer maintenant.
77 Cedric Ryngaert, “Immunity from Execution and Diplomatic Property”, in Tom Ruy, Nicolas Angelet, Luca Ferro, éd., The Cambridge Handbook of Immunities and International Law, Cambridge, CUP, 2019, p. 289.
78 Personnel diplomatique et consulaire des Etats-Unis à Téhéran (Etats-Unis d’Amérique c. Iran), arrêt, C.I.J. Recueil 1980, p. 40, par. 86 ; voir aussi Activités armées sur le territoire du Congo (République démocratique du Congo c. Ouganda), arrêt, C.I.J. Recueil 2005, p. 270, par. 309 et p. 277, par. 337.
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II. La France, Etat accréditaire a violé ses obligations en vertu de la CVRD
47. Monsieur le président, Mesdames et Messieurs de la Cour, la lettre du 4 octobre 2011 de l’ambassadeur de Guinée équatoriale au ministre français des affaires européennes et étrangères constitue, nous l’avons dit, le point de départ de l’acquisition officielle du statut de locaux de la mission diplomatique de la Guinée équatoriale par l’immeuble sis au 42 avenue Foch à Paris. C’est à partir de cette date que les locaux en question sont couverts par l’inviolabilité prévue par la convention de Vienne.
48. Or, après le 4 octobre 2011, la France a, par divers actes ou omissions, porté atteinte à l’inviolabilité de ces locaux de la mission de la Guinée équatoriale et à la dignité de la mission de ce pays (A). Par ailleurs, la France n’a pas respecté les critères qu’elle considère applicables à la désignation des locaux de la mission, par interprétation de la convention de Vienne, et, ce faisant, a violé l’obligation de non-discrimination (B).
A. Les actes par lesquels la France a porté atteinte à l’inviolabilité et à la dignité de la mission de la Guinée équatoriale
49. Il s’agit de :
 premièrement, la perquisition de la police française du 14 au 23 février 2012 ;
 deuxièmement, la saisie pénale de l’immeuble sis au 42 avenue Foch, le 19 juillet 2012 ; et
 troisièmement, la confiscation pénale de l’immeuble sis au 42 avenue Foch par le Tribunal correctionnel de Paris en date du 27 octobre 2017, confirmée par l’arrêt de la Cour d’appel de Paris en date du 10 février 2020.
1.1. La perquisition de la police française du 14 au 23 février 2012, des locaux de la mission diplomatique de la Guinée équatoriale est une atteinte à l’inviolabilité de la mission de la Guinée équatoriale
50. Monsieur le président, Mesdames et Messieurs les juges, à partir du 4 octobre (2011), l’immeuble du 42 avenue Foch, constituant les locaux de la mission diplomatique de la Guinée équatoriale, avait droit à la protection prévue par la convention de Vienne, en particulier l’inviolabilité énoncée à l’article 22. Or, pendant la période du 14 au 23 février 2012, les autorités françaises ont pénétré dans l’immeuble en question, l’ont perquisitionné et enlevé plusieurs objets ainsi que de l’ameublement. Elles l’ont fait sur le fondement erroné que l’immeuble relevait «du
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domaine privé»79. Ce faisant, la France a violé la règle de l’inviolabilité des locaux de la mission diplomatique de la Guinée équatoriale.
1.2. La saisie pénale de l’immeuble sis au 42 avenue Foch, le 19 juillet 2012, porte atteinte au paragraphe 3 de l’article 22 de la CVRD
51. La France ne s’est pas limitée à la perquisition illicite, au regard de la convention de Vienne, de l’immeuble sis au 42 avenue Foch constituant les locaux de la mission diplomatique de la Guinée équatoriale. Le 19 juillet 2012, cinq mois après la perquisition, la France a procédé à la saisie pénale de cet immeuble. Et elle croit pouvoir minimiser la portée de cet acte extrêmement grave dans les relations diplomatiques entre les deux Etats en déclarant que «la saisie immobilière ... n’a d’effet que sur le droit de la propriété de l’immeuble et ne saurait donc emporter méconnaissance de l’inviolabilité»80. Dans le cas d’espèce, la Guinée équatoriale est la propriétaire et l’utilisatrice de l’immeuble aux fins de sa mission diplomatique. La saisie constitue au minimum un amoindrissement de «la dignité» de la mission, au sens de l’article 22, paragraphe 2, de la convention de Vienne. Elle est explicitement prohibée par le paragraphe 3 de l’article 22 de ladite convention.
1.3. La confiscation de l’immeuble sis au 42 avenue Foch, en tant que peine de nature pénale, porte atteinte à l’inviolabilité, trouble la paix et amoindrit la dignité de la mission de la Guinée équatoriale
52. Monsieur le président, le 27 octobre 2017, le Tribunal de grande instance de Paris a rendu un jugement par lequel il a, entre autres, prononcé une peine de confiscation de l’immeuble sis au 42 avenue Foch, constituant les locaux de la mission diplomatique de Guinée équatoriale81. L’effet suspensif attaché à l’appel de ce jugement avait retardé la vente aux enchères de cet immeuble, comme conséquence normale de cette confiscation judiciaire. Mais si cet appel l’a retardé pendant un temps, la confirmation de cette confiscation en appel en date du 10 février 2020 place à nouveau l’épée de Damoclès au-dessus des locaux de la mission diplomatique de Guinée équatoriale en France, comme l’a montré Me Tchikaya tout à l’heure.
79 CMF, par. 3.46.
80 CMF, par. 3.52.
81 RG, annexe 1, p. 105.
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53. Monsieur le président, Mesdames et Messieurs de la Cour, vous devez savoir la vérité sur ce qui est en jeu ici. La Guinée équatoriale utilise l’immeuble sis au 42 avenue Foch comme locaux de sa mission non en vertu d’un bail, mais, comme je l’ai dit, parce qu’elle en est la propriétaire. La saisie et, a fortiori, la confiscation de cet immeuble pourrait la priver de locaux de sa mission diplomatique en France. En effet, si la confiscation était exécutée, et on l’a montré tout à l’heure, elle ne peut être exécutée que parce que, dans les procédures pénales devant les juridictions françaises, le prévenu, après l’appel, a saisi la Cour de cassation. C’est seulement dans ce cas que l’exécution de la confiscation n’a pas lieu. Donc, je disais que la confiscation de cet immeuble pourrait priver la Guinée équatoriale de sa mission diplomatique en France. Et si la confiscation était exécutée, la mission de la Guinée équatoriale en France serait à la rue. Voilà la vérité. Et comment pourrait-on réaliser la vente aux enchères sans porter atteinte à l’inviolabilité des locaux de la mission de la Guinée équatoriale qui constitue une violation de l’article 22, paragraphe 1, sans que la paix de la mission ne soit troublée et sa dignité amoindrie, ce qui constitue une violation de l’article 22, paragraphe 2, et sans qu’on puisse parler de mesure d’exécution, ce qui constitue une violation de l’article 22, paragraphe 3 ?
B. La France a violé l’obligation de non-discrimination de l’article 47 de la Convention de Vienne sur les relations diplomatiques
54. L’article 47, paragraphe 1, de la convention prescrit formellement à l’Etat accréditaire de ne pas faire «de discrimination entre les Etats» dans l’application de la convention.
55. Mesdames et Messieurs de la Cour, dans sa lettre du 11 octobre 2011  que la Guinée équatoriale a mentionnée plus d’une fois, contrairement à ce que l’on a pu dire  la France estimait qu’
«un immeuble relevant du statut diplomatique doit être déclaré comme tel au Protocole avec une date d’entrée précise dans les locaux. Une fois les vérifications effectuées sur la réalité de l’affectation de l’immeuble, le Protocole en reconnaît le caractère officiel auprès de l’administration française...»82
56. La France établissait ainsi, pour la première fois dans un document écrit, une certaine procédure à suivre en matière de désignation des locaux d’une mission diplomatique sur son territoire. Je souligne, Monsieur le président, qu’au demeurant, elle s’adressait uniquement au
82 MGE, annexe 35.
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ministère français de la justice pour les besoins des juges d’instruction français et non pas aux Etats, à tous les Etats, ni même à la Guinée équatoriale. Cette procédure soudaine appelle plusieurs observations :
 Premièrement, la France n’a pas respecté sa propre procédure dans ses relations avec la Guinée équatoriale. En effet, elle n’a jamais procédé à une vérification entre le 4 octobre 2011, date à laquelle l’ambassade de la Guinée équatoriale a informé le ministère français des affaires étrangères de l’utilisation de l’immeuble comme locaux de sa mission et le 11 octobre 2011, date à laquelle le ministère a notifié son refus à l’ambassade.
 Deuxièmement, la procédure inédite contenue dans la lettre de la France du 11 octobre 2011 n’était pas édictée dans un document de portée générale ; elle s’adressait  comme je l’ai dit tout à l’heure  au ministère français de la justice pour les juges d’instruction français et non pas aux Etats. Elle n’avait pas été appliquée lors de l’établissement des locaux de la mission de la Guinée équatoriale au 29 boulevard de Courcelles. Il s’est donc agi d’une mesure ciblée contre la Guinée équatoriale. Celle-ci ne peut dès lors considérer ce comportement de la France que comme arbitraire et discriminatoire, en violation de l’article 47, paragraphe 1, de la convention.
 Troisièmement, le comportement arbitraire et discriminatoire de la France est accentué par le fait que la France refuse formellement le statut de locaux de la mission diplomatique de la Guinée équatoriale à l’immeuble sis 42 avenue Foch, mais le reconnaît de facto. Les autorités françaises se rendent à la mission diplomatique de la Guinée équatoriale au 42 avenue Foch à Paris pour obtenir leurs visas d’entrée en Guinée équatoriale, devenant subitement oublieuses de leur refus de lui reconnaître le statut de locaux de la mission diplomatique de ce pays. Lorsque la Guinée équatoriale a relevé cette contradiction, la Partie adverse a feint de minimiser la portée d’un tel comportement, se bornant à rappeler «son attachement à la relation bilatérale» et la nécessité de «permettre l’organisation de visites et d’échanges»83. La France s’offusque même de ce que «la Guinée équatoriale s’efforce d’exploiter les bonnes dispositions affichées par les autorités françaises pour tenter de faire valoir ses prétentions»84.
83 DF, p. 49, par. 3.27.
84 Ibid., p. 49, par. 3.28.
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57. La Guinée équatoriale aurait voulu que de telles bonnes dispositions ne soient pas à éclipser, et qu’elles intègrent l’ensemble des relations diplomatiques entre les deux Etats. Cela nous aurait épargné cette procédure qu’elle s’est vue obligée de faire. Le pragmatisme ne doit pas devenir du cynisme.
58. La Guinée équatoriale relève que la France a accordé une protection aux locaux du 42 avenue Foch qu’elle ne reconnaît pas en tant que locaux de la mission de la Guinée équatoriale. Elle rappelle les propos d’un de ses conseils qui a déclaré, sans en apporter le moindre commencement de preuve, que la France l’a fait «tout en rappelant sa position constante»85 ; se citer soi-même pour prouver ce qu’on déclare, c’est ce qu’on appelle «self-serving evidence». La France ajoute du reste que ce n’est pas sur le fondement de la convention de Vienne qu’elle a pu accorder une protection particulière à l’immeuble du 42 avenue Foch, mais seulement par magnanimité, et désormais parce qu’elle «y est en l’état provisoirement tenue sur le seul fondement de l’ordonnance de la Cour en date du 7 décembre 2016»86. J’ai donc envie de m’écrier : Louée soit cette Cour qui permet à un petit Etat d’avoir la protection que la convention de Vienne offre à sa mission diplomatique, mais qu’une interprétation personnelle d’une puissance et une pratique insaisissable peuvent l’en priver !
59. Et pourtant, même dans ce cas, la France, qui paraît si soucieuse, d’une part, de respecter les décisions de la Cour, en l’occurrence l’ordonnance du 7 décembre 2016, et, d’autre part, d’éviter la détérioration des relations bilatérales avec la Guinée équatoriale, ne se montre pas très cohérente dans son comportement, car alors elle n’aurait pas requis et obtenu, par le biais du ministère public qui est sous l’autorité du Gouvernement, tour à tour la saisie et la confiscation de l’immeuble constituant les locaux de la mission diplomatique de la Guinée équatoriale. Devant un tel comportement erratique qui met en cause la pierre angulaire du droit des relations diplomatiques entre les Etats et rend possible toute vie internationale, la Guinée équatoriale fait confiance à votre haute juridiction pour y mettre bon ordre, consciente que le principe de l’égalité des Etats, tout en n’ignorant pas les inégalités de puissance, permet la coexistence pacifique sur la base de la non-discrimination et du respect mutuel.
85 DF, p. 49, par. 3.28.
86 Ibid., p. 49-50, par. 3.28.
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60. En conclusion à cette partie de sa plaidoirie, la Guinée équatoriale réitère que :
 premièrement, la thèse française des «conditions cumulatives» pour l’établissement des locaux d’une mission diplomatique est sans fondement, et à vrai dire dangereuse en raison de l’incertitude et de la précarité auxquelles elle expose les locaux de la mission diplomatique ;
 deuxièmement, même si l’Etat accréditaire est fondé à contrôler la désignation des locaux de la mission diplomatique, il doit le faire, comme en convient la France elle-même, suivant une démarche consensuelle, en concertation avec l’Etat accréditant, et non de façon unilatérale ou discriminatoire, et dans tous les cas dans le respect de ses obligations internationales ;
 troisièmement, l’immeuble sis au 42 avenue Foch à Paris a acquis le statut de locaux de la mission de la Guinée équatoriale en France à partir du 4 octobre 2011, et devait bénéficier, à partir de cette date, de la protection prévue par les dispositions pertinentes de la convention de Vienne ; dès lors, les mesures coercitives prises à son encontre par la France constituent des violations flagrantes de la convention de Vienne, notamment de la règle de l’inviolabilité des locaux d’une mission diplomatique (art. 22) ;
 quatrièmement, faute d’une réglementation française connue en matière d’établissement des locaux d’une mission, l’opposition à la Guinée équatoriale d’une procédure méconnue et ciblée sur cet Etat est un comportement arbitraire et discriminatoire, contraire à l’article 47 de la convention de Vienne sur les relations diplomatiques.
61. Ce disant, Monsieur le président, j’ai terminé avec mes plaidoiries. Je vous remercie, Monsieur le président, de votre bienveillante attention et vous prie respectueusement de bien vouloir passer la parole à Sir Michael Wood pour la suite des plaidoiries de la Guinée équatoriale. Merci.
Le PRESIDENT : Je remercie le professeur Kamto pour son exposé et je donne à présent la parole à Sir Michael Wood. Vous avez la parole.
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Sir Michael WOOD:
6. FRANCE’S CLAIM OF ABUSE OF RIGHTS IS WITHOUT MERIT
1. Mr. President, Members of the Court, as Professor Kamto has just explained, France has done Equatorial Guinea wrong by failing to recognize the diplomatic status of its Embassy in Paris. To add insult to injury, France has repeatedly made wholly unjustified attacks on the motives of Equatorial Guinea in bringing its claims before this Court, qualifying them as abusive. The Court has already rejected such assertions, which find no support in fact or in law87.
2. It is likewise highly regrettable that France continues to call into question Equatorial Guinea’s motives in acquiring the building at 42 avenue Foch and in deciding to establish its Embassy there. Such a posture is unworthy of France and is unacceptable in international relations. France’s attachment to such unfounded accusations seems, more than anything, to be an attempt to shift discussion away from the weakness of its own position as regards its own unlawful conduct.
I. There has been no abuse of rights by Equatorial Guinea
3. France’s assertion that Equatorial Guinea has committed an abuse of rights is not supported by evidence. As I shall explain, the assertion is also logically inconsistent. France cannot at one and the same time say there are no rights and that there has been an abuse of rights. Even more fundamentally, France’s attitude threatens to undermine basic tenets of the peaceful settlement of disputes.
4. Mr. President, an abuse of rights is a very serious charge, especially when directed at a State  and here a State that has turned to this Court for the law’s protection. As France itself concedes88 and as the Court’s case law consistently affirms89, a claim of abuse of rights has to be sustained by clear and convincing evidence. It cannot be based on disputable inferences: bad faith cannot be presumed. Yet France has produced nothing but speculation in support of its allegations. In its Counter-Memorial, for example, it suggests that “the timing of the events in this case is
87 Immunities and Criminal Proceedings (Equatorial Guinea v. France), Provisional Measures, Order of 7 December 2016, I.C.J. Reports 2016 (II), p. 1148; Immunities and Criminal Proceedings (Equatorial Guinea v. France), Preliminary Objections, Judgment, I.C.J. Reports 2018 (I), p. 292.
88 See, for example, RF, para. 3.2.
89 See REG, para. 3.6.
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sufficient in itself”90. In its Rejoinder, it says that for Equatorial Guinea not to have known that the building it acquired to serve as its Embassy in Paris was subject to legal proceedings “seems totally unlikely”91. It again says in its Rejoinder that it is “against all likelihood” that Equatorial Guinea has searched for a new location for its Embassy in Paris prior to these legal proceedings92. France further suggests that it is a “disturbing coincidence” that Equatorial Guinea acquired ownership of the building prior to the intrusion of the French police into the building93. Mr. President, such bald assertions are based on no evidence whatsoever. They do not even begin to meet the high evidentiary threshold required for establishing an abuse of rights. And in any event, we have shown them to be false.
5. We have shown, Mr. President, that there never was any sinister “strategy” of the kind that France alleges94; even the partial and distorted account presented by France can hardly sustain such an allegation. The facts  as earlier set out by Maître Tchikaya and Maître Evuy and in our written pleadings  point not to any abuse of rights, but to legitimate attempts by Equatorial Guinea to exercise and protect its rights by lawful and reasonable means. France acknowledges the weakness of its position by suggesting, in its Counter-Memorial95, that to claim an abuse of rights, bad faith does not need to be proved. That hardly squares with the widely established understanding, reflected in the Court’s case law, that a claim of abuse can only succeed when there is “clear evidence” and only in “exceptional circumstances”96. While that language was used in the context of abuse of process, the Court has considered that “the basic concept of an abuse may be the same”97.
90 CMF, para. 4.15.
91 RF, para. 3.23.
92 RF, para. 3.25; see also para. 3.14 (“against any likelihood”), para. 3.22 (“It is also strange . . .”).
93 RF, para. 3.21.
94 CR 2018/2, para. 21 (Pellet).
95 CMF, para. 4.10.
96 See Immunities and Criminal Proceedings (Equatorial Guinea v. France), Preliminary Objections, Judgment, I.C.J. Reports 2018 (I), p. 336, para. 150; Certain Iranian Assets (Islamic Republic of Iran v. United States of America), Preliminary Objections, Judgment, I.C.J. Reports 2019 (I), pp. 42-43, para. 113 (referring to an abuse of process).
97 Immunities and Criminal Proceedings (Equatorial Guinea v. France), Preliminary Objections, Judgment, I.C.J. Reports 2018 (I), p. 335, para. 146; Certain Iranian Assets (Islamic Republic of Iran v. United States of America), Preliminary Objections, Judgment, I.C.J. Reports 2019 (I), p. 41, para. 103.
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6. I will not dignify France’s allegations by responding to each one of them. Our earlier exposition of the facts has done that98. But I would like to deal, and I must deal, with a couple of the more serious assertions repeatedly made by the French authorities and by the French courts.
7. First, there is the suggestion that Mr. Obiang Mangue’s appointment as Equatorial Guinea’s Second Vice-President in May 2012 was because of the proceedings against him in France99. This ridiculous suggestion shows just how distorted France’s account of the facts is. In reality, as we have explained, Mr. Obiang Mangue’s appointment was part of a major government reshuffle as a result of a major constitutional reform following a national referendum100.
8. Next, France alleges that a letter sent by the President of Equatorial Guinea to the President of France in February 2012101 is an acknowledgment that the sale of the building was meant to shield it from proceedings in France102. It is not. I would ask you to look carefully at the sentence relied upon by France, now on the screen. Speaking of his son, the President wrote to the President of France, and this is the Registry’s translation: “France was his preferred country and, as a young man, he purchased a residence in Paris; however, due to the pressures on him as a result of the supposed unlawful acquisition of assets, he decided to resell the said building to the Government of the Republic of Equatorial Guinea.” There is nothing here, nor in other evidence, to show that the sale was intended to shield the building. On the contrary, the letter simply indicates that because of the pressures on him, the President’s son felt constrained to sell a property that was no longer of use to him because he no longer wished to reside in France.
9. In the same vein, France refers disparagingly to Equatorial Guinea’s attempts to stop the attachment of its Embassy “through a considerable amount of diplomatic correspondence”103. Yet diplomatic correspondence was a reasonable way for a State to try and protect its Embassy in the face of a growing threat posed by a receiving State that refused even to discuss the matter amicably.
98 See, inter alia, REG, Chap. I.
99 CMF, para. 4.19.
100 See MEG, para. 2.3.
101 See MEG, para. 4.11.
102 CMF, para. 4.39.
103 CMF, para. 4.20.
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10. Mr. President, France’s accusations of inconsistency on the part of Equatorial Guinea before this Court are particularly puzzling. In essence, France has criticized Equatorial Guinea for specifying the date of 4 October 2011 as a “critical date” in terms of diplomatic premises status, even though it had completed the purchase of the Embassy building three weeks earlier, on 15 September104. France then mentions that Equatorial Guinea has nevertheless protested on site when French police sought to enter the premises during the time between those dates, that is, on 28 September and 3 October105. Whereas France sees inconsistency here, these actions were simply common sense and reasonable.
11. The fact of the matter is that Equatorial Guinea acquired ownership of the building on 15 September 2011 intending to use it as its Embassy. It did so before any measures had been taken or threatened against the building, including the initial searches that were later carried out by the French police on 28 September and 3 October. Equatorial Guinea did not expect the French police to seek to enter the premises on those days. When they did, Equatorial Guinea’s Ambassador was there to tell them the purpose of the building. Following the intrusions into the building, Equatorial Guinea quickly notified France, on 4 October, that the building was indeed its Embassy. Consistent with its position that notification suffices for such purposes where no local procedure mandates otherwise, as Professor Kamto has just explained, Equatorial Guinea maintains that France acted in violation of the Vienna Convention not on 28 September or 3 October, but only after it had notified the diplomatic status of the building. Where is the inconsistency that Frances accuses us of?
12. If anyone has been inconsistent, it is France. As we explained in the Reply, and as Professor Kamto has just recalled, France’s arbitrary and discriminatory refusal to recognize the diplomatic status of Equatorial Guinea’s Embassy ran counter to past bilateral practice and to the (inconsistent) procedures outlined by France itself106. Moreover, while the French criminal courts  misled by the Quai d’Orsay  wrongly treated the Embassy building as private property, the French tax authorities had no hesitation in recording the transfer to Equatorial Guinea of the shareholder rights in the companies that owned the building  and have also collected the taxes
104 CMF, para. 4.23.
105 Ibid.
106 REG, para. 2.67.
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due for that transfer without any demur107. As Maître Evuy recalled, a French civil court ruled in October 2013 that the building was indeed diplomatic premises and, consistent with Equatorial Guinea’s position before this Court, saw no need for any affirmation of the matter from the Quai d’Orsay108. France has allowed its officials to go to the Embassy building to obtain visas to enter Equatorial Guinea, while at the same time denying its status as diplomatic premises109. It has addressed diplomatic Notes to Equatorial Guinea’s Embassy, including, as we have shown, in the last few months, by explicitly using its avenue Foch address  a fact we did not expect France to deny in its Rejoinder110.
13. France refers to some of its own inconsistent behaviour as “pragmatic measures” or as merely “practical arrangements”111, but it refuses to measure Equatorial Guinea’s conduct by that same standard. In any event, the contradictions in France’s approach are far more significant than such matters as Equatorial Guinea’s occasional use of old Embassy notepaper, about which France has sought to make so much112.
14. Mr. President, France relies heavily on so-called “facts” adopted by the Tribunal correctionnel in the course of the criminal proceedings launched against the Vice-President despite his immunity. But the findings of the investigating judges and of the French courts cannot be taken by this Court as reflecting the truth. As we have shown in our written pleadings, the French judicial authorities, for whatever reason, adopted a thoroughly one-sided approach from the outset, using such terms as “habillage juridique” with regard to the sale of the building and making unfounded accusations about Equatorial Guinea’s Government more generally113.
15. In addition, much of what France now points to, in accusing Equatorial Guinea of abuse of rights, post-dates the French authorities’ unlawful refusal to recognize the inviolability of the
107 REG, para. 3.20.
108 REG, para. 1.41.
109 REG, para. 3.26.
110 RF, para. 3.32; see the four documents annexed to Equatorial Guinea’s Note to the Registry dated 24 Jan. 2020 (and the Registrar’s letter of 6 Feb. 2020).
111 RF, paras. 3.28, 3.34.
112 See, for example, RF, paras. 1.11, 1.15.
113 See REG, paras. 1.5, 1.7, 1.20.
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Embassy and indeed, post-dates the institution of the current proceedings before this Court. This shows just how arbitrary France’s actions were in deciding not to respect the Embassy’s status.
16. Moreover, in relying on the findings adopted in the course of the criminal proceedings and, in particular, in relying on the reports of those who entered Equatorial Guinea’s Embassy in blatant disregard of its inviolability, France is seeking to benefit from its own unlawful conduct. This, we submit, should not be sanctioned. One may recall the “fruit of the poisonous tree” doctrine, known in most municipal law systems, which serves to prevent illegally acquired information from negatively impacting a defendant.
17. Before concluding on abuse of rights, I need to make four brief points in the light of France’s arguments in its Rejoinder.
18. First, France has demonstrated in this case the inherent potential for abuse of the doctrine of “abuse of rights” itself. France’s conduct brings to mind Sir Hersch Lauterpacht’s words of caution:
“There is no legal right, however well established, which could not, in some circumstances, be refused recognition on the ground that it has been abused. The doctrine of abuse of rights is therefore an instrument which, apart from other reasons calling for caution in the administration of international justice, must be wielded with studied restraint.”114
19. As we indicated in our written pleadings115, such restraint is especially called for in the context of the law on diplomatic immunity, in which a claim of abuse of rights may jeopardize the very existence of the rights concerned. That is why diplomatic law contains specific remedies where the receiving State considers that there may have been an abuse. Receiving States may, for example, declare diplomats persona non grata, or break off diplomatic relations; but they may not  as this Court has previously had occasion to state in the strongest terms116, and as the International Law Commission made clear in its articles on State responsibility117  take
114 H. Lauterpacht, The Development of International Law by the International Court (Grotius Publications, 1982), p. 164.
115 Equatorial Guinea, Written Statement, para. 1.78; REG, para. 3.9. 116 Case concerning United States Diplomatic and Consular Staff in Tehran (United States of America v. Iran).
117 Article 50.2: “A State taking countermeasures is not relieved from fulfilling its obligations: . . . (b) to respect the inviolability of diplomatic or consular agents, premises, archives and documents.” Yearbook of the International Law Commission 2001, Vol. II, Part Two, p. 131.
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countermeasures such as ignoring the inviolability of mission premises. The importance of this principle remains at least as great in 2020 as it was in 1979.
20. Second, the abuse of rights doctrine by its very terms seeks to limit the exercise of rights that exist. For France to argue that Equatorial Guinea has committed an abuse of rights by designating the building at 42 avenue Foch as its Embassy, is  well  it is to concede that Equatorial Guinea did indeed have the right to designate the building as its Embassy.
21. Third, since France itself claims that it has prevented Equatorial Guinea from exercising its right, again it cannot claim that there was an abuse of rights, as the right in question was  according to its account  never in fact exercised. Nor can France point to any injury caused to it, the existence of which is another fundamental element in any actual abuse of rights, as France too has accepted118.
22. Finally, in claiming an abuse of rights, France continues to refer not only to Equatorial Guinea’s invocation of the rights provided under the Vienna Convention, but also to its recourse to the Court in its attempt to safeguard these rights119. In so doing, France effectively seeks to portray the present proceedings as an abuse of process, and thus to resuscitate a claim already rejected by the Court120. Moreover, challenging good faith efforts aimed at the peaceful settlement of disputes is certainly not something that should be encouraged.
II. The international responsibility of France
23. Mr. President, Members of the Court, before concluding I will now turn briefly to the international responsibility of France. France spilt much ink, in both its Counter-Memorial and Rejoinder, trying to limit any findings of the Court regarding its responsibility, in apparent recognition that its actions may indeed have been wrongful.
24. France concedes in its written submissions that the searches carried out at the Embassy premises, and the non-recognition of the diplomatic status of the Embassy, may well have given
118 RF, paras. 3.45-3.47.
119 CMF, paras. 4.46-4.53.
120 Immunities and Criminal Proceedings (Equatorial Guinea v. France), Provisional Measures, Order of 7 December 2016, I.C.J. Reports 2016 (II), p. 1148; Immunities and Criminal Proceedings (Equatorial Guinea v. France), Preliminary Objections, Judgment, I.C.J. Reports 2018 (I), p. 292.
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rise to harm121. They did indeed, and that harm continues. It is clear that the repeated intrusions into the Embassy building, and the persistent refusal of France to recognize its diplomatic status, have had a lasting and damaging impact on its ability to serve its purpose. This was precisely the reason for the provisional measure sought by Equatorial Guinea with respect to the building, which the Court indicated in December 2016.
25. In seeking to evade responsibility for the attachment of the building by its courts, something which is clearly prohibited by Article 22, paragraph 3, of the Vienna Convention, France argues that the question of ownership of the building is not relevant to matters within the Court’s jurisdiction122. As Maître Tchikaya has recalled, however, it is France itself that has repeatedly referred to this question of ownership, when arguing that there has been an abuse of rights123.
26. Alongside cessation, full reparation is required for the injury caused by France’s internationally wrongful acts. Satisfaction is clearly called for in the present circumstances, including assurances or guarantees of non-repetition, particularly because France has constantly sought refuge in the claim that the Government has no way to communicate with the French courts (and this despite its own initial statement to the judges on 11 October 2011, which lies at the root of this whole sorry story). It is, I would suggest, quite ironic that France seeks refuge in the view that it cannot talk to its courts  it cannot express views to its own courts  when it is precisely the expression of views to its own courts and misleading them that led to the situation we are now in. Compensation for the damage that has been caused, both material and moral, is due as well, and we have already indicated our willingness to specify at a later stage the amount sought.
27. Finally, Mr. President, we must strongly reject France’s suggestion that Equatorial Guinea contributed to the harm caused by France124. That claim is founded on the same speculative and self-serving interpretation of the relevant events to which I referred earlier, and which we are confident the Court will not accept.
121 CMF, para. 5.4; RF, para. 4.4.
122 RF, para. 4.5.
123 See, for example, RF, para. 3.21.
124 RF, paras. 4.24-4.31.
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28. Mr. President, Members of the Court, with that we conclude Equatorial Guinea’s first round of oral argument. We thank you for your kind attention.
Le PRESIDENT : Je remercie Sir Michael Wood, dont l’exposé conclut le premier tour de plaidoiries de la Guinée équatoriale. La procédure orale en l’affaire reprendra demain, mardi 18 février, à 10 heures, aux fins du premier tour de plaidoiries de la France. L’audience est levée.
L’audience est levée à 12 h 50.
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Public sitting held on Monday 17 February 2020, at 10 a.m., at the Peace Palace, President Yusuf presiding, in the case concerning Immunities and Criminal Proceedings (Equatorial Guinea v. France)

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